- Mercredi 12 novembre 2025
- Désignation d'un vice-président
- Proposition de nomination de M. Didier Samuel, candidat proposé par le Président de la République aux fonctions de président de l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) - Désignation d'un rapporteur
- Proposition de loi visant à protéger les jeunes de l'exposition excessive et précoce aux écrans et des méfaits des réseaux sociaux - Désignation d'un rapporteur
- Audition de Mmes Amélie Oudéa-Castéra, présidente du comité national olympique et sportif français (CNOSF) et Marie-Amélie Le Fur, présidente du comité paralympique et sportif français (CPSF)
- Audition de M. Didier Samuel, candidat proposé par le Président de la République aux fonctions de président de l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm)
- Vote sur la proposition de nomination, par le Président de la République, de M. Didier Samuel aux fonctions de président de l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm)
- Projet de loi de finances pour 2026 - Audition de Mme Marina Ferrari, ministre des sports, de la jeunesse et de la vie associative
Mercredi 12 novembre 2025
- Présidence de M. Laurent Lafon, président -
La réunion est ouverte à 9 h 30.
Désignation d'un vice-président
M. Laurent Lafon, président. - Avant d'entamer notre ordre du jour, nous devons procéder à la désignation d'un poste de vice-président, laissé vacant à la suite du départ de notre collègue Martin Lévrier.
L'alinéa 6 de l'article 13 du Règlement du Sénat dispose que : « Pour la désignation des vice-présidents, les groupes établissent une liste de candidats selon le principe de la représentation proportionnelle ».
Le groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants (RDPI) a souhaité désigner comme vice-présidente Mme Samantha Cazebonne. Je vous propose d'entériner cette désignation.
La vice-présidente est désignée.
Proposition de nomination de M. Didier Samuel, candidat proposé par le Président de la République aux fonctions de président de l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) - Désignation d'un rapporteur
La commission désigne Mme Laurence Garnier rapporteure sur la proposition de nomination de M. Didier Samuel, candidat proposé par le Président de la République aux fonctions de président de l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm), en application de l'article 13 de la Constitution.
Proposition de loi visant à protéger les jeunes de l'exposition excessive et précoce aux écrans et des méfaits des réseaux sociaux - Désignation d'un rapporteur
La commission désigne Mme Catherine Morin-Desailly rapporteure sur la proposition de loi n° 744 (2024-2025) visant à protéger les jeunes de l'exposition excessive et précoce aux écrans et des méfaits des réseaux sociaux, présentée par Mme Catherine Morin-Desailly et plusieurs de ses collègues.
Audition de Mmes Amélie Oudéa-Castéra, présidente du comité national olympique et sportif français (CNOSF) et Marie-Amélie Le Fur, présidente du comité paralympique et sportif français (CPSF)
M. Laurent Lafon, président. - Nous en venons à l'audition de Mmes Amélie Oudéa-Castéra et Marie-Amélie Le Fur, respectivement présidentes du Comité national olympique et sportif français (CNOSF) et du Comité paralympique et sportif français (CPSF), qui représentent, accompagnent et soutiennent l'ensemble du mouvement sportif dans notre pays.
Mesdames les présidentes, nous sommes très heureux de vous accueillir pour échanger sur la situation du sport en France. Notre commission examinera la semaine prochaine l'avis de son rapporteur sur les crédits du sport, Jean-Jacques Lozach, alors que le débat sur le projet de loi de finances (PLF) démarrera le 25 novembre au Sénat.
La question du financement des politiques sportives est aujourd'hui au coeur des préoccupations du mouvement sportif. Malgré les promesses d'héritage des jeux Olympiques et Paralympiques (JOP) de Paris 2024, la situation budgétaire impose un recul des moyens affectés au sport, compromettant les ambitions fixées ces dernières années, notamment celle de faire de la France une nation sportive.
Vous aviez toutes deux exprimé votre inquiétude cet été, alors que le PLF était encore en cours d'élaboration. La baisse des crédits du programme 219 « Sport » est finalement moindre que ce que vous redoutiez. Elle est néanmoins de l'ordre de 6,5 % et entourée de nombreuses incertitudes, s'agissant d'éventuelles régulations budgétaires qui pourraient avoir lieu, comme ce fut le cas cette année.
Le rendement des taxes affectées à l'Agence nationale du sport (ANS) est lui aussi incertain, en particulier celui de la taxe « Buffet », qui assure une solidarité entre sport professionnel et sport amateur, mais dépend à 70 % de l'évolution des droits de retransmission du football.
Ces interrogations touchent à la fois le financement du sport de haut niveau et le développement des pratiques sportives, les deux étant étroitement liés. Viennent s'y ajouter des enjeux de gouvernance. Madame Marie Amélie Le Fur, vous présidez également l'ANS, dont les missions sont en cours de réexamen, conformément aux termes de sa convention constitutive. La complexité de la distribution des subventions sur le terrain est régulièrement pointée.
Par ailleurs, nous avons engagé, au Sénat, une réforme du sport professionnel, afin d'encadrer davantage le fonctionnement des ligues et de renforcer la solidarité dans ce secteur.
Enfin, votre rôle est déterminant pour préserver autant que possible la dynamique des Jeux, mais aussi pour préparer les futurs jeux Olympiques et Paralympiques : ceux de Milan-Cortina, qui auront lieu du 6 au 22 février 2026, et bien sûr les Jeux d'hiver de 2030 qui se dérouleront dans les Alpes françaises. Leur organisation a été véritablement lancée cette année, avec la mise en place d'un comité d'organisation et d'une Société de livraison des ouvrages olympiques (Solideo).
Vous nous direz comment vous percevez l'avancement de ce projet, qui présente la particularité d'avoir été initié par les deux régions principalement concernées, en concertation avec l'État.
Le projet de loi relatif à l'organisation des jeux Olympiques et Paralympiques de 2030 est actuellement en navette entre les deux assemblées. Nous attendons désormais son inscription à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale.
Mesdames les présidentes, je vous propose de procéder à un propos liminaire. Nos collègues pourront ensuite vous poser leurs questions, à commencer par le rapporteur Jean-Jacques Lozach.
Mme Amélie Oudéa-Castéra, présidente du Comité national olympique et sportif français (CNOSF). - Monsieur le président, merci pour cette introduction. Je souligne la richesse des travaux du Sénat sur tous les sujets qui touchent au sport, et particulièrement ceux de votre commission, qui a ajouté le mot « sport » à son intitulé en 2024. Votre investissement porte à la fois sur l'olympisme et le paralympisme, sur le sport amateur et le sport professionnel. Je veux aussi saluer l'importance de la proposition de loi relative au sport professionnel que vous avez portée, monsieur le président, avec Michel Savin.
Le sport traverse une étape inédite de son histoire. Entre Paris 2024 et les Jeux d'hiver de 2030, jamais nous n'avons accueilli deux éditions des Jeux à six ans d'intervalle. Ce contexte nous offre un élan unique pour atteindre notre ambition : passer d'une nation de grands sportifs à une grande nation sportive. C'est un moment d'opportunité, mais aussi un moment où certains vents contraires soufflent sur le sport français ; il faut les contenir. C'est maintenant que nous pouvons durablement faire bouger les lignes de la place du sport en France. Cette occasion ne doit pas être gâchée.
Notre premier impératif est de réussir ensemble l'héritage des Jeux de Paris 2024. C'est par nos actions quotidiennes que celui-ci prendra tout son sens. Il est déjà concret, bien plus qu'on ne le dit : 17,2 millions de licenciés, soit une progression de 20 points en vingt ans ; 71 % des Français pratiquant une activité sportive, soit une hausse de plus de 17 points en douze ans ; des milliers d'équipements de proximité construits avec l'ANS et le mouvement sportif ; des résultats sportifs exceptionnels de nos équipes de France, confirmés en 2025, qui valident largement notre modèle de haute performance.
Toutefois, il va falloir aller « plus vite, plus haut et plus fort » sur cet héritage. Le CNOSF a un rôle et une responsabilité particulière avec la reprise du Fonds de dotation Paris 2024, que j'ai le plaisir de présider. Ce fonds coordonne les parties prenantes de la gouvernance pour le bon usage du boni de liquidation des Jeux, aujourd'hui chiffré à 76 millions d'euros. Pour les années à venir, il interviendra sur trois axes : les célébrations des Jeux, la pratique sportive pour tous et l'accompagnement des athlètes.
Au titre du sport pour tous, il est impératif d'accélérer le processus sur trois sujets prioritaires.
Le premier est la place du sport dans la vie des jeunes. Le mouvement sportif regrette l'arrêt, en 2025, du Pass'Sport pour les enfants de 6 à 13 ans issus de familles modestes, en sus du démantèlement du dispositif des deux heures supplémentaires pour les collégiens. Ces deux évolutions ont malheureusement été confirmées dans le PLF pour 2026, mais de bonnes nouvelles se profilent peut-être pour le Pass'Sport, grâce aux amendements adoptés en commission des affaires culturelles puis en commission des finances à l'Assemblée nationale, visant à le rétablir pour la saison prochaine.
Le deuxième concerne les équipements structurants. L'effort doit se poursuivre, et je sais que votre assemblée est très attentive à l'accompagnement de l'investissement local. Nous avons besoin de remédier à la vétusté d'un certain nombre d'équipements sportifs, tout en travaillant à leur meilleure mutualisation pour booster les taux d'usage dans les territoires.
Le troisième est l'inclusion sociale par le sport. Il faut absolument poursuivre la démarche des 10 000 clubs engagés dans les territoires, avec des actions d'« aller-vers », de repérage des « invisibles » et d'insertion professionnelle. Pour ce faire, le sport est un levier important.
En parallèle de l'héritage, il faut préparer les Jeux de 2030. Lors du Comité interministériel aux jeux Olympiques et Paralympiques (Cijop) de juin dernier, j'ai présenté les cinq rôles majeurs que jouerait à cet égard le CNOSF : préparer et conduire la délégation des athlètes, en lien avec le CPSF ; mobiliser l'expertise des fédérations de sports d'hiver, faire appel à des volontaires et supporters, associer le grand public en amont et durant les Jeux via le Club France ; et contribuer à la construction du volet 2030 de l'héritage des Jeux, en favorisant les meilleures mutualisations et passerelles avec l'héritage de Paris 2024.
Le projet avance, les équipes du Comité d'organisation des jeux Olympiques et Paralympiques (Cojop) sont maintenant bien structurées, et une révision budgétaire récente a permis d'affiner le budget du Comité d'organisation. Le CNOSF et le CPSF y ont pris une part active.
Le PLF pour 2026 comporte également deux éléments importants pour 2030 : l'article 60, qui acte la garantie de l'État au projet, dans des modalités encore en discussion entre les parties prenantes et devant l'Assemblée nationale ; et la création du programme 385, qui porte les autorisations d'engagement (AE) et les crédits de paiement (CP), avec la mise en place de la Solideo, dont les effectifs progressent sensiblement dans cette version du PLF.
En prélude à 2030, les Jeux de Milan-Cortina auront lieu dans à peine 85 jours. Nous aurons une magnifique équipe de France de plus de 160 athlètes, un record pour notre délégation olympique, avec l'ambition de figurer dans le top 5, comme à Paris 2024. Les moyens alloués à la haute performance ont été largement préservés dans le PLF pour 2026, ce dont le mouvement olympique se félicite.
Dans ce moment inédit, le CNOSF accompagne avec détermination la transformation du mouvement sportif. J'ai défendu, dans le cadre de l'élection à la présidence du comité, une ambition sous la forme d'un triptyque : bâtir un CNOSF plus fort, plus utile et plus moderne.
Plus fort, pour peser davantage dans le débat public et faire entendre la voix du sport. Je présenterai mardi prochain, au Salon des maires, un plaidoyer pour faire du sport une grande cause municipale pour le mandat à venir, après ma contribution récente à la Convention citoyenne sur les temps de l'enfant.
Plus utile, en soutenant les fédérations, particulièrement les plus petites, sur la lutte contre les violences, la laïcité, la simplification administrative, le bénévolat et la prospection de partenaires économiques.
Plus moderne, enfin, en accompagnant activement la transformation économique des fédérations, leur transition numérique et écologique, et la féminisation des instances via l'essaimage du Club des 300 dirigeantes dans les territoires pour atteindre la parité au niveau des ligues régionales en 2028. Nous mettrons également en place un conseil de prospective pour anticiper l'évolution des usages.
Pour réussir l'héritage, préparer les Jeux de 2030 et transformer notre modèle, le sport a besoin de soutien. Vous l'avez évoqué, monsieur le président, 2025 a été une année très difficile, avec un budget en baisse, atténué toutefois grâce aux amendements du Sénat, et des coupes en gestion de près de 300 millions d'euros qui ont mis le sport en difficulté.
Le budget pour 2026, actuellement en discussion, marque une inflexion positive que je veux saluer. La baisse des crédits, d'un peu moins de 5 %, est bien moindre que les 18,7 % envisagés initialement. Le maintien des taxes affectées est également un point essentiel pour les ressources du sport français.
Nous avons besoin de quelques corrections que le Sénat pourra certainement apporter, notamment grâce à l'action et à la sagacité de votre rapporteur pour avis, M. Jean-Jacques Lozach. Le budget est presque satisfaisant, mais il reste essentiel de travailler ensemble au rétablissement du Pass'Sport pour les 6-13 ans.
Nous devons créer, en lien avec le ministère des sports, les conditions d'une reconstitution de la trésorerie de l'Agence, qui a beaucoup mobilisé ses ressources pour mener à bien les plans d'équipement. Il est également nécessaire de réviser la trajectoire de baisse des cadres techniques sportifs, qui, avec une réduction de 26 postes dans le projet, pose de réelles difficultés pour nos fédérations, tant pour le haut niveau que pour le développement de la pratique.
Nous sommes également inquiets de la trajectoire de baisse des services civiques, avec la suppression prévue de l'enveloppe de 40 000 services civiques dans le budget pour 2026. Ces points s'ajoutent aux aléas liés au rendement de la taxe « Buffet », dans un contexte où les droits du football restent incertains.
Le soutien de l'État et des parlementaires en faveur du CNOSF est indispensable pour que celui-ci puisse accomplir l'ensemble de ses missions. En 2025, le Comité avait construit un budget à l'équilibre autour de 25 millions d'euros, garanti par la convention pluriannuelle d'objectifs (CPO) avec l'État et par un accord sur le programme de marketing conjoint (JMPA) avec les deux régions et le Comité international olympique (CIO).
Ces accords ont subi des baisses significatives : une contraction de 3 millions d'euros sur la CPO et une réduction de 20 % de l'accord marketing, l'ensemble représentant 75 % des recettes initiales. Il est important de préserver la soutenabilité économique de notre modèle. À cet égard, l'engagement du ministère des sports de maintenir une CPO à 9,4 millions d'euros annuels, inscrits dans le PLF pour 2026, constitue un élément capital.
En conclusion, je soulignerai l'effort du CNOSF pour prendre pleinement sa part dans les ajustements budgétaires que l'ensemble des secteurs doivent consentir. Le Comité mène en parallèle un véritable effort de transformation économique pour moderniser le modèle du mouvement sportif, en recherchant des financements privés - sponsoring, partenariats, mécénat, travaux - et en articulant ses actions avec des fonds d'investissement et des banques publiques comme la Caisse des dépôts et consignations (CDC) ou la Banque publique d'investissement (Bpifrance).
Vous, élus de la Nation, qui êtes proches du terrain, savez tout ce qu'apporte le sport. C'est le moment de ne pas relâcher notre engagement. Le sport conduit cet effort de transformation, et il nous faut, jour après jour, le faire vivre dans nos territoires pour bâtir enfin cette nation sportive à la hauteur de nos ambitions.
Mme Marie-Amélie Le Fur, présidente du Comité paralympique et sportif français (CPSF). - Je m'exprime aujourd'hui en qualité de présidente du Comité paralympique et sportif français pour présenter plus spécifiquement les enjeux de financement du parasport en France.
Je souhaite d'abord remercier le Sénat, et plus particulièrement votre commission, pour leur engagement en faveur du sport. Deux exemples l'illustrent : la loi du 2 mars 2022 visant à démocratiser le sport en France, structurante pour le parasport, qui a permis des avancées sur plusieurs chantiers, et l'amendement de 80 millions d'euros voté l'an dernier dans le PLF, grâce auquel l'ANS a pu maintenir une politique engagée en faveur du sport dans les territoires.
Je présenterai le fonctionnement budgétaire du Comité paralympique et sportif français et du parasport en France, ainsi que les évolutions considérables que nous avons connues ces dernières années.
Le CPSF exerce deux grandes missions : d'une part, la conduite de la délégation aux jeux Paralympiques d'été et d'hiver - nous sommes dans la phase finale de préparation de Milan-Cortina 2026, jeux importants dans la perspective de 2030, tout en préparant dès maintenant Los Angeles 2028 - ; d'autre part, la représentation des fédérations souhaitant développer une offre sportive.
Cette dynamique s'est fortement renforcée : de 25 fédérations membres du Comité paralympique en 2018, nous sommes passés à 50 aujourd'hui, avec trois nouvelles demandes d'affiliation. Cela illustre la maturité croissante du mouvement sportif et sa volonté d'accueillir les personnes en situation de handicap (PSH) dans les clubs et les territoires.
Le budget du Comité est globalement équilibré entre fonds publics et privés. Il repose notamment sur une CPO avec le ministère des sports, d'un montant de 1,5 million d'euros par an, complétée par des avenants couvrant les jeux Paralympiques et les compétitions multisports.
Nous bénéficions également d'autres financements publics, en particulier d'une contractualisation récente avec les agences régionales de santé (ARS), conformément à la loi du 2 mars 2022 relative au sport en établissements sociaux et médico-sociaux (ESMS). Celle-ci prévoit la mise en place d'un projet sportif et d'un référent sport dans chaque établissement. Fort de son expertise, le Comité paralympique accompagne les ARS et ces référents dans la montée en compétence, afin d'adapter les projets aux besoins des PSH.
Un financement de l'ANS soutient par ailleurs notre déploiement territorial : depuis 2019, le Comité compte au moins un salarié dans chaque région, et deux en Nouvelle-Aquitaine et en Auvergne-Rhône-Alpes, pour accompagner le mouvement sportif, les acteurs de proximité et les collectivités dans la définition et la mise en oeuvre de politiques publiques du parasport.
S'agissant des ressources privées, la France, en tant que pays hôte des jeux Paralympiques, ne peut commercialiser directement ses marques, notamment les Agitos. Un programme marketing conjoint a donc été signé avec le Comité d'organisation, initialement prévu à hauteur de 15,6 millions d'euros. À la suite d'une révision budgétaire menée ces dernières semaines, ce JMPA a subi une baisse de 3 millions d'euros sur six ans, ce qui rend d'autant plus nécessaire la stabilité des financements publics, en particulier de la CPO et de la contractualisation avec l'ANS.
Le Comité porte également des programmes d'intervention dans les territoires, souvent cofinancés avec les collectivités. Or, la baisse de leurs dotations et leur recentrage sur les compétences prioritaires entraînent une diminution des budgets dédiés au sport. J'attire notamment l'attention sur le programme « Club inclusif », programme phare d'impulsion territoriale : en 2022, seulement 1,4 % des clubs déclarait pouvoir accueillir une PSH ; nous atteignons aujourd'hui 3 % à 4 %, mais nous devons accélérer le processus. Ce programme, cofinancé par les collectivités, risque toutefois d'être fragilisé si les financements locaux se contractent davantage.
Concernant la trajectoire financière entre 2024 et 2025, le budget de la haute performance s'est stabilisé. Grâce à l'amendement que vous aviez présenté, nous avons pu, en cours d'année, doter la haute performance de 6 millions d'euros complémentaires, permettant de financer le plan hiver et d'accompagner les fédérations qui préparent les athlètes pour les JOP de Milan-Cortina en 2026 et pour ceux qui se dérouleront dans les Alpes françaises en 2030.
Concernant le paralympisme, l'impulsion des Jeux de Paris 2024 a quadruplé les moyens dédiés à la haute performance, permettant à la France d'enrayer sa chute au classement mondial et d'atteindre le top 8 cette année. L'ambition collective reste de viser le top 5 pour Los Angeles 2028, ce qui nécessitera des performances accrues dans les sports majeurs, tout en préservant la pluralité de notre modèle et la diversité des fédérations et disciplines. Ce rayonnement des athlètes de haut niveau alimente également la pratique et l'engagement sportif sur les territoires.
Sur le développement de la pratique, une vraie compréhension des enjeux du parasport s'est affirmée ces dernières années. Entre 2019 et 2024, 70 millions d'euros ont été attribués à ce secteur sur des enveloppes désormais dédiées et fléchées. En 2025, ces financements ont été stables. L'enveloppe consacrée à l'accessibilité, historiquement portée à 3 millions d'euros en 2024, a baissé de 500 000 euros en 2025. Elle reste structurante, soutenant à la fois les collectivités dans la mise en accessibilité des équipements et les clubs pour s'équiper et accueillir les PSH.
En outre, une part des projets sportifs fédéraux (PSF) doit être consacrée au parasport. Or, ce financement a déjà baissé en 2025. Sans sursaut dans le budget 2026, ce sera malheureusement cette enveloppe qui sera prioritairement diminuée. Ainsi, à budget et politique d'intervention inchangés, eu égard aux efforts de trésorerie consentis pour absorber une coupe budgétaire de près de 300 millions d'euros en cours d'année 2025, nous aurons en fin d'année une trésorerie négative, ce qui supposerait une coupe de 40 millions d'euros dans nos enveloppes d'intervention, principalement à destination des PSF, donc des clubs en territoire et des organes déconcentrés de nos fédérations, c'est-à-dire au plus proche des pratiquants. Nous souhaitons donc reconstituer un niveau de trésorerie acceptable et maintenir notre politique d'intervention.
