Mercredi 8 janvier 2014
- Présidence de M. Daniel Raoul, président -Accès au financement bancaire des entreprises - Audition de Mme Jeanne-Marie Prost, médiatrice nationale du crédit
La commission auditionne Mme Jeanne-Marie Prost, Médiatrice nationale du crédit, sur l'accès au financement bancaire des entreprises, en particulier des TPE et des PME.
M. Daniel Raoul, président. - Avant de commencer, je vous souhaite une excellente année. L'automne a été chargé ; notre calendrier d'ici à février le sera également : nous examinerons le projet de loi de programmation sur la ville, ainsi que, fin janvier, le projet de loi consommation ; et nous examinerons en deuxième lecture le projet de loi pour l'accès au logement et un urbanisme rénové. Nous examinerons aussi en commission, avant l'interruption de mars, le texte sur l'agriculture.
Madame Jeanne-Marie Prost, nous vous auditionnons sur l'accès au financement bancaire des entreprises. Nous vous avions déjà entendue en février 2013, après votre nomination au poste de Médiatrice nationale du crédit. La dégradation des conditions d'accès des très petites entreprises (TPE) et des petites et moyennes entreprises (PME) aux financements bancaires de court terme, la frilosité des banques et l'attitude de la Banque de France constituent un sujet qui nous préoccupe et que nous avons déjà évoqué en commission, à l'initiative notamment d'Alain Chatillon. En outre, nos collègues constatent régulièrement les difficultés du recyclage local de l'épargne locale.
Mme Bernadette Bourzai. - Absolument !
M. Daniel Raoul, président. - Les entreprises souffrent d'un allongement des délais de paiement (la loi sur la consommation en traitera). L'été dernier, plus de 42 % d'entre elles disaient avoir rencontré des difficultés de trésorerie au cours des six derniers mois et près de 30 % anticipaient une dégradation de leur situation de trésorerie. Les secteurs les plus touchés sont ceux du tourisme, du bâtiment, et des productions à forte saisonnalité. Certes l'action de la Banque publique d'investissement (BPI) doit être saluée mais elle ne suffit pas. Une action urgente auprès des établissements bancaires est nécessaire pour qu'ils soutiennent les PME par l'octroi de financements de court terme. L'attitude excessivement prudente de la Banque de France, à travers ses cotations et ses directives transmises aux banques, n'incite pas celles-ci à soutenir les entreprises.
Vous avez été, en outre, fin novembre 2013, chargée par le ministre de l'économie et des finances d'une mission sur le financement des TPE, pour étudier leurs fonds propres, leurs besoins de trésorerie. Quelle est votre analyse de la situation ? Quelles pistes proposez-vous pour améliorer l'accès au crédit des TPE ?
En Pays de Loire, je signale que nous avons un accord entre la région et un pool bancaire, pour financer la trésorerie des entreprises saines qui rencontrent un problème ponctuel.
Mme Jeanne-Marie Prost, Médiatrice nationale du crédit. - Un an après ma nomination, cette audition est l'occasion de faire le point. J'effectue de nombreux déplacements : une vingtaine l'an passé. Je rencontre les banques et les assureurs-crédit, les partenaires sociaux professionnels, les chambres des métiers, les fédérations professionnelles, les acteurs publics. Je suis attachée à ce travail de terrain qui constitue une spécificité de ma mission : en effet, 80 % des entreprises qui nous sollicitent sont des entreprises de moins de dix salariés.
Selon les chiffres de la Banque de France, la distribution de crédits aux petites et moyennes entreprises, l'an passé, dans une conjoncture économique atone, a été faible : sur un an, l'encours de crédits n'a augmenté que de 0,5 % à fin octobre 2013. A ce sujet, attention à la confusion : toutes entreprises confondues, l'évolution du crédit bancaire aux entreprises a été négative car la désintermédiation est en marche, les grandes entreprises se finançant de plus en plus par le marché. Mais ce n'est pas le cas pour les PME : il est essentiel que lors des prochaines années, avec le nouveau cadre prudentiel, les banques continuent à les financer.
La courbe d'évolution du crédit aux PME est plate, mais, comme le montrent les collectes de statistiques spécifiques que la Banque de France consacre désormais aux TPE, les encours aux TPE ont augmenté de 2,3 %. Cela peut surprendre. Mais la situation des TPE est très hétérogène et leur taux de défaillances et de sinistralité augmente.
Le coût du crédit n'est pas excessif en France. Tant mieux pour les entreprises mais les banques se voient contraintes d'être plus exigeantes sur les garanties. Notre système bancaire fournit du crédit aux entreprises à des coûts très satisfaisants : c'est une de ses particularités.
Les cotations de la Banque de France, qui connaît bien les PME et dont le réseau de proximité s'est très facilement coulé dans la nouvelle mission de médiation du crédit, confirment que la situation de ces entreprises s'est dégradée l'an dernier.
Cela se lit dans la répartition de l'encours des crédits aux PME par classes de risque : la part des PME les mieux cotées a reculé d'un point. Les banques m'ont indiqué qu'elles n'avaient pas donné d'instructions pour réduire les crédits en cas de changement de cotation. Sans doute sont-elles néanmoins plus sourcilleuses sur les garanties.
Les enquêtes d'opinion relatives à l'accès au crédit sont contradictoires. La Banque de France réalise à ce titre des enquêtes trimestrielles auprès de 3 000 PME : il apparaît que 90 % de leurs demandes de crédits d'investissement ont été satisfaites ainsi que 75 % des demandes de crédits de trésorerie, soit les taux d'acceptation les plus hauts depuis 2012. Ces chiffres laissent cependant perplexes. Selon les enquêtes de la BPI ou de l'Ifop réalisée pour le compte de la CGPME, beaucoup de PME déclarent rencontrer des difficultés de trésorerie ou d'accès au crédit. S'agit-il d'autocensure ? Beaucoup de chefs d'entreprise déclarent s'autocensurer ; mais le phénomène est difficile à estimer. Parfois la situation des entreprises est tellement dégradée qu'aucun crédit ne les sauverait : dans un tel cas l'autocensure est justifiée, bien sûr.
Comme je vous l'ai indiqué, nous nous appuyons sur le réseau de la Banque de France. J'ai souhaité que la médiation soit réactive, visible, disponible, proactive, bien que, naturellement, nous ne puissions pas nous autosaisir. Le nombre des dossiers déposés a augmenté de près de 8 % en 2013 alors qu'il diminuait lentement depuis 2010, après avoir été très élevé - une lame de fond, avec plus de 16 000 dossiers ! - en 2009. Toutefois le nombre de dossiers que nous avons pu accepter augmente moins vite. En effet, certaines entreprises ont un bilan tellement dégradé que nous ne pouvons que leur conseiller de s'adresser sans perdre de temps au tribunal de commerce. La Médiation du crédit intervient en amont des procédures amiables et collectives. Il serait en effet contreproductif de mener une médiation en parallèle à une procédure judiciaire : cela risquerait de créer des distorsions de concurrence et de faire courir des risques à d'autres créanciers. C'est une question de déontologie.
Le ministre de l'Économie et des finances m'a confié une mission sur le financement des TPE, en tant que présidente de l'Observatoire du financement des entreprises. Celui-ci réunit non seulement des experts de la Banque de France, de l'Insee, de Bercy, de la BPI, mais aussi des représentants des fédérations patronales, comme l'Union professionnelle artisanale (UPA) ou la CGPME. La sinistralité des TPE est plus importante que celle des PME. Les défaillances des TPE ont augmenté en un an de 5,6 %, contre 1 % pour les PME. La sinistralité des auto-entrepreneurs est élevée car beaucoup d'entre eux ne sont pas préparés au métier d'entrepreneurs et doivent de ce fait cesser leur activité un ou deux ans après avoir démarré.
