Mardi 18 novembre 2025

- Présidence de M. Laurent Lafon, président -

La réunion est ouverte à 16 h 05.

La crise des conseils d'architecture, d'urbanisme et de l'environnement (CAUE) - Audition de M. Joël Baud-Grasset, président de la Fédération nationale des conseils d'architecture, d'urbanisme et de l'environnement (FNCAUE), Mme Delphine Christophe, directrice générale des patrimoines et de l'architecture du ministère de la culture, M. Vincent Montrieux, adjoint au directeur de l'habitat, de l'urbanisme et des paysages du ministère de la transition écologique, et M. Olivier Touvenin, chef du service de la gestion fiscale du ministère de l'économie et des finances

M. Laurent Lafon, président. - Pour évoquer la situation de crise dans laquelle se trouvent de nombreux conseils d'architecture, d'urbanisme et de l'environnement (CAUE), nous recevons cet après-midi M. Joël Baud-Grasset, président de la Fédération nationale des CAUE ; Mme Delphine Christophe, directrice générale des patrimoines et de l'architecture du ministère de la culture, que nous avons le plaisir d'accueillir pour la première fois dans ces nouvelles fonctions ; M. Vincent Montrieux, adjoint au directeur de l'habitat, de l'urbanisme et des paysages du ministère de la transition écologique (MTE) ; et M. Olivier Touvenin, chef du service de la gestion fiscale du ministère de l'économie et des finances.

Nous vous remercions d'avoir répondu à l'invitation de la commission de la culture, qui suit de près le sujet de l'ingénierie patrimoniale dans les territoires. Votre éclairage nous sera évidemment précieux dans la perspective de l'examen prochain du projet de loi de finances.

Comme nous le savons tous, les CAUE ont été mis en place, sous statut associatif, dans la quasi-totalité des départements, où ils exercent une mission d'expertise architecturale et paysagère au service des particuliers, de l'administration et des collectivités locales.

Ce service public indépendant est précieux sur tout le territoire ; il est crucial dans les territoires faiblement dotés en ingénierie urbanistique et patrimoniale, au premier rang desquels les zones rurales, comme l'ont récemment montré plusieurs travaux du Sénat. Je pense notamment à la mission d'information sur les architectes des bâtiments de France, à laquelle ont participé de nombreux membres de notre commission, notamment sa présidente Marie-Pierre Monier et son rapporteur Pierre-Jean Verzelen, ainsi qu'au rapport d'information de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable sur le programme « Petites Villes de demain », dont nous avons le plaisir d'accueillir la rapporteure Nicole Bonnefoy, ainsi que Sébastien Fagnen.

Ces associations traversent depuis plusieurs mois une crise de financement majeure, qui a déjà conduit à la mise en liquidation du CAUE de la Manche et menace fortement celui de l'Orne. D'une manière générale, la plupart des CAUE sont dans une situation fragile ou critique, qui les conduit déjà à procéder à d'importantes suppressions d'emplois.

L'origine de ces difficultés a été établie par plusieurs rapports parlementaires émanant des deux assemblées, notamment par les travaux de nos collègues de la commission des finances Stéphane Sautarel et Isabelle Briquet, dont les conclusions et les recommandations ont été adoptées la semaine dernière.

Elles découlent de la très forte chute, au cours des deux dernières années, du montant collecté de la taxe d'aménagement, dont la part départementale représente en moyenne 80 % des ressources des CAUE. Ce montant a diminué de 31 % entre 2023 et 2024 et, selon les projections de la commission des finances, devrait chuter de 56 % entre 2023 et 2025. Le recul serait plus important encore en ce qui concerne spécifiquement la part départementale de cette taxe, mobilisée pour financer les CAUE ; des précisions sur ce point seront évidemment nécessaires de la part de M. Touvenin.

Cet effondrement résulte de trois facteurs. Le premier est celui du recul de la construction, dont résulte une baisse mécanique de l'assiette de la taxe. Les deux suivants sont en lien avec les nouvelles modalités de liquidation de la taxe prévues par la loi de finances de 2021. Cette réforme a en effet décalé son exigibilité à la date d'achèvement des travaux, ce qui constitue un deuxième facteur explicatif. Elle a également transféré la compétence de sa liquidation du ministère de la transition écologique, dont elle relevait auparavant, au ministère de l'économie et des finances ; il semble, et il s'agit là du troisième facteur, que ce transfert ait été insuffisamment préparé et se traduise aujourd'hui par d'importants dysfonctionnements techniques, qui ne permettent pas la collecte effective de la taxe par les services départementaux des finances publiques.

Nous attendons aujourd'hui que vous nous éclairiez sur ces différents éléments et sur les mesures prises pour y remédier. Je voudrais notamment que nous puissions disposer d'éléments objectifs sur le poids respectif de ces différents facteurs. Devant les députés Christine Pirès Beaune et David Amiel, ainsi que devant la commission des finances du Sénat, la direction générale des finances publiques (DGFiP) a en effet mis l'accent sur le recul de la construction et le report de la date d'exigibilité de la taxe pour expliquer le recul de sa collecte. Ces éléments n'expliquent cependant pas tout : le rapport des deux députés pointe en effet l'absence totale de liquidation des taxes d'urbanisme dans certains départements lors des deux premières années du transfert, notamment le Maine-et-Loire.

Au-delà de ces dysfonctionnements manifestes se pose désormais, dans l'urgence, la question des mesures à mettre en oeuvre pour assurer la pérennité de certains CAUE, dont certaines pourraient être inscrites dans le projet de loi de finances pour 2026 : peut-être vos ministères respectifs ont-ils déjà défini quelques orientations sur ce point ?

Voilà quelques-unes des questions que nous aborderons cet après-midi. Je vous propose d'y répondre dans un propos liminaire de cinq à dix minutes, puis s'ensuivra une discussion, qui sera ouverte par la rapporteure de notre commission sur les sujets patrimoniaux, Mme Sabine Drexler.

M. Joël Baud-Grasset, président de la Fédération nationale des conseils d'architecture d'urbanisme et de l'environnement. - Permettez-moi tout d'abord de me présenter : président de la FNCAUE et du CAUE de la Haute-Savoie, je suis avant tout vice-président du conseil départemental de la Haute-Savoie, chargé des finances. Le sujet de la taxe d'aménagement fait partie intégrante de ma feuille de route de conseiller départemental : ses recettes abondent à la fois le budget de la commune dans laquelle le permis de construire a été délivré et le budget du département, où elles sont affectées à des actions liées à l'environnement, aux espaces naturels sensibles, et aux actions périphériques, par exemple aux voies vertes.

Le législateur a voulu, au travers de la loi du 3 janvier 1977 sur l'architecture, que les CAUE dispensent des services gratuits aux usagers. Dans le cadre de la réforme de la taxe d'aménagement de 2013, il a prévu qu'un certain taux de la part départementale de cette taxe leur serait affecté ; cette recette fléchée représente aujourd'hui 80 % de leurs ressources. C'est pourquoi, lorsque nous parlons des difficultés rencontrées par les CAUE, nous faisons référence aux problèmes rencontrés dans la collecte de la taxe d'aménagement.

L'accompagnement proposé par les CAUE aux collectivités locales et à tous les porteurs de projets est original et se distingue de la maîtrise d'ouvrage : en tant qu'associations présidées par des élus locaux et départementaux, ils apportent des conseils en amont des projets, sans en tirer un bénéfice.

Dès les années 2021 et 2022, nous avons commencé à alerter sur deux risques auxquels ils sont exposés.

Le premier a trait aux conséquences de la modification du déclencheur de la perception de la taxe d'aménagement : auparavant due au dépôt de permis de construire, elle l'est désormais à la fin des travaux. Nombre d'entre vous ont été maires ; il vous est donc aisé d'imaginer le casse-tête que représente, pour les collectivités locales, le fait de devoir solliciter les porteurs de projets pour avoir confirmation de la fin des travaux afin de collecter la taxe.

Permettez-moi d'illustrer mon propos en prenant un exemple, mis en lumière par une question d'actualité au Gouvernement posée par Sylviane Noël, sénatrice de la Haute-Savoie ; les services de l'État ont certainement été à même d'identifier les communes et les budgets concernés. Je parlerai de l'une d'entre elles : Marignier, en Haute-Savoie, où un permis de construire a été délivré pour un projet d'entreprise de 9 500 mètres carrés. Pour les projets d'une surface égale ou supérieure à 5 000 mètres carrés, la taxe d'aménagement est due quelques mois après la délivrance de l'autorisation. Le pétitionnaire du permis de construire, qui souhaitait payer une partie de la taxe due au titre de ce projet, d'un montant estimatif de 340 000 euros, n'a pas su à qui s'adresser ; il a même essayé de faire une déclaration sur le site internet du service des impôts le 8 octobre dernier. Alors que, d'un côté, ce porteur de projet souhaite apporter une contribution à la commune concernée et, que de l'autre, le maire compte sur cette recette pour abonder son budget communal, aucun titre n'a été émis à ce jour.

Le second facteur de risque résulte du transfert de la liquidation de la taxe à la DGFiP. Dans sa question d'actualité au gouvernement, la sénatrice Sylviane Noël évoque la commune des Houches, proche de Chamonix, qui ne parvient pas à récupérer les taxes dues pour les exercices de 2020 et de 2021. La charge de la liquidation incombait alors à la direction départementale des territoires et de la mer (DDTM), mais le transfert de la collecte à la DGFiP a permis à certains projets de passer sous les radars. Or, une fois dépassé le délai de reprise de trois ans, ces recettes seront perdues.

Je souhaitais, par ces exemples précis, démentir le discours consistant à imputer les difficultés rencontrées par les CAUE à la baisse de la construction de l'ordre de 40 %. Il existe un dysfonctionnement au niveau de la perception de la taxe.

Mme Delphine Christophe, directrice générale des patrimoines et de l'architecture du ministère de la culture. - Tout d'abord, je voudrais souligner la grande préoccupation du ministère de la culture quant à la période de crise traversée par les CAUE. Les CAUE sont en effet des partenaires très précieux du ministère et de ses services déconcentrés, notamment les unités départementales de l'architecture et du patrimoine (Udap), avec lesquels ils collaborent quotidiennement. Le travail qu'ils réalisent sur les sujets d'urbanisme et d'environnement permet de sortir des logiques structurelles de silo que nous combattons tous.

Les CAUE accompagnent les acteurs publics sur la préparation des projets et des choix des démarches à engager par les collectivités locales, dont nous connaissons les besoins en ingénierie. Ils dispensent aussi des conseils gratuits auprès des particuliers lors de permanences, qui confortent le travail de nos services déconcentrés. Ils sont, de surcroît, des relais essentiels du ministère de la culture sur la sensibilisation des publics et la valorisation des bonnes pratiques, notamment auprès des publics scolaires. Enfin, ils participent à la formation et au perfectionnement des maîtres d'ouvrage, des professionnels et des agents des administrations et des collectivités.

Chaque année, le ministère maintient son financement à la FNCAUE, à hauteur d'environ 170 000 euros. Les directions régionales des affaires culturelles (Drac) signent aussi des conventions avec les CAUE, par lesquelles elles leur octroient des subventions. Une trentaine de conventions prévoient chaque année un financement d'environ 500 000 euros, relevant souvent d'un cofinancement d'actions de sensibilisation et de promotion de l'architecture dans les territoires.

Plusieurs projets du ministère sont menés conjointement avec la FNCAUE. L'application Archistoire contribue à la démocratisation de l'accès à l'architecture en permettant des visites de sites en réalité augmentée. Un projet d'exposition itinérante sur l'architecture et le paysage associe par ailleurs le ministère à la FNCAUE et au réseau des maisons d'architecture ; une exposition itinérante conjointe sur le label « Architecture contemporaine remarquable » sera ainsi mise en route en 2026. Les CAUE constituent enfin un véritable appui pour la concrétisation du plan France ruralités, auquel notre ministre est particulièrement attachée : grâce à leur accompagnement, un grand nombre de projets de restructuration de centres-bourgs récemment primés ont pu voir le jour.

Au mois de février dernier, une nouvelle stratégie nationale pour l'architecture a été présentée par la ministre de la culture. L'attachement du ministère à la territorialisation et à l'adaptation de son action aux réalités locales a été réaffirmé à cette occasion. La mise en oeuvre de cette stratégie constitue sans doute un moment favorable pour réaffirmer le rôle des CAUE dans les objectifs interministériels, y compris au niveau local.

Le ministère de la culture propose qu'une mission d'inspection conjointe de l'inspection générale des affaires culturelles (Igac), de l'inspection générale de l'environnement et du développement durable (Igedd), et peut-être de l'inspection générale des finances (IGF) soit rapidement diligentée afin de réfléchir aux nouveaux modes de gouvernance des CAUE. Il rejoint ainsi la recommandation n° 7 de Mme Isabelle Briquet et de M. Stéphane Sautarel, qui propose d'engager une réflexion d'ensemble sur la gouvernance et le financement des solutions d'ingénierie.

M. Vincent Montrieux, adjoint au directeur de l'habitat, de l'urbanisme et des paysages du ministère de la transition écologique. - Le ministère de la transition écologique s'intéresse aux CAUE à un double titre. Il avait historiquement, par ses services déconcentrés, la charge de la liquidation de la taxe d'aménagement jusqu'en 2022, son recouvrement étant assuré par la DGFiP. D'une manière plus permanente, les CAUE jouent un rôle majeur dans la préservation de la qualité architecturale des constructions, via l'accompagnement des pétitionnaires, mais également dans la qualité environnementale, s'agissant notamment de la qualité paysagère.

Le ministère de la transition écologique et la FNCAUE ont d'ailleurs été à l'initiative d'un dispositif de formation aux élus sur ces questions, qui a trouvé son public et que nous souhaitons reconduire au bénéfice des élus qui prendront leurs fonctions à compter de 2026, si nos moyens financiers nous le permettent. Il nous paraît en effet essentiel que la problématique du paysage, qui diffuse dans l'ensemble des opérations d'aménagement, d'urbanisme et de construction, soit bien comprise par les collectivités.

Le transfert de la liquidation de la taxe d'aménagement a requis un basculement progressif des effectifs du MTE vers la DGFiP, alors que le ministère conservait la gestion de certains stocks. Le transfert des équivalents temps plein (ETP) a été organisé en phases successives, ce qui a permis d'assurer la résolution de ce stock à compter du mois de septembre 2022. À ce jour, un petit volant d'agents constitué en task force auprès de la direction régionale et interdépartementale de l'environnement, de l'aménagement et des transports (Drieat) des Hauts-de-Seine suit la fin de ce stock en venant en appui des différentes DDTM qui ne disposent plus des moyens humains pour procéder à des opérations de liquidation.

Je note le problème concernant la commune des Houches, qui n'était pas remonté jusqu'à moi.

Je ferai quelques observations sur les raisons de la baisse du rendement de la taxe d'aménagement, qui sont évoquées dans le rapport de la mission flash.

Cette baisse s'explique d'abord par la réduction du nombre d'autorisations d'urbanisme, passé de 411 000 à 256 000 entre 2021 et 2024, soit une baisse de 38 %.

Elle s'explique ensuite par l'évolution de la liquidation des taxes d'urbanisme. Auparavant, la liquidation intervenait un an, puis deux ans, après la délivrance de l'autorisation d'urbanisme ; dorénavant, l'opération a lieu dans les 90 jours suivant l'achèvement des travaux. Le rapport du Sénat évoque la piste d'un système d'acompte et, à moyen terme, la nécessité d'engager une réflexion d'ensemble sur la gouvernance et le financement des CAUE. Une mission inter-inspections serait certainement la réponse adaptée puisque les problématiques sont multifactorielles : état conjoncturel de la construction, avenir des CAUE, modalités de gestion et de financement.

La recommandation n° 4 du rapport du Sénat est relative à la constitution de groupes de travail sur la taxe d'aménagement, afin d'assurer le suivi avec les collectivités. Des échanges ont déjà eu lieu entre les services et des représentants des collectivités ; nous sommes tout à fait disposés à continuer cet exercice de manière à apporter des informations précises à la FNCAUE.

M. Olivier Touvenin, chef du service de la gestion fiscale du ministère de l'économie et des finances. - Nous ne nions pas l'existence de dysfonctionnements dans la liquidation de la taxe d'aménagement, comme nous l'avons dit lors d'un webinaire avec l'Association des maires de France et des présidents d'intercommunalité (AMF) qui a réuni plusieurs centaines de maires, et redit devant la commission des finances du Sénat il y a très peu de temps.

