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Vous pouvez également consulter le compte rendu intégral de cette séance.


Table des matières



Questions d'actualité

Relations diplomatiques avec le Maroc et l'Algérie

M. Hervé Marseille

Mme Élisabeth Borne, Première ministre

Assises des finances publiques (I)

Mme Cathy Apourceau-Poly

M. Gabriel Attal, ministre délégué chargé des comptes publics

Pénurie de contrôleurs aériens en Guadeloupe

M. Dominique Théophile

M. Jean-François Carenco, ministre délégué chargé des outre-mer

Assises des finances publiques (II)

M. Vincent Éblé

M. Christophe Béchu, ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires

Agression à Bordeaux et état de la psychiatrie

Mme Nathalie Delattre

M. François Braun, ministre de la santé et de la prévention

Décarbonation de l'aérien

M. Daniel Salmon

M. Christophe Béchu, ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires

Assises des finances publiques (III)

M. Emmanuel Capus

M. Gabriel Attal, ministre délégué chargé des comptes publics

Loi de programmation des finances publiques

M. Gérard Longuet

M. Gabriel Attal, ministre délégué chargé des comptes publics

Corps électoral en Nouvelle-Calédonie

M. Pierre Frogier

Mme Élisabeth Borne, Première ministre

Naufrage d'un navire de migrants au large de la Grèce

M. Jean-Pierre Sueur

Mme Chrysoula Zacharopoulou, secrétaire d'État chargée du développement, de la francophonie et des partenariats internationaux

Accord Union européenne - Mercosur

M. Jean-François Rapin

Mme Chrysoula Zacharopoulou, secrétaire d'État chargée du développement, de la francophonie et des partenariats internationaux

Mortalité infantile en France

Mme Jocelyne Guidez

M. François Braun, ministre de la santé et de la prévention

Recrutement des sapeurs-pompiers volontaires

M. Jean Bacci

Mme Sonia Backès, secrétaire d'État chargée de la citoyenneté

Financement du système de santé

Mme Michelle Meunier

M. François Braun, ministre de la santé et de la prévention

Installation illicite des gens du voyage

Mme Elsa Schalck

M. Jean-François Carenco, ministre délégué chargé des outre-mer

Protection du patrimoine résidentiel

Mme Sabine Drexler

M. Christophe Béchu, ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires

Rappel au Règlement

Nominations à d'éventuelles CMP

Salut à une délégation parlementaire internationale

Transport transmanche

Discussion générale

M. Hervé Berville, secrétaire d'État chargé de la mer

Mme Catherine Procaccia, rapporteur de la commission des affaires sociales

Mme Nadège Havet, rapporteure pour avis de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable

Mme Mélanie Vogel

M. Bernard Buis

M. Jean-Luc Fichet

Mme Cathy Apourceau-Poly

M. Jean-Marie Vanlerenberghe

M. Christian Bilhac

Mme Agnès Canayer

Mme Colette Mélot

M. Jean-Michel Houllegatte

M. Didier Mandelli

M. Pascal Allizard

Discussion des articles

ARTICLE 1er

Mme Céline Brulin

M. Michel Canévet

ARTICLE 1er BIS (Supprimé)

ARTICLE 1er TER (Supprimé)

ARTICLE 3 (Supprimé)

ARTICLE 4 (Supprimé)

INTITULÉ DE LA PROPOSITION DE LOI

Interventions sur l'ensemble

M. Jacques Fernique

Mme Céline Brulin

M. Jean-Luc Fichet

M. Bernard Buis

Mme Colette Mélot

M. Pascal Allizard

M. Jean-Marie Vanlerenberghe

Mme Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales

Industrie verte (Procédure accélérée - Suite)

Discussion des articles (Suite)

ARTICLE 2 (Suite)

ARTICLE 2 BIS

APRÈS L'ARTICLE 2 BIS

ARTICLE 3

APRÈS L'ARTICLE 3

AVANT L'ARTICLE 4 A

ARTICLE 4 A

APRÈS L'ARTICLE 4 A

ARTICLE 4

APRÈS L'ARTICLE 4

AVANT L'ARTICLE 5

ARTICLE 5

Mme Cécile Cukierman

APRÈS L'ARTICLE 5

APRÈS L'ARTICLE 5 TER

ARTICLE 6

ARTICLE 6 BIS

ARTICLE 7

APRÈS L'ARTICLE 7

Ordre du jour du jeudi 22 juin 2023




SÉANCE

du mercredi 21 juin 2023

102e séance de la session ordinaire 2022-2023

Présidence de M. Gérard Larcher

Secrétaires : Mme Jacqueline Eustache-Brinio, M. Loïc Hervé.

La séance est ouverte à 15 heures.

Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu analytique, est adopté sous les réserves d'usage.

Questions d'actualité

M. le président.  - L'ordre du jour appelle les questions d'actualité au Gouvernement.

Je vous rappelle que notre séance est retransmise en direct sur Public Sénat et sur notre site internet.

Chacun sera attentif au respect des uns et des autres et du temps de parole.

Relations diplomatiques avec le Maroc et l'Algérie

M. Hervé Marseille .  - (Applaudissements sur les travées du groupe UC et sur plusieurs travées des groupes INDEP et Les Républicains) Je souhaite vous parler de notre relation avec les pays du Maghreb, notamment avec le Maroc.

M. Roger Karoutchi.  - Très bien !

M. Hervé Marseille.  - En déplacement au Maroc avec le président Cambon et des membres du groupe d'amitié, nous avons pu mesurer l'état de dégradation de cette relation. Nous ne sommes pas reçus au Parlement ou dans les ministères, mais dans des lieux privés.

Depuis deux ans, le Maroc, pays historiquement ami, où nous avons beaucoup d'intérêts, a des difficultés dans sa relation avec la France.

Nous avons consenti de gros efforts en direction de l'Algérie : le Président de la République s'y est rendu, puis la Première ministre, avec une importante délégation. Nos renoncements n'ont guère été récompensés, si j'en crois le rétablissement d'un couplet peu amical envers la France dans l'hymne national algérien.

Le Président de la République a reçu hier Mme Meloni. Or, entre la France, l'Italie, le Maroc et l'Algérie, il y a l'Union pour la Méditerranée (UPM), depuis longtemps en rade.

Il est indispensable, pour affirmer la place de la France en Méditerranée, d'engager un dialogue utile sur la question migratoire, de relancer l'UPM et de renouer une relation de confiance avec nos amis marocains. (Marques d'impatience à gauche) Quelles initiatives prendrez-vous en ce sens ? (Applaudissements sur les travées des groupes UC, INDEP et Les Républicains)

Mme Élisabeth Borne, Première ministre .  - La France a une relation riche, une histoire partagée et des liens humains étroits avec le Maroc et l'Algérie. Une histoire d'une telle intensité n'est jamais dépassionnée. Nous voulons approfondir nos liens dans le respect mutuel. (Mines dubitatives sur plusieurs travées du groupe Les Républicains)

Avec l'Algérie, nous continuons à travailler dans l'esprit de la déclaration d'Alger. J'ai moi-même présidé à Alger un comité intergouvernemental de haut niveau. Il y a des obstacles, mais aussi une volonté commune des présidents Macron et Tebboune : regarder vers l'avenir et construire au bénéfice de nos deux peuples. Dans le domaine migratoire, le dialogue est exigeant, en particulier sur la réadmission des ressortissants algériens en situation irrégulière. (« Et le Maroc ? » sur plusieurs travées)

Avec le Maroc, nos liens humains, économiques et culturels sont très forts : 46 000 étudiants marocains en France, 46 000 élèves dans les établissements français au Maroc, plus de 1 000 filiales d'entreprises françaises. Mme Colonna s'y est rendue en décembre pour une visite constructive. Nous souhaitons approfondir ce partenariat d'exception.