Pour conclure, nous sommes tournés vers les Jeux de 2030. Depuis le début de la phase de candidature, le comité paralympique est autour de la table, ce que justifient les singularités des parasports, notamment d'hiver.
Notre ambition pour 2030 est triple. Premièrement, nous devons réussir le volet « haute performance » et tendre vers une plus grande diversité. Ainsi, nous n'avions jamais eu d'équipe de curling ou de hockey sur luge. Notre délégation paralympique à Milan compte quinze athlètes. Pour 2030, nous souhaitons densifier l'équipe de France et avoir plus de sports représentés.
Deuxièmement, il faut porter le développement de la pratique sportive des PSH, sous l'angle du sport d'hiver, de montagne et, plus globalement, de nature, dans lequel nous rencontrons encore bien des difficultés, notamment d'ordre réglementaire ou d'accessibilité.
Troisièmement, comme pour Paris 2024, ces Jeux doivent être un catalyseur d'innovation sociale en faveur des PSH, afin de les replacer au coeur du débat de société. Le sport est un bon levier, à même de mobiliser et de sensibiliser la jeunesse dans un cadre ludique.
M. Jean-Jacques Lozach, rapporteur pour avis sur les crédits du sport. - Concernant la gouvernance des fédérations, deux dates récentes sont à retenir : d'une part, l'année 2019, avec la création de l'ANS ; d'autre part, la loi du 2 mars 2022 visant à démocratiser le sport en France. Comment appréciez-vous ces évolutions, notamment en matière de transparence des fédérations, de pérennité financière et de relations entre sport amateur et sport professionnel ? Des ajustements restent-ils nécessaires ?
Je m'interroge notamment sur le devenir de l'ANS. Quelle vision privilégiez-vous pour son périmètre d'intervention ? Doit-elle se concentrer sur le sport de haut niveau, voire sur la haute performance ? Faut-il conserver le statut de groupement d'intérêt public (GIP) ? Selon quelles déclinaison territoriale, implication du monde économique et relation avec les délégations régionales académiques à la jeunesse, à l'engagement et aux sports (Drajes) ?
Pour en revenir au débat budgétaire, madame la présidente du CNOSF, vous parlez de vents contraires sur le sport français. Ces vents sont également budgétaires : en un an, les crédits de paiement baissent de 6,5 %, à 554 millions d'euros, pour le seul programme 219 « Sport », exclusion faite, donc, du programme 385 « Jeux Olympiques et Paralympiques d'hiver 2030 ». La tendance est claire : la diminution de 182 millions d'euros en 2025 suit des hausses de 60 millions d'euros en 2024 et de 143 millions d'euros en 2023.
Je sais votre attachement, à toutes les deux, à une trajectoire de diversification des ressources, publiques comme privées, pour les fédérations, ce qui amène au problème des contrats sportifs fédéraux. Billetterie, produits dérivés, mécénat, sponsoring, sans parler de l'argent public, avec les deux taxes affectées et les crédits budgétaires de l'État... Quelles sont vos suggestions ? Quelles barrières restent à lever ?
Vous avez évoqué trois points de vigilance, à commencer par le Pass'Sport, dont le reformatage est malvenu. Ainsi, la semaine dernière, des présidents de fédération nous ont d'ores et déjà fait part d'un ralentissement des inscriptions des 6-13 ans. La décision n'a d'ailleurs fait l'objet ni d'étude d'impact ni de concertation.
Vous avez également mentionné la trésorerie de l'ANS et la baisse de 26 conseillers techniques sportifs (CTS). J'ajouterais un autre point de vigilance, selon moi le très gros point noir de ce budget 2026 : les équipements. En effet, tous les programmes qui leur sont propres disparaissent, nous laissant noyés dans les programmes de droit commun : dotation d'équipement des territoires ruraux (DETR), dotation de soutien à l'investissement local (DSIL) et fonds vert, lequel chutera de 500 millions d'euros l'année prochaine... Un véritable coup d'arrêt a été donné aux programmes spécifiques comme « Génération 2024 » et le plan 5 000 équipements sportifs de proximité.
Il y a bien une volonté de mutualisation des équipements sportifs, en application de la loi du 2 mars 2022, qui n'est d'ailleurs pas sans poser des difficultés. En effet, si, sur le papier il est facile d'ouvrir les gymnases des collèges et des lycées, dans la réalité, c'est plus difficile. Cela ne veut pas dire qu'il ne faut pas s'y employer, car il est vrai que ces équipements sont loin d'être saturés, notamment à partir de 17 heures et pendant les vacances.
Selon nous, le plafond de la taxe « Buffet » a été surévalué. C'est d'ailleurs la première fois que je vois une taxe plafonnée au-delà du montant escompté... Nous devrions ainsi atteindre 40 millions d'euros, au lieu des 60 millions inscrits, ce qui est à relier à la crise des droits télévisuels du football.
Dans quelle mesure le CNOSF et le CPSF accompagnent-ils l'émergence d'emplois qualifiés dans le sport pour faire face à l'afflux de licenciés dans les clubs et créer des emplois ? Je songe en particulier au secteur de l'insertion sociale et professionnelle et à la politique de la ville.
Vous avez évoqué le rôle que vous entendez jouer pour la préparation des JOP 2030. Nous avons voté des textes, souvent d'initiative sénatoriale, relatifs à la protection des publics, et notamment à la lutte contre les violences sexuelles et sexistes (VSS). Comment le CNOSF et le CPSF s'articulent-ils avec les fédérations et le ministère pour appliquer et mesurer l'efficacité de ces nouveaux dispositifs ?
Je terminerai par une synthèse. Le 11 octobre dernier, vous avez toutes les deux organisé une manifestation d'alerte et d'inquiétude, pour essayer de dynamiser le mouvement sportif et parasportif. Avez-vous l'espoir d'être entendues par le Gouvernement ?
Mme Amélie Oudéa-Castéra. - Sur la gouvernance, à mon arrivée au ministère, en 2022, le sport français avançait à hue et à dia : les acteurs ne coopéraient pas, se regardaient en chiens de faïence et nous ne savions plus qui faisait quoi. Nous avons alors énormément travaillé pour clarifier les rôles et, surtout, pour consolider un esprit d'équipe qui ne nous a jamais quittés jusqu'à la livraison des Jeux et qui reste à entretenir aujourd'hui.
La difficulté réside dans la multiplicité des acteurs et les coûts de structure, question qui ne manquera pas de se poser étant donné la contraction des budgets. En revanche, la collégialité est un acquis dans le fonctionnement de l'ANS, tel qu'il est assuré par sa présidente et par ses équipes remarquables.
Le bât blesse parfois dans l'efficacité de la gouvernance territoriale, les conférences régionales du sport ayant un bilan inégal. Cela fait partie de mon plaidoyer pour les élections municipales. Nous devons faire usage des dispositions de la loi du 2 mars 2022 sur les plans sportifs locaux, afin de structurer la programmation des équipements au niveau du bloc communal, avec une implication forte des intercommunalités.
Ensuite, les fédérations assument bien davantage la plénitude de leurs missions, notamment en matière de développement ; je ne reviens pas sur les records battus et l'augmentation du nombre de licenciés.
Notre modèle de haute performance, caractérisé par la synergie entre l'action de l'ANS et les fédérations, doit être préservé dans sa forme actuelle. L'équipe qui lui est consacrée, au coeur de l'ANS, est très reconnue et respectée.
J'en viens à la dimension éthique de l'action des fédérations, qui font preuve de détermination en matière de lutte contre les discriminations et contre les VSS. J'y veille en répondant à leurs attentes. En particulier, les petites fédérations souhaitent être mieux accompagnées dans la gestion des dossiers disciplinaires. Souvent, elles manquent de ressources et le sujet est sensible, voire anxiogène pour leurs équipes. Je réfléchis à la création d'un modèle de fondation pour un sport sans violence, dans lequel nous nous appuierions sur des instructeurs financés par du mécénat ou issus du mécénat de compétences, qui nous permettraient de leur venir davantage en aide pour accélérer la gestion des dossiers disciplinaires. Parallèlement, je souhaite continuer à mobiliser les fédérations sur un meilleur déploiement des contrôles d'honorabilité.
Cette prise de conscience des fédérations vaut aussi pour leur engagement en faveur de l'inclusion sociale par le sport. Ainsi, une dizaine d'entre elles, pionnières, contribuent fortement à la démarche des clubs engagés dans ce domaine.
S'agissant des équipements, je fais écho à votre inquiétude et à votre volontarisme. Il existe clairement des marges de manoeuvre liées à un meilleur taux d'usage dans les territoires, qui se situerait aux alentours de 50 %. Ainsi, si certaines disciplines et municipalités sont saturées, la planification territoriale, l'ouverture de créneaux et une meilleure répartition au fil de la journée entre les associations sportives sont des pistes. C'est là un autre axe que nous poursuivons dans le cadre du plaidoyer, autour de la notion d'un nouveau pacte sportif avec les territoires.
En même temps, il faut une programmation encore plus ciblée pour les équipements structurants dans les territoires, dont nous connaissons la vétusté et les carences, comme pour les gymnases et les piscines. À des fins d'efficience et pour dégager des marges de manoeuvre, nous devons mieux mobiliser l'échelon intercommunal et les outils de planification comme Data ES.
Pour conclure, l'emploi sportif est une priorité pour nous. Nous travaillons ardemment à sa féminisation, ainsi qu'à la promotion, y compris dans les territoires, de la notion de groupement d'employeurs, afin de remédier à la fragilité, la précarité de cet emploi, ce qui est très important pour sa transformation économique et sociale.
Mme Marie-Amélie Le Fur. - En ce qui concerne le volet parasportif, l'évolution de la gouvernance a eu un impact positif considérable, l'ANS et les conférences territoriales ayant permis de réfléchir aux acteurs à réunir. Or, il y avait depuis des années un impensé du comité paralympique et de ses organes déconcentrés qui n'existaient pas à l'époque ; personne ne se faisait alors l'écho des besoins du parasport. Ainsi, la création de cette gouvernance en 2019, avec le comité paralympique comme membre fondateur et des représentants dans les conférences régionales du sport et dans les conférences des financeurs, a permis à cette voix spécifique d'émerger et de faire connaître les retours du terrain.
Concernant le périmètre de l'Agence, notre modèle est le bon, car il permet de ne pas dissocier la haute performance du développement de la pratique. En revanche, nous devons encore travailler sur la complémentarité des deux enjeux, particulièrement pour le parasport, dans la mesure où l'un irrigue l'autre.
Nous venons de fêter les six ans de l'Agence, qui devait révolutionner le modèle de la haute performance, non pas en partant d'une feuille blanche s'agissant du développement de la pratique, mais en s'appuyant sur l'existant pour le transformer totalement. Nous savons que cette dynamique peut prendre du temps, d'autant que, pendant l'épisode de covid, l'Agence s'est plutôt alignée sur celle du plan de relance.
Pour cette phase 2, nous entendons stabiliser ce qui a été acquis et développé sur la haute performance, car nous avons le bon modèle, avec une impulsion de l'Agence comprise et acceptée par les fédérations. En revanche, il faut aller beaucoup plus loin dans la construction d'un nouveau modèle de développement des pratiques. Nous avons besoin d'une véritable stratégie collégiale, ce que nous n'avons pas réussi à établir pendant les cinq premières années de l'Agence, malgré l'impulsion des membres des différents collègues. Telles sont donc l'ambition et la priorité des six prochains mois. C'est ainsi que nous obtiendrons une rationalisation des engagements du budget de l'État, à l'échelle du collège et de tous les acteurs du sport.
Ensuite se pose la question du déploiement territorial, qui n'est pas satisfaisant à ce stade. Dans des territoires n'ayant pas subi la fusion des régions, nous avons obtenu des résultats. Parfois, certains acteurs ont eu l'impression d'un fort dogmatisme tendant à amoindrir le pouvoir d'action du territoire. D'autres ont fait une lecture différente du décret et de sa déclinaison opérationnelle, d'où des modes opératoires très variables. Nous voulons profiter de l'impulsion liée au renouvellement des commissions et des conférences de territoire pour regrouper les bonnes personnes autour de la table. En effet, quand certains ne sont pas convaincus de l'intelligence collégiale, il n'y a pas d'intérêt à ce qu'ils siègent dans ces conférences.
Par ailleurs, peut-être ne sommes-nous pas obligés de dépendre de deux instances distinctes, telles que la loi les prévoit : la conférence régionale du sport et la conférence des financeurs. En effet, à 80 %, elles sont composées des mêmes représentants. Dans certains territoires, elles ont un bureau commun et se réunissent immédiatement l'une après l'autre.
Il faut s'assurer que ces conférences régionales du sport et des financeurs ne viennent pas empêcher. Elles doivent permettre de prioriser le fléchage de financements vers un projet de territoire, en laissant les collectivités maîtresses de leur budget et de leurs orientations. Il faut donc vraiment le voir comme un outil complémentaire, et non supplémentaire ou de substitution.
Concernant les équipements, vous savez très bien, monsieur le rapporteur, que je suis totalement alignée avec vous. J'ai la même inquiétude quant aux dispositifs de droit commun, au vu de ce qui est advenu du fonds vert. Ainsi, alors que celui-ci devait initialement financer la rénovation énergétique des bâtiments sportifs, nous avons appris quelques mois plus tard que ces derniers ne seraient plus éligibles. Cette perte de fonds fléchés accrédite l'idée selon laquelle le sport est vu par certains comme secondaire.
Concernant la taxe « Buffet », nous sommes bien au fait du sujet. Dans le budget initial 2026 de l'ANS, les recettes sont contractualisées à un montant bien inférieur au plafond.
Nous travaillons beaucoup avec l'ANS sur les emplois sportifs qualifiés mis à la disposition des fédérations, au niveau tant national que territorial, pour accompagner le développement de la pratique. Avec le ministère des sports, nous allons avancer sur la formation. En effet, si la loi impose que le parasport soit évoqué dans tous les diplômes, il l'est de manière très hétérogène. Nous souhaitons donc disposer d'un module dispensé dans le cadre de l'ensemble de ces formations, afin que les éducateurs disposent d'acquis communs dans ce domaine.
Enfin, nous avons pris le sujet des VSS à bras-le-corps, car leur taux de prévalence est plus élevé que la moyenne pour les PSH. Ainsi, notamment dans les compétitions où le comité paralympique est en responsabilité, nous entendons faire signer un contrat d'engagement à nos cadres et à nos athlètes, ce qui permet de remettre en cause une accréditation. À tout moment, dans le cadre d'une échelle de sanctions graduelle, il est possible d'aller jusqu'à l'exclusion complète de la compétition et des Jeux, en cas de manquement aux devoirs d'intégrité et de respect des autres. Au-delà des VSS, cela concerne tout fait de discrimination.
Mme Catherine Belrhiti. - Le premier bilan des jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 montre un intérêt accru pour la pratique sportive chez les jeunes et dans les clubs. Comment entendez-vous transformer concrètement cet héritage en bénéfice durable pour les clubs amateurs et les territoires, notamment dans les zones rurales et périurbaines ? Selon quels indicateurs ?
Avec la baisse prévue des crédits du programme « Sport », comment le CNOSF entend-il préserver le soutien aux fédérations et aux clubs amateurs tout en maintenant ses ambitions pour le haut niveau et les événements internationaux ? Envisagez-vous des financements alternatifs, comme le partenariat public-privé ou le mécénat ?
Parmi les grands perdants de la baisse de crédits, l'on trouve le sport pour tous, avec la diminution du budget de l'ANS, le retrait du Pass'Sport pour les 6-13 ans et la fin des deux heures de sport au collège. Ce sont des remontées fortes des clubs, auxquelles il faut absolument répondre. En tant qu'ancienne athlète de haut niveau, je porterai une attention toute particulière à la limitation de cette baisse des crédits.
Comment le CPSF compte-t-il capitaliser sur les Jeux de 2024 pour accroître la médiatisation, la participation et l'inclusion des sportifs paralympiques sur le territoire ? Quelles mesures sont prévues pour que cet héritage bénéficie aux fédérations et aux clubs locaux ? Le Comité prévoit-il des programmes pour sensibiliser les écoles, les universités et les clubs amateurs à l'inclusion par le sport et à la pratique paralympique ? Comment ces initiatives seront-elles valorisées pour renforcer l'impact social du Pass'Sport ?
M. Adel Ziane. - La réussite des Jeux de Paris 2024 a été remarquable à tout point de vue, grâce aux athlètes et para-athlètes français. C'est une fierté nationale. Cependant, nous devons relever plusieurs défis pour faire vivre l'héritage de ces Jeux et préparer sereinement ceux de 2030.
Ma première question porte sur le rôle des collectivités territoriales. Si l'héritage matériel est incontestable pour mon département de la Seine-Saint-Denis, l'héritage immatériel reste à faire vivre, alors que nous avons le taux de licenciés le plus faible de France hexagonale. Toutefois, le département est au rendez-vous, parfois au-delà de ses compétences. Grâce au boni des Jeux, nous avons pérennisé plusieurs dispositifs de soutien de la pratique sportive pour tous, qui favorisent l'apprentissage de la nage, le sport-santé, l'inclusion et l'insertion des publics en difficulté. Vos deux institutions ont un rôle crucial à jouer pour accompagner les départements. Quel plan d'action concret envisagez-vous pour renforcer cette action, au regard du soutien que vous apportez déjà aux clubs ?
Ensuite, après une baisse de 182 millions d'euros en 2025, le budget du sport va subir à nouveau une coupe de 39 millions d'euros, en particulier pour l'action « Promotion du sport pour le plus grand nombre ». Vous avez toutes deux qualifié ce taux d'effort d'excessif et de disproportionné et souligné le risque posé pour les clubs, les emplois d'éducateurs et l'accès des enfants au sport. Madame Oudéa-Castera, au regard de vos expériences ministérielles passées, comment comptez-vous peser sur ces arbitrages ?
Par ailleurs, compte tenu du budget présenté, qui efface une partie des efforts accomplis lors de l'organisation des JOP, comment pérenniser l'héritage et les bonnes pratiques de Paris 2024 ? Quelle est votre feuille de route pour assurer la transition vers les Jeux de 2030 et garantir que les établissements, les clubs et les territoires seront prêts ?
Mon dernier point porte sur le traitement des athlètes et sur les enjeux de santé mentale, d'après-carrière, d'équité, mais aussi d'intégrité sportive. La polémique autour de la participation de Mouhamadou Fall aux Enhanced Games, où le recours à des produits « améliorants » est autorisé, illustre l'urgence de disposer d'un cadre clair et protecteur. Comment entendez-vous renforcer la protection des athlètes tout en prévenant de tels détournements et quelles sanctions proposez-vous pour ceux qui aggravent la défiance vis-à-vis de l'olympisme ?
M. Claude Kern. - Vous avez évoqué la mutualisation des équipements sportifs. Toutefois, il convient de ne pas oublier les grands équipements sportifs, qui manquent cruellement en France. En outre, plutôt que de construction, il faudrait parler de rénovation. Le risque est, sinon, de créer des friches. À ces fins, envisagez-vous de promouvoir cette démarche et de faciliter le recours à des partenariats public-privé ? Cela permettrait également, plus qu'une mutualisation, une utilisation en multi activité de ces équipements, à l'appui de l'un de vos objectifs, qui est aussi le nôtre : que le sport devienne une grande cause municipale, ce qui est délicat en cette période de disette budgétaire.
En ce qui concerne le sport de haut niveau, nous savons que le CNOSF et le CPSF jouent un rôle essentiel dans sa préparation et son accompagnement, en lien avec l'ANS. Ainsi, après le succès des Jeux de Paris 2024, la question se pose de la capacité à maintenir ce niveau d'exigence, alors que les crédits consacrés au développement des pratiques sportives sont en net recul. Ces moyens sont pourtant nécessaires pour satisfaire la promesse d'héritage et contribuer à l'émergence de futurs talents, pour les athlètes tant olympiques que paralympiques.
Comment entendez-vous consolider le modèle français du sport de haut niveau dans la perspective des prochaines échéances internationales ? Peut-on rester l'une des premières nations de sport de haut niveau sans mettre les moyens nécessaires à l'émergence d'une véritable nation sportive, où le sport est intégré comme un élément de la culture nationale, à tout âge et sur tout le territoire ?
Mme Mathilde Ollivier. - Mesdames les présidentes, nous vous auditionnons dans un contexte particulièrement préoccupant pour le sport français. Alors que la France s'apprête à accueillir à nouveau un grand événement sportif en 2030, nous constatons des reculs importants en matière de soutien budgétaire au sport. Les crédits sont certes maintenus pour la haute performance, mais des inquiétudes pèsent sur les équipements, le soutien aux fédérations, le Pass'Sport ou encore l'accompagnement à la pratique des personnes les plus éloignées.
Les Jeux d'hiver sont moins populaires que les Jeux d'été, seuls 8 % des Français déclarant pratiquer des sports d'hiver ou de montagne. Dans un contexte de fortes contraintes budgétaires, il serait donc difficilement justifiable que des moyens publics conséquents soient engagés au détriment du sport au quotidien. Ainsi, comment le CNOSF et le CPSF entendent-ils peser dans les discussions avec l'État et avec l'ANS pour garantir que la préparation des Jeux d'hiver de 2030 ne se fasse pas au détriment des clubs, des associations et des équipements locaux, socle même de notre politique sportive ? En effet, le haut niveau ne peut inciter à la pratique que si la vitalité des structures locales, dont le haut niveau dépend, est soutenue. C'est tout l'enjeu de ce budget.
