Proposition de loi Renforcer la lutte contre les violences sexuelles et sexistes

Direction de la Séance

N°31

31 mars 2025

(1ère lecture)

(n° 483 , 482 )


AMENDEMENT

C Défavorable
G  

présenté par

Mme Mélanie VOGEL, MM. BENARROCHE, Grégory BLANC et DANTEC, Mme de MARCO, MM. DOSSUS, FERNIQUE et GONTARD, Mme GUHL, MM. JADOT et MELLOULI, Mmes OLLIVIER et PONCET MONGE, M. SALMON et Mmes SENÉE et SOUYRIS


ARTICLE 1ER (SUPPRESSION MAINTENUE)

Consulter le texte de l'article ^

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

À la fin du second alinéa de l’article 2226 du code civil, les mots : « prescrite par vingt ans » sont remplacés par le mot : « imprescriptible ».

Objet

Cet amendement du groupe Écologiste, Solidarité et Territoires a pour objet de rétablir l’article 1er du texte consacrant l’imprescriptibilité civile des viols, agressions sexuelles, actes de torture et de barbarie commis sur des mineurs.

Le professeur en droit privé et sciences criminelles Benjamin Moron-Puech souligne l’importance, au regard du droit d’accès à une action pour les victimes, de consacrer l’imprescriptibilité pour certains crimes commis sur les mineurs. 

La prescription comme obstacle à l’enquête a été clairement affirmée par le Comité de l’ONU contre la torture dont les observations sont prises en compte par la Cour pour l’interprétation de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales. 

Le passage du temps n’atténue pas le préjudice qui, dans certains cas, peut même s’aggraver du fait d’un syndrome post-traumatique nécessitant une prise en charge médicale et psychologique et un soutien social, souvent inaccessibles pour qui n’a pas obtenu réparation. Les États parties doivent veiller à ce que toutes les victimes de torture ou de mauvais traitement, indépendamment de la date à laquelle la violation a été commise ou du fait qu’elle a été commise par un régime précédent ou avec son assentiment soient en mesure de faire valoir leurs droits à un recours et d’obtenir réparation. 

La Cour européenne des droits de l’Homme, dans son arrêt du 17 septembre 2013, Esim c.Turquie, a pu juger que, « dans les affaires d’indemnisation des victimes d’atteinte à l’intégrité physique, celles-ci doivent avoir le droit d’agir en justice lorsqu’elles sont effectivement en mesure d’évaluer le préjudice subi »

La prescription serait donc un obstacle inconventionnel aux droits de ces victimes et pour la reconnaissance de leur préjudice. 

Selon l’association Face à l’Inceste, reconnaître l’imprescriptibilité civile permettrait également de reconnaître le caractère singulier des violences sexuelles commises sur les mineurs, et particulièrement les violences incestueuses. La prescription empêche en effet les victimes de porter plainte, l’omerta et l’amnésie dissociative font qu’elles ne peuvent réaliser ou révéler, qu’après des décennies, ce qui leur est arrivé.De même, dans les cas d’aveu tardif de l’agresseur, nous fermons aujourd’hui la porte des tribunaux aux victimes qui ne peuvent recevoir d’indemnisation alors que l’agresseur a révélé les faits et que les victimes sont bien identifiées. 

Parce qu’il est important de respecter la temporalité des victimes et de leur permettre, quand cela est possible, d’obtenir réparation pour le préjudice qu’elles ont subi, cet amendement demande de reconnaître l’imprescriptibilité civile pour ces victimes.