Comment se passe le dialogue entre les TPE et les banques ? Les petites entreprises sont-elles logées à la même enseigne que les grandes ? Cette clientèle est souvent traitée par les agences locales et non les centres d'affaires, à la différence des PME. Cela n'est pas irrationnel : le chef d'entreprise a dans la même agence son compte privé, peut-être des contrats d'assurance, des produits d'épargne... Cette réflexion sur les problèmes spécifiques des TPE avait déjà été engagée dans le cadre de l'Observatoire du financement des entreprises. En 2011, mon prédécesseur Gérard Rameix avait préconisé dans un rapport consacré au financement des TPE que les banques soient plus réactives et réduisent les délais de traitement. La Banque de France avait parallèlement mis en place un outil de suivi des crédits aux TPE. Depuis deux ans une évolution a été amorcée, notamment grâce à la mobilisation des experts-comptables. Ceux-ci sont des tiers de confiance de la Médiation et j'ai renouvelé la convention avec les experts-comptables afin qu'ils accompagnent leurs clients dans les démarches. Plusieurs réseaux bancaires, notamment mutualistes, ont signé des conventions et se sont engagés à répondre dans un délai de quinze jours aux petits dossiers qui portent le visa de l'expert-comptable. En outre, la BPI, a consacré 150 millions d'euros, sur les 850 millions qu'elle a alloués au préfinancement du crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE), à des dossiers de moins de 15 000 euros sur lesquels elle ne gagne pas d'argent. Ce financement permet un soutien de la trésorerie. De même les dispositifs de mobilisation des créances sur les marchés publics et la ligne de créances « Avances plus » ont connu une progression très rapide depuis un an. Dans les secteurs du bâtiment, du petit commerce, des cafés-hôtels-restaurants ou des services aux particuliers, cette mobilisation rapide de financements constitue un soutien appréciable.
Enfin, les situations sont très hétérogènes : le nombre des saisines a fortement augmenté, avec de fortes disparités selon les régions, sans qu'il y ait toujours de lien avec l'attitude des banques : ainsi dans une région du centre de la France, la distribution de crédit apparaît dynamique alors que mes interlocuteurs ont souligné les difficultés des PME.
Nous sommes à l'écoute des territoires. Nous cherchons à prévenir les difficultés des entreprises : les outils existent mais, malheureusement, les chefs d'entreprise nous saisissent quand « la maison brûle ». Notre taux de succès est stable à 57 %. Les banques que nous contactons jouent le jeu ; encore faut-il que les chefs d'entreprises nous sollicitent...
M. Martial Bourquin, président du groupe d'études sur l'industrie. - Vous soulignez le décalage entre la réalité objective et la perception de la situation, néanmoins les entreprises se plaignent de manière récurrente de difficultés d'accès au crédit. Beaucoup négocient âprement avec leurs banques. Elles sont handicapées par la logique draconienne du système de cotation de la Banque de France qui met l'accent sur le passé. Comme élus de terrain, nous constatons les difficultés des entreprises, car elles s'adressent d'abord au maire. Les banques ne sont pas les seules en cause : les assureurs-crédit classent systématiquement certaines activités en zone rouge, comme l'industrie automobile, ce qui pénalise les sous-traitants. Le problème existe bel et bien hélas : le sous-préfet de mon arrondissement partage mon inquiétude.
Les entreprises s'autocensurent, mais il s'agit parfois d'entreprises saines. Je connais des entreprises qui se sont vu refuser un crédit et dont l'investissement, financé ensuite grâce par l'Agence française de développement, s'est révélé excellent. Les ratios de la Banque de France, les calculs des banques procèdent d'une logique purement financière et ne tiennent pas compte des spécificités de l'industrie : des crédits sont refusés pour des considérations financières de court terme alors que les investissements industriels doivent s'évaluer sur la durée. Il faudrait que l'Observatoire du financement des entreprises s'interroge sur le système de cotation de la Banque de France, très pénalisant pour les entreprises.
M. Alain Chatillon. - Le grand virage a été Bâle III, quand les banques ont été tenues de doubler leurs fonds propres. Heureusement qu'Oseo a pris le relai...
L'accueil des clients dans les agences des banques a changé : le directeur d'agence locale ne joue plus que le rôle de boîte aux lettres entre le client et les différents échelons de sa hiérarchie. L'instruction des dossiers de financement relève du parcours du combattant. Les procédures sont trop centralisées. Il devient impossible pour un artisan ou un commerçant de joindre son conseiller par téléphone, il est renvoyé vers des standards téléphoniques anonymes. Les cotations de la Banque de France se fondent sur le passé, sans tenir compte du présent. Enfin il convient de réorienter l'épargne vers les PME. J'ai été vice-président du conseil régional de la région Midi-Pyrénées. A l'époque Sofaris apportait des garanties de financement.
Il y a deux ans, lorsque la BCE a prêté 1,5 à 2 milliards d'euros aux banques à 0,8 %, celles-ci les ont replacés tout de suite à la BCE à 1,8 %. Ce qui compte, c'est le différentiel. En tant que président d'un pôle de compétitivité à cheval sur deux régions - Aquitaine et Midi-Pyrénées - et regroupant 320 entreprises, je suis confronté aux problématiques spécifiques des crédits de campagne, dans le domaine agro-alimentaire : il ne faut pas que les banques attendent dix mois pour donner une réponse ! Il y a aussi le problème des énarques, qui, en province comme à Paris, restent dans leurs bureaux, où ils tiennent des réunions « décentralisées » au lieu de visiter les entreprises. Dernière remarque enfin sur les collectivités territoriales, qui représentent 70 % de l'investissement local : Dexia, qui prêtait 17 milliards d'euros, n'a pas été remplacée ; la Poste et la Caisse des dépôts et consignations (CDC) n'arrivent qu'à 6 milliards. On sait ce que cela veut dire pour les petites entreprises de travaux publics. Je suis sur la même ligne que Martial Bourquin. Il y a une différence entre ce que vous ressentez dans les bureaux à Paris et ce que nous percevons sur le terrain. Merci de vous délocaliser un peu.
M. Daniel Raoul, président. - C'est comme en navigation, où il faut choisir entre un cap moins serré mais qui fait aller moins vite ou aller plus vite mais de manière plus risquée : les banques ne pourraient-elles pas augmenter leurs marges en prenant un peu plus de risque ?
M. Yannick Vaugrenard. - Nous croyons être sortis de la crise de 2008 : en réalité, nous sommes en plein dedans. La moitié des transactions boursières se font sur l'économie virtuelle et non réelle. La bulle spéculative est à nos portes. Le décalage entre vos chiffres et les réalités décrites par nos interlocuteurs est flagrant : si 80 % des crédits à l'investissement et 75 % des crédits de trésorerie sont satisfaits, vous constatez pourtant une hausse de 8 % des saisines du médiateur : c'est paradoxal. La nouvelle manière d'exercer le métier de banquier se caractérise, comme le souligne Alain Châtillon, par une dépersonnalisation du contact entre acteur économique et la banque. L'accord ou le désaccord est trop souvent fondé sur un critère purement mathématique, ce qui rompt la relation de confiance entre l'artisan, le commerçant et son banquier. Les taux, dites-vous, sont aujourd'hui intéressants, en comparaison avec ceux en vigueurs chez nos voisins ; une évolution permettrait-elle alors d'élargir les possibilités de crédit ?