Ensuite, certains d'entre vous ont peut-être vu le documentaire Futurs champions, le prix de la gloire, diffusé sur Arte et qui concerne l'entraînement des enfants à la pratique de haut niveau selon des méthodes qui, dans beaucoup de pays occidentaux, entraînent encore des séquelles avant l'âge de 10 ans : blessures à répétition, burn-out, anorexie. Dans un contexte d'enjeux financiers toujours plus importants, certains entraîneurs profitent d'un vide juridique dans ce domaine. Des réflexions sont-elles menées au sein de vos organismes pour mieux protéger ces enfants ? Quel cadre prévoir pour les enfants pratiquant le sport de haut niveau, à l'instar de ce qui existe dans le domaine du spectacle ?
M. Bernard Fialaire. - Une confusion persiste entre l'activité physique et le sport, la présence d'un délégué interministériel chargé du sport-santé complexifiant encore les choses. L'activité physique dépend du ministère de la santé, le sport de la jeunesse et des sports, et l'éducation physique et sportive de l'éducation nationale, ce à quoi s'ajoute le sport scolaire. Or, tout est indispensable à notre jeunesse, que ce soit dans la prévention en matière de santé, dans l'inclusion, dans l'apprentissage des règles ou de l'effort, ou encore dans la maîtrise de son corps et la lutte contre le mal-être. Il convient donc de démêler cette confusion.
Le sport universitaire est complètement délaissé, alors que l'on constate un grand mal-être étudiant et un problème de santé mentale. Comment le sport olympique, qui est une vitrine, peut-il être un vecteur de communication pour amener cette tranche de notre population vers une activité sportive ?
M. Pierre Ouzoulias. - « Citius, altius, fortius », « Plus vite, plus haut, plus fort » : telle est la devise des jeux Olympiques. Toutefois, il me semble qu'en France, nous sommes passés à « minus cito, minus alte, minus fortiter », c'est-à-dire « moins vite, moins haut, moins fort »... Le constat est terrible.
Le problème des équipements est fondamental et le retrait du fonds vert, par les préfectures, est une catastrophe absolue pour la mise à niveau énergétique des équipements sportifs. Cela démontre qu'il n'y a pas de politique pluri ministérielle et que le ministère des sports, comme celui de la culture, est incapable de faire défendre par d'autres ministères des politiques qui concernent tout le monde.
Un exemple : la réussite des frères Lebrun a suscité une énorme demande pour le ping-pong, laquelle reste totalement insatisfaite, parce que les équipements sont vétustes et insuffisants. Des gymnases ne sont pas utilisés faute de chauffage, parce que l'on ne peut pas jouer au tennis de table quand il fait 12 degrés. Ce n'est pas un problème de coordination interterritoriale, mais de matériel : des installations sont aujourd'hui complètement obsolètes du fait de leur non-mise à niveau énergétique.
Nous avons donc besoin d'un plan national, car les communes n'y arriveront pas toutes seules. Si nous voulons offrir plus de sport aux gens, il faut d'abord leur donner des équipements. Tous les acteurs sur le terrain sont concernés, notamment les préfectures.
Mme Béatrice Gosselin. - Le nombre de missions de service civique, qui atteint 110 000, a baissé de 40 000, ce qui posera un problème pour nos activités sportives, pour l'encadrement des jeunes et pour l'insertion des PSH.
Toutefois, le point le plus crucial est celui que soulève notre collègue Pierre Ouzoulias : malgré l'engouement pour les piscines, avec Léon Marchand, pour le tennis de table ou pour le judo, nous n'avons pas toujours, dans les territoires ruraux, les équipements nécessaires. Cela crée une rupture entre les territoires, alors que l'élan post-olympique ne peut s'entretenir sans une visibilité pluriannuelle, indispensable pour que les collectivités puissent planifier, engager et entretenir leurs équipements.
Une partie du boni de 76 millions d'euros issu de la liquidation des Jeux pourrait-elle être mobilisée pour remplacer des équipements défaillants, pour améliorer leur qualité énergétique et pour construire là où il y en a besoin ? Dans certains territoires, les enfants veulent faire du sport, mais nous n'avons pas de salle pour eux.
M. Cédric Vial. - En réponse à Mathilde Ollivier, je précise que le centre de recherche pour l'étude et l'observation des conditions de vie (Crédoc) mentionne que 9 % des Français sont allés en vacances aux sports d'hiver durant l'hiver 2022-2023. Habitant à la montagne, je n'en fais probablement pas partie, n'y allant pas en séjour, bien que pratiquant des sports de montagne. En fait, ce sont bien 19 % de la population, soit un peu plus de 12 millions de personnes, qui déclarent pratiquer les sports d'hiver, c'est-à-dire le ski ou le snowboard, au moins tous les deux ou trois ans. Cela signifie qu'après le jogging, il s'agit probablement du sport le plus pratiqué alors que l'on compte, par exemple, 1,2 million de trailers. Je ne suis donc pas complètement convaincu par l'argument sur la popularité de ces activités...
Nous sommes un certain nombre ici à avoir signé une tribune transpartisane, avec des députés et des représentants du monde sportif ou associatif, afin que le sport adapté ait son moment lors des Jeux des Alpes de 2030. Ce serait l'honneur de la France, après une expérience à Nagano qui ne s'est jamais reproduite, que d'accueillir les premiers jeux Olympiques et Paralympiques accessibles au sport adapté. Alors que les décisions se prennent en ce moment même, j'aimerais vous entendre sur ce point et j'espère que vous soutiendrez les initiatives que nous sommes nombreux ici à avoir prises pour encourager de telles compétitions.
M. Jacques Grosperrin. - Les associations sont le socle de la pratique sportive en France. À Bernard Fialaire, qui s'interrogeait sur la confusion entre les activités physiques et le sport, je réponds que le sport est avant tout une activité physique institutionnalisée, avec des compétitions.
Le modèle associatif en France est menacé, ce que traduit ce projet de loi de finances avec la baisse des subventions au travers du Pass'Sport, les suppressions de postes de CTS, le manque d'équipements et, surtout, la difficulté à recruter des bénévoles. Compte tenu de ce budget contraint, de quels leviers disposez-vous pour accompagner le réseau associatif sportif ?
J'en viens à la loi tant attendue sur l'héritage, non seulement par les sénateurs, mais également par l'ensemble des Français. La vétusté des infrastructures sportives et le maillage territorial des équipements posent parfois problème, de même que la gouvernance des fédérations et la carrière des sportifs de haut niveau. Avez-vous eu des échanges avec l'exécutif ? Quelles sont les principales pistes à l'étude ?
Mme Sonia de La Provôté. - L'une des missions de l'ANS est l'observation territoriale de la demande sportive. Or le financement des équipements et la mise à niveau du parc existant sont singulièrement mis en difficulté au regard des orientations budgétaires. La DETR, la DSIL et le fonds vert ne pourront répondre à toutes les demandes, alors que le secteur scolaire est déjà une priorité, à laquelle je ne vois pas comment le sport peut se raccrocher.
Nous constatons une diminution du nombre de CTS et de services civiques, alors que le financement des collectivités territoriales pose question et que le sponsoring est en difficulté. Par conséquent, l'expression des droits sportifs, pour dresser un parallèle avec les droits culturels, devrait être une priorité nationale, au regard des valeurs du sport et républicaines, ainsi que du rapport à la citoyenneté qu'elle sous-tend. Or, ces droits sportifs sont singulièrement mis en difficulté, dans leur répartition territoriale comme disciplinaire. Où en est l'ANS, dont l'une des missions principales est de guider le ministère dans ses orientations nationales, sans s'y substituer ?
M. Jean-Gérard Paumier. - Je me permets d'appeler, comme ancien maire et ancien président de département, votre attention sur le dysfonctionnement financier de certaines fédérations sportives. Lors des assemblées générales annuelles, de nombreux clubs locaux font en effet état de hausses régulières de la contribution au comité départemental ou à la ligue régionale. En outre, ils doivent s'en acquitter, la plupart du temps, en début de saison sportive, à l'automne, au moment où leur trésorerie n'est pas au plus haut.
Ainsi, dans un certain nombre de cas, j'ai constaté que la subvention communale versée à un club sportif servait en fait uniquement à payer sa quote-part à l'échelon départemental ou régional, qui a en main l'atout maître de la délivrance des licences. Que comptez-vous faire pour remédier à ces situations qui, même si elles sont rares, sont parfois ressenties comme une forme de racket organisé ?
Mme Amélie Oudéa-Castéra. - Je souhaite relever le défi du sénateur Ouzoulias : avec combativité et sans reproduire le défaitisme que nous avons connu en amont des JOP 2024, nous pouvons réaliser, avec lucidité, que le sport français va globalement bien. L'évolution du nombre de licences et du taux de pratique, y compris pour des publics qu'il était compliqué de faire progresser - femmes, seniors, PSH -, est positive.
En revanche, certains combats se matérialisent à l'occasion du projet de loi de finances pour 2026, à commencer par la place du sport dans la vie de notre jeunesse. C'est pourquoi je réaffirme ma vive préoccupation au regard du démantèlement du Pass'Sport pour les 6-13 ans et du dispositif des deux heures de sport en plus pour les collégiens, alors que nous devons conserver une forte ambition.
La question nous a été posée des quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV) : les cités éducatives doivent continuer d'être encouragées et le temps extrascolaire doit être bien utilisé pour un accueil en club de nos enfants. C'est le sens de la contribution que le CNOSF, avec des chercheurs et des universitaires, a versé au Conseil économique, social et environnemental (Cese), en vue de la Convention citoyenne sur les temps de l'enfant.
Les 6-13 ans représentent environ 80 % des bénéficiaires du Pass'Sport. Or, au sein des fédérations de gymnastique ou d'athlétisme, par exemple, l'on constate que des milliers d'enfants issus de familles modestes abandonnent la pratique. Il est crucial d'enrayer cette chute, quitte à imaginer, dans le contexte budgétaire difficile que nous connaissons, un recentrage socio-économique, en travaillant mieux avec les caisses d'allocations familiales, au bénéfice des familles modestes.
La pratique étudiante est également un enjeu, au sujet duquel nous avons un travail d'animation à mener avec les universités. Vous connaissez mon engagement sur cette thématique. Ainsi, il faut que nous développions les championnats universitaires en héritage des Jeux, dont nous avons vu, en 2024, qu'ils étaient efficaces pour relancer le goût des étudiants pour la pratique sportive, alors que 40 % d'entre eux ne font pas de sport et que des problèmes très importants existent pour leur santé mentale et leur équilibre psychologique.
Je vous rejoins sur l'importance des collectivités territoriales dans le financement du sport, pour lequel les communes sont au premier rang, à hauteur de 8 milliards d'euros, auxquels j'ajoute plus de 3 milliards d'euros de la part des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI). Il est extrêmement important de leur donner, dans un partenariat avec le mouvement sportif, la confiance nécessaire pour continuer à porter la pratique sportive locale.
Il ne s'agit pas pour elles, cependant, de compenser un désengagement de l'État, qu'il faut combattre. Il convient donc de mieux accompagner, par exemple au moyen des plans sportifs locaux, la programmation et l'animation de ces politiques sportives. Or aujourd'hui, le CNOSF n'a plus aucune marge de manoeuvre financière, compte tenu de notre effort envers le comité d'organisation et de la contraction liée à notre CPO.
Je rappelle également que le boni de liquidation des Jeux, dont 20 % reviennent au CNOSF, ne peut en aucun cas alimenter ses dépenses de fonctionnement, puisque son produit est réservé à la promotion du sport en France. Telle est la raison de mon message sur le maintien de la subvention de l'État, condition à laquelle nous pourrons continuer à jouer notre rôle de structure faîtière vis-à-vis de nos fédérations.
Je suis particulièrement active sur le front du développement des nouvelles sources de financement. Ainsi, le sport concentre 58 % des mécènes et 40 % des volumes en France, avec parfois une progression de douze à quinze points, avec une forte importance des territoires, notamment des PME.
Cela étant, nous avons besoin de développer des contacts avec les banques publiques d'investissement et avec des fonds d'investissement, mais aussi de rechercher des améliorations de l'environnement normatif, par exemple sur les hospitalités ou le sponsoring, afin de stabiliser leur cadre juridique. J'insiste sur le partenariat que je suis en train de construire avec la Caisse des dépôts, plus particulièrement avec la Banque des territoires. Il nous permettra, à compter de 2026, d'embarquer tous les acteurs pertinents.
La modernisation des équipements sportifs s'inspire du dispositif EduRénov, consacré aux établissements scolaires. Nous souhaitons ainsi qu'une démarche « Sport Rénov' » ouvre aux collectivités l'accès, pour leurs installations sportives et leurs clubs municipaux, à des taux bonifiés et à l'ingénierie technique gratuite des prestataires de la CDC.
Parmi les points d'inquiétude, les équipements sont cruciaux. Il faut mieux utiliser l'argent, au moyen d'une programmation plus ciblée et outillée. À cet égard, j'ai souligné l'importance de l'outil Data ES afin d'obtenir des éléments qualitatifs et quantitatifs de programmation. Nous devons mieux travailler avec les préfets, qui seront les délégués territoriaux de l'Agence et qui prioriseront les enveloppes pour le sport demain. Il n'est pas acceptable que l'évolution du fonds vert conduise à supprimer des financements locaux pour le sport.
En même temps, nous devons travailler sur l'optimisation des usages. Ainsi, certains territoires sont saturés, quand d'autres disposent de capacités sous-utilisées, ce qui peut être corrigé par une analyse de l'utilisation effective des plages horaires et aussi par une meilleure mutualisation des équipements scolaires. À cet égard, vous êtes un relais important, mesdames et messieurs les sénateurs. Je rappelle que les établissements scolaires comportent pas moins de 26 000 équipements, dont seulement 20 % sont en accès libre pour les associations sportives.
Le soutien au bénévolat est une autre de nos priorités. Je ferai des annonces importantes le 5 décembre prochain, à l'occasion de la journée mondiale du bénévolat, afin de renforcer la visibilité nationale de l'offre de formation. Nous travaillons avec les acteurs de l'administration du travail, la délégation générale à l'emploi et à la formation professionnelle (DGEFP), mais aussi la Caisse des dépôts, responsable du passeport de compétences, pour oeuvrer à une meilleure reconnaissance des acquis de l'expérience bénévole. Nous sommes aussi très attachés à une meilleure animation des communautés de bénévoles et de volontaires des Jeux de Paris 2024, dont certaines, que je salue, sont en train de se structurer.
J'en arrive aux ressources humaines, alors que les CTS sont vitaux pour la santé du sport français. J'ai vraiment besoin de votre aide sur ce point.
Je voudrais faire écho à ce qui a été dit sur l'accueil collectif de mineurs. Les imperfections révélées dans certaines disciplines sportives doivent être corrigées. La direction des sports du ministère est, je le sais, particulièrement mobilisée sur ce sujet ; je me fais l'écho des préoccupations que vous relayez pour que nous continuions de bien accompagner nos jeunes.
Enfin, afin de préserver le double projet de nos hauts potentiels sportifs, nous devons poursuivre des actions ambitieuses dans le cadre de l'héritage, au sein de nos établissements universitaires et jusqu'à l'Institut national du sport, de l'expertise et de la performance (Insep), avec le dispositif des hautes études pluridisciplinaires pour top athlètes (Hepta).
M. Laurent Lafon. - Les collectivités peuvent-elles présenter des dossiers pour le financement de leurs équipements afin de bénéficier du boni ?
Mme Amélie Oudéa-Castéra. - Non, les dépenses d'équipement ne sont pas éligibles au boni, réservé à trois axes : les célébrations, le développement de la pratique - par exemple, les programmes « Savoir rouler » et « Savoir nager », à fort impact territorial - et l'accompagnement des athlètes. Nous avons beaucoup à faire pour ces derniers, que ce soit pour leur reconversion, pour le double projet que j'évoquais ou pour leur santé mentale, qui est l'une de nos priorités avec Marie-Amélie Le Fur.
Mme Marie-Amélie Le Fur. - Pour nous, il y a véritablement enjeu à poursuivre les activités de rayonnement des jeux Paralympiques, et même du parasport au sens large. C'est pourquoi le travail d'accompagnement des médias et du champ audiovisuel va se poursuivre. Nous avons eu une petite baisse d'effectifs au sein du Comité, mais nous avons souhaité que le pôle communication et marketing reste important en termes de ressources humaines. L'objectif est d'inciter les acteurs de l'audiovisuel à parler plus, et surtout mieux, des jeux Paralympiques, c'est-à-dire plus des sujets sportifs que de la situation du handicap.
Nous sommes sur une logique de projets et d'actions à destination des acteurs clés. Dans les territoires, ce sont évidemment les clubs. Nous sommes en train de réfléchir à leurs besoins. De ce point de vue, le programme Club inclusif, centré sur la sensibilisation des bénévoles et des encadrants, est un outil très utile. Les mesures d'impact que nous commençons à mettre en place démontrent un très haut taux de satisfaction, tant de la part des clubs, qui sont satisfaits à 95 % ou 96 %, que - cela répond aussi à la question sur l'héritage immatériel des collectivités - sur l'accompagnement. En l'espèce, 80 % des collectivités engagées dans le programme avaient déjà une volonté d'agir en faveur du parasport, mais seulement 16 % d'entre elles avaient un plan d'action structuré. Nous avons créé un guide à destination des élus au sport des départements pour les aider à conduire des politiques publiques du parasport en termes d'équipement et d'accompagnement des associations. Une politique incitative, ce n'est pas que du budgétaire ; parfois, c'est aussi du dialogue relationnel. Nous venons de déployer ce programme à La Réunion ; c'est la première fois que nous avons un dispositif spécifique à destination des territoires d'outre-mer.
Nous avons également développé un axe très fort en faveur de la jeunesse. À nos yeux, parler des jeux Paralympiques est aussi un moyen d'acculturer les jeunes de manière dynamique et ludique au handicap. Avec le CNOSF, nous sommes déjà en train de préparer l'édition 2026 de la semaine Olympique et Paralympique. Je vous invite à échanger avec le Cojop pour savoir quelles seront leurs priorités pour 2030 ; je pense que la jeunesse en fera partie.
L'Agence veut continuer d'avancer sur les équipements, notamment les équipements structurants, l'innovation et la rénovation. En tout cas, c'est le plan d'action que nous avons proposé. Après avoir mis en place plus de 10 000 équipements de proximité, nous devons réorienter l'action de l'Agence, par exemple sur la rénovation énergétique de gymnases où il fait froid. Pour les collectivités, cela représente des dépenses considérables. Nous devons aussi envisager de nouvelles typologies d'équipements, pour être mieux adaptés à la réalité des territoires. Il est parfois un peu compliqué de comprendre quel est le besoin réel d'une collectivité qui veut sortir un équipement.
Nous sommes donc en train de travailler sur un pivotement des ressources humaines de l'Agence nationale du sport vers le pôle équipement, qui, à date, gère des décaissements de subventions. Je souhaite qu'ils soient comme les conseillers haute performance, en appui d'expertise auprès des collectivités. Ils doivent pouvoir expliquer ce que sont les pratiques émergentes et faire un vrai observatoire de ce qui existe par ailleurs en France et à l'international, afin d'aider les collectivités à la construction ou la rénovation des équipements, et ce avec une vision à cinq ans ou à dix ans des besoins des territoires. Ils doivent aussi être dans une dynamique d'accompagnement des nouveaux modèles économiques, notamment du modèle économique public-privé, en matière d'équipements comme dans le fonctionnement des clubs.
Le boni doit venir en complémentarité des axes et des orientations qui seront retenus pour le Cojop dans la perspective de 2030 et par l'Agence, afin de permettre des réorientations et des priorisations dans certains secteurs et, dans notre cas, de retrouver de la capacité d'action sur les équipements.
Avec Amélie Oudéa-Castéra, nous ne voulons pas la performance à tout prix ; nous voulons la performance dans le respect de l'intégrité de nos sportifs de haut niveau. Nous avons sorti voilà trois semaines un plan d'action en faveur de la santé mentale des sportifs de haut niveau, tant sur le temps de la compétition, avec ce qu'on appelle les welfare officers, qu'en dehors, avec des suivis psychologiques.
L'idée est évidemment aussi de sécuriser l'intensité d'entraînement. Nous avons un outil médical : le suivi médical réglementaire (SMR) des sportifs de haut niveau, sur lequel nos deux commissions médicales respectives travaillent. Il ne s'agit pas seulement d'un suivi antidopage ; c'est avant tout un suivi d'intégrité des sportifs de haut niveau, avec un volet psychologique, physiologique et physique. Lorsqu'un médecin a des indicateurs qui lui semblent alarmants, il nous passe un coup de fil, et nous essayons de comprendre ce qui se passe physiquement ou mentalement. Cela permet de détecter des situations à risques.
Sur la feuille de route 2030, il ne sera pas acceptable d'avoir des vases communicants en termes de financement. Il faut conserver tout ce que nous avons fait pour le sport d'été et le développement de sa pratique, et agir de manière complémentaire.
Plus que du sport de montagne ou des sports d'hiver, je parlerais de sport outdoor. Parler du sport outdoor, c'est parler de la jeunesse, du sport nature, de l'association avec tous les territoires. L'un des enjeux des Jeux de 2030 sera l'éducation à la biodiversité et à l'environnement.
Nous agirons évidemment en faveur de la présence des athlètes déficients intellectuels aux Jeux de 2030. D'ailleurs, le CPSF est associé à la tribune qui a été mentionnée. Nous avons déjà eu des réunions sur le sujet avec le Cojop. À l'échelon international a été adoptée une motion du mouvement paralympique pour inciter le board du Comité international paralympique (IPC) à travailler sur le sujet et à nous présenter une feuille de route d'ici au 31 décembre 2025. Nous avons un peu de temps, car il ne s'agit pas d'ajouter un sport supplémentaire ; c'est simplement une classification et une discipline additionnelles.
L'Agence nationale du sport et le ministère des sports continuent le travail en commun, d'autant qu'Amélie Oudéa-Castéra avait donné une impulsion forte en ce sens en tant que ministre.
