- L'ESSENTIEL
- I. P109 : DES CRÉDITS EN BAISSE SOUS
L'EFFET COMBINÉ DU GEL ET DU RECENTRAGE DES APL AINSI QUE DE LA HAUSSE
DE LA RLS
- II. P135 : UNE FORTE CONTRACTION DES
CRÉDITS DU FAIT DU RECENTRAGE DES AIDES ET D'UNE
DÉBUDGÉTISATION
- III. P177 : UNE HAUSSE BIENVENUE DES
CRÉDITS QUI NE RÉSOUT PAS LA QUESTION DE LA
SOUS-BUDGÉTISATION STRUCTURELLE
- I. P109 : DES CRÉDITS EN BAISSE SOUS
L'EFFET COMBINÉ DU GEL ET DU RECENTRAGE DES APL AINSI QUE DE LA HAUSSE
DE LA RLS
- TRAVAUX EN COMMISSION
- LISTE DES PERSONNES ENTENDUES
- DÉPLACEMENT
- LA LOI EN CONSTRUCTION
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N° 140 SÉNAT SESSION ORDINAIRE DE 2025-2026 |
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Enregistré à la Présidence du Sénat le 24 novembre 2025 |
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AVIS PRÉSENTÉ au nom de la commission des affaires économiques (1) sur le projet de loi de finances, considéré comme rejeté par l'Assemblée nationale, pour 2026, |
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TOME VI COHÉSION DES TERRITOIRES (LOGEMENT) |
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Par Mme Amel GACQUERRE, Sénatrice |
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(1) Cette commission est composée de : Mme Dominique Estrosi Sassone, présidente ; MM. Alain Chatillon, Daniel Gremillet, Mme Viviane Artigalas, MM. Franck Montaugé, Franck Menonville, Bernard Buis, Fabien Gay, Vincent Louault, Mme Antoinette Guhl, M. Philippe Grosvalet, vice-présidents ; MM. Laurent Duplomb, Daniel Laurent, Mme Sylviane Noël, M. Rémi Cardon, Mme Anne-Catherine Loisier, secrétaires ; Mmes Martine Berthet, Marie-Pierre Bessin-Guérin, MM. Yves Bleunven, Michel Bonnus, Denis Bouad, Jean-Marc Boyer, Jean-Luc Brault, Frédéric Buval, Henri Cabanel, Alain Cadec, Guislain Cambier, Mme Anne Chain-Larché, MM. Patrick Chaize, Patrick Chauvet, Pierre Cuypers, Daniel Fargeot, Gilbert Favreau, Mmes Amel Gacquerre, Marie-Lise Housseau, Annick Jacquemet, Micheline Jacques, MM. Yannick Jadot, Gérard Lahellec, Mmes Marianne Margaté, Pauline Martin, MM. Serge Mérillou, Jean-Jacques Michau, Sebastien Pla, Christian Redon-Sarrazy, Mme Évelyne Renaud-Garabedian, MM. Olivier Rietmann, Daniel Salmon, Marc Séné, Lucien Stanzione, Jean-Claude Tissot. |
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Voir les numéros : Assemblée nationale (17ème législ.) : 1906, 1990, 1996, 2006, 2043, 2047, 2048, 2060, 2063 et T.A. 180 Sénat : 138 et 139 à 145 (2025-2026) |
L'ESSENTIEL
Réunie le mercredi 26 novembre, la commission des affaires économiques a donné un avis favorable aux crédits de la mission « Cohésion des territoires ».
Globalement, la rapporteure, Amel Gacquerre, déplore que l'inflexion amorcée par le budget 2025 en faveur du logement, sous l'impulsion de Valérie Létard et notamment matérialisée par la réduction de 200 millions de la réduction de loyer de solidarité (RLS), n'ait pas été poursuivie au sein de ce projet de loi de finances pour 2026.
Elle constate que les crédits dédiés au logement contribuent de manière significative à la réduction des dépenses publiques : les crédits des trois programmes dédiés au logement, qui représentent 21,2 milliards d'euros, sont en baisse de 4,18 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2025. L'effort est surtout marqué sur la rénovation énergétique du parc privé qui connaît, outre une réforme des aides, une débudgétisation, intéressante au regard du contexte budgétaire mais sur laquelle la rapporteure appelle à la vigilance.
Le programme 177, dédié à l'hébergement d'urgence et au logement adapté, connaît, quant à lui, une hausse bienvenue de crédits de 110 millions d'euros. Celle-ci reste néanmoins insuffisante pour combler la sous-budgétisation persistante de ce programme. Surtout, l'absence de financement du parc actuel rend impossible toute augmentation de places, alors même que le nombre de personnes à la rue traduit une situation dramatique. Pour cette raison, la rapporteure a proposé l'adoption d'un amendement prévoyant 85 millions d'euros pour renforcer la sincérité du programme.
I. P109 : DES CRÉDITS EN BAISSE SOUS L'EFFET COMBINÉ DU GEL ET DU RECENTRAGE DES APL AINSI QUE DE LA HAUSSE DE LA RLS
Le programme 109, qui porte les aides personnelles au logement (APL), représente 16,1 milliards d'euros de dépenses, un montant en réduction de 587 millions d'euros par rapport à 2025 du fait de trois mesures d'économies.
· Le recentrage des APL versées aux étudiants extracommunautaires sur les seuls boursiers sur critères sociaux, à compter du 1er juillet 2026, génèrerait 100 millions d'euros en 2026 et 200 millions d'euros en année pleine selon le Gouvernement. La mesure conduirait à exclure du versement des APL 100 000 étudiants non-boursiers sur les 115 000 étudiants extra-européens allocataires des APL, pour un montant mensuel de 165 € ;
· Le gel transversal du barème des APL pour les 5,7 millions de bénéficiaires, au même titre que l'ensemble des prestations relevant du champ de la sécurité sociale1(*), générerait une économie de 108 millions d'euros pour l'État en 2026. Alors que les ressources des étudiants font aujourd'hui l'objet d'une forfaitisation, cette mesure vient donc apporter un « ciblage » des APL à destination des étudiants extra-européens ;
· La hausse de la réduction de loyer de solidarité (RLS) de 200 millions par rapport à 2025, pour l'élever à 1,3 milliard après 1,1 milliard l'an dernier, matérialise le recul du Gouvernement en matière de soutien au logement social, par rapport à l'inflexion obtenue l'an dernier par Valérie Létard ;
· Le reste de l'évolution des crédits, soit environ 180 millions d'euros, résulte enfin, selon le ministère, de l'évolution prévisionnelle de la dépense en l'absence de mesure, en raison d'un ajustement des modèles.
La rapporteure déplore le recul en matière de soutien au logement social que constitue la hausse de la RLS en 2026. Elle s'ajoute à la hausse de 300 millions de la contribution des bailleurs sociaux au Fonds national des aides à la pierre (Fnap). Mais contrairement au Fnap, la RLS ne réinjecte aucun financement dans la construction. C'est une ponction improductive, qui est une perte sèche pour les bailleurs sociaux et pour la politique du logement en général.
Elle fait également part de ses préoccupations sur les effets du recentrage des APL sur les seuls étudiants extra-européens boursiers, le ministère du logement n'étant pas en mesure de fournir de statistiques sur leur situation économique et sociale.
II. P135 : UNE FORTE CONTRACTION DES CRÉDITS DU FAIT DU RECENTRAGE DES AIDES ET D'UNE DÉBUDGÉTISATION
En l'absence de crédits dédiés à la rénovation du parc social, le programme 135 porte principalement la dotation de l'État à l'Agence nationale de l'habitat (Anah) dont 85 % financent le soutien à la rénovation énergétique.
A. UNE RÉFLEXION À MENER SUR LES MODALITÉS D'UN SOUTIEN PUBLIC À LA RÉNOVATION ÉNERGÉTIQUE DU PARC SOCIAL
La promesse d'octobre 2023 d'une enveloppe d'1,2 milliard sur trois ans n'a pas été tenue. Si l'an dernier, Valérie Létard avait obtenu le report de 200 millions gelés, aucune ouverture de crédit n'est prévue cette année pour la rénovation énergétique du parc social.
Pourtant, l'étude « Perspectives du logement social » de la Banque des territoires montre bien que la situation financière des bailleurs sociaux, que la hausse de la RLS n'améliore pas, ne leur permettra pas de produire suffisamment de logements sociaux tout en répondant au défi de la rénovation du parc. Une réflexion sur les modalités d'un soutien à la rénovation du parc s'impose donc. Le dispositif « Seconde vie », expérimenté en 2023, mais opérationnel seulement depuis début 2025 faute de textes d'application, a permis l'agrément de 6 000 projets grâce à une exonération de taxe foncière pendant 25 ans, qui passerait néanmoins à 15 ans au-delà du 31 décembre 2026. Son avenir doit être clarifié.
Quant au Fnap, le rapport de Jean-Baptiste Blanc, au nom de la commission des finances du Sénat en juillet dernier2(*), a montré combien le désengagement de l'État a affaibli cet outil essentiel. Pour 2026, sa capacité d'intervention ne tient que grâce à la contribution accrue des bailleurs, ce qui n'est pas soutenable à long terme. Une réflexion sur les modalités de sa pérennité financière s'impose également.
Enfin, à fin 2025, les crédits engagés par l'État au titre de l'engagement de renouveau du bassin minier (ERBM) s'élèveront à 131,5 millions d'euros. Plus de 9,5 millions d'autorisations d'engagement et 20 millions de crédits de paiement sont prévus en 2026 pour liquider les restes-à-payer d'opérations antérieures et contribuer à la rénovation de 700 logements supplémentaires. Entre 2018 et 2024, plus de 9 500 logements ont été financés sur les 12 000 logements que l'ERBM de 2017 avait fixé pour cible.
B. LA RÉNOVATION ÉNERGÉTIQUE DU PARC PRIVÉ ENTRE REVIREMENTS, DÉBUDGÉTISATION ET MANQUE DE CAP CLAIR
1. Une restructuration du soutien public à la rénovation énergétique
La dotation de l'État à l'Agence nationale de l'habitat (Anah) serait réduite de 19,2 % en crédits de paiement et de 28 % en autorisations d'engagements, soit une baisse de respectivement 500 et 750 millions d'euros. Cette contraction importante répond à deux évolutions : un recentrage des aides et une débudgétisation.
· Le « recentrage » des aides de l'Anah, à la suite des réformes intervenues en septembre 2025 notamment sur le parcours accompagné de MaPrimeRénov'3(*), mais aussi sur le parcours « par gestes »4(*), permettra, selon le ministère du logement, d'économiser environ 500 millions d'euros en crédits de paiement et 700 millions d'euros en autorisations d'engagement.
· Le recours accru aux certificats d'économies d'énergie (CEE), par la mobilisation de 500 millions d'euros de CEE supplémentaires, permet de « débudgétiser » une partie du soutien à la rénovation énergétique du parc privé. La part des CEE dans le budget de l'Anah passerait ainsi de 10 % en 2024 à 34 %. Si cet outil « extrabudgétaire » est intéressant compte tenu de l'état des finances publiques, la rapporteure souligne qu'il n'est pas exempt de conséquences sociales, économiques et politiques. En effet :
ü Le recours aux CEE fait peser le coût du soutien à la rénovation énergétique non sur le contribuable, mais sur le consommateur : les CEE représentent environ 4 % de la facture d'énergie, soit environ 165 € par an en moyenne. Cela n'est pas neutre en matière sociale puisque le coût de l'énergie représente une part plus importante du budget des plus modestes ;
ü La débudgétisation réduit le contrôle parlementaire sur l'ampleur et les modalités du soutien public à la rénovation énergétique ;
ü Par ailleurs, les CEE restent un mécanisme de marché, certes étroitement surveillé par le ministère de l'économie, mais qui peut souffrir de variations en fonction de l'offres et de la demande - c'est arrivé en 2022, où un surstock a fait plonger les prix ;
ü Enfin, les CEE sont sujets aux fraudes : des acteurs auditionnés par la rapporteure ont exprimé leurs préoccupations quant à une recrudescence des fraudes du fait de la hausse du volume mobilisable. Si la loi du 30 juin dernier5(*) contre toutes les fraudes aux aides publiques a introduit plusieurs avancées pour renforcer les contrôles en la matière, elle n'est pas encore totalement applicable.
2. Un manque de cap de la politique du Gouvernement en matière de rénovation énergétique
La fermeture temporaire de MaPrimeRénov' entre juin et septembre 2025 puis sa réouverture partielle témoignent, selon la rapporteure, d'un manque de cap, voire de l'incohérence de la politique du Gouvernement en faveur de la rénovation énergétique.
La rapporteure a pu en mesurer les conséquences concrètes auprès des artisans et des élus lors d'un déplacement dans l'Audomarois (pays de Saint-Omer, Pas-de-Calais) le 17 novembre organisé conjointement avec la Confédération des artisans et des petites entreprises du bâtiment (Capeb).
Si la fermeture du guichet puis les changements de règles d'éligibilité des travaux et de plafonds d'aides intervenus en septembre dernier ont évidemment eu des effets dévastateurs en termes de lisibilité pour les ménages, ils sont aussi sources de découragement pour les artisans et les entrepreneurs : ces derniers avaient investi, recruté et formé leurs équipes pour répondre aux objectifs ambitieux annoncés en 2021. Avec ces revirements successifs, ils ont le sentiment de n'avoir pas été entendus, de n'avoir pas été considérés.
Au-delà de l'instabilité, c'est la stratégie elle-même qui manque de cohérence. Après avoir privilégié la massification des rénovations d'ampleur, le Gouvernement les restreint aujourd'hui. Quant aux rénovations par gestes, elles sont indispensables, encore faut-il qu'elles soient organisées, hiérarchisées, mises en cohérence. Il est contre-productif de soutenir des travaux dans le désordre, de proposer à un ménage de changer son système de chauffage s'il n'a jamais changé ses fenêtres ou isolé ses murs. C'est pourquoi la rapporteure plaide auprès du Gouvernement pour élaborer, conjointement avec la filière, un véritable « parcours de rénovation par gestes », pour rendre chaque euro dépensé plus efficace et faire de la pédagogie auprès des consommateurs.
3. L'importance du pilotage budgétaire
Les auditions de la rapporteure ont mis en évidence que, loin de se résumer à une question de fraudes, la fermeture du guichet en juin dernier résulte surtout d'un afflux de dossiers, supérieur de 20 % aux prévisions, qui résulte paradoxalement du succès de la rénovation d'ampleur. Cet afflux était incompatible avec les crédits ouverts en loi de finances et avec les moyens humains de l'Anah. Cela l'a conduite à accumuler un stock important de dossiers non traités. À ces difficultés, se sont ajoutées les fraudes, qui ont contribué à rallonger les délais.
