Projet de loi Souveraineté alimentaire et agricole

commission des affaires économiques

N°COM-400

6 juin 2024

(1ère lecture)

(n° 639 )


AMENDEMENT

présenté par

MM. DUPLOMB et MENONVILLE, rapporteurs


ARTICLE 13

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Rédiger ainsi cet article :

Le code de l’environnement est ainsi modifié :

I. – Au I de l’article L. 171-7, après le mot : « exercées », sont insérés les mots : « et sous réserve des dispositions figurant à l’article L. 171-7-2, »

II. – Après l’article L. 171-7-1, il est inséré un article L. 171-7-2 ainsi rédigé :

« Art. L. 171-7-2. – Lorsque les infractions visées au 1° de l’article L. 415-3 n’ont pas été commises de manière intentionnelle au sens dudit article ou par négligence grave, l’autorité administrative compétente peut ordonner le paiement d’une amende au plus égale à 450 €.

« Elle peut, par dérogation au premier alinéa de l’article L. 171-7 et hors cas de récidive, prononcer la même sanction pour le fait, sans la déclaration ou l’enregistrement mentionnés au II de l’article L. 214-3 et à l’article L. 512-7 et exigés pour un acte, une activité, une opération, une installation ou un ouvrage, de :

« 1° Commettre cet acte ou exercer cette activité ;

« 2° Conduire ou effectuer cette opération ;

« 3° Exploiter cette installation ou cet ouvrage ;

« 4° Mettre en place ou participer à la mise en place d’une telle installation ou d'un tel ouvrage.

« L’autorité administrative peut suspendre l’exécution des actes de toute nature constitutifs des infractions visées aux six premiers alinéas du présent article, à moins que des motifs d’intérêt général et en particulier la préservation des intérêts protégés par le présent code ne s’y opposent.

« Elle peut, en toute hypothèse, édicter des mesures conservatoires aux frais de la personne responsable de l’atteinte. Elle peut également obliger la personne physique ou le dirigeant de la personne morale responsable de l’atteinte à suivre un stage de sensibilisation aux enjeux de l’environnement, et notamment à la reconnaissance et à la protection des espèces et habitats.

« Sauf en cas d'urgence, les mesures mentionnées au présent article sont prises après avoir communiqué à l’intéressé les éléments susceptibles de fonder les mesures et l’avoir informé de la possibilité de présenter ses observations dans un délai déterminé. »

III. – À l’article L. 171-11, après la référence : « L. 171-7 », il est inséré la référence : «, L. 171-7-2, ».

IV. – Le premier alinéa de l’article 173-1 est ainsi modifié :

1° Les références : « L.214-3 » et « L. 512-7 » sont supprimées ;

2° Le mot : « et » est remplacé par le signe : « , » ;

3° Après la référence : « L. 712-2 », sont insérés les mots : « et au I de l’article L. 214-3 ».

V. – L’article L. 415-3 est ainsi modifié :

1° Après l’avant-dernier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« L’autorité administrative peut, tant que l’action publique n’a pas été mise en mouvement, transiger avec les personnes physiques et les personnes morales sur la poursuite des délits prévus au 1° du présent article, dans les conditions prévues par le deuxième alinéa du I et les III à V de l’article L. 173-12. » ;

2° Après le dernier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Par dérogation aux dispositions du présent article, les infractions visées au 1° du présent article sont soumises, lorsqu’elles n’ont pas été commises par négligence grave ou de manière intentionnelle, aux sanctions prévues par l’article L. 171-7-2 du présent code. Sont réputés n’avoir pas été commis de manière intentionnelle, les faits répondant à l’exécution d’une obligation légale ou réglementaire ou des prescriptions prévues par une autorisation administrative, ou correspondant à l’exercice des activités prévues par des documents de gestion mentionnés à l’article L. 122-3 du code forestier. »

Objet

Cet amendement vise à réécrite l’article 13 relatif à la dépénalisation de certaines infractions environnementales.

Il se situe dans la droite ligne de l’ambition initiale du Gouvernement, figurant dans l’étude d’impact rattachée au présent projet de loi.

Cette ambition a été revue à la baisse à l’occasion du passage en séance publique à l’Assemblée nationale.

En effet, la rédaction proposée pour l’article L. 171-7-1 du code de l’environnement porte en elle le risque de la double peine : une poursuite pénale associée à un stage de sensibilisation.  C’est donc l’inverse de l’objectif poursuivi. Le stage de sensibilisation évoqué à l’article est également problématique : auprès de quelle organisation le stage sera-t-il effectué ? Qui en supportera le coup ? Plus fondamentalement, ce stage participe d’une forme d’infantilisation d’un monde agricole qui méconnaitrait l’environnement dans lequel il évolue, ce qui est à l’opposé de la réalité de l’activité agricole.

De plus, la modification proposée de l’article L. 415-3, visant à « dépénaliser » les infractions figurant au 1°, apparait comme particulièrement fragile dans sa rédaction et n’évoque pas le cas de la négligence. En la matière, le législateur est contraint : le droit européen oblige un État membre à prévoir des peines de nature pénale en cas d’atteinte intentionnelle ou résultant d’une négligence grave. La rédaction proposée s’en trouve dès lors également contrainte : une dépénalisation sèche de ces infractions serait nécessairement inconventionnelle. Il est donc proposé de dépénaliser les infractions non intentionnelles et résultant d’une négligence simple, ces deux concepts conservant nécessairement une part de subjectivité. En outre, comme figurant dans le dispositif initial, les atteintes résultant d’une obligation légale ou règlementaire sont dépénalisées.

Aussi, en lieu et place d’une sanction pénale pouvant atteindre trois ans d’emprisonnement et 150 000 euros d’amende, il est proposé un régime de répression administrative, excluant les cas de récidives, permettant aux pouvoirs publics d’ordonner, le cas échéant, le paiement d’une amende au plus égale à 750 euros. Ce régime de répression est soumis à un contentieux de pleine juridiction.

En outre, la réécriture proposée, s’inscrivant dans l’ambition initiale de l’habilitation à légiférer par ordonnance prévue par le projet de loi initial, procède à la dépénalisation de certaines infractions relatives aux prescriptions d’attachants aux installations classées pour la protection de l’environnement (ICPE). Le champ des ICPE figurait bien dans l’article 13 tel que proposé initialement, l’article L. 173-1 étant expressément visé, mais a manifestement disparu de la version « en dur » proposée par le Gouvernement en séance publique à l’Assemblée nationale.

En la matière, il est donc proposé d’opérer une distinction selon la gravité de l’infraction : un défaut de déclaration ou d’enregistrement des installations soumises à ces prescriptions fera l’objet d’une répression administrative (amende), au regard de l’atteinte moindre aux intérêts environnementaux qu’elles sont susceptibles d’engendrer. Le défaut d’autorisation demeurera une infraction à caractère pénal, au regard des impacts sérieux sur l’environnement que les activités nécessitant une telle autorisation sont susceptibles d’engendrer.

Au total, cet amendement se propose de réinstaurer une échelle des sanctions manifestement absente du code de l’environnement. Si toute infraction à ses prescriptions appelle une réponse, cette réponse ne saurait être de même nature.