commission des lois |
Projet de loi Nouvelle organisation territoriale de la République (2ème lecture) (n° 336 ) |
N° COM-68 5 mai 2015 |
AMENDEMENTprésenté par |
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MM. PINTAT, PONIATOWSKI, MOUILLER, REVET, Bernard FOURNIER, Daniel LAURENT, CHAIZE, PIERRE et BONHOMME ARTICLE 14 |
Au seizième alinéa, supprimer le mot : « obligatoire ».
Objet
Le présent amendement a pour objet de rétablir, en matière de suppression des doubles emplois entre les syndicats et les EPCI à fiscalité propre, le texte initial du projet de loi que le Sénat n'avait pas modifié sur ce point. Il soustrait donc le caractère obligatoire de la suppression, ajouté par l'Assemblée nationale. Outre le fait que le mot « obligatoire »ne présente ici aucune valeur ajoutée sur le plan juridique, il est indispensable que la Commission départementale de la coopération intercommunale (CDCI) puisse jouer pleinement son rôle, en se prononçant notamment sur les évolutions proposées par le préfet pour la mise en oeuvre du schéma départemental de coopération intercommunale (SDCI), y compris celles qui visent à réduire le nombre de syndicats pour supprimer des situations qualifiées de doubles emplois.
Tout d'abord, comme la notion de double emploi n'est pas définie, elle risque de donner lieu à des interprétations différentes et d'aboutir dans certains cas à imposer la suppression ou la réduction du périmètre de certains syndicats, sans réelle justification du point de vue de la rationalisation, de l'efficacité et de l'intérêt général.
L'absence de définition de la notion de double emploi a pour conséquence que son champ d'applicationest a prioritrès flou, cequi nourrit en partie les inquiétudes des élus locaux, notamment ceux des grands syndicats techniques compétents pour l'organisation des services publics de réseaux. Le Gouvernement a tenu des propos rassurants au sujet de ces grands syndicats, en indiquant qu'ilsne seraient a priori pas menacés par la réforme territoriale,mais le caractère « obligatoire » de la suppression des doubles emplois va dans le sens inverse. Il semble inclure tous les syndicats, y compris les grands. D'ailleurs, dans sa rédaction initiale, l'objectif de réduction du nombre de syndicats réaffirmé à l'article 14 du projet de loi visait bien, entre autres, les syndicats de distribution d'électricité, sans tenir compte des efforts accomplis dans ce domaine en matière de regroupement. En effet, dans les deux-tiers des départements, toutes les communes desservies par ERDF sont aujourd'hui regroupées dans un syndicat unique, sachant que dans les autres départementsil existe également, en règle générale,un syndicat de grande taille. La marge de manœuvre en termes de réduction du nombre de syndicats est donc très réduite dans ce secteur d'activité, force est de le constater. Dans les secteurs de l'eau et de l'assainissement,la marge de manoeuvre est en revanchebeaucoup plus importante dans la plupart des départements compte tenude l'existenced'un grand nombre de syndicats de petite taille,mais égalementde services municipaux. A cet égard, le Gouvernement aprésentéà l'Assemblée nationale des amendements qui prévoient le transfert obligatoire de ces deux compétences aux communautés de communes et aux communautés d'agglomération. Cette dernière mesure semble paradoxale par rapport à l'affirmation selon laquelle les grands syndicats d'eau et d'assainissement ne seront pas affectés par la réforme territoriale, d'autant plus que l'article 20 bisdu projet de loi prévoit d'autoriser les communautés d'agglomération à exercer undroit de retrait automatique pour les communes également membres des syndicats, dans le cas où ces communautés d'agglomération souhaitent s'opposer à l'application du mécanisme de représentation-substitution afin dereprendre à leur compte l'exercice direct des compétences eau et/ou assainissement sur leur territoire, sans tenir compte de l'organisation déjà en place et des investissementsréalisés par les syndicats préexistants.
Ensuite, le droit en vigueur comporte déjà des dispositions sur la suppression obligatoire des doubles emplois
Au cours des débats, le Gouvernement a précisé que la situation de double emploi concerne prioritairement les syndicats inclus en totalité dans le périmètre d'un EPCI à fiscalité propre, au nombre de 5 500 environsur le territoire, qui n'ont pas vocation à être maintenus pour la plupart d'entre eux.Orle droit en vigueur comporte déjà des dispositions applicables aux situations dans lesquelles le périmètre d'un syndicat de communes ou d'un syndicat mixte est soit identique à celui d'un EPCI à fiscalité propre, soittotalement inclus dans celui-ci : le code général des collectivités territoriales (CGCT) prévoit alors que cet EPCI est substituéde plein droit au syndicat pour la totalité des compétences qu'il exerce ou vient à exercer. C'est donc sur cette base légale déjà existante que le préfet doit s'appuyerpour réduire le nombre de syndicats. Il est en revanche essentiel que la CDCI conserve la possibilité de se prononcer en formulant un choix entre les options qui peuvent, le cas échéant, être mise en œuvre localement. En particulier, il ne faudrait pas vider de son sens un amendement à l'article 14 que le Sénat a adopté en première lecture afin que la réduction du nombre de syndicats ne passe pas automatiquement par un transfert de leurs compétences aux EPCI à fiscalité propre, mais qu'elle puisse également prendre la forme de fusions avec d'autres syndicats ou d'extensions de leurs périmètres.
Enfin, rendre obligatoire la suppression des doubles emplois donne une sensation de manque de confiance dans la capacité des acteurs territoriaux, aussi bien le préfet que les élus locaux siégeant à la CDCI, àvéritablement s'entendre sur des évolutions concertées qui vont dans le sens des objectifs fixés en matière de rationalisation de la carte de la coopération intercommunale, sansjamais perdre de vue l'organisation et les spécificités des territoires auxquelles les élus sont très attachés.