En résumé, même si les fraudes sont de plus en plus prégnantes, la fermeture était bien, aussi, une décision budgétaire non assumée.
La réouverture, fin septembre, est restée extrêmement limitée : elle a été calibrée pour 13 000 dossiers seulement, pour ne pas saturer l'exercice 2026 déjà encombré de milliers de demandes en attente. Selon l'Anah, le stock de demandes déposées en 2025, mais qui seront engagées en 2026, représenterait déjà 40 % de l'objectif 2026 !
La rapporteure rappelle l'importance de la programmation budgétaire, car les stop and go qui peuvent découler d'un pilotage défaillant sont dévastateurs.
III. P177 : UNE HAUSSE BIENVENUE DES CRÉDITS QUI NE RÉSOUT PAS LA QUESTION DE LA SOUS-BUDGÉTISATION STRUCTURELLE
En 2026, les crédits du programme 177, dédié à l'hébergement d'urgence et au logement adapté, connaissent une hausse de 110 millions d'euros, dont 81 millions d'euros pour l'hébergement d'urgence et 29 millions d'euros pour le logement adapté.
La rapporteure salue cette avancée, mais souligne qu'elle sera malheureusement insuffisante pour assurer une budgétisation « sincère » du programme.
Comme elle le dénonçait l'an dernier, et comme la Cour des comptes le rappelle régulièrement, les besoins de l'hébergement d'urgence sont systématiquement et délibérément sous-estimés. Les crédits ouverts en loi de finances ne couvrent pas le maintien des 203 000 places existantes. Cette année encore, le projet de loi de finances de fin de gestion doit ouvrir 119,5 millions supplémentaires, simplement pour atteindre la fin de l'année, à nombre de places d'hébergement constant.
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Au 31 décembre 2024 |
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dont 51 863 en centres d'hébergement et de réinsertion sociale (CHRS) |
en hébergement d'urgence, dont 1 608 en résidences hôtelières à vocation sociale |
dédiées aux femmes enceintes |
En outre, la rapporteure note que la recommandation de la Cour des comptes visant à appliquer un taux de mise en réserve de 0,5 % au programme 177, dont les dépenses sont contraintes, n'a une nouvelle fois pas été respectée : le taux de réserve sur ce programme était de 5,5 % en 2025.
Régler cette « sous-budgétisation » est la priorité absolue. Sans cela, tout débat sur l'augmentation du nombre de places est vain. En effet, les 20,5 millions de crédits obtenus en commission mixte paritaire pour financer 2 000 places supplémentaires à destination des femmes proches de la maternité et de leurs enfants, ont été fléchés vers le financement du parc existant. Autrement dit, contrairement au souhait du législateur, ces 2 000 places supplémentaires n'ont jamais été créées, faute de crédits suffisants pour financer le parc existant.
L'« insincérité » budgétaire rejaillit aussi sur les publics hébergés, sur les administrations et sur les travailleurs sociaux.
· Ce système contraint les centres d'hébergement à avancer sur leur trésorerie les fonds nécessaires au maintien des places et à demeurer dans l'incertitude toute l'année sur le montant final de subventions qui leur sera accordé.
· Cela place aussi les services de l'État dans un rôle inconfortable, contraints de couvrir a posteriori des places non financées. C'est insécurisant et inefficace, car l'instabilité politique ne nous assure pas, bien au contraire, du vote du projet de loi de fin de gestion.
En s'appuyant sur l'exécution 2024, sur les montants demandés en fin de gestion 2025 et sur les montants prévisionnels inscrits pour 2026, la rapporteure estime que 85 millions d'euros sont nécessaires pour assurer la sincérité budgétaire de l'hébergement d'urgence.
Pour la rapporteure, cette sincérité budgétaire est le strict minimum, alors que la situation des personnes à la rue est dramatique : plus de 8 500 personnes par jour appellent le 115 pour une demande d'hébergement d'urgence. En moyenne annuelle, le taux de demandes non pourvues était de 64 % en juillet dernier. Le 18 août dernier, 2 159 enfants sont ainsi restés sans solution d'hébergement à la suite de leur demande au 1156(*), un nombre en hausse de 6 % par rapport à l'an dernier et de 30 % par rapport à 2022.
Derrière ces chiffres déjà inquiétants se cache une réalité plus grave encore, car de nombreuses personnes ne sollicitent même plus le 115, résignées à l'absence de solution. Plus de 900 sans-abris sont décédés en 2024 en France, dont 34 enfants.
Face à une telle tension, certains préfets donnent des consignes pour « hiérarchiser les vulnérabilités », en définissant des critères de priorisation, voire en organisant la remise à la rue de personnes pour en accueillir d'autres. Ces pratiques sont contraires au principe d'inconditionnalité de l'accueil inscrit dans notre droit.
Cela place en outre les travailleurs sociaux dans une situation morale inextricable, contraints de devoir choisir chaque jour entre des situations également urgentes, également douloureuses.
Cette fragilité structurelle se traduit aussi par un recours massif aux nuitées hôtelières. En août dernier, près de 30 000 enfants vivaient à l'hôtel. La qualité de ces hébergements est très inégale, mais dans tous les cas, pour un enfant, vivre à l'hôtel, c'est subir des difficultés scolaires, une sociabilité entravée, un quotidien heurté qui fragilise toute la famille. C'est pourquoi la rapporteure insiste sur la nécessité de ne pas négliger l'accompagnement social.
De manière générale, elle rappelle que l'hébergement d'urgence est, par essence, le dernier filet de sécurité de toutes les autres politiques publiques : il est donc le miroir de toutes les insuffisances de nos services publics - logement, emploi, santé... Cela impose une approche résolument interministérielle.
Sur une note plus positive, la rapporteure souligne les résultats encourageants du plan Logement d'abord II. Sa montée en charge se poursuit en 2026 avec 29 millions d'euros afin de contribuer à la création de 30 000 places d'intermédiation locative et à l'ouverture de 10 000 pensions de famille entre 2023 et 2027.
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Au 30 septembre 2025 |
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en intermédiation
locative |
en pensions de famille créées |
TRAVAUX EN COMMISSION
Audition de
M. Vincent Jeanbrun, ministre de la ville et du
logement
(Mardi 25 novembre 2025)
Mme Dominique Estrosi Sassone, présidente. - Nous avons le plaisir de recevoir aujourd'hui, pour la première fois depuis sa nomination le 12 octobre dernier, le ministre de la Ville et du Logement, Vincent Jeanbrun.
Monsieur le ministre, je vous souhaite la bienvenue dans notre enceinte. Vous trouverez toujours, au sein de notre commission, des relais avisés et engagés sur les questions de logement et de politique de la ville.
Vous disposez d'un ministère de plein exercice, c'est une rupture et un signal que nous saluons : des marges de manoeuvres politiques sont indispensables pour peser au niveau interministériel, car le Logement et la Ville sont malheureusement trop souvent appréhendés, à tort, sous le seul prisme des dépenses.
L'an dernier, notre commission avait salué une véritable inflexion en faveur du logement au sein du projet de loi de finances, sous l'impulsion de Valérie Létard. Je pense notamment à la réduction de 200 millions d'euros de la réduction de loyer de solidarité (RLS), à la généralisation du prêt à taux zéro dans le neuf ou encore à l'exonération de droits de succession pour les dons dans le cadre familial permettant l'acquisition d'une résidence principale.
Cette année, le Gouvernement semble prendre le chemin inverse en augmentant les prélèvements pesant sur les bailleurs sociaux à hauteur de 500 millions d'euros, dont 200 millions de RLS. Cette dernière est une ponction improductive, dont notre commission dénonce les effets depuis sa création en 2017. Car les bailleurs sociaux sont des acteurs indispensables de la relance de la production de logements.
Or, pour cela, ils doivent disposer de marges de manoeuvre suffisantes et ce n'est pas le cas dans la situation budgétaire actuelle. L'édition 2025 de l'étude « Perspectives du logement social » de la Banque des territoires, dont les travaux font référence dans le secteur, est édifiante à ce sujet. Elle rappelle que les bailleurs sociaux ne pourront pas maintenir un haut niveau de production de logements tout en investissant massivement dans la réhabilitation, sauf à éroder progressivement leurs fonds propres et à créer un ralentissement de la production à compter de 2035.
En ce qui concerne le parc privé, notre commission défend depuis de nombreuses années une revalorisation de l'investissement locatif par la création d'un véritable statut du bailleur privé. Comme je le répète souvent, il est temps de ne plus voir les propriétaires comme des profiteurs d'une rente, mais comme des contributeurs essentiels à la vie économique et sociale de notre pays. On ne dort pas dans un PEA ! Notre défi est de trouver une voie de conciliation entre l'efficacité de cette mesure pour la relance de l'investissement locatif, à travers des taux suffisamment incitatifs, et la nécessaire maîtrise de nos finances publiques. Monsieur le ministre, la position du Gouvernement a-t-elle évolué sur ce statut du bailleur privé à l'aune des débats à l'Assemblée nationale ?
Outre l'investissement locatif, la relance de l'accès à la propriété est une urgence sociale, mais aussi politique. Je dis souvent que débloquer les parcours résidentiels est indispensable pour relancer la mobilité sociale et éviter d'alimenter un sentiment de déclassement et d'assignation à résidence, dont les effets sur l'échiquier politique peuvent être dévastateurs. Monsieur le ministre, quelles mesures le Gouvernement entend-il porter pour redonner aux ménages l'espoir d'accéder à la propriété ? Le Gouvernement est-il favorable à l'ouverture du prêt à taux zéro (PTZ) aux logements acquis en bail réel solidaire (BRS) ? La revente de ces logements pose parfois un problème, quand elle n'est pas éligible au PTZ : les bailleurs se retrouvent avec des logements difficiles à revendre.
Voilà, Monsieur le ministre, les sujets sur lesquels je souhaitais vous interroger en priorité. Je vous laisse désormais la parole pour un propos introductif avant que mes collègues ne prennent le relais avec leurs questions, en particulier Amel Gacquerre, rapporteure pour avis sur les crédits logement et Viviane Artigalas, rapporteure pour avis sur les crédits de la politique de la ville.
M. Vincent Jeanbrun, ministre du logement et de la ville. - Merci pour vos mots d'introduction, ils disent très bien la situation du logement dans notre pays - elle se résume en deux mots : une crise grave. Aussi, dans ce débat budgétaire, avons-nous collectivement, Gouvernement et Parlement, un devoir plus qu'une mission : celui de répondre à cette crise du logement.
Ce n'était pas arrivé depuis longtemps, mon ministère recouvre et rassemble le logement et la politique de la ville : c'est un signal fort qu'a souhaité envoyer le Premier ministre, et je m'en réjouis. Cela doit nous permettre d'avoir des marges de manoeuvre pour être plus efficaces encore, notamment sur les questions de rénovation urbaine, qui sont à la conjonction du logement et de la politique de la ville. Il ne s'agit pas, comme je l'ai entendu, d'avoir le logement au détriment de la politique de la ville, ou l'inverse : c'est bien l'ensemble de ces politiques publiques qui bénéficieront du plein et entier engagement du ministre et de toutes ses équipes.
Je sais que vous êtes particulièrement attentifs, ici au Sénat, à la défense des budgets de la politique de la ville. Notre engagement se manifeste notamment par le fait que nous avons d'ores et déjà porté la réforme des zones franches urbaines (ZFU) en quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV). C'est désormais inscrit à l'article 12 du projet de loi de finances pour 2026, ce qui est une très bonne nouvelle. Les ZFU dans tous les quartiers prioritaires constituent une première avancée majeure. Côté logement, il y a la création du statut du bailleur privé ; nous y reviendrons.
C'est ma façon de vous répondre, Madame la présidente. Vous me demandiez quelles étaient les évolutions voulues par le Gouvernement entre la première copie de ce budget - qui était un peu dure, disons-le - et la version actuelle. Mon ministère a obtenu un premier statut de bailleur privé, c'est le fruit d'un compromis qui a le mérite d'exister et je ne doute pas que le Sénat saura l'améliorer avec le talent, le brio et le sérieux budgétaire qui le caractérisent, car nous sommes ici dans une maison sérieuse : je suis sûr que nous parviendrons à un statut du bailleur privé de qualité, ce qui est très attendu.
Cette audition est dédiée à la seconde partie du PLF, particulièrement aux quatre programmes de la mission « Cohésion des territoires » : les programmes 109, 135, 177 et 147. Je tiens à saluer et à remercier les directeurs d'administration centrale pour leurs travaux et leur accompagnement quotidien, en particulier la Direction générale des collectivités locales (DGCL), l'Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT), la Direction générale de l'aménagement, du logement et de la nature (DGALN), la Direction de l'habitat, de l'urbanisme et des paysages (DHUP) et la Délégation interministérielle à l'hébergement et à l'accès au logement (DIHAL). Leurs services concourent en synergie à la continuité de l'État, à la satisfaction de l'intérêt général et à la mise en oeuvre de la feuille de route confiée par le Premier ministre. Il me semble important de le rappeler dans le contexte d'instabilité politique qui est le nôtre. Je remercie donc tout particulièrement Cécile Raquin, directrice générale des collectivités territoriales, Damien Botteghi, directeur de l'habitat, de l'urbanisme et des paysages, et son adjointe Marie-Laure Van Qui. Je remercie également Jérôme D'Harcourt, délégué interministériel à l'hébergement et à l'accès au logement, avec qui j'étais ce matin pour visiter un lieu d'accueil des femmes victimes de violences, ainsi que Corinne de La Mettrie, directrice générale déléguée politique de la ville de l'ANCT. C'était l'occasion pour moi de les remercier pour leur présence et de permettre à chacun de bien les identifier.
Ma feuille de route est claire : achever le nouveau programme de rénovation urbaine. Il s'agit d'assurer le suivi et la mise en oeuvre des 43 mesures du Comité interministériel des villes (CIV), de relancer l'offre de logement - le neuf comme l'ancien - et de fluidifier le recours au parc d'hébergement, mission très complexe. La méthode est claire : s'appuyer sur les travaux initiés en amont, notamment par mes prédécesseurs - Valérie Létard a ouvert la voie sur de très nombreux dispositifs - et par les parlementaires, en particulier par le Sénat, ils sont une mine d'informations et d'idées pour une politique de relance, que ce soit pour le logement - particulièrement celui des jeunes et des jeunes actifs - ou sur les enjeux de la politique de la ville. Ma méthode ne consistera donc pas à faire une grande « loi Jeanbrun », mais d'aller chercher les bonnes idées là où elles se trouvent, c'est-à-dire auprès de ceux qui connaissent bien le terrain et font remonter des propositions intelligentes.