M. Bruno Retailleau. - Vous faites des déplacements, c'est bien. Mais dans nos départements, nous n'avons plus, à propos de la médiation du crédit, ni image ni son. Les chefs d'entreprise, dans leurs difficultés, n'entendent pas parler de vous ! Nous assistons à une rupture entre micro et macro-économie, illustrée d'ailleurs par une bourse qui va bien et une économie réelle qui va mal. J'ai une proposition à vous faire sur la cotation de la Banque de France au fichier bancaire des entreprises (Fiben) : en 2010, au moment où la reprise laissait entrevoir des perspectives encourageantes, j'avais rendu un rapport au ministre, dans lequel je soulignais notamment qu'une décote de quelques points des entreprises à cause d'un passé récent catastrophique aurait des conséquences désastreuses. Le gouverneur de la banque de France Christian Noyer avait alors demandé à tous les directeurs de ses succursales de recevoir les chefs d'entreprise avant toute décote, afin d'évaluer non seulement leurs chiffres, mais aussi leurs projets et leurs perspectives. Je vous rappelle que cette cotation détermine aussi les conditions des assureurs et de l'affacturage.
Mme Jeanne-Marie Prost. - Je comprends votre préoccupation sur la cotation. La déportation des encours que nous avons constatée va dans le même sens. Il ne faut pas que la décote conduise les banques à restreindre le crédit. J'évoquerai ce sujet avec Christian Noyer, c'est dans mon rôle. Il est toujours difficile de juger l'activité d'un réseau d'une centaine de directeurs comme celui de la Banque de France. Selon les lieux, selon le directeur, la médiation est très active ou elle l'est moins. J'ai fait vingt déplacements entre avril et décembre, soit deux à trois par mois. Vous reprochez aux énarques de rester dans leur bureau parisien : ce n'est pas mon cas. Je suis en accord avec vous sur les problèmes que posent les relations entre les banques et les chefs d'entreprise. À chaque réunion que je fais avec les banques et les assureurs-crédit - même si ces derniers ont des problématiques spécifiques - je leur dis la même chose : les chefs d'entreprise ont le sentiment que vous êtes des « boîtes aux lettres » ; si vous voulez leur dire non, dites-le au lieu de laisser vos interlocuteurs dans l'attente. Les banquiers le reconnaissent et me donnent raison. Certains réseaux ont pris conscience de la situation spécifique des TPE.
Il y a un avant et un après Bâle III. Avant, l'accès au crédit était très ouvert : dans une réunion avec des chambres consulaires, un chef d'entreprise m'a même parlé d' « open bar » !
M. Alain Chatillon. - Leur bilan de ces années n'est pas si mauvais, si l'on excepte les investissements en Italie et Grèce.
Mme Jeanne-Marie Prost. - Le monde a changé depuis 2008 ; ce qu'il faut, c'est que nos réseaux bancaires conservent la capacité à distribuer du crédit. Sur la question des PME industrielles, je pilote depuis trois mois un groupe de travail sur le financement de l'industrie, rassemblant dans le cadre du Conseil national de l'industrie l'administration, les fédérations patronales et les syndicats, mais aussi des chefs d'entreprise. Il reste en effet beaucoup à faire sur ce problème spécifique, sur lequel nous manquons d'éclairage. J'espère que ce groupe de travail permettra de progresser sur ce sujet.
Concernant l'attitude des banques, j'ai beaucoup négocié dans le cadre de dossiers en médiation, et je connais bien leurs réactions : dans 57 % des cas, nous parvenons à les convaincre de regarder l'avenir et pas seulement le passé. J'ai bien entendu votre message : il faut pousser les banques trop prudentes. Je continuerai mes efforts pour améliorer notre visibilité mais il ne faut pas que les chefs d'entreprises hésitent à nous saisir. Certes, notre positionnement n'est pas extrêmement médiatique...
M. Bruno Retailleau. - S'il y avait une conférence de presse par département, cela serait déjà bien.
Mme Jeanne-Marie Prost. - Je m'adresse à l'occasion de chacun de mes déplacements à la presse quotidienne régionale (PQR) ou à la télévision régionale : tous les chefs de TPE ne lisent pas Les Échos...
La Médiation s'appuie aussi beaucoup sur ses partenaires tiers de confiance, notamment sur les organismes consulaires. Toutefois certains d'entre eux se proposent de faire eux-mêmes de la médiation bancaire. Je leur fais remarquer que nous nous appuyons sur l'accord de place de la Médiation par lequel les banques s'obligent à participer à nos réunions et à maintenir le montant de leurs concours pendant la durée de la négociation : c'est un outil irremplaçable.
M. Daniel Raoul, président. - Je vous remercie de ces précisions. Je crois que nous vous reverrons à l'issue de vos travaux sur le financement des TPE.
Mise sur le marché et brevetabilité des semences et obtentions végétales - Examen du rapport et du texte de la commission
La commission examine le rapport et le texte de la commission sur la proposition de résolution européenne n° 218 (2013-2014) présentée par MM. Jean Bizet et Richard Yung, en application de l'article 73 quater du Règlement, sur la mise sur le marché et la brevetabilité des semences et obtentions végétales.
M. Daniel Raoul, président. - Nous accueillons Richard Yung, co-auteur de la proposition de résolution européenne, sur laquelle nous entendons d'abord la rapporteure, Bernadette Bourzai.
Mme Bernadette Bourzai, rapporteure. - Le secteur des semences, premier maillon de la chaîne de production végétale, avec un chiffre d'affaires entre 2,6 et 2,9 milliards d'euros par an, employant 9 000 personnes, dont un quart dans la recherche, joue un rôle important en France, qui est le troisième exportateur mondial. A côté des grandes entreprises, il existe des petits sélectionneurs qui sont essentiels, notamment sur les marchés de niche. La proposition de règlement de la Commission européenne sur la commercialisation des semences a été présentée dans le cadre du paquet sanitaire de mai 2013, qui visait à regrouper plus de 70 textes en cinq règlements. Il ne traite pas des questions de propriété intellectuelle sur le végétal, mais celles-ci structurent l'économie de la filière semencière. C'est pourquoi la proposition de résolution examine les nouvelles règles présentées par la Commission européenne pour la production et la mise à disposition du marché des semences, mais va également plus loin en rappelant l'attachement au système de propriété intellectuelle particulier sur les semences qui repose sur le certificat d'obtention végétale (COV), plus ouvert que le brevet. Un tel rappel est nécessaire à l'heure où le brevet grignote du terrain : l'Office européen des brevets (OEB) attribue ainsi des brevets sur des gènes ou sur des plantes présentant des caractéristiques particulières - la facilité de coupe pour le brocoli, par exemple - respectant la lettre des textes mais pas leur esprit, et contredisant le principe de non brevetabilité du vivant.
La commercialisation des semences, rappelons-le, n'est autorisée que si celles-ci sont enregistrées au catalogue officiel des espèces et variétés. Une variété ne peut être enregistrée qu'après des tests montrant qu'elle est homogène, stable et distincte de celles existant déjà ; et, sauf pour les variétés fruitières ou potagères, si elle a été soumise à un test de valeur agronomique et technologique (VAT). Les semences vendues doivent aussi faire l'objet d'une certification officielle qui en garantit la qualité aux agriculteurs-utilisateurs.
La nouvelle réglementation européenne adapte sans les changer ces deux principes et harmonise les dispositions sectorielles dans un règlement unique, qui concerne même le matériel forestier de reproduction. Alors que l'enregistrement des semences se fait aujourd'hui au niveau des États membres, le catalogue commun des espèces et variétés n'étant qu'une compilation des catalogues nationaux, les opérateurs pourront demain obtenir une inscription directe au catalogue européen. Actuellement chargé de gérer seulement le système de protection des obtentions végétales, l'Office communautaire des variétés végétales (OCVV), rebaptisé Agence européenne des variétés végétales (EAPV) pourrait enregistrer des demandes d'inscription au catalogue et les instruire. Une même variété aurait une dénomination unique dans l'ensemble de l'Union.
