Direction de la séance |
Proposition de loi Accès au foncier agricole (1ère lecture) (PROCÉDURE ACCÉLÉRÉE) (n° 72 , 71 ) |
N° 133 rect. bis 3 novembre 2021 |
AMENDEMENTprésenté par |
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MM. LOUAULT et HENNO, Mme BILLON, MM. LE NAY, JANSSENS, CANÉVET, CAPO-CANELLAS et Jean-Michel ARNAUD, Mme VÉRIEN et MM. MOGA, LAFON et DUFFOURG ARTICLE 1ER |
Alinéa 61
Supprimer cet alinéa.
Objet
Cet alinéa introduit en commission par notre rapporteur (V. amendement n° COM-99) vise à limiter le "risque de conflit d’intérêts" à l’égard des SAFER dans la mise en œuvre du dispositif proposé par le texte dès lors que celles-ci pourront intervenir à la fois en tant qu’instructeur des dossiers de demandes d’autorisation et en tant qu’opérateur sur le marché du foncier agricole. Aussi, cet alinéa prévoit d’interdire, purement et simplement, aux SAFER d’acquérir ou de procéder à l'attribution, par cession ou par substitution, des biens immobiliers agricoles ou des titres sociaux concernant les sociétés dont elles auront pu instruire les demandes d’autorisation, et ce pendant une durée de neuf ans.
Cette mesure est regrettable et parfaitement contraire à l’esprit comme à la lettre du texte qui nous est aujourd’hui soumis pour discussion. En effet, il est très clairement écrit que la SAFER instruit les dossiers de demandes d’autorisation « au nom et pour le compte » de l’autorité administrative (alinéa 34) et que cette autorité reste seule décisionnaire et compétente in fine pour statuer sur les demandes d’autorisation (alinéas 50 et s.), l’avis rendu par la SAFER ne la liant pas (il s’agit d’un avis simple et non pas d’un avis conforme).
Le texte issu de la lecture à l’Assemblée nationale écarte tout risque de conflit d’intérêt puisque c’est l’autorité administrative qui décide, en toutes circonstances, de la nécessité de la mise en place des mesures compensatoires par le demandeur et qui exige de ce dernier de les exécuter (alinéa 52), la SAFER n’assurant, dans ce dernier cas, qu’un rôle d’intermédiation foncière (pour choisir les agriculteurs bénéficiaires) dans la mise en œuvre des engagements librement consentis par les parties et repris dans la décision d’autorisation prise par l’autorité administrative.
Rappelons, à ce titre, que le Conseil d’Etat a estimé, dans son avis du 6 mai dernier, que « le pouvoir d’appréciation de l’autorité préfectorale est suffisamment encadré » et, partant, que le texte ne méconnait aucune exigences constitutionnelles.
Par ailleurs, la mesure de "gel" des moyens d’intervention de la SAFER risque de fragiliser fortement cet organe ou cet outil de régulation du foncier agricole à qui l'Etat a confié une mission d'intérêt public en vue de contribuer à concilier les objectifs de politique publique (agriculture, environnement et développement rural) et de contribuer au renouvellement des générations en agriculture. Ce faisant, elle risque d’instituer une situation très préjudiciable à l’agriculture et à nos territoires ; une situation qui n’est sérieusement justifiée par aucune considération d’intérêt général, par aucune nécessité publique évidente ou aucune circonstance particulière, en fait ou en droit.
En outre, elle constituerait également, à n’en pas douter, une source ou un levier évident de contournement ; en effet, il est assez facile d’imaginer qu’un déclarant dépose un jour une demande d’autorisation pour la réalisation d’une opération quasiment insignifiante (cessions de quelques parts sociales) pour lui permettre ensuite, grâce au bénéfice de l’autorisation qui lui aura été délivrée pour cette opération, de réaliser librement, sans aucune contrainte ni contrôle, et pendant les neuf années suivantes, des opérations sociétaires, de plus grande ampleur, conduisant à des concentrations d’exploitations agricoles.
Pour l’ensemble de ces raisons, il est proposé de supprimer cette mesure (prévue à l’aliéna 61) qui apparaît manifestement excessive et disproportionnée au regard de la place occupée par l’Etat et de celle confiée aux SAFER dans ce texte et, plus généralement, au regard des dispositions législatives et réglementaires qui encadrent, sous le contrôle de l’Etat, l’exercice de leurs missions de service public.