C'est dans cet esprit que je souhaite rassembler ce que j'appelle un « plan logement », qui n'est pas un projet de loi unique, mais le catalogue de toutes les mesures intelligentes à défendre dans les deux assemblées parlementaires. J'ai cru comprendre, Madame la présidente, qu'une proposition de loi très riche, signée de votre main, initiera prochainement des mesures en faveur du logement : vous pouvez compter sur moi pour accompagner cette démarche.
Le logement est un enjeu économique, social et humain. Économique, parce qu'il représente une part importante de l'activité nationale, et qu'une politique ambitieuse du logement rapporte aux deniers de l'État. On a parfois du mal à le faire entendre, mais une partie de nos déficits s'explique par un manque de soutien au logement - l'investissement dans ce secteur a un effet levier, il faut le rappeler et faire de la pédagogie. Les politiques du logement sont aussi une façon de soutenir la construction et l'artisanat, qui en ont grand besoin : avec une politique ambitieuse du logement, il y a une politique ambitieuse pour l'emploi.
La politique du logement est un enjeu social, ensuite, parce que le logement reste un besoin vital. Je fais très volontiers mienne votre phrase, Madame la présidente : « on ne dort pas dans son PEA », j'aime son humour, mais aussi la façon dont elle indique le chemin que nous devons emprunter. En effet, nous devons faire en sorte que les Français qui ont un petit bas de laine le sortent de la banque pour investir dans la pierre et donc aident à construire un toit pour des Français qui en ont besoin. C'est un enjeu fondamental, car l'absence de logement décent est la première cause de précarité dans notre pays. Nous devons construire du logement et, mieux, le construire au bon endroit et le rendre accessible à tous : c'est tout l'enjeu des politiques publiques liées au logement, et des outils nouveaux comme le statut de bailleur privé.
Dans la politique du logement comme dans la politique de la ville, nous n'oublions pas les outre-mer, qui ont des défis considérables en la matière.
Je crois aussi que nous devons recourir au triptyque décentralisation, clarification et simplification. Il faut rendre une grande partie de la politique du logement aux collectivités locales et, en particulier, aux maires la politique d'attribution des logements sociaux. Le maire que j'ai été pendant dix ans considère que nous devons pouvoir, en tant qu'élus locaux, rendre compte à notre population et participer activement à ce que l'on appelle de manière un peu trop technique la politique de peuplement. Les maires le disent, vous le savez parfaitement : ils veulent loger des habitants qui sont déjà sur leur commune ou leur agglomération, il faut le prendre en compte. Cependant, il faut être très clair : si l'on donne le quota préfectoral au maire, il faut lui donner tout le quota, y compris celui relevant du droit au logement opposable (DALO). Tous les maires avec qui j'en ai parlé m'ont dit avoir sur leur territoire des habitants relevant du Dalo et vouloir les loger - et il faut le reconnaitre : il est difficile de voir des habitants de la commune en situation très grave, qui attendent depuis longtemps, voir passer des personnes relevant du Dalo venues d'autres territoires. Je l'ai encore constaté lors du congrès des maires, les édiles attendent que la politique d'attribution leur soit confiée. Les propositions dans ce sens ne manquent pas, par exemple celle de Sophie Primas, avec sa proposition de loi visant à renforcer le rôle des maires dans l'attribution des logements sociaux - je vais m'en inspirer. Dans un autre registre, les rapporteures Amel Gacquerre et Vivianne Artigalas ont mené des travaux très importants, notamment sur les questions d'obligation de rénovation énergétique ou encore sur le recours au groupement momentané d'entreprises - cela fait partie des initiatives pertinentes que nous devons promouvoir et mettre en oeuvre le plus rapidement possible.
La simplification normative est également très importante, ainsi qu'un soutien actif aux logements sociaux. Vous avez raison, madame la présidente, la copie initiale du Gouvernement était à 1,3 milliard d'euros de RLS. La ministre des comptes publics a d'ores et déjà dit qu'un effort pourrait être fait et a évoqué le montant de 1,1 milliard, comme l'année dernière : c'est déjà un progrès notable, validé à l'Assemblée nationale.
Sur la politique de la ville, je commencerai par rappeler que la cohésion des territoires est au coeur de la promesse républicaine, notamment en matière d'égalité des chances. Enfant des quartiers prioritaires, j'ai toujours considéré que la Nation a le devoir de faire en sorte que, où que l'on naisse, l'on ait la même égalité des chances. C'est pourquoi je suis très heureux de porter la politique de la ville au sein de mon ministère. Les crédits consacrés à l'hébergement et à l'insertion - le programme 177 - demeurent à un niveau historiquement élevé pour 2026 et connaîtront même une augmentation. Celle-ci assurera le maintien du parc d'hébergement d'urgence généraliste et la montée en charge du deuxième plan quinquennal « Logement d'abord ». Je connais l'attachement du Sénat aux crédits de ce programme et la frustration qui a été la vôtre lors du précédent exercice budgétaire. Aujourd'hui, journée internationale pour l'élimination de la violence faite aux femmes, je rappelle que, selon le rapport de la délégation aux droits des femmes du Sénat, près de 3 000 femmes sans abri passent la nuit dans la rue. C'est inacceptable et nous devons collectivement trouver des solutions. Dans ces circonstances, la « sincérisation » des crédits dévolus à ce programme est un impératif.
Les aides personnelles au logement (APL) - le programme 109 - font l'objet d'une réduction maîtrisée, portée par deux mesures principales : le gel du barème et un recentrage du dispositif. Concernant le programme 135, il connaîtra une baisse significative. Concentré sur l'Agence nationale de l'amélioration de l'habitat (Anah) et le dispositif MaPrimeRénov', les engagements de l'agence seront toutefois stabilisés en 2026 par rapport à 2025. Cette stabilisation est rendue possible par une réduction des crédits budgétaires de l'État, qui s'accompagne d'une mobilisation accrue du produit de la vente des certificats d'économie d'énergie (CEE). Il y a donc une baisse faciale au niveau budgétaire, puisque nous allons chercher de l'extra-budgétaire à travers les CEE.
Les discussions sur le budget de l'Anah sont en cours, mais l'orientation est claire : donner de la visibilité à l'ensemble des acteurs en évitant le « stop-and-go » que nous avons connu l'année dernière et qui est délétère. L'idée est de recentrer les dispositifs de l'Anah sur les passoires énergétiques les plus dégradées et sur les foyers les plus modestes, afin d'aider en priorité ceux qui en ont le plus besoin - nous mobiliserons les mêmes moyens, mais en nous concentrant sur les foyers les plus en demande.
Le programme 147, relatif à la politique de la ville, bénéficie d'une légère progression, malgré la réduction des dispositifs spécifiques « Quartiers d'été ». Ce niveau de crédits nous permet de maintenir l'ensemble des autres dispositifs, comme les contrats de ville, les cités éducatives, les programmes de réussite éducative ou les adultes-relais, et d'augmenter significativement le financement de l'Agence nationale pour la rénovation urbaine (Anru). Je profite de cette occasion pour évoquer le dispositif des maisons de l'enfance et de la réussite éducative (MeRe) initié par ma prédécesseure au ministère de la ville, Juliette Méadel.
Les crédits de cette mission traduisent une ligne d'équilibre : préserver les actions les plus structurantes tout en veillant à la soutenabilité des dépenses publiques. C'est un budget de responsabilité centré sur l'efficacité. Je connais le sérieux des sénateurs, en particulier celui du rapporteur général du budget, Jean-François Husson, pour préserver la trajectoire de réduction du déficit public au-dessous des 5 %, comme le demande le Gouvernement - la majorité des sénateurs viserait même 4,7 %... Le projet de loi de finances pour 2026 n'est donc pas un budget d'attente, c'est un budget d'action qui consolide les outils existants, tout en préparant les adaptations nécessaires aux enjeux démographiques, climatiques et sociaux.
Mme Amel Gacquerre, rapporteure pour avis sur les crédits relatifs au logement. - Sans dévoiler l'avis que je présenterai demain à la commission sur les crédits « Logement », je souhaite vous interroger sur la rénovation du parc social, et vous alerter sur l'hébergement d'urgence.
La promesse d'octobre 2023 d'une enveloppe d'1,2 milliard d'euros sur trois ans en faveur de la rénovation énergétique du parc social n'a pas été tenue. Si l'an dernier, Valérie Létard avait obtenu le report de 200 millions gelés en 2024, il n'en est rien cette année. En ce qui concerne l'engagement de renouveau du bassin minier (ERBM), les crédits ne permettront que de liquider les restes-à-payer d'opérations antérieures. Monsieur le ministre, l'objectif de 12 000 logements financés au titre de l'ERBM, fixé en 2017, sera-t-il atteint ? D'après les données reçues dans le cadre de mes travaux, 9 500 logements ont été financés sur 2018-2024.
De manière générale, nous devons engager une réflexion sur le financement de la rénovation et la réhabilitation du parc social. Dans le scénario central de l'étude « Perspectives du logement social » évoqué par notre présidente, en dépit des investissements massifs alloués à la réhabilitation, seuls 60 % du parc seraient en conformité avec la stratégie nationale bas carbone à horizon 2050. À l'heure où l'État s'est désengagé du Fonds national des aides à la pierre (Fnap), dont la pérennité financière n'est assurée que par l'abondement des bailleurs sociaux, et où le dispositif « Seconde vie » deviendra moins avantageux dès la fin 2026, avec une exonération de taxe foncière qui passera de 25 ans à 15 ans, quel est l'avenir de nos politiques publiques en faveur de la rénovation du parc social ?
Ensuite, Monsieur le ministre, je vous alerte sur les crédits dédiés à l'hébergement d'urgence, qui sont systématiquement et délibérément sous-dotés en loi de finances. L'actuel projet de loi de finances de fin de gestion prévoit l'ouverture de 120 millions d'euros, témoignant de ce pilotage budgétaire insécurisant - et même dangereux, car notre configuration politique ne nous assure pas du tout de l'adoption de ce texte. Près de 900 sans-abris sont morts dans la rue en 2024, et parmi eux 34 enfants : assurer la sincérité budgétaire du programme est donc le strict minimum et le préalable à toute augmentation du parc. Avec Nadia Sollogoub, nous tenons à vous alerter sur ce sujet majeur pour notre société.
Mme Viviane Artigalas, rapporteure pour avis sur les crédits de la politique de la ville. - J'ai présenté mercredi dernier à la commission mon avis sur le programme 147 dédié à la politique de la ville. Constatant que les grands dispositifs spécifiques de la politique de la ville, comme les cités éducatives, le programme de réussite éducative ainsi que les adultes relais seraient préservés, et que l'Anru serait dotée de 66 millions d'euros de crédits supplémentaires, j'ai émis un avis favorable. Néanmoins, les quartiers d'été paient le prix de ces évolutions. Ils ne seraient plus dotés que de 5,1 millions d'euros en 2026 : doit-on craindre la suppression du dispositif à terme, à l'heure où les colos apprenantes du programme 163 « Jeunesse et vie associative » sont également supprimées ?
Enfin, malgré la hausse bienvenue cette année, j'ai appelé à la plus grande vigilance sur le rattrapage du retard accumulé par l'État dans le financement de l'Anru. Car l'État n'a versé qu'à peine plus de 10 % des montants promis. Monsieur le ministre, êtes-vous en mesure de vous engager devant nous à une accélération des paiements de l'État, compatible avec le rattrapage de son retard ? Un montant d'au moins 250 millions d'euros serait nécessaire l'an prochain. Surtout, lorsque les conclusions du rapport de préfiguration par Philippe Van de Maele auront été remises, avons-nous l'assurance d'un troisième programme de renouvellement urbain ? Je rappelle que cela nécessite une loi. Il est indispensable de faire cela rapidement, et avant les présidentielles de 2027, si nous voulons éviter toute latence entre programmes.
J'en viens à l'hébergement d'urgence. Le 25 novembre est la Journée internationale pour l'élimination de la violence à l'égard des femmes. Chaque année, des milliers de femmes quittent leur domicile pour échapper aux violences conjugales. Faute de solutions adaptées, elles sont trop souvent envoyées à l'hôtel avec leurs enfants dans des conditions indignes, dangereuses, coûteuses pour l'État et contre-productives.
Face à ces situations humaines inacceptables, comment le Gouvernement compte-t-il garantir que les 110 millions d'euros supplémentaires du projet de loi de finances pour 2026 financeront enfin des dispositifs dignes, tels que des hébergements spécialisés et sécurisés ? Des projets existent dans les territoires, mais aussi de véritables parcours de sortie de l'hôtel et un accès effectif au logement social : il faut les promouvoir, qu'en dites-vous ?
M. Vincent Jeanbrun, ministre. - Madame la rapporteure Gaquerre, je porte un grand intérêt au monde du logement social et particulièrement à sa capacité à se rénover, notamment sur l'aspect énergétique, qui est fondamental pour faire baisser les charges et les loyers des locataires.
Nous envisageons de proposer aux bailleurs sociaux, au-delà des enjeux de baisse de la RLS qui leur redonnent un peu de souffle, 400 millions d'euros de CEE dans le cadre de programmes sécurisés, soit 200 millions supplémentaires que l'an dernier. Sur ces 200 millions supplémentaires, 40 millions financeront l'ingénierie et 160 millions seront attribués via des fiches dites bonifiées, qui apportent plus de garanties et beaucoup moins de volatilité. Avec 400 millions d'euros ainsi disponibles, nous pourrons couvrir plus de demandes : la réponse est donc extrabudgétaire, mais elle sera au rendez-vous.
Vous m'interrogez aussi sur l'engagement du renouveau du bassin minier. L'État tiendra ses promesses ; c'est un sujet particulièrement suivi par le Président de la République, cela m'a été confirmé lors de ma prise de fonctions.
Sur la question de l'hébergement d'urgence, Madame la rapporteure Artigalas, il y a bien un enjeu de « sincérisation » de ce budget. Notre pays est généreux et offre plus de 200 000 places chaque année. Or, les crédits ne suffisent pas à financer ces 200 000 places ; c'est pourquoi nous travaillons pour qu'ils progressent de 110 millions d'euros l'an prochain, la sincérité budgétaire est très importante, c'est aussi une condition pour piloter les programmes, pour les acteurs publics aussi bien que pour les associations, qui ne peuvent pas attendre systématiquement la fin de l'année pour connaître leur budget. Je demande donc le plus de sincérité possible dans les crédits pour l'hébergement d'urgence. J'étais ce matin dans un centre d'accueil pour des femmes victimes de violences, j'y ai encore une fois constaté combien l'hébergement d'urgence est une nécessité : il change des vies, des trajectoires, des destins - une très grande partie des femmes sont accueillies avec des enfants, elles trouvent dans ces centres une nouvelle famille. Je veillerai à ce que nous ayons les moyens de nos ambitions au service de cette politique publique tout à fait nécessaire. Du reste, j'ai cosigné aujourd'hui même, avec Aurore Bergé, une circulaire pour que tous les préfets mettent en place un cadre clair et priorisent le soutien aux femmes victimes de violences, à la fois dans l'hébergement d'urgence, mais également pour le relogement, afin qu'elles puissent redémarrer dans la vie avec un nouveau « chez elles », notamment dans le logement social.
