Proposition de loi Améliorer l'accès aux soins dans les territoires

Direction de la Séance

N°26

9 mai 2025

(1ère lecture)

(PROCÉDURE ACCÉLÉRÉE)

(n° 577 , 576 , 574)


AMENDEMENT

C Défavorable
G  

présenté par

Mmes SOUYRIS et PONCET MONGE, MM. BENARROCHE, Grégory BLANC et DANTEC, Mme de MARCO, MM. DOSSUS, FERNIQUE et GONTARD, Mme GUHL, MM. JADOT et MELLOULI, Mme OLLIVIER, M. SALMON et Mmes SENÉE et Mélanie VOGEL


ARTICLE 5

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Supprimer cet article.

Objet

L’article 5 de la proposition de loi envisage d’autoriser les médecins installé.e.s dans les zones sous denses à pratiquer des dépassements d’honoraires, c’est-à-dire revenir à des mesures qui, sur les vingt dernières années, n’ont prouvé leur efficacité qu’à un seul titre : celui de générer des effets d’aubaine. 

En effet, une telle disposition, présentée comme un levier d’attractivité pour les praticien.ne.s, créerait en réalité un risque majeur d’aggravation des inégalités d’accès aux soins. Les patientes et patients les moins favorisé.e.s financièrement disposent structurellement plus rarement de complémentaires santé couvrant les dépassements. L’instauration de tarifs supplémentaires se traduirait donc, à court terme, par un reste à charge accru pour les ménages les plus modestes, lesquels constituent déjà une part importante de la population concernée et présentent une morbidité souvent plus élevée que la moyenne nationale.

Par ailleurs, l’expérience des vingt dernières années démontre la faible efficacité des incitations financières sur la démographie médicale. L’association UFC Que Choisir relève que les dispositifs successifs – « option conventionnelle » de 2007, « options conventionnelles relatives à la démographie » de 2011, ou encore la bonification « santé solidarité territoriale » – n’ont déplacé qu’un nombre marginal de médecins tout en générant des effets d’aubaine substantiels. Ainsi, la majoration de 20 % des honoraires accordée en 2007 n’a abouti qu’à l’arrivée nette d’une cinquantaine de praticiens en dix ans, pour un coût public supérieur à soixante millions d’euros. De même, les aides instaurées en 2011 ont bénéficié à plus de deux mille médecins pour un coût de près de trente trois millions d’euros, alors que seuls dix pour cent d’entre eux étaient effectivement nouvellement installés dans les zones sous dotées.

Cette persistance d’une faible rentabilité sociale des mesures incitatives a conduit l’Assurance maladie, dans son bilan établi fin 2021, à constater l’inefficacité des contrats démographiques et de l’aide à l’installation, dispositifs pourtant dotés de près de quatre-vingt dix quatre millions d’euros entre 2017 et 2020. Moins de la moitié de ces contrats correspondaient à de véritables nouvelles implantations et la dégradation de l’offre de soins ne s’est pas infléchie. Autoriser les dépassements d’honoraires reviendrait dès lors à accroître encore les dépenses publiques et celles des complémentaires sans garantie d’un meilleur maillage médical.

Enfin, sur le plan symbolique comme sur le plan pratique, faire payer davantage les habitant.e.s des zones sous denses afin d’attirer de nouveaux médecins porterait atteinte au principe d’égalité devant la santé, consacré par le préambule de la Constitution de 1946 et l’article L1110-1 du code de la santé publique. La solidarité nationale ne saurait reposer sur une modulation des tarifs qui frappe précisément les territoires et les populations les plus vulnérables.

Pour toutes ces raisons – risque d’exclusion financière des patients, inefficacité démontrée des précédentes incitations et poids budgétaire injustifié – il est proposé de supprimer purement et simplement l’article 5.