La durée de validité des inscriptions au catalogue passerait de dix à trente ans, et de cinq à trente ans pour les renouvellements d'inscription. Cela ne fait pas obstacle à un retrait du catalogue avant terme, notamment lorsque personne n'effectue la maintenance de la variété. En outre, les critères permettant d'estimer la VAT des variétés nouvelles seraient enrichis de critères environnementaux : sensibilité moindre aux organismes nuisibles, meilleure adaptation aux conditions climatiques ou moindre consommation de ressources. Pour alléger les tâches des autorités d'enregistrement, la réalisation de l'examen technique préalable à l'enregistrement des nouvelles variétés, notamment les tests de DHS, seraient confiés aux demandeurs.
Les dérogations au cadre général de l'enregistrement des semences, pour le maintien d'une biodiversité cultivée, seraient en outre plus larges qu'aujourd'hui : l'enregistrement ne serait pas exigé pour les matériels destinés uniquement à la conservation des ressources phytogénétiques ; les variétés traditionnelles agricoles pourraient être enregistrées sans tests DHS, sur la base d'une simple description officielle reconnue ; des matériels hétérogènes, ne pouvant prétendre à une définition en tant que variété, pourraient être enregistrés pour préserver la diversité biologique des espèces ; la Commission européenne pourrait édicter des règles simplifiées par des actes délégués pour les matériels de niche ; afin de ne pas pénaliser les petits acteurs de la recherche variétale et les collectifs d'agriculteurs-sélectionneurs, les micro-entreprises seraient exonérées du paiement des redevances lors de l'enregistrement. Ces dérogations visent à donner un cadre légal aux pratiques alternatives des agriculteurs.
La proposition de résolution présentée par Jean Bizet et Richard Yung valide globalement le projet de règlement avec quelques réserves : la durée d'inscription au catalogue resterait fixée à dix ans, et cinq ans pour les renouvellements, considérant qu'un délai de trente ans inciterait moins à l'innovation variétale et ralentirait le renouvellement variétal ; les possibilités d'établir des dérogations aux règles d'enregistrement des semences et de certification pour les opérateurs non professionnels seraient restreintes ; la VAT des variétés nouvelles candidates à l'inscription au catalogue ne serait pas définie directement au niveau européen mais national, les caractéristiques agricoles et climatiques de chaque État-membre, voire de chaque région au sein d'un même État-membre, devant être prises en compte ; les matériels forestiers de reproduction seraient exclus du champ du règlement ; enfin, une réserve plus générale porte sur l'ampleur du recours à des actes délégués pour compléter ou adapter le règlement de base, ce qui donne un pouvoir excessif à la Commission européenne.
Partageant globalement l'appréciation des auteurs de la proposition de résolution, je suggère toutefois de ne pas prendre position sur la question de la durée de validité des enregistrements au catalogue : une inscription pour une durée longue évite de multiplier les démarches administratives et les agriculteurs souhaitant utiliser une variété ancienne ne seront pas pénalisés par une disparition prématurée de celle-ci du catalogue. La proposition de résolution me paraît également trop sévère sur les dérogations au cadre général, justifiées pour les matériels de reproduction qui ne relèvent pas du cadre normé des semences certifiées. Les mélanges, les variétés dites population, les échanges de semences entre non professionnels à des fins de conservation de la biodiversité cultivée me semblent très utiles. Il faut organiser la coexistence d'une agriculture de masse, assez standardisée, et d'une agriculture plus rustique et plus diversifiée qui, d'ailleurs, ne concerne pas les mêmes territoires. Enfin, la proposition de résolution pourrait exiger que les tests sur les variétés végétales soient effectués dans le cadre d'un service public de l'enregistrement et de la certification, sans trop déléguer de tâches aux industriels eux-mêmes, faute de quoi les résultats des tests pourraient être suspectés de partialité. J'aurai donc des amendements sur ces points.
La seconde partie de la proposition de résolution concerne la propriété intellectuelle sur les semences. Les variétés végétales obtenues par les procédures de sélection classiques sont couvertes par le COV, dispositif original qui ne bloque pas l'arbre de progression technologique : un obtenteur peut utiliser tout le matériel protégé pour créer de nouvelles variétés, qu'il pourra à son tour protéger par un COV. L'article 53 de la convention sur le brevet européen comme l'article 4 de la directive de 1998 sur la protection juridique des inventions biotechnologiques excluent de la brevetabilité les variétés végétales ou les races animales, ainsi que les procédés essentiellement biologiques d'obtention de végétaux ou d'animaux, c'est-à-dire les méthodes d'obtention des végétaux consistant en des phénomènes naturels, tels que le croisement par voie sexuée et la sélection. Sont également exclues de la brevetabilité les techniques modernes d'assistance à l'amélioration des plantes, comme l'utilisation de marqueurs moléculaires génétiques.
Mais cette exclusion de la brevetabilité est loin de couvrir l'ensemble du secteur végétal : les inventions biotechnologiques peuvent en faire l'objet, dès lors qu'elles répondent aux trois conditions générales du droit des brevets, nouveauté, activité inventive du demandeur et application industrielle. Sont ainsi brevetables les « inventions ayant pour objet un procédé microbiologique, ou d'autres procédés techniques, ou un produit obtenu par ces procédés », soit les plantes obtenues par transgénèse, mutagénèse ou fusion cellulaire, les gènes et séquences de gènes, même s'ils existent à l'état naturel, lorsqu'ils sont produits ou isolés à partir d'un procédé technique qui ne résulte pas directement d'un croisement classique.
Sont donc brevetables les inventions ne portant pas sur une espèce particulière de plante : l'OEB a ainsi pu délivrer un brevet concernant un type de brocoli spécialement adapté pour la facilité de la moisson, qui ne couvre pas une variété de brocoli mais une caractéristique technique susceptible de s'appliquer à toute une série de variétés végétales. Une autre affaire concerne la tomate. L'attribution des deux brevets est contestée et pose une question juridique de fond sur laquelle la grande chambre de recours de l'OEB devrait se prononcer à la mi-2014. Les plantes obtenues par des procédés non brevetables sont-elles susceptibles de bénéficier d'une protection par un brevet européen ? Dans l'attente de la réponse, l'OEB a suspendu l'instruction de toutes les demandes de brevets portant sur des plantes obtenues par un procédé essentiellement biologique.
Ce grignotage du brevet dans le secteur végétal suscite un émoi certain, qui explique cette seconde partie de la proposition de résolution européenne. Nous y rappelons notre attachement au COV, et souhaitons circonscrire davantage le brevet, comme l'avait fait le Parlement européen par une résolution en 2012. Nous tirons à notre tour le signal d'alarme. Le brevetage de gènes natifs constitue une réelle menace sur l'innovation variétale, les entreprises créant des variétés nouvelles par voie conventionnelle finissant par dépendre systématiquement de brevets et ne bénéficiant plus en pratique de l'exception du sélectionneur du système du COV. Il existe là un véritable risque de verrouillage de l'innovation variétale, qui conduirait à une concentration de l'industrie semencière. L'information des sélectionneurs sur les brevets déposés par d'autres est mal assurée, ils peuvent devenir des contrefacteurs sans même le savoir ! Nous souhaitons que cette information conditionne la recevabilité des actions en contrefaçon. Je propose d'être encore plus explicite et de demander clairement de circonscrire davantage la notion de contrefaçon en matière de propriété intellectuelle dans le secteur végétal, pour éviter les situations absurdes.
