Projet de loi Projet de loi de finances pour 2026
Direction de la Séance
N°II-1923
5 décembre 2025
(1ère lecture)
SECONDE PARTIE
MISSION JUSTICE
(n° 138 , 139 , 145)
AMENDEMENT
| C | |
|---|---|
| G | |
| En attente de recevabilité financière | |
présenté par
Mme de LA GONTRIE, MM. CHAILLOU et BOURGI, Mme HARRIBEY, MM. KANNER et KERROUCHE, Mmes LINKENHELD et NARASSIGUIN, MM. ROIRON, UZENAT
et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain
Article 49 (crédits de la mission)
(État B)
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I. – Créer le programme :
Renforcement des juridictions criminelles
II. – En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :
(en euros)
Programmes | Autorisations d’engagement | Crédits de paiement | ||
| + | - | + | - |
Justice judiciaire dont titre 2 |
| 18 000 000 |
| 18 000 000 |
Administration pénitentiaire dont titre 2 |
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Protection judiciaire de la jeunesse dont titre 2 |
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Accès au droit et à la justice |
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Conduite et pilotage de la politique de la justice dont titre 2 |
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Conseil supérieur de la magistrature dont titre 2 |
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Renforcement des juridictions criminelles | 18 000 000 |
| 18 000 000 |
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TOTAL | 18 000 000 | 18 000 000 | 18 000 000 | 18 000 000 |
SOLDE | 0 | 0 | ||
Objet
La justice criminelle traverse une crise d’engorgement sans précédent, régulièrement qualifiée d’« embolie » par les professionnels. Le rapport de la mission d’urgence sur l’audiencement criminel et correctionnel remis en mars 2025 a confirmé la gravité de la situation : délais théoriques d’écoulement en hausse, difficultés à tenir les sessions d’assises, sous-dimensionnement des effectifs de greffe et insuffisance des capacités d’audiencement.
La situation de la justice criminelle est désormais hors de contrôle, et les chiffres attestent de l’ampleur de la crise : le stock d’affaires criminelles a doublé en cinq ans, passant de 2 368 en 2019 à 4 593 dossiers en 2024, dont plus de 4 000 dossiers hautement sensibles susceptibles de conduire à la remise en liberté d’accusés dangereux faute de jugement dans les délais légaux. La durée moyenne pour juger un viol atteint un niveau insoutenable : 75 mois, soit plus de 6 ans d’attente, un délai qui « confine au déni de justice » selon les chefs de cour. Le délai d’écoulement théorique du stock s’est envolé de 12,4 mois en 2019 à 17,4 mois en 2024 (+40 %) et pourrait franchir, dans certains ressorts, un point de rupture dès 2025-2026, les cours d’appel ne parvenant déjà plus à juger certains accusés détenus avant l’expiration des délais de détention provisoire. La cour d’appel de Paris enregistre à elle seule une hausse de 165 % des dossiers criminels depuis 2020, avec des records mensuels (106 affaires nouvelles en juillet 2025). Les cours criminelles départementales, loin de désengorger le système, sont saturées : 90 % de leur activité concerne les viols, tandis que la durée des procès augmente sans cesse (3,43 jours en moyenne), les dossiers de viol représentent 60,5 % des informations criminelles ouvertes. La mission d’urgence estime par ailleurs que la résorption minimale du stock nécessiterait au moins 180 magistrats, 100 parquetiers, 70 assesseurs et 130 greffiers supplémentaires, alors même que les créations d’emplois récentes n’ont jamais intégré la hausse massive et structurelle du contentieux criminel observée depuis 2022. La justice criminelle n’est plus seulement engorgée : elle est au bord de la rupture systémique.
Ainsi, bien que le PLF 2026 prévoie la création de nouveaux ETP, ces postes ne sont pas suffisamment orientés vers les pôles criminels, les cours criminelles départementales, les cours d’assises ou la Cour de cassation, pourtant identifiés comme zones critiques. Ce manque de fléchage compromet donc la résorption des stocks, accroît les délais de jugement et fragilise la qualité des décisions rendues.
Afin de respecter les règles de recevabilité financière des amendements de crédits, cet amendement annule 18 000 000 d’euros d’autorisations d’engagement et de crédits de paiement sur l’action 06 « Soutien » du programme 166 « Justice judiciaire ».
Il ouvre en contrepartie 18 000 000 d’euros d’autorisations d’engagement et de crédits de paiement sur les actions nouvelles 01 (Renfort du traitement et jugement du contentieux civil et pénal), 02 (renfort de la Conduite de la politique pénale et jugement des affaires pénales), 03 (Renfort pour la cour de cassation) et 04 (Renfort pour la formation), du programme nouveau « renforcement des juridictions criminelles ».
Les auteurs de l’amendement tiennent à souligner qu’ils n’ont en réalité aucune intention de réduire le montant des AE et CP du programme 166 et qu’ils invitent le gouvernement à lever le gage afin de permettre l’engagement de cette action dont notre pays a aujourd’hui particulièrement besoin. Toutefois, les règles de recevabilité financière les obligent à une telle présentation du présent amendement.
Le présent amendement propose ainsi un redéploiement interne de 18 000 000 M€, neutre budgétairement, permettant de renforcer les actions 01 (Renfort du traitement et jugement du contentieux civil et pénal - 4 000 000 M€), 02 (renfort de la Conduite de la politique pénale et jugement des affaires pénales - 10 000 000 M€), 03 (Renfort pour la cour de cassation - 1 000 000 M€) et 04 (Renfort pour la formation - 3 000 000 M€) du nouveau programme « renforcement des juridictions criminelles ». Ce transfère permettra de financer :
- la mobilisation accélérée des ETP nouvellement créés vers les pôles criminels ;
- le renforcement des chambres criminelles des cours d’appel ;
- le soutien accru aux cours criminelles départementales ;
- l’amélioration du suivi des dossiers d’assises (greffe, assistance, expertise).
- La formation des nouveaux ETP
- Création d’ETP supplémentaires (180 magistrats, 100 parquetiers, 70 assesseurs et 130 greffiers supplémentaires)