Ces dysfonctionnements s'expliquent d'abord par le retard de livraison d'un certain nombre d'outils informatiques, qui concernaient malheureusement les grands projets, c'est-à-dire ceux qui donnent lieu à acompte et apportent le plus de recettes. Ils s'expliquent ensuite par des difficultés de compréhension par les usagers de leurs obligations déclaratives, une fois le permis déposé, puis une fois la construction achevée. Le nouveau dispositif prévoyait une innovation, la déclaration dématérialisée des taxes d'urbanisme, qui a complexifié ces obligations.

Nous avons donc fourni, en février dernier, un important travail technique pour simplifier le parcours déclaratif, dans les limites de nos possibilités puisque nous devons respecter l'ensemble des attendus législatifs et réglementaires. Nous avons par ailleurs mis en place des mesures correctrices à l'échelle locale. S'agissant des grands projets, sur lesquels nous avions pris du retard, nos services ont travaillé à en liquider un certain nombre manuellement et à en assurer le recouvrement. Enfin, nous avons reçu la livraison de l'ensemble du bloc informatique nécessaire à la gestion des grands projets, en deux phases : pour la déclaration, l'été dernier ; pour la liquidation, c'est-à-dire pour la collecte de la taxe, il y a seulement quelques semaines.

Ces dysfonctionnements nous ont fait prendre du retard par rapport au projet initial, ce qui a eu logiquement des conséquences déplaisantes pour un certain nombre de collectivités - je pense aux communes, qui attendent des recettes de la taxe d'aménagement, et aux conseils départementaux, qui financent par ce truchement les CAUE.

Nous sommes en train d'essayer de rattraper ce retard, comme nous l'avons indiqué à la commission des finances. Depuis la mi-septembre, plus de 100 millions d'euros ont été mis en liquidation. Je n'ai pas les chiffres précis pour la part départementale, mais je vous les communiquerai. S'agissant des grands projets, nous avons donné des consignes à nos directions départementales ; j'ai noté les exemples que vous aviez cités, et nous allons rattraper les dysfonctionnements qui ont pu se produire.

Il n'en demeure pas moins que le niveau de ressource apportée par la taxe d'aménagement est lié au nombre de permis de construire, lequel est en diminution, particulièrement pour les grands projets, avec une forte baisse de 38 %. La meilleure année, les recettes de la taxe d'aménagement étaient de plus de 2 milliards d'euros. L'année dernière, elles étaient de 1,7 milliard et seront, d'après nos projections, d'un peu plus de 1 milliard d'euros en 2025, avec un probable décalage de trésorerie : nous recouvrerons début 2026 des sommes qui auraient dû être collectées cette année sans les dysfonctionnements évoqués.

La base taxable a sensiblement diminué, et je crains qu'il en aille de même pour les années à venir, ce qui ne peut qu'avoir un effet défavorable sur ceux qui en bénéficient. D'où la nécessité de se pencher conjointement, en interministériel, sur l'économie générale du dispositif des CAUE. Le dispositif est ancien - il date de 1977 -, et la taxe affectée a été introduite au milieu des années 2010, dans un contexte immobilier qui n'est plus le même aujourd'hui. Il faut donc se pencher sur les dysfonctionnements du dispositif pour essayer de garantir la viabilité des CAUE, auxquels les collectivités et les différents partenaires ministériels sont attachés.

Mme Sabine Drexler, rapporteur pour avis de la mission « Culture » sur le programme 175 « Patrimoines ». - Nous sommes tous préoccupés par la situation des CAUE, car nos territoires ont besoin de leurs compétences.

Ma première question porte sur les outils de gestion mis en place pour assurer la liquidation de la taxe d'aménagement par les services départementaux des finances publiques.

Dans leur rapport de juin 2025, les députés Christine Pirès Beaune et David Amiel se sont interrogés sur le choix fait par la DGFiP de ne pas reprendre les outils précédemment utilisés par les DDTM, pour leur préférer des solutions manifestement inabouties. Je pense notamment à l'application GesLoc, qui présente, semble-t-il, des défaillances techniques, ainsi qu'à l'interface Gérer mes biens immobiliers (GMBI), dont les insuffisances ont été pointées par la Cour des comptes en janvier dernier.

Vous nous avez apporté quelques éléments de réponse, monsieur Touvenin, mais pourriez-vous nous éclairer sur les solutions techniques concrètement mises en oeuvre pour répondre à ces difficultés ? Est-il par ailleurs envisagé de remettre en place un formulaire de déclaration préalable des surfaces taxables, qui permettait autrefois la taxation d'office, ainsi que le propose la FNCAUE ?

Ma deuxième question porte sur les effectifs mobilisés au sein des directions départementales des finances publiques (DDFiP) pour assurer la liquidation des taxes d'urbanisme. Le même rapport de l'Assemblée nationale indique que, alors que les effectifs initialement prévus étaient déjà inférieurs à ceux qui assuraient ces opérations dans les DDTM, tous les postes prévus n'ont pas été affectés. Les députés avancent à cet égard le chiffre de 37 % seulement des postes pourvus au premier semestre 2025. Confirmez-vous cette difficulté de recrutement ? Quelles en sont les causes et quelles sont les mesures mises en oeuvre pour y remédier ?

Je m'interroge, enfin, sur le sort d'une autre taxe d'urbanisme collectée selon les mêmes modalités que la taxe d'aménagement : la redevance d'archéologie préventive, instituée en 2021 pour financer les diagnostics archéologiques réalisés par l'Institut national de recherches archéologiques préventives (Inrap) et les services d'archéologie des collectivités territoriales. La liquidation et la collecte de cette taxe donnent-elles lieu aux mêmes difficultés que celles qui sont constatées pour la taxe d'aménagement ? Si c'est effectivement le cas, dans quelle proportion le montant collecté a-t-il reculé depuis 2023 ?

Plus largement, le produit de cette taxe n'est plus affecté, depuis 2016, aux opérateurs de l'archéologie préventive, qui connaissent de sérieuses difficultés financières. Le cas des CAUE, qui sont principalement financés par la taxe d'aménagement, montre les limites du financement quasi exclusif de services publics par un outil fiscal soumis à des fluctuations conjoncturelles. Pour autant, les opérateurs de l'archéologie souhaiteraient que les montants de la redevance collectée leur soient effectivement attribués.

Pourriez-vous nous indiquer l'écart entre les montants collectés au titre de la redevance d'archéologie préventive et les montants alloués aux opérateurs via le programme 175 ? Une réforme du financement des services d'archéologie préventive est-elle envisagée par les services du ministère de la culture ?

M. Olivier Touvenin. - La redevance d'archéologie préventive est « embarquée », elle fait partie d'un tout global. Je vous communiquerai les chiffres, mais, les mêmes causes produisant les mêmes effets, la tendance est identique.

Les effectifs transférés à la DGFiP l'ont été budgétairement, de programme à programme, avec un quantum inférieur à celui qui était mobilisé auparavant par les services du ministère du logement. On considérait alors - la perspective apparaît maintenant plus lointaine que celle qui était envisagée initialement - que le nouveau processus dématérialisé reposant sur la déclaration des usagers permettrait des gains de productivité. Ce transfert d'effectifs s'est traduit par un transfert de personnels : il a été proposé aux agents qui effectuaient les opérations de liquidation dans les services locaux du ministère de la transition écologique de rejoindre la DGFiP. Tous ne l'ont pas accepté, ce qui explique ce pourcentage de 37 % : il correspond non pas aux personnels mobilisés par la mission, mais aux personnels qui nous ont rejoints.

Ainsi, 37 % de nos effectifs budgétaires ont été pourvus par des personnels expérimentés du MTE. Mais nous avons pourvu l'ensemble des postes qui nous avaient été transférés budgétairement. Les personnels du MTE, qui sont des sachants, ont été positionnés comme des référents : ils nous ont aidés pour la formation des autres agents et pour le suivi des dossiers. De mémoire, ils étaient 180 à nous rejoindre initialement ; certains sont retournés ensuite dans leur ministère. Finalement, nous avons dû en garder environ 120.

M. Vincent Montrieux. - 117 !

M. Olivier Touvenin. - La mission mobilise plus de 300 effectifs, le reste étant pourvu par des agents de la DGFiP.

M. Laurent Lafon, président. - L'ensemble des départements est-il couvert ?

M. Olivier Touvenin. - Tout à fait.

J'en viens aux outils informatiques. Nous n'avons pas repris ceux du ministère du logement parce que nous avons opéré un changement complet de processus. À l'occasion du transfert de la liquidation - nous assurions déjà le recouvrement -, il a été fait le choix d'un paiement au terme des travaux, sauf pour les grands projets, et d'une déclaration effectuée par celui qui dépose l'autorisation d'urbanisme, avec deux étapes.

Lors du dépôt de l'autorisation d'urbanisme, il faut déclarer une date prévisionnelle d'achèvement des travaux, qui nous permet de mettre en oeuvre un mécanisme de surveillance. Quand les travaux sont terminés, il faut faire une déclaration exhaustive de l'ensemble des éléments de la base taxable, qui nous permet de calculer la taxe d'aménagement, de la mettre en liquidation et d'en assurer le recouvrement.

Les outils ne pouvaient donc pas être les mêmes puisque le processus est différent. Par ailleurs, ceux utilisés par le ministère du logement étaient vieillissants ; les reprendre aurait conduit à un gâchis technologique et de ressources. Nous avons préféré revoir complètement les outils informatiques. Le seul élément que nous avons repris est le calculateur mis à disposition des usagers par le ministère de la transition écologique, qui permet de simuler le montant de la taxe due.

Le rapport parlementaire de Mme Pirès Beaune et de M. Amiel devait initialement être publié en juin 2024, ce qui n'a pas été possible pour les raisons que vous connaissez tous. Nous avons actualisé les informations que nous avions communiquées, pour l'essentiel, sur la partie du rapport relative à la gestion de la taxe d'habitation, qui a fait l'objet de la plupart des remarques de la Cour des comptes. Malgré ce léger décalage temporel, il n'en reste pas moins que ce que pointe le rapport - le retard dans le développement des outils informatiques - est tout à fait exact.

Un particulier ou un entrepreneur dépose une autorisation d'urbanisme sur un flux informatique qui porte le joli nom de Sitadel, lequel est transmis à la DGFiP - il est également utilisé par le ministère du logement à des fins statistiques. Cela nous permet de disposer de l'ensemble des autorisations d'urbanisme et d'assurer la surveillance et la relance de leurs titulaires.

Après la première déclaration, si nous n'avons aucune nouvelle au bout de six mois, on fait une première relance pour demander la date de fin prévisionnelle des travaux. Une fois que l'on estime les travaux effectués, on effectue plusieurs relances, par courriel et par courrier estampillé DGFiP, pour demander au redevable de nous fournir des précisions sur la fin des travaux. Le module de gestion, c'est GesLoc, et le module de surveillance et de relance s'appelle Surf (surveillance-relance foncière). Lorsque le redevable ne nous répond pas, nous entrons dans un processus de recouvrement forcé : nos services lui adressent une mise en demeure en lui demandant de nous transmettre une déclaration et de s'acquitter de la taxe d'aménagement due, ou de nous apporter des éléments prouvant que les travaux n'ont pas eu lieu, qu'ils ont été abandonnés ou qu'ils n'ont pas été terminés. En l'absence de réponse à cette mise en demeure, nous mettons en oeuvre des actes de recouvrement forcé et une amende est prévue pour ceux qui ne paieraient pas leur taxe d'urbanisme.

Pour l'essentiel, les rentrées de cette taxe sont satisfaisantes : elle est acquittée par des propriétaires qui réalisent des travaux tels que la construction d'une véranda, d'un garage ou d'une annexe, ce qui facilite les opérations d'identification et de recouvrement. Il en va de même pour les grands projets, portés par des acteurs qui ont la plupart du temps pignon sur rue.

La mauvaise volonté des redevables n'est donc pas l'élément déterminant des dysfonctionnements constatés. Outre les retards pris sur les outils informatiques mis à disposition de nos services et des redevables, les particuliers se heurtent souvent à un parcours déclaratif complexe du fait de la présence de divers abattements et zonages, notamment lorsqu'ils ne remplissent une déclaration que ponctuellement. Cela nous a amenés à améliorer le parcours en février dernier, avec la mise en place d'un accompagnement téléphonique et la mise à disposition de déclarations papier.

Pour en revenir aux gains de productivité, nous tablions sur un taux de dématérialisation d'environ 80 % au moment du lancement du projet, mais le résultat est sensiblement inférieur avec un taux d'environ 50 %, qui progresse lentement, cet état de fait ayant des répercussions sur le rythme de traitement. Nous avons mis l'accent sur les grands projets dans la mesure où une taxe d'aménagement ne rapporte guère que 1 000 euros pour un petit propriétaire qui réalise un aménagement dans son domicile ; à l'inverse, les grands projets peuvent rapporter des sommes comprises entre 100 000 euros et 350 000 euros, et constituent l'essentiel de la ressource.

M. Laurent Lafon, président. - Les dysfonctionnements rencontrés sur GesLoc au début de l'année ont-ils été résolus ?

M. Olivier Touvenin. - Nous avons effectué un retour d'expérience assez intensif dès le mois de septembre 2023 au sein des services, les agents ayant également souffert des difficultés survenues, ce qui nous a permis d'élaborer des plans d'action. Par ailleurs, nous avons identifié les manques relatifs au parcours déclaratif, ce qui nous a conduits à lancer une série de développements informatiques pour améliorer la situation. Ces chantiers ne sont pas achevés et le projet devrait être à peu près stabilisé courant 2026.

Je reconnais tout à fait que quatre ans se seront écoulés depuis le moment où nous avons récupéré la gestion des taxes d'urbanisme, en septembre 2022.

M. Laurent Lafon, président. - C'est long, très long !

M. Olivier Touvenin. - J'en conviens ; c'est à l'aune de l'ensemble des projets informatiques. Il faut aussi prendre en considération le fait que le périmètre pris en charge par l'outil GMBI a grossi en cours de route, puisqu'il a intégré la gestion de la taxe d'habitation sur les résidences secondaires, la collecte d'information sur la révision des valeurs locatives des locaux d'habitation, sans oublier la taxe d'aménagement et la redevance d'archéologie préventive. Cela aboutit, comme l'a relevé la Cour des comptes, à un projet informatique extrêmement complexe et lourd, d'où une difficulté à respecter les délais impartis.

Enfin, concernant les surfaces, des discussions nourries ont eu lieu avec les représentants des collectivités territoriales lorsque la DGFiP a récupéré la gestion de la liquidation. Lesdites collectivités souhaitaient maintenir le dispositif d'acompte pour les grands projets, demande qui a été satisfaite en retenant une surface de 5 000 mètres carrés. Comme nous avons pu l'indiquer à la commission des finances, la question d'une réduction de ce seuil à 3 000 mètres carrés reste ouverte : elle semble faisable sur le plan technique et nous n'y sommes pas opposés.

De manière générale, la complexité de la taxe d'urbanisme, du fait des nombreux abattements et zonages existants, mériterait d'être mise en débat.

J'en termine en vous indiquant que nous nous sommes engagés, aux côtés de l'AMF, à constituer des groupes de travail associant des représentants des maires et de leurs services autour de plusieurs thèmes, dont celui de la simplification de la taxe. Ces échanges alimenteront le plan d'action que nous souhaitons mettre en oeuvre en 2026 et les années suivantes.

M. Vincent Montrieux. - Il est exclu de reprendre l'outil informatique ADS 2007, qui, comme son nom l'indique, est vieux de dix-huit ans. Nous sommes en train de mettre au point un outil qui nous permettra d'effectuer uniquement l'instruction des autorisations d'urbanisme, la liquidation ayant été transférée à la DGFiP.

M. Laurent Lafon, président. - Quand sera-t-il prêt ?

M. Vincent Montrieux. - Nous l'avons appelé « ADS 2028 ».

M. Laurent Lafon, président. - Si je comprends bien, la réforme qui était censée s'appliquer à partir de 2022 ne le sera qu'à compter de 2026, voire 2028 ?

M. Vincent Montrieux. - Ce n'est pas du tout ce que j'ai dit, mais je me suis probablement mal exprimé. L'outil informatique dont nous disposions avait un double objet : il servait à instruire les autorisations d'urbanisme pour les services de l'État et à liquider l'ensemble de la taxe d'aménagement.

Si la liquidation de cette taxe a été transférée, tel n'a pas été le cas du module informatique, trop vieux pour être exportable à la DGFiP, d'où le développement de nouveaux outils par cette dernière. L'outil que nous sommes en train de concevoir aura vocation à ne traiter que l'instruction.