Notre relation avec l'Algérie, le Maroc et la Tunisie s'inscrit plus largement dans notre politique pour la Méditerranée. La France est à l'origine de l'Union pour la Méditerranée.

M. Roger Karoutchi.  - C'était il y a quinze ans...

Mme Élisabeth Borne, Première ministre.  - Elle continuera à prendre des initiatives fortes pour resserrer nos liens et relever nos défis communs, notamment en matière d'environnement. (M. Alain Richard applaudit.)

M. David Assouline.  - Bref, vous n'avez rien à dire !

M. Antoine Lefèvre.  - Ce n'est pas gagné...

Assises des finances publiques (I)

Mme Cathy Apourceau-Poly .  - (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE et sur quelques travées du groupe SER) Les Assises des finances publiques sont un nouveau rendez-vous manqué pour les collectivités territoriales. Association des maires de France, Assemblée des départements de France et Régions de France ont refusé d'y participer, à raison ! Vous leur demandez, pour désendetter la France, de réduire leurs dépenses de fonctionnement de 0,5 %, alors que leurs finances sont très fragiles et que les exécutifs locaux n'ont jamais eu tant de mal à boucler leur budget.

Suppression de la taxe d'habitation et de la CVAE à coup de 49.3, augmentation non compensée du point d'indice des fonctionnaires territoriaux : ces décisions affectent le service rendu à la population et le principe même de libre administration des collectivités territoriales.

Vous êtes incapables de travailler avec les collectivités, de dialoguer avec les élus. Vous leur demandez d'agir pour la transition écologique, mais en dépensant moins que l'inflation... À quand un réel pacte financier entre l'État et les collectivités territoriales pour garantir les services publics et prendre en compte les réalités locales ? (Applaudissements à gauche)

M. Gabriel Attal, ministre délégué chargé des comptes publics .  - C'est le ministre des comptes publics qui vous répond, mais aussi l'élu local, conseiller municipal depuis dix ans. (Exclamations ironiques à gauche)

Mme Céline Brulin.  - C'est de la schizophrénie !

M. Gabriel Attal, ministre délégué.  - Je suis convaincu qu'on ne peut pas opposer l'État et les collectivités locales. (M. Michel Dagbert applaudit.) Ils ont besoin l'un de l'autre pour investir et relever le grand défi de la transition écologique. Nous devons avancer ensemble, y compris pour maîtriser nos dépenses publiques. La hausse des taux d'intérêt impacte tout le monde.

L'année dernière, nous avions présenté un programme de stabilité et une loi de programmation des finances publiques qui prévoyaient un effort plus important pour les collectivités territoriales que pour l'État.

M. Jean-François Husson.  - Un échec !

M. Gabriel Attal, ministre délégué.  - Nous vous avons entendus : la nouvelle copie prévoit une baisse de 0,5 % des dépenses de fonctionnement pour les collectivités territoriales, contre 0,8 % pour l'État.

M. Pascal Savoldelli.  - Dans quels ministères ?

M. Gabriel Attal, ministre délégué.  - Nous avons reçu les associations d'élus à plusieurs reprises, au niveau ministériel. Nous continuons à avancer avec elles, avec l'investissement au service de la transition écologique pour objectif et la concertation pour méthode. (Applaudissements sur les travées du RDPI)

Pénurie de contrôleurs aériens en Guadeloupe

M. Dominique Théophile .  - (Applaudissements sur les travées du RDPI) La Guadeloupe s'apprête à affronter une hausse du trafic aérien avec les vacances estivales. Une aubaine, après deux années de crise covid - mais la pénurie de contrôleurs aériens oblige à fermer l'aéroport Pôle Caraïbes du 23 au 25 juin, après une première fermeture en février.

Cet aéroport, essentiel pour la continuité territoriale, ne dispose que de 19 agents opérationnels sur 24, quand il en faudrait 31 pour assurer un fonctionnement normal. Vols reportés, passagers non acheminés, évacuations sanitaires parfois annulées : la situation est urgente, mais les réponses ne sont pas au rendez-vous. Nous ne pouvons attendre 18 mois pour former de nouveaux contrôleurs. Il faudrait envisager des transferts d'agents depuis Fort-de-France ou une mutualisation des effectifs avec la Martinique. Aussi, pour éviter des perturbations plus graves, le Gouvernement pourrait-il mettre en place des mesures d'urgence ? (Applaudissements sur les travées du RDPI)

M. Jean-François Carenco, ministre délégué chargé des outre-mer .  - En effet, la situation de sous-effectif du service de la navigation aérienne Antilles-Guyane a conduit à fermer les services de contrôle aérien toutes les nuits et en matinée quand l'effectif n'est pas suffisant.

Le directeur compétent a engagé un dialogue social pour garantir un maintien du service et des conditions d'exercice satisfaisantes pour les contrôleurs. Le transport d'urgence et sanitaire est garanti par le Dragon 971, qui intervient 24 heures sur 24 : pas de danger pour la sécurité civile. Il est prévu un nouveau tour de service avec une offre élargie sur la plage 6 heures 45-23 heures, à effectifs constants. Par ailleurs, sept contrôleurs sont en formation sur place, et six autres devraient arriver d'ici la rentrée. Le ministère des transports parle de fidélisation et d'optimisation de la formation. La situation devrait s'améliorer d'ici quelques semaines. (Applaudissements sur quelques travées du RDPI)

Assises des finances publiques (II)

M. Vincent Éblé .  - (Applaudissements sur les travées du groupe SER) J'associe Rachid Temal à ma question. La Première ministre a avoué, lundi, que le Gouvernement n'avait pas assez associé les collectivités territoriales sur la question du point d'indice. Vous leur imposez en effet de revoir leur copie, deux mois après le vote de leur budget. C'est d'autant plus irritant que le coût annoncé a doublé entre le matin et l'après-midi !

M. André Reichardt.  - Très bien !

M. Vincent Éblé.  - Suppression de la taxe d'habitation, contrats de Cahors, loi de programmation imposant 13 milliards d'euros d'économie, augmentation du point d'indice dès 2022, plans Eau ou Vélo annoncés unilatéralement, dont il faut assumer la mise en oeuvre - la liste est longue !

Incapable de contenir le déficit public, le Gouvernement demande aux collectivités de participer à un plan d'économie de 10 milliards d'euros, sachant qu'il ne fera pas sa part. Tandis que le ministre Béchu s'inquiète de la frilosité à investir, le ministre Le Maire propose l'auto-assurance des recettes, qui va freiner l'investissement local...

Alors qu'il faudrait envisager de recréer un lien fiscal entre industrie et territoire, vous élevez un totem à la baisse des impôts avec des campagnes populistes comme #BalanceTonMaire ou « En avoir pour mes impôts », qui remettent en cause le consentement même à l'impôt. Comment comptez-vous répondre à l'exigence de justice pour les territoires ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER)

M. le président.  - C'est M. Béchu, et non M. Attal, qui vous répond. (Exclamations à gauche)

M. Rachid Temal.  - Lui aussi est élu local ! (Sourires à gauche)

M. Christophe Béchu, ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires .  - La question du rapport entre l'État et les collectivités territoriales n'est pas nouvelle. Le totem de la baisse des dotations, porté par les gouvernements que vous avez soutenus entre 2012 et 2017, avait eu bien d'autres conséquences... (Applaudissements sur plusieurs travées du RDPI, des groupes UC, INDEP, et Les Républicains)

M. Jean-François Husson.  - M. Attal avait voté pour !

M. Christophe Béchu, ministre.  - Sur la hausse du point d'indice, un dispositif est habituellement proposé par l'État, qui détermine la valeur du point pour toutes les fonctions publiques ; il y a des consultations en coulisses avec les collectivités, qui s'opposent rarement à une revalorisation, puis demandent une compensation budgétaire. Mais j'imagine que vous ne contestez pas le bien-fondé de cette augmentation de 1,5 %, dans le contexte actuel d'inflation ?