Enfin, la résolution suggère d'exclure explicitement la brevetabilité de plantes issues de précédés essentiellement biologiques ainsi que des gènes natifs. Je partage pleinement ce refus d'appropriation étendue sur le secteur végétal. Si des droits de propriété intellectuelle doivent être accordés afin d'encourager la recherche, le risque est grand, à l'inverse, de la décourager si l'on pousse le curseur de la protection trop loin. Je vous recommande donc d'adopter la proposition de résolution qui nous est soumise, assortie de quelques amendements.
M. Richard Yung. - Le COV est une invention française, prise dans une confrontation entre pays anglo-saxons et pays latins. Les États-Unis, par exemple, protègent par le brevet et ne reconnaissent pas les COV. Et ils gagnent des positions fortes ! Or nous avons une grosse industrie des semences.
M. Daniel Raoul, président. - Nous sommes le premier exportateur européen de semences.
M. Richard Yung. - Nous devons donc nous défendre. L'articulation entre brevet et COV est complexe : il peut y avoir dans un COV un élément breveté, suite à une opération humaine. Dans ce cas, qu'est-ce qui protège : COV ou brevet ? Si c'est le brevet, la protection se renouvelle-t-elle à chaque génération de plante ? C'est un débat qui a conduit à suspendre l'octroi de brevets dans le domaine végétal. L'OEB rassemble 37 pays, dont certains ne veulent pas suivre cette voie.
La Commission européenne propose une durée d'inscription au catalogue de trente ans alors que les brevets durent vingt ans : c'est très long. L'argument pour, c'est que cela augmente la stabilité ; l'argument contre, que cela octroie un monopole pour une durée trop longue ; c'est aussi ce que pense le gouvernement. Je suis enfin tout à fait d'accord avec vous pour ne pas déléguer les tests DHS aux obtenteurs, qui seraient alors juge et partie.
M. Daniel Raoul, président. - C'est le même problème que pour les médicaments.
M. Richard Yung. - En France, nous avons les services publics qu'il faut pour faire ces tests, comme le Groupement national interprofessionnel des semences et plants (Gnis).
M. Daniel Raoul, président. - Oui, nous avons des outils remarquables tels que l'Institut national de la recherche agronomique (Inra), la Station nationale d'essai de semences (Snes), le Gnis, le groupe d'étude et de contrôle des variétés et des semences (Geves). Cela pourrait aussi être confié à l'Office communautaire des variétés végétales (OCVV).
M. Joël Labbé. - Ce texte n'apporte pas de réponses satisfaisantes aux problématiques des semences de ferme et des semences paysannes. La protection juridique ne doit pas entraver l'innovation in situ ayant pour objectif l'adaptation aux terroirs et au changement climatique : échanges réguliers de petites quantités de semences entre agriculteurs et multiplications successives dans chaque terroir, pour fixer la variété. Les variétés du domaine public libres de tout droit de propriété intellectuelle devraient être exemptées d'enregistrement. Sur les variétés à faible diffusion, dont parfois quelques exemplaires seulement subsistent, comment amortir le coût et la bureaucratie d'un enregistrement au catalogue ? Ces variétés pourraient disparaître. Le matériel hétérogène, dont la diffusion doit permettre aux cultures de disposer d'une plus grande diversité variétale, et le matériel de niche ne doivent plus être brevetables. C'est un service public indépendant des obtenteurs qui doit être chargé du contrôle. Il faut protéger les agriculteurs contre la présence fortuite d'éléments brevetés dans ses cultures, résultant de flux de pollen combinés à l'octroi de brevet sur des gènes naturellement présents dans ses plantes. Aujourd'hui la récolte peut être saisie par l'obtenteur ! C'est inacceptable.
Mme Bernadette Bourzai, rapporteure. - L'amendement n° 12 propose que l'enregistrement et la certification des semences relèvent d'une mission de service public, garantissant la confiance des utilisateurs.
M. Joël Labbé. - Il satisfait mon amendement n° 4 que je retire.
L'amendement n° 12 est adopté. L'amendement n° 4 est retiré.
Mme Bernadette Bourzai, rapporteure. - Je préfère ne pas prendre position sur la durée proposée par la Commission, de trente ans. Je signale que le COV est déjà valable pendant vingt-cinq ans - et trente ans pour les pommes de terre. Nous conserverons ainsi des variétés anciennes au catalogue. C'est l'objet de l'amendement n° 13.
M. Joël Labbé. - Mon amendement n° 5 va dans le même sens. Je me félicite en effet de cet allongement.
L'amendement n° 13 est adopté. L'amendement n° 5 devient sans objet.
Mme Bernadette Bourzai, rapporteure. - L'amendement n° 6, saluant les dérogations pour les opérateurs non professionnels procédant à des échanges de semences issues de la sélection paysanne, appuie le nouveau règlement européen qui les ouvre davantage, et s'oppose à la proposition de résolution qui veut les circonscrire. Il n'y a pas lieu d'opposer les deux systèmes : le système normé des semences certifiées, et le système moins normé. Libre au paysan de choisir son modèle. Avis favorable.
Mme Bernadette Bourzai, rapporteure. - L'amendement n° 11 interdit que les régimes dérogatoires applicables aux matériels de niche ou aux matériels hétérogènes profitent aux semences affectées par les droits de propriété intellectuelle. Cette rédaction obscurcit la compréhension et pourrait avoir des effets pervers. Avis défavorable.
L'amendement n° 11 n'est pas adopté.
Mme Bernadette Bourzai, rapporteure. - L'amendement n° 1 porte sur la contrefaçon. J'y suis défavorable, proposant moi-même un amendement sur le sujet en fin de texte.
M. Joël Labbé. - Cet amendement me semble intéressant. Je le voterai.
L'amendement n° 1 n'est pas adopté.
Mme Bernadette Bourzai, rapporteure. - L'amendement n° 7 est rédactionnel. Avis favorable.
Mme Bernadette Bourzai, rapporteure. - L'amendement n° 8 prévoit une obligation d'information des agriculteurs et des jardiniers sur la propriété intellectuelle portant sur les plantes. Je demande à Joël Labbé de le rectifier en supprimant la mention des jardiniers, qui doivent être traités différemment, car leur vocation n'est pas de vendre des produits.
M. Joël Labbé. - Les semences potagères peuvent faire l'objet d'une sélection in situ. C'est pourquoi nous avons ajouté les jardiniers.
M. Daniel Raoul, président. - Les jardiniers n'ont pas vocation à vendre. Ils peuvent échanger des semences, mais ce n'est pas à proprement parler du commerce.
M. Joël Labbé. - Soit.
L'amendement n° 8 ainsi rectifié est adopté.
Mme Bernadette Bourzai, rapporteure. - L'amendement n° 2 rappelle une position philosophique hostile à la brevetabilité des plantes issues des processus classiques de sélection. Cette idée, sous-jacente aux alinéas précédents, gagnerait à être exprimée plus clairement : avis favorable.
Mme Bernadette Bourzai, rapporteure. - L'amendement n° 9 concerne également les jardiniers. Je demande qu'il soit rectifié comme l'a été l'amendement n° 8.
L'amendement n° 9 ainsi rectifié est adopté.
Mme Bernadette Bourzai, rapporteure. - Mon amendement n° 14 vise à ce que la notion de contrefaçon en matière de semences et plants soit définie de manière plus circonscrite car il y a des malentendus sur cette notion. Le rapporteur de la loi d'avenir de l'agriculture à l'Assemblée nationale, M. Germinal Peiro, a d'ailleurs déposé un amendement en ce sens.