Mme Paulette Matray. - Ayant moi-même été maire d'une très petite commune rurale, je ne peux que souligner que cette catégorie de collectivités a besoin des CAUE. Les considérations techniques et informatiques que vous venez d'exposer font perdre de vue le service que ces structures rendent dans les territoires, en particulier dans les plus fragiles d'entre eux, car ils sont dépourvus d'ingénierie.

Tous les projets de la commune de Marigny - dont j'étais la maire - ont ainsi été visés par le CAUE de notre département, qui est un outil indispensable. En conséquence de la réforme de la taxe d'aménagement, 10 % des effectifs ont été supprimés en moyenne : en Saône-et-Loire, ce sont trois emplois qui ont été supprimés sur une dizaine de postes, ce qui a entraîné le gel de certains projets, tandis que les salariés sont dans l'incertitude.

Existe-t-il un calendrier précis et crédible de résorption des retards de collecte sur la taxe d'aménagement ? L'État entend-il déployer un dispositif exceptionnel d'avance financière pour garantir la continuité de l'activité des CAUE, le maintien des emplois et la poursuite de leurs missions au service des habitants et des élus ?

Mme Sonia de La Provôté. - La situation m'inspire une forme de colère. Les gestionnaires des moyens ne se rendent pas compte de la réalité du terrain alors que les conséquences des dysfonctionnements sont dramatiques : au-delà des pertes d'emplois et de la fermeture de CAUE, des compétences, des référents et des tiers de confiance sur lesquels pouvaient s'appuyer les élus locaux disparaissent.

Il faudrait au contraire préserver ces tiers de confiance qui les conseillent sur de larges sujets, qu'il s'agisse de l'aménagement d'une place ou du devenir de l'église. On ne naît pas avec des compétences d'urbanisme et les CAUE jouent magistralement un rôle d'acculturation à ces problématiques. De surcroît, leur attache départementale crée un lien de proximité et en fait les garants de l'équité entre les communes rurales et les communes urbaines. Sans ces structures, nous allons à la catastrophe, car les Drac seront dans l'incapacité de compenser leur disparition.

Un CAUE a déjà fermé et d'autres sont en passe de connaître le même sort. Sur le plan budgétaire, qu'ont prévu ceux qui sont responsables de cette quasi-catastrophe afin de pallier transitoirement les difficultés et d'empêcher la fermeture de ces structures ? Je me joins à l'interrogation de ma collègue : un système d'avances financières à destination des départements est-il prévu ?

Mme Monique de Marco. - Le département de la Gironde a également perdu des postes. Au regard de la grande difficulté dans laquelle nous nous trouvons, comptez-vous mettre en place une cellule de crise et un fonds de sauvegarde visant à aider les CAUE ? Comptez-vous identifier des solutions permettant de rétablir un financement pérenne pour ces structures ?

J'ai compris de vos interventions que les CAUE traversent une période transitoire et j'ignore ce que vous entendez lorsque vous indiquez envisager une réforme structurelle permettant d'adapter les CAUE aux réalités du territoire. Faut-il donc modifier leurs missions ? Pouvez-vous être plus précis sur vos recommandations ?

De la même manière, lorsque vous évoquez la perspective de diligenter une mission conjointe pour réfléchir aussi aux nouveaux modes de gouvernance, c'est vraiment - passez-moi l'expression - du blabla ! Je ne suis pas du tout convaincue par vos propositions : que faisons-nous dès maintenant, puis à moyen et à long terme ?

Par ailleurs, ne faudrait-il pas déployer un contrôle du versement et de l'utilisation de la taxe d'aménagement par les départements ?

M. Jacques Grosperrin. - J'étais inquiet et n'ai été guère rassuré par les propos de M. Touvenin. Les associations disparaissent une à une, au risque d'un éparpillement du savoir-faire. Je pense aussi aux femmes et aux hommes qui travaillent dans ces structures : nous faisons face à une urgence humaine.

Face aux dysfonctionnements dont vous nous avez fait part, pourquoi ne pas envisager que la Banque des territoires intervienne - peut-être en se portant garante pour des emprunts - afin d'éviter la disparition complète des CAUE ?

En tout état de cause, le ministère de l'économie porte une grande responsabilité dans le retard pris et il est urgent d'agir.

M. Sébastien Fagnen, membre de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable. - Je m'en voudrais de paraître agacé alors que je participe pour la première fois à une réunion de cette commission, mais je peux difficilement cacher ma colère à l'écoute de ce qui a été dit. En effet, dans la Manche, département que je représente, le CAUE vient d'être liquidé, 14 emplois ont été supprimés et une expertise incomparable, assise sur des années de pratique et d'accompagnement, disparaît du paysage. Je suis donc agacé quand j'entends certains de nos interlocuteurs disserter sur le sexe des anges et la nature des logiciels, alors que nos territoires perdent ce qu'ils ne récupéreront pas.

Comment une réforme dont nous savions qu'elle allait droit dans le mur a-t-elle pu continuer à être menée ? Nous savions que les moyens humains seraient insuffisants, que les outils informatiques n'étaient pas prêts, mais la réforme a suivi son cours. Le CAUE de la Manche est le premier d'une liste qui risque de s'allonger ; je songe notamment à celui de l'Orne, qui risque de disparaître lui aussi. La sonnette d'alarme aurait dû être tirée depuis longtemps, ce qui interroge sur le fonctionnement de nos administrations centrales, qui devraient être en mesure d'appuyer sur le frein quand c'est nécessaire.

Un fonds d'urgence sera-t-il mis en place pour accompagner les CAUE ? Ils sont au bord du gouffre et le temps qu'il reste à certains se compte en jours ou en semaines. La mise en place d'un fonds est indispensable à la survie de ces structures qui permettent d'accompagner les collectivités, avec une ingénierie précieuse, dans le souci de l'intégration environnementale et du respect de l'architecture vernaculaire. Nous avons de grands défis à relever, notamment en ce qui concerne la mise en oeuvre du « zéro artificialisation nette » (ZAN). Nous voyons tomber un service public de la transition écologique au moment où nous en avons le plus besoin. Cette situation est absurde et dramatique. Les élus locaux vont se retrouver orphelins d'une structure qui leur apportait un service indispensable, les aidait à répondre aux enjeux écologiques et leur permettait aussi de poursuivre des objectifs esthétiques, d'ancrer le beau dans nos territoires, ce qui ne relève pas du supplément d'âme. J'espère des réponses franches et rapides sur ce fonds d'urgence.

Mme Nicole Bonnefoy, rapporteure pour avis de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable sur le programme « Petites villes de demain ». - Le rendement de la taxe d'aménagement va continuer de baisser, en raison des nécessités liées à la sobriété foncière et au ZAN. Il faudra donc revoir l'assiette de cette taxe, les abattements prévus et toute cette fiscalité. Nous sommes quelques-uns à travailler sur le sujet au Sénat et nous déposerons des amendements dans le cadre de l'examen du projet de loi de finances pour 2026.

Cependant, la baisse du rendement n'est pas la seule cause du problème et il faut évoquer aussi le changement de processus. Nous sommes nombreux ici à avoir posé des questions écrites quand ce changement a été annoncé. Depuis tous les bancs, nous avons signalé que le nouveau processus ne fonctionnerait pas et nous n'avons pas été écoutés. Aujourd'hui, les conséquences sont dramatiques pour les territoires, pour les personnes qui travaillent dans ces structures et pour cette expertise essentielle qui se perd. Ce n'est pas acceptable.

Dans le cadre de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable, nous avons remis un rapport, avec Louis-Jean de Nicolaÿ, sur le dispositif « Petites Villes de demain ». Dans ce cadre, nous nous sommes beaucoup déplacés en France et, partout, on nous a dit combien l'ingénierie territoriale locale, dont celle des CAUE, était précieuse pour la mise en oeuvre des dispositifs d'aménagement du territoire et pour la planification de l'adaptation au changement climatique. Ne plus donner les moyens à cette ingénierie indépendante et pluridisciplinaire est catastrophique.

Qu'allez-vous faire ? Un fonds d'urgence sera-t-il créé ? Il faut des solutions immédiates.

Le législateur a souhaité l'indépendance des CAUE et la gratuité des missions qui lui sont confiées. Il s'agit d'un service public. Avec nos collègues de la commission des finances, nous avons auditionné un représentant de la DGFiP : il a évoqué une possible remise en question du modèle de la gratuité des CAUE. Ce n'est pas acceptable.

M. Jean-Gérard Paumier. - Les élus locaux apprécient les services rendus par les CAUE. Ces conseils mettent à disposition une ingénierie territoriale dont les maires ne disposent pas et sont source de conseil, en matière d'environnement et de bâtiment. J'éprouve un sentiment d'incompréhension par rapport à la réforme menée : qui a eu l'idée de ce changement qu'aucun élu local ne demandait ? Quelles raisons techniques ont entraîné ce transfert d'un ministère à un autre ?

Je voudrais aussi souligner le rôle méconnu, mais important que jouent les CAUE en matière culturelle. Ils organisent notamment des expositions dans les départements et sensibilisent à la qualité architecturale.

La mise en place d'un fonds d'urgence constituerait une juste réparation de la part de l'État pour des manquements dont les collectivités ne sont pas responsables, mais dont elles subissent les conséquences.

M. Laurent Lafon, président. - Vous avez avancé le montant de 1 milliard d'euros pour la recette de la taxe d'aménagement, qui rapportait encore 2,4 milliards d'euros il y a peu. S'agit-il du montant attendu pour 2025 ou 2026, ou d'une estimation à plus long terme, qui signifierait une baisse pérenne du rendement de cette taxe ?

M. Joël Baud-Grasset. - Il est réconfortant de constater que nombre d'élus considèrent que les CAUE ont montré toute leur pertinence. Les représentants de l'administration ont été un peu chahutés ; ils ont cependant eu l'humilité de donner une explication franche sur le sujet, accessible et non technocratique. Il est essentiel de savoir de quoi nous parlons et quelles sont les causes de ce qui ne fonctionne pas. J'espère qu'ils investiront l'énergie humaine nécessaire pour offrir un résultat tangible et accessible pour les citoyens. Je plaide aussi pour la mise en place d'un fonds de sauvegarde. Nous pouvons évoluer, malgré l'inertie constatée de nos administrations, qui explique nos difficultés à collecter la taxe.

J'ai rencontré le maire d'une commune du Var, qui m'a expliqué s'être engagé dans un projet urbain partenarial (PUP), qui relève du ministère de la transition écologique. Dans ce cadre, le maire fait état de ses besoins concernant un potentiel aménagement et la collectivité reçoit immédiatement une dotation financière. La maire de Saint-Gingolph m'a également parlé de ce dispositif : dans sa commune de quelques centaines d'habitants, un promoteur immobilier avait prévu un important projet de logements et elle a suggéré la mise en place d'un PUP. La dotation financière levée par la commune l'exonérera-t-elle de la taxe d'aménagement ? Le département en sera-t-il exonéré aussi ?

M. Vincent Montrieux. - Effectivement, le PUP constitue une alternative à la taxe d'aménagement.

Concernant l'origine de la réforme, un rapport de l'IGF et de l'Igedd a fondé une réflexion commune aux deux ministères concernés, sur la base d'un constat partagé sur le processus antérieur. Le rapport de la mission flash mené par le Sénat ne conteste ni ce constat, ni le principe même de la réforme. La situation antérieure posait en effet des difficultés, en raison en particulier de la nécessité de procéder à des remboursements lorsque les projets n'étaient pas mis en oeuvre. La taxe d'aménagement était acquittée au tout début des opérations de construction, ce qui impliquait, pour certains opérateurs, de devoir débourser des sommes alors que le projet risquait de ne pas être mis en oeuvre. L'idée que ce dispositif n'était pas optimal faisait consensus.

Par ailleurs, en passant d'un système de liquidation par les services à un système d'autoliquidation partielle, de nature déclarative, les opérations ont été simplifiées, ce qui permet de limiter le nombre d'agents qui s'y consacrent. Il semble logique que l'État cherche à optimiser l'affectation de ses agents.

M. Olivier Touvenin. - Effectivement, le processus antérieur n'offrait pas complètement satisfaction. Son inconvénient principal était de faire débourser des sommes à un certain nombre d'acteurs, usagers ou promoteurs, dès le dépôt de la demande d'autorisation d'urbanisme. Ainsi, un ou deux ans après, on demandait aux collectivités ayant bénéficié des sommes de les rembourser, à hauteur de 25 % à 30 % des montants collectés. En matière de fonctionnement des politiques publiques et de processus administratif, ce mécanisme constituait un élément d'incertitude. Par ailleurs, en termes de financement, les sommes à débourser par les promoteurs pouvaient avoir des effets sur la nature des projets et sur leurs ambitions en matière d'urbanisme.

Le second point concerne le sens de cette réforme. En termes de politique publique, il est logique et cohérent que la DGFiP, administration fiscale de référence à la fois en matière d'impôt et de tenue des bases foncières pour les collectivités locales, centralise l'ensemble de la collecte de la taxe, de sa liquidation à son recouvrement, dans la mesure où celle-ci est liée à des valeurs foncières, des autorisations d'urbanisme et des questions cadastrales.

L'adhérence des taxes d'urbanisme et des taxes foncières constitue l'un des effets positifs attendus de la réforme. Préoccupation légitime des collectivités territoriales, dans la mesure où cela détermine pour elles un certain nombre de ressources non négligeables - taxe foncière, taxe d'habitation sur les résidences secondaires -, la qualité des bases foncières est établie par la DGFiP. En fonction des constructions et des valeurs locatives, nous calculons les montants de ces taxes, que nous reversons ensuite aux collectivités.

On nous fait parfois le reproche de ne pas correspondre à l'état de l'art sur la tenue des bases foncières ; des cabinets proposent notamment des prestations de services afin d'améliorer celles-ci. On peut toujours progresser, mais la tenue des bases est globalement de qualité. Le fait de collecter, via un canal unique, la taxe d'urbanisme et la taxe foncière s'avère aussi un moyen de récupérer de la base fiscale. Nous sommes informés de la construction, de la taxe d'urbanisme due à la fin de la construction, et ensuite de la taxe foncière récurrente liée à cette construction. Cela entraîne, en termes de qualité de tenue des bases et d'assurance sur le produit de la taxe foncière, des effets positifs supérieurs au système antérieur, quand les éléments étaient séparés.

J'entends les critiques sur le sujet de l'informatique. Au-delà du caractère frustrant de projets qui s'avèrent souvent longs, complexes et coûteux, il reste que l'informatique permet aux administrations fiscales d'assurer la collecte de l'impôt. Grâce à l'informatique, nous avons modernisé l'ensemble des processus fiscaux ; nous avons conduit avec succès le projet de prélèvement à la source. Nous avons connu davantage de difficultés avec le service GMBI.

L'informatique permet à la fois une meilleure gestion, un meilleur suivi et, à terme, des gains de productivité et d'efficience. Au-delà de la concentration dans une seule administration des activités de recouvrement et de liquidation, l'une des ambitions du projet initial était de mettre en place un processus automatisé, susceptible de produire des gains d'efficience ; à ce jour, je le concède, l'objectif n'est pas encore atteint.

Pour rappel, le transfert a été voté en 2021 dans le cadre d'un texte de loi. À l'époque, les collectivités ont présenté un certain nombre de remarques, notamment concernant l'acompte pour les grands projets. Celles-ci ont été prises en compte et le législateur s'est prononcé sur la base d'éléments précis. Ensuite, l'exécution a peut-être été trop rapide, mais cela ne remet pas en cause le bien-fondé de la réforme. De toute façon, comme l'a mentionné le ministère du logement, l'obsolescence des outils informatiques appelait un chantier important.

Le montant de la collecte des taxes d'aménagement s'élevait à 2,2 milliards d'euros en 2023 et 1,7 milliard d'euros en 2024. Cette année, nous avons déjà collecté 600 millions d'euros. Le stock de la DGFiP, que nous allons nous efforcer de résorber d'ici la fin de l'année, est estimé à 120 millions d'euros. Une fois le titre envoyé, le redevable dispose de deux mois pour nous payer, ce qui entraînera des reports sur 2026. À cela s'ajoute le stock important mentionné par le ministère du logement, qui fait en sorte de le résorber. Au total, le montant des recettes en 2025 devrait s'élever à 1 milliard d'euros.

Les perspectives dépendent du dynamisme du marché de la construction. J'ai compris, au regard des derniers chiffres communiqués par le ministère du logement, que la tendance était plutôt à la baisse. Cela rend d'autant plus urgente la réflexion à mener sur le financement des CAUE.