M. Rachid Temal.  - Un peu de sérieux !

M. Christophe Béchu, ministre.  - Puisque derrière l'artifice de votre présentation, il y a la question du dialogue entre l'État et les collectivités, je peux vous dire que ce rendez-vous approche, dans le cadre de la planification écologique. Comment donner aux collectivités les moyens d'accélérer sur l'atténuation et l'adaptation, quel partage des responsabilités et des contraintes ? Vous serez évidemment associés à ces réflexions.

Mme Laurence Rossignol.  - Ce n'était pas la question !

M. Vincent Éblé.  - Les collectivités territoriales ne veulent plus de transfert de compétences sans concertation ni compensation. Elles attendent un soutien de l'État pour affronter les difficultés : moins de condescendance, plus de respect et de considération ! (Applaudissements sur les travées du groupe SER)

Agression à Bordeaux et état de la psychiatrie

Mme Nathalie Delattre .  - (Applaudissements sur les travées du RDSE) Insupportable, c'est le mot pour qualifier l'ignoble attaque subie à Bordeaux par cette grand-mère et sa petite-fille, auxquelles j'adresse mes pensées. Je remercie les forces de l'ordre pour l'interpellation rapide de l'agresseur.

« Se faire agresser, ça arrive à tout le monde » : voilà la réponse sidérante d'une adjointe au maire de Bordeaux, banalisant l'explosion de l'insécurité dans notre ville.

Je pourrais questionner le ministre de l'intérieur sur l'affectation d'une unité de CRS à demeure à Bordeaux, ou le garde des sceaux sur la suspension récente des incarcérations au centre pénitentiaire de Gradignan, en raison de la surpopulation carcérale, laissant des individus dangereux sur la voie publique. Les problèmes psychiatriques, souvent couplés à des addictions, sont trop souvent sous-estimés.

Monsieur le ministre de la santé, je me tourne vers vous. Avec Jean Sol et Philippe Bas, j'avais été à l'initiative d'une mission sur l'expertise psychiatrique en matière pénale. Notre société est de plus en plus menacée par la sous-estimation des problèmes psychiatriques dont attestent des faits divers quotidiens. Il faut une politique ambitieuse et financée pour la psychiatrie, en faire une grande cause nationale. Combien de drames faudra-t-il pour vous en convaincre ? (Applaudissements sur les travées du RDSE et sur plusieurs travées des groupes UC, INDEP et Les Républicains ; M. Bernard Jomier applaudit également.)

M. François Braun, ministre de la santé et de la prévention .  - J'exprime ma solidarité et celle du Gouvernement envers les victimes de cette odieuse agression. Nous travaillons de concert avec MM. Darmanin et Dupond-Moretti, car le problème est global. Nous devons mobiliser tous les outils pour identifier et traiter les problèmes psychiatriques.

La psychiatrie souffre, à la suite de décennies de gestion comptable aveugle. Dès 2018, nous avons lancé une feuille de route, renforcée en 2021 avec les premières Assises de la santé mentale et de la psychiatrie.

Les réponses s'inscrivent dans le temps long. Développement de la prévention, avec 43 000 secouristes en santé mentale, développement des compétences psychosociales à l'école, numéro de prévention du suicide, dispositif de vigilance, prise en charge de 130 000 patients grâce à MonParcoursPsy, maisons des adolescents - une par département... tout cela n'est certes pas suffisant, mais soyez assurée de ma détermination pour trouver des solutions, avec les professionnels et les parlementaires. (M. François Patriat applaudit.)

Décarbonation de l'aérien

M. Daniel Salmon .  - (Applaudissements sur les travées du GEST) Le Bourget sera-t-il le salon de l'illusion, de l'avion magique ? Depuis lundi, la filière aéronautique et le Président de la République annoncent un avion vert pour demain ou après-demain. Bien entendu, la recherche d'alternatives au kérosène est nécessaire. Le bât blesse dans le message qui est véhiculé : ne changeons pas nos habitudes, la technologie va tout régler ! Point de sobriété dans le discours, on parle de doublement du trafic d'ici 2040.

Une voix à droite.  - Très bien !

M. Daniel Salmon.  - Mais l'avion électrique n'est pas pour demain, l'avion à hydrogène n'est pas disponible, et il faudra choisir entre les usages de la biomasse : biocarburants, chauffage, alimentation ? C'est un bon greenwashing, qui n'a pour but que de remettre à demain les décisions que nous devons prendre aujourd'hui ; c'est-à-dire réduire les trajets en avion, et surtout faire payer au transport aérien la pollution qu'il engendre. (Applaudissements sur les travées du GEST ; « Ah ! » et protestations sur les travées du groupe Les Républicains)

M. Christophe Béchu, ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires .  - Je ne peux croire que vous regrettiez la recherche pour un avion moins émetteur, que pour rendre l'écologie populaire il faille la rendre punitive.

M. Emmanuel Capus.  - C'est très juste !

M. Thomas Dossus.  - C'est n'importe quoi !

M. Christophe Béchu, ministre.  - Je ne peux croire que vous regrettiez la tenue en France du plus grand salon aéronautique du monde.

M. Emmanuel Capus.  - Très bien !

M. Christophe Béchu, ministre.  - La solution repose sur un triptyque : sobriété, efficacité, innovation.

MM. Daniel Salmon et Thomas Dossus.  - Où est la sobriété ?

M. Christophe Béchu, ministre.  - Manquer un de ces piliers, c'est manquer à l'équilibre dont nous avons besoin, et aller dans le mur. Certains veulent condamner l'innovation...

M. Daniel Salmon.  - Ce n'est pas ce que j'ai dit !

M. Christophe Béchu, ministre.  - D'autres prétendent qu'il ne faut rien changer à nos usages, et que nous réussirons par l'innovation...

M. Thomas Dossus.  - Qu'est-ce qu'on change ?

M. Christophe Béchu, ministre.  - La sobriété, c'est que nous sommes le premier pays à avoir interdit les vols pour lesquels il existe une alternative ferroviaire en moins de 2 h 30.

M. Thomas Dossus.  - Deux lignes aériennes !

M. Christophe Béchu, ministre.  - La sobriété, c'est privilégier le train et ce sont les taxes sur le kérosène, relevées l'année dernière. Nous avons investi 100 milliards d'euros dans le ferroviaire.

L'efficacité, c'est la baisse du poids, l'évolution des moteurs, enjeu international. La moitié des 3 % d'émissions mondiales de gaz à effet de serre dont est responsable l'aérien proviennent d'avions fabriqués en Europe.

Le Président de la République a défini deux axes : travailler sur les moteurs, et sur les carburants alternatifs. J'insiste pour éviter la caricature : il ne s'agit pas de prendre des terres agricoles, mais de produire à partir de résidus de bois, d'algues, ou d'huiles usagées. (Applaudissements sur les travées du RDPI, du groupe INDEP et sur quelques travées du groupe UC)

M. Emmanuel Capus.  - Excellent !

M. Daniel Salmon.  - J'avais indiqué en introduction que la recherche est indispensable. Vous caricaturez. Ce qui est irresponsable, c'est de ne pas dire que la sobriété est nécessaire. Vous nous préparez à un monde à plus 4 degrés. (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains) Les politiques servent à cela : il ne faut pas reporter à demain ce que nous pouvons faire aujourd'hui. (Applaudissements sur les travées du GEST et sur quelques travées du groupe SER ; protestations sur les travées du groupe Les Républicains)

Assises des finances publiques (III)

M. Emmanuel Capus .  - (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP ; marques d'ironie à gauche) Lundi se tenaient les assises de Bercy.