Pour être opérateur-conseil, nous devons avancer et discuter collégialement du déploiement opérationnel de la stratégie - j'y ai fait référence tout à l'heure -, notamment afin de prioriser certaines actions, dans un souci de plus grande efficacité.
M. Laurent Lafon, président. - Mesdames les présidentes, nous vous remercions de vos réponses. Il était d'autant plus important de vous entendre ce matin que nous auditionnerons cet après-midi Mme Marina Ferrari, ministre des sports, de la jeunesse et de la vie associative.
Cette audition a fait l'objet d'une captation vidéo qui est disponible en ligne sur le site du Sénat.
Audition de M. Didier Samuel, candidat proposé par le Président de la République aux fonctions de président de l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm)
M. Laurent Lafon, président. - Nous recevons ce matin M. Didier Samuel, candidat proposé par le Président de la République aux fonctions de président de l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm).
Quelques explications juridiques s'imposent sur les raisons d'une telle procédure, alors que M. Samuel a été nommé le 1er février 2023 pour un mandat de quatre ans, soit jusqu'au 1er février 2027.
Né le 24 octobre 1957, M. Samuel a atteint la limite d'âge de 68 ans, fixée par le code de la recherche.
En application de l'article L. 341-4 du code général de la fonction publique, les fonctionnaires occupant un emploi à la décision du Gouvernement atteints par la limite d'âge qui leur est applicable peuvent être maintenus dans cet emploi dans l'intérêt du service et avec leur accord, pour une durée maximale de deux ans, « par une décision prise dans les mêmes formes » que leur nomination.
Suivant une jurisprudence du Conseil d'État, la présidence de l'Inserm est assimilée à un emploi à la décision du Gouvernement.
Aussi la décision de maintenir en fonction M. Samuel ne peut-elle intervenir qu'après son audition par les commissions compétentes de l'Assemblée nationale et du Sénat, en application des dispositions des lois organiques du 23 juillet 2010 relatives à la mise en oeuvre du cinquième alinéa de l'article 13 de la Constitution.
La commission des affaires culturelles de l'Assemblée nationale a entendu M. Samuel tout à l'heure, puis procédé à un vote à bulletin secret. Les dépouillements de celui-ci et du vote auquel procédera notre commission auront lieu simultanément à l'issue de cette audition. Je précise que celle-ci est publique et diffusée sur le site internet du Sénat.
Je rappelle également que le Président de la République ne pourrait pas procéder à cette nomination si l'addition des votes négatifs de chaque commission représentait au moins trois cinquièmes des suffrages exprimés dans les deux commissions.
Monsieur Samuel, depuis votre nomination, au mois de février 2023, notre commission a eu l'occasion d'échanger avec vous à plusieurs reprises, que ce soit dans le cadre d'auditions budgétaires au format rapporteur ou d'auditions en commission plénière sur des thématiques plus spécifiques. Vous avez également reçu une délégation de notre commission en avril dernier au Centre de recherche cardiovasculaire, visite au cours de laquelle nous avons pu aborder de nombreux sujets nationaux et internationaux. Vous êtes donc un interlocuteur régulier et important de notre commission.
Alors que vous êtes à mi-mandat, nous voudrions savoir quel regard vous portez sur vos deux premières années à la tête de l'Inserm. Quelles actions avez-vous menées ? Dans quels objectifs et avec quels résultats ? Avez-vous rencontré des difficultés particulières ? Avez-vous renoncé à certaines ambitions, voire échoué sur certains dossiers ?
Nous sommes aussi intéressés de connaître les perspectives que vous tracez pour l'Inserm à court et moyen termes, dans un contexte budgétaire que nous savons très contraint et alors que la question de la souveraineté de notre recherche se fait de plus en plus prégnante.
Après votre prise de parole liminaire, vous serez interrogé par notre rapporteure Laurence Garnier, puis par les collègues qui le souhaiteront.
M. Didier Samuel, candidat proposé par le Président de la République aux fonctions de président de l'Institut national de la santé et de la recherche médicale, rapporteur. - Monsieur le président, comme vous l'avez rappelé, j'ai eu 68 ans voilà trois semaines. Je me présente devant vous aujourd'hui, car je souhaite aller jusqu'à la fin de mon mandat, au mois de janvier 2027, afin de mener à bien la mission qui m'a été confiée.
Je le rappelle, je suis professeur de médecine, spécialiste des maladies du foie et de la transplantation hépatique. J'ai dirigé un service hospitalo-universitaire à l'hôpital Paul-Brousse pendant vingt-cinq ans. J'ai aussi été, pendant dix-sept ans, directeur d'une unité de recherche de l'Inserm Paris-Saclay sur les maladies du foie. J'ai également eu une activité internationale ; j'ai été éditeur en chef du Journal of Hepatology pendant cinq ans. J'ai par ailleurs été président de la Société internationale de transplantation hépatique. J'ai également eu des fonctions électives de doyen. J'ai été doyen de la faculté de médecine Paris-Saclay pendant six ans et président de la conférence des doyens de médecine avant de devenir président de l'Inserm.
Depuis mon arrivée, j'ai souhaité renforcer l'image de l'Inserm, pour la faire correspondre à ce qu'il est : un institut de la recherche biomédicale nationale. J'ai également voulu mettre en avant son lien très fort avec la santé et la qualité de la médecine en France et lui donner une position centrale en recherche biomédicale, dans un triangle composé de l'Inserm, des centres hospitaliers universitaires (CHU) et des universités. Il s'agissait pour moi de doter l'Inserm d'une stratégie à la fois nationale et scientifique. Il y a aussi une stratégie de site en partenariat avec l'université, les CHU et les autres organismes de recherche.
J'ai renforcé la visibilité et la présence de l'Inserm en Europe et dans le monde. J'ai également mis en place l'agence de programmes de recherche en santé. Et je me suis inscrit dans l'objectif université cheffe de file.
Dans la continuité de mes deux premières années, mon projet pour 2025-2027 est celui d'un avenir ambitieux pour l'Inserm.
Tout d'abord, je souhaite faire de l'agence de programmes de recherche en santé, qui a été créée au mois de mars 2024, une réussite et l'amener à maturité. J'ai voulu avoir deux vice-présidents, dont l'un représenterait les directeurs généraux de CHU et l'autre, les universités. J'y ai créé un vrai bloc de recherche en santé, avec trente-sept partenaires, dont les CHU, les universités, les autres organismes de recherche, les différentes agences en santé, et un bureau exécutif.
Nous avons pu lancer trois programmes et équipements prioritaires de recherche (PEPR) : un sur les maladies neurodégénératives, un sur les maladies inflammatoires chroniques et auto-immunes et un sur la transplantation d'organes. J'ai aussi mis en place le programme France Vaccin, qui vient d'être validé, afin de redonner à la France une vraie visibilité en vaccinologie.
Parallèlement au projet de loi sur la fin de vie, nous avons lancé un programme de recherche sur le sujet, financé par le programme 172 « Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires », à hauteur de 5 millions d'euros sur cinq ans.
L'Inserm travaille actuellement à un programme de recherche sur la prévention, de 60 millions d'euros, qui sera déposé d'ici quelques semaines. Il met en place un comité d'orientation stratégique, un comité scientifique international, et je veille à ce qu'il se coordonne aussi avec les autres agences, notamment l'Agence nationale de recherche et de sécurité Maladies infectieuses émergentes (ANRS-Mie) et l'Institut national du cancer (INCa). J'ai aussi institué un comité d'interface avec le groupement d'intérêt scientifique (GIS) Institut pour la recherche en santé publique, afin de nous coordonner.
Je pense donc avoir réussi à mettre autour de la table au cours de cette année l'ensemble des acteurs et, surtout, à proposer une gouvernance apaisée, transparente et efficace.
J'ai aussi souhaité redéployer l'Inserm à l'international. J'ai relancé l'ensemble des partenariats internationaux. Je suis allé à l'étranger, et j'ai signé des conventions avec différents organismes : National Institutes of Health (NIH) américains, universités de Pittsburgh, d'Ottawa, de Laval, de Singapour, Taïwan, de Shanghai, Riken au Japon, etc. J'ai participé activement au forum annuel Science, technology and society de Kyoto et au Head of international research organisation (HIROs) meeting, où se réunissent une trentaine de dirigeants d'organismes de recherche nationaux ; la prochaine édition aura d'ailleurs lieu, à ma demande, à Paris au mois de juin 2026 ; je la coordonnerai avec Yasmine Belkaid, de l'Institut Pasteur.
J'ai créé aussi des joint labs internationaux entre nos laboratoires et des laboratoires internationaux, pour renforcer notre visibilité. J'ai ouvert un bureau de l'Inserm à Washington depuis deux ans et j'envisage l'ouverture d'un bureau à Tokyo en 2026.
J'ai par ailleurs mis en place un réseau d'ambassadeurs de l'Inserm : neuf chercheurs, anciennement de l'Inserm, qui travaillent à l'étranger y représentent l'Institut.
J'ai aussi souhaité regagner de l'influence en Europe. Je suis allé dans plusieurs pays : Allemagne, Autriche, Pays-Bas, Danemark. La semaine dernière, j'étais à Londres pour renouer les liens avec les Britanniques, qui sont nos premiers partenaires en recherche et qui sont revenus dans le cluster de santé Horizon Europe depuis maintenant un an. D'ailleurs, ils sont les premiers récipiendaires de l'European Research Council (ERC).
J'ai créé des joint labs européens : un en Allemagne, un en Autriche, un en Angleterre et un en Espagne. L'Inserm est le premier récipiendaire européen au sein d'Horizon Europe, et de très loin, devant tous les autres organismes de recherche. Nous sommes très présents en recherche collaborative européenne. Nous coordonnons d'ailleurs l'European Joint Programme on Rare Diseases (EJPRD) sur les maladies rares ; nous coordonnons aussi Be Ready, sur la préparation aux épidémies, et le Joint Programming Initiative on Antimicrobial Resistance, sur la résistance aux antibiotiques. Ce sont des programmes à 150 millions ou 200 millions d'euros avec une trentaine de pays.
L'un de mes objectifs est clairement d'être plus présent encore à l'ERC et à Horizon Europe pour les chercheurs.
J'ai également voulu faire revenir l'Inserm dans les outre-mer. Je suis allé à La Réunion, en Guyane, aux Antilles. J'ai créé la première unité de recherche en Guyane, en janvier 2025. Elle sera d'ailleurs, en parallèle avec la création du CHU de Guyane, très axée sur les maladies infectieuses et sur la santé publique. Les territoires ultramarins sont importants, car ils ont des pathologies infectieuses différentes, mais susceptibles de nous concerner en métropole : Zika, dengue, chikungunya, etc. Il y a aussi des problématiques de santé publique et de santé environnementale, comme la drépanocytose et le chlordécone en Guadeloupe.
Je souhaite que l'Inserm soit un acteur majeur de la recherche d'excellence. Je rappelle que nous avons 280 unités de recherche, qui sont toutes des unités mixtes avec les universités, 50 unités mixtes de services et 9 000 chercheurs. Et je soutiens la recherche à l'échelon local, avec la nomination de vingt référents scientifiques Inserm qui dialoguent notamment avec les universités.
L'Inserm a porté plusieurs programmes, dont Impact Santé, financé pour 30 millions d'euros par France 2030, avec une vraie volonté d'avoir des objectifs de recherche de rupture. Nous avons labellisé une dizaine de projets d'excellence et d'accélération et six projets exploratoires dans ce cadre-là. Il y a eu des programmes d'impulsion, qui sont des programmes plus petits, sur la chirurgie du futur, sur climat et santé, sur exposome et santé, c'est-à-dire l'environnement. Nous avons créé deux accélérateurs de recherche technologique en plus des trois existants, un sur l'ARN messager à Orléans et un sur la biologie de synthèse à Montpellier, et nous avons aussi développé des réseaux thématiques transdisciplinaires : virus et cerveau ; coeur et cerveau.
Je souhaite aussi revitaliser la recherche clinique et remédicaliser la recherche à l'Inserm, qui s'était affaiblie. Les médecins sont très occupés par la clinique et le management. Je veux travailler à l'attractivité et permettre aux médecins de revenir dans les unités de recherche. J'ai nommé pour cela un nouveau responsable du pôle recherche clinique.
Nous travaillons avec les universités et les CHU dans un cadre commun qui va être présenté aux Assises nationales hospitalo-universitaires à Nantes dans quinze jours, à la fois sur la création d'une instance de site CHU-universités-Inserm opérationnelle et sur la gestion des biobanques. La gestion des cohortes concerne à la fois les universités, les hôpitaux et l'Inserm : nous coordonnons le plan France Cohortes. Et le partage des données de santé est un vrai enjeu pour moi ; j'y travaille.
Je souhaite travailler avec les directeurs d'hôpitaux et les doyens, pour redonner du temps de recherche aux médecins des hôpitaux. Il s'agissait d'essayer d'avoir un programme similaire à Clinical Scientist, en Allemagne.
Il est absolument essentiel de placer les intelligences artificielles (IA) au coeur de la stratégie scientifique de l'Inserm. C'est nous qui coordonnons le Paris Santé Campus. J'ai créé aussi au sein de l'Inserm un pôle IA et santé numérique en mars 2025 ; il est dirigé par un directeur de recherche de l'Institut national de recherche en sciences et technologies du numérique (Inria).
J'ai mis en place le collecteur d'analyse de données associé au plan France Médecine Génomique. Il rentre maintenant dans sa phase opérationnelle et devrait « booster » ce plan, qui va redémarrer en 2026 et redonner de l'attractivité aux chercheurs et aux carrières des chercheurs. Pour cela, j'ai été bien aidé par la loi du 24 décembre 2020 de programmation de la recherche pour les années 2021 à 2030 (LPR), qui comporte un volet revalorisation des salaires des chercheurs et aussi un volet indemnitaire pour les chercheurs.
Je me réjouis de la création des chaires de professeur junior. Nous avons recruté une quarantaine de titulaires de ces chaires, dont 35 % sont de nationalité étrangère. De même, le dernier concours Inserm a montré que 30 % des candidats ont de nationalité étrangère. L'Inserm est par ailleurs impliqué dans le programme Choose France for Science.
L'Inserm est aussi ouvert sur le monde industriel, grâce à sa filiale Inserm Transfert, qui a maintenant vingt-cinq ans. Nous aidons les chercheurs à breveter leurs découvertes, à faire les licences, à prendre contact avec les start-ups. Notre mission est d'aller plus loin , de mieux accompagner nos chercheurs pour qu'ils trouvent des débouchés industriels.
Simplifier le fonctionnement des unités et simplifier le travail du chercheur fait aussi partie de mes objectifs. Nous travaillons avec l'Agence nationale de la recherche (ANR) sur la simplification des appels d'offres en utilisant un portail commun ; nous avons limité le nombre de justificatifs requis. Nous mettons en place des cellules pour aider les chercheurs à aller à l'Europe, à l'ERC, à Horizon Europe. Nous avons aussi recours à de la délégation de gestion.
Je travaille activement avec la nouvelle présidente du Haut Conseil de l'évaluation de la recherche et de l'enseignement supérieur (Hcéres) pour simplifier le processus d'évaluation des unités. L'Inserm doit aussi être un point de référence nationale et de référence scientifique pour l'État et pour les parlementaires, ce qui explique aussi nos rencontres régulières, pour assurer, avec l'ANRS-MIE, une vigilance sanitaire sur tous les risques de maladies infectieuses émergentes qui peuvent nous menacer.
Nous devons aussi répondre aux enjeux sociétaux qui nous concernent, comme l'impact du climat sur la santé, l'impact de l'exposition et de l'environnement sur la santé, les causes du cancer du pancréas, les causes du nombre plus important de cancers chez les jeunes.
L'Inserm travaille aussi à sortir de son couloir, à assurer la diffusion de la connaissance et de la science, non seulement dans le grand public, mais aussi auprès des parlementaires et de l'État, ainsi que des médecins.
Nous avons déployé Canal Détox, afin de lutter contre les fake news, en particulier sur les réseaux sociaux. Nous avons une cellule riposte, avec 130 chercheurs qui répondent en temps réel à de fausses informations, mais nous avons aussi des outils de communication pour diffuser la connaissance scientifique, rappeler aussi l'importance du lien entre recherche et progrès médical, et recherche et qualité de la médecine : il est vital de le rappeler, tous les progrès médicaux viennent de la recherche, et il n'y a pas de progrès médical sans recherche.
J'ai aussi travaillé à augmenter la visibilité de la marque Inserm en France et dans le monde, notamment dans les médias.
Nous travaillons actuellement sur le contrat d'objectifs, moyens et performances de l'Inserm pour la période 2026-2030, que nous devons rendre disponible d'ici quelques mois, au premier trimestre 2026. Ce sera aussi notre plan stratégique. Nous nous appuierons aussi sur le rapport du Hcéres, qui est attendu d'ici quelques semaines.
Je pense avoir engagé l'Inserm dans une transformation, une restructuration profonde, en restaurant son image d'acteur incontournable de la recherche biomédicale, en lui donnant une place centrale dans un triangle ouvert avec les universités, les CHU et les autres organismes de recherche. Je crois avoir reconstitué une relation apaisée et constructive avec l'ensemble des partenaires et redonné à l'Inserm, à travers ses programmes nationaux, une vision stratégique de la recherche biomédicale. J'estime avoir relancé le positionnement de l'Inserm à l'international, notamment à l'échelon européen, et redonné de l'attractivité à notre recherche.
Mon ambition est de placer l'Inserm dans une position de leader incontesté de la recherche biomédicale française et de leader international, ainsi que de renforcer nos liens avec l'innovation en santé. Bien entendu, il reste beaucoup à faire, à consolider, à développer. Je suis devant vous aujourd'hui, parce que je souhaite que vous me permettiez de mener à bien l'intégralité de mon mandat.
Mme Laurence Garnier, rapporteure. - Lors de votre audition par la commission au début de l'année 2023, vous aviez indiqué vouloir faire de l'Inserm l'organisateur et le pilote de la recherche en santé à l'échelon national. L'ambition que vous aviez posée à l'époque a coïncidé avec la réforme de la gouvernance de l'écosystème de la recherche, qui s'est traduite par la création en 2024 des agences de programmes. Quel bilan tirez-vous de l'agence de programmes en santé? Est-elle, à vos yeux, le bon outil pour déployer cette ambition de structuration de la communauté de recherche en santé ?
Le chantier de simplification qui s'est parallèlement ouvert nous semble nécessaire pour faciliter le travail de nos chercheurs. Pourriez-vous nous en détailler les mesures concrètes au sein de l'Inserm ?
Vous aviez indiqué voilà deux ans et demi que la coordination de l'Inserm avec les CHU était trop hétérogène et qu'elle devait évoluer pour rapprocher les chercheurs et les cliniciens. Nous sommes un peu moins de trois ans plus tard. Quel bilan faites-vous des relations entre l'Inserm et les CHU aujourd'hui ?
Vous aviez également fait part de la nécessité de renforcer la présence de l'Inserm au niveau des appels d'offres européens. Voilà une quinzaine de jours, le ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche nous a indiqué que les résultats de la France au programme-cadre de recherche Horizon Europe n'étaient globalement pas bons. Sachant que l'Inserm est l'organisme qui s'en sort le mieux, quels leviers avez-vous mis en oeuvre pour solliciter ce programme-cadre ?
Vous aviez par ailleurs insisté sur l'importance de la recherche translationnelle, qui consiste à transformer en applications pratiques les découvertes faites en laboratoire. Vous avez pour cela une politique de valorisation qui passe par la filiale Inserm Transfert, dont vous avez parlé Avez-vous d'autres outils ? Avez-vous pour projet de mettre en place de nouvelles relations partenariales, notamment avec l'industrie, au cours des deux prochaines années ?
Enfin, puisque vous indiquez vouloir renforcer le niveau d'excellence de l'Inserm, quelles marges de progression identifiez-vous d'ici à 2027 ?
M. Didier Samuel. - Dès lors que les agences ont un budget d'un million d'euros par an, elles doivent être adossées aux organismes nationaux de recherche correspondants, c'est-à-dire, dans le cas de l'agence de programmes en santé, à l'Inserm.
Le rôle de l'agence est identifié : premièrement, amener l'ensemble des partenaires ; deuxièmement, définir des priorités stratégiques ; troisièmement, piloter des programmes de type PEPR.
Sur le premier point, je pense que c'est extrêmement positif. Nous avons réussi à mettre autour de la table des partenaires qui, parfois, ne se parlaient pas assez : CHU, universités, autres organismes de recherche, Haute Autorité de santé (HAS), Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM), Agence de la biomédecine, etc. Quand nous avons lancé l'agence, ce n'était pas gagné. Au bout d'un an et demi, les partenaires sont, me semble-t-il, plutôt satisfaits. On a pu lancer quatre gros programmes de recherche qui ont été discutés de façon concomitante, puis priorisés.
L'agence va rentrer dans sa deuxième phase - une phase de maturité. Elle va piloter les premiers programmes de recherche qu'elle a sollicités, c'est-à-dire trois PEPR et France Vaccin. Elle va aussi intégrer les PEPR qui sont déjà lancés ; l'Inserm en pilote huit. Il faut qu'elle montre sa capacité à montrer des directions stratégiques à l'État et à soutenir des programmes. L'idée est que tout n'aille pas de l'État vers les chercheurs ; la communauté de recherche doit aussi faire remonter à l'État les priorités qu'elle identifie.
Sur la simplification du travail des chercheurs, nous avons déjà fait des choses, mais il y a encore beaucoup à faire. Premièrement, il faut simplifier le système des appels d'offres ; nous avons mis en place un portail commun avec l'ANR. Deuxièmement, dans la gestion des projets, nous avons diminué le recours aux justificatifs qui empoisonnaient la vie des chercheurs. Troisièmement, nous mettons en place des pôles de soutien pour les appels à projets lourds. Nous nous sommes parfois alliés aux universités, notamment pour des projets européens. À Marseille, la cellule Mission Europe pour la Recherche (Mer) aide la communauté des chercheurs à faire remonter les projets à l'échelon européen, en faisant en sorte qu'ils se concentrent sur l'aspect scientifique et moins sur l'aspect administratif.