Je suis l'interlocuteur qui a évoqué, devant la commission des finances, la question de la gratuité des prestations des CAUE, de manière ouverte et sans dire qu'il fallait le faire. La gratuité et l'indépendance du modèle sont des facteurs distincts. Le principe de la gratuité en toutes circonstances mérite, à mon sens, d'être interrogé dans le contexte actuel des finances publiques. Sans dire non plus qu'il s'agit de mettre fin à la gratuité, il me semble légitime de s'interroger sur un modèle conçu en 1977.

M. Vincent Montrieux. - Pour rappel, nous avons recensé 256 000 autorisations de construction en 2024, contre 411 000 autorisations en 2021. Le chiffre définitif pour 2025 devrait s'approcher de celui de 2024. Plusieurs centaines de millions d'euros de baisse de la taxe d'aménagement collectée résultent directement de cette diminution des autorisations d'urbanisme, indépendamment de la réforme de sa liquidation. Cela justifie que l'on s'interroge sur la diversification du financement des CAUE, qui dépendent actuellement à 80 % de la taxe d'aménagement.

M. Laurent Lafon, président. - Au-delà de la situation du marché de l'immobilier et de la construction, divers éléments peuvent expliquer cette baisse de recettes, notamment les dysfonctionnements mentionnés par M. Touvenin. Notre difficulté est de chiffrer la part de la baisse de recettes qui résulte des dysfonctionnements dus à l'État et subis par les collectivités locales.

La réforme a été votée par les parlementaires sans que ces derniers aient été informés de l'impréparation des administrations et de la baisse des recettes qui en découlerait.

Concernant l'archéologie préventive, nous avons compris que l'évolution des recettes de la redevance correspondante suivait celle de la taxe d'aménagement. Une réflexion est-elle menée, du côté ministère de la culture, sur le financement des opérateurs ?

Mme Delphine Christophe. - Depuis 2016, la redevance d'archéologie préventive va directement dans le budget de l'État. Les 68 collectivités territoriales ayant des services d'archéologie préventive dépendent du programme 175 « Patrimoines ». En 2022, le calcul de la subvention accordée par le ministère de la culture à ces services, qui interviennent avant l'Inrap sur les phases de diagnostic, a été révisé. Le nouveau calcul établi en 2022 a entraîné une augmentation de 3 millions d'euros de la subvention du ministère de la culture.

Dans le projet de loi de finances pour 2026, 14,2 millions d'euros sont prévus, soit un niveau équivalent à celui de 2025. La subvention versée à chacune des collectivités s'établit à partir des réalisations de l'année précédente. Au total, on estime à 12,8 ou 12,9 millions d'euros le montant total à verser aux collectivités, soit une enveloppe couverte par le PLF.

Je n'ignore pas les difficultés que rencontrent certains services d'archéologie préventive. Nous discutons du sujet avec les départements de France, dans le cadre d'une nouvelle convention signée en début d'année. Cela donnera peut-être lieu à des mesures dans les prochains mois.

M. Laurent Lafon, président. - Vos ministres de tutelle vous ont-ils demandé de travailler à l'existence d'un fonds de soutien ? Si tel est le cas, à combien chiffrez-vous l'enveloppe de ce fonds ?

M. Olivier Touvenin. - Je ne dispose d'aucun élément sur un fonds d'urgence. Nous avons des informations concernant certaines mesures liées à la taxe, notamment la diminution du plafond des acomptes. Par ailleurs, les départements ont la possibilité juridique d'offrir des avances.

M. Vincent Montrieux. - Nous n'avons pas d'informations sur le sujet. Un amendement déposé à l'Assemblée nationale prévoit une enveloppe de 170 millions d'euros, sans que cela engage une position du Gouvernement.

M. Joël Baud-Grasset. - Le rapport d'information du 18 juin 2025 précité dressait un état du nombre de titres de taxe émis en 2024 - moins de 400 000 -, du montant des taxes d'aménagement liquidées la même année - soit un total de 1,6 milliard d'euros - et surtout des liquidations encore réalisées selon l'ancien dispositif, c'est-à-dire par les DDTM, puisque seulement 2,4 % des liquidations ont alors relevé de la DGFiP.

Certes, le rythme de la construction ralentit et le nombre des autorisations d'urbanisme décroît, mais nous constatons que l'ancien dispositif permettait toujours de mettre des moyens financiers à la disposition des collectivités locales et que les acteurs en présence ne percevaient pas la nécessité d'en changer immédiatement.

Je rappelle également à M. Touvenin que, si les pétitionnaires privés effectuent souvent de simples aménagements tels que des agrandissements ou la construction d'une véranda, ils construisent aussi des maisons, ce qui peut représenter des montants compris entre 4 000 et 5000 euros, et pouvant aller jusqu'à 10 000 euros.

L'informatique donne parfois lieu à des situations cocasses ; le mécanisme du click and collect ne marche parfois pas comme il faut. Le conseil d'administration de la FNCAUE évoquait ce matin même du cas d'une personne qui, dans le Maine-et-Loire, a été appelée au paiement de la taxe d'aménagement au terme des travaux qu'elle a fait réaliser pour l'installation d'un velux. J'espère que vous nous montrerez votre bonne volonté à faire en sorte que tout fonctionne bien et assez rapidement.

Nous espérons par ailleurs qu'un fonds de compensation et d'accompagnement, s'il est mis en oeuvre, sera bien fléché en direction des CAUE. Le risque existe en effet qu'il reste dans les caisses des départements, ce que je suis bien placé pour savoir en ma qualité de vice-président chargé des finances du conseil départemental de la Haute-Savoie. Des élus ne manquent certes pas de volonté politique, mais certains services peuvent aussi être tentés de conserver les crédits. Nous serons pour notre part vigilants et j'appelle les législateurs que vous êtes à faire de même au moment du fléchage de ces crédits, de telle sorte que nous passions le trou d'air actuel, dans l'attente de l'aboutissement d'une réflexion plus globale.

Nous gagnerons d'ailleurs à associer à ces réflexions les acteurs des ministères de la culture et de la transition écologique qui travaillent déjà sur les questions qui intéressent directement les CAUE, plutôt que ceux de Bercy, dont l'approche est plus distanciée et abstraite.

M. Laurent Lafon, président. - Merci de votre participation à cette table ronde.

Cette audition a fait l'objet d'une captation vidéo qui est disponible en ligne sur le site du Sénat.

La réunion est close à 17 h 45.

Mercredi 19 novembre 2025

- Présidence de M. Laurent Lafon, président -

La réunion est ouverte à 9 h 00.

Projet de loi de finances pour 2026 - Crédits relatifs à la Presse - Examen du rapport pour avis

M. Laurent Lafon, président. - Nous démarrons nos travaux par l'examen de l'avis préparé par Michel Laugier sur les crédits consacrés à la Presse au sein du Projet de loi de finances (PLF) pour 2026.

M. Michel Laugier, rapporteur pour avis sur les crédits relatifs à la presse. - Ce n'est malheureusement pas cette année que j'annoncerai le redressement des perspectives économiques de la presse. Certes, la baisse des ventes a été moins forte en 2024 que les années précédentes : avec 2,6 milliards d'exemplaires diffusés en 2024, la presse écrite a connu une baisse de 1,8 % au lieu de 4,5 % l'année dernière ; la diffusion de la presse quotidienne nationale et régionale diminue de « seulement » 0,7 %.

Les jeux Olympiques et Paralympiques et l'actualité politique chargée sont sans doute pour beaucoup dans ce « freinage » de la baisse des ventes. Le tournant du numérique s'accentue et permet aussi de consolider un peu le niveau de diffusion global : en 2024, les diffusions numériques représentaient 27 % du total, soit + 3 points en un an. Il reste que sur 20 ans, les recettes liées aux ventes ont diminué de près de moitié et celles liées à la publicité de plus des deux tiers. La transformation numérique n'est qu'une partie de la solution, car il y a ici un paradoxe bien connu. D'un côté, le papier se vend de moins en moins mais il reste rentable, il est vrai en partie grâce aux aides de l'État. De l'autre, le numérique est attractif mais peu rentable car personne ne veut payer cher un abonnement numérique. L'équilibre économique global de la presse, sans lequel sa liberté et son indépendance sont illusoires, est donc toujours aussi menacé.

Phénomène aggravant, nous vivons depuis quelque temps une crise de l'information journalistique, de plus en plus concurrencée par d'autres formes de communication hybrides qui mêlent de manière inextricable données réelles, expression de simples opinions et fausses informations.

L'année 2024 a vu une accélération de ce phénomène, avec notamment les conséquences de l'élection du nouveau président américain. L'effet est à la fois indirect, par la dégradation du statut de l'information, mais aussi direct, notamment pour l'Agence France Presse (AFP) qui a perdu de nombreux contrats, j'y reviendrai.

Du fait de cette situation économique difficile, les aides publiques à la presse revêtent une importance certaine pour préserver le pluralisme et la liberté d'expression auxquels nous sommes tous attachés. Comme je l'avais développé l'année dernière, ces aides de l'État se sont ajoutées les unes aux autres au fil du temps et sans plan d'ensemble. Elles sont opaques et complexes, et donc en partie inefficaces, raison pour laquelle une réforme d'ensemble serait nécessaire. L'évolution des crédits affectés à ces aides au sein du PLF 2026 ne s'avère pas des plus cohérentes.

On observe globalement une diminution de 5,8 %. Je n'aurais pas nécessairement d'objections de principe à une telle diminution si elle s'accompagnait, sinon d'une réforme globale, du moins d'une ventilation des différentes aides permettant à la presse de se transformer pour affronter les défis actuels. Or, ce n'est que très partiellement le cas. On peut certes porter au crédit du ministère un début de réforme de l'aide à la distribution au numéro.

Il s'agit ici de l'éternel dossier des messageries de presse, « France Messagerie » et les Messageries lyonnaises de presse (MLP). Je rappelle que France Messagerie est la seule à distribuer les quotidiens, et pour cela bénéficiait jusqu'à cette année de deux mécanismes d'aide : une aide d'État de 27 millions d'euros, dont 9 millions directement pour elle ; une péréquation en provenance des magazines, pour 7 millions d'euros en 2025, dont près de 5 millions prélevés sur les MLP.

France Messagerie a pu assurer sa rentabilité dans la période récente, moyennant les aides reçues. Toutefois, j'avais souligné l'année dernière que ses résultats financiers largement positifs ne pouvaient qu'interroger. De fait, les volumes d'aide au bénéfice de la presse quotidienne nationale (PQN) d'Information de politique générale (IPG) suscitent une certaine irritation dans le reste du secteur.

Une première réponse avait été apportée lors de l'examen du précédent PLF, puisque le Gouvernement avait supprimé par un amendement, la part de l'aide de 9 millions d'euros directement versée à France Messagerie. Cette diminution est confirmée pour 2026, ce qui me semble plutôt sain.

La réforme va même un peu plus loin. Je rappelle qu'un rapport des inspections générales des finances et des affaires culturelles avait permis d'élaborer plusieurs scénarios pour faire évoluer la distribution de la presse, en mettant en oeuvre une mutualisation poussée, notamment avec la presse quotidienne régionale (PQR). Une démarche de concertation avait ensuite été confiée à Sébastien Soriano, ex-président de l'Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse (Arcep). Interrompue à cause de la dissolution, elle a cependant débouché sur un projet de contrat de modernisation de la distribution de la presse, transmis aux acteurs de la filière le 1er août 2025. En contrepartie d'efforts de mutualisation au niveau de l'impression, du transport et des dépositaires, ce contrat prévoit un accompagnement par l'État à hauteur de 5 millions d'euros par an, sur trois ans, pour aider à réaliser les investissements nécessaires et pour compenser les conséquences sociales inévitables de la réforme. Toutefois, à ce stade, ce financement reste virtuel, le contrat n'ayant pas été signé du fait des réticences des deux premiers quotidiens nationaux. Parallèlement, l'aide à la distribution est enfin partiellement réformée : le périmètre des bénéficiaires est élargi et ne soutient plus seulement la PQN-IPG, mais également la PQN non-IPG, ainsi que les hebdomadaires nationaux IPG.

Ce nouveau dispositif, qui doit entrer en vigueur en 2026, fait l'objet d'échanges avec le secteur pour stabiliser ses paramètres. À cet égard, il est impératif que son calibrage et sa répartition soit fondé sur un calcul économique précis et non sur la volonté de respecter à tout prix le statu quo actuel des aides. L'enjeu est de dessiner une trajectoire de soutien durable à l'ensemble de la presse, non de figer les positions acquises ! Il faut maintenant que ce contrat soit signé.

C'est là que le bât blesse : le PLF prévoit en effet une baisse massive de l'une des « carottes » disponible pour y inciter, avec une amputation des crédits du Fonds stratégique pour le développement de la presse (FSDP). Ce fonds, qui attribue des aides sous conditions et semble plébiscité par les professionnels, avait vu 10 millions de ses crédits prévus pour 2025 « gelés » et avait finalement été suspendu. Non seulement il sera amputé de 20 % en 2026, mais il devrait subir un nouveau gel qui le réduira à peu de chose.

À moins que les crédits « gelés » de 2025 ne soient finalement dégelés en tout ou partie et reportés à 2026... Ce fonds constitue pourtant le seul outil transformatif dans les aides à la presse, permettant notamment d'aider directement les éditeurs à effectuer une transition vers le numérique, gros enjeux actuel, particulièrement pour la PQR et la presse magazine. C'est pourquoi je vous propose de rétablir cette aide au niveau du PLF 2025 par un amendement.

Je vais maintenant évoquer brièvement la question des radios associatives. Vous le savez, comme l'année dernière, le PLF proposait une baisse massive du Fonds de soutien à l'expression radiophonique locale (FSER). Cette baisse aurait été encore plus importante cette fois : de 16 millions d'euros, soit - 45 % par rapport à 2025.

Lors de son audition ici même, la ministre de la culture a cependant déclaré : « Je sais le rôle essentiel joué par les radios associatives : je ne doute pas que, comme l'année dernière, nous pourrons leur redonner des moyens et rétablir ces crédits. »

En conséquence, attendons que le Gouvernement dépose cet amendement de rétablissement des crédits du FSER lors de l'examen de la Mission devant le Sénat ; s'il ne le fait pas, je vous proposerai ultérieurement de déposer un tel amendement.

Je veux dire à présent dire un mot de l'AFP. Au cours des dernières années, l'Agence a su composer dans un environnement économique difficile et retrouver son équilibre économique, qui avait été sérieusement malmené. Elle a ainsi réalisé 16 millions d'euros d'économies sur son précédent Contrat d'objectifs et de moyens (COM) 2019-2023, et s'est engagée à un effort supplémentaire de 9 millions d'euros d'ici 2028. Son endettement, qui était de 50 millions d'euros en 2018, devait ainsi être nul en 2028. En dépit de ces très bon résultats, l'AFP est de nouveau confrontée à une situation très difficile pour deux raisons : d'abord, l'Agence a dû affronter en 2025 une conjonction politique défavorable au niveau international. En particulier, les décisions de l'administration Trump ont un impact important sur les recettes de l'Agence. Elles ont en effet conduit à la rupture brutale des contrats avec le Gouvernement américain et l'organisme public qui supervise plusieurs médias actifs à l'étranger (US Agency for Global Media). L'arrêt des financements à l'Agence des États-Unis pour le développement international (USAID) s'est également traduit par des désabonnements de nombreux clients financés par l'aide étrangère américaine partout dans le monde. Le contrat d'investigation numérique avec META en Amérique du Nord a été rompu, et à terme, l'ensemble du partenariat avec cette entreprise pourrait être concerné. L'AFP redoute enfin un effet de contagion de cette décision auprès de TikTok. Au total, ce sont plus de 16 millions d'euros de recettes qui sont entrain de partir en fumée ! Deuxième élément défavorable, des facteurs structurels fragilisent durablement l'Agence. Le chiffre d'affaires « médias » diminue, les ressources publicitaires et les marges financières se réduisent face aux plateformes et acteurs de l'intelligence artificielle (IA). La diversification des revenus, engagée depuis l'accord conclu par l'Agence avec Google sur les droits voisins et avec Mistral sur l'utilisation de l'IA, ne permet pas de compenser la chute des revenus, tandis que les négociations avec les autres acteurs du numérique s'avèrent plus difficiles que prévu. Malgré des mesures d'économies immédiates à hauteur de 2 millions d'euros au second semestre grâce à un pilotage très serré des coûts, l'exercice 2026 pourrait donc être déficitaire. Le Président-directeur général a donc annoncé en juin 2025 que l'AFP allait engager un programme d'économies de 12 à 14 millions d'euros sur 2025 et 2026, afin de pérenniser son redressement, honorer sa dette et continuer à investir.