M. Rachid Temal.  - Excellent ! (Nouvelles marques d'ironie sur les travées du groupe SER ; « Ah ! » sur les travées du groupe Les Républicains)

M. Emmanuel Capus.  - Le Gouvernement a tenu un langage de fermeté, avec un objectif clair : 10 milliards d'euros d'économies d'ici la fin du quinquennat. (Exclamations sur plusieurs travées) Cela a le mérite de clore le quoi qu'il en coûte. Le groupe INDEP soutient cette démarche. (Marques d'ironie sur les travées du groupe SER et sur plusieurs travées du groupe Les Républicains)

M. Rachid Temal.  - Monsieur Béchu, au micro !

M. Emmanuel Capus.  - Il est urgent de remettre de l'ordre dans nos comptes. (Les exclamations ironiques ponctuent les propos de l'orateur.) Mais la tâche s'annonce ardue. La Première ministre a annoncé le retour en septembre de la loi de programmation des finances publiques, déjà adoptée par le Sénat. Ce texte devra préciser le cadre légal de la réduction des finances publiques et la participation des collectivités territoriales à cet effort. La règle d'or les contraint à équilibrer leur budget.

M. Rachid Temal.  - Démagogie !

M. Emmanuel Capus.  - Or elles ne représentent que 20 % des dépenses publiques et moins de 10 % de la dette. Il serait injuste et inefficace de leur demander des efforts supplémentaires. Monsieur le ministre, pouvez-vous nous assurer que vous ne mettrez pas davantage les collectivités territoriales à contribution ? (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP et sur quelques travées du groupe UC ; exclamations ironiques sur les travées du groupe Les Républicains ; on réclame M. Christophe Béchu à gauche.)

M. François Bonhomme.  - Oui, il le peut !

M. Gabriel Attal, ministre délégué chargé des comptes publics .  - En effet, nous avons annoncé, dans le cadre du nouveau programme de stabilité, une révision de la charte de l'effort. Vous avez été une vigie, monsieur Capus, sur ce point, en nous invitant à un effort plus important de la part de l'État. (Marques d'ironie sur les travées du groupe Les Républicains et à gauche) Dans la nouvelle loi de programmation, nous prévoirons un effort plus important pour l'État, à moins 0,8 %.

M. Rachid Temal.  - Et les communes ?

M. Gabriel Attal, ministre délégué.  - Je le répète : nous avons besoin les uns des autres. L'État et les collectivités territoriales doivent agir de concert. Je n'oppose pas les 3 % et les 3 degrés. Pour plus de transition écologique, nous devons garder le contrôle sur nos finances publiques afin de conserver des marges de manoeuvre budgétaires nécessaires à notre transition énergétique.

Bruno Le Maire a proposé le système d'auto-assurance des collectivités territoriales, qui constitueraient des réserves en cas de surcroît de recettes. Nous continuerons à avancer. Nous rééditerons les dialogues de Bercy en améliorant le dispositif. (Applaudissements sur les travées du RDPI)

M. Emmanuel Capus.  - Vous connaissez l'exaspération des élus locaux. Ils sont prêts à faire des efforts, à condition de réduire les normes et de leur laisser une autonomie financière. (Applaudissements sur les travées des groupes INDEP et UC, ainsi que sur quelques travées du RDSE)

Loi de programmation des finances publiques

M. le président.  - Je salue Gérard Longuet, qui a décidé de ne pas renouveler son mandat. Il a été présent durant 22 ans dans notre hémicycle, et fut président du groupe UMP, membre de la commission des finances, président de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques (Opecst). Il a toujours donné beaucoup d'élévation au débat. (Mmes et MM. les sénateurs des groupes Les Républicains, UC, INDEP, du RDSE et du RDPI se lèvent et applaudissent, de même que M. Teva Rohfritsch et Mme Esther Benbassa ; applaudissements sur quelques travées du GEST et du groupe SER)

M. Gérard Longuet .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur plusieurs travées du groupe UC) Je reste d'une sérénité à toute épreuve, malgré cet hommage. Gabriel Attal n'était pas né que j'étais déjà en politique ! (Rires) Avant-hier, Bruno Le Maire a lancé les Assises des finances publiques. Comme écrivain, je l'accepte, mais comme metteur en scène, il est nul ! (Applaudissements et rires sur les travées du groupe Les Républicains et sur plusieurs travées du groupe SER) Pour les finances publiques, il n'y a qu'une scène, le Parlement. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC et INDEP, ainsi que sur plusieurs travées des groupes SER, CRCE et du GEST)

La question est simple, et déjà évoquée par M. Capus. (M. Emmanuel Capus remercie de l'hommage.) Je vais enfoncer le clou : pourquoi diable ne pas avoir répondu à la commande de Mme Borne en avril, de présenter en juillet la loi de programmation des finances publiques (LPFP) 2023-2027 ? (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC et sur quelques travées du groupe INDEP)

M. Jean-François Husson.  - Allez !

M. Gabriel Attal, ministre délégué chargé des comptes publics .  - Je réponds toujours aux demandes de la Première ministre, qui lundi a souhaité que la LPFP soit présentée en septembre. Pourquoi ? Cela fait plus sens de la présenter au moment du projet de loi de finances. Cette loi de programmation avait été acceptée au Sénat avec un quantum important d'économies supplémentaires.

M. Jean-François Husson.  - Tout à fait.

M. Gabriel Attal, ministre délégué.  - Il faudra identifier les économies point par point.

Mme Frédérique Puissat.  - On l'a déjà fait !

M. Gabriel Attal, ministre délégué.  - Monsieur le sénateur Longuet, je vous rends hommage, à vous et à votre parcours. J'avais 12 ans quand vous êtes entré au Sénat. (Sourires ; M. Roger Karoutchi s'amuse.)

Je me suis intéressé très jeune à la vie politique ; j'ai l'impression de vous avoir connu très jeune et d'avoir suivi votre voix singulière tout au long de votre carrière politique. Je suis convaincu que vous continuerez à contribuer au débat d'idées. (Applaudissements sur les travées du RDPI, des groupes INDEP, Les Républicains et UC)

M. Gérard Longuet.  - Votre problème est un problème de majorité politique. Soyez rassuré : aucun Président de la République, depuis l'élection au suffrage universel, n'a été élu au premier tour. Tous ont eu à gérer des majorités compliquées. À sept occasions seulement, depuis 1967, le Président de la République a obtenu une majorité parlementaire au moyen de son seul parti. Au coeur de la Ve République, il existe une réalité parlementaire : les alliés du second tour méritent d'être pris en considération. Cela manque aujourd'hui.

M. le président.  - Veuillez conclure.

M. Gérard Longuet.  - Vous avez trois choix (M. Jean-François Longeot s'en amuse) : une coalition gouvernementale, ce qui ne semble pas être du caractère du Président ; la cohabitation dans votre propre camp avec un Premier ministre dont vous pensez qu'il sera plus fédérateur...

M. Rachid Temal.  - Darmanin !

M. Gérard Longuet.  - ... et la dissolution. Je regrette de ne plus être parlementaire pour assister à l'un de ces événements ! (Vifs applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC et INDEP)

Corps électoral en Nouvelle-Calédonie

M. Pierre Frogier .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Madame la Première ministre, la Nouvelle-Calédonie est toujours dans l'attente. Mais désormais, sa longue histoire se poursuivra dans la France.

À Nouméa, M. Darmanin a engagé des échanges avec les différentes forces politiques. Je le remercie de sa détermination et me tiens à votre disposition sur ce chemin. Mais pour y parvenir, il faut franchir l'obstacle du renouvellement des assemblées de province, que seule une réforme du corps électoral rendra possible.

Les accords de Nouméa prévoyaient une durée de résidence de dix ans pour obtenir le droit de vote. La réforme constitutionnelle de 2007, imposée, a fermé l'accès du corps électoral à 1998. Les référendums successifs laissent la population divisée.

