Direction de la séance |
Projet de loi Projet de loi de finances pour 2025 (1ère lecture) SECONDE PARTIE MISSION OUTRE-MER (n° 143 , 144 , 145, 150) |
N° II-1177 29 novembre 2024 |
En attente de recevabilité financière |
AMENDEMENTprésenté par |
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M. XOWIE, Mmes CUKIERMAN et APOURCEAU-POLY, MM. BACCHI, BARROS, BASQUIN et BROSSAT, Mmes BRULIN et CORBIÈRE NAMINZO, MM. CORBISEZ et GAY, Mme GRÉAUME, M. LAHELLEC, Mme MARGATÉ, MM. OUZOULIAS et SAVOLDELLI et Mmes SILVANI et VARAILLAS ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS L'ARTICLE 60 |
Après l’article 60
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Une convention cadre pluriannuelle sera conclue entre l’État et la Nouvelle-Calédonie, au plus tard au 30 mars 2025.
La Nation se fixe comme objectif d’accompagner la collectivité dans l’engagement de sa reconstruction. Elle veillera à assurer les mesures nécessaires permettant de garantir :
- La compensation des pertes de recettes fiscales et sociales auprès des collectivités et des régimes sociaux de Nouvelle-Calédonie dans le cadre d’une trajectoire de retour à l’équilibre des finances publiques.
- Le maintien des régimes de chômage, tant que la Nouvelle-Calédonie n’aura pas retrouvé une activité économique créatrice d’emplois.
- La préparation d’un plan d’investissements publics destiné d’une part, à reconstruire les infrastructures détruites et, d’autre part, à engager un programme de grands travaux et de diversification permettant de favoriser la relance de l’activité économique.
- L’accompagnement des acteurs économiques, au travers notamment de la prolongation du dispositif de soutien aux entreprises particulièrement touchées par la crise en Nouvelle- Calédonie.
II. – Un comité stratégique de suivi de la convention cadre pluriannuelle, réunissant les représentants de l’État et de la Nouvelle-Calédonie, sera chargé de veiller à la cohérence de la trajectoire de retour à l’équilibre des finances de la collectivité. Ce comité se réunira régulièrement afin d’échanger sur la progression des réformes prévues, d’établir un bilan annuel permettant d’évaluer les mesures restant à mettre en œuvre ou à créer pour parvenir aux objectifs fixés .
Objet
La Nouvelle-Calédonie sort exsangue des événements qui ont débuté le 13 mai dernier.
Plus de 2.2 milliards euros de dégâts, dont 400 millions d’infrastructures publiques, 742 entreprises dégradées, pillées ou incendiées, dont 1/3 seulement sont assurées au titre de la garantie émeutes », des milliers de sociétés indirectement impactées par la crise avec une baisse entre 20 et 70% de leur chiffre d’affaires, 1000 entreprises individuelles radiées, 29 000 Calédoniens au chômage (22 000 au chômage partiel et 7 000 au chômage total) soit 32% des 68 000 salariés du secteur privé.
La contraction du PIB calédonien est estimée entre 20 et 30%.
A fin octobre, les compagnies d’assurance n’avaient versé aux entreprises calédoniennes sinistrées que 10% des indemnisations attendues. La perte de recettes fiscales, douanières et sociales est estimée pour l’année 2024 à 600 millions d’euros, c’est-à-dire un tiers des recettes fiscales du pays, et près de 20% des cotisations sociales, en sachant qu’un tiers d’entre elles sont aujourd’hui acquittées au titre des régimes de chômage.
Les financements déjà obtenus de l’Etat sous forme de subvention à hauteur de 75 millions d’euros et d’avances remboursables d’un montant de 234 millions d’euros, financements libérés au coup par coup et totalement engagés à ce jour, ne répondent que très partiellement aux besoins du pays et n’offrent qu’un horizon de quelques semaines.