Ainsi, l'Agence doit poursuivre les réformes nécessaires au maintien de sa rentabilité tout en préservant ce qui fait son ADN : une information à la qualité reconnue par tous, alimentée par un réseau mondial de journalistes. L'année 2026 sera cruciale à cet égard.

Pour finir, j'évoquerai la question des droits voisins et de l'IA. Le sujet de la rémunération des éditeurs pour les contenus utilisés par les plateformes numériques demeure une source de contentieux et d'incompréhensions. Alors qu'une première génération d'accords avait permis d'obtenir des compensations en 2021-2022, la négociation de nouveau accords s'avère particulièrement difficile après l'élection du Président Trump. La posture de négociation de départ des plateformes, Meta en particulier, consiste à dire que la valeur des contenus produits par les éditeurs est très faible, voire nulle. Plusieurs contentieux sont actuellement en cours ; nous suivrons avec attention leurs résultats.

J'en viens enfin à l'IA. Comme le disent les éditeurs de presse : « les moteurs de recherche nous ont dépouillé de nos revenus, les réseaux sociaux de nos lecteurs, maintenant l'IA nous dépouille de nos contenus ». Cette absorption des contenus se poursuit actuellement, faute d'une législation européenne et nationale suffisamment protectrice. Certains éditeurs intentent des actions en justice contre les grandes bases de données gratuites telles que Common Crawl, C4 ou Oscar, qui servent à l'entraînement des IA. Ces batailles juridiques sont coûteuses et aléatoires bien que souvent victorieuses. Au-delà, des avancées apparaissent nécessaires dans le calcul de la valeur des contenus, afin d'avancer vers une rémunération économiquement fondée des éditeurs. Il s'agit là d'un chantier essentiel pour l'avenir de la presse en général !

Sous le bénéfice de ces observations, je propose un avis favorable aux crédits de la presse pour l'année 2025.

Mme Monique de Marco. - Je remercie le rapporteur, qui a présenté un constat que je trouve alarmant et que nous partageons. Cette coupe est tout de même deux fois plus importante que celle qui avait été proposée dans le PLF 2025.

Pour commencer, je prendrai l'exemple des aides à la presse : il s'agit d'une coupe de 11 millions d'euros, contre 2 millions d'euros dans le PLF 2025. Pour les radios associatives, c'est une coupe de 16 millions d'euros, contre 10 millions d'euros dans le PLF précédent.

Je parlerai ensuite du soutien à l'AFP, qui est bien sûr conforme aux engagements de la France, mais néanmoins insuffisant au regard des graves difficultés de l'Agence. Certes, cette dotation budgétaire est conforme à la trajectoire prévue dans le COM conclu entre l'État et l'AFP pour la période 2024-2028. Mais malgré le respect de cette trajectoire, l'agence française alerte sur sa situation financière particulièrement dégradée. Elle anticipe une baisse de ses produits commerciaux de 8,4 millions d'euros en fin de gestion 2025 par rapport au budget initial. Cette situation est causée par les grands bouleversements politiques, économiques et technologiques de notre époque.

Les dépenses de personnel représentent tout de même les trois quarts des charges de l'AFP. Cette situation économique pourrait avoir de lourdes conséquences sociales pour les 2 400 employés de l'Agence, dont 1 700 journalistes. Je rappelle que l'AFP a une mission d'intérêt général. Celle-ci, en grande difficulté, pourrait voir son aura internationale diminuer. En ce moment crucial pour la presse et pour l'information, il serait bon d'aider l'AFP à passer ce cap difficile.

En ce qui concerne les aides à la presse, entre 2023 et 2026, elles seront passées de 197 millions à 177 millions d'euros, soit une baisse de plus de 10 %. Les aides à la presse semblent donc constituer une véritable variable d'ajustement des budgets d'austérité, alors que la presse écrite contribue de façon essentielle à la production d'informations fiables, de qualité, plurielles, libres et indépendantes. Pourtant, la crise du modèle de cette presse continue de s'aggraver, justifiant au contraire un renforcement du soutien de l'État que nous ne voyons pas venir.

J'en viens maintenant au troisième volet, celui des radios associatives locales, dont les crédits sont diminués de près de moitié. Il est vrai que, lors de son audition, Mme la ministre a indiqué qu'elle comptait, si j'ai bien compris, sur le Sénat pour combler cette coupe importante pour les radios associatives. Elle émettra peut-être un avis favorable, elle négociera peut-être avec Bercy ; chaque année, toutefois, nous nous retrouvons face à cette situation où il revient au Sénat de compenser cette perte financière pour pouvoir rétablir ces aides aux radios associatives, qui sont un acteur essentiel dans nos territoires. Au total, je partage tout à fait le constat, mais je ne comprends pas l'avis favorable sur les crédits du programme. J'ai même eu du mal à entendre les mots « avis favorable » sur ce budget, tant ils sont contraires au constat qui a été présenté. Nous n'allons pas suivre cet avis favorable. Nous avons espoir que quelques amendements que nous présenterons pourront être votés, mais cela ne nous satisfera pas complètement. Par conséquent, nous émettons un avis défavorable à l'avis favorable que vous venez de présenter !

M. Pierre-Antoine Levi. - Je souhaite en premier lieu saluer le travail de notre rapporteur Michel Laugier sur ces crédits de la presse, qui éclaire année après année les enjeux démocratiques du programme 180 « Presse et médias ».

Le PLF 2026 prévoit une dotation de 347 millions d'euros en crédits de paiement, soit une diminution - cela a été dit - de 22 millions d'euros par rapport à 2025, ce qui représente 6,1 % dans un contexte budgétaire contraint que nous connaissons tous. Malgré cette contrainte, ce budget représente un engagement substantiel de l'État en faveur du pluralisme médiatique et de la liberté de la presse.

Plusieurs éléments méritent d'être salués. L'AFP voit sa dotation augmenter de 4,2 millions d'euros pour atteindre 147 millions d'euros, conformément à la trajectoire du COM 2024-2028. Dans un monde où la désinformation progresse et où les guerres informationnelles se multiplient, l'AFP représente un rempart indispensable. Classée parmi les trois grandes agences mondiales, elle incarne l'excellence du journalisme français.

Les aides au pluralisme sont maintenues à 23 millions d'euros. Ces dispositifs constituent l'épine dorsale du pluralisme de la presse. Le maintien de l'aide au titre ultramarin à 2 millions d'euros et celui de l'aide au service de la presse tout en ligne à 4 millions d'euros témoignent d'une vision équilibrée qui n'oublie ni l'Outre-mer ni les médias numériques émergents. L'aide à la modernisation des diffuseurs de presse, préservée à 5 millions d'euros, est cruciale face à l'érosion du réseau de distribution. Le renforcement prévu pour les marchands de presse en zone rurale dans le cadre du plan « Culture et ruralité » répond à une urgence territoriale.

Après des années d'attente, la réforme de la distribution de la presse semble enfin sur le point de se concrétiser. Elle vise à garantir la continuité de la distribution sur l'ensemble du territoire, tout en assurant sa soutenabilité économique. La nouvelle aide à la distribution, dotée de 23 millions d'euros, compensera partiellement les coûts de distribution au numéro de la PQN. L'autorisation auprès de la Commission européenne est en cours pour une mise en oeuvre effective en 2026.

Notre soutien à ces crédits ne nous empêche pas d'exprimer une préoccupation majeure. Michel Laugier l'a rappelé : le FSER voit ses crédits chuter de 15,7 millions d'euros pour s'établir à environ 20 millions d'euros, soit une baisse de 45 %. Mes chers collègues, soyons clairs, cette réduction n'est pas acceptable. Cette coupe brutale menace directement les quelque 700 radios associatives qui dépendent de ce fonds pour environ 40 % de leurs ressources. Ces radios constituent des acteurs essentiels du lien social, particulièrement dans les quartiers prioritaires et en milieu rural. Elles contribuent à l'intégration, à la formation, au maintien des langues régionales et à l'expression des cultures minoritaires. Elles forment chaque année des centaines de jeunes aux métiers de la radio et participent au déploiement du DAB+. Plus de la moitié de ces radios pourraient disparaître dès 2026 et près de 80 % des emplois du secteur, soit environ 2 400 postes, seraient menacés. C'est tout un écosystème d'information locale, culturelle et citoyenne qui serait balayé. L'année dernière, la mobilisation du secteur et l'engagement de la ministre avaient permis d'éviter une coupe similaire. Une solution et une correction devront être trouvées lors de l'examen du texte en séance publique. Notre rapporteur y sera particulièrement attentif et portera cette exigence avec détermination. L'aide à l'exemplaire pour les titres postés diminue de 4,4 millions d'euros pour s'établir à 61 millions d'euros. La transition vers le portage doit rester progressive et tenir compte des réalités territoriales. Malgré ces points de vigilance, le groupe de l'Union centriste votera favorablement à ces crédits, car l'État maintient un engagement significatif pour les médias, piliers de notre démocratie, et parce que la réforme de la distribution se profile enfin.

M. Jérémy Bacchi. - Je voudrais à mon tour saluer le rapport de notre collègue Michel Laugier qui, comme chaque année, brosse un panorama avec beaucoup de justesse et une analyse forte intéressante.

Je vais essayer d'être quelque peu optimiste. Notre collègue Michel Laugier parlait d'une baisse du rythme du recul de la vente de la PQN et de la PQR, une baisse réelle. Des éléments ont été évoqués dans le rapport, que je partage. Il y a peut-être aussi, dans le pays - en tout cas, j'aime à le penser -, un besoin d'informations vérifiées, et un retour, y compris des plus jeunes générations, vers une PQN et PQR qui soit en capacité de répondre à leurs attentes, loin de tout ce qui a pu être évoqué, les réseaux sociaux ou autres, en matière d'information. Il nous faut arriver à soutenir une tendance qui pourrait être nouvelle de ce point de vue.

C'est extrêmement important, même si cela a été dit : l'attractivité du numérique est réelle. Pourtant le modèle économique est, pour le coup, beaucoup plus fragile. Il y a donc à réfléchir, à travailler sur la question du soutien à la presse, y compris sur cette transition vers le numérique, mais aussi sur la manière de le rendre économiquement rentable avec des publicités qui, peu ou prou, sont entre trois et quatre fois moindres que sur le format papier. C'est une réalité. Les 6 % de baisse des aides à la presse dans le budget de cette année ont aussi un impact important. Il ne faut pas le négliger dans le contexte international et national que nous connaissons : cette baisse est regrettable.

Les 27 millions d'euros de l'aide à la distribution de la vente au numéro se concentrent, selon moi, essentiellement sur les éditeurs et pas toujours sur la distribution. Nous savons bien que c'est pour la distribution que les surcoûts liés aux frais inhérents au transport sont le plus lourds. Nous ferons d'ailleurs des amendements en ce sens en séance. Il y a un vrai sujet sur la question de la distribution. Je sais, monsieur le rapporteur, que c'est un sujet sur lequel vous travaillez depuis de nombreux mois. Même si nous ne sommes pas nécessairement d'accord sur tout, nous sommes au moins d'accord sur l'idée qu'il faut ouvrir un chantier sur cette question, parce qu'il y a des choses qui dysfonctionnent clairement.

Je terminerai rapidement en évoquant la coupe budgétaire sur les radios. Comme mes collègues, je trouve cette situation extrêmement grave, y compris sur le plan symbolique. Au-delà de cette baisse de 45 %, 3 000 emplois sont directement menacés, des dizaines de rédactions risquent de disparaître, ainsi qu'une diversité de médias dans nos territoires qui constitue aussi un maillage essentiel à la vie de ces derniers. Par conséquent, comme certains de mes collègues, nous nous réserverons le droit, en séance, de voter ou non en fonction des amendements qui seront retenus. L'objectif est de pouvoir donner de la force à l'ensemble des amendements, y compris ceux proposés par notre rapporteur. Ensuite, nous aviserons en séance.

M. Pierre Ouzoulias. - Le cas de l'AFP est parfaitement symbolique de ce qui se passe. Les contenus de l'AFP sont pillés - c'est du vol - par les plateformes d'IA générative. Ils sont ensuite revendus auprès d'organes qui concurrencent directement l'AFP. Nous sommes donc dans une situation où c'est l'AFP qui finance sa propre mise en concurrence et sa quasi-disparition. Bien évidemment, cela n'est pas acceptable.

Nous avions envisagé une riposte mesurée. La première partie du plan nécessitait une négociation entre le ministère de la culture et les opérateurs ; elle a complètement échoué. Il faut maintenant passer à la phase 2 et donner les moyens juridiques aux producteurs de contenu de mieux se défendre par rapport aux plateformes. C'est un sujet vraiment essentiel.

M. Michel Laugier, rapporteur pour avis. - Effectivement, je n'ai pas parlé de la future loi issue des États généraux de l'information, qui est toujours au Conseil d'État : je n'ai pas d'information sur sa date de dépôt au Parlement.

Je suis d'accord avec vos réactions par rapport à certaines baisses. Mais précisément, concernant le FSDP, je vous propose de rétablir des crédits permettant d'accompagner les éditeurs et les professionnels de la presse dans leur transformation. Pour les radios, c'est la même chose. Je reste quand même relativement optimiste, puisque l'année dernière, nous avons connu exactement la même situation. Je vous rappelle que nous n'avions pas eu besoin de déposer un amendement, car c'est le Gouvernement lui-même qui en avait déposé un pour rétablir les crédits. La ministre s'est engagée une nouvelle fois... Nous connaissons très bien le poids et l'importance des radios locales. Nous savons très bien, de surcroît, à l'approche des élections municipales, l'intérêt que nous avons à les aider encore plus. C'est pourquoi je m'engage devant vous, si le Gouvernement ne le fait pas, à déposer au nom de la commission un amendement pour rétablir ces crédits.

Aujourd'hui, il est vrai que nous avons besoin d'une véritable politique de distribution. C'est pourquoi le rapport Soriano est important. C'est également pour cela que le FSDP va pouvoir aider à répondre à certains besoins, à condition que tout le monde puisse signer. Il est vrai que nous avons aussi toujours cette dualité entre la PQN et la PQR. Pour la PQR, il y a moins de difficultés, car elle s'organise seule, alors que nous devons passer par des messageries pour distribuer la PQN et les magazines. La situation évolue aujourd'hui plutôt dans le bon sens. La responsabilisation est beaucoup plus grande. D'autres paramètres sont à prendre en compte : le nombre de points de vente est également en baisse : nous en avons perdu 800. Nous constatons donc bien qu'il existe aujourd'hui d'importantes difficultés. Certains points de vente, notamment dans les villes et en région parisienne, vendent aussi du tabac. Or, aujourd'hui, beaucoup de ces commerces sont rachetés par des personnes qui abandonnent ensuite la vente de la presse.

Par ailleurs, l'IA est la nouvelle menace. Nous y sommes confrontés dès aujourd'hui. Il est vrai qu'il est aussi de notre ressort de légiférer, tant au plan national qu'au plan européen. C'est essentiel, car seuls, nous aurons beaucoup de difficultés.

La presse gardera toute sa place, à condition que nous lui en donnions toujours les moyens. C'est pourquoi les aides à la presse, même si l'on peut en améliorer la répartition, me semblent toujours indispensables.

M. Laurent Lafon, président. - Nous allons examiner l'amendement du rapporteur.

M. Michel Laugier, rapporteur pour avis. - Il s'agit de rétablir, au sein du programme 180 « Presse et médias », les crédits du FSDP au niveau du PLF 2025, en leur ajoutant 3,3 millions d'euros. Ces crédits supplémentaires sont gagés sur le programme 334 « Livre et industries culturelles » ; nous demanderons ensuite au Gouvernement de lever ce gage.

La commission adopte l'amendement du rapporteur à l'unanimité.

La commission émet un avis favorable à l'adoption des crédits du programme 180 « Presse et médias » de la mission « Médias, livre et industries culturelles » du projet de loi de finances pour 2026.

Projet de loi de finances pour 2026 - Crédits relatifs au sport - Examen du rapport pour avis

M. Laurent Lafon, président. - Mes chers collègues, nous poursuivons avec le rapport sur les crédits du sport, présenté par Jean-Jacques Lozach.