Pour fédérer cette communauté de destin, il faudra une vision de long terme, l'ambition d'un avenir partagé, sortir du seul débat institutionnel. La citoyenneté fixera l'identité particulière de la Nouvelle-Calédonie dans la solidarité nationale. Pouvez-vous vous engager sur un agenda pour un corps électoral ouvert dès l'année prochaine ? Il y va de notre vivre ensemble. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; M. Franck Menonville applaudit également.)

Mme Élisabeth Borne, Première ministre .  - L'accord de Nouméa est arrivé à son terme en décembre 2021, après trois référendums organisés sous l'autorité du Président de la République. Désormais, il revient aux partenaires politiques d'examiner la situation, aux termes de l'accord. Mon Gouvernement accompagne les discussions. En un an, les ministres de l'intérieur et des outre-mer se sont rendus sur place à quatre reprises, et j'ai réuni les partenaires à Paris en octobre 2022. J'ai rencontré le Front de libération nationale kanak et socialiste (FLNKS) et les représentants non indépendantistes en avril dernier, notamment sur les compétences, le droit à l'autodétermination et le corps électoral provincial.

Un gel indéfini de ce dernier questionnerait notre démocratie et nos engagements internationaux. Le ministre de l'intérieur et des outre-mer a formulé des propositions et le haut-commissaire à Nouméa a organisé des échanges techniques. Une solution consensuelle peut être trouvée. J'invite à conclure un accord fin août.

Les élections provinciales auront lieu en 2024, c'est un enjeu démocratique. L'esprit de Nouméa, que vous incarnez comme signataire des accords en 1988 et en 1998, c'est l'ambition humaine du destin commun. Elle répond à l'attente de nombre de Néo-calédoniens : soyons à la hauteur.

Je rends à mon tour hommage à Gérard Longuet, ancien ministre et président de groupe, mais aussi à Jean-Pierre Sueur, ancien ministre et président de la commission des lois, ainsi qu'à Michelle Meunier, qui siège depuis douze ans. Vos voix portent. Nous avons pu nous opposer, mais aussi travailler ensemble au service de la République et de l'intérêt général. (Applaudissements sur toutes les travées, à l'exception de celles du groupe CRCE)

Naufrage d'un navire de migrants au large de la Grèce

M. le président.  - Je donne la parole à Jean-Pierre Sueur, ancien président de la commission des lois, questeur du Sénat, qui a sans doute battu le nombre d'heures passées dans les fauteuils de l'hémicycle ! (Applaudissements prolongés sur toutes les travées ; Mmes et MM. les sénateurs se lèvent, d'abord à gauche, puis dans tout l'hémicycle ; M. Pap Ndiaye se lève également.)

M. Jean-Pierre Sueur .  - (Applaudissements sur les travées du groupe SER) Merci, c'est trop.

Je souhaitais interroger Mme la Première ministre sur ce qui s'est passé la nuit du 13 au 14 juin au large de la Grèce, et qui est une honte pour notre civilisation : 750 hommes, femmes, enfants, entassés comme des bêtes dans un bateau qui a coulé. Frontex et plusieurs États savaient que le péril était imminent : les images de la BBC montrent que pendant sept heures, le bateau est resté là, entre la vie et la mort.

Nous ne pouvons nous résigner à ces nouveaux morts qui s'ajoutent aux dix mille en Méditerranée, aux vingt ou trente mille dans la Manche ces dernières années. Je demande que la France pèse de tout son poids en faveur d'une politique européenne qui mette un terme au naufrage de ces êtres humains. (Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE, du GEST, ainsi que sur plusieurs travées du RDPI, du RDSE et du groupe UC ; Mme Esther Benbassa, MM. Alain Houpert et Gérard Longuet applaudissent également.)

Mme Chrysoula Zacharopoulou, secrétaire d'État chargée du développement, de la francophonie et des partenariats internationaux .  - Ce naufrage survenu le 14 juin au large de la Grèce est un drame de plus. Nous ne pouvons nous y résigner. Cette tragédie nous bouleverse tous, et je renouvelle mes condoléances aux familles des victimes.

Nous devons tout mettre en oeuvre, au niveau européen notamment, pour éviter un nouveau drame de ce type. L'accord trouvé le 8 juin dernier entre les ministres de l'intérieur européens sur le traitement des demandes d'asile peut y contribuer. Comme le Président de la République et la présidente du Conseil Giorgia Meloni l'ont annoncé, la France et l'Italie sont pleinement mobilisées en ce sens.

M. Pierre Laurent.  - Pas l'Italie !

Mme Chrysoula Zacharopoulou, secrétaire d'État.  - Ce drame rappelle aussi l'importance de la coopération avec les pays tiers en matière de lutte contre les passeurs. Nous devons renforcer les capacités des États d'origine et de transit pour lutter ceux qui exploitent la détresse des migrants et traiter les causes de l'exil.

Je tiens moi aussi à vous saluer, monsieur le questeur Sueur. Vous avez incarné pendant quarante ans, par vos convictions et votre engagement, la République, le Sénat, et votre cher Loiret. Nous vous en sommes reconnaissants. (Applaudissements sur les travées du RDPI et sur plusieurs travées du groupe SER ; applaudissements épars sur les autres travées)

M. Jean-Pierre Sueur.  - Il est facile d'exploiter constamment le sujet de l'immigration, de faire de la politique facile en disant que les étrangers sont un danger pour notre pays. Mais il y a des problèmes qu'il faut traiter, et non exploiter. Des milliers de personnes qui sont en danger en Méditerranée. Merci de faire prendre conscience, au niveau européen, qu'il faut une politique énergique impulsée par la France.

(Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE, du GEST, ainsi que sur plusieurs travées du RDPI et du groupe INDEP ; M. Bernard Delcros et Mme Annick Jacquemet applaudissent également.)

Accord Union européenne - Mercosur

M. Jean-François Rapin .  - J'associe Mme Primas à ma question. Madame la Première ministre, vous déclariez en octobre 2019 qu'il était impossible de signer un traité avec un pays qui ne respecte pas la forêt amazonienne ni le traité de Paris. Le Président de la République disait encore, le 25 février au salon de l'agriculture, que tout accord était impossible sans respect des accords de Paris et des contraintes sanitaires et environnementales imposées à nos producteurs.

Mais il y a quinze jours, M. Olivier Becht estimait qu'il fallait conclure l'accord avec le Mercosur, en négociation depuis vingt-trois ans. Même souhait exprimé par la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, et de la future présidence espagnole du Conseil de l'UE. La barque prend l'eau de toutes parts. Nous sommes très inquiets, d'autant plus que la Commission européenne est en mesure de tenir les parlements européens à l'écart de la ratification.

M. Macron va-t-il trahir sa promesse vendredi, lorsqu'il rencontrera le président Lula ? (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC ; M. Didier Marie applaudit également.)

Mme Chrysoula Zacharopoulou, secrétaire d'État chargée du développement, de la francophonie et des partenariats internationaux .  - Je vous prie d'excuser la ministre des affaires étrangères et de l'Europe, en déplacement. La France, comme beaucoup de pays, a exprimé dès 2019 des préoccupations environnementales. La Commission européenne a fait des efforts, notamment sur la déforestation, mais ils restent insuffisants.

La France a imposé trois conditions à la ratification : le respect de l'accord de Paris, l'alignement, en matière de développement durable, avec les meilleurs standards environnementaux et sociaux, et enfin un programme ambitieux sur les mesures miroirs. Nous nous opposons à la scission de l'accord.

Cet accord doit être présenté aux parlements nationaux. Le Président de la République échangera avec son homologue brésilien vendredi en marge du sommet pour un nouveau pacte financier mondial. (M. François Patriat applaudit.)

