Proposition de loi Renforcer la lutte contre les violences sexuelles et sexistes

Direction de la Séance

N°6 rect.

29 mars 2025

(1ère lecture)

(n° 483 , 482 )


AMENDEMENT

C Défavorable
G  

présenté par

Mmes BILLON et ANTOINE, MM. Jean-Michel ARNAUD et BONNEAU, Mme de LA PROVÔTÉ, M. DELCROS, Mmes DEVÉSA, GACQUERRE, HERZOG et JACQUEMET, MM. LAFON et LAUGIER, Mme LOISIER, M. MENONVILLE, Mmes PATRU et PERROT, M. PILLEFER et Mmes ROMAGNY, SOLLOGOUB, TETUANUI et VERMEILLET


ARTICLE 2

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Après l’alinéa 3

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

…) Après le même troisième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé : 

« Par dérogation à l’alinéa précédent, l’action publique des crimes de meurtre ou d’assassinat, de tortures ou d’actes de barbaries, de viol et les délits d’agression sexuelles mentionnés à l’article 706-47 du présent code, lorsqu’ils sont commis sur des mineurs, se prescrit de soixante années révolues à compter de la majorité de ces derniers. » ;

Objet

La question de l’imprescriptibilité pénale des violences sexuelles sur mineurs divise profondément. Certains plaident pour une suppression totale des délais de prescription afin de garantir un accès à la justice aux victimes, tandis que d’autres s’y opposent fermement, invoquant son inefficacité ou encore la nécessité de respecter la hiérarchie des infractions et la préservation des principes du droit pénal.

Cet amendement propose donc une voie médiane en doublant le délai de prescription existant.

Les violences sexuelles sur enfants ont des conséquences psychologiques durables, qui empêchent souvent les victimes de porter plainte dans le délai imparti. Selon les données de la CIIVISE, 50 % des victimes d’inceste souffrent d’amnésie dissociative, un mécanisme de survie qui peut durer plusieurs décennies. Actuellement, une victime de viol survenu dans l’enfance peut porter plainte jusqu’à 48 ans. Cependant, de nombreux témoignages indiquent que certaines victimes ne retrouvent la mémoire ou ne sont en capacité de dénoncer les faits que bien plus tard. En 2023, 75 % des témoignages recueillis par la CIIVISE concernaient des faits prescrits.

Ces chiffres soulignent la nécessité de réévaluer les délais de prescription : ce n’est pas aux victimes de s’adapter au droit, mais au droit de s’adapter à leur processus de reconstruction.

Il convient par ailleurs de souligner qu’à l’échelle internationale, la tendance est à l’abolition ou à l’allongement des délais de prescription.

De nombreux pays ont déjà supprimé ou assoupli les délais de prescription pour les violences sexuelles sur mineurs :

       • La Suisse, les Pays-Bas, le Danemark et la Belgique ont voté l’imprescriptibilité des crimes sexuels sur mineurs.

       • Le Canada et le Royaume-Uni ont voté l’imprescriptibilité de toutes les infractions sexuelles, quel que soit l’âge de la victime.

       • En Espagne, le Congrès a approuvé en novembre 2024 une réforme du Code pénal visant à instaurer l’imprescriptibilité des délits sexuels graves contre les mineurs.

Au niveau européen :

       • La résolution 2230 du Conseil de l’Europe (2020) appelle à supprimer la prescription pour les violences sexuelles sur mineurs.

       • Une étude du Conseil de l’Europe (septembre 2023) souligne une tendance à la suppression ou à l’assouplissement des délais de prescription dans plusieurs pays.

       • L’avis du Comité de Lanzarote (juin 2024) définit la suppression de la prescription comme « un moyen efficace de garantir un délai suffisant pour engager des poursuites ».

Aujourd’hui, 18 des 43 États parties à la Convention de Lanzarote, soit 41 %, ne prévoient plus de prescription pour tout ou partie des violences sexuelles sur mineurs.

Dans un souci de cohérence, cet amendement prévoit également l’allongement du délai de prescription pour les crimes de meurtre, d’assassinat, de tortures ou d’actes de barbaries commis sur un mineur.



NB :La présente rectification porte sur la liste des signataires.