M. Jean-Jacques Lozach, rapporteur pour avis sur les crédits relatifs au sport. - La politique de l'État en faveur du sport est financée par deux programmes de la mission « Sport, jeunesse et vie associative » et par l'affectation à l'Agence nationale du sport (ANS) du produit de deux taxes. Toutes composantes confondues, ce budget s'élève à 849 millions d'euros en 2026, soit une baisse de 4,6 %. Cette présentation, parfois retenue par le Gouvernement, est toutefois trompeuse. En effet, d'une part, ce montant total inclut les crédits dédiés à la préparation des jeux Olympiques et Paralympiques d'hiver de 2030, qui prennent la suite de ceux de 2024 et viennent soutenir ce budget. D'autre part, le produit des taxes affectées est comptabilisé à son montant plafond, dont on sait déjà qu'il ne sera pas atteint, ce qui pose question en termes de sincérité budgétaire.

En ce qui concerne les crédits et les taxes affectées, le budget est véritablement en décalage avec les ambitions affichées. Les crédits du programme « Sport » baissent de 6,5 %, et même de 9 % hors dépenses de personnel. La baisse est encore plus forte en termes d'autorisations d'engagement (AE), du fait de l'arrêt du plan d'équipement « Génération 2024 ». Je reviendrai sur les mesures d'économie incluses dans ce budget, notamment la révision à la baisse de plusieurs dispositifs d'incitation à la pratique sportive des jeunes. Je regrette également une diminution de l'effectif des conseillers techniques sportifs de 26 équivalents temps plein, ce qui n'est pas négligeable.

Ce budget comporte peu de nouvelles mesures positives par rapport aux précédents. Il y figure néanmoins une légère augmentation de la dotation versée à l'Agence nationale du sport (ANS) pour le soutien à l'innovation et aux équipements de haut niveau, ainsi qu'une enveloppe pour le paiement des primes aux médaillés français des Jeux d'hiver de 2026 - les Jeux d'hiver de Milan-Cortina qui auront lieu dans quelques semaines.

Les crédits figurant dans la loi de finances initiale pour 2025 ont été affectés par des mesures de régulation. En effet, le décret du 25 avril 2025 a annulé 29 millions d'euros en AE et 24 millions d'euros en crédits de paiement (CP). Cette mesure s'est accompagnée d'un surgel complémentaire. Le projet de loi de finances de fin de gestion confirme l'annulation des crédits gelés, soit 142 millions d'euros en AE et 46 millions d'euros en CP au titre de l'exercice 2025.

S'agissant des deux taxes affectées à l'ANS, le plafond d'affectation que nous avions obtenu pour 2025 est reconduit, y compris les 80 millions d'euros supplémentaires votés au Sénat.

Des marges existent encore, puisque le plafond d'affectation du prélèvement sur les paris sportifs en ligne est fixé à 180 millions d'euros, alors que son rendement est estimé à 208 millions d'euros. Un déplafonnement total rapporterait donc 28 millions d'euros. Ce déplafonnement est d'autant plus nécessaire que le rendement de la taxe « Buffet » est, lui, très incertain du fait de l'évolution des droits audiovisuels sportifs - les droits TV du football - et de la création par LFP Media de sa propre chaîne. Je ne reviens pas sur les jeux Olympiques et Paralympiques (JOP) de 2024. Le programme qui leur était consacré est désormais clôturé. Nous devons néanmoins être attentifs à l'emploi du boni de liquidation du comité d'organisation (Cojop), d'un montant de 76 millions d'euros, qui fera l'objet d'un contrôle de la Cour des comptes l'an prochain. S'agissant des JOP de 2030, le programme monte en puissance pour amorcer le projet. Le budget total du Cojop est de 2,1 milliards d'euros, dont 26 % de recettes publiques provenant de l'État et des régions. Le Comité international olympique (CIO) contribue à hauteur de 30 %. Le reste du budget repose sur des partenariats à conclure et sur la billetterie. Traditionnellement, les Jeux d'hiver sont de moindre ampleur que les Jeux d'été, mais ils comportent une part supérieure de financement public. Le récent rapport de la Cour des comptes sur l'organisation des Jeux de 2024 doit nous inciter à la vigilance s'agissant des coûts pour le moment invisibles de ces Jeux, notamment en termes de sécurité ou de transport. Pour tenir le calendrier, l'adoption définitive du projet de loi olympique est désormais urgente. En effet, le CIO souhaitait un vote avant le 31 décembre ; il semblerait que la loi puisse être examinée à l'Assemblée nationale le 12 janvier prochain. Sur le fond, ce budget délaisse le « sport pour tous » dans un contexte de questionnement sur la gouvernance du budget du sport. Le plan « Génération 2024 » devait financer 5 000 équipements. Les objectifs quantitatifs ont été atteints, mais à un coût bien moindre que celui prévu au départ, de l'ordre de 160 millions d'euros au lieu des 300 millions d'euros promis. L'existence d'infrastructures sportives rénovées est un préalable indispensable au développement des pratiques, 75 % des équipements ayant plus de vingt ans. La demande est en augmentation : les 120 fédérations agréées par le ministère chargé des sports ont délivré 17,2 millions de licences annuelles en 2024, soit une augmentation notable de 3,8 % sur un an. Si la politique de mutualisation des équipements sportifs est utile - il s'agit là de l'application de la loi du 2 mars 2022 -, elle ne sera pas suffisante.

Une politique nationale de maillage du territoire en équipements structurants rénovés est absolument nécessaire. Les piscines constituent en particulier une réelle urgence ; nous le répétons depuis plusieurs années. L'enjeu n'est évidemment pas que sportif, mais aussi social et de santé publique.

Par ailleurs, deux politiques en faveur de la pratique des jeunes sont sacrifiées : d'une part, les deux heures supplémentaires de sport au collège seront désormais concentrées sur les zones REP et REP+ ; d'autre part, le Pass'Sport a été modifié dans deux directions. Son montant est passé de 50 à 70 euros par enfant, ce qui est plutôt une bonne nouvelle, car il était auparavant insuffisamment incitatif, surtout pour les familles nombreuses. Mais il est désormais réservé aux jeunes âgés de 14 à 17 ans, ce qui est en revanche une très mauvaise nouvelle ; plusieurs fédérations ont déjà constaté une diminution de la pratique des 6-13 ans à la suite de cette mesure. La Fédération française d'athlétisme indique par exemple que la diminution du nombre de licenciés est de 8 % sur les catégories des 6-13 ans. L'effet de ce recentrage est particulièrement préjudiciable dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville. La tranche d'âge des 6-13 ans est celle au cours de laquelle il faut ancrer la pratique sportive.

La fragilisation financière de l'ANS risque d'impacter en première ligne les projets sportifs fédéraux, au détriment des clubs, qui en subiront donc directement les conséquences. Ce qui est vraiment touché, c'est le sport du quotidien. L'État se désengage ainsi de plusieurs politiques sportives pour un bénéfice budgétaire immédiat, mais au prix d'un coût social et sanitaire mal maîtrisé. La grande cause nationale de l'année 2024 paraît bel et bien oubliée.

Je terminerai en évoquant les questionnements sur la gouvernance des crédits du sport. Vous le savez, de nombreuses collectivités locales sont en difficulté sur le plan financier et 49 % d'entre elles déclarent réduire leurs investissements en matière d'infrastructures sportives. C'est dans ce contexte que les concours de l'État sont réformés, avec notamment la fusion des trois dotations destinées à l'investissement - dont celle qui était réservée aux territoires ruraux - et la création du Fonds d'investissement pour les territoires (FIT). Or, une partie importante de ces dotations contribuait à soutenir le sport, à hauteur de 207 millions d'euros en 2024. La gestion déconcentrée de ces crédits rend toute planification difficile. Outre un possible effet délétère de cette réforme sur les communes rurales du fait de la disparition de la dotation d'équipement des territoires ruraux (DETR), les investissements sportifs doivent pouvoir rester traçables. Désormais, les équipements sportifs seront complètement noyés dans les financements de droit commun, sans fléchage spécifique.

L'incertitude est encore accrue par les annonces du Premier ministre concernant un futur grand acte de décentralisation qui concernerait notamment le champ du sport.

Enfin, l'avenir de l'ANS est questionné, comme nous l'avons constaté lorsque nous avons auditionné la ministre et les représentants du mouvement olympique et paralympique. Une mission d'évaluation doit rendre prochainement ses conclusions. La réussite de l'Agence n'est pas contestée s'agissant du sport de haut niveau, puisque la France a terminé cinquième en ce qui concerne le nombre de médailles aux JOP 2024. Toutefois, la complexité du déploiement territorial des procédures et l'insuffisance des moyens remettent en cause la capacité de l'ANS à mener une politique ambitieuse de développement de la pratique sportive. L'ANS a été créée pour fédérer des financements de divers horizons ; la mission d'évaluation devra déterminer s'il existe des marges de manoeuvre dans ce domaine ou si, à défaut, la gestion des crédits doit être recentrée au niveau de l'État.

Ces nombreux reculs et ces incertitudes persistantes me conduisent à vous proposer un avis défavorable au budget des sports, comme l'an dernier.

M. Laurent Lafon, président. - J'ouvre le débat. La parole est à Claude Kern.

M. Claude Kern. - Je remercie Jean-Jacques Lozach pour son analyse du budget du sport. Comme il l'a annoncé, ce budget est en très forte diminution. Clairement, le compte n'y est pas.

Concernant l'ANS, cinq ans après sa création, son fonctionnement mérite d'être questionné. L'ANS manque de lisibilité, ses conférences régionales sont quasi invisibles et un rapport sénatorial propose même sa suppression. Nous devons donc envisager de refonder l'ANS, de simplifier l'action publique et de soutenir réellement les collectivités qui financent déjà l'essentiel du sport dans ce pays. Les responsabilités de l'ANS dans la répartition des financements publics restent à préciser.

S'agissant du financement des équipements sportifs, pendant que l'État se désengage, les budgets locaux s'effritent, les collectivités sont essorées et les besoins explosent. Certes, le plan « 5 000 équipements » est annoncé comme étant un succès, mais sans garantie durable pour moderniser et rénover les infrastructures, nous laisserons tomber des millions de pratiquants. Apporter les garanties nécessaires aux collectivités territoriales en termes de soutien à cette rénovation et à la modernisation des équipements sportifs, ainsi qu'à la mise en oeuvre d'un engagement sportif dynamique, sont autant d'enjeux essentiels à la pratique du « sport pour tous ».

Que dire des décisions récentes ? Une diminution de 60 % pour le « sport pour tous », une réduction des deux heures supplémentaires de sport au collège, l'exclusion des 6-13 ans du Pass'Sport... Comment prétendre démocratiser le sport après les Jeux de Paris, tout en réduisant ainsi les moyens qui permettent d'en ouvrir l'accès ? Loin d'être des ajustements, ces mesures sont des reculs préoccupants - des reculs sociaux, sanitaires et éducatifs. C'est un véritable coup dur pour l'avenir du sport et pour la cohésion sociale dans notre pays. Nous faisons des économies de façade, qui ont un impact délétère massif. Il est donc temps de remettre de la cohésion et de la justice dans notre politique sportive. La stratégie nationale sport-santé a pourtant été lancée, mais que de paradoxes pour la rendre effective !

Une évidence s'impose : les paris sportifs, qui génèrent des profits colossaux, doivent contribuer davantage. C'est aujourd'hui une urgence pour l'avenir du sport et de notre cohésion sociale. La lutte contre le piratage doit permettre aussi d'augmenter les crédits du sport sans affaiblir d'autres secteurs.

Il est nécessaire de procéder à une réorientation de la taxe « Buffet » et de la taxe sur les paris sportifs. Faute d'un tel signal, le groupe Union centriste rendra un avis défavorable, comme le rapporteur.

M. David Ros. - Je remercie le rapporteur parce qu'il a disséqué ce budget de manière très précise. C'est important, car la réalité est assez éloignée de ce qui est affiché par le gouvernement.

Je ne reviendrai pas sur tout ce qui a été dit, y compris par notre collègue Claude Kern, dont je partage les analyses. Je voudrais néanmoins insister sur l'action 1, dont le titre est « la promotion du sport pour le plus grand nombre », ce qui est extrêmement ambitieux. Comme l'a très bien dit le rapporteur, c'est là que l'on constate les baisses les plus significatives en pourcentage, à la fois pour l'ANS, qui a un certain nombre de conventions à gérer avec les fédérations, pour l'enveloppe du Pass'Sport et, globalement, pour tout ce qui peut aider à la pratique du plus grand nombre - je n'évoque même pas le sport universitaire.

Or, nous avons auditionné à la fois la ministre et les présidentes des comités nationaux olympiques et sportifs, dont l'ancienne ministre Amélie Oudéa-Castera, qui sait a priori de quoi elle parle. Elle a mis en avant une volonté d'avoir un grand programme de développement des pratiques sportives au niveau des collectivités locales et notamment des communes. Le salon des maires a lieu cette semaine. Quand on voit les situations financières des communes - cela a été dit, notamment vis-à-vis des équipements, et je ne parle pas que des piscines - ou les difficultés du monde associatif, et que l'on regarde ce budget, on se demande si n'est pas un voeu pieux.

La question que l'on peut se poser est la suivante : les acteurs sportifs sont très motivés, très dynamiques. Je me demande s'ils ne pâtissent pas quelque peu de ce dynamisme dans la mesure où ce budget est relativement faible au regard des budgets de la Nation : c'est à chaque fois aux politiques sportives que l'on demande les efforts les plus conséquents. Si l'on veut éviter que la promotion du sport pour tous ne soit la promotion du sport devant la télévision, il faut, évidemment, réagir très fortement.

Le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain suivra donc l'avis défavorable du rapporteur.

M. Jérémy Bacchi. - Merci, monsieur le rapporteur.

Depuis la fin des JOP 2024, le budget du sport ne cesse d'être rogné. Le programme 219 accuse une baisse de 18 % en AE et de 6,5 % en CP. Le Gouvernement continue de vanter l'héritage des JOP, mais, dans nos territoires, les piscines ferment, les gymnases se dégradent et les clubs amateurs manquent de tout. Les communes, principales financeuses - cela a été dit - des équipements sportifs, subissent quant à elles l'austérité et les coupes budgétaires.

L'Association nationale des élus en charge du sport (Andes) a eu les mots justes : c'est un « très mauvais signal ». Le gel des crédits dédiés aux équipements sportifs ne fait qu'aggraver la situation. Pourtant, le développement du sport en France mérite mieux que ces économies de bout de chandelle. Ce n'est pas une dépense, c'est un investissement rentable et essentiel. Une étude du cabinet Pluricité et du Centre de droit et d'économie du sport, mise en avant par l'Observatoire national de l'activité physique et de la sédentarité, démontre que chaque euro investi dans le sport génère au moins 1,73 euro d'économie publique, en santé notamment, en prévention et en cohésion sociale.

Comment comprendre qu'après l'élan des JOP, on détricote la seule politique publique qui avait permis à des milliers d'enfants de découvrir le sport ? Comment justifier qu'en 2026, dans la France de l'héritage olympique, les 6-13 ans soient exclus du Pass'Sport ?

Pour l'ensemble de ces raisons, nous suivrons l'avis du rapporteur et nous voterons contre ces crédits.

M. Stéphane Piednoir. - J'interviens au nom de notre collègue Michel Savin et je tiens à féliciter le rapporteur dont nous partageons les inquiétudes récurrentes.

Il y a eu l'affichage, puis il y a eu les gels et surgels de 2025, qui ont amoindri le budget du sport. Nous sommes en fait très loin de l'ambition affichée d'une nation sportive consacrant au minimum 1 % de son PIB au développement du sport.

Le pays sait se mobiliser pour les grandes manifestations sportives qui se déroulent sur son sol. Je songe, pour les plus anciens, à la Coupe du monde de 1998 ou, plus récemment, aux JOP 2024, où les résultats sportifs sont au rendez-vous lorsque nous savons nous mobiliser sur notre terrain. En réalité, nous ne devenons pas une nation sportive, en ce sens qu'il n'y a pas de culture sportive dès le plus jeune âge. Or, cette culture sportive commence évidemment par le commencement, c'est-à-dire lorsque les enfants sont amenés à utiliser les équipements sportifs locaux.

Cela rejoint ce qui a été dit précédemment par mes excellents collègues, notamment David Ros, qui a d'ailleurs présenté à l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques (Opecst) un rapport sur les sciences et le sport, que je vous invite à lire de très près. Pour en revenir à ces équipements vieillissants, nous avons des plans d'équipement et une absence de crédits pour le renouvellement des infrastructures qui sont inquiétants, alors que nos équipements ont, pour les trois quarts d'entre eux, plus de vingt ans. Nous songeons évidemment aux piscines, mais il faut aussi penser aux gymnases, qui sont dans un état de vétusté parfois vraiment avancé.