J'ai demandé à la directrice du département de l'évaluation de l'Inserm de travailler de concert avec la nouvelle présidente de l'Hcéres, Coralie Chevallier, pour simplifier le programme d'évaluation des unités, notamment pour arriver à un seul fichier commun. L'évaluation est quelque chose d'absolument nécessaire. Il est important de se remettre en cause tous les cinq ans ou six ans et de réfléchir à la stratégie. Mais cela implique une simplification du processus ; nous y travaillons.
Sur les appels à projets européens, nous voulons être beaucoup plus proactifs, notamment pour essayer d'identifier les chercheurs qui sont capables de mener un projet à cette échelle - tous ne le sont pas -, leur proposer d'y aller et les aider, en simplifiant le montage du projet administratif. C'est ce que nous sommes en train de faire.
Pour Horizon Europe, avoir un programme coordonné nécessite d'être soi-même un leader, mais aussi d'avoir une structure capable de vous aider à monter le projet, car il s'agit tout de même de projets très complexes.
Nous sommes présents à l'échelon européen pour essayer d'influer sur le futur programme-cadre de l'Union, qui va démarrer en 2028. Comme vous le savez peut-être, le budget de l'ERC, c'est-à-dire le premier pilier, va être doublé, à 31 milliards d'euros, avec des programmes qui seront augmentés. Il est vraiment important que les chercheurs français aillent à l'ERC, ainsi qu'aux bourses doctorales Marie-Curie. Nous les y aiderons. Pour le deuxième pilier, nous nous sommes aussi efforcés, à l'échelon européen, de conserver la recherche collaborative en santé, qui risquait de ne plus être présente dans le programme-cadre Horizon Europe. Les crédits de celui-ci vont être augmentés significativement, à 175 milliards d'euros en 2028. Des infrastructures européennes vont être mises en place et financées en partie par l'Europe. Ce sont des leviers importants. Le ministre souhaite, à juste titre, qu'on aille plus loin à l'échelon européen, tout en reconnaissant les efforts accomplis.
Je l'ai indiqué, Inserm Transfert a maintenant vingt-cinq ans. Cette structure est aujourd'hui très opérationnelle pour tout ce qui relève de la valorisation de la recherche : dépôt de brevets et de licences, mise en place de start-ups... La difficulté est de parvenir ensuite à des médicaments ; cela nécessite du temps, de l'investissement, de l'énergie. Nous avons mis en place des conventions scientifiques qui offrent aux chercheurs du temps pour travailler, par exemple, avec une start-up. Nous avons évidemment des garanties d'indépendance, et nous souhaitons travailler avec des fonds d'investissement dirigés sur la santé. Nous travaillons aussi avec les pôles universitaires d'innovation ; nous sommes présents dans presque tous.
Pour ce qui est du travail avec l'industrie, je rappelle que le budget de l'Inserm est de 1,2 milliard d'euros, dont environ 730 millions d'euros viennent de sa subvention pour charges de service public et 500 millions d'euros de ses ressources propres. Cela recouvre les contrats conclus à l'initiative des chercheurs, mais aussi l'ANR, pour 25 %, le programme d'investissements d'avenir (PIA), pour 20 %, et les fonds d'origine européenne, pour 20 %. L'industrie représente seulement 6 % de ces financements, et sa part est même en diminution. Je pense que nous devons y travailler.
Je ne vous le cache pas, il n'y a pas d'excellence sans investissement. En l'occurrence, certaines mesures salariales ne sont pas compensées dans le budget, et ce depuis plusieurs années ; c'est le cas des mesures Guérini de réévaluation du point d'indice ; par ailleurs, le compte d'affectation spéciale « Pensions » n'a pas été compensé en 2025 et ne le sera pas non plus en 2026. Cela représente 30 millions d'euros non financés cette année, 60 millions d'euros au total. Je dois donc choisir entre baisser significativement la dotation des unités de recherche et réduire les recrutements de chercheurs.
Or, si je suis devant vous, c'est pour maintenir la dynamique de l'Inserm. Nous allons donc utiliser notre trésorerie et nous aurons un budget déficitaire - j'espère que ce sera accepté - pour cela. Je souhaite que les mesures salariales soient compensées dans les futurs budgets pour nous redonner de la vitalité. Mais mon objectif est clairement de maintenir la dynamique, voire de l'amplifier. C'est en ce sens que je travaille.
M. Adel Ziane. - Au mois de janvier 2023, le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain s'était prononcé contre votre candidature à la présidence de l'Inserm. Nous avions dénoncé un fait du prince venu de l'Élysée, le Président de la République ayant refusé de reconduire M. Gilles Bloch, votre prédécesseur, pourtant candidat à un second mandat. Le Sénat avait alors très largement rejeté votre nomination avec seulement deux voix pour et quatorze contre.
Trois ans plus tard, nous revoilà avec vous, en ayant désormais atteint la limite d'âge, fixée à 67 ans révolus. Le Président de la République souhaite vous maintenir dans vos fonctions au nom de « l'intérêt du service » selon le communiqué de l'Élysée.
Au sein de notre groupe, nous estimons que le respect de la limite d'âge n'est pas une simple formalité administrative ; c'est aussi une garantie de bonne gouvernance et d'équité entre les chercheurs et les dirigeants d'établissements publics. S'il peut y avoir des dérogations individuelles, elles ne doivent pas être motivées par des considérations politiques. Par exemple, il y avait un intérêt à maintenir le préfet Michel Cadot dans ses fonctions de délégué interministériel aux grands événements sportifs à un an des jeux Olympiques de Paris.
Nous souhaitons une clarification de la notion d'intérêt du service, pour savoir dans quels cas, de manière exceptionnelle et parfaitement circonscrite, il pourrait y avoir des dérogations à la limite d'âge.
Certes, votre projet pour l'Inserm est très ambitieux, et nous vous en félicitons. Mais nous avons besoin de la clarification que je viens de solliciter.
L'Inserm est une institution d'excellence tournée vers l'avenir. Elle a besoin d'un pilotage stable. Pour autant, nous estimons que le maintien d'un président au-delà de la limite d'âge pourrait créer un précédent dangereux. En outre, le recours à la procédure prévue à l'article 13 de la Constitution pour entériner cette prorogation dérogatoire au droit commun nous apparaît surprenant ; cela reviendrait à faire valider par le Parlement un nouveau fait du prince.
M. Pierre Ouzoulias. - À mon sens, les travaux que vous menez sur la fin de vie et sur l'accueil des étrangers, étudiants comme enseignants, sont absolument fondamentaux. Les critiques que je vais émettre ne porteront donc ni sur votre bilan, ni sur vos qualités, ni sur la façon dont vous avez insufflé un certain nombre de politiques au sein de l'Inserm.
Le problème est d'ordre constitutionnel. Il nous est demandé de nous prononcer au titre de l'article 13, cinquième alinéa, de la Constitution. La moindre des choses est que le candidat proposé par le Président de la République offre la garantie de pouvoir effectuer la totalité de son mandat. Si nous sommes systématiquement obligés de revenir deux ou trois fois sur une même candidature, c'est toute cette procédure constitutionnelle qui devient obsolète.
Je ne peux pas accepter que le Président nous ait proposé un candidat ne pouvant pas réaliser la totalité de son mandat. Je ne pourrai donc pas voter en faveur du renouvellement envisagé ; j'en suis - croyez-le bien - très sincèrement désolé.
M. Max Brisson. - Je crains d'être un peu répétitif. Incontestablement, monsieur le président, vous êtes investi dans vos fonctions. Nous saluons votre travail et vos ambitions ; votre bilan en témoigne. Le groupe Les Républicains n'a pas de réserve sur votre action à la tête de l'Inserm.
Mais une interrogation a déjà été exprimée et taraude certains d'entre nous, et pas simplement sur les bancs de la gauche. Lorsque le Président de la République vous a nommé, la limite d'âge en cours de mandat était connue ; elle avait d'ailleurs pu expliquer les réticences de certains d'entre nous. Lorsqu'on érige un principe, il est bien regrettable d'en organiser le contournement. Cela expliquera la diversité des votes des commissaires du groupe Les Républicains.
Mme Mathilde Ollivier. - Je rejoins les observations et les interrogations qui ont été formulées par les collègues avant moi s'agissant du respect de la procédure prévue à l'article 13, cinquième alinéa, de la Constitution.
Les récentes informations sur des ingérences du ministère de l'agriculture dans l'élaboration du rapport du Haut-Commissariat au plan sur les cancers pédiatriques dans les territoires à forte exposition aux pesticides ont suscité un débat sur l'indépendance de l'expertise sanitaire. Comment l'Inserm garantit-il une indépendance totale vis-à-vis des intérêts économiques et politiques, notamment dans ses travaux en santé environnementale sur les liens entre environnement, pesticides et cancer ?
Mme Laure Darcos. - Je suis en partie d'accord avec mes collègues, d'autant que j'étais moi-même très proche de Gilles Bloch et que j'avais été assez déçue qu'il ne puisse pas effectuer un deuxième mandat.
Pour autant, au regard de votre action et de votre bilan à la tête de l'Inserm, je trouverais dommage que vous ne puissiez pas rester encore quelques années. Grâce à vous, l'Inserm a pris une dimension internationale qu'il n'avait pas auparavant ; il me paraît très important de la conserver.
Chers collègues, nous n'avons de cesse de déplorer la valse des ministres. En l'occurrence, il nous est demandé de maintenir en fonction quelqu'un qui incarne une vraie stabilité et dont le bilan est, à mes yeux, impressionnant.
En outre, sur le principe, je pense qu'il faut mettre un terme à la pratique consistant à faire cesser les mandats à 65 ans, âge où l'on est encore très jeune dans sa tête. À mes yeux, dans la fonction publique, on devrait pouvoir rester au moins jusqu'à 70 ans. Nous autres, sénateurs, ne nous en privons pas...
Mme Sonia de La Provôté. - Si la compétence se limitait à une tranche d'âge ou avait une date de péremption, cela se saurait. Sur des sujets comme la gouvernance de l'Inserm, l'âge n'est pas le problème... J'aimerais maintenant aborder un certain nombre de questions de fond.
D'abord, le cofinancement de la recherche entre secteurs public et privé est probablement le moyen le plus efficace et le plus rapide de passer de la recherche à la fabrication. Pensez-vous pouvoir élargir cette coopération, notamment au sein des équipes de recherche de l'Inserm ?
Ensuite, vous avez évoqué un meilleur accompagnement des chercheurs en matière d'essais cliniques. Où en êtes-vous à cet égard ? Nous avons été dépassés par l'Espagne très rapidement, alors que nous étions tout de même les spécialistes dans ce domaine.
En outre, alors que vous avez évoqué le partage des données en matière numérique, vous n'avez pas mentionné la question du registre national des cancers. L'Inserm s'est-il emparé du sujet ?
Enfin, vous avez cinq sites parisiens pour le siège, trois sites territorialisés en Île-de-France, le reste étant réparti de manière très inégale dans les autres territoires. Or l'Inserm est le moteur le plus puissant que nous ayons pour faire de la recherche en santé partout. Êtes-vous en recherche d'une répartition territoriale plus équilibrée ?
M. Bernard Fialaire. - La question qui nous est posée, c'est de savoir si le bilan du professeur Samuel nous convient et si nous estimons qu'il a les capacités pour poursuivre son action. Pour moi, la réponse sera oui. Et, pour répondre à mes collègues sur l'âge, je me réjouis que nous puissions sortir de ces carcans qui empoisonnent le débat !
M. Pierre-Antoine Levi. - L'Inserm fait face à un contexte budgétaire particulièrement difficile. Son budget s'élève à plus de 1,2 milliard d'euros, pour un écosystème de près de 14 000 personnes réparties dans 350 laboratoires, dont la majorité sont des unités mixtes de recherche (UMR) associant l'Inserm et des universités.
Votre parcours, monsieur le président, est singulier. Doyen de la faculté de médecine de Paris-Saclay de 2017 à 2023, puis président de la Conférence des doyens de médecine, vous connaissez intimement les enjeux de l'articulation entre recherche et formation. Or cette articulation est aujourd'hui mise à l'épreuve. Les UMR dépendent à la fois de l'Inserm et des universités, lesquels sont toutes sous tension budgétaire. Les jeunes chercheurs doctorants et postdoctorants sont en première ligne : difficultés de financement, contrats courts, fuite de cerveaux...
Comment préservez-vous l'attractivité de la recherche française en santé pour les jeunes talents ? À quels moyens concrets avez-vous recours pour sécuriser les parcours des doctorants et postdoctorants ?
Quelle est votre stratégie pour maintenir la qualité scientifique des unités mixtes, alors que l'Inserm et les universités partenaires voient leurs ressources diminuer ? Comment éviter que cette double contrainte ne fragilise durablement les laboratoires et la formation de la prochaine génération de chercheurs ?
M. Jacques Grosperrin. - La baisse des dotations des laboratoires a-t-elle eu, cette année, un impact fort sur les activités de l'Inserm ? Les chercheurs de l'Inserm sont-ils formés à l'utilisation de l'IA ?
M. Didier Samuel. - Tout d'abord, je ne peux pas changer mon âge. La première fois que je m'étais présenté devant vous, j'avais l'ambition d'aller au bout de mon mandat. Quatre ans ne sont pas de trop pour mener à bien cette mission ! Au cours de mes fonctions, j'ai connu huit ministres de la santé ; je considère, pour ma part, que la stabilité est très importante pour un organisme tel que l'Inserm.
Par ailleurs, étant professeur des universités-praticien hospitalier (PU-PH), je suis autorisé par mon université et l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) à aller jusqu'au terme de mon mandat à l'Inserm. Je ne suis pas à la retraite. Quant à l'interprétation de l'article 13 de la Constitution, elle ne dépend pas de moi... J'ai respecté l'ensemble de la procédure en me présentant devant vous et en sollicitant votre soutien. J'ai engagé de nombreuses actions depuis deux ans et demi. Le chantier étant immense, je souhaite que vous m'accordiez ces quinze mois supplémentaires pour mener à bien la transformation de l'Inserm et lui rendre l'éclat qu'il mérite.
Madame Ollivier, vous m'avez interrogé sur l'oncopédiatrie, et aussi sur l'indépendance de l'Inserm - je précise, à cet égard, que l'Institut est placé sous la double tutelle des ministères de la santé et de la recherche, et non pas sous celle du ministère de l'agriculture.
Concernant l'oncopédiatrie, l'Institut travaille de concert avec l'Institut national du cancer. Ces deux organismes disposent d'un budget commun pour la recherche, qui a succédé au budget Aviesan (Alliance pour les sciences de la vie et de la santé) / INCa, et qui représente près de 25 millions d'euros. Par ailleurs, le directeur de la recherche à l'INCa est aussi le directeur de l'Institut thématique Cancer de l'Inserm. Nous avons en effet souhaité lier les travaux de l'Inca et ceux de l'Inserm sur le cancer.
J'ai voulu que l'Inserm soit plus réactif face aux enjeux sociétaux. Le sujet de l'impact des pesticides sur la santé publique, par exemple, est absolument majeur. C'est pourquoi j'ai nommé Robert Barouki, spécialiste de l'impact de l'exposome et de la toxicité environnementale, directeur de l'Institut thématique Santé publique de l'Inserm.
L'Inserm conduit donc ses propres recherches sur la toxicité des pesticides, notamment pour la santé des agriculteurs, dans le cadre d'une démarche indépendante s'appuyant sur des éléments scientifiques. Ces travaux portent sur les différents types de polluants, qu'il s'agisse des substances perfluoroalkylées et polyfluoroalkylées (PFAS), ou du chlordécone, qui a été utilisé dans les années 1960 en Guadeloupe pour protéger les plantations de bananes et qui est toujours présent dans les sols soixante ans plus tard.
Notre Institut thématique Santé publique travaille sur ces thématiques de façon totalement indépendante. L'Inserm avait d'ailleurs publié il y a trois ou quatre ans, avant ma prise de fonctions, une expertise collective sur les pesticides, un document qu'il conviendrait d'actualiser. Je peux donc vous rassurer, madame la sénatrice : nos unités de recherche travaillent sur l'impact des polluants sur la santé dans le cadre d'une démarche scientifique spécifique. Outre les travaux de Robert Barouki et ceux de Xavier Coumoul, qui dirige l'équipe Metatox de l'Inserm, je tiens à citer ceux de l'Institut de recherche en santé, environnement et travail (Irset), à Rennes, qui portent aussi sur l'exposome.
L'Inserm a également pour mission de répondre à des questions d'ordre épidémiologique, telles que : pourquoi y a-t-il davantage de cancers du pancréas ? ou encore : pourquoi y a-t-il davantage de cancers chez les jeunes ?
Madame Darcos, vous l'avez rappelé, j'ai toujours été au cours de ma carrière ouvert aux collaborations internationales. Or, selon moi, l'Inserm n'était pas assez visible au niveau tant européen qu'international.
Nous devons faire face à un enjeu géostratégique : le désinvestissement américain. Je suis revenu hier des États-Unis, où j'ai rencontré Jay Bhattacharya, le nouveau directeur des NIH, dont je ne partage pas la vision. La direction des NIH a en effet pris pour cible certaines recherches portant sur les maladies infectieuses, les vaccins et l'impact du changement climatique sur la santé, et elle se livre à une attaque globale contre la recherche biomédicale. L'Agence des États-Unis pour le développement international (USAID) a été démantelée ; de ce fait, les partenariats de l'ANRS-MIE avec les pays du Sud ont été arrêtés. L'accord de partenariat international que j'avais signé il y a un an a été complètement stoppé.
En revanche, toujours aux États-Unis, j'ai pu relancer un partenariat direct avec des universités américaines, notamment la Johns Hopkins University, ainsi que des universités de la région de Washington. J'ai également créé un joint lab entre l'Inserm, le professeur José-Alain Sahel du département d'ophtalmologie de l'université de Pittsburgh et l'Institut de la vision français, en vue d'encourager les travaux sur l'implant sous-rétinien permettant de traiter la dégénérescence maculaire liée à l'âge (DMLA) - un article sur le sujet est paru il y a dix jours dans la revue médicale The New England -, qui sera une véritable révolution thérapeutique.
Madame de La Provôté, il est vrai que la moitié des unités de l'Inserm se trouvent en région parisienne, et notamment sur les sites de trois universités : Paris-Cité, Sorbonne Université et Paris-Saclay. Mais nous disposons aussi de douze délégations régionales, dont neuf qui sont en région - demain, par exemple, je me rendrai sur notre site de Marseille.
Outre ces délégations régionales, j'ai souhaité, pour renforcer la présence territoriale de l'Inserm, que nous ayons des référents scientifiques de sites. Ainsi, dans le nord-ouest de la France, il y a des référents à Caen, Amiens, Lille et Rouen. Et lors des Assises hospitalo-universitaires qui se dérouleront les 27 et 28 novembre prochains à Nantes, nous présenterons, via un communiqué commun Inserm/centres hospitaliers universitaires (CHU)/universités, notre programme visant à renforcer significativement la stratégie de site, notamment en remplaçant les comités consultatifs de protection des personnes dans la recherche biomédicale (CCPPRB), lesquels sont peu efficaces.
La coopération avec le secteur privé est un sujet important. La partie « industrie » de nos ressources propres n'est plus que de 6 %. Des outils ont été mis en place, que nous devons apprivoiser : les bioclusters ; les instituts hospitalo-universitaires (IHU), qui relèvent du partenariat public-privé ; l'Agence de l'innovation en santé (AIS). La Fédération française des industries de Santé (Fefis), qui représente les industries pharmaceutiques, est présente en tant que partenaire au sein de notre agence de programmes de recherche en santé. En outre, nous avons mis en place un comité de dialogue spécifique avec l'industrie pharmaceutique. En effet, nous avons besoin de cette industrie pour fabriquer des médicaments - les chercheurs ne savent pas le faire -, tous issus de la recherche biomédicale.
Enfin, j'ai lancé la Fondation Inserm en vue d'encourager le mécénat dont pourrait bénéficier l'Institut et qui est actuellement insuffisant - il s'élève à 7 millions d'euros par an, ce qui très faible.
Concernant la simplification des essais cliniques, je rappelle que l'Inserm n'est pas seul concerné puisque les CHU en sont des promoteurs importants.
Tout d'abord, je souhaite amplifier la coopération avec les centres hospitaliers universitaires. Ensuite, le nouveau directeur du pôle Recherche clinique de l'Inserm, que j'ai nommé, et qui dirigeait auparavant le centre d'investigations cliniques (CIC) de l'hôpital Saint-Louis, a une grande expérience des essais cliniques. Je lui ai demandé de raccourcir tous les délais, qu'il s'agisse de la promotion ou des contrats, et de revitaliser notre recherche clinique, en partenariat avec les CHU.
Le partage des données de santé présentes à l'hôpital ainsi que dans les cohortes gérées par l'Inserm et par les universités est un enjeu absolument majeur. À cet égard, nous devons réussir à échanger, tout en protégeant les données des patients. Nous y travaillons. Ainsi, nous coordonnons le projet France Biobank Network (FrBioNet) et réfléchissons, avec l'ensemble des partenaires concernés, à la mise en place d'un plan destiné à favoriser le partage des données des cohortes. J'ai demandé au directeur du pôle Santé numérique de l'Inserm de se pencher sur ce sujet.
Je préférerais que le contexte budgétaire soit plus favorable. Si 5 millions d'euros étaient accordés à l'Inserm, par exemple, nous pourrions mettre en place des programmes spécifiques, augmenter les dotations des laboratoires, effectuer certains travaux...