M. Jean-François Rapin.  - Nous prenons acte de vos propos : vous n'exclurez pas les parlements nationaux. À vous de défendre les agriculteurs français et la France. La commission des affaires européennes, que je préside, y veillera. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC)

Mortalité infantile en France

Mme Jocelyne Guidez .  - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) Voilà sept ans que la mortalité infantile en France est supérieure à la moyenne européenne : nous sommes passés de la troisième position à la fin du XXe siècle à la vingtième ! En 2021, 2 700 enfants de moins d'un an ont perdu la vie.

L'indicateur évolue de manière préoccupante en Île-de-France, Centre Val de Loire et Grand Est, ainsi qu'en outre-mer : 8,9 pour mille à Mayotte, 8,2 pour mille en Guyane et 8,1 pour mille en Guadeloupe contre 3,5 pour mille en France hexagonale.

Quelles sont les explications à cette tendance française, et les mesures qu'envisage le Gouvernement pour mettre fin à cette surmortalité en outre-mer, et dans certains départements comme la Seine-Saint-Denis, le Jura, l'Indre-et-Loire et le Lot ? (Applaudissements sur les travées du groupe UC)

M. François Braun, ministre de la santé et de la prévention .  - La lutte contre la mortalité infantile est un marqueur de l'état de notre système de santé. (Marques d'ironie)

La mortalité infantile dans notre pays, rappelons-le, est à un niveau historiquement bas. Toutefois, rien n'est acquis : le taux est légèrement remonté, notamment pendant la première semaine de vie.

La vaccination obligatoire des nourrissons est une nécessité, et je m'insurge contre ceux qui en relativisent l'importance.

M. Bernard Jomier.  - Très bien !

M. François Braun, ministre.  - Nous avons systématisé le dépistage néonatal qui permet de prendre en charge treize maladies graves, et la stratégie des 1 000 premiers jours, autour de la santé physique et mentale de l'enfant.

Tous les aspects de la santé doivent être pris en charge : c'est l'esprit des Assises de la pédiatrie et de la santé de l'enfant, dont les groupes de travail formuleront bientôt des propositions - avec un ciblage sur les outre-mer. Nous avons avancé sur la rénovation du métier d'infirmière puéricultrice pour mieux prendre en charge ces enjeux.

Concernant les maternités, à rebours d'une gestion comptable d'un autre temps, je veux un nouveau modèle de suivi néonatal qui sécurise l'accouchement dans des plateaux techniques associant toutes les disciplines.

Mme Jocelyne Guidez.  - Non, il ne faut pas dénigrer la vaccination. Mais cela fait vingt ans que la mortalité infantile ne baisse plus ; c'est catastrophique ! Marc Bloch écrivait, dans L'Étrange défaite : « Français, je vais être contraint, parlant de mon pays, de ne pas en parler qu'en bien ; il est dur de devoir découvrir les faiblesses d'une mère douloureuse. » Je n'en reviens pas de notre déclassement. (Applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains, ainsi que sur plusieurs travées du groupe CRCE)

Recrutement des sapeurs-pompiers volontaires

M. Jean Bacci .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Un hectare de forêt qui brûle, c'est 46 tonnes de CO2 émis. En 2022, 72 000 hectares ont brûlé en France, dégageant 3,5 milliards de tonnes de CO2.

Un accord a été trouvé en commission mixte paritaire (CMP) sur notre proposition de loi de lutte contre le risque incendie ; mais sous la pression comptable de Bercy, les députés ont refusé la réduction des cotisations patronales des collectivités territoriales en contrepartie de la mise à disposition de sapeurs-pompiers volontaires pour les services départementaux d'incendie et de secours (Sdis). Nous sommes ainsi privés d'un moyen aigu de recrutement.

Autre regret, le renoncement des députés à une mesure forte en faveur du débroussaillement, moyen important de protection passive de la forêt.

Vous consacrez des milliards à la décarbonation, mais vous refusez quatre millions d'euros aux collectivités et aux particuliers pour protéger la forêt. Quel paradoxe ! Le texte issu de la CMP manque d'ambition, à cause de considérations budgétaires de court terme. Monsieur le ministre, il ne faut pas penser à la forêt que quand elle brûle. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur plusieurs travées du groupe UC ; Mme Michelle Gréaume applaudit également.)

Mme Sonia Backès, secrétaire d'État chargée de la citoyenneté .  - Je vous remercie pour la proposition de loi que vous portez avec Anne-Catherine Loisier, Pascal Martin et Olivier Rietmann, qui vient de faire l'objet d'un accord en CMP. Elle contient de nombreuses avancées : vous créez un continuum de prise en compte du risque incendie, de la prévention au reboisement. Le texte a fait l'objet d'un large consensus.

Concernant l'exonération de charges pour les employeurs, vous avez fait le choix d'une expérimentation pendant trois ans. Ainsi les particuliers pourront participer activement à la lutte contre l'incendie. Le choix a été fait dès le début de ne pas intégrer les collectivités territoriales. (Mmes Sophie Primas et Anne-Catherine Loisier le déplorent.) Il existe d'autres dispositifs qui les concernent directement.

Nous n'avons pas retenu non plus le crédit d'impôt pour l'obligation légale de débroussaillement, cette loi n'étant pas le vecteur le plus opportun.

M. Olivier Rietmann.  - Ben voyons !

Mme Sonia Backès, secrétaire d'État.  - Vous pourrez toujours compter sur notre soutien aux sapeurs-pompiers : grâce à votre texte, nous sommes mieux armés pour cela. (Murmures désapprobateurs sur les travées du groupe Les Républicains ; applaudissements sur quelques travées du RDPI)

Financement du système de santé

M. le président.  - Je profite de cette dernière question posée par Mme Meunier pour saluer son travail au sein de la commission des affaires sociales, son rapport sur le bien vieillir, et surtout sa vice-présidence de la commission de déontologie parlementaire. (De nombreux sénateurs se lèvent et applaudissent.)

Mme Michelle Meunier .  - (Applaudissements sur les travées du groupe SER) Je pose ma question avec gravité. Votre Gouvernement ignore avec insistance les alertes des professionnels du soin, oppose les Français méritants et les précaires, malgré la détresse physique et morale qui se répand. L'état de santé de notre pays se dégrade. Les dépenses de santé augmentent, c'est normal. Mais vous faites la chasse aux arrêts maladie et réduisez les remboursements des frais dentaires. C'est grave, car cela incitera les mutuelles à répercuter leurs dépenses sur les cotisations et réduira le pouvoir d'achat des assurés. Les accidents du travail touchent plus fortement le secteur du soin et de l'aide à domicile à cause des tensions sur le recrutement.

SI vous ne réagissez pas, nous aurons une santé à deux vitesses : soins et complémentaires premium pour les plus aisés, renoncement au soin pour les plus précaires, coincés aux urgences en attendant d'être soignés par d'autres précaires. Quand mettrez-vous fin à ce cercle vicieux pour investir dans notre système de santé ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER ; Mmes Marie-Noëlle Lienemann et Esther Benbassa applaudissent également.)

M. François Braun, ministre de la santé et de la prévention .  - À mon tour de saluer votre carrière au service nos concitoyens - mais aussi de rétablir quelques vérités. Nous avons instauré le 100 % santé pour l'optique, l'auditif et les frais dentaires. C'est tout le contraire d'une médecine à deux vitesses ! Nous avons construit cela avec les complémentaires, et non contre elles. Depuis 2011, en raison de la progression des affections de longue durée (ALD), la sécurité sociale assume une part de plus en plus importante des frais : trois points de plus, contre respectivement un et deux points de moins pour les complémentaires et les ménages. Pour garantir l'avenir de notre système de santé et assurer le virage préventif, tout le monde doit faire des efforts, y compris les complémentaires. Nous leur avons donc demandé de participer au 100 % prévention.