Par conséquent, sans être trop long, au nom de mon groupe, nous suivrons l'avis défavorable du rapporteur concernant l'adoption des crédits du programme consacré au sport.

Mme Mathilde Ollivier. - Je commencerai par un point global sur la mission « Sport, jeunesse et vie associative ». Notre collègue Éric Jeansannetas, rapporteur spécial de la commission des finances, indique qu'en pourcentage, cette mission est celle qui contribue le plus au redressement des comptes publics. C'est symptomatique de l'importance portée à ces différents programmes par le Gouvernement. Nous devons défendre ces politiques, qui sont très présentes dans la vie des citoyennes et des citoyens. Les Français s'engagent avant tout sur ces sujets. C'est donc un symbole bien triste pour toutes les personnes engagées dans le sport et dans la vie associative que de voir le manque de soutien du Gouvernement sur ces thématiques.

Plus spécifiquement, sur les programmes relatifs au sport, la baisse est très importante. Nous partageons tous ce constat. C'est avant tout l'action 1, celle du sport pour toutes et tous, qui subit cette baisse : moins 50 % sur l'action 1 relative à la promotion du sport pour le plus grand nombre. On pourrait s'arrêter là, car c'est déjà symptomatique de ce qui est visé : la pratique du sport du quotidien, du sport populaire. Finalement, c'est la nation sportive que nous appelons de nos voeux qui est aujourd'hui sacrifiée, tandis que les budgets pour le sport de haut niveau, pour l'organisation des JOP 2030 sont, eux, préservés.

Plus en détail, sur le Pass'Sport, le rapporteur l'a dit, les fédérations et les clubs alertent sur les risques importants induits par sa suppression pour les 6-13 ans. C'est l'âge critique pour ancrer la pratique du sport dans nos jeunes générations, qui en ont absolument besoin, notamment d'un point de vue sanitaire, comme il vient de le mentionner avant moi. Ce n'est pas seulement une question sportive, c'est aussi une question sanitaire, alors que la pratique sportive et la santé des jeunes sont aujourd'hui préoccupantes. La sédentarité des plus jeunes est alarmante, et c'est par ce type de mesures que l'on peut vraiment lutter contre ce phénomène.

Sur l'extinction du plan « Génération 2024 », Monsieur le rapporteur, la ministre a indiqué avoir atteint l'objectif de 5 000 équipements.

Toutefois, je note que 157 millions d'euros sur les 300 millions d'euros qui avaient été budgétisés ont été effectivement dépensés. Pouvez-vous revenir sur ce point ? Si tel est le cas, cela signifie que seuls 50 % de l'objectif du plan « Génération 2024 » ont été atteints et que nous avons finalement assisté à une réduction importante des objectifs de ce plan. Nous partageons tous les autres constats qui ont été faits par le rapporteur, sur les recettes et sur les autres aspects de la mission. Nous suivons donc l'avis défavorable du rapporteur.

M. Bernard Fialaire. - Je voudrais également remercier Jean-Jacques Lozach pour cette démonstration. Je dois dire que je comprends mal ce grand domaine où l'on mélange l'activité physique et le sport. On nous parle du sport à l'école, qui relève de l'éducation nationale, et de l'activité physique, qui relève de la santé publique. Quant au sport professionnel, il relève plutôt de l'économie comme le montre sa financiarisation croissante. Nous avons besoin de clarté.

Il en va de même pour les équipements sportifs. Nous avons énormément d'équipements sportifs scolaires qui ne sont pas utilisés, alors que nous manquons d'installations par ailleurs. Des réorganisations sont nécessaires.

Le sport est un bon vecteur de sensibilisation à l'activité physique. Je reviens sur l'interpellation que j'avais adressée à Amélie Oudéa-Castéra sur le sport universitaire, qui concerne une tranche d'âge très sensible aux troubles psychiques, aux fragilités et au mal-être. Le sport - je dis bien le sport -, de façon encadrée, avec des relations sociales, permettrait peut-être d'apporter une réponse.

Pour toutes ces raisons, le groupe RDSE votera comme à son habitude. Pour ma part, je m'abstiens pour manifester mon incompréhension totale à ce sujet.

M. Jean-Jacques Lozach, rapporteur pour avis. - Je vais essayer d'apporter quelques lumières et de répondre globalement aux interpellations et aux observations de mes collègues.

S'agissant de l'ANS, il est vrai que l'ambition de départ était tout à fait légitime : mettre autour de la table tous les acteurs directement concernés, que ce soit l'État, les collectivités locales, le mouvement sportif et le monde économique, c'est-à-dire les entreprises privées. Ce que nous craignions au départ s'est effectivement confirmé. Cette crainte avait d'ailleurs justifié l'avis défavorable du Conseil d'État - je vous le rappelle - à la création de l'agence sous la forme d'un GIP. Le monde économique, le monde des entreprises, a brillé par son absence, notamment en ce qui concerne la déclinaison territoriale de l'ANS, ce qui fait d'ailleurs qu'aujourd'hui des conférences régionales du sport et des conférences des financeurs distinctes ne sont même plus obligatoires sur les territoires. Il s'agit donc d'un échec, en ce qui concerne la contribution du secteur privé au financement du sport, car c'est bien ce qui avait été recherché.

Quant aux secteurs qui sont délaissés, les chiffres parlent d'eux-mêmes : la ligne budgétaire « promotion du sport pour le plus grand nombre » subit une baisse de 25 %. Le fossé se creuse donc en quelque sorte entre la préoccupation du développement des pratiques et, d'autre part, celle du développement de la haute performance dans notre pays.

Le plus déstabilisant, c'est d'abord l'instabilité ministérielle. Avec quatre ministres des sports en deux ans, il est difficile de fixer un cap pour une politique sportive ambitieuse. C'est surtout, depuis toutes ces dernières années, le lancement à grand renfort de communication de tout un ensemble de programmes nationaux qui, au bout de trois, quatre ou cinq ans, disparaissent ou sont dénaturés, vidés de leur contenu. Le Pass'sport en est un exemple caricatural, avec une économie de 40 millions d'euros. Le même phénomène est observé pour les trente minutes d'activité physique quotidienne dans le primaire, les deux heures de sport supplémentaires dans les collèges, etc.

Je n'ai pas encore évoqué les maisons sport-santé. L'intention était louable mais beaucoup de maisons sport-santé n'ont pas trouvé leur modèle économique et sont portées à bout de bras - jusqu'à quand ? - soit par les agences régionales de santé, soit par des collectivités, soit par les maisons de santé pluriprofessionnelles que nous avons sur les territoires. Elles sont considérablement fragilisées.

En ce qui concerne la lutte antidopage, symbole de notre vision éthique de la pratique sportive, nous atteignons vraiment un plancher. On nous a dit et répété depuis plusieurs années que si nous descendions sous les 10 000 contrôles par an, la politique française, souvent citée comme modèle sur le plan européen, perdrait fortement son crédit. Or, nous risquons d'arriver à ce seuil des 10 000 prélèvements par an. Il serait donc dramatique de descendre au-dessous et, bien évidemment, nous suivrons cela avec vigilance l'an prochain.

En termes d'équipements, les chiffres que vous avez donnés sont exacts : environ 160 millions d'euros dépensés au lieu de 300 millions d'euros. Là aussi, la réalité montre qu'il y avait des besoins énormes à satisfaire, puisque, s'agissant du montage des dossiers, alors que tout cela devait être étalé sur trois ans, cela l'a été sur deux ans. C'est donc bien qu'il y avait des attentes diversifiées. Bien souvent, les plans « 5 000 équipements sportifs » et « Génération 2024 » ont permis la construction de City stades. Mais pas seulement. Il y a notamment une discipline qui a vraiment bénéficié de ces programmes : le judo, qui s'est emparé des instruments mis à sa disposition, pour créer des dojos au pied des immeubles, c'est-à-dire aller vers les jeunes, notamment dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville. Malheureusement, toutefois, le coup d'arrêt est brutal.

Les équipements constituent l'angle mort de ce budget. Une enveloppe de 10 millions d'euros seulement est budgétée pour le haut niveau et l'innovation. Or, aujourd'hui, avec 10 millions d'euros, on ne finance même pas un centre aquatique digne de ce nom. La zone d'ombre de ce budget du sport pour l'année 2026 est donc véritablement la problématique des équipements sportifs.

M. Laurent Lafon, président. - Nous allons mettre aux voix l'avis du rapporteur, que je remercie.

La commission émet un avis défavorable à l'adoption des crédits relatifs au Sport de la mission « Sport, jeunesse et vie associative » du projet de loi de finances pour 2026.

Projet de loi de finances pour 2026 - Crédits relatifs à la jeunesse et à la vie associative - Examen du rapport pour avis

M. Laurent Lafon, président. - Nous examinons à présent les crédits relatifs à la jeunesse et à la vie associative.

M. Yan Chantrel, rapporteur pour avis sur les crédits relatifs à la jeunesse et à la vie associative. - Le programme 163 ne dispose plus que de 600,6 millions d'euros dans le projet de loi de finances (PLF) pour 2026, soit une baisse conséquente de 221,5 millions d'euros par rapport à l'année précédente. C'est plus d'un quart des crédits votés en 2025 qui a disparu, alors que les besoins ne cessent de croître.

Cette baisse ne s'explique que partiellement par la suppression du service national universel, puisque seuls 65,9 millions d'euros y ont été consacrés en 2025. Si je me réjouis de la mise à l'arrêt de ce dispositif contesté, je regrette que ces crédits n'aient pas été, au moins en partie, reventilés entre les autres actions du programme pour 2026. Au contraire, le Gouvernement a fait le choix assumé de resserrer encore l'étau budgétaire autour des politiques publiques destinées à la jeunesse.

Le budget consacré au développement du service civique accuse ainsi une baisse de près de 20 %. Une telle contraction impose de ramener la cible annuelle à 110 000 volontaires en 2026, soit 25 000 jeunes de moins qu'en 2025 - une année déjà marquée par une révision à la baisse de l'objectif initial de 150 000 volontaires - et 40 000 de moins qu'en 2023 et 2024.

Cet affaiblissement du dispositif est d'autant plus regrettable qu'il risque de frapper d'abord les publics les plus éloignés. Le service civique demeure en effet plébiscité : l'Agence du service civique (ASC) enregistre trois fois plus de candidatures que de missions disponibles. Réduire encore le nombre de missions reviendrait à accroître mécaniquement la sélectivité au détriment des jeunes les moins diplômés. Les premiers chiffres le confirment déjà : en 2025, la part des volontaires titulaires d'un diplôme du supérieur atteint 34 %, contre 31 % en 2024.

Au-delà des jeunes eux-mêmes, la baisse des crédits fait peser une double menace : d'une part, un affaiblissement profond du tissu associatif, qui dépend largement de l'engagement des volontaires - à titre d'exemple, l'association Unis-Cité a déjà engagé un plan de sauvegarde de l'emploi d'une ampleur inédite en 2025 - ; d'autre part, une dégradation tangible du service rendu aux usagers dans plusieurs services publics. Les annulations de crédits de 2025 ont ainsi privé le ministère de l'Éducation nationale de plus de la moitié de ses volontaires.

Je regrette ce coup d'arrêt infligé à un dispositif d'engagement, de citoyenneté et de mixité sociale reconnu, qui a largement fait ses preuves.

Le soutien au mentorat diminue également : la dotation prévue pour 2026 s'élève à 24,5 millions d'euros, soit 4,5 millions d'euros de moins qu'en 2025. Pourtant, le plan « 1 jeune, 1 mentor » est en plein développement. Le nombre de jeunes accompagnés est passé de 72 000 en 2021 à 112 000 en 2022, puis à plus de 135 000 pour les années 2023 et 2024. En 2025, le plan a poursuivi sa montée en puissance avec l'ouverture d'un nouvel appel à projets permettant à 67 nouvelles associations de rejoindre la dynamique.

Ce coup de rabot brutal va indéniablement fragiliser le développement du dispositif. Cet affaiblissement est d'autant plus regrettable que le mentorat s'adresse très majoritairement à un public en situation de fragilité, issu de milieux moins favorisés ou, confronté à des difficultés d'insertion. Ainsi, le nombre de jeunes issus de lycées professionnels a progressé de 47 % par rapport à 2023, tandis que le nombre de jeunes accompagnés par l'aide sociale à l'enfance a augmenté de 39 % sur la même période. Les premiers résultats sont donc très prometteurs.

Un rapport de l'Institut national de la jeunesse et de l'éducation populaire (Injep), publié en juin dernier, souligne l'impact positif du mentorat ressenti par les jeunes les plus fragiles, l'effet particulièrement fort chez les collégiens et lycéens issus de milieux modestes, et le rôle structurant que peuvent jouer les mentors dans les moments clés du parcours des jeunes.

La diminution inattendue des crédits consacrés au plan dans le PLF 2026 interroge. Cette coupe budgétaire apparaît d'autant plus malvenue que près d'un jeune actif de 15 à 24 ans sur cinq est au chômage et risque le décrochage. Dans ce contexte, le mentorat, qui cible spécifiquement les publics les plus fragiles, a plus que jamais un rôle à jouer. Il doit être soutenu et doit poursuivre sa montée en puissance.

J'aimerais également évoquer avec vous la situation des colonies de vacances. La mise en place des « colos apprenantes » à partir de l'été 2020 avait significativement contribué à atténuer la baisse historique d'activité des accueils collectifs de mineurs avec hébergement. En effet, plus de 400 000 mineurs sont partis en « colos apprenantes » depuis leur création. Or ce dispositif, qui avait pourtant été pérennisé l'année dernière, est brutalement supprimé au sein du PLF 2026. Cette suppression est d'autant plus paradoxale que le secteur n'a toujours pas retrouvé son niveau d'avant-crise. De fait, 1,34 million de mineurs sont partis en colonie de vacances en 2023-2024, soit quasiment 100 000 de moins qu'avant la pandémie, en 2018-2019.

Alors que 57 % des familles qui ne partent pas en vacances évoquent le coût comme principal frein au départ, la suppression sèche de ce dispositif risque de fragiliser encore davantage le secteur à très court terme.

Certes, le « Pass colo » est, lui, préservé. Toutefois, le dispositif est encore méconnu et ne concerne que les familles ayant un enfant de 11 ans et dont le quotient familial est compris entre 0 et 1 500 euros. Il doit permettre à 32 000 enfants de partir en 2026, un nombre bien en deçà des 88 000 mineurs ayant bénéficié des « colos apprenantes » l'année dernière.

En 2024, 38 % des 5-19 ans ne sont pas partis en vacances, soit environ 4,8 millions d'enfants. Il est plus que jamais urgent de mettre en oeuvre un plan d'action sur le temps long pour sensibiliser davantage les familles et les enfants à l'intérêt des colonies de vacances et redynamiser durablement le secteur.

Je terminerai en évoquant la situation du monde associatif. Le secteur est au bord de la rupture : 30 % des associations employeuses déclarent avoir moins de trois mois de trésorerie, dont 5 % ont moins d'un mois d'exploitation en réserve. Si l'on considère ces chiffres, ce sont près de 90 000 emplois associatifs qui sont directement menacés à court terme, faute de trésorerie.

Les associations font également face à une érosion continue du financement public, qui constitue pourtant leur principale source de revenus. Près d'une association employeuse sur deux déclare avoir vu ses financements publics diminuer en 2025. Pour une association sur cinq, cette baisse a même été supérieure à 20 %.

Plus inquiétant encore, près de 40 % des structures associatives déclarent également devoir réduire leur masse salariale en 2025. Plusieurs associations d'importance, comme le Secours catholique, ont annoncé pour la première fois en 2025 la mise en oeuvre de plans sociaux. Cette situation n'est pas tenable.

Pour la première fois, le 11 octobre dernier, les associations, à l'appel du Mouvement associatif, ont manifesté sur l'ensemble du territoire pour alerter sur la situation du secteur. Or, force est de constater que le PLF 2026 n'apporte aucune solution en la matière. Les crédits sont certes préservés dans ce programme, mais cette stagnation budgétaire s'inscrit dans un contexte de hausse continue de la demande sociale et des charges qui pèsent sur le secteur.

À ce titre, je m'interroge sur la stagnation des crédits en faveur du développement de Guid'Asso. Le réseau fait l'unanimité auprès des acteurs de terrain, mais il faut lui donner les moyens de poursuivre sa montée en charge en 2026.