Au terme du versement des allocations de chômage partiel au 31 décembre 2024, ou total (d’une durée de 9 mois maximum à 75% du SMG quel qu’ait été le salaire antérieur) plusieurs dizaines de milliers de Calédoniens, dépourvus de tous revenus, vont se retrouver en quête d’emploi sur un marché du travail inexistant, ce qui ne peut que déboucher sur des émeutes de la faim constitutives d’une véritable insurrection sociale. D’autant plus qu’en Nouvelle-Calédonie, il n’existe pas d’amortisseur social ultime à l’instar du RSA en métropole. D’ores et déjà 52% des locataires du parc de logements sociaux (16 000 logements) sont en situation d’impayés.
Dans ce contexte, faute de confiance dans les perspectives politiques d’avenir, d’une part et, d’autre part, faute de dispositifs fiscaux nationaux incitant à la reconstruction, l’investissement privé des chefs d’entreprise ne pourra pas constituer le levier de croissance dont la Nouvelle-Calédonie a impérativement besoin, la consommation des ménages étant en voie d’effondrement.
La France a toujours été aux côtés de ses collectivités ultramarines lorsqu’elles étaient frappées par des catastrophes d’une ampleur telle qu’elles n’étaient pas en capacité d’y faire face. Tel a été le cas notamment après le passage du cyclone Irma à Saint Martin et Saint Barthelemy au travers d’un soutien financier massif, représentant plus de 50% du PIB de ces îles, cette contribution de l’Etat constituant une « manifestation de la solidarité nationale, malgré l’autonomie fiscale de ces deux îles » selon les termes du gouvernement.
La Nouvelle-Calédonie n’étant pas en capacité de faire face à un effondrement systémique, la solidarité de la Nation est un devoir pour l’Etat et une impérieuse nécessité pour assurer la survie économique et sociale du pays.
C’est dans ce cadre que le Congrès de la Nouvelle-Calédonie a adopté à la quasi-unanimité la résolution n° 435 du 28 août 2024 demandant à l’Etat d’adopter « un plan de reconstruction et d’accompagnement de la Nouvelle-Calédonie (…) pour éviter la mort économique et sociale du pays ».
Le présent amendement s’inscrit dans cette perspective au travers des principes suivants :
- Encadrer le partenariat Etat- Nouvelle-Calédonie pour l’accompagnement et la reconstruction du pays au travers d’une convention pluriannuelle.
- Prévoir les dispositifs assurant la compensation des pertes de recettes fiscales, douanières et sociales des collectivités de Nouvelle-Calédonie et des régimes sociaux jusqu’au 31 décembre 2025, sur la base des recettes constatées sur l’année 2023, cette compensation ayant vocation à être reconduite sur les années suivantes à due proportion des pertes de recettes effectivement enregistrées dans le cadre d’une trajectoire de retour à l’équilibre des finances publiques.
- Garantir le maintien des différents régimes d’assurance chômage partiel et total, spécifique comme de droit commun, afin de permettre aux familles concernées de bénéficier d’un revenu minimum de subsistance, le temps pour la Nouvelle-Calédonie de retrouver une activité économique créatrice d’emplois.
- Installer un comité stratégique de suivi de la convention cadre pluriannuelle, réunissant les représentants de l’Etat et de la Nouvelle-Calédonie, chargé de veiller à la cohérence de la trajectoire de retour à l’équilibre des finances du pays qui s’inscrit dans la perspective tracée par le plan « de sauvegarde, de reconstruction et de refondation de la Nouvelle-Calédonie » travaillé par le gouvernement de la Nouvelle-Calédonie en lien avec l’Etat. Ce comité se réunira régulièrement afin d’échanger sur la progression des réformes prévues, d’établir un bilan annuel permettant d’évaluer les mesures restant à mettre en œuvre ou à créer pour parvenir aux objectifs fixés.
Cet amendement a été préparé par l’ensemble des groupes politiques non indépendantistes et indépendantistes du congrès, le président du gouvernement, les présidents de province et les présidents d’associations de maires qui en ont validé le contenu en comité inter institutionnel le 4 novembre dernier, et pour lequel un courrier du même jour demande le soutien de l’ensemble des groupes de l’Assemblée nationale et du Sénat.
Tel est le sens de l’amendement.