M. Richard Yung. - Comment définir cette notion de manière plus circonscrite ? Il existe des principes généraux et, pour une vingtaine de variétés, des accords entre les obtenteurs et les grandes fédérations agricoles. Mais quid des autres variétés ? Grâce au privilège de l'agriculteur, les cultivateurs peuvent réutiliser une partie des semences dans des proportions raisonnables. Pour le reste, ils doivent payer, mais ne le font pas puisqu'il n'y a aucun accord. Ils ne sont pas poursuivis, mais craignent de l'être un jour.
M. Daniel Raoul, président. - C'est le débat sur la contribution volontaire obligatoire (CVO). Il y a là un vrai problème. Si les semences sont utilisées non seulement dans la ferme mais aussi pour nourrir du bétail qui sera ensuite mis sur le marché, il y a concurrence déloyale entre ceux qui paieront la CVO et les autres.
M. Bruno Sido. - Réutiliser ce qu'on a récolté, comment cela peut-il être une fraude ?
M. Daniel Raoul, président. - L'idéal serait d'arriver à un accord comparable à celui qui a été passé sur le blé tendre.
Mme Bernadette Bourzai, rapporteure. - Adoptons cet amendement en attendant le débat sur la loi d'avenir de l'agriculture.
M. Bruno Sido. - Pour le colza, on ne peut plus acheter de produit pour traiter les semences. Il est donc impossible de semer son propre colza. La même chose se passera un jour ou l'autre pour les céréales.
M. Daniel Raoul, président. - Pas s'il y a un accord, comme sur le blé tendre. Un tel accord coûte moins cher aux agriculteurs.
M. Bruno Sido. - Pourquoi ne pas remplacer « circonscrite » par « restrictive » ?
Mme Bernadette Bourzai, rapporteure. - Car le mot « restrictive » rendrait la phrase ambiguë.
M. Joël Labbé. - L'amendement pose la question de la présence fortuite.
M. Daniel Raoul, président. - C'est aussi le problème des OGM.
Mme Bernadette Bourzai, rapporteure. - L'amendement de M. Germinal Peiro propose que la protection de la propriété intellectuelle « ne s'applique pas en cas de présence fortuite ou accidentelle d'une information génétique brevetée dans des semences, du matériel de multiplication des végétaux, des plantes ou des parties de plantes. »
M. Joël Labbé. - Nous soutenons cet amendement.
M. Daniel Raoul, président. - Il y a un vrai problème : certains utilisent des OGM de mauvaise foi, y compris dans les fromages !
L'amendement n° 14 est adopté. L'amendement n° 10 est retiré.
Mme Bernadette Bourzai, rapporteure. - L'amendement n° 3 porte sur les risques de l'accord commercial entre l'Europe et les États-Unis en cours de discussion. Je demande le retrait : c'est une question importante mais qui est ici au minimum prématurée. Avis défavorable.
M. Joël Labbé. - Pour nous, c'est important et nous voterons l'amendement.
L'amendement n° 3 n'est pas adopté.
La proposition de résolution européenne, modifiée, est adoptée.
Les avis et les amendements adoptés sont repris dans le tableau ci-dessous.
- Présidence de M. Martial Bourquin, vice-président -
Biocarburants - Examen du rapport et du texte de la commission
La commission examine le rapport et le texte de la commission sur la proposition de résolution européenne n° 226 (2013-2014) présentée par Mme Bernadette Bourzai, en application de l'article 73 quater du Règlement, sur les biocarburants.
Mme Bernadette Bourzai, rapporteure. - La commission des affaires européennes a adopté le 10 décembre dernier ma proposition de résolution sur les biocarburants. Le débat sur les biocarburants a été relancé en 2012 lorsque la Commission européenne a proposé de modifier deux directives sur la question. Le Parlement européen a approuvé et amendé cette proposition le 11 septembre dernier mais les 28 ministres de l'énergie n'ont pas trouvé d'accord le 12 décembre. Il revient donc à la Grèce, qui préside le Conseil de l'Union européenne, de trouver un compromis. Grâce à la présente proposition de résolution, le Sénat contribuera au débat en incitant notre Gouvernement à faire valoir ses positions auprès des autres États membres.
La directive « Énergies renouvelables » d'avril 2009 fixe à chaque État membre un objectif de 10 % d'incorporation de carburants d'origine renouvelable dans les transports à l'horizon 2020. Les biocarburants doivent également respecter des critères de durabilité et entraîner dès 2017 une réduction d'au moins 50 % des émissions de gaz à effet de serre par rapport aux carburants fossiles. La directive « Qualité des carburants » d'octobre 1998 prévoit d'ici à 2020 une réduction d'au moins 6 % des émissions de gaz à effet de serre sur l'ensemble du cycle de vie par unité d'énergie produite à partir de combustibles fossiles. Cette réduction des émissions de gaz à effet de serre peut être obtenue grâce à l'utilisation de biocarburants ou de carburants de substitution, mais aussi par la réduction des opérations de brûlage à la torche et de dispersion des gaz dans l'atmosphère sur les sites de production.
La France a adopté une attitude volontariste dans la mise en oeuvre des objectifs européens, fixant pour 2010 un objectif d'incorporation des biocarburants de 7 % et prenant plusieurs mesures : exonération partielle de la taxe intérieure de consommation pour les biocarburants jusqu'à fin 2015 ; prélèvement supplémentaire de la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) sur les carburants contenant peu de biocarburants ; lancement en 2009 du supercarburant 95 E10, compatible avec la plupart des véhicules à essence, et de carburants destinés à des véhicules dédiés tels que le super éthanol E85 ou le gazole B30. Toutefois, les objectifs ne sont pas encore atteints : le taux d'incorporation était de 6,83 % en 2012 et n'a guère progressé depuis 2010.
Or les évolutions proposées par la Commission européenne remettent en question cette politique. La Commission a cherché à analyser l'impact du changement d'affectation des sols indirect sur les émissions de gaz à effet de serre. Ce paramètre, connu par le sigle CASI en français ou ILUC en anglais, permet d'évaluer le bilan environnemental des biocarburants : si la production de biocarburants sur des terres agricoles en Europe a pour effet la déforestation ou la destruction de prairies dans d'autres parties du monde pour compenser la perte de production agricole, des quantités considérables de CO2 stockées dans ces forêts et prairies risquent d'être libérées dans l'atmosphère.
La Commission a donc proposé que l'objectif d'incorporation de 10 % ne soit pas atteint uniquement avec des biocarburants de première génération, qui peuvent se substituer à des cultures alimentaires. Elle suggère aussi d'imposer une plus forte réduction des émissions de gaz à effet de serre pour les nouvelles installations. Elle accorde une pondération supérieure, dans le calcul de la contribution aux objectifs d'incorporation, aux biocarburants à faibles émissions liées aux changements d'affectation des sols indirects. C'est le principe du double comptage pour certaines huiles usagées ou graisses animales, et même du quadruple comptage pour des biocarburants avancés tels que les algues ou certains déchets. Enfin elle oblige les États membres et les fournisseurs de carburants à notifier, pour les biocarburants, les émissions estimatives dues aux changements d'affectation des sols indirects.
Les débats ont porté tout particulièrement sur la limitation de la contribution des biocarburants conventionnels, ou de première génération, à la réalisation des objectifs pour 2020. La Commission a proposé de limiter cette part à 5 %, soit la moitié seulement de l'objectif global de 10 % d'incorporation des carburants d'origine renouvelable. Cette cible étant quasiment atteinte, il s'agit donc d'une stabilisation de la production. Le Parlement européen a relevé ce plafond à 6 %, tout en incluant un sous-objectif de 2,5 % pour les biocarburants avancés. Au sein du Conseil des ministres, la présidence lituanienne a proposé un seuil de 7 %, auquel se sont opposés certains pays. Les débats ont aussi porté sur le principe de notification des émissions liées au changement d'affectation des sols indirect, certains pays soulignant la fragilité des études scientifiques sur cette question. Il n'y a pas eu d'accord.