L'appel à l'aide des associations employeuses n'a pas non plus été entendu, puisque les financements de postes supplémentaires du Fonds de coopération de la jeunesse et de l'éducation populaire (Fonjep) instaurés dans le cadre du plan de relance se sont achevés en 2026. Le nombre de postes soutenus par le dispositif en 2025 devrait donc s'établir aux alentours de 7 000, retrouvant le niveau d'avant la crise sanitaire, mais bien en deçà des besoins actuels du secteur. Par ailleurs, le montant de la subvention Fonjep n'a pas évolué depuis 2011 et s'établit toujours à 7 164 euros annuels par poste, ce qui représente entre 10 % et 15 % du coût global d'un poste salarié. Dans un rapport publié en 2016, la Cour des comptes estimait déjà que le faible montant du poste ne permettait pas d'avoir un véritable effet de levier pour d'autres cofinancements. Il est plus que jamais temps de revaloriser cette subvention annuelle, comme cela a été fait pour les postes relevant du ministère de l'Europe et des affaires étrangères en 2023, afin d'aider les associations employeuses à surmonter la crise du secteur.

Enfin, je ne peux que déplorer également la stagnation des montants octroyés au Fonds pour le développement de la vie associative (FDVA), malgré la hausse du nombre des demandes. En 2025, près de 33 965 associations ont effectué une demande de subvention au titre du FDVA 2 ; parmi elles, seulement 22 063 ont été financées. Ainsi, plus d'une association demandeuse sur trois n'a pas été soutenue.

Le montant moyen des subventions octroyées est également en baisse : il s'est élevé à 2 409 euros en 2020 et 2 340 euros en 2024, contre 2 000 euros en 2025. Augmenter les montants accordés au FDVA, par exemple par la revalorisation de la quote-part des sommes acquises à l'État affectée au dispositif, constituerait un acte fort pour soutenir les associations, notamment les plus fragiles d'entre elles, et répondre à l'appel lancé par le monde associatif le 11 octobre dernier.

Pour toutes ces raisons, je propose de donner un avis défavorable aux crédits du programme 163 pour 2026.

Mme Béatrice Gosselin. - Le budget du programme 163 consacré à la jeunesse et à la vie associative s'inscrit dans un contexte de forte tension budgétaire. Cependant, nous regrettons sincèrement le manque de redéploiement interne. En effet, bien que certains dispositifs aient été abandonnés ou fortement réduits, à l'instar du Service national universel (SNU), aucune réallocation significative n'a été opérée pour renforcer les actions qui fonctionnent réellement auprès de notre jeunesse.

Ainsi, l'ASC voit sa dotation diminuer de 115 millions d'euros : cela représente 40 000 missions de moins pour l'année 2026. Or, le service civique permet aux établissements publics et aux associations qui y ont recours de bénéficier de l'aide précieuse des volontaires, essentielle dans les territoires ruraux. Cet aspect est souvent oublié.

Je regrette aussi la baisse des crédits consacrés au mentorat. Le dispositif fait ses preuves auprès des jeunes en difficulté, et obtient de très bons résultats en matière de mixité sociale. Or, là encore, les budgets diminuent de 4,5 millions d'euros. Pourtant, le mentorat accompagne des jeunes qui sont souvent dans une situation sociale ou scolaire fragile ; son efficacité est reconnue. En réduire les moyens, c'est affaiblir un outil ciblé, qui agit précisément là où les institutions classiques atteignent leurs limites.

Je souhaite également attirer l'attention sur les « colos apprenantes », dont le budget s'élevait à 36,8 millions d'euros en 2025. L'année dernière, 88 000 jeunes ont pu en bénéficier, dont 37 % de primo-partants. Ces enfants qui ne partaient pas en vacances ont eu pour la première fois l'opportunité de le faire, mais ne le pourront désormais plus, car ce dispositif est abandonné. Cela représente un nombre d'enfants considérable qui, autrement, n'aurait pas quitté leur environnement familier sans les « colos apprenantes ». Or, on fait une croix dessus. Je trouve cela dommage.

Enfin, le monde associatif, qui assure une grande partie de l'éducation populaire et participe activement à la cohésion sociale, demeure fragilisé. Les associations doivent simultanément absorber la hausse des coûts, l'augmentation de la TVA sur certains biens et services et, pour certaines, la réintroduction de la taxe d'apprentissage.

Par ailleurs, les dotations des collectivités sont également en baisse. Les petites associations ne vont pas tenir le choc. Si elles n'ont ni les moyens ni l'ingénierie nécessaires, nous allons devoir faire face à la disparition de nombre d'entre elles. De nombreux emplois vont aussi disparaître. Pourtant, la vie associative est indispensable pour renforcer la cohésion sociale et faire vivre nos territoires.

Il est donc essentiel, à l'avenir, de cibler les priorités et consolider les dispositifs qui ont fait leurs preuves et qui fonctionnent, comme le service civique, le mentorat, les « colos apprenantes » et l'éducation populaire. Par conséquent, nous regrettons sérieusement que les 65 millions d'euros de crédits issus de la suppression du SNU ne soient pas redistribués en faveur de ces différents dispositifs.

Le groupe Les Républicains ne votera pas ce budget en l'état.

Mme Colombe Brossel. - Je partage en tous points ce qui vient d'être dit. Lorsqu'il y a des convergences de vues sur l'inefficacité des dispositifs supprimés, et sur des choix budgétaires qui consistent à rayer d'un trait de plume des lignes entières, sans aucune considération pour celles et ceux qui en bénéficient, c'est généralement le moment de s'interroger sur l'utilité des politiques publiques et sur les moyens d'atteindre les objectifs fixés.

En effet, nous pouvions faire autrement. Il eût été possible de s'interroger sur l'efficacité du SNU avant de devoir le faire uniquement pour des raisons budgétaires. Là aussi, les travaux des parlementaires et les travaux d'évaluation ne manquaient pas. Je regrette à titre personnel que l'évaluation des politiques publiques dans notre pays soit finalement réduite à une simple évaluation budgétaire. Je ne vais pas pour autant pleurer la fin du SNU. Nous avons souvent dit combien il nous semblait possible de mener d'autres politiques plus intéressantes en faveur de la jeunesse et de l'engagement. De là, toutefois, à rayer ce dispositif d'un trait de plume sans se poser la question de la manière dont ces fonds auraient pu être réalloués sur d'autres dispositifs bien plus utiles...

Il est vraiment fascinant de voir que les trois dispositifs les plus pénalisés par les choix budgétaires qui nous sont proposés, à savoir les « colos apprenantes » - qui, de toute façon, disparaissent, la ligne budgétaire étant supprimée -, le service civique et le mentorat, sont des dispositifs d'accompagnement d'enfants, d'adolescents et de jeunes adultes présents en zone urbaine, en quartier prioritaire de la politique de la ville, en territoire rural et en zone périurbaine. Le développement du mentorat dans les Outre-mer, par exemple, est aussi un choix fort de l'administration. Le collectif Mentorat et les associations s'en étaient saisis rapidement.

Or, je n'arrive pas à comprendre la logique qui peut pousser à affaiblir des dispositifs dont l'efficacité est reconnue sur l'ensemble du territoire. Il n'est pas si simple, en matière d'engagement des jeunes, de parvenir à cette mécanique fine qui permet de mailler tout le territoire et de permettre à tous les jeunes de s'engager, quels que soient leur lieu d'habitation, leur origine sociale, leur parcours de vie ou leur parcours d'études. Quel regret ! Pour étayer ce regret et essayer d'avancer dans le dialogue avec Mme la ministre et avec Bercy, nous voterons évidemment comme le suggère notre rapporteur.

M. Claude Kern. - La chute de 26 % des crédits du programme « Jeunesse et vie associative » traduit un manque d'ambition et est particulièrement préoccupante. Il est difficile de ne pas questionner les choix qui ont conduit à cibler ces secteurs déjà fragilisés.

Les associations continuent de survivre dans un système à bout de souffle qui réclame urgemment une refonte profonde. Il faut sortir de la logique d'appel à projets pour enfin instaurer des subventions pluriannuelles stables et prévisibles. Quant aux jeunes, ils paient le prix fort de décisions qui semblent déconnectées de la réalité. Les coupes massives dans le service civique, la disparition des colonies de vacances apprenantes et d'autres dispositifs sont autant de signaux qui dessinent un désengagement préoccupant, alors que la santé mentale des jeunes, pourtant grande cause nationale 2025, continue de se dégrader dangereusement.

Plusieurs questions demeurent. Qu'en est-il des crédits consacrés au feu SNU ? Qu'en est-il de la proposition de relever de 40 % à 60 % la quote-part versée au FDVA sur les sommes acquises à l'État au titre des comptes bancaires inactifs et des contrats d'assurance-vie en déshérence, mesure utile à la fois à la formation des bénévoles et à l'ensemble des territoires ? Qu'en est-il de l'augmentation de la dotation socle du FDVA ? Qu'en est-il du Fonjep, qui n'a pas été revalorisé depuis près de vingt ans ?

En l'état actuel et dans l'attente d'un soutien renforcé au service civique, le groupe Union centriste suivra l'avis du rapporteur, à savoir un avis défavorable.

M. Ahmed Laouedj. - Faire un budget, c'est faire des choix. Pour cette mission « Jeunesse et vie associative », le Gouvernement fait le choix de l'austérité, au détriment de celles et ceux qui font encore tenir debout notre cohésion sociale. La chute de 26 % du programme 163 est particulièrement alarmante : suppression du SNU, réduction de plus de 100 millions d'euros pour le service civique, extinction des « colos apprenantes ».

Dans nos territoires, où les associations portent à bout de bras la solidarité, l'éducation populaire et l'accompagnement des jeunes, ces coupes auront un effet dévastateur. Beaucoup de structures dépendent déjà de financements annuels fragiles, subissent l'inflation sur leur loyer et sur l'énergie, et voient leurs capacités d'action se restreindre. La baisse du nombre de missions de service civique de 150 000 - chiffre stabilisé depuis 2016 - à 110 000 en 2026 va encore réduire les opportunités d'engagement pour une jeunesse qui en manque cruellement. Dans mon département, cet engagement constitue souvent un premier tremplin vers l'emploi ou la formation.

Cette mission « Jeunesse et vie associative » révèle un choix politique que nous ne pouvons cautionner : celui d'un désengagement massif de l'État, là où les besoins sont les plus criants. La baisse drastique des crédits de paiement traduit une réalité simple : les acteurs de terrain auront moins de moyens, alors que la jeunesse est fragilisée et que les associations sont à bout de souffle. En Seine-Saint-Denis, territoire jeune, populaire et pourtant riche d'initiatives et d'énergie, cette contraction budgétaire aura des conséquences directes : des projets annulés, des portes qui se ferment, des opportunités manquées pour celles et ceux qui devraient être au coeur de nos priorités.

Pour toutes ces raisons et faute d'un rééquilibrage sérieux, je ne peux que souligner l'écart grandissant entre l'ambition affichée et les moyens réellement consacrés à la jeunesse et à la vie associative. Notre responsabilité collective est de bâtir un budget qui accompagne, qui protège et qui émancipe. L'avenir d'un pays se mesure d'abord à ce qu'il investit dans sa jeunesse. Je continuerai donc à défendre avec constance des politiques publiques à la hauteur de ces impératifs républicains. Le groupe RDSE suivra l'avis du rapporteur et émettra un avis défavorable.

Mme Mathilde Ollivier. - Couper dans le budget des associations, c'est couper dans le dernier filet de solidarité qui porte les personnes les plus pauvres de notre pays. En 2025, 15,4 % de la population française vit sous le seuil de pauvreté - chiffre le plus haut jamais enregistré depuis le début du décompte en 1996. Nous nous retrouvons donc dans une situation alarmante pour les associations, avec, d'une part, une baisse des crédits et, d'autre part, une hausse très forte des besoins qui aurait nécessité des investissements et des engagements supplémentaires pour soutenir le tissu associatif.

Je souhaite revenir sur deux points qui ont été évoqués.

Le premier a été pointé par le rapporteur : il s'agit de l'augmentation de la part des jeunes diplômés de l'enseignement supérieur parmi les participants au service civique. C'est un constat également fait par les associations sur le terrain, qui indiquent que le niveau d'engagement, à la fois par les dons et dans le bénévolat, est assez inégalitaire, avec une surreprésentation des catégories socioprofessionnelles supérieures. L'élargissement du service civique permet aussi d'ancrer l'engagement associatif de manière large dans la société, en favorisant la diversité des profils qui s'engagent. Par conséquent, le réduire, c'est encore augmenter ces inégalités.

S'agissant des « colos apprenantes », l'extinction de ce dispositif est un très mauvais signal. Le faire disparaître, c'est faire disparaître un outil d'émancipation important pour la jeunesse de notre pays. Cette extinction est donc quelque peu incompréhensible. Pour de nombreux jeunes, ces colonies représentent l'un des seuls moments d'ouverture et d'émancipation sur le monde. Toutefois, le nombre de départs connait une baisse importante dans notre pays ces dernières années. C'est pourtant un outil de cohésion sociale et de rencontre de jeunes de différents horizons. Il est donc très problématique de constater la disparition de ce dispositif, et nous serons sans doute nombreux à apporter des amendements pour le rétablir.

Nous suivons l'avis défavorable du rapporteur.

Mme Evelyne Corbière Naminzo. - Les crédits du programme 163 souffrent d'une baisse drastique, en partie imputable à la suppression du SNU, mais pas seulement.

Les actions consacrées au développement de la vie associative et celles en faveur de la jeunesse et de l'éducation populaire connaissent également une baisse de crédits importante, de l'ordre de 13 % et de 23 % respectivement. Au sein de l'action 1, l'enveloppe allouée au compte d'engagement citoyen reste stable à 2,8 millions d'euros, mais sans prise en compte de l'inflation. Nous y voyons un signal négatif. La baisse de ces crédits en euros constants pourra donc avoir pour conséquence de réduire la couverture des droits à formation mobilisés par les bénéficiaires du compte d'engagement citoyen. Le budget du FDVA reste quant à lui stable à hauteur de 33 millions d'euros.

Concernant l'action 2, les crédits consacrés au Fonjep restent stables en euros constants. La baisse des crédits de cette action est imputable à l'extinction du dispositif des « colos apprenantes » et à la baisse de la dotation versée au mentorat. Ces deux baisses sont pour nous un signal très inquiétant ; cela a été dit et nous partageons ces constats. Près de 1,2 million d'enfants et d'adolescents partent en colonie de vacances, un chiffre en déclin à cause de l'augmentation des coûts des séjours et de la diminution des soutiens publics. Nous sommes inquiets de l'extinction de ce dispositif, alors qu'il permettait à de nombreux enfants de bénéficier d'un séjour de vacances.

L'Observatoire des vacances et des loisirs des enfants et des jeunes signalait que 38 % des enfants ne partent pas en vacances chaque année. Ce chiffre varie selon les milieux sociaux : 73 % des enfants de familles à hauts revenus peuvent partir en vacances chaque année ; en revanche, dans les foyers à bas revenus, seuls 56 % des enfants partent. Nous avons donc déposé un amendement pour reconduire ce dispositif. Nous serons vigilants quant à la suite des débats qui auront lieu dans l'hémicycle.

Concernant les crédits alloués au développement du service civique, ils sont également en baisse de 19 % pour l'année 2026. Le service civique est un dispositif qui a fait ses preuves. Cette politique favorise l'insertion des jeunes à travers leur engagement. Cette baisse de crédits aura donc un impact fortement négatif sur le nombre de contrats qui seront signés et sur le monde associatif de manière générale, puisque le service civique constitue un soutien très clair à l'activité associative.

Nous soutiendrons l'avis défavorable du rapporteur et ne voterons pas ces crédits.

M. Yan Chantrel, rapporteur pour avis. - Je constate que le diagnostic est partagé. Nous mettons en place des dispositifs qui ont besoin de temps pour être connus. C'est le cas des « colos apprenantes », qui se sont fortement développées depuis leur mise en place en 2020. Or, alors qu'elles sont désormais connues et font leurs preuves, nous les supprimons. Nous comprenons qu'il s'agit de choix purement budgétaires, mais il est regrettable qu'un dispositif qui fonctionne et qui a une utilité sociale au quotidien sur nos territoires soit supprimé de manière si brutale.

La commission émet un avis défavorable à l'adoption des crédits relatifs à la jeunesse et à la vie associative de la mission « Sport, jeunesse et vie associative » du projet de loi de finances pour 2026.

La réunion est close à 10 h 50.