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Direction de la séance

Projet de loi

Projet de loi de finances pour 2026

(1ère lecture)

PREMIÈRE PARTIE

(n° 138 )

N° I-464

24 novembre 2025


En attente de recevabilité financière

 

AMENDEMENT

présenté par

C
G  

M. Vincent LOUAULT


ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS ARTICLE 10


Après l’article 10

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.- Le code général des impôts est ainsi modifié :

1° L’article 151 septies est ainsi modifié :

a) Après le c du 1° du II, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« c bis) 300 000 € s’il s’agit de plus-values réalisées par des entreprises exerçant une activité agricole à l’occasion de la cession de matériels agricoles » ;

b) À la première phrase du premier alinéa du 2° du II, après les mots : « dudit 1° » , sont insérés les mots : « , lorsque les recettes sont supérieures à 330 000 € et inférieures à 350 000 € pour les plus-values mentionnées au c bis) du même 1° » ;

2° La section II du chapitre IV du titre premier de la première partie du livre premier du code général des impôts est complétée par une sous-section ainsi rédigée :

« .... – Crédit d’impôt au titre des charges de mécanisation collective

« Art. 244 quater... – I. – Les exploitations agricoles redevables de l’impôt sur les sociétés ou de l’impôt sur le revenu peuvent bénéficier d’un crédit d’impôt annuel assis sur les dépenses qui leurs sont facturées par la coopérative agricole dont ils sont coopérateurs au titre des charges de mécanisation collective.

« Le bénéfice du crédit d’impôt est subordonné à l’adhésion à une coopérative agricole mutualisant des matériels agricoles au profit de coopérateurs de2026 à 2030. Pour être pris en compte, le crédit d’impôt ne doit pas être inférieur à 500 € et l’exploitant agricole doit s’engager à continuer à poursuivre son activité pendant au moins trois années.

« II. – Le crédit d’impôt annuel est égal à 7,5 % des dépenses de mécanisation collective facturées par la coopérative au titre de l’année.

« III. – Le crédit d’impôt est plafonné à 3 000 € par exploitant et par année civile. Pour les exploitants agricoles qui exercent leur activité depuis moins de trois ans, le crédit d’impôt n’est pas plafonné.

« IV. – En cas de fusion ou d’opération assimilée intervenant au cours de la période mentionnée à la première phrase du second alinéa du I, la fraction de la créance qui n’a pas encore été imputée par la personne apporteuse est transférée à la personne bénéficiaire de l’apport.

« V. – Le I s’applique aux dépenses facturées à compter du 1er janvier 2026.

« VI. – Le bénéfice du crédit d’impôt est subordonné au respect de la réglementation européenne relative aux aides de minimis dans le secteur agricole. »

II. – Le I n’est applicable qu’aux sommes venant en déduction de l’impôt dû.

III. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

Objet

La mécanisation représente aujourd’hui un poste de dépense majeur pour les exploitations agricoles françaises. Selon les données d’Agreste, elle s’élève à près de 18 milliards d’euros par an, soit 25 à 30 % des charges d’exploitation, quand les pays voisins présentent des niveaux significativement inférieurs : 20 à27 % en Allemagne, 20 à 25 % aux Pays-Bas, 15 à 22 % en Italie, 15à 20 % en Pologne, 18 à 24 % en Belgique et seulement 12 à 14 % enEspagne.

Cette charge élevée s’explique notamment par un faible niveau de mutualisation des équipements agricoles : moins de 10 % des agriculteurs partagent aujourd’hui leur matériel au sein d’une structure collective. Or, la hausse continue du coût des agroéquipements accentue cette situation. Selon les données d’Axema, le prix de vente des machines agricoles a augmenté de 30 %entre 2021 et 2024, et une étude de la Fédération des CUMA des Pays de la Loire fait état d’une hausse de 31 % du coût de la mécanisation entre 2010 et 2019, passant de 327 €/ha à 428 €/ha.

La surmécanisation constitue ainsi un vecteur d’endettement et d’isolement pour les exploitants : elle mobilise un capital important, souvent sous-utilisé, et contribue à alourdir la structure de coûts des exploitations.

Depuis 1979, les exploitants agricoles bénéficient d’une exonération des plus-values réalisées à l’occasion de la cession de matériels agricoles.Ce dispositif fiscal actuel vise de facto à favoriser la consommation individuelle de machines agricoles. En revanche, il n’existe pas de dispositif fiscal d’incitation, telle une exonération fiscale ou une réduction d’impôt, lorsque les exploitants agricoles décident de se regrouper en coopérative pour acheter et mutualiser l’utilisation de ces matériels agricoles. La fiscalité aujourd’hui n’est donc ni orientée sur la compétitivité, ni sur la sobriété des exploitations agricoles en matière d’agroéquipements.

Dans ce contexte, le présent amendement vise à rééquilibrer la fiscalité de la mécanisation agricole en créant un crédit d’impôt au titre des charges de mécanisation collective, afin d’encourager la mutualisation des matériels au sein des coopératives d’utilisation de matériel agricole (CUMA).

Ce crédit d’impôt de 7,5 % s’appliquerait aux dépenses facturées par les CUMA à leurs coopérateurs au titre des charges de mécanisation collective, dans la limite de 3 000 € par an et par exploitation, et sous réserve d’un seuil minimal de 500 €. Pour éviter tout effet d’aubaine, le bénéfice du crédit d’impôt serait conditionné à la poursuite de l’activité agricole pendant au moins trois années.Le coût budgétaire de la mesure est estimé à 17millions d’euros par an, neutralisé à budget constant par un plafonnement abaissé de 350 000 euros à 300 000 euros de l’exonération fiscale sur les plus-values de cession de matériels agricoles, actuellement prévue à l’article 151 septies du code général des impôts. Ce rééquilibrage permettra de réorienter la dépense fiscale existante vers des pratiques plus vertueuses, à la fois pour la compétitivité des exploitations et pour les finances publiques. Ce plafonnement ne s’appliquera pas aux entreprises de travaux agricoles et forestiers qui contribuent également à l’utilisation partagée.