Les positions ne sont pas définitivement tranchées. Gardons-nous des simplifications excessives. Les biocarburants ne sont pas le moyen miracle pour assurer la transition énergétique dans les transports ; il ne s'agit pas non plus d'un mal absolu dont il faudrait sortir en urgence. Je crois en une approche intermédiaire prenant en compte les différents aspects de la politique des biocarburants : l'objectif de réduction des émissions de CO2, la dimension agricole, industrielle de cette politique, et son aspect stratégique.
Cette dimension stratégique n'est pas souvent évoquée : pourtant la production de carburants sur notre sol, par des technologies que nous maîtrisons, est un gage d'amélioration de notre indépendance énergétique dans le secteur crucial des transports. Un jour sans doute les véhicules électriques et les biocarburants avancés permettront d'atteindre cet objectif avec un meilleur bénéfice environnemental. D'ici-là les biocarburants de première génération sont incontournables, même si le taux d'incorporation ne peut guère dépasser 30 % pour le biodiesel. L'objectif de 10 % pour l'ensemble des carburants d'origine renouvelable, ou de 7 % pour les biocarburants de première génération, est un pas important.
La filière bioéthanol représente selon les professionnels 8 900 emplois directs ou induits et une valeur ajoutée de 815 millions d'euros sur 15 sites de production. Les cultures destinées aux biocarburants de première génération occupaient en 2009 une portion de la surface agricole utile de 5,5 % environ, en grande majorité du colza pour le biodiesel. La production de biocarburants occupe près des deux tiers de la surface cultivée en oléagineux mais seulement une faible partie en blé, maïs et betteraves. Les cultures destinées aux biocarburants produisent également des tourteaux de colza et des drèches de blé, qui vont à l'alimentation animale : on a réduit ainsi sensiblement les importations de tourteaux de soja américains.
En outre, la production d'éthanol constitue un débouché intéressant lorsque le prix du blé est déprimé : elle stabilise ainsi le revenu des céréaliers. Comme l'indique la Cour des comptes, les intérêts de ces derniers rejoignent ceux des sociétés de production d'éthanol, dont ils sont souvent actionnaires. La filière bioéthanol a beaucoup investi depuis 2005 dans des unités de production et elle vend aux autres pays européens, concurrençant l'éthanol américain. Les producteurs mettent aussi en avant leurs efforts importants, depuis dix ans, pour réduire la consommation d'eau et d'énergie dans les processus de fabrication.
Les industriels réclament surtout des règles stables et cohérentes. La mise au point de nouveaux modèles automobiles, en particulier, prend plusieurs années. La proposition de résolution rappelle donc que le développement des biocarburants a été motivé par la volonté de combattre le changement climatique, mais aussi de diminuer la dépendance énergétique, de redresser la balance des paiements et de créer des emplois dans le cadre d'une croissance durable. Elle souligne que les plafonds d'incorporation ne doivent pas compromettre les investissements déjà réalisés dans les biocarburants de première génération. Pour autant il est indéniable que les biocarburants de première génération n'ont pas tous les avantages qu'on leur prêtait à l'origine - c'est d'ailleurs pour cela que certains proposent de leur donner le nom d'« agro-carburant ».
La production de biocarburants devra demeurer secondaire, à l'échelle mondiale, par rapport à la production alimentaire. Les experts de la FAO estiment que, depuis 2004, les biocarburants ont joué un rôle significatif dans l'augmentation et la volatilité des prix des matières premières agricoles à court terme. De plus, ils introduisent une certaine corrélation entre les marchés agricoles et les marchés de l'énergie - corrélation plus ou moins stricte, cela reste à déterminer. La part de la surface agricole utile consacrée aux biocarburants est inférieure à 1 % dans le monde. Il ne serait pas acceptable qu'elle augmente au point de déclencher des crises alimentaires et toute politique des biocarburants devrait être coordonnée avec la politique alimentaire.
De même, la question des changements d'affectation des sols indirects doit être prise au sérieux. La part des biocarburants dans la déforestation et la destruction des prairies, sujet très controversé, fait l'objet d'études scientifiques. Une synthèse de l'Ademe, en avril 2012, fait état d'un consensus scientifique sur la réalité des changements d'affectation des sols, mais souligne la difficulté à mesurer son ampleur. La Commission européenne reconnaît les limites des modèles numériques qu'elle utilise. Le travail d'évaluation doit donc se poursuivre. Cela ne facilite pas la tâche du législateur. La proposition de résolution aborde donc les risques potentiels liés au changement d'affectation des sols indirect mais aussi les incertitudes sur l'ampleur du phénomène et ses effets.
Le carburant le plus respectueux de l'environnement, celui qui induit le moins de dépendance énergétique, c'est encore celui qu'on ne consomme pas ! L'amélioration technique des moteurs et des moyens de transport collectifs est une priorité. La recherche doit également se poursuivre sur les biocarburants avancés, de deuxième voire de troisième génération, qui n'ont pas d'impact sur la production alimentaire. Les projets ne manquent pas en France. Notre pays a une carte à jouer sur le plan industriel. Toutefois, ces filières n'en sont qu'au premier stade de leur développement et leur contribution en 2020 ne pourra être que partielle. La proposition de résolution propose donc de soutenir avec réalisme le sous-objectif consacré aux biocarburants avancés, ainsi que le mécanisme de comptage multiple.
Les débats au sein de notre commission des affaires européennes ont fait émerger un consensus autour du plafonnement à 7 % du taux d'incorporation des biocarburants de première génération. Les politiques environnementales comme les politiques agricoles ou industrielles se construisent dans la durée. Les incertitudes demeurent sur les effets de la production des biocarburants. Des changements de cap brutaux désorganiseraient la filière sans justification scientifique.
Il convient donc de combiner les différentes ressources dans un « bouquet » pour assurer la transition énergétique dans les transports : biocarburants de première génération, développement du véhicule électrique, amélioration des carburants avancés afin que ceux-ci représentent une alternative réaliste.
M. Roland Courteau. - J'approuve entièrement cette proposition de résolution, équilibrée et frappée au coin du bon sens. Son point n° 17, en particulier, préconise à juste titre de conserver l'outil industriel existant et de stabiliser le taux d'incorporation à 7 % afin de maintenir les emplois, les capacités d'innovation et de recherche. Certes, la première génération de biocarburants présente nombre d'inconvénients majeurs, et notamment les changements d'affectation de sols. Elle a déçu les espoirs s'agissant de limitation des émissions de CO2, et cette production a contribué à aggraver la difficulté à nourrir sept milliards d'êtres humains. Elle peut être améliorée, cependant, et ne doit donc pas être abandonnée. N'oublions pas que notre dépendance aux hydrocarbures nous coûte quelque 66 milliards d'euros par an ! La troisième génération de biocarburants semble plus prometteuse en termes de réduction des émissions de CO2 et ne mobilisera pas d'immenses surfaces agricoles. À Narbonne, l'Inra travaille sur des micro-algues dont le potentiel exploitable est colossal. Hélas, cette filière ne sera pas opérationnelle avant 2030. Et ces recherches requièrent d'importants financements, tout comme le développement de la filière lignocellulosique et de son produit phare, le Jatropha. Cette filière de deuxième génération ne serait rentable qu'à partir d'un prix de 250 dollars par baril.
M. Joël Labbé. - Il y a des doutes sur l'ampleur des conséquences alimentaires du changement d'affectation des sols, mais le mal est déjà fait. Nous sommes hostiles au maintien de l'objectif à 7 %. Les deuxième et troisième générations de biocarburants sont intéressantes, mais en sont encore au stade expérimental. Elles doivent être évaluées, notamment pour détecter d'éventuels effets pervers. Certains d'entre nous avaient très tôt tiré la sonnette d'alarme sur les biocarburants de première génération, avant que ceux-ci ne sévissent dans le monde entier.