Merci pour votre avis favorable sur les crédits de la politique de la ville. Vous avez raison de le dire, le dispositif « Quartiers d'été » voit ses crédits reculer, alors qu'il est très apprécié des maires ; je m'en remets à la sagesse parlementaire pour peut-être l'abonder davantage - sachez bien que je n'ai nulle intention de supprimer ce dispositif qui a porté ses fruits. Ce maintien est d'autant plus important que les « colos apprenantes » ont été supprimées du budget ; nous travaillons activement avec mon cabinet et mon administration, notamment en lien avec la Caisse nationale des allocations familiales (Cnaf), pour les maintenir dans la géographie prioritaire de la ville, mais je ne peux guère, à ce stade, vous faire d'annonce. L'école apprenante présente une plus-value importante, nous nous efforcerons de trouver de nouveaux financements pour mettre en place un modèle, sinon identique, du moins similaire.
Sur la rénovation urbaine, ensuite, l'État n'a qu'une parole et il tiendra ses engagements : nous irons au bout des financements engagés par l'Anru. Nous avons mobilisé 300 millions d'euros sur le cycle et nous les tiendrons. Permettez-moi cependant de ne pas vous répondre à ce stade sur l'Anru 3 : une mission de préfiguration est en cours, et il serait désobligeant de ma part de m'exprimer avant que le préfigurateur ait terminé sa mission. Je peux cependant vous dire qu'il serait inaudible que l'État n'accompagne pas, avec les partenaires et notamment Action Logement, les projets de rénovation urbaine issus des territoires.
Enfin, sur l'hébergement d'urgence, c'est l'honneur de la France de ne pas laisser les gens dormir dans la rue. Trop de personnes dorment encore dehors et y risquent leur vie, alors que nous arrivons dans la période hivernale. C'est un défi que nous devons relever. La France a considérablement augmenté le nombre de places ces dernières années, c'est même le double pour les femmes victimes de violences. Ce n'est pas suffisant, mais cela montre une trajectoire et une volonté très forte en la matière.
M. Guislain Cambier. - Vous parlez de crise grave du logement, mais, je ne vais pas mâcher mes mots - moi qui suis venu à la politique avec Jean-Louis Borloo -, nous nous demandons si Emmanuel Macron a une quelconque ambition en matière de logement ! En huit ans, nous avons connu huit ministres du logement - méritoires, en particulier votre prédécesseure, mais que pouvaient-ils si le Président de la République n'avait aucune ambition pour leur secteur, s'il croit que le marché s'autorégule ?
Le Président de la République et Bercy se rendent-ils bien compte de la crise du logement ? Mesurent-ils que cette crise grave, c'est la faillite pour des milliers d'entreprises, ce sont des dizaines de milliers d'emplois détruits ? Ont-ils conscience que le logement représente 22 % du PIB français et que c'est le premier secteur industriel de notre économie ?
Nous voulons bien vous accompagner, mais encore faut-il que l'exécutif ait une ambition et une vision...
Mme Anne-Catherine Loisier. - Êtes-vous prêt à rouvrir le choix du mix énergétique et à revenir sur le dogme du tout-électrique et sur la mise au pilori des chaudières à bois haute performance, qui impacte aujourd'hui lourdement la construction et le coût des logements ? En effet, au 1er janvier prochain, les chaudières à bois ne seront quasiment plus aidées au titre de MaPrimeRénov' et des C2E - l'aide plafonnerait à 1 000 euros, contre 7 000 voire 14 000 euros pour une pompe à chaleur (PAC).
Dans cette assemblée, nous sommes favorables au mix énergétique, car nous savons que l'énergie bois est utile et qu'elle est la moins chère dans le grand pays forestier qu'est la France ; c'est important en particulier pour les foyers les plus défavorisés. Êtes-vous donc prêt à sortir de ce dogme du « tout-PAC », qui sera vraiment préjudiciable à l'économie de notre territoire, à des milliers d'artisans et surtout aux Français en situation modeste qui ne pourront pas financer les surcoûts liés au fonctionnement d'une PAC ?
M. Yves Bleunven. - Nos bailleurs sociaux supportent de multiples contraintes, alors qu'ils sont le bras armé de nos territoires pour construire et relever le défi du logement. Comment entendez-vous consolider leur modèle économique ?
Depuis quelques années, nous assistons à une augmentation folle des coûts de la construction. Certaines causes sont traitées, mais nous restons très inquiets, je vous l'ai dit lors du débat sur la crise du logement. Les prix et les coûts des matériaux paraissent décalés de la réalité et méritent des investigations. Alors que certains éléments justifiant l'augmentation ont évolué dans le sens contraire, les coûts ne baissent pas : qu'en pensez-vous ?
La crise du logement passe pour une « bombe sociale ». Or, quand on parle de simplifier les procédures, on nous renvoie à une éventuelle loi spécifique. Une loi de simplification a été faite pour les Jeux olympiques, afin que les logements prévus soient livrés à temps ; des assouplissements exceptionnels ont été également pris pour Mayotte. Avez-vous dans vos projets un texte pour simplifier le processus de construction ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, présidente. - Nous sommes attachés au modèle généraliste du logement social, en particulier pour son rôle contracyclique.
M. Vincent Jeanbrun, ministre. - J'ai vu Jean-Louis Borloo cette semaine et, effectivement, cela fait du bien de l'entendre - et nous avons parlé ensemble du rôle fondamental des bailleurs sociaux.
D'une façon générale, je crois que Bercy a constaté l'effet contracyclique des bailleurs sociaux, ils ont en partie sauvé le monde du logement, notamment privé - et c'est une bonne nouvelle que cela ait été entendu, c'est ce qui a rendu plus simple de revenir cette année à ce qu'avait réussi à négocier Valérie Létard, soit un montant de RLS à 1,1 milliard d'euros. Amélie de Montchalin s'y est engagée oralement, reste à l'écrire dans la loi et à le voter, mais le Gouvernement a exprimé là sa volonté de redescendre la RLS au même niveau que l'année dernière.
Il ne m'appartient pas de dire ce que pense le Président de la République. Ce que je sais, c'est que ma feuille de mission indique très clairement de relancer le logement - neuf, ancien, privé et social -, avec un slogan qui me convient bien : « du logement partout et pour tous », pour n'oublier aucun territoire.
C'est aussi en cela que le statut du bailleur privé aura un intérêt : nous faisons en sorte qu'il ne soit pas zoné territorialement pour ne pas nous retrouver dans cette absurdité connue avec le dispositif Pinel où, à force de se focaliser sur les zones tendues, nous en sommes venus à subventionner du logement surtout là où il y avait déjà un marché. C'est, d'un point de vue économique, assez étonnant.
La simplification est aussi une urgence, parce que si la construction et la rénovation coûtent cher, c'est bien sûr en raison du coût des matériaux, mais aussi parce que les démarches administratives sont extrêmement longues. En tant que maire, j'ai lancé mon projet de coeur de ville fin 2014 et nous n'avons toujours pas posé la première pierre, tant les démarches, les enquêtes, les délibérations sont longues, sans compter les recours nombreux contre le projet. Le premier enjeu est donc de gagner du temps administratif, sans pour autant faire moins bien ou avec moins d'ambition, en particulier sur le plan environnemental. Nous devons pouvoir simplifier et pour me faire comprendre, j'emploie cette formule : je rêve du « Notre-Dame de la construction » et des « jeux Olympiques du logement ». J'aimerais que le Parlement s'inspire de ce qui a été fait pour les jeux Olympiques, ce que nous devrons d'ailleurs refaire pour les jeux Olympiques d'hiver car sans loi de simplification, nous n'aurons pas les équipements nécessaires. Ce que nous constatons après les jeux Olympiques, c'est que l'on a construit du logement avec la même ambition et la même qualité, mais en un tiers du temps, voire en deux fois moins de temps qu'habituellement, et pour moins cher. Je propose donc de mettre en débat cette idée qu'on peut simplifier les règles de la construction, peut-être pas toutes les règles partout, mais, par exemple, dans le cadre d'une zone d'aménagement. Une fois que la création d'une telle zone a été validée par les habitants, le conseil municipal et le préfet, on pourrait considérer que des garde-fous sont en place et que, dès lors, il est possible d'appliquer des règles simplifiées pour avancer, comme on l'a fait pour les jeux Olympiques - l'idée étant de ne pas perdre de temps, puisqu'il s'agit d'opérations maîtrisées par les pouvoirs publics. D'autres simplifications ont été adoptées cet automne dans la proposition de loi du député Harold Huwart de simplification du droit de l'urbanisme et du logement - le Conseil constitutionnel en a censuré plusieurs en estimant qu'elles étaient des cavaliers législatifs, il faudra y revenir dans un texte idoine.
Autre défi, celui de l'innovation : il faut réfléchir au logement un peu différemment que nous le faisons, intégrer par exemple les tiny house, comme vous le faites en Bretagne, Monsieur Bleunven. Il ne faut pas s'interdire d'innover localement, c'est l'échelon pertinent, car ce qui vaut par exemple sur vos terres bretonnes ne vaut pas forcément en plein coeur de l'Île-de-France, même si de bonnes inspirations peuvent être trouvées.
Je reprends à mon compte l'idée de rencontrer les organismes dédiés pour évoquer la question de l'indice des prix et des matériaux. Vous avez raison : même si la guerre en Ukraine se poursuit, les filières se sont réorganisées et la Covid est derrière nous. Nous devons donc nous poser un certain nombre de questions.
Madame la sénatrice Loisier, à titre personnel, je suis assez favorable au mix énergétique. Élu de la région Île-de-France, j'ai soutenu avec la présidente de région la réactivation de la filière bois, qui fait partie de la solution. Toutefois, dans l'exercice budgétaire qui est le nôtre et pour accompagner les outils énergétiques au meilleur rendement et au bilan CO2 le plus bas, l'Anah a reconcentré son action sur les pompes à chaleur, il faut en tenir compte. Cependant, pour reprendre la formule du Premier ministre, le Gouvernement a proposé, nous débattons, et vous décidez. Je vous ai exposé ma position. Le mix énergétique reste possible et financé dans le cadre d'une rénovation globale. Comme je l'indiquais, nous allons essayer, sur MaPrimeRénov', de nous concentrer sur des rénovations d'ampleur, dans lesquelles la filière bois pourra avoir un débouché. En revanche, sur les gestes simples, cela ne figure pas dans le budget tel qu'il a été monté. Je suis à votre disposition pour que nous reparlions ensemble de la question du diagnostic de performance énergétique (DPE).
M. Jean-Luc Brault. - Une mesure fonctionne très bien dans les secteurs du logement et de la construction : le prêt à taux zéro (PTZ). Destiné aux primo-accédants sous condition de revenus, il reste largement accessible.
Seriez-vous prêt à l'élargir aux familles nombreuses ? Je m'explique : beaucoup de familles dans nos campagnes ont construit à taux zéro avec un enfant et en ont aujourd'hui deux, voire trois. Elles ne peuvent plus construire, car elles n'ont plus l'argent nécessaire, les banques ne jouent pas le jeu et les salaires ne suivent pas. Ne pourrions-nous pas permettre à ces familles, grâce à un nouveau PTZ, d'agrandir leur maison sans avoir à attendre un héritage, ceci dans un cadre strictement contrôlé ? Qu'en pensez-vous ?
Mme Pauline Martin. - Membre de la commission d'enquête sénatoriale sur les agences de l'État, je reste en questionnement sur l'efficience de l'Anah, en particulier face à sa gestion de MaPrimeRénov', marquée par un niveau exceptionnel de fraude et par une complexification administrative qui dépasse parfois l'entendement, mais qui semble devenir habituelle dans les services de l'État. Que pensez-vous de l'idée de supprimer l'Anah, et de réintégrer ses missions dans votre ministère ? Et que pensez-vous du fonctionnement de l'Anru, dont Jean-Louis Borloo nous a dit qu'elle avait été détournée de ses missions originelles ?
M. Daniel Fargeot. - Suite au rapport Daubresse-Cosson pour une relance durable de l'investissement locatif, de juin dernier, vous avez annoncé la création d'un statut du bailleur privé par le biais d'un amendement du Gouvernement au projet de loi de finances. Son esquisse est bonne, mais un mécanisme d'amortissement pour les logements acquis à compter du 1er janvier 2026 et loués nus pour au moins neuf ans, ne peut être considéré comme la création d'un statut de bailleur privé. Nous attendons donc la suite avec impatience et sachez que nous aurons des propositions claires et précises en la matière. C'est donc avec attention que nous regarderons les mesures dans le plan d'urgence pour le logement que vous avez annoncé.
J'ai une question particulière concernant l'expulsion des délinquants de leur logement social. Dans le Val-d'Oise, la commune de Franconville est particulièrement mobilisée sur ces questions, mais ses élus nous disent qu'ils éprouvent la plus grande difficulté à ce que les procédures pénales aboutissent à des expulsions. Avez-vous engagé une réflexion conjointe avec le garde des Sceaux pour orienter l'arsenal de sanctions vers les expulsions ?
M. Vincent Jeanbrun, ministre. - Merci pour ces questions précises, qui confirment à quel point les sénateurs maîtrisent ces sujets de manière très fine et sont, de surcroît, force de proposition.
Le PTZ « famille nombreuse » est un concept à creuser, parmi les mesures concrètes du plan logement que j'appelle de mes voeux - un tel dispositif n'aurait pas le même coût s'il est cumulable avec le bail réel solidaire (BRS).
M. Yves Bleunven. - Ce serait très utile pour des familles qui veulent s'agrandir, mais qui y renoncent parce qu'elles seraient trop à l'étroit dans leur logement - pensons aussi à la démographie...
M. Vincent Jeanbrun, ministre. - Cela nécessite un chiffrage et un cadrage précis des conditions financières. L'intérêt du PTZ, c'est que le promoteur n'en est pas informé à l'avance, et qu'il n'intègre donc pas cette donnée au projet - on évite donc l'écueil que l'on constate avec ma MaPrimeRénov', de voir les prix augmenter parce que le dossier est subventionné... Je m'engage à creuser cette idée d'un PTZ familles nombreuses.
Une réorganisation ou une suppression des agences publiques comme l'Anah et l'Anru sont-elles souhaitables ? Une précision importante : MaPrimeRénov', même si elle a pu connaître quelques soubresauts, donne satisfaction ; on nous demande de maintenir ses moyens, plutôt que de les diminuer, l'idée de soutenir nos concitoyens dans la rénovation énergétique fait l'unanimité. L'Anah a fait la lumière sur les accusations de fraude. Sur l'année 2024, on estime qu'environ 8 millions d'euros, et non 600 millions comme on l'entend parfois, font l'objet d'une étude approfondie pour suspicion de fraude, c'est un niveau raisonnable. Sur l'année 2025, aucun euro n'a été versé à ce stade, mais 35 millions ont été provisionnés par précaution - c'est assez peu, rapporté aux milliards d'euros que ce programme représente. L'Anah, forte de son ingénierie et de la remise à niveau de ses systèmes d'information, s'est protégée pour lutter contre la fraude.
Plus largement, les changements éventuels dans l'organisation des agences publique relèvent d'une réforme plus large voulue par le Premier ministre, qui engage une vision de la décentralisation et du rôle des services de l'État. Notre objectif dans l'examen de la loi de finances, reste le service public rendu à nos concitoyens - et je ne crois pas à la baguette magique qui supprimerait des agences tout en maintenant le service à son niveau. Il faut réfléchir à la façon de rendre ce service de meilleure façon, plus efficace et moins onéreuse.
Concernant l'Anru, Jean-Louis Borloo ne dit pas que l'agence aurait été détournée de ses missions originelles, mais que son fonctionnement a été rendu plus complexe que ce qu'il avait conçu à l'origine. Jean-Louis Borloo me rappelait les premiers temps de l'Anru, quand elle fonctionnait avec ce qu'il avait appelé un « comité de bienveillance » : il s'agissait alors de placer autour d'une table tous les acteurs susceptibles d'aider le maire dans ses projets de rénovation urbaine, dans un cadre flexible ; avec les années, l'agence s'est dotée d'un comité d'engagement, ce qui la rend plus complexe. Pour ma part, ayant pu en bénéficier en tant que maire, je considère que l'agence a beaucoup apporté par sa capacité à fournir de l'ingénierie, des financements et à réunir tout le monde autour de la table. Vous avez donc en face de vous un ministre qui défend la rénovation urbaine et qui espère que nous pourrons continuer à en faire dans ce pays. De manière générale, je défends les politiques publiques, pas leur complexité - et je serais heureux de les rendre plus simples.
Je salue les premiers pas d'un statut du bailleur privé, et je ne doute pas que le Sénat va l'améliorer, lui donner plus d'impact : je compte sur vous.
S'agissant de l'expulsion de délinquants du parc social, je sais l'implication des maires du Val d'Oise, en particulier de Xavier Melki à Franconville, je m'y suis rendu et j'y ai vu l'engagement de l'édile, ainsi que du préfet. Des maires se sont saisis des nouvelles dispositions de la loi sur le narcotrafic, entrées en vigueur l'été dernier. Forts de condamnations effectives d'individus reliés au narcotrafic, ils ont pu lancer des procédures d'expulsion qui sont allées jusqu'au bout. Une jurisprudence intéressante a même été établie, puisque des agressions ayant eu lieu à l'agence du bailleur, donc hors de la commune, ont été retenues par les juges comme un trouble de jouissance lié au logement et ont pu entraîner des expulsions. Le droit va plutôt dans le sens des bailleurs, des maires et des préfets, avec une logique simple : le logement social doit aider les familles qui ne pourraient pas se loger autrement - donc nous n'avons pas à donner la priorité à ceux qui troublent l'ordre public. Dès lors, une réflexion s'impose : ce qui fonctionne si bien avec la loi sur le narcotrafic, serait-il possible de l'étendre à d'autres formes de violence et à un certain nombre de condamnations ? Je parle de violences graves. Nous accueillons en hébergement d'urgence des femmes qui vivent à la rue avec leur enfant, nous voulons leur accorder un logement social mais nous en manquons ; lorsque l'on constate que certains sont occupés par des locataires qui se sont rendus coupables de violences aggravées, on a de quoi se demander s'il ne faudrait pas changer certaines attributions - il y même des cas où le mari condamné pour violences conjugales reste dans le logement social, et c'est la femme victime qui se retrouve en hébergement d'urgence, il y a là quelque chose à faire pour donner aux bailleurs sociaux la possibilité de se séparer des familles qui posent problème. Nous le savons tous ici, les locataires qui posent problème sont une petite minorité, mais une petite minorité qui peut gâcher la vie d'un très grand nombre. Cela fait partie des combats que je mène et, bien sûr, j'en discute avec mes collègues au Gouvernement.
Mme Dominique Estrosi Sassone, présidente. - Hier, la présidente de l'Union sociale de l'habitat (USH) me citait un cas pratique : une famille a été expulsée pour troubles à l'ordre public, mais le préfet a aussitôt demandé à un autre bailleur social de tout mettre en oeuvre pour accueillir cette famille. À quoi sert d'expulser, si c'est pour devoir reloger aussitôt et déplacer ainsi le problème ?
M. Vincent Jeanbrun, ministre. - C'est ce que j'évoquais dans mon propos introductif : les maires doivent être force de proposition dans l'attribution des logements sociaux, d'abord parce qu'ils doivent être en mesure de protéger leur territoire. Il faut le faire intelligemment, il ne s'agit pas de donner au maire un pouvoir d'attribution individuelle du logement, ce n'est pas à lui de choisir les locataires, mais il doit pouvoir établir la liste des candidats entre lesquels la commission d'attribution pourra choisir. Ensuite, le maire doit avoir un droit de veto. Lorsque nous nous retrouvons avec des familles qui causent des troubles extrêmement graves, avec des agressions, des condamnations, des adultes qui font des allers-retours réguliers en prison, il me paraît inaudible que le maire ne dispose pas d'un veto sur l'installation de telles familles sur son territoire.
Dans le cas de Franconville, la mesure d'expulsion a été efficace en matière de narcotrafic. En revanche, s'agissant des violences - je pense à des jeunes qui, pendant les émeutes de 2023, ont dégradé du mobilier urbain sous les caméras et ont commis des actes très graves -, le juge estime qu'il n'y a pas de trouble de jouissance si l'acte est commis en dehors du strict patrimoine du bailleur, et interdit en conséquence l'expulsion. L'acte peut être grave et commis dans la rue qui jouxte l'immeuble social - si ce n'est pas sur le patrimoine du bailleur, l'expulsion n'est pas possible ; nous allons devoir y réfléchir de plus près et voir comment corriger cet état de fait.
Mme Marianne Margaté. - Vous parlez d'une crise grave du logement, d'une « bombe sociale », il faut en prendre la mesure et voir son impact sur nos concitoyens, en particulier la souffrance humaine qu'elle engendre. Les trois millions de ménages demandeurs de logement regroupent cinq millions de personnes, les dépenses de logement représentent facilement le tiers ou la moitié des ressources, les jeunes peinent à prendre leur autonomie, les familles sont contraintes. Dans ce contexte, la révision du gel des APL n'est-elle pas une partie de la réponse à apporter à ces familles ? Ce serait aussi une manière de lutter contre la pauvreté, les impayés et l'impossibilité d'accéder à un logement. Vous avez mentionné, et c'est une bonne nouvelle, la baisse de la RLS. L'APL sera-t-elle augmentée en compensation pour aider les locataires ?
Nous assistons depuis 2017 à une démolition progressive de notre modèle généraliste du logement social : 16 milliards d'euros ont été prélevés sur les bailleurs sociaux, ce qui les oblige à revoir leur coût de gestion, donc à diminuer le nombre de gardiens, de tout ce qui fait la gestion de proximité, des personnes proches des locataires et qui sont des régulateurs, qui peuvent prévenir et aider. La présence humaine est progressivement supprimée, les moyens manquent pour rénover, les logements se dégradent et les bailleurs manquent de ressources pour construire. On parle de fluidifier le parc, mais que veut-on fluidifier ? Quand les gens ne peuvent plus entrer dans le parc social ni en sortir, il n'y a rien à fluidifier.
Il faut faire attention, ensuite, sur l'expulsion des délinquants, car les sanctions judiciaires sont entre les mains de la justice, il ne faut pas de condamnation collective de la famille. On va mettre les gens à la rue, mais où iront-ils ? La condamnation collective de la famille pose bien des problèmes, y compris de droit.
Enfin, l'encadrement des loyers arrive à terme et la question se pose de sa pérennisation, mais aussi de son élargissement et de son amélioration, car nous connaissons les dérives liées aux compléments de loyer. Qu'en pensez-vous ? L'encadrement des loyers, aux mains du maire, ne serait-il pas un moyen de freiner la spéculation sur le parc privé ?
J'attire votre attention sur la commission d'enquête qu'avec ma collègue Amel Gacquerre nous avons consacrée aux copropriétés. Nous y avons souligné le nombre très important de copropriétés en difficulté - plus de 150 000 sur environ 800 000 - et la grande pauvreté qui y existe, qu'elle soit le fait des propriétaires - un million de propriétaires modestes ou très modestes - ou des locataires. C'est donc, hélas, le vivier pour les marchands de sommeil, pour le logement indigne, pour l'absence de rénovation avec des propriétaires qui ne peuvent pas réaliser les travaux. D'où l'importance de l'Anah et d'un plan d'initiative « Petites Copropriétés » - parce ce qu'on entend peu parler de ces petites copropriétés, sauf, hélas, quand elles s'écroulent.
M. Bernard Buis. - Alors que le logement social est saturé, avec plus de 2,8 millions de demandes en attente et moins de 8 % de rotation en 2023, vous avez récemment déclaré vouloir mettre fin au « logement social à vie » : qu'est-ce à dire, et quelles mesures envisagez-vous pour y parvenir ?
Ma deuxième question est une alerte sur la situation très dégradée des conseils d'architecture, d'urbanisme et de l'environnement (CAUE), à la suite de la réforme de la taxe d'aménagement. Alors que cette taxe constitue leur principale source de financement, sa réforme s'est accompagnée de dysfonctionnements importants, liés à des réductions d'effectifs et à des défaillances des outils numériques. Au niveau national, les montants collectés baissent de 40 % par rapport à 2023, un décalage d'environ 230 millions d'euros. Dans une tribune commune soutenue par l'Association des maires ruraux de France et par l'Association des petites villes de France, la Fédération nationale des CAUE et Départements de France ont alerté sur les conséquences graves de cette baisse. Quelles mesures pourriez-vous prendre à très court terme pour garantir le maintien des services rendus aux territoires par les CAUE ?
Mme Martine Berthet. - Le logement des travailleurs saisonniers est aussi un domaine dans lequel il y a beaucoup à faire. Nous l'avons souligné dans notre rapport sur le logement des jeunes et avons soutenu le développement des résidences à vocation d'emploi en les introduisant dans la loi de simplification du droit de l'urbanisme et du logement. Les entreprises dans les stations de tourisme ont besoin d'être accompagnées directement afin de loger leurs travailleurs saisonniers dans des conditions dignes, ce qui n'est pas toujours le cas.
Il faudrait, tout d'abord, qu'elles ne soient pas soumises à la taxe d'habitation sur les résidences secondaires, mais aussi leur donner la possibilité de récupérer la TVA sur l'achat, la construction ou la rénovation des logements qu'elles doivent mettre en oeuvre pour loger ces saisonniers. Ce n'est pas le cas actuellement, car cela n'est pas considéré comme faisant partie de leur activité principale. Pourtant, ces saisonniers sont bien indispensables à cette activité, qu'il s'agisse des magasins, des hôtels, des restaurants, des remontées mécaniques ou de la gestion des plages. Qu'en pensez-vous ?
M. Vincent Jeanbrun, ministre. - Vous avez raison de rappeler qu'il y a trop de mal-logement en France et que notre jeunesse en souffre tout particulièrement. Je songe notamment au camping de Paris, qui est occupé à l'année en particulier par des étudiants. Le défi à relever est considérable, nous allons nous inspirer du très bon rapport parlementaire qui a été rédigé sur ces questions.
Sur les APL, vous rappelez que le Gouvernement a décidé un gel et un recentrage, sachant que l'inflation est faible ; ce gel rapportera environ 100 millions d'euros au budget général et 200 millions d'euros en année pleine. Nous avons un impératif de sérieux budgétaire. Quand l'inflation a été très forte, l'État a accompagné ; quand elle est plus faible, nous sommes dans une logique d'années blanches. Cela n'est pas idéal, mais nous sommes face à de telles contraintes que nous n'avons pas vraiment le choix. Si nous voulons pouvoir envoyer des signaux forts aux bailleurs sociaux, il faut bien le financer quelque part : il y a un enjeu de rigueur et de sérieux budgétaire à tenir.
Je crois, comme vous, qu'il faut des parcours résidentiels ; la mobilité dans le parc social ne sera réelle qu'à partir du moment où nous trouverons des portes de sortie pour les familles qui le souhaitent. Cela passe notamment par le fait de construire plus, mieux et de manière plus abordable.
J'examine la question de l'encadrement des loyers sans dogmatisme. J'entends des points de vue opposés en la matière, et je crois que, dans ces conditions, mieux vaut non pas généraliser une obligation d'encadrer les loyers, mais rendre l'encadrement possible aux maires qui le souhaitent, pour qui cet encadrement fait sens localement - par exemple les maires frontaliers ou de zones touristiques, où les loyers s'enchérissent au point que la population historique locale ne peut plus se loger. Nous attendons le rapport des économistes qui travaillent sur le sujet. Je me permets cependant de vous alerter sur le fait que certains veulent confier à l'agglomération le pouvoir d'encadrer les loyers : or je crois que l'échelon pertinent est la commune, ou bien l'encadrement sera obligatoire pour des maires qui ne l'auront pas choisi.
Je salue votre rapport sur les copropriétés dégradées, il décrit une réalité trop longtemps ignorée. J'ai dans mon portefeuille ministériel le projet « Marseille en grand » et nous constatons qu'au-delà des enjeux sur le patrimoine des bailleurs sociaux, les copropriétés dégradées sont au coeur des problématiques qui défraient la chronique. On a laissé ces copropriétés se dégrader petit à petit, au point de les abandonner parfois à des marchands de sommeil qui en ont fait des réservoirs d'horreur. Les logements en copropriété représentent 30 % du parc de logement, c'est considérable, les copropriétés dégradées comptent environ 1,5 million de logements. C'est un véritable défi, on comprend pourquoi l'enveloppe de 250 millions d'euros fléchée l'an passé dans le budget de l'Anah a été entièrement consommée, je négocie pour qu'elle augmente l'an prochain.
Qu'ai-je voulu dire en appelant à la fin du logement social à vie ? Aujourd'hui, le bail avec un bailleur social ne comporte ni date de sortie ni même de clause de revoyure, contrairement à un bail avec un propriétaire privé. Ces clauses me paraissent fondamentales. Pour le bailleur, qui doit pouvoir mettre fin au bail en cas de manquement grave du locataire, sans avoir à passer nécessairement par la justice, je propose de débattre d'une clause de revoyure tous les trois ans. Nous devons y réfléchir avec les professionnels du secteur. Ce sera aussi utile pour le locataire, pour lui garantir un rendez-vous avec le bailleur. Lors de mon déplacement à Franconville, par exemple, j'ai visité des logements sociaux totalement insalubres - 48 heures après ma visite, le préfet a décrété leur insalubrité et les familles ont été relogées et quand on demande des explications au bailleur, qui gère très bien son parc par ailleurs, il nous répond qu'il n'avait pas connaissance de l'état délabré de ces logements... parce qu'il n'est pas habilité à y pénétrer ! Je trouve cette réponse tout simplement extraordinaire. Une clause de revoyure tous les trois ans serait donc l'occasion de faire le point et ce serait utile aux deux côtés.
Je crois, ensuite, qu'il faudra « muscler » un peu le jeu sur la mise en co-titularité du bail. J'ai vu dans ma commune des grands-parents qui, un an avant de quitter leur logement social pour prendre leur retraite, inscrivent sur le bail leur petit-fils ou leur petite-fille, étudiant à Paris - ce qui conduit à une sorte de transmission, quasiment un héritage, sans passer par la moindre commission d'attribution. Des maires disent même que le service se marchande : il suffit de conclure un PACS ou de faire une domiciliation, et l'on contourne les commissions d'attribution. Cela n'est pas acceptable... Autre exemple, encore à Franconville : une famille liée au narcotrafic a été expulsée ; le maire reçoit quelques jours plus tard les voisins, qui lui disent être à l'étroit dans leur logement ; le maire appelle le bailleur pour voir s'ils peuvent s'installer dans le logement libéré - mais le bailleur avoue sa surprise, puisque dans son fichier, le logement trop petit était censé être occupé... par un couple de retraités ! En réalité, la famille à l'étroit sous-louait son logement depuis des années, à un prix bien supérieur au loyer du bailleur social... Voyez, ce genre de situation serait plus rare avec une revoyure tous les trois ans.
J'ai grandi dans le logement social. Sans lui, mon petit frère et moi n'aurions pas eu la vie que nous avons eue et je ne serais pas devant vous pour en parler. Je suis donc très favorable à mobiliser la solidarité nationale pour donner à des familles qui ne peuvent se loger dignement, un accès à des logements sociaux abordables. Je souhaite aussi que ce système soit méritocratique, que les plus méritants en bénéficient et que ceux qui se sont détournés des règles du droit et des comportements civiques élémentaires ne soient plus prioritaires.
Il est encore possible de fluidifier les parcours résidentiels, en construisant plus et différemment. L'accession sociale à la propriété est l'une des seules raisons pour lesquelles des familles peuvent demander à partir de leur logement social pour réaliser leur rêve de devenir propriétaire. Il faut donc trouver les bons véhicules, comme le BRS ou le PTZ. Je vous donne rendez-vous lors des travaux relatifs au plan logement pour apporter des solutions.
J'ai bien pris note de l'alerte sur les CAUE, il y a une véritable problématique de captation de la taxe d'aménagement, y compris pour les collectivités locales, nous devons trouver une réponse.
Enfin, vous avez raison de m'interpeller sur les travailleurs saisonniers. Cela rejoint ce que nous évoquions sur l'innovation et la nécessité d'inventer du sur-mesure. C'est aussi pour cela que je travaille activement à la décentralisation, à la clarification et à la simplification voulues par le Premier ministre. Il faut du sur-mesure : on n'habite pas en bord de côte comme en haut d'une montagne ou dans le Val-de-Marne. Comment crée-t-on du logement adapté ? Je vous propose que nous y travaillions ensemble. Il y a le volet fiscal pour que des résidences secondaires puissent être ouvertes, c'est une piste à explorer. Je ne vous garantis pas la TVA tout de suite, vu le contexte budgétaire, mais nous devons y réfléchir, et pourquoi pas au sujet de la taxe sur les résidences secondaires. Il y a aussi l'aspect normatif. Avons-nous besoin d'avoir les mêmes contraintes urbaines pour tous les types de logement ? Les permis sont-ils les mêmes pour construire du logement 100 % saisonnier que du logement à l'année ? C'est une vraie question. C'est peut-être là que nous pouvons nous donner des marges d'expérimentation. La tiny house est un bon exemple : les règles ne sont pas les mêmes que pour un logement dans un immeuble classique. Je suis favorable à explorer cette voie.
Mme Annick Jacquemet. - Que pensez-vous des cités éducatives en matière de réussite scolaire, et quelles sont les perspectives d'évolution de ce dispositif ?
La semaine dernière devant le congrès des maires, vous avez proposé aux élus de mieux « packager » les dispositifs de protection de l'enfance : qu'entendez-vous par là, plus précisément ?
Enfin, les représentants de la fédération « Solidaire pour l'habitat » (Soliha) m'ont dit leurs difficultés financières et de gestion liées aux changements de règles de MaPrimeRénov' : êtes-vous conscient de ces difficultés de gestion pour cet acteur associatif essentiel, et que pouvez-vous faire pour les résoudre ?
M. Christian Redon-Sarrazy. - En zone rurale, les loyers sont souvent faibles, mais les coûts de construction ou de rénovation ne sont pas inférieurs et les bailleurs sociaux sont assez peu présents, car ils ont d'autres priorités. L'initiative privée est limitée, du fait de la faible rentabilité, les communes n'ont généralement pas les moyens d'intervenir et les programmes des départements sont souvent insuffisants. Dans ces conditions, comment intervenir ? Il y a en zone rurale un parc immobilier relativement important, une partie se dégrade parce qu'aucun opérateur n'intervient, alors qu'il y a de la demande pour ce type de logement et ce niveau de loyer. Ne faudrait-il pas des mesures spécifiques aussi bien pour le parc privé que pour le parc public ?
M. Vincent Jeanbrun, ministre. - Des évaluations sont en cours sur les cités éducatives, les retours de terrain que j'en ai sont excellents. Nous y avons mis davantage de moyens à la suite des émeutes urbaines de 2023, les budgets sont désormais stabilisés. Le dernier CIV a proposé d'étendre le dispositif, c'est aussi pourquoi il nous faut l'évaluer précisément. Les cités éducatives que j'ai visitées montrent une capacité de coordination de l'ensemble des acteurs, d'action très concrète qui met la citoyenneté et les familles au coeur de tous les enjeux de l'école. Le dispositif est cher mais il fonctionne bien, nous en maintenons le budget et nous avons vocation à poursuivre l'extension de la labellisation.
Une précision : c'est sur les « colos apprenantes » que je vous ai dit ne pas pouvoir faire d'annonce. Elles ont été retirées du budget, alors qu'elles ont leur utilité, en particulier dans les quartiers prioritaires de la ville (QPV) ; c'est pourquoi j'essaie de trouver d'autres façons de les financer.
Concernant la protection de l'enfance, j'évoquais dans mon propos liminaire les mesures prises par Juliette Méadel, ma prédécesseure au ministère de la ville. Elle a créé une labellisation de différents centres dans les communes - leur forme peut varier d'une ville à l'autre - en articulant le programme de réussite éducative (PRE), les dispositifs sur l'aide à l'enfant, sur l'accompagnement des parents avec la parentalité, et l'accompagnement psychologique pour un certain nombre d'enfants dans ce qu'elle a appelé les Maisons de l'enfance et de la réussite éducative (MeRe). Certaines villes disposent d'outils de cette nature depuis longtemps, mais il est bon de les labelliser, de les mettre en avant et de créer un recueil des bonnes pratiques pour qu'ils puissent être mis en oeuvre partout où cela est possible. Il faut continuer dans cette voie, la jeunesse a besoin d'un accompagnement psychologique peut-être plus fort qu'auparavant. Dans les quartiers prioritaires, il y a beaucoup de violence, elle peut créer des traumatismes qu'il faut prendre en charge le plus tôt possible pour reprendre pied et poursuivre une vie normale, ou bien on risque de perpétuer des comportements violents. J'étais hier soir à Meaux, chez Jean-François Copé, pour l'avant-première d'un film sur les rixes réalisé par les jeunes de ces quartiers ; il montre que l'accompagnement a permis à ces jeunes de prendre conscience de leur mal-être, de réaliser que la violence n'était pas normale alors qu'elle est ordinaire dans leur environnement. Il y a beaucoup à faire, en proximité, pour aider les jeunes.
Concernant MaPrimeRénov', les territoires bénéficient souvent d'une délégation, certains sont même en délégation de type 3, ils sont donc quasiment autonomes. Le « stop-and-go » est ce qu'il y a de pire, d'où ma volonté de recentrer le dispositif sur ceux qui en ont le plus besoin et d'avoir une gestion plus facile.
Je ne suis pas sûr qu'il faille créer un dispositif particulier pour le logement dans le rural. Ma feuille de route est claire : du logement partout et pour tous. C'est pourquoi le volet sur l'ancien est aussi important, y compris dans le cadre du statut du bailleur privé, parce qu'il faut effectivement investir dans de l'habitat existant, pour le rénover. Cela suppose de mobiliser les investisseurs privés, donc de les aider mais avec une contrepartie : des loyers plafonnés. À l'issue des débats à l'Assemblée nationale, nous étions à un niveau de 3,5 % pour du loyer intermédiaire ; plus le loyer sera bas - conventionné, social, voire très social -, plus l'aide et l'exonération seront importantes. C'est l'un des premiers outils qui permet de reconquérir des territoires où il y a une demande.
J'étudie également un autre mécanisme consistant à redistribuer du logement social de la ville vers le rural. Cela s'est fait entre la commune d'Aubervilliers et une communauté de communes de Bretagne : une rénovation nécessitait de reconstituer des logements, mais il n'est pas évident de trouver une zone hors périmètre Anru à Aubervilliers et alentour où l'on puisse construire ; une solution a été trouvée en Bretagne, une partie de la reconstitution y a donc été faite. C'est tout bénéfice pour la ville en rénovation urbaine, qui a besoin de diminuer son nombre de logements sociaux et qui va financer une part importante de la construction dans une communauté d'agglomération rurale qui n'en aurait pas eu les moyens, c'est une formule gagnant-gagnant où tout le monde s'y retrouve. Je suis ouvert à toute proposition pour enrichir le plan logement : il n'est pas souhaitable, ni souhaité par les Français, de loger tout le monde dans les métropoles. À une époque, le logement social était craint dans les zones rurales, aujourd'hui on veut retrouver des leviers de peuplement, parce qu'on veut accueillir des familles - et cela correspond au voeu des Français d'habiter dans des zones moins denses. Il y a des outils pour le faire, je vais examiner toutes les initiatives qui vont dans le bon sens et si vous avez des propositions, je serais heureux d'en parler avec vous - je sais que le Sénat est une force de proposition, puisque les territoires ruraux sont en général bien défendus dans cette maison.
Mme Dominique Estrosi Sassone, présidente. - D'une manière générale, tous les territoires sont bien défendus dans cette maison, qu'ils soient ruraux ou urbains, sans qu'il y ait d'opposition entre eux.
Merci pour votre disponibilité, monsieur le ministre, nous percevons votre volonté d'avancer - sachez que vous pouvez compter sur nous : il y a urgence dans la politique du logement, elle doit être portée au plus haut niveau dans les priorités nationales, car le logement est tout simplement nécessaire et se trouve donc au fondement d'autres priorités politiques, économiques et sociales.
Ce point de l'ordre du jour a fait l'objet d'une captation vidéo qui est disponible en ligne sur le site du Sénat.
Examen en
commission
(Mercredi 26 novembre 2025)
Mme Dominique Estrosi Sassone, présidente. - Nous examinons à présent le rapport pour avis de notre collègue Amel Gacquerre sur les crédits relatifs au logement de la mission « Cohésion des territoires » du PLF pour 2026.
Mme Amel Gacquerre, rapporteure pour avis sur les programmes « Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables », « Aide à l'accès au logement » et « Urbanisme, territoires et amélioration de l'habitat » de la mission « Cohésion des territoires ». - Madame la présidente, mes chers collègues, au sein du budget 2026, les trois programmes dédiés au logement, qui représentent 95 % des crédits de la mission, seraient dotés de 21,2 milliards d'euros, en baisse de plus de 4 % par rapport à 2025.
Tout en vous présentant les évolutions des crédits de chacun de ces programmes, je tiens cette année à mettre en lumière l'effet concret des décisions budgétaires en matière de rénovation énergétique sur le terrain : c'était l'objet de mon déplacement du 17 novembre dernier dans l'Audomarois, la région de Saint-Omer dans le Pas-de-Calais.
Je commence par le programme 109 « Aide à l'accès au logement », qui porte les aides personnalisées au logement (APL). Ses crédits diminueraient de près de 600 millions d'euros. Trois décisions expliquent cette contraction.
D'abord, la hausse de la réduction de loyer de solidarité (RLS) l'explique à hauteur d'un tiers. Autrement dit, le Gouvernement a fait le choix de revenir sur l'avancée obtenue par Valérie Létard l'an dernier, lorsque la RLS avait été abaissée de 200 millions d'euros. C'est un recul, que je déplore d'autant plus qu'il s'ajoute à la hausse de 300 millions de la contribution des bailleurs sociaux au fonds national des aides à la pierre (Fnap). Mais, contrairement au Fnap, la RLS ne réinjecte aucun financement dans la production de logements. C'est une ponction improductive, qui est une perte sèche pour les bailleurs sociaux et pour la politique du logement en général.
Ensuite, le gel du barème des APL génère une économie de 108 millions d'euros. Il s'inscrit dans le cadre d'un gel de l'ensemble des prestations sociales inscrit dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS), qui représente plus de 2,5 milliards d'économies pour l'État et les organismes de sécurité sociale.
Enfin, le recentrage des APL des étudiants extracommunautaires vers les titulaires d'une bourse sur critères sociaux représente, quant à lui, 100 millions d'euros d'économies en 2026. Alors que les ressources des étudiants font aujourd'hui l'objet d'une forfaitisation, cette mesure vient apporter un « ciblage » des APL à destination des étudiants extraeuropéens.
J'en viens aux évolutions intervenues sur le programme 135, « Urbanisme, territoires et amélioration de l'habitat », qui contribue le plus à la réduction des dépenses publiques de la mission.
En ce qui concerne la rénovation énergétique du parc social, la promesse d'octobre 2023 d'une enveloppe de 1,2 milliard d'euros sur trois ans n'a pas été tenue. Si l'an dernier, Valérie Létard avait obtenu le report de 200 millions d'euros gelés en 2024, aucune ouverture de crédits n'est prévue cette année pour la rénovation énergétique du parc social.
Pourtant, les travaux de la Banque des territoires nous montrent bien que la situation financière des bailleurs sociaux ne leur permettra pas de produire suffisamment de logements sociaux tout en répondant au défi de la rénovation du parc. Une réflexion s'impose donc.
Le dispositif « Seconde vie », opérationnel depuis début 2025, a permis l'agrément de 6 000 projets grâce à une exonération de taxe foncière pendant vingt-cinq ans, qui passerait néanmoins à quinze ans au-delà du 31 décembre 2026. Son avenir doit être clarifié.
Quant au Fnap, le rapport d'information de notre collègue Jean-Baptiste Blanc rendu l'été dernier a montré combien le désengagement de l'État a affaibli cet outil essentiel. Pour 2026, sa capacité d'intervention ne tient que grâce à la contribution accrue des bailleurs, ce qui n'est pas soutenable à long terme.
En ce qui concerne le parc privé, la dotation de l'État à l'Agence nationale de l'habitat (Anah) serait réduite de 23 % en crédits de paiement (CP) et de 32 % en autorisations d'engagement (AE), soit respectivement de 500 millions d'euros et de 750 millions d'euros. Cet effort budgétaire important est le fruit de deux mouvements, à savoir un recentrage des aides et une débudgétisation.
Le recentrage des aides décidé en septembre dernier inclut, pour le parcours par gestes, la suppression des aides pour les travaux d'isolation des murs et de changement de chaudière biomasse. Ces deux mesures représenteront des économies de 50 millions d'euros en CP et de 110 millions d'euros en AE. S'y ajoutent l'abaissement des plafonds d'aides et le recentrage sur les ménages les plus modestes et les passoires.
La réduction de la dotation de l'Anah s'explique surtout par une bascule d'un financement en crédits budgétaires vers des certificats d'économies d'énergie (CEE) qui sont, je le rappelle, hors budget et payés sur les factures d'énergie de tout un chacun. Le surcroît de CEE mobilisables en faveur de la rénovation énergétique des logements s'élèverait à 500 millions d'euros. Face à l'ampleur de cette débudgétisation, j'ai décidé d'entendre cette année les entreprises agréées qui financent les travaux éligibles aux CEE.
Compte tenu du contexte budgétaire, le recours aux CEE est une solution intéressante, car il permettra à l'Anah de poursuivre son action en 2026. Néanmoins, mes auditions confirment que la débudgétisation, que cette bascule mérite toute notre vigilance : d'abord, elle réduit le contrôle parlementaire sur le soutien à la rénovation énergétique ; ensuite, elle fait peser le coût, non plus sur le contribuable, mais sur le consommateur, dans la mesure où les CEE représentent environ 4 % de la facture d'énergie, soit environ 165 euros par an en moyenne. Cela n'est pas neutre socialement puisque le coût de l'énergie représente une part plus importante du budget des plus modestes.
Par ailleurs, les CEE restent un mécanisme de marché, certes étroitement surveillé par le ministère, mais je rappelle qu'un surstock a fait plonger les prix en 2022.
Enfin, les CEE sont exposés aux fraudes et certains acteurs que j'ai auditionnés se sont inquiétés de possibles hausses en lien avec l'augmentation des volumes. La loi du 30 juin dernier contre toutes les fraudes aux aides publiques, dont notre collègue Olivier Rietmann était rapporteur, a fait avancer les choses, mais elle n'est pas encore totalement applicable.
Plus largement, les épisodes récents autour du guichet de MaPrimeRénov' témoignent, selon moi, d'un manque criant de cap, voire de l'incohérence de la politique du Gouvernement en faveur de la rénovation énergétique. J'ai pu en mesurer les effets concrets auprès des artisans et des élus lors d'un déplacement dans l'Audomarois le 17 novembre dernier, organisé avec la Confédération des artisans et des petites entreprises du bâtiment (Capeb).
La fermeture du guichet puis les changements de règles d'éligibilité des travaux et de plafonds d'aides intervenus en septembre dernier sont un très mauvais signal envoyé aux artisans et aux entrepreneurs : ces derniers avaient investi, recruté et formé leurs équipes pour répondre aux objectifs ambitieux annoncés en 2021. Avec ces revirements successifs, ils ont le sentiment de ne pas avoir été entendus ni considérés.
Au-delà de l'instabilité, c'est la stratégie elle-même qui manque de cohérence. Après avoir privilégié la massification des rénovations d'ampleur, le Gouvernement les restreint aujourd'hui. Quant aux rénovations par gestes, elles sont indispensables, mais encore faut-il qu'elles soient organisées, hiérarchisées et mises en cohérence. Il est contreproductif de soutenir des travaux dans le désordre, de proposer à un ménage de changer son système de chauffage s'il n'a jamais changé ses fenêtres ou isolé ses murs. C'est pourquoi je plaide auprès du Gouvernement pour l'élaboration, en lien avec la filière, d'un « parcours de rénovation par gestes », pour rendre chaque euro dépensé plus efficace et faire de la pédagogie auprès des consommateurs.
Je souhaite enfin souligner l'importance du pilotage budgétaire du guichet des aides à la rénovation énergétique. Loin de se résumer à une question de fraudes, la fermeture du guichet en juin dernier résulte surtout d'un afflux de dossiers, supérieur de 20 % aux prévisions, qui résulte paradoxalement du succès du soutien aux rénovations d'ampleur. Cet afflux, non budgété en loi en finances, a conduit l'Anah à accumuler un stock important de dossiers non traités.
À ces difficultés se sont ajoutées les fraudes, qui ont contribué à rallonger les délais. En résumé, même si les fraudes sont de plus en plus prégnantes, la fermeture était bien, aussi, une décision budgétaire non assumée.
La réouverture, fin septembre, est restée extrêmement limitée : elle a été calibrée à 13 000 dossiers seulement, pour ne pas saturer l'exercice 2026 déjà encombré de milliers de demandes en attente. L'Anah m'a indiqué que le stock de demandes déposées en 2025 - mais qui seront engagées en 2026 - représentait déjà 40 % de l'objectif 2026 !
Je termine ma présentation par les crédits du programme 177 « Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables ». En 2026, ils connaissent une hausse de 110 millions d'euros, dont 81 millions d'euros pour l'hébergement d'urgence et 29 millions d'euros pour le logement adapté. C'est une avancée importante par rapport à nos alertes de l'an dernier. Elle est malheureusement insuffisante pour assurer une budgétisation « sincère » du programme.
Comme je le dénonçais l'an dernier, et comme la Cour des comptes le rappelle régulièrement, les besoins de l'hébergement d'urgence sont systématiquement et délibérément sous-estimés. Les crédits ouverts en loi de finances ne couvrent pas le maintien des 203 000 places existantes. Cette année encore, le projet de loi de finances de fin de gestion (PLFG) doit ouvrir 119,5 millions d'euros supplémentaires, simplement pour atteindre la fin de l'année.
Avec ma collègue rapporteure pour avis de la commission des affaires sociales, Nadia Sollogoub, nous estimons que 85 millions d'euros sont nécessaires pour assurer la sincérité budgétaire de l'hébergement d'urgence, car régler cette « sous-budgétisation » est la priorité absolue.
Sans cela, tout débat sur l'augmentation du nombre de places est vain. En témoigne l'amère expérience de cette année : les 20,5 millions d'euros de crédits obtenus en commission mixte paritaire pour financer 2 000 places à destination des femmes proches de la maternité et leurs enfants ont été fléchés vers le financement du parc existant. Autrement dit, contrairement au souhait du législateur, ces 2 000 places supplémentaires n'ont jamais été créées, faute de crédits suffisants pour financer le parc existant.
L'« insincérité » budgétaire rejaillit aussi sur les publics hébergés, les administrations et les travailleurs sociaux. Les centres d'hébergement sont contraints d'avancer sur leur trésorerie les fonds nécessaires au maintien des places et demeurent dans l'incertitude toute l'année sur le montant final de subventions qui leur sera accordé. Cela place aussi les services de l'État dans un rôle inconfortable, contraints de couvrir a posteriori des places non financées. Or l'instabilité politique ne nous assure pas, bien au contraire, du vote du PLFG.
Pendant ce temps, la situation des personnes à la rue est dramatique : plus de 8 500 personnes par jour appellent le 115 pour une demande d'hébergement d'urgence. En moyenne annuelle, le taux de demandes non pourvues était de 64 % en juillet dernier. Derrière ces chiffres déjà inquiétants se cache une réalité plus grave encore, car de nombreuses personnes ne sollicitent même plus le 115, résignées à l'absence de solution.
En 2024, 912 sans-abri sont morts dans la rue ; 4 % d'entre eux, soit une trentaine, étaient des enfants. Cette proportion a doublé depuis la décennie précédente, en lien avec la triste hausse du nombre de familles à la rue.
Face à une telle tension, certains préfets donnent des consignes pour « hiérarchiser les vulnérabilités », en mettant en place des critères de priorisation, voire en organisant la remise à la rue de certaines personnes pour en accueillir d'autres. Ce sont des pratiques contraires au principe d'inconditionnalité de l'accueil inscrit dans notre droit. Cela place en outre les travailleurs sociaux dans une situation morale inextricable, contraints de devoir choisir chaque jour entre des situations également urgentes, également douloureuses.
De manière générale, je rappelle que l'hébergement d'urgence est par essence le dernier filet de sécurité de toutes les autres politiques publiques : il est donc le miroir de toutes les insuffisances de nos services publics - logement, emploi, santé... Cela impose une approche résolument interministérielle.
Sur une note un peu plus positive, il faut souligner les résultats encourageants du plan « logement d'abord 2 ». Sa montée en charge se poursuit en 2026 avec 29 millions d'euros supplémentaires, conformément à nos préconisations de l'an dernier, pour financer des places principalement en pensions de famille et en intermédiation locative.
Voilà, mes chers collègues, le résultat de mes travaux sur ces crédits relatifs au logement, qui contribuent positivement à l'effort budgétaire, malgré une situation perfectible. J'émets donc un avis favorable, sous réserve de l'adoption d'un amendement visant à renforcer la sincérité budgétaire de l'hébergement d'urgence grâce à 85 millions d'euros supplémentaires, pour éviter l'ouverture de crédits en cours d'exécution.
Mme Nadia Sollogoub, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales sur le programme « Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables » de la mission « Cohésion des territoires ». - Concernant le programme 177, la hiérarchisation des vulnérabilités et les non-recours sont des réalités documentées, même si l'Insee n'a pas produit de données chiffrées depuis 2012 sur le sujet. Comme j'ai pu le vérifier sur le terrain aux côtés du Samu social et au sein d'une plateforme d'écoute, ladite hiérarchisation existe et les travailleurs sociaux sont en souffrance, car ils ne peuvent pas répondre à la majorité des demandes. Plus de 2 000 enfants sont à la rue et le collectif « Les Morts de la rue » nous a indiqué que le plus jeune décédé dans la rue en 2025 n'avait que quinze jours.
Comme Amel Gacquerre et moi-même le soulignons chaque année, ce budget est chroniquement dysfonctionnel : en début d'exercice, le Gouvernement sait ainsi qu'il n'accorde pas les crédits suffisants pour répondre aux besoins. La situation était certes pire l'an dernier, puisque 250 millions d'euros manquaient à l'appel en début d'exercice, contre 119 millions d'euros cette année. Tant que ce dysfonctionnement n'aura pas été corrigé, toutes les décisions politiques, telles que les 20 millions d'euros votés l'an dernier pour les femmes et les enfants à la rue, resteront sans effet.
Par ailleurs, les associations peinent à avoir confiance dans le remboursement, par le biais du PLFG, des prestations qu'elles avancent sur leur trésorerie, le vote de cette loi étant à la fois extrêmement tardif et aléatoire compte tenu de l'incertitude politique. La plupart d'entre elles pourraient donc décider de se retirer du financement, ce qui aurait des conséquences dramatiques.
Il est donc essentiel de sortir de cette sous-budgétisation, d'autant que cela nous permettra de faire plus avec les mêmes sommes : si les places et les budgets sont sécurisés en début d'année, les associations pourront en effet être dans une position plus favorable pour négocier les places d'hébergement.
Lesdites places se négocient d'ailleurs sur des plateformes centralisées, ce qui m'amène à attirer votre attention sur le phénomène de financiarisation qui est à l'oeuvre dans le secteur. En effet, des groupes rachètent des hôtels et répondent aux appels d'offres lancés pour les places d'hébergement ; il faut donc que les associations soient mieux armées dans le cadre des négociations.
Si le terme de « financiarisation » peut effrayer, je note, en contrepoint, que cette structuration peut permettre de négocier des services en sus des places, comme j'ai pu le constater en visitant un hôtel social qui proposait entre autres le nettoyage du linge et une salle de convivialité.
Je vous appelle donc à voter l'amendement abondant le programme à hauteur de 85 millions d'euros.
Mme Sophie Primas, rapporteur spécial de la commission des finances sur les programmes « Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables », « Aide à l'accès au logement », « Urbanisme, territoires et amélioration de l'habitat » et « Politique de la ville » de la mission « Cohésion des territoires ». - Nos trois commissions partagent le même point de vue, notamment sur la « sincérisation » du budget de l'hébergement d'urgence, d'où mon soutien à l'amendement proposant 85 millions d'euros supplémentaires.
En outre, je souscris aux observations de Nadia Sollogoub concernant la structuration et l'organisation de l'offre d'hébergement d'urgence : il faut veiller à éviter des effets de bord non désirés, tout en considérant les avantages possibles en termes d'amélioration des services.
Pour ce qui est de la RLS, Valérie Létard avait bataillé avec Bercy l'an dernier pour obtenir une diminution de 1,3 milliard d'euros à 1,1 milliard d'euros : j'estime qu'il faut repartir sur cette base et flécher 200 millions d'euros vers le Fnap, car nous ne pouvons pas demander aux bailleurs de faire face à la RLS tout en contribuant davantage à ce fonds.
Une baisse de la contribution des bailleurs sociaux au Fnap de 375 millions d'euros à 275 millions d'euros est prévue, mais la commission des finances proposera, en parallèle, de ramener la RLS à 900 millions d'euros. Un effort équivalent à celui de l'année dernière sera donc demandé aux bailleurs, mais avec une trajectoire de désengagement sur la RLS.
Par ailleurs, nous accueillons avec bienveillance la bascule de l'Anah vers les CEE, à la réserve près que cela réduit le contrôle parlementaire. De surcroît, ce mécanisme génère des problèmes de trésorerie, car le paiement intervient plus tard dans le cadre des CEE, mais l'utilisation de ces certificats est bienvenue compte tenu des exigences qui pèsent sur le budget.
Mme Viviane Artigalas. - Ce budget ne nous convient pas du tout. Malgré le fait qu'elle a émis des constats que nous partageons, je regrette qu'Amel Gacquerre émette un avis favorable à l'adoption de ces crédits.
Outre la mesure relative aux APL, qui touche directement les ménages les plus modestes alors que le pouvoir d'achat des Français a été mis à mal, la ponction massive opérée sur les bailleurs sociaux n'est pas acceptable.
En matière de rénovation énergétique, les CEE auraient dû être employés pour augmenter le rythme des rénovations et non pas pour faire diminuer la trésorerie de l'Anah, d'autant plus que ces certificats sont davantage sujets à la fraude que les subventions de l'Agence.
Par ailleurs, nous voterons en faveur de l'amendement abondant les crédits de l'hébergement d'urgence, même si nous aurions souhaité qu'ils soient plus élevés. Particulièrement attachée à la situation des femmes victimes de violences, qui se retrouvent parfois hébergées dans des conditions extrêmement précaires avec leurs enfants, je rappelle que 2 159 enfants à la rue ont été recensés dans la nuit du 18 au 19 août, dont 553 étaient âgés de moins de 3 ans : il n'est plus possible de tolérer de telles situations et des hébergements supplémentaires sont nécessaires.
Nous voterons contre ces crédits.
Mme Marianne Margaté. - Si je partage l'analyse d'Amel Gacquerre, je ne comprends pas sa conclusion : il me semble en effet malaisé de développer un tel argumentaire et de conclure par un avis favorable, tant ce budget est catastrophique. De quoi parle-t-on en évoquant des « efforts budgétaires partagés » ? Les diminutions prévues ont un coût humain, social, écologique et économique, et la formule est inadmissible compte tenu des effets directs de la crise du logement sur la vie de nos concitoyens et sur l'activité économique.
Le gel des APL - et de l'ensemble des prestations sociales - est malvenu alors que le pouvoir d'achat recule et que la pauvreté augmente, tout comme les charges énergétiques des locataires. Quant au « recentrage » des aides, il est plutôt question d'en exclure les étudiants extracommunautaires non boursiers : après avoir multiplié par seize leurs frais d'inscription, cette décision leur envoie un très mauvais message - encore plus dans le contexte actuel -, alors que les étudiants sont confrontés à une grande précarité dans notre pays.
Par ailleurs, je partage votre analyse sur l'hébergement d'urgence : il s'agit de répondre à un besoin vital de protection et de sécurité que notre République est incapable de garantir à l'ensemble des personnes qui sont à la rue. S'y ajoute le manque de logements adaptés aux ressources de ces personnes, ce qui aggrave la tension sur l'hébergement d'urgence puisqu'il est impossible d'en sortir.
Pour ce qui est du programme 135, 16 milliards d'euros ont été ponctionnés sur les bailleurs sociaux depuis 2017. La diminution de la RLS est une avancée intéressante, et je m'interroge d'ailleurs sur ses impacts sur la prise en charge de l'APL.
Enfin, ce budget ne porte aucune ambition en matière de rénovation énergétique alors que les sonnettes d'alarme ont été tirées de toutes parts, la bascule vers les CEE traduisant un renoncement supplémentaire.
Notre groupe votera donc contre ces crédits.
M. Yannick Jadot. - Je souscris aux constats faits à propos de l'état de ces filières et de la situation vécue par nos concitoyens. Le logement est absolument essentiel pour eux, car il s'agit souvent de la première dépense contrainte, aux côtés de charges énergétiques qui grèvent leur budget. Le débat politique et médiatique n'aborde pourtant pas ces préoccupations fondamentales, une forme de déni et de spirale du silence s'installant sur cette question du logement. Faute de nous en occuper sérieusement, nous risquons de laisser le champ libre aux populistes d'extrême droite : notre responsabilité est grande en la matière, et je sais que nous en avons tous conscience ici.
Dans ce contexte, la bascule vers les CEE marque la transition vers un système payé par les consommateurs et non plus par les contribuables, ce qui correspond à une forme de privatisation de la politique de rénovation thermique, avec divers dégâts à la clé. L'un des progrès de MaPrimeRénov' résidait dans un meilleur calendrier de paiement de la prime par l'État, alors que le nouveau mécanisme risque d'exclure ceux qui en ont le plus besoin.
Symétriquement, les sous-investissements chroniques dans le logement social amèneront une privatisation d'une politique de l'État - d'où la réflexion sur le statut du bailleur privé - alors que ce dernier devrait être bien plus actif par le biais des bailleurs sociaux.
Enfin, je m'associe aux propos de Mme Margaté sur les étudiants étrangers : l'université française étant un phare international de la connaissance depuis le XIIIe siècle et appuyant notre soft power, faisons donc attention à ne pas multiplier les messages négatifs en leur direction, sans quoi ils iront se former ailleurs, au détriment du rayonnement de la France.
Nous voterons donc contre ces crédits.
M. Henri Cabanel. - Nous voterons contre également. S'agissant de l'hébergement d'urgence et le 115, j'ai récemment croisé, à deux pas d'ici, un homme couché sur un carton, pieds nus, alors que la température était très basse ; des dizaines de personnes sont passées devant lui sans broncher et j'ai moi-même appelé le 115 pour signaler sa présence, mais, après avoir passé une demi-heure en attente, j'ai fini par raccrocher. Je tenais à le souligner, car ce dysfonctionnement est un réel problème.
Mme Amel Gacquerre, rapporteure pour avis. - Je suis ravie d'entendre que nous partageons les constats et l'analyse sur ce sujet transpartisan. J'entends votre étonnement par rapport à mon avis favorable, mais je pense qu'il est important de relever une série de points qui, à défaut d'être positifs - le terme me gêne -, sont des avancées non négligeables.
Tout d'abord, ce budget s'inscrit dans le cadre d'un effort global de réduction des dépenses publiques. Ensuite, une montée en puissance du plan « logement d'abord 2 » y est inscrite et nos alertes ont été entendues au sujet de l'hébergement d'urgence, par rapport à l'an dernier où la situation était pire. Je précise sur ce sujet que mon avis favorable est conditionné à l'adoption de mon amendement.
Concernant la rénovation énergétique, il existe bien une débudgétisation de l'enveloppe confiée à l'Anah, et j'ai d'ailleurs émis des réserves sur les CEE, mais l'Agence elle-même nous a indiqué que ces certificats lui permettaient de poursuivre son action en 2026. Le fait que ces crédits permettent de répondre à une série de besoins justifie donc cet avis favorable.
Pour ce qui est des étudiants extracommunautaires, je rappelle que la décision de revenir sur les APL ne concerne que ceux qui ne bénéficient pas de bourses. Dans un contexte budgétaire contraint, il me semble souhaitable de se fixer des priorités et d'avoir le courage de prendre ce type de décisions, en s'occupant d'abord des boursiers !
Enfin, concernant le statut du bailleur privé, j'insiste sur le fait qu'il ne faudra pas traiter ce sujet de manière isolée : le logement privé et le logement social coexistent et répondent à des besoins différents. Rien ne sert de les opposer alors que nous sommes confrontés à une pénurie globale de logements ; il faut au contraire avoir une vision d'ensemble et actionner tous les leviers.
J'entends donc vos questionnements, sans comprendre les raisons qui vous conduisent à émettre un avis défavorable au regard de tous les points que je viens d'évoquer.
Mme Dominique Estrosi Sassone, présidente. - Chers collègues, nous nous prononçons à présent sur l'amendement exposé précédemment par Amel Gacquerre et sur les crédits de la mission. Je vous rappelle que nous avions réservé notre vote sur les crédits relatifs à la politique de la ville la semaine dernière.
L'amendement II-109 est adopté.
La commission émet un avis favorable à l'adoption des crédits relatifs au logement et à la politique de la ville de la mission « Cohésion des territoires ».
LISTE DES PERSONNES ENTENDUES
Mercredi 5 novembre 2025
- Agence nationale de l'habitat (Anah) : MM. Grégoire FRÈREJACQUES, directeur général adjoint, et Antonin VALIÈRE, responsable des relations institutionnelles.
Jeudi 6 novembre 2025
- Audition commune de la Fédération des acteurs de la solidarité (FAS) et d'Unicef France :
· FAS : M. Emmanuel BOUGRAS, responsable du service stratégie et analyse des politiques publiques ;
· Unicef France : Mmes Julie LIGNON, chargée de plaidoyer sur les questions de lutte contre la pauvreté, et Mina STAHL, chargée des relations avec les pouvoirs publics.
Vendredi 7 novembre 2025
- Union sociale pour l'habitat (USH) : MM. Christophe BELLÉGO, directeur des études, et Antoine GALEWSKI, directeur des relations institutionnelles et parlementaires.
- Direction de l'habitat, de l'urbanisme et des paysages (DHUP) : Mmes Anne-Emmanuelle OUVRARD, adjointe au directeur de l'habitat, de l'urbanisme et des paysages, et Marie-Laure VAN QUI, adjointe au sous-directeur du financement et de l'économie du logement et de l'aménagement.
- Délégation interministérielle à l'hébergement et à l'accès au logement (Dihal) : M. Jérôme D'HARCOURT, délégué interministériel, Mme Léonore BELGHITI, sous-directrice, directrice de la mission « pilotage et transformation de l'hébergement d'urgence », et M. Thibault PUYAUBRAN, chargé de mission budgétaire.
- Fédération française du bâtiment (FFB) : MM. Pascal HOUSSET, président du groupe énergie/décarbonation, Thibault GIMOND, ingénieur énergie, et Mme Léa LIGNÈRES, chargée d'études.
- Confédération de l'artisanat et des petites entreprises du bâtiment (Capeb) : MM. Gilles CHATRAS, administrateur confédéral, Thibaut BOUSQUET, directeur des affaires publiques, et Alexandre COBRET, chargé de mission affaires publiques.
Mercredi 12 novembre 2025
- Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) : M. Romain ROUSSEL, sous-directeur « industrie, santé et logement ».
- Fédération des services énergie environnement (Fedene) : M. Pascal GUILLAUME, président, Mme Marion LETTRY, déléguée générale, et M. Louis LESIGNE, conseiller affaires publiques.
- Groupement des professionnels des certificats d'économie d'énergie (GPCEE) : Mme Florence LIEVYN, présidente, et M. Pierre-Damien GROSJEAN, vice-président.
DÉPLACEMENT
DÉPLACEMENT DANS L'AUDOMAROIS (PAYS DE SAINT-OMER,
PAS-DE-CALAIS)
LUNDI 17 NOVEMBRE 2025
- Visite de la SARL SW Plâtrerie à Vaudringhem et entretien avec son dirigeant, M. Stéphane WEPIERRE.
- Visite de l'entreprise AA Services à Merck-Saint-Liévin et entretien avec son président, M. Rémi CAFFRAY, artisan chauffagiste.
- Réunion de travail avec des entreprises locales, en présence de MM. Philippe HOCHART, maire de Merck-Saint-Liévin, et Luc SETAN, adjoint au maire de Nielles-lès-Bléquin :
· M. Freddy GUILBERT, dirigeant de Guilbert Frères, entreprise de maçonnerie-menuiserie à Hesdigneul-lès-Béthune, et président de la Confédération de l'artisanat et des petites entreprises du bâtiment du Pas-de-Calais (Capeb 62) ;
· Mme Cathy NICUTA, représentante de Éco House 62, entreprise de menuiserie à Béthune, et secrétaire de la Capeb 62 ;
· M. Éric DION, dirigeant de la SARL Dion, entreprise de chauffage sanitaire à Bihucourt, et responsable de la section plomberie-chauffage de la Capeb 62 ;
· M. Damien MAES, président d'honneur de la Capeb 62 ;
· M. Rémi CAFFRAY, président de AA Services, entreprise de plomberie sanitaire et d'électricité à Merck-Saint-Liévin ;
· M. Florian CARON, président de Art Bâtiment, entreprise de maçonnerie-plâtrerie à Saint-Omer ;
· M. Jean-René CHABE, représentant la SARL René Chabe, entreprise de couverture et zinguerie à Heuringhem ;
· M. Hugo GRESSIER, gérant d'OHMIK, entreprise d'électricité à Saint-Omer ;
· M. Matthieu LIBERT, dirigeant de Libert Innovation, entreprise de travaux d'installation d'équipements thermiques et de climatisation à Créquy ;
· M. Hervé PETIT, président d'Héliovent, entreprise d'énergies renouvelables et d'éolien solaire à Renty ;
· Mme Fanny VIS, représentante d'une entreprise de chauffage sanitaire, de plomberie et d'électricité à Bourthes ;
· M. et Mme Stéphane et Delphine WEPIERRE, dirigeants d'une entreprise de plâtrerie-plaquisterie à Vaudringhem.
LA LOI EN CONSTRUCTION
Pour naviguer dans les rédactions successives du texte, visualiser les apports de chaque assemblée, comprendre les impacts sur le droit en vigueur, le tableau synoptique de la loi en construction est disponible sur le site du Sénat à l'adresse suivante :
https://www.senat.fr/dossier-legislatif/pjlf2026.html
* 1 Article 44 du projet de loi de financement de la sécurité sociale.
* 2 Rapport « Quel bilan pour le fonds national des aides à la pierre ? », Commission des finances du Sénat.
* 3 Recentrage du dispositif accompagné sur les logements de classe DPE E à G, baisse des plafonds de travaux éligibles, suppression du bonus sortie de passoire, alignement des taux de subvention pour les ménages aux revenus « intermédiaires » et « supérieurs » sur ceux en vigueur pour les sauts de deux classe DPE.
* 4 Notamment suppression des aides pour les travaux d'isolation des murs et de changement de chaudière biomasse.
* 5 Loi n° 2025-594 du 30 juin 2025 contre toutes les fraudes aux aides publiques.
* 6 Baromètre « Enfants à la rue » publié par la Fédération des acteurs de la solidarité et l'UNICEF France.





