Direction de la séance |
Projet de loi Financement de la sécurité sociale pour 2025 (1ère lecture) (n° 129 , 138 , 130) |
N° 843 15 novembre 2024 |
AMENDEMENTprésenté par |
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Mmes PONCET MONGE et SOUYRIS, MM. BENARROCHE, Grégory BLANC et DANTEC, Mme de MARCO, MM. DOSSUS, FERNIQUE et GONTARD, Mme GUHL, MM. JADOT et MELLOULI, Mme OLLIVIER, M. SALMON et Mmes SENÉE et Mélanie VOGEL ARTICLE 7 BIS |
Supprimer cet article.
Objet
Ajouté à l’Assemblée nationale par amendement, le présent article propose de soumettre les étrangers vivant à l’étranger à une convocation annuelle par les consulats français pour la vérification et la délivrance du certificat de vie.
Issu d’une proposition de l’ancien Premier Ministre, Gabriel Attal, le présent dispositif favorise une politique du soupçon envers les étrangers dont la contribution sur le sol français est oubliée au profit d’une focalisation à la figure du fraudeur.
Cette annonce ferait suite à une expérimentation menée en Algérie, au cours de laquelle 300 dossiers de retraités de plus de 98 ans sur 1 000 étudiés ont été déclarés non conformes. Cela a suffi pour prétendre à la possibilité d’une fraude massive et couteuse des pensions de retraites à l’étranger, G. Attal citant le chiffre de 200 millions d’euros à récupérer.
Pourtant, en avril 2024, la CNAV a fini par lancer une enquête sur plus de 3000 dossiers à l’étranger. Sur ces 3.000 dossiers, 200 ont été identifiés comme suspects, et ont entraîné le déclenchement d'une enquête et au final, seulement 16 cas de fraude ont été mis à jour.
Cela représente 70 millions de manque à gagner, c’est 3 fois moins que le chiffre de 200 millions avancé et surtout c’est une goutte d’eau comparé aux 340 milliards de pensions de retraite versés chaque année aux Français.
De fait, s’il est toujours nécessaire de lutter contre la fraude, ce focus sur les étrangers n’a pas de justification rationnelle.
Selon la CNAV, les retraités résidant à l’étranger reçoivent en moyenne une pension mensuelle du régime général de 300 euros. Au total, les prestations retraite versées s’élèvent à 3,9 milliards d’euros par an, ce qui représente 2,7 % du montant total des allocations versées en 2022. Une moyenne des pensions perçues bien plus faible que celle touchée par les retraités restés en France, qui se trouve aux alentours de 840 euros. De plus, les effectifs concernés sont relativement peu nombreux, mais surtout en diminution. Selon la CNAV 1 million de retraités vivaient à l’étranger en 2022. Cela représente environ 7,2 % seulement des 15 millions de bénéficiaires du système de retraite. Avec 15 000 retraités hors de l’Hexagone de moins qu’en 2021, ces chiffres sont en diminution. L’écrasante majorité d’entre eux vivent en Europe (47 %) ou en Afrique (42 %). Ils sont notamment plus de 300 000 à résider en Algérie, près de 164 000 au Portugal, 157 000 en Espagne et 61 000 au Maroc.
Ces étrangers ont déjà un accès limité à l’ASPA qui est conditionnée depuis peu à 9 mois de résidence en France, ce qui en limite l’accès, disposition qui avait déjà été prise par Gabriel Attal en tant que Ministre chargé des comptes publics.
Outre la faiblesse des gains espérés, la disposition proposée aura surtout un contrecoup financier qui risque d’en annuler tous les bénéfices puisqu’elle suppose de multiplier les moyens humains dans les consulats. De l’aveu même de Pascal Brindeau, ancien député UDI et rapporteur de la commission d'enquête sur la fraude sociale, le risque d’embouteillage est élevé : "Ça implique simplement qu'il faut renforcer les moyens humains des consulats dans ces pays-là. Parce que sinon, vous allez avoir un embouteillage de rendez-vous sur la question du contrôle des retraites, en plus des rendez-vous liés au titre de séjour ou autres visas".
Par ailleurs, une expérimentation de la CNAV est déjà en cours dans certains pays, comme l’Algérie et le Maroc puisque l’organisme a noué un partenariat avec une banque algérienne et la caisse de retraite marocaine. Après six mois sans réponse aux autorités françaises, l’assuré qui « réapparaît » devra effectuer use présenter à un contrôle d’identité au guichet de ces organismes. Les cas suspects devront ensuite se rendre au consulat. Ainsi, le dispositif proposé doublonne une initiative déjà en cours en alourdissant inutilement le travail consulaire.
Pour toutes ces raisons, le présent amendement se propose de supprimer l’article 7bis.