Je veillerai à ce que les Français soient indemnisés à juste proportion. Il est légitime de proposer des économies, mais cela ne se fera jamais au détriment de l'accès aux soins pour tous les Français. (MM. Michel Dagbert et François Patriat applaudissent.)

Mme Michelle Meunier.  - Vous sapez l'hôpital public, vous ne répondez ni à nos propositions - comme le ratio de soignants par patient - ni à la colère de ceux qui cotisent sans jamais voir le fruit de leurs efforts. (Applaudissements sur les travées du groupe SER ; Mme Laurence Cohen applaudit également.)

Installation illicite des gens du voyage

Mme Elsa Schalck .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; M. Alain Duffourg applaudit également.) J'associe à ma question mes collègues du Bas-Rhin. L'occupation des terrains par les gens du voyage revient régulièrement dans le débat - sans que rien ne change. Les collectivités se sont pourtant mises en conformité avec la loi, en construisant à grands frais des aires de passage. Mais le problème reste entier.

Entendez le sentiment d'abandon et le découragement d'un maire, qui doit, un dimanche soir, gérer l'arrivée imprévue de centaines de caravanes et la colère de la population ! Les maires s'attendaient à être soutenus, mais ils se sentent démunis et seuls face à l'affaiblissement de l'autorité de l'État. C'est la double peine : payer et subir. Une commune alsacienne a dépensé 700 000 euros pour une aire de passage aujourd'hui déserte, alors que des dégradations sont commises autour du stade de football qu'ont préféré des gens du voyage, avec leurs 400 caravanes.

Il faut y mettre fin, et pour cela adapter la loi Besson. Les élus ont pris leurs responsabilités ; le Sénat a pris les siennes en votant le texte de Patrick Chaize. Quand prendrez-vous les vôtres ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur plusieurs travées du groupe UC)

M. Loïc Hervé.  - Bravo !

M. Jean-François Carenco, ministre délégué chargé des outre-mer .  - Le suivi des installations illicites est essentiel. Il faut mieux réprimer : c'est l'essence de la loi de 2018 qui assouplit les conditions de saisine du préfet, avec emploi de la force si nécessaire et renforcement des sanctions pénales jusqu'à un an d'emprisonnement.

M. André Reichardt.  - Jamais appliquée !

M. Jean-François Carenco, ministre délégué.  - Tous les préfets ont été mobilisés en janvier 2022 pour relancer les schémas d'accueil.

M. Loïc Hervé.  - Cela fait un an et demi !

M. Jean-François Carenco, ministre délégué.  - Des efforts restent à fournir. (« Oh ! » à droite) Un référent ministériel gens du voyage est nommé. (On ironise à droite.)

Enfin, le 24 avril 2023 - c'est assez récent - une circulaire sur la gestion des grands passages estivaux a été rédigée et un courrier envoyé à toutes les associations des gens du voyage. (Les marques d'ironie redoublent à droite.) Le Gouvernement entend avancer sur un meilleur accueil et une plus forte répression des installations illicites. (M. François Patriat applaudit ; protestations sur les travées du groupe Les Républicains)

Protection du patrimoine résidentiel

Mme Sabine Drexler .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Trop souvent perçu comme une charge, le patrimoine marque une culture et une identité. Il crée aussi de l'emploi. Le petit patrimoine n'est pas protégé, à moins d'être explicitement signalé dans les documents d'urbanisme. Lavoirs, fours à pains, calvaires, maisons à colombage d'Alsace, malouinières en Bretagne, maisons vigneronnes d'Occitanie, burons du Cantal, échoppes bordelaises, longères de Vendée, chalets du Briançonnais, meulières d'Île-de-France, chaumières normandes, mas provençaux font l'attractivité de notre pays. Ce bâti vernaculaire est durable, car il tient compte des ressources locales et contribue à réduire chauffage et climatisation.

Or le diagnostic de performance énergétique (DPE) opposable conduit certains propriétaires à réaliser des travaux d'isolation inadaptés mais subventionnés, d'autres à délaisser leur bien. Les architectes des bâtiments de France (ABF) disent ne plus pouvoir endiguer cette vague d'isolation par l'extérieur, qui sévit même dans les secteurs protégés.

Comment comptez-vous empêcher que des gestes ou des matériaux inappropriés portent atteinte au bâti de notre pays ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur plusieurs travées du groupe UC ; Mme Émilienne Poumirol, MM. Mickaël Vallet et Jacques Fernique applaudissent également.)

M. Christophe Béchu, ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires .  - J'associe à ma réponse le président Lafon : vous m'avez en effet alerté il y a quelques mois sur ce risque d'une application aveugle du DPE qui ne tiendrait pas compte de la résistance des maisons de pleine pierre. Nous avons entendu le cri d'alarme d'associations patrimoniales qui ont relayé cette alerte. Avec la ministre de la culture, nous avons reçu les ABF pour leur demander ce qu'il était possible de faire.

Il y a des solutions, comme à l'hôtel de Roquelaure que j'occupe temporairement, où le recours à la géothermie permettrait de ne pas porter atteinte au bâtiment.

Vous avez cité les longères de Vendée - vous auriez pu pousser jusqu'aux troglodytes du Saumurois ou aux clochers tors du Haut-Anjou. Sur nos territoires, des collectivités se mobilisent, comme la Vendée, Monsieur Retailleau. (On apprécie à droite.) Préparons l'avenir en nous appuyant sur le passé. C'est une question non seulement de mémoire, mais aussi de cohésion. (Applaudissements sur les travées du RDPI)

La séance est suspendue à 16 h 20.

Présidence de M. Pierre Laurent, vice-président

La séance reprend à 16 h 30.

Rappel au Règlement

M. Pierre Ouzoulias.  - Il s'agit d'un rappel au règlement commémoratif, sur la base de l'article 36 - un peu aménagé pour la circonstance...

Le 18 juin, le Président de la République a annoncé que Missak Manouchian serait transféré au Panthéon le jour du quatre-vingtième anniversaire de son exécution au Mont Valérien, accompagné de sa femme, Mélinée. Avec lui, ce sont tous les étrangers morts pour la France qui entreront au Panthéon : la Résistance nationale dans la pluralité de ses composantes sera enfin rassemblée, d'Honoré d'Estienne d'Orves à Missak Manouchian, de Geneviève de Gaulle-Anthonioz à Olga Bancic, de Charles Delestraint à Georges Guingouin, de Marc Bloch à Edmond Michelet, d'Henri Frenay à Emmanuel d'Astier de La Vigerie.

Nous nous félicitons de cette décision, qui honore une certaine idée de la France, de la République et de la Nation pensée comme projet politique. (M. Bernard Buis opine du chef.)

Avant de mourir, Missak Manouchian écrivait à sa femme : « Je suis sûr que le peuple français et tous les combattants de la Liberté sauront honorer notre mémoire dignement. » Montrons-nous dignes de leur combat et continuons de défendre, dans la pluralité de nos opinions, les principes pour lesquels ils sont tombés : la liberté, la justice, la démocratie, la paix et les droits de l'homme. (Applaudissements)

Nominations à d'éventuelles CMP

M. le président.  - Des candidatures ont été publiées pour siéger au sein des éventuelles commissions mixtes paritaires chargées de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi ratifiant les ordonnances relatives à la partie législative du livre VII du code monétaire et financier et portant diverses dispositions relatives à l'outre-mer, du projet de loi visant à donner à la douane les moyens de faire face aux nouvelles menaces et de la proposition de loi visant à renforcer l'accès des femmes aux responsabilités dans la fonction publique.

Ces candidatures seront ratifiées si la présidence n'a pas reçu d'opposition dans le délai d'une heure prévu par notre Règlement.

