Projet de loi Projet de loi de finances pour 2026

Direction de la Séance

N°II-1936

5 décembre 2025

(1ère lecture)

SECONDE PARTIE

MISSION ACTION EXTÉRIEURE DE L'ÉTAT

(n° 138 , 139 , 141, 144)


AMENDEMENT

C
G  
En attente de recevabilité financière

présenté par

Mmes OLLIVIER et Mélanie VOGEL, MM. GONTARD, MELLOULI, BENARROCHE, Grégory BLANC, DANTEC, DOSSUS et FERNIQUE, Mme GUHL, M. JADOT, Mmes de MARCO et PONCET MONGE, M. SALMON et Mmes SENÉE et SOUYRIS


Article 49 (crédits de la mission)

(État B)

Consulter le texte de l'article ^

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Action de la France en Europe et dans le monde

dont titre 2

 

66 000 000

66 000 000

Diplomatie culturelle et d’influence

66 000 000

 

66 000 000

 

Français à l’étranger et affaires consulaires

 

 

 

 

TOTAL

66 000 000

66 000 000

66 000 000

66 000 000

SOLDE

0

0

Objet

Le présent amendement vise à remédier au déficit structurel de l’Agence pour l'enseignement français à l'étranger (AEFE) en garantissant à l’opérateur public une compensation intégrale du coût des pensions civiles des personnels détachés dans les établissements historiques (en gestion directe et conventionnés).

En 2009, l'État a transféré à l'AEFE la charge de la part patronale des pensions civiles des personnels détachés dans les établissements en gestion directe et conventionnés, auparavant assumée par l'Éducation nationale. Une compensation de 120 M€ avait initialement été accordée mais n'a jamais été indexée depuis seize ans. Le coût réel des pensions est aujourd'hui de 186 M€ par an d’après l’AEFE, créant un écart structurel avec la compensation de l’État figée depuis 2009 et intégrée à la subvention pour charges de service public (SCSP) versée depuis le programme 185.         

À chaque conseil d’administration, l’Agence alerte le gouvernement sur le différentiel entre la subvention allouée par l’État et le montant des pensions civiles que doit supporter l’opérateur. Ce différentiel, estimé à 66 millions d’euros en 2025 par l’AEFE, n’a jamais été compensé. Son augmentation au fil des années a amplifié le déséquilibre. L'Agence rappelle que depuis 2009, le coût des pensions civiles initialement estimé à 120 millions d’euros a depuis considérablement augmenté avec la progression du taux de contribution. Le taux de cotisation patronale est passé de 62,14 % en 2009 à 78,28 % en 2025 (+ 16 points), avec une hausse brutale de 4 points en 2025, sans que l’État n’ajuste son soutien financier en conséquence.

Le ministère chargé du budget a plusieurs fois précisé que « la décision de ne pas compenser l'augmentation des pensions civiles constituait un choix délibéré de politique budgétaire », acceptant pleinement les conséquences de cette décision sur le déséquilibre financier du réseau d'enseignement français à l'étranger et sur les familles. 

Ce sous-financement chronique contraint l’opérateur à prélever sur sa trésorerie ce qui devrait être compensé par l’État, à opérer des suppressions de postes massives (500 depuis 2017, 100 en 2025, 50 prévues en 2026-2027), à reporter des travaux bâtimentaires urgents au détriment de la sécurité des élèves et des personnels, et à une hausse continue des frais de scolarité répercutée sur les parents.

L’insuffisance de la subvention pour charges de service public contribue également à la chute du nombre de boursiers français constatée ces dernières années (passé de 29713 en 2020 à 20575 en 2024).

Elle constitue aujourd'hui un risque avéré pour la trésorerie de l’opérateur public, qui atteint désormais un seuil de sécurité critique, avec moins de 48 jours de fonctionnement.

À l’occasion de plusieurs réunions d’urgence depuis le 20 octobre dernier, la Direction générale de la mondialisation du Ministère de l'Europe et des Affaires étrangères a qualifié la situation de « préoccupante », évoquant un « système à bout de souffle ».       

Pour mémoire, l'État prend toujours en charge l’intégralité des 90 M€ de pensions pour les personnels détachés dans les établissements partenaires, mais ne compense qu’une partie réduite du coût des cotisations patronales qui lui incombent pour les personnels détachés dans les établissements du réseau AEFE (EGD et conventionnés), piliers de la mission de service public.

La Cour des comptes avait pourtant recommandé dès 2016 une compensation intégrale et pérenne, soulignant que l'État, en tant qu'employeur, devait assumer pleinement le coût des pensions civiles de ses agents détachés. Un rapport sénatorial de 2018 (DELAHAYE, FÉRAUD) avait également identifié la problématique des pensions civiles comme « le cœur du problème au sein du réseau » et préconisé de sanctuariser la SCSP pour préserver l'équilibre financier sans sacrifier la qualité pédagogique. Ces recommandations n'ont jamais été suivies. 

Le texte du Projet de loi de finances 2026 présenté par le Gouvernement prévoit une SCSP de 391,6 M€ pour l'AEFE, soit une baisse de 53,9 M€ par rapport à l'exécution 2024. Cette nouvelle coupe aggrave une situation déjà critique.

Cet amendement majore de 66 M€ les crédits de l'action 5 du programme 185 afin de couvrir le coût réel des pensions civiles estimé en 2025. Le gage est prélevé sur l'action 02 du programme 105. Nous appelons toutefois le Gouvernement à lever ce gage : il s'agit de réparer une dette historique de l'État envers l'AEFE, non de réduire d'autres politiques publiques.