M. Gérard Bailly. - La situation des agriculteurs est compliquée. On leur demandait déjà, il y a des décennies, de produire des biocarburants comme alternative aux importations de carburants fossiles. Et, Joël Labbé, vous dites que certains d'entre vous ont tiré la sonnette d'alarme, mais il y a vingt ans, au conseil régional de Franche-Comté, Dominique Voynet prônait sans retenue les biocarburants. On a ensuite imposé aux agriculteurs des jachères : 10 à 15 % des terres agricoles, il y a encore dix ans. Dans mon département, en outre, la sucrerie d'Aiserey a fermé, les betteraviers ont dû se reconvertir dans la production de légumes, qu'ils ne peuvent plus continuer aujourd'hui... Ces changements d'orientation coûtent cher aux producteurs, qui consentent à chaque fois des investissements nouveaux. Le monde agricole, en vingt ans, a connu de nombreux bouleversements.
M. Martial Bourquin, président. - Le travail de la rapporteure est remarquable et équilibré. Il ne faut pas brûler ce qu'on a aimé hier, même si l'affectation des terres arables est un problème qu'on ne peut négliger. Ne condamnons pas une filière qui a réalisé de lourds investissements. Une start-up que j'ai visitée travaille sur des biocarburants issus de micro-algues : la production de CO2 serait quasi nulle. La pire des choses en économie, ce sont les coups de balancier. Mieux vaut rectifier intelligemment la trajectoire. Cette filière redeviendra peut-être prometteuse.
Mme Bernadette Bourzai, rapporteure. - Au Parlement européen j'ai été rapporteure pour avis sur cette question en 2008 au nom de la commission de l'agriculture. Les craintes que nous avions exprimées sur les changements d'affectation des sols n'ont hélas pas débouché sur des mesures restrictives. Quelques années plus tard, on constate qu'il y a un problème réel, il convient de ne pas l'aggraver.
M. Roland Courteau. - Oui !
M me Bernadette Bourzai, rapporteure. - La Commission européenne propose de plafonner à 5 % le taux d'incorporation des biocarburants de première génération. La France défend 7 %, taux qu'elle a presque atteint. Elle ne souhaite pas que l'on remette brutalement en cause l'existence de cette filière. Les recherches sur les biocarburants de deuxième et troisième génération donneront des résultats dès 2020. C'est pourquoi je propose d'encourager les comptages doubles ou quadruples, pour conforter une telle évolution.
M. Martial Bourquin, président. - Le moteur à deux litres n'est pas une utopie. Or il apportera à la fois limitation des émissions de CO2 et amélioration de notre solde commercial extérieur.
Mme Bernadette Bourzai, rapporteure. - L'amendement n° 1 remplace le terme « biocarburants » par « agro-carburants ». J'y suis défavorable aujourd'hui : je proposais moi-même ce changement sémantique en 2008 au Parlement européen - il m'a manqué deux voix ! - mais puisque nous souhaitons désormais que les matières premières soient, de plus en plus, des végétaux forestiers ou des algues, la proposition n'est plus de mise.
M. Roland Courteau. - Comment appellerons-nous les carburants issus des micro-algues ?
M. Joël Labbé. - Bonne question, quoi qu'il en soit, l'appellation « bio » est trop valorisante pour les carburants de première génération. C'est ce qui me dérange. Je maintiens mon amendement.
Mme Bernadette Bourzai, rapporteure. - Évitons de multiplier les appellations. Parler de biocarburants de première et de deuxième génération est assez clair, je pense.
L'amendement n° 1 n'est pas adopté.
Mme Bernadette Bourzai, rapporteure. - L'amendement n° 2 vise à tenir compte de la contradiction entre les effets néfastes du changement d'affectation des sols indirect et les effets positifs de la réduction des émissions de gaz carbonique. L'ampleur des conséquences du changement d'affectation étant encore mal connue, restons prudents. Avis défavorable.
M. Joël Labbé. - Il ne s'agit que de clarifier les choses.
L'amendement n° 2 n'est pas adopté.
Mme Bernadette Bourzai, rapporteure. - L'amendement n° 3 supprime la mention selon laquelle l'ampleur et la nature des effets du changement d'affectation des sols indirect sont loin de faire l'objet d'un consensus. Or, l'alinéa 11 vise à constater l'absence de consensus et à demander en conséquence une certaine retenue dans les décisions. C'est l'un des éléments essentiels de cette proposition de résolution ! Avis défavorable.
L'amendement n° 3 n'est pas adopté.
Mme Bernadette Bourzai, rapporteure. - L'amendement n° 4 limite à 5 % le plafond d'incorporation des biocarburants en 2020. Nous proposons le chiffre de 7 %, qui correspond à une stabilisation. Ne revenons pas en arrière. Je souligne, surtout, que la défiscalisation s'achèvera en 2015. Vous aurez bientôt satisfaction. Avis défavorable.
M. Joël Labbé. - La France s'est montrée excessivement volontariste. La Cour des comptes a indiqué qu'entre 2005 et 2010 la défiscalisation partielle avait coûté 2,65 milliards d'euros à l'État, dont 1,8 milliard d'euros ont profité aux producteurs de biodiesel, lesquels ont, dans le même temps, réalisé 500 millions d'euros d'investissement, soit quatre fois moins ! À lui seul, le groupe Sofiprotéol a touché 50 millions d'euros... J'avais demandé il y a deux ans à M. Cahuzac, lors d'un débat sur le collectif budgétaire, que ce cadeau fiscal soit supprimé - sans succès. Je maintiens mon amendement.
M. Martial Bourquin, président. - Votre argument est juste, mais votre proposition sans objet, puisque la défiscalisation va cesser. Et certains agriculteurs se sont endettés pour financer ces investissements, ils ne survivraient pas à un retour à 5 %.
M. Joël Labbé. - Gérard Bailly a raison : les agriculteurs ont déjà été trop brinquebalés. Affirmons que leur mission est de nourrir la population, grâce à une production de qualité - et de proximité, autant que possible. Quant à la promotion des biocarburants il y a vingt ans, elle faisait débat au sein de notre mouvement et si Dominique Voynet était pour, ce n'était pas le cas de tout le monde. Je maintiens mon amendement.
M. Martial Bourquin, président. - Les petits agriculteurs n'ont pas à payer le prix des revirements de politiques.
Mme Bernadette Bourzai, rapporteure. - La Cour des comptes a indiqué, dans son rapport de 2012 cité par Joël Labbé, que c'était finalement le consommateur qui supportait à son insu le coût de cette politique fiscale.
L'amendement n° 4 n'est pas adopté.
Mme Bernadette Bourzai, rapporteure. - L'amendement n° 5 subordonne le soutien aux biocarburants avancés à leur potentiel de réduction des émissions de gaz à effet de serre et à l'absence d'impact négatif sur la sécurité alimentaire. Avis favorable.
Mme Bernadette Bourzai, rapporteure. - L'amendement n° 6 supprime le comptage multiple des carburants avancés. Avis défavorable : il faut encourager clairement les carburants les plus performances sur le plan environnemental.
L'amendement n° 6 n'est pas adopté.
Mme Bernadette Bourzai, rapporteure. - L'amendement n° 7 supprime l'appel à maintenir un objectif d'incorporation de 7 %. Avis défavorable.
L'amendement n° 7 n'est pas adopté.
La proposition de résolution européenne ainsi amendée est adoptée.
Les avis et les amendements adoptés sont repris dans le tableau ci-dessous.