Salut à une délégation parlementaire internationale

M. le président.  - (Mmes et MM. les sénateurs se lèvent, ainsi que M. le ministre.) Je salue la présence dans notre tribune d'honneur d'une délégation internationale composée de parlementaires du Brésil, du Botswana, de Colombie, du Mexique, du Pérou, du Royaume-Uni et de Zambie, particulièrement investis dans les politiques de développement durable et de conservation des ressources.

La délégation participera au Sommet pour un nouveau pacte financier mondial, qui se déroulera à Paris demain et après-demain. Elle est reçue au Sénat par nos collègues Ronan Dantec et Christian Cambon pour une réunion de travail sur la protection de l'environnement, suivie d'une visite institutionnelle du Palais du Luxembourg. Elle participera demain à une table ronde organisée à l'Assemblée nationale par notre collègue député Hubert Julien-Laferrière.

En votre nom à tous, je souhaite à la délégation la plus cordiale bienvenue au Sénat et un fructueux séjour en France. (Applaudissements)

Transport transmanche

M. le président.  - L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, visant à lutter contre le dumping social sur le transmanche.

Discussion générale

M. Hervé Berville, secrétaire d'État chargé de la mer .  - En mars 2022, P&O Ferries licenciait 786 marins sans préavis, par visioconférence, pour les remplacer par des marins payés deux fois moins, sans jour de repos et passant en mer quinze semaines d'affilée. Cette course au moins-disant social risque, telle une vague scélérate, d'emporter des pans entiers de notre transport maritime.

Nous sommes tous concernés, élus du littoral ou d'ailleurs ; je salue d'ailleurs l'engagement de la rapporteure, Catherine Procaccia, élue du Val-de-Marne. (Mme la rapporteure sourit.)

Cette proposition de loi est cruciale pour préserver notre modèle social, assurer la sécurité en mer et protéger nos espaces maritimes.

Pendant un an, nous avons travaillé avec les organisations syndicales et patronales pour trouver des solutions communes. Je salue notamment l'implication de Jean-Marc Roué. Nous avons ainsi construit une réponse collective pour mettre fin à un dumping social scandaleux.

Après que le Brexit a ouvert la voie aux pratiques dérégulées d'armateurs peu scrupuleux, nous avons d'abord mis en place une charte d'engagements volontaires, en concertation avec les autorités britanniques. Elle invite les armateurs à s'engager en faveur de conditions supérieures au minimum en matière de temps de travail et de respect de l'environnement. Je remercie Jean-François Rapin, Agnès Canayer et Michel Canévet pour leur contribution à ces travaux transpartisans.

Nous avons dressé un triple constat : aucune entreprise respectant le principe de concurrence libre et non faussée, cher à la rapporteure, ne peut s'aligner sur des pratiques proches de l'esclavage moderne ; aucune entreprise adoptant ces pratiques ne peut prétendre qu'elle ne fait pas courir de risques à ses équipages et ses passagers, ni prétendre s'engager d'un point de vue environnemental.

Face à ces constats, le Gouvernement a soutenu la proposition de loi du député Didier Le Gac, dont l'article 1er régule les liaisons internationales en imposant un salaire minimal horaire - aucun marin ne doit être moins payé qu'en France - et l'équivalence entre temps de travail et temps de repos pour garantir la sécurité en mer.

La commission des affaires sociales a clarifié le dispositif et renforcé sa robustesse. Nous avons déposé un amendement pour en limiter l'application à la zone transmanche, conformément à l'objet de la proposition de loi, qui ne traite pas de la Méditerranée. Par ailleurs, un décret paru ce matin interdit l'utilisation du registre international français (RIF) pour le transmanche, comme avec le Maghreb par le passé.

L'article 2 sanctionne pénalement le recours à des marins sans certificat médical.

Les articles 1er bis et 1er ter, supprimés par la commission, concernent toutes nos façades maritimes : les navires permettant la construction des éoliennes en mer appliqueront en partie le droit français, en vertu du principe de l'État d'accueil. Il s'agit de renforcer l'application de notre droit en alourdissant les sanctions pénales contre les contrevenants. Comment accepter un niveau de sanction moins élevé dans nos eaux territoriales que pour le transport transmanche ?

Dans un souci de cohérence et pour lutter efficacement contre le dumping social dans le déploiement des éoliennes en mer, nous proposerons le rétablissement de ces deux articles. De Fécamp à Fos-sur-Mer, armateurs et élus nous disent tous avoir besoin de ce dispositif renforcé.

Ce texte de justice sociale envoie un message clair : la France défend la sécurité en mer et sa souveraineté. Hissons haut le pavillon France pour le bien-être des gens de mer, la sécurité maritime et la protection de l'environnement. (Applaudissements sur les travées du RDPI, du RDSE et du groupe INDEP, ainsi que sur plusieurs travées du groupe SER ; M. Gérard Lahellec applaudit également.)

Mme Catherine Procaccia, rapporteur de la commission des affaires sociales .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Certains se demanderont pourquoi, élue d'un département qui n'est traversé que par la Seine et la Marne, je suis rapporteur de ce texte. Sans doute la présidente Deroche connaît-elle mon goût pour les sujets originaux - et les mers chaudes... (Sourires)

Dans le contexte du Brexit puis de la crise sanitaire, l'arrivée d'un nouvel opérateur a conduit certaines compagnies à optimiser leurs coûts en optant pour des pavillons offrant de faibles garanties pour les gens de mer. P&O Ferries a licencié 786 marins dans les conditions que le ministre a rappelées. Selon Armateurs de France, P&O Ferries et Irish Ferries, battant pavillon chypriote, emploient des marins pour un salaire inférieur de 60 % au salaire français, sans appliquer l'équivalence entre durée d'embarquement et temps de repos, contrairement à Brittany Ferries et DFDS.

Ces pratiques sont, hélas, légales. Elles laissent peu de marge aux États. La convention de Montego Bay et le droit européen permettent en effet le libre choix du pavillon, dont les règles prévalent. Pour autant, elles ne sont pas acceptables, car elles perturbent le marché du transport transmanche et fragilisent la sécurité de la navigation dans l'un des détroits les plus fréquentés au monde.

Le droit de l'Union européenne permet aux États d'adopter des lois de police, fixant des règles impératives pour la sauvegarde de leurs intérêts publics, quelle que soit la loi applicable au contrat. Je découvre, après dix-neuf ans de mandat, cet ovni juridique...

C'est l'objet de l'article 1er, qui impose le versement du salaire minimal de branche français et l'équivalence entre temps de travail et temps de repos.

Les restrictions à la liberté du commerce doivent être proportionnées. La commission a donc sécurisé le dispositif en veillant à la proportionnalité des peines. Les peines de 7 500 euros d'amende par salarié et de 15 000 euros et six mois de prison en cas de récidive sont dissuasives. Nous avons, en revanche, supprimé l'interdiction d'accoster dans tout port français après trois infractions, contraire à l'individualisation des peines et manifestement disproportionnée.

Nous avons fixé une date d'entrée en vigueur au 1er janvier 2024, qui coïncide avec l'entrée en vigueur de la loi britannique alignant les salaires des navigants sur ceux des personnels britanniques.

À l'article 2, nous avons renforcé les sanctions en cas de certificat médical non valide.

En revanche, nous avons supprimé les articles 1er bis et 1er ter, introduits à l'Assemblée nationale pour renforcer les sanctions pouvant être prononcées sur les liaisons nationales où s'appliquent les conditions sociales de l'État d'accueil, notamment entre la Corse et la France continentale.

Les risques de distorsion de concurrence existent entre les compagnies sous pavillon français et sous pavillon d'un autre pays européen, notamment italien, mais le droit de l'Union l'autorise. Toutefois, le dispositif de l'État d'accueil limite fortement les possibilités de dumping social sur les navires concernés. En effet, les règles applicables aux salariés employés sur ces navires sont les mêmes que pour les