Je l'ai dit devant les députés, si je devais appliquer les règles budgétaires en vigueur, c'est-à-dire la non-compensation des mesures salariales et de celles relatives aux pensions de retraite, qui représentent 60 millions d'euros sur trois ans, je serais obligé de réduire l'effectif de l'Inserm de plusieurs centaines d'emplois et la dotation des unités de recherche de moitié. Je ne le ferai pas. Je présenterai donc un budget déficitaire et j'utiliserai la trésorerie, car je souhaite maintenir et amplifier la dynamique de l'Institut. Je ne suis pas là pour promouvoir une recherche diminuée ou contrainte.
Concernant les mesures d'attractivité, le programme Atip-Avenir, conçu dans le cadre d'un partenariat entre l'Inserm et le CNRS, a permis de créer vingt postes d'excellence.
Quant aux chaires de professeur junior, créées par la LPR, donc par vous, mesdames, messieurs les parlementaires, j'y ai consacré tous mes efforts. Dans ce cadre, nous avons recruté quarante professeurs, dont 30 % sont des étrangers et 50 % des Français revenus d'un pays étranger - la proportion est la même, cette année, parmi les lauréats du concours de chargé de recherche de l'Inserm. C'est un beau succès. Un élément ira contre cette attractivité : l'arrêt des mesures salariales prévues dans la LPR ; j'espère donc qu'il ne sera pas définitif.
Si vous me faites confiance, mesdames, messieurs les sénateurs, je m'attacherai à renforcer la qualité scientifique des travaux de l'Inserm et à maintenir son dynamisme.
M. Laurent Lafon, président. - Nous vous remercions, monsieur le président.
Cette audition a fait l'objet d'une captation vidéo qui est disponible en ligne sur le site du Sénat.
Vote sur la proposition de nomination, par le Président de la République, de M. Didier Samuel aux fonctions de président de l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm)
M. Laurent Lafon, président. - L'audition de M. Didier Samuel étant achevée, nous allons maintenant procéder au vote.
Le vote se déroulera à bulletin secret, comme le prévoit l'article 19 bis de notre Règlement. En application de l'article 1er de l'ordonnance n° 58-1066 du 7 novembre 1958 portant loi organique autorisant exceptionnellement les parlementaires à déléguer leur droit de vote, les délégations de vote ne sont pas autorisées.
Je vous rappelle que le Président de la République ne pourrait procéder à cette nomination si l'addition des votes négatifs des commissions de l'Assemblée nationale et du Sénat représentait au moins trois cinquièmes des suffrages exprimés dans les deux commissions.
La commission procède au vote, puis au dépouillement du scrutin sur la proposition de nomination, par le Président de la République, de M. Didier Samuel aux fonctions de président de l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm), simultanément à celui de la commission des affaires culturelles et de l'éducation de l'Assemblée nationale.
M. Laurent Lafon, président. - Voici le résultat du scrutin, qui sera agrégé à celui de la commission des affaires culturelles et de l'éducation de l'Assemblée nationale :
Nombre de votants : 30
Bulletins blancs ou nuls : 2
Suffrages exprimés : 28
Pour : 14
Contre : 14
La réunion est close à 12 h 30.
La réunion est ouverte à 16 h 30.
Projet de loi de finances pour 2026 - Audition de Mme Marina Ferrari, ministre des sports, de la jeunesse et de la vie associative
M. Laurent Lafon, président. - Après avoir entendu, ce matin, les présidentes du Comité national olympique et sportif français (CNOSF) et du Comité paralympique et sportif français (CPSF), nous sommes heureux d'accueillir cet après-midi Mme Marina Ferrari, ministre des sports, de la jeunesse et de la vie associative, pour faire un point sur les secteurs relevant de sa responsabilité, un peu plus d'un mois après son entrée en fonction.
Dans les prochains jours, notre commission entendra les conclusions de ses rapporteurs pour avis, MM. Jean-Jacques Lozach et Yan Chantrel, sur la mission « Sport, jeunesse et vie associative » du projet de loi de finances (PLF) pour 2026, dont l'examen en séance publique est prévu le 10 décembre. Après l'élan suscité par l'accueil des jeux Olympiques, de nombreux acteurs du mouvement sportif expriment aujourd'hui leurs inquiétudes face à la contraction des moyens publics, tant de l'État que des collectivités territoriales.
Les crédits du programme 163 « Jeunesse et vie associative » diminuent de 26 %. Si nous nous réjouissons de la mise à l'arrêt du service national universel (SNU), qui répond à une demande ancienne et récurrente de notre commission, nous regrettons toutefois les importantes coupes infligées aux autres actions du programme, dans un contexte particulièrement tendu.
La situation du secteur associatif est en effet préoccupante. Pour la première fois, le 11 octobre dernier, les associations ont manifesté pour dénoncer l'érosion de leurs moyens financiers et l'épuisement des bénévoles, deux facteurs qui viennent mettre en péril la continuité de leurs activités.
Je pense également au secteur des colonies de vacances, qui peine à retrouver son niveau d'avant la crise sanitaire. Dans ce contexte, la suppression brutale des « colos apprenantes » interroge, alors que ce dispositif a pourtant permis à près de 400 000 mineurs d'effectuer un séjour en colonies de vacances depuis 2020, et qu'il venait d'être pérennisé au sein du PLF 2025.
Les crédits du programme 219 « Sport » diminuent, quant à eux, de 6,5 %. Cette baisse concerne notamment les équipements et les politiques de développement des pratiques sportives des jeunes.
À ce contexte s'ajoutent de nombreuses incertitudes. D'une part, nous constatons, année après année, que la loi de finances adoptée par le Parlement est affectée par des mesures de régulation budgétaire. D'autre part, le rendement des ressources affectées à l'Agence nationale du sport (ANS) est incertain. La taxe « Buffet », essentielle pour assurer la solidarité entre sport professionnel et sport amateur, est dépendante de l'évolution des droits de retransmission, en particulier ceux du football.
Le sport de haut niveau paraît relativement préservé, de même que les crédits du programme 385 « Jeux Olympiques et Paralympiques d'hiver 2030 », nécessaires à la poursuite de ce projet, véritablement lancé cette année avec la mise en place d'un comité d'organisation et d'une société de livraison des ouvrages olympiques (Solideo) dont le Sénat a auditionné les principaux responsables.
Par ailleurs, sous suivons avec attention les enjeux structurels et de gouvernance. Les missions de l'ANS sont aujourd'hui questionnées ; vous nous direz quelles évolutions vous semblent possibles. Parallèlement, le Sénat a engagé un travail de réforme du sport professionnel pour améliorer son encadrement et renforcer les mécanismes de solidarité, dans un secteur marqué par de fortes disparités économiques. La proposition de loi adoptée à cette fin par le Sénat, le 10 juin dernier, comporte également des mesures indispensables pour renforcer la lutte contre le piratage des contenus sportifs ; nous espérons voir ce travail aboutir le plus tôt possible.
Madame la ministre, votre ministère joue un rôle crucial à la fois d'un point de vue économique et en matière de cohésion sociale. Le sport et l'engagement associatif ont un pouvoir fédérateur unique dans notre pays. C'est pourquoi nous serons attentifs à la manière dont seront envisagés la consolidation et l'avenir de ce secteur.
Madame la ministre, je vous laisse la parole pour un propos liminaire. Nos collègues pourront ensuite vous poser leurs questions, en commençant par les rapporteurs pour avis, MM. Yan Chantrel et Jean-Jacques Lozach. Je rappelle que cette audition est diffusée en direct sur le site internet du Sénat.
Mme Marina Ferrari, ministre des sports, de la jeunesse et de la vie associative. - Je suis très honorée d'être auditionnée, pour la première fois, par votre commission. Je connais votre attachement aux sujets ayant trait au sport, à la jeunesse et à la vie associative. Vous avez d'ailleurs tenu à ce que le mot « sport » figure dans la dénomination de votre commission, ce qui n'est pas le cas dans l'autre chambre.
Dans le PLF 2026, les crédits alloués à notre ministère représentent 0,3 % du budget de l'État. Il s'agit, certes, d'un « petit budget », mais il a de fortes répercussions en matière de santé, de dynamique économique et de politique sociale. Réparti entre trois missions budgétaires, ce budget s'élève à 1,476 milliard d'euros, en incluant bien sûr les taxes affectées. Je souhaite remercier le Sénat du travail remarquable qu'il a effectué l'an dernier pour défendre le budget de ce ministère. Vous avez joué un rôle important dans l'augmentation de 80 millions d'euros du plafond de la taxe affectée sur les paris sportifs, qui nous permet, aujourd'hui encore, de faire face à de nombreuses actions.
Comme l'a indiqué le Premier ministre, ce budget est perfectible. Il arrivera bientôt devant vous, et nous allons pouvoir travailler ensemble sur les corrections éventuelles.
Ma feuille de route a pour vocation de répondre aux besoins du monde sportif, de la jeunesse et du monde associatif, ainsi qu'à ceux des élus, acteurs essentiels des politiques publiques qui relèvent de mon périmètre ministériel.
Je souhaite maintenant évoquer les programmes 219 « Sport » et 385 « Jeux Olympiques et Paralympiques d'hiver 2030 ». Nous observons une baisse contenue des crédits liés au sport, de l'ordre de 6,5 %. Si l'on ajoute les taxes affectées, la baisse n'est plus que de 4,6 % par rapport à 2025, soit 41 millions d'euros en moins. Je tiens à saluer la mobilisation de ma prédécesseure, du monde sportif et des élus, qui a permis de limiter cette baisse. Pour rappel, depuis 2017, ce budget a augmenté de 255 millions d'euros, soit près de 50 %.
La baisse actuelle des moyens concerne, pour l'essentiel, le Pass'Sport. Je m'interroge sur le recentrage du dispositif. En tant que parlementaire, j'avais écrit à ma prédécesseure sur ce sujet. J'ai demandé à ce qu'une évaluation soit menée à l'issue de la campagne - l'appel est ouvert jusqu'au 31 décembre 2025 - afin que nous puissions examiner les conséquences de ce recentrage, notamment concernant la prise de licence chez les 6-13 ans et les 14 ans et plus. En fonction des résultats de l'évaluation, je suis ouverte à l'idée de revenir sur ce recentrage, en travaillant notamment sur les 6-13 ans. Pour cela, il nous faudra peut-être modifier les paramètres d'attribution.
À 3 millions d'euros près, les moyens attribués à l'ANS sont stabilisés. Ils s'élèvent à 396 millions d'euros, dont 240 millions d'euros de taxes affectées. L'an dernier, le débat parlementaire a permis le rehaussement de la taxe affectée sur les paris sportifs ; ce plafond est conservé dans le PLF pour 2026.
Les moyens de la haute performance sont maintenus à 123 millions d'euros. Je tiens également à saluer la réussite des deux plans d'équipement pour les terrains sportifs. À ce jour, 10 617 terrains ont été financés. Par ailleurs, l'État honorera bien ses engagements concernant les paiements attendus par les collectivités.
Nous travaillons encore à la mise en oeuvre de la stratégie nationale sport-santé 2025-2030, telle que celle-ci a été annoncée par ma prédécesseure en septembre dernier. Le financement des maisons sport-santé, à hauteur de 6,5 millions d'euros, est prévu dans le cadre du programme 219. Ces crédits sont complétés par le ministère de la santé, via les fonds d'intervention régionaux (FIR).
Aux termes de l'article 19 du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2026, de nouveaux parcours coordonnés renforcés (PCR) peuvent prendre en charge l'activité physique adaptée afin de prévenir l'aggravation de pathologies chroniques.
Dans le cadre du programme 385, nous allouons les moyens nécessaires à l'organisation des jeux Olympiques et Paralympiques (JOP) d'hiver dans les Alpes françaises en 2030, avec notamment 22 millions d'euros pour la Solideo, dédiés aux études et aux premiers investissements, ainsi que l'adoption du budget du Comité d'organisation des jeux Olympiques et Paralympiques (Cojop) à hauteur de 2,132 milliards d'euros. L'épure budgétaire fixée à 2 milliards d'euros est donc respectée, avec une contribution de l'État plafonnée à 362 millions d'euros, conformément au cadrage préalablement établi.
Les travaux sont menés avec une grande vigilance, afin de respecter le budget prévu comme en 2024. Nous avons l'ambition de faire de ces JOP les plus sobres de l'histoire, aussi bien sur le plan écologique que budgétaire.
Le programme 163 « Jeunesse et vie associative » accuse pour sa part une baisse de crédits de 26 %, soit 221 millions d'euros en moins. Les crédits structurels du ministère sont préservés ; le fonds pour le développement de la vie associative (FDVA) est maintenu à 68 millions d'euros, et le fonds de coopération de la jeunesse et de l'éducation populaire (Fonjep) à 37 millions d'euros.
Nous sommes conscients des difficultés rencontrées par les associations, comme en témoigne le mouvement lancé le 11 octobre dernier. Je reçois actuellement tous les représentants du monde associatif afin d'échanger avec eux sur ces difficultés.
Ce PLF porte une mesure attendue de longue date : le doublement du plafond fiscal de la niche « Coluche ». Dans le cadre de l'article 9, celui-ci passerait de 1 000 à 2 000 euros.
Quant au service civique, dont nous célébrons cette année le quinzième anniversaire, son budget s'élève à 465 millions d'euros. L'objectif décroît à 110 000 missions, contre 135 000 en 2025 et 150 000 en 2024, alors que le dispositif est apprécié à la fois du monde associatif, des collectivités et des ministères qui y ont recours. Je suis ouverte à l'idée de nouvelles pistes de financements.
Concernant les « colos apprenantes », les moyens du dispositif sont supprimés. Nous sommes à la tâche pour trouver d'autres sources de financement. Nous avons lancé des travaux avec la Caisse nationale des allocations familiales (Cnaf) pour étudier une prise en charge de ces séjours à visée éducative ; à ce stade, les discussions n'ont pas abouti.
En revanche, le Pass Colo a été maintenu dans le cadre du programme 304, avec une dotation inchangée de 11 millions d'euros. Cette année, 30 000 enfants ont bénéficié du dispositif, soit deux fois plus que l'an dernier.
Les moyens du mentorat, quant à eux, passent de 29 à 24,5 millions d'euros.
Je souhaite évoquer les effectifs du ministère. Ceux de son réseau déconcentré, consacrés à la jeunesse et au sport, sont préservés. Depuis le 4 novembre, la délégation générale au service national universel (DGSNU) a intégré les services de la direction de la jeunesse, de l'éducation populaire et de la vie associative (DJEPVA), afin de constituer une sous-direction de l'engagement capable de piloter le parcours de l'engagement citoyen pour nos jeunes.
Est également demandé un effort de réduction de 26 équivalents temps plein (ETP), soit 13 équivalents temps plein travaillés (ETPT), pour les conseillers techniques sportifs (CTS) ; cela correspondrait, pour une part, à des non-remplacements de départs en retraite. Les effectifs de l'ANS passent, quant à eux, de 61 à 57 ETP. Par ailleurs, je veille à préserver les effectifs dédiés aux échéances olympiques - Milan-Cortina en 2026, Los Angeles en 2028, puis les Alpes en 2030.
J'ai identifié trois priorités pour ma feuille de route : l'adoption du budget dont je viens de vous tracer les grandes lignes ; le projet de loi olympique, déjà voté par le Sénat, qui doit être examiné le 12 janvier prochain par l'Assemblée nationale ; enfin, la proposition de loi relative à l'organisation, à la gestion et au financement du sport professionnel. Je salue votre travail sur ce dernier texte, largement adopté par le Sénat. Sachez que le Gouvernement est désireux de conserver sa structure actuelle, qui inclut le traitement du piratage. Selon une récente évaluation, on estime à 290 millions d'euros le montant des recettes qui pourraient être récupérées en luttant contre le piratage. L'objectif est d'inscrire ce texte à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale au cours du premier trimestre 2026.
Sur le fond, j'ai la volonté de favoriser une pratique sportive plus sûre et plus ouverte à tous. Mon premier point consiste à lutter contre les violences sexistes et sexuelles (VSS). J'étais présente lors du colloque organisé à ce sujet au Sénat, le 30 octobre dernier, par la sénatrice Valérie Guillotin, et je réunirai prochainement les associations qui mènent un travail remarquable de lutte contre les VSS. De nombreuses choses restent à faire, et nous devons être à la fois irréprochables et ambitieux sur le sujet.
Je souhaite également accentuer le développement du parasport. En février dernier, la prise en charge intégrale des fauteuils roulants sportifs est entrée en vigueur. Nous allons prochainement dévoiler la nouvelle stratégie nationale sport et handicaps 2025-2030. Je tiens à saluer le travail actuel, mené conjointement avec le CPSF. Il s'agit d'avoir encore davantage de lieux accessibles à la pratique ; nous comptons actuellement 2 300 clubs sportifs inclusifs, et nous visons les 4 000 clubs d'ici 2027. Comme pour les JOP de Paris 2024, nous devons profiter des Jeux d'hiver pour conserver cette dynamique enclenchée.
Enfin, je souhaite mieux travailler avec les collectivités, en les associant davantage aux décisions et en leur simplifiant la vie. Les collectivités sont les premiers financeurs du sport, et de précieux soutiens pour la vie associative. Nous avons confié une mission à l'association nationale des élus en charge du sport (Andes), afin de proposer des modèles de gymnases plus économes en coût de construction et en foncier, et plus sobres énergétiquement.
Une réflexion est également à conduire sur les carences en équipements - notamment les piscines - ainsi que sur le vieillissement des équipements sportifs et des centres de vacances. Sur ces sujets, nous avons des dispositifs à faire évoluer pour être plus efficients.
En lien avec les collectivités, je souhaite mieux articuler les politiques publiques et avancer sur la simplification tant attendue. Je souhaite également avancer sur la suppression de l'obligation de vidange annuelle des piscines ; sur ce point, ayant une oreille très attentive du cabinet de la ministre de la santé, j'ai bon espoir d'aboutir.
Enfin, en lien avec les fédérations, je souhaite engager une réflexion sur les normes grises, qui ont des effets sur les collectivités.
Les sujets sont nombreux, et ils ne manqueront pas de nourrir des discussions. Le contexte politique impose à chacun de prendre part à l'effort. Notre ministère ne déroge pas à cette contrainte, l'important étant que l'effort soit justement réparti. Je sais pouvoir compter sur la sagesse du Sénat pour que, dans nos échanges et nos travaux, cela puisse être le cas.
Je défends l'idée d'une stabilisation du budget du ministère, tout en me projetant sur la prochaine échéance olympique. Celle-ci entraînera une nouvelle montée en charge afin de préparer les JOP des Alpes françaises en 2030.
M. Jean-Jacques Lozach, rapporteur pour avis sur les crédits du sport. - Nous sommes dans une période d'instabilité politique, et nous avons pour habitude de souhaiter la bienvenue aux nouveaux ministres. Vous êtes notre quatrième ministre des sports en deux ans. Au sein de la commission, notre attitude reste constante : chaque année, nous menons un combat pour obtenir le plus ambitieux budget possible, et nous continuerons à agir en ce sens.
Ma première question, à laquelle vous avez partiellement répondu, est la suivante : quel cap entendez-vous donner à la politique sportive de notre pays ?
Sur la dimension budgétaire, la copie de 2025 avait, au départ, été mal perçue. De façon unanime, notre commission avait exprimé un avis défavorable. Ensuite, dans l'hémicycle, nous avions corrigé cette copie, notamment à travers un amendement sénatorial qui a permis d'obtenir 80 millions d'euros de recettes supplémentaires. Cette avancée a été, pour une large partie, mise à mal quelques semaines plus tard par les gels de crédits et les décrets ministériels.
L'effort demandé à la politique sportive paraît aujourd'hui disproportionné par rapport à ce que celle-ci représente dans le budget de l'État. Nous souhaitons nous battre, a minima, pour un maintien du niveau des dépenses.
Cette austérité budgétaire frappe le sport pour tous, celui du quotidien, que l'on pratique à tous les âges. Sont concernés les projets sportifs fédéraux, ainsi que les clubs et les associations partout dans nos territoires. On observe ainsi un recul de 203 millions d'euros des crédits dédiés au sport du quotidien dans ce budget pour 2026.
En matière de gouvernance, une question essentielle se pose : quel avenir pour l'ANS ? L'année 2025 devait être consacrée à une évaluation de l'agence après cinq années de fonctionnement et une année de réajustement. Le débat commence à peine, et deux positions s'opposent : la première défend à la fois le développement du sport de haut niveau et celui des pratiques ; la seconde privilégie un recentrage de l'Agence sur le sport de haut niveau, voire uniquement sur la haute performance.
Concernant le budget, nous partageons les inquiétudes du mouvement sportif et parasportif. Celles-ci concernent notamment la trésorerie de l'ANS et le Pass'Sport. Sur ce dernier point, vous semblez vouloir rétablir certains critères, notamment concernant la tranche des 6-13 ans. L'État a souhaité réaliser une économie de 40 millions d'euros sur ce dispositif. De notre côté, nous entendons revenir à la première configuration.
La suppression des 26 postes de CTS est un sujet important. Nous avons connu, il y a quatre ou cinq ans, une sérieuse polémique entre le mouvement sportif et le ministère des sports ; il ne faudrait pas que de nouvelles tensions apparaissent, car il s'agit cette fois des entraîneurs nationaux, des cadres sportifs au niveau des régions et des départements.
La question des équipements est absente de ce budget. Jusqu'à présent, il existait des programmes spécifiques comme « Génération 2024 » ou le programme des 5 000 équipements sportifs de proximité. Les besoins étaient tels que ces programmes spécifiques ont connu un véritable succès. Aujourd'hui, nous assistons à un coup d'arrêt. Les équipements sportifs sont désormais dispersés dans les financements de droit commun, et cela aura des effets négatifs sur la politique sportive.
