Projet de loi Financement de la sécurité sociale pour 2026

Direction de la Séance

N°533

14 novembre 2025

(1ère lecture)

(n° 122 )


AMENDEMENT

C
G  

présenté par

Mme FÉRET


ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS ARTICLE 36

Après l’article 36

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport pour améliorer les conditions de travail et promouvoir la bientraitance dans les secteurs social, médico-social et de la santé.

II. – Le rapport comporte les axes suivants :

1° Financements : Préciser les moyens financiers dédiés aux actions de prévention et aux actions de lutte contre les maltraitance (sensibilisation, formation, etc.), étudier des scenarii de financements complémentaires pour construire un système avec une répartition des coûts, fondé sur les besoins réels, sans répercussion financière pour les associations, corréler le financement des établissements aux besoins (besoins de soins avec une dimension préventive, besoins d’autonomie, besoins de vie sociale) ;

2° Gouvernance : Renforcer la dimension interministérielle lors de la conception, l’élaboration et la mise en application des politiques de santé publique, et rendre systématique la participation des professionnels de terrain, des personnes accompagnées/patients et de leur entourage ;

3° Qualité de l’accompagnement et conditions de travail : définir un ratio minimal d’encadrement en fonction des établissements et services médico-sociaux et des besoins des personnes, permettant des accompagnements de qualité et humain et d’individualiser l’accompagnement.

Objet

Alors que les budgets des associations baissent régulièrement depuis des années, alors que les besoins des personnes en situation de vulnérabilité se sont densifiés et complexifiés, ce qui a un impact sur les conditions de travail des salariés et des dirigeants du monde associatif, la démarche de contractualisation avec l’État et les Collectivités territoriales devrait tenir compte des besoins des acteurs privés à but non lucratif (associations, fondations, mutuelles) gestionnaires d’ESMS (constat de l’existence d’objectifs et fiches actions imposés, avec très peu de marges de négociation pour les adapter aux projets spécifiques de chaque association et aux besoins des territoires).

La configuration générale du pilotage des établissements et services est en elle-même devenue problématique : la tendance actuelle semble entériner des situations de sous-financement plutôt qu’octroyer de nouveaux moyens aux associations, comme aux services publics, confrontés à l’augmentation des besoins des personnes, au besoin d’embaucher plus de personnel qualifié, à l’empilement des dispositifs et à la nécessité de mettre en place des actions de transformation de leur organisation. Les objectifs chiffrés, les procédures rigides visant la quantité plus que la qualité d’accompagnement et les contraintes évaluatives définies selon des normes toujours plus pesantes (non assorties des moyens nécessaires) contraignent les acteurs du travail social à respecter le cadre et font perdre de vue le rôle social et humain du travail social et des professionnels.

L’obligation de gérer dans l’urgence, sous contraintes et avec des moyens insuffisants, entraîne une maltraitance systémique que subissent les associations des solidarités et de la santé, vues de plus en plus comme sous-traitantes de l’action publique, choisies en fonction du moins disant budgétairement. Et non pour dans leur rôle essentiel et central de corps intermédiaires qui, au-delà de la gestion de réponses, permet d’agir dans la société, de travailler sur les représentations collectives et de concevoir d’autres pratiques.

Ainsi, d’importants dysfonctionnements dans la gestion ou l’organisation susceptibles d’affecter la prise en charge des usagers ou le respect de leurs droits – si ces derniers ne sont en aucun cas excusables car ils affectent la prise en charge des personnes, le respect de leurs droits ou leur protection – sont induits et provoqués par les difficultés de recrutement, la baisse des étudiants, l’absentéisme et les départs qui ont accru la charge des salariés restants.

Les publics, plus nombreux, nécessitent une prise en charge souvent plus délicate, conjuguée à cette complexité administrative et RH croissante et à ces financements restreints. En effet, les financeurs, en réduisant les financements de fonctionnement des organisations, réduisent ainsi les temps d’intervention, sans diminuer en proportion les tâches à réaliser. Ce qui génère, par ricochet, des conditions de travail dégradées, une augmentation du mal-être au travail et, de fait, avec un temps moindre pour réaliser les bons gestes et utiliser les bonnes postures, une évolution très défavorable du taux de sinistralité (le secteur médico-social occupe la première place en termes d’accidents du travail, d’affections psychiques et de maladies professionnelles comme les troubles musculosquelettiques).

Or, la lutte contre les maltraitances et la promotion de la bientraitance passent en priorité par la qualité de l’accueil et de l’accompagnement des personnes, la qualité des actes, mais aussi la qualité de l’écoute, de l’échange et du relationnel. Ce qui nécessite du temps, plus de professionnels et de sortir d’une logique financière où chaque acte est normé et valorisé financièrement. Il s’agit bien de mettre l’humain au cœur de ces relations. Ainsi, pour les professionnels, qu’ils exercent en établissement, dans des services ou à domicile, le temps de la relation et de l’humain doit être retrouvé, valorisé et rétribué, pour ainsi redonner pleinement du sens à ces professions.

L’accompagnement des personnes vulnérables doit se faire sans barrière financière, pour bénéficier des services nécessaires de professionnels eux-mêmes accompagnés dans leur parcours professionnel, reconnus dans leur utilité sociale et valorisés à l’aune de leur importance sociale capitale, et de structures soutenues financièrement par les pouvoirs publics.

Ainsi, il est aujourd’hui vital de doter les structures sociales, médico-sociales et sanitaires des financements adéquats pour pouvoir embaucher suffisamment de personnels, avec des rémunérations à la hauteur de leurs qualifications exigées et nécessaires et de leur utilité sociale, avec des budgets pour mettre en place les formations exigées par le décret n° 2024-166 du 29 février 2024, pour également mettre en place des démarches de prévention des risques professionnels, avec du personnel dédié et des démarches d’amélioration de la qualité de vie et des conditions de travail.

Cet amendement a été travaillé avec l’Uniopss.