Dans les sept secteurs concernés par le projet de décentralisation figure le sport. Sur quoi le débat va-t-il porter ? Actuellement, il s'agit d'une compétence partagée entre le département et la région. Comment envisagez-vous l'avenir des relations entre l'État et les collectivités en matière de sport ?
De nombreux ministères interviennent dans la politique sportive. L'ensemble des dotations est estimé à 7,3 milliards d'euros, ce qui représente à peu près dix fois le budget du ministère des sports. Mais 80 % de ce montant sont consacrés aux salaires des 30 000 enseignants d'éducation physique et sportive (EPS). Par ailleurs, les secteurs comptabilisés au titre de la politique sportive sont très divers : je pense, par exemple, à la vie de l'élève, à l'administration pénitentiaire, à la politique judiciaire de la jeunesse ou encore à la préparation et l'emploi des forces armées.
M. Yan Chantrel, rapporteur pour avis sur les crédits relatifs à la jeunesse et à la vie associative. - Madame la ministre, la principale amputation de votre budget concerne les crédits relatifs à la jeunesse et à la vie associative.
Je me réjouis de la suppression du SNU. Depuis plusieurs années, nous étions un certain nombre à déplorer des expérimentations hasardeuses. Mais je m'interroge sur l'avenir du dispositif. En effet, celui-ci doit se transformer en un parcours d'engagement citoyen piloté par la DJEPVA. Avez-vous des précisions sur ce nouveau projet ? Quels moyens lui seront consacrés, sachant qu'une partie de cet argent pourrait aider à financer le service civique ?
Avec l'objectif affiché de 110 000 volontaires en service civique, on se situe en dessous des 10 % d'une classe d'âge. L'objectif initial étant de 150 000 volontaires, la décrue est importante. La trésorerie est actuellement à l'os. Pourquoi affaiblir ainsi un dispositif qui fonctionne et n'a cessé de faire ses preuves ? Peut-on compter sur vous pour encourager une augmentation de ces crédits ?
Le monde associatif traverse une crise sans précédent. De nombreuses structures alertent sur la pérennité à court terme de leur activité et de leurs emplois. Une vague de licenciements est en cours. Dans ce contexte, envisagez-vous d'augmenter la quote-part des sommes acquises à l'État au titre des comptes bancaires inactifs au profit du FDVA pour 2026 ?
Depuis 2021, le collectif mentorat est financé par la délégation générale à l'emploi et à la formation professionnelle (DGEFP) dans le cadre du programme 102. Cette subvention s'élève à 950 000 euros par an pour la période 2024-2026, ce qui représente 80 % des ressources du collectif. Des discussions ont été engagées, il y a quelques mois, entre la DGEFP et la DJEPVA afin que cette dernière puisse devenir le financeur du collectif. Pouvez-vous nous confirmer que cette opération sera effective à compter du 1er janvier 2026, avec un transfert des 950 000 euros annuels du programme 102 vers le programme 163 ?
Mme Marina Ferrari, ministre. - Monsieur le rapporteur Lozach, vous avez souligné l'instabilité politique ; nous en sommes tous victimes, aussi bien les ministres qui se succèdent que vous-même qui devez répéter vos avis... Souhaitons-nous plus de stabilité, car nous en avons tous besoin !
Dans le cadre de l'exécution budgétaire, le Gouvernement a été contraint de procéder à plusieurs gels de crédits pour équilibrer le budget et atteindre l'objectif fixé en matière de réduction de la dépense publique.
Vous m'interrogez sur l'avenir de l'ANS. Le rapport d'évaluation m'a été remis récemment, et j'en fais une lecture très attentive. À ce stade, aucune décision n'est arrêtée. Vous avez rappelé l'alternative du débat : faut-il recentrer l'ANS uniquement sur la haute performance, ou bien maintenir l'action de l'Agence sur ses deux objets initiaux, à savoir la haute performance et le développement de la pratique ?
L'ANS a parfaitement répondu à ses objectifs en matière de développement de la haute performance. En revanche, concernant le volet de la pratique, il est plus difficile d'estimer sa plus-value véritable.
Toutes les potentialités offertes par le groupement d'intérêt public (GIP) n'ont, à mon sens, pas été explorées. Dans le budget actuel de l'ANS, on recense seulement 2,1 millions d'euros de ressources extérieures, alors qu'un GIP a vocation à aller chercher davantage de financements extérieurs. Aujourd'hui, pour financer les équipements sportifs, de nombreux partenariats public-privé se développent sur le territoire. À cela s'ajoutent le mécénat et la recherche de subventions européennes.
Aujourd'hui, l'ANS est souvent perçue comme un guichet. Il y a un travail à réaliser pour faire connaître les actions de l'ANS en matière de développement de la pratique. Les résultats de ces dernières années sont bons. Dans l'attente de la prochaine feuille de route, je tiens à saluer le travail accompli par les équipes.
La trésorerie de l'ANS connaît une tension, qui réclame notre vigilance. En ce qui concerne le financement des équipements sportifs, nous serons au rendez-vous des collectivités qui attendent un règlement.
Pour le Pass'Sport, j'attends d'avoir une vision objectivée de la situation et de l'impact du recentrage. Cependant, même s'il est encore trop tôt pour se positionner, je suis prête à ce que nous travaillions ensemble pour revenir sur ce qui a été décidé pour les 6-13 ans. Les premiers chiffres qui me sont parvenus - pour le mois de septembre et la première moitié du mois d'octobre - montrent que les prises de licences des 14 ans et plus n'ont que très faiblement évolué, ce qui signifie que les financements supplémentaires n'ont pas eu d'impact pour cette tranche d'âge. En revanche, toujours selon ces premières remontées, les chiffres semblent s'effondrer pour les 6-13 ans. La chute est notamment spectaculaire pour le football.
Par conséquent, il faudra peut-être envisager un retour en arrière, d'autant que l'habitude de la pratique sportive se prend entre 6 et 13 ans. Il faudra réfléchir à mettre en place un dispositif différent de celui qui a été adopté, pour des raisons budgétaires. De plus, il nous faudra aussi examiner certains paramètres dans le cadre de l'enveloppe constante. À titre d'exemple, je m'interroge sur la possibilité de travailler sur le quotient familial, afin que l'aide soit la plus efficace possible et qu'elle bénéficie aux publics en ayant le plus besoin.
J'en viens à la suppression des 26 postes de CTS. Sur les 1 442 postes actuels, 689 sont mis à disposition des fédérations. Ces postes feront l'objet d'une attention particulière de ma part, notamment les postes d'entraîneurs, car nous voulons nous donner les moyens d'atteindre la haute performance et d'obtenir des résultats sportifs. De manière pragmatique, j'ai demandé à savoir à quoi correspondent ces postes et quels sont les départs en retraite prévus. Il s'agit de travailler en lien avec les fédérations pour identifier quels postes peuvent ne pas être remplacés, tout en assurant une continuité et une qualité de service. J'ai également demandé à l'administration centrale de fournir un effort afin de limiter celui qui doit peser sur les CTS.
En ce qui concerne les équipements sportifs, le projet de loi ne prévoit pas d'autorisations d'engagement (AE). Cependant, deux plans ont déjà été menés à bien, chacun visant à créer ou à rénover 5 000 équipements. Quand nous aurons évalué leur mise en oeuvre, nous pourrons éventuellement travailler à trouver de nouvelles ressources pour d'autres plans. Je songe notamment à la natation, qui connaît des fragilités et des carences dans de nombreuses zones géographiques. Il nous faudra peut-être mettre en oeuvre un plan spécifique pour les piscines, qui pourrait comprendre de nouveaux dispositifs, comme celui des piscines mobiles pour la ruralité.
Par ailleurs, je note que deux enveloppes de 10 millions d'euros pourront être mobilisées pour des équipements innovants. À vous, parlementaires, de voir si vous souhaitez faire évoluer la copie budgétaire en matière de financement de nos équipements sportifs.
De plus, le Gouvernement réfléchit à une possible fusion, au sein d'une enveloppe unique, des crédits d'investissement alloués aux collectivités territoriales. Pour simplifier la vie des collectivités, il s'agirait de mettre en place un guichet d'entrée unique pour la dotation d'équipement des territoires ruraux (DETR), la dotation de soutien à l'investissement local (DSIL), le fonds vert et peut-être les aides aux équipements sportifs. J'ai entendu la crainte exprimée par le Sénat, notamment concernant la DETR, d'une déstabilisation des équipements en milieu rural. La réflexion est en cours et je n'ai pas de position arrêtée à ce stade.
En revanche, si nous devions mettre en place une enveloppe dédiée à l'investissement dans les structures sportives, il faudrait que le système soit identique à celui de la culture, avec des objectifs assignés à chaque préfet. C'est le Parlement qui aura le dernier mot.
Enfin, en ce qui concerne le grand acte de décentralisation, le Premier ministre nous a demandé de transmettre nos propositions. Les missions de mon ministère, en tout cas celles qui sont liées au sport, relèvent d'une compétence partagée et sont difficilement décentralisables. J'ai évoqué la « différenciation » dans la note que j'ai transmise. Ainsi, pour certains centres de ressources, d'expertise et de performance sportives (Creps), le bloc communal souhaiterait entrer au sein de l'établissement. Quand des volontés existent sur les territoires, il faut pouvoir laisser aux collectivités la possibilité de s'organiser. Par ailleurs, j'ai toujours été prudente sur la question du chef de file ; il n'est pas nécessaire d'en inventer quand les choses se passent bien.
J'en viens au SNU, dont les crédits n'ont pas été remobilisés en raison de contraintes budgétaires. Je l'ai rappelé : au sein du ministère, la DGSNU a été intégrée à la DGEPVA pour créer une sous-direction de l'engagement. En effet, mon ambition est que mon ministère soit aussi celui de l'engagement de la jeunesse. Le SNU s'éteignant progressivement, il nous faut réfléchir à une nouvelle forme d'engagement.
Les effectifs déconcentrés du SNU sont également conservés au sein du ministère, ce qui est important puisqu'ils pourront être redéployés dans nos services déconcentrés. Ces effectifs permettront de renforcer les équipes pédagogiques mais aussi de mener davantage de contrôles sur le terrain, dans le cadre de la lutte contre les VSS et contre l'entrisme.
Pour l'Agence du service civique (ASC), il s'agit encore d'un choix budgétaire. À cet égard, je souhaite que nous puissions travailler ensemble afin d'améliorer la copie budgétaire, dans l'ambition de tendre le plus possible vers l'engagement de 10 % d'une classe d'âge au sein d'un service civique.
Ce service, parfois très décrié, parfois très apprécié, constitue pour moi une bonne politique, qui a fait ses preuves. Aujourd'hui, des services civiques sont engagés partout, auprès de nos aînés au sein du réseau Aide à domicile en milieu rural (ADMR), comme au sein de nos institutions et de la fonction publique. Cette politique mérite que nous continuions à la soutenir et la discussion budgétaire nous occupera sur ce point.
Concernant le FDVA, la question de la quote-part des comptes bancaires inactifs est aussi soumise à l'arbitrage du Parlement. La quote-part s'élève à 40 %, ce qui représente 35 millions d'euros. À ce stade, je n'ai pas de demande significative en la matière.
Concernant le mentorat, financé sur le programme 102, l'enveloppe de 950 000 euros reste inchangée. Le transfert n'est pas acté pour le moment.
M. Claude Kern. - L'attribution des Jeux d'hiver de 2030 a ouvert une nouvelle phase olympique. Ce projet, initié par deux grandes collectivités territoriales, a été développé en concertation avec l'État. Après une mise en place retardée, le Cojop et la Solideo se sont enfin mis en marche, et nous souhaitons que les Jeux de Milan-Cortina, qui auront lieu en février prochain, lancent véritablement le projet français.
Le projet de loi relatif à l'organisation des jeux Olympiques et Paralympiques de 2030 a été adopté au Sénat en juin et son adoption par l'Assemblée nationale devient relativement urgente, afin de lancer les travaux et de tenir les délais.
Quelles seront vos priorités des prochains mois en la matière ? Quels enseignements tirez-vous pour l'organisation des Jeux de 2030 du récent rapport de la Cour des comptes sur les JOP de 2024 ? Je songe notamment aux recommandations relatives à l'anticipation des dépenses de sécurisation, à l'encadrement et à la valorisation du bénévolat, ou encore au fonctionnement de la gouvernance des Jeux.
J'en viens à la question des hospitalités, sans lesquelles de nombreux clubs ne peuvent pas fonctionner. Quelle serait votre position sur une éventuelle mesure d'encouragement qui pourrait être prise dans le cadre du PLFSS ?
Enfin, la baisse du budget de fonctionnement des missions locales aura un impact significatif sur la politique de la jeunesse.
Mme Mathilde Ollivier. - Deux ans après les Jeux de Paris 2024, qui étaient censés marquer un tournant pour la démocratisation du sport, le budget que vous présentez tourne le dos à cet héritage. Le sport du quotidien est sacrifié, alors qu'il est essentiel à la santé, à la solidarité et à la citoyenneté. Comment justifier une baisse de 50 % des moyens dédiés à la promotion du sport pour toutes et tous ? Comment accepter la fin du plan « 5 000 équipements » alors que piscines et gymnases ferment, faute d'entretien ?
Par ailleurs, la suppression du Pass'Sport pour les 6-13 ans représente un contresens. Cette mesure pénalisera les familles modestes et aggravera la sédentarité des jeunes, alors que l'activité physique a été identifiée comme une grande cause nationale. Il s'agit d'une coupe sèche, aucun projet de remplacement n'étant proposé. Cependant, vous semblez partager notre inquiétude sur le sujet ; quelles sont vos pistes pour remplacer ou rétablir le Pass'Sport pour cette classe d'âge ?
En parallèle, les crédits augmentent pour les Jeux de 2030. La France peut accueillir de grands événements, mais pas au détriment des clubs, des bénévoles et des éducateurs, qui font vivre le sport sur nos territoires. Où est passée la promesse de l'héritage olympique ? Nous attendons un rééquilibrage clair en faveur du sport pour toutes et tous.
Enfin, je souhaite revenir sur les difficultés du monde associatif, notamment sur la question des départs en vacances des jeunes. Les associations d'éducation populaire jouent un rôle essentiel pour garantir le droit aux vacances des enfants, que ce budget affaiblit. Le dispositif « colos apprenantes », qui avait permis à plus de 400 000 enfants de bénéficier d'un séjour entre 2020 et 2024, disparaît sans solution de remplacement. Votre prédécesseure se félicitait pourtant de leur succès ; pourquoi les supprimer ?
Cette situation est d'autant plus préoccupante qu'environ 38 % des enfants ne partent pas en vacances chaque année. Privées de soutien, de nombreuses associations tirent la sonnette d'alarme et risquent de renoncer à l'organisation de séjours, laissant sur le bord du chemin les familles les plus modestes et creusant encore les inégalités d'accès aux loisirs, à la culture et à l'émancipation. Comment justifier que l'État renonce à garantir à chaque enfant le droit fondamental de partir en vacances ?
M. Stéphane Piednoir. - Je m'associe aux regrets formulés sur le programme « Sport », dont les crédits proposés pour 2026 marquent une nouvelle baisse significative. Cette baisse intervient après une loi de finances pour 2025 déjà fortement dégradée, en dépit de l'amendement de 80 millions d'euros défendu par Michel Savin. La diminution est conjuguée à la fin de la mise en oeuvre des plans d'équipement, ainsi qu'à une absence de crédits dédiés aux équipements structurants. Tout cela envoie le signal préoccupant d'un désengagement global de l'État de la politique de financement des équipements sportifs.
Pourtant, 75 % de ces équipements ont plus de vingt ans et les collectivités locales n'ont pas les moyens de les remettre en état. Je songe en particulier aux piscines, dont le coût de fonctionnement et le nombre trop réduit compromettent la généralisation du savoir-nager, qui est un impératif du code de l'éducation, une obligation de l'État. Comment le Gouvernement entend-il garantir l'accès de tous à cet apprentissage alors que les infrastructures adaptées manquent à proximité des écoles ? Envisagez-vous de lancer un plan national pluriannuel ?
En ce qui concerne l'ANS, sa trésorerie s'élève à moins de 50 millions d'euros à la fin de l'année 2025, alors que le reste à payer atteint plus de 130 millions d'euros. Nous sommes confrontés à une situation insurmontable. Le cofinancement entre l'État, les collectivités et le secteur privé n'a jamais trouvé son équilibre. Les collectivités ne peuvent contribuer à la hauteur attendue et le financement privé reste quasiment nul ou insuffisant. Nous défendons une proposition d'organisation à l'échelle départementale, plus proche des élus locaux et des besoins des territoires, qui intégrerait les services de l'État, le département, la région, les intercommunalités et les acteurs du sport. Quelle est votre position sur le fonctionnement et le devenir de l'Agence ?
Par ailleurs, de nombreuses communes craignent que le financement des équipements soit désormais intégré au fonds d'investissement pour les territoires (FIT), sans que des moyens supplémentaires lui soient alloués. Pouvez-vous les rassurer sur ce point ?
Deux propositions de loi importantes pour le sport ont été votées à une large majorité au Sénat : l'une relative à l'organisation, à la gestion et au financement du sport professionnel et l'autre visant à assurer le respect du principe de laïcité dans le sport. Ces textes sont très attendus, notamment par les clubs et les diffuseurs pour la lutte contre le piratage. Seront-ils prochainement inscrits à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale ?
Enfin, je voudrais revenir sur la pratique sportive en compétition, en particulier celle de la course à pied, qui me tient à coeur. Cette pratique se développe à un rythme très soutenu depuis quelques années. Cette croissance semble fortement corrélée avec la mise en place du parcours de prévention santé (PPS), qui remplace le certificat médical. Faudrait-il revenir à un contrôle médical plus strict, afin d'éviter des drames comme le décès survenu dimanche dernier lors du marathon des Alpes-Maritimes ?
Mme Karine Daniel. - J'aimerais revenir sur la situation de danger et d'urgence financière dans laquelle se trouvent les associations. Je commencerai par donner quelques chiffres qui permettent de rappeler l'ampleur du mouvement associatif, qui compte 700 000 associations membres, 20 millions de bénévoles, 1,8 million de salariés. De plus, 67 millions de Françaises et de Français bénéficient des actions menées par les associations, dans les domaines de la santé, du sport, de l'éducation, de la culture, du droit, de la solidarité ou de l'inclusion. Ces associations luttent contre la précarité, l'isolement, le handicap et les violences faites aux femmes. Elles soutiennent 2,4 millions de personnes en distribuant de l'aide alimentaire, alors que 2 159 enfants, dont 503 de moins de 3 ans, dorment encore à la rue et que la pauvreté explose, notamment chez nos aînés.
Dans un contexte budgétaire dégradé comme jamais depuis quinze ans, le monde associatif est fragilisé. Il subit des baisses de crédits récurrentes, des coupes annoncées dans plusieurs secteurs et des diminutions des budgets alloués par les collectivités territoriales, voire des pertes pures et simples de subventions.
En conséquence, un quart des associations de solidarité sont menacées de disparition, disposant de moins de deux mois de trésorerie pour fonctionner. Le secteur le plus touché est celui du social et du médico-social, qui concerne l'aide alimentaire, l'hébergement d'urgence, la protection de l'enfance et l'accompagnement du handicap. Les associations, notamment dans ce secteur, subissent aussi une crise du travail social, qui les affaiblit encore davantage.
Dans ce contexte, 58 % des associations ont une visibilité inférieure à douze mois sur leur financement, 50 % subissent des retards récurrents de versement de fonds publics et 24 % disposent de moins de deux mois de liquidités. À titre d'exemple, les centres d'information sur les droits des femmes et des familles (CIDFF) sont lourdement touchés par les coupes budgétaires. Les associations doivent donc réduire leurs interventions là où les services publics sont les moins présents : dans les zones rurales et les quartiers prioritaires de la politique de la ville.
Ainsi, la baisse des financements alloués à la vie associative que vous annoncez constitue un grand sujet de préoccupation. Quel message souhaitez-vous adresser aux mouvements associatifs à travers ces perspectives budgétaires ? Quelles assurances pouvez-vous donner sachant que, plus la puissance publique s'affaiblit dans ce secteur, plus elle offre d'espace aux fonds privés ? L'entrisme a lieu aussi dans le secteur associatif.
M. Pierre-Antoine Levi. - J'ai une tendresse particulière pour le service civique, créé il y a quinze ans par Yvon Collin, qui était sénateur de mon département. Le budget alloué à ce dispositif passerait de 580 millions d'euros à 465 millions d'euros, ce qui représenterait une baisse de 115 millions d'euros, obligeant à supprimer 40 000 places. Le nombre de jeunes accueillis passerait donc de 150 000 à 110 000.
Cette réduction intervient alors que les indicateurs de pauvreté et de mal-être chez les jeunes sont plus qu'inquiétants, et que la santé mentale des jeunes a été déclarée grande cause nationale 2025. De plus, avec la disparition du SNU, le service civique devient mécaniquement le principal dispositif d'engagement et d'insertion pour les jeunes.
Depuis la création du dispositif en 2010, plus de 875 000 jeunes se sont engagés au service de l'intérêt général. En 2024, le service civique comptait autant de demandeurs d'emploi que d'étudiants ou d'inactifs, parmi lesquels 30 % venaient des territoires ruraux et 15 % des quartiers prioritaires. Il s'agit donc d'un véritable outil de mixité sociale et de cohésion nationale. Surtout, l'effet du dispositif sur l'insertion est prouvé : un an après leur mission, trois quarts des jeunes ont un emploi ou suivent une formation qualifiante. Le service civique leur donne confiance en eux et en l'avenir, ce qui est essentiel dans le contexte.
Comment justifier cette baisse budgétaire drastique, de 20 %, alors que la demande des jeunes reste très forte et que les besoins d'insertion n'ont jamais été aussi importants ? Compte tenu de la disparition du SNU, le service civique ne devrait-il pas être renforcé en tant que dispositif d'engagement de la jeunesse ? Quelles garanties donner pour assurer que les contrats de service civique ne seront pas à nouveau gelés en cas d'adoption d'une loi spéciale en janvier, comme cela s'est produit début 2025 ? Enfin, acceptez-vous de réexaminer cette trajectoire budgétaire pour revenir au moins au niveau du montant initialement prévu pour 2025, qui s'élevait à 580 millions d'euros ?
M. David Ros. - J'aimerais vous entendre sur le domaine du sport-santé. Demain, je présenterai devant l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques (Opecst) les conclusions du rapport Science et Sport, dont l'un des aspects importants est le sport-santé. Sur mon territoire, des inquiétudes se manifestent, notamment concernant la maison sport-santé de Saclay, qui risque de fermer en raison de difficultés financières. De plus, le club omnisports des Ulis est confronté à la suppression immédiate du dispositif d'aide à l'emploi de France Travail, qui a empêché le recrutement d'une personne en CDI. Quelles orientations donner en la matière, notamment sur la question du sport sur ordonnance ?
L'ANS pourrait prendre en charge une mission, qui consisterait à lier au quotidien les résultats sportifs à la pratique des clubs et des gens sur les territoires, ce qui permettrait de tirer bénéfice des avancées obtenues dans le sport de haut niveau.
J'en viens à la question des équipements publics. Une somme de 20 millions d'euros est prévue pour soutenir le développement des piscines ; compte tenu du coût représenté par ce type d'équipement, cette somme ne servira pas à grand-chose : il n'y aura que de petits bassins, si ce n'est des pataugeoires... De nombreuses piscines sont vieillissantes et certaines sont en train de fermer. Il ne s'agit pas tant de préparer les futurs Léon Marchand qui, hélas ! s'entraînent souvent sur d'autres continents, que de pouvoir initier les jeunes à la natation, d'abord pour des raisons de sécurité. Le budget n'est pas de nature à rassurer les élus locaux ; que pouvez-vous en dire ?
Mme Béatrice Gosselin. - Je souhaiterais revenir sur le bilan des associations. En effet, 70 % des associations employeuses déclarent puiser dans leurs fonds propres, qui sont fragiles, voire nuls. De plus, 30 % des associations ont une trésorerie de moins de trois mois et 5 % n'ont aucune trésorerie. Enfin, une association employeuse sur deux déclare avoir vu ses financements publics diminuer et une sur quatre déclare réduire ses activités. Près de 40 % des associations vont donc réduire leur masse salariale, alors que le secteur associatif représente 10 % de l'emploi privé en France. Par ailleurs, 9 % des associations annoncent des suppressions d'emplois, des licenciements ou des plans de sauvegarde.
La suppression du dispositif « colos apprenantes » est incompréhensible, tant il semble important sur le plan social, mais aussi en matière de rattrapage scolaire, de cohésion et de mixité.
Concernant le service civique, pourquoi ne pas récupérer les millions d'euros qui étaient alloués au SNU ? Vous avez invoqué des explications liées au personnel, mais ces crédits pourraient servir à engager un plus grand nombre de jeunes.
Par ailleurs, la réintroduction de la taxe d'apprentissage est annoncée pour les acteurs non lucratifs. Des associations vont donc devoir assumer un coût global supplémentaire, alors que leur budget ne le permet pas.
Enfin, de nombreux facteurs, comme la baisse des contrats aidés ou la diminution des subventions des collectivités elles-mêmes exsangues, expliquent la souffrance du monde associatif. Si nous laissons ce monde basculer, nous perdrons un tissage territorial essentiel, sur les plans sportif, culturel et social. Avant de procéder à des coupes sombres, il faut réfléchir aux conséquences qu'elles peuvent entraîner.
Mme Colombe Brossel. - En ce qui concerne le service civique, nous pointons les millions d'euros de baisse budgétaire, mais il faudrait surtout évoquer le nombre de jeunes qui ne pourront plus s'engager dans ces parcours. En 2026, nous ne compterons que 60 000 entrées, ce qui signifie que nous allons revenir au niveau de 2016 ; il s'agit d'une régression incroyable ! Le dispositif retrouvera son niveau d'il y a dix ans alors qu'il célébrera son quinzième anniversaire et que nous reconnaissons tous son utilité.
Par ailleurs, cette régression va toucher l'ensemble du territoire. L'an dernier, quand il a fallu sacrifier un certain nombre de postes, les gros contributeurs ont été ciblés et non l'ensemble du tissu associatif qui irrigue nos territoires. L'éducation nationale a payé le prix fort et a divisé par deux le nombre de jeunes accueillis en service civique. C'est en zone rurale que nous avons vu disparaître les postes et ces suppressions ont eu un impact considérable. Cette année, le Gouvernement ne pourra pas atteindre ses objectifs sans toucher aux autres structures et l'impact se fera donc ressentir sur tout le territoire.
Enfin, j'évoquerai le mentorat. Quel que soit le nom qu'on lui donne, « accompagnement individualisé » ou « accompagnement de publics spécifiques », qu'il ait lieu dans les zones rurales ou les quartiers prioritaires de la politique de la ville, il fonctionne. Nous ne pouvons pas nous permettre de revoir à la baisse le financement de dispositifs qui fonctionnent en termes d'insertion, d'éducation et de lien avec les familles.
M. Cédric Vial. - Concernant le service civique, 580 millions d'euros lui ont été alloués l'année dernière lors de l'adoption du projet de loi de finances, mais 77 millions d'euros de crédits ont été gelés presque immédiatement après. Ensuite, il a été indiqué que 30 millions de ces crédits gelés devaient être récupérés ; 4 millions seulement l'ont été pendant l'été. Ainsi, 26 millions d'euros doivent encore être dégelés ; vont-ils l'être ?
Le financement s'élève théoriquement à 465 millions d'euros pour l'année prochaine ; faut-il s'attendre à de nouveaux gels de crédits ?
Le chiffre de 110 000 jeunes est avancé, mais je voudrais clarifier les choses. Nous comptons toujours deux fois les mêmes jeunes, puisque ceux qui entrent en début d'année sont recomptés en début d'année suivante. Ainsi, quand nous évoquons le chiffre de 150 000 jeunes, il s'agit en réalité de 86 000 nouveaux jeunes qui entrent dans le dispositif. Quand on passe à 135 000, il s'agit en fait de 73 000 nouveaux jeunes. L'année prochaine, le dispositif n'accueillera que 60 000 jeunes.
Enfin, on parle d'annulation de crédits, mais nous pourrions aussi bien parler de l'annulation des mandats d'Emmanuel Macron, en tout cas de sa politique en direction de la jeunesse. En effet, on annule le SNU, qui lui tenait à coeur, nous supprimons les « colos apprenantes », dispositif cher à Jean-Michel Blanquer, et le service civique revient à son niveau d'avant 2017. Comment essayer de construire une nouvelle politique pour la jeunesse, qui en a tant besoin ?
Mme Marina Ferrari, ministre. - En ce qui concerne les jeux Olympiques et Paralympiques de 2030, effectivement, le temps presse et il est urgent d'adopter le projet de loi, qui doit être examiné début janvier par l'Assemblée nationale. En effet, il nous faut lancer les travaux pour être au rendez-vous ; en outre, plus le temps passe, plus ces opérations risquent de nous coûter cher.
Pour ces Jeux, les priorités sont de faire passer le texte, d'adopter le budget de la Solideo en décembre, puis de définir la carte des sites. En temps masqué, le Cojop et la Solideo travaillent. Le Cojop avance notamment sur les partenariats, quand la Solideo oeuvre à produire certaines études nécessaires et à lancer les appels d'offres pour les différents équipements.
Concernant les hospitalités, le souhait de relever le plafond à 25 % dans le PLFSS a été évoqué ; quid du coût budgétaire d'une telle mesure ? J'ignore ce qu'elle pourrait coûter aux finances publiques et ne suis pas certaine qu'elle soit dans l'air du temps. En revanche, j'entends plusieurs propositions qui viseraient à taxer davantage les hospitalités. Compte tenu de la situation des recettes du sport professionnel, je suis très réticente à l'idée de modifier quoi que ce soit. Tant que nous n'aurons pas travaillé sur la question des revenus liés aux médias et à la diffusion, nous devons veiller à ne pas aggraver une situation déjà très fragile.
La proposition de loi relative à l'organisation, à la gestion et au financement du sport professionnel doit permettre d'améliorer le cadre et d'avancer sur la question du piratage. Il s'agit donc de mettre en oeuvre les dispositions prévues par ce texte et d'avancer avec les fédérations, en particulier celles de football et de rugby, avant d'imaginer de nouveaux dispositifs. C'est le message que je voudrais faire passer : évitons d'instaurer de nouvelles taxes quand la situation tangue.
Madame la sénatrice Ollivier, nous ne tournons pas le dos au sport.
Mme Mathilde Ollivier. - À l'héritage olympique !
Mme Marina Ferrari, ministre. - Vous avez dit que les Jeux de 2030 ne devaient pas se faire au détriment des clubs. Absolument, mais il n'en a jamais été question ! Il faut se garder d'opposer ces Jeux à la promesse de l'héritage olympique. Étant originaire du département qui a accueilli les derniers Jeux d'hiver organisés en France, je peux vous dire que cela a changé la vie de nos territoires et de nos clubs sportifs. Les infrastructures livrées alors sont encore utilisées par nos clubs aujourd'hui, elles nous ont permis de maintenir la pratique de certaines disciplines sur nos territoires ; elles seront utilisées de nouveau pour les Jeux de 2030. Je sais que ceux-ci suscitent certaines critiques, mais je n'opposerai jamais Jeux et clubs. Pour le paralympique aussi, l'héritage doit être amplifié : nous devons encore oeuvrer au développement des disciplines hivernales pour les personnes en situation de handicap. À cet égard, ces Jeux nous permettront de livrer des infrastructures plus accessibles et d'améliorer l'accès aux stations. Notre politique vise, dans ce domaine comme dans d'autres, à valoriser l'héritage des Jeux précédents, en particulier ceux de 2024.
Vous m'interrogez ensuite sur la fin du plan « 5 000 équipements ». Oui, il est terminé, mais c'est après avoir livré 10 617 équipements, soit le double de l'objectif initial. Il faut le reconnaître, même si cela ne nous dispense pas de nous pencher sur d'autres sujets, évoqués par plusieurs d'entre vous, comme notamment les piscines.
Vous avez enfin évoqué les départs en vacances des jeunes. Je partage votre sentiment sur ce sujet. J'ai lu les rapports de la Fondation Jean-Jaurès sur l'accès aux vacances, en particulier des jeunes : souvent, les enfants qui ne partent pas en vacances ne pourront pas le faire non plus à l'âge adulte. Par ailleurs, pour ce qui est de la pratique sportive, on sait que c'est souvent en colonie de vacances que l'on se met à pratiquer un sport. Il est donc essentiel que nos jeunes puissent partir en vacances. De fait, la ligne « colos apprenantes » a été mise en extinction dans le projet de budget 2026. Je vous renvoie sur ce point, sans me dédouaner, à la discussion parlementaire que vous aurez. Nous avons ouvert des pistes avec la Cnaf ; les discussions, pour l'instant, ne sont pas concluantes, mais nous ne désarmons pas. Il faut surtout mener un travail collectif pour rendre plus lisibles les aides au départ en colonie de vacances : il existe une multitude de dispositifs, que les parents trop souvent ne maîtrisent pas. Il faudrait des dispositifs simplifiés pour que les personnes pouvant en bénéficier y aient davantage recours.
Monsieur le sénateur Piednoir, vous m'interrogez sur le manque de crédits pour les infrastructures sportives. Vendredi dernier, en déplacement dans la Nièvre, j'ai demandé à la préfecture combien, en dehors des plans de l'ANS, on avait pu mobiliser pour les équipements sportifs au titre de la DETR ; on m'a répondu : 550 000 euros. L'État assure donc bien toujours un financement de ces infrastructures sur nos territoires, que ce soit au travers de la DETR, de la DSIL ou du fonds vert. Vous le savez mieux que quiconque, quand il faut rénover un équipement, l'État accompagne les collectivités concernées.
Faut-il un plan plus spécifique pour les piscines ? Pourquoi pas ? M. le sénateur Ros a parlé de « pataugeoires ». Voyez-vous, j'ai regardé ce qui a été fait, notamment en Moselle, avec les centres aquatiques mobiles : ces camions, c'est tout de même mieux qu'une pataugeoire ! Ces équipements coûtent environ 775 000 euros ; on est certes loin d'un grand centre aquatique, mais cela peut permettre, dans des zones rurales, d'apprendre le b.a.-ba de la natation. Il existe aussi des bassins mobiles plus classiques ; je pense aux programmes déployés notamment par la ligue Île-de-France de natation. S'intéresser à ces pistes ne signifie pas que nous renonçons aux équipements fixes ou à la rénovation des bassins existants - vous avez raison de rappeler que 22 % de nos équipements sportifs ont plus de cinquante ans.
Par ailleurs, nous continuons à travailler étroitement avec les collectivités et l'éducation nationale pour ouvrir davantage au public les équipements sportifs adossés aux collèges, aux lycées, ou même aux universités. Un rapport qui vient de m'être remis retrace l'expérimentation menée en Nouvelle-Aquitaine, où 50 % de ces équipements sont désormais ouverts à la pratique hors temps scolaire. Il faut encore progresser ; ces structures - on en compte tout de même 23 000 en France - doivent être davantage ouverts à tous, notamment le week-end. Nous nous y emploierons d'ici à 2027.
Vous m'interrogez également sur le fonctionnement de l'ANS. Oui, celle-ci doit évidemment être plus proche des élus. Nous devons faire vivre davantage ce GIP.
Enfin, je tiens à une adoption très rapide de la proposition de loi relative au sport professionnel dans sa configuration actuelle. Je juge en particulier extrêmement intéressant son volet relatif au développement du sport féminin ; la question du piratage devient, elle aussi, essentielle.
Sur la proposition de loi visant à assurer le respect du principe de laïcité dans le sport, adoptée par le Sénat, le Gouvernement n'a pas de position arrêtée, mais il demeure favorable à l'inscription de ce texte à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale. Comme il s'agit d'une initiative parlementaire, il faudra que l'Assemblée elle-même décide de se saisir de ce texte.
Concernant les certificats médicaux, je n'ai pas encore eu le temps d'examiner ce sujet de près, mais je compte bien le faire. De la souplesse a été introduite, mais des événements malheureux comme celui que vous avez relaté peuvent inciter à rétablir l'obligation d'un certificat pour certaines compétitions qui exigent un effort particulier du fait de leur intensité.
Madame la sénatrice Daniel, nous sommes bien conscients du mal-être exprimé par les associations autour du mouvement « ça ne tient plus ». On assiste à des plans sociaux inédits ; cela doit nous amener à nous interroger sur le modèle économique de nos associations, qui ont intérêt à recourir à des financements complémentaires croisés pour moins dépendre de l'argent public. Vous relevez que certaines collectivités remettent en question les financements octroyés à des associations. Il ne m'appartient pas de porter un jugement sur le libre choix de telle ou telle collectivité. En revanche, je dois dire qu'entre 2019 et 2023, le financement dévolu aux associations par l'État a augmenté de 44 %. Cela recouvre certes la période de la covid, mais nous avons quand même consenti un effort considérable, sans lequel beaucoup d'associations n'existeraient plus. Je suis aussi au courant des difficultés rencontrées par les CIDFF. Vous pouvez constater que, pour ce qui relève de mon ministère, il n'y a pas de baisse des crédits alloués à la vie associative ; cela ne nous dispense pas de rester vigilants sur d'autres lignes budgétaires relevant d'autres ministères.
Vous craignez que le recours à des fonds privés puisse donner lieu à des formes d'entrisme. Certes, mais ce n'est pas toujours le cas. Le mécénat se développe toujours plus et nous devons encourager de telles démarches, notamment par la mise en réseau des acteurs, pour que les associations puissent plus facilement trouver un interlocuteur.
Monsieur le sénateur Levi, l'objectif de cette année est bien de garantir 110 000 missions de service civique, en intégrant tant le stock que le flux - 71 000 missions sont aujourd'hui en cours. Je me réjouis de voir le consensus de votre commission sur le service civique ; ce n'est pas le cas partout... Les arbitrages budgétaires actuels ne sont pas figés ; je souhaite que les échanges que nous aurons bientôt permettent d'améliorer la copie, mais, au vu des contraintes budgétaires, cela ne pourra se faire qu'à enveloppe constante, en réorientant certaines sommes vers la politique que nous aimerions voir mise en oeuvre pour le service civique.
Vous m'interrogez aussi sur la possibilité d'une loi spéciale. Pour notre part, nous souhaitons - comme vous, j'imagine - aller au bout de la discussion budgétaire au Parlement, qui devrait nous permettre de relever certains budgets. Nous avons acté un changement de méthode en renonçant à employer l'article 49.3 de la Constitution. À ce stade, il n'est pas question d'avoir recours à une loi spéciale ; en tout cas, ce n'est pas notre souhait.
Monsieur le sénateur Ros, vous m'interrogez sur la politique sport-santé et, notamment, le sport sur ordonnance. Je vous renvoie sur ce point à l'article 19 du PLFSS, qui permettra des avancées en la matière. Pour la deuxième stratégie nationale sport-santé, nous allons travailler à budget constant : 16,2 millions d'euros seront consacrés aux projets sport-santé, 16,5 millions d'euros au développement des maisons sport-santé et 1 million d'euros à un appel à projets pour le sport en milieu professionnel dans la fonction publique.
Madame la sénatrice Gosselin, je ne nie évidemment en aucune manière les difficultés des associations. Comme vous, je regrette la mise en extinction de la ligne budgétaire « colos apprenantes » ; j'espère que la discussion parlementaire et notre travail avec la Cnaf nous permettront de progresser sur ce point.
Vous m'interrogez également sur la décision de soumettre les employeurs du secteur non lucratif à la taxe d'apprentissage. Il est vrai qu'une disposition relative à la participation financière aux centres de formation à l'apprentissage figure dans le PLF, mais son adoption par l'Assemblée nationale n'est pas encore certaine. Les associations s'en émeuvent, ce que l'on peut comprendre au vu des difficultés financières qu'elles rencontrent actuellement, mais ce sont des employeurs au même titre que les entreprises qui ont recours à l'apprentissage. Le calendrier n'est peut-être pas le bon, mais il serait logique que, puisqu'elles sont aujourd'hui bénéficiaires de ces contrats d'apprentissage, elles financent aussi la formation.
Mme Béatrice Gosselin. - Certaines associations, en plus de quelques employés, ont recours à l'immense ressource du bénévolat. Si on leur impose de trop nombreuses difficultés, il est à craindre que ces bénévoles renoncent à leur engagement, ce qui serait fort dommageable.
Mme Marina Ferrari, ministre - Pour vous répondre plus particulièrement sur le bénévolat, une étude vient de confirmer une intuition que j'avais eue sur le terrain : les jeunes s'engagent toujours plus dans le bénévolat, de manière spectaculaire. Cette orientation peut nous mettre du baume au coeur et nous incite à mener une politique encourageant le lien entre acteurs. Le rajeunissement des bénévoles est un message d'espoir pour nos associations.
Madame la sénatrice Brossel, concernant le service civique, les chiffres parlent d'eux-mêmes et vos observations sur ce sujet sont assez justes. Oui, l'éducation nationale a dû absorber une grosse part des réductions, ce qui doit nous inciter à rester vigilants. On pourrait être tenté de réduire la part de jeunes en service civique au sein de la fonction publique afin de favoriser leur présence dans le monde associatif, ou réciproquement. À mon sens, plutôt que de s'engager dans de telles dichotomies, il faut rester équilibré, ne pas pénaliser le monde associatif - tout le monde ici a rappelé combien nous en avons besoin - et conserver également le service civique au sein de la fonction publique, qui permet de valoriser celle-ci et de susciter des vocations. Pour autant, les derniers arbitrages rendus, avant mon entrée en fonctions, ont davantage protégé le milieu associatif, ce qui prouve que nous lui portons une attention toute particulière.
Le mentorat fonctionne bien, vous l'avez dit. Ses crédits enregistrent une légère baisse, mais la convention pluriannuelle d'objectifs (CPO) restera bien à 950 000 euros. De plus en plus d'entreprises se tournent vers le mécénat ; peut-être faudrait-il examiner comment développer davantage le mécénat au sein du mentorat.
Monsieur le sénateur Vial, je vous confirme le dégel de ces 26 millions d'euros. Peut-on s'attendre à un autre gel ? Je ne peux pas vous répondre à ce jour. Je ne le souhaite évidemment pas, mais qui vivra verra !
Faut-il voir dans les décisions actuelles une annulation des mandats d'Emmanuel Macron ? Monsieur le sénateur, je vous répondrai simplement que, au gré des différents gouvernements que j'ai eu l'honneur de servir, nous avons toujours oeuvré, non pas pour défendre une politique particulière, mais pour l'intérêt général des Français.
M. Laurent Lafon, président. - Je vous remercie de vos réponses, madame la ministre ; nous avons bien noté vos ouvertures et nous espérons en obtenir également de Bercy, sur le service civique et le Pass'Sport notamment, deux sujets sur lesquels nous travaillerons volontiers avec vous dans les prochaines semaines.
Je précise aussi que la question de Claude Kern sur les hospitalités portait plus spécifiquement sur les difficultés que l'application de la loi Sapin II peut générer pour des entreprises sponsors ; nous aurons l'occasion d'y revenir avec vous.
Cette audition a fait l'objet d'une captation vidéo qui est disponible en ligne sur le site du Sénat.
La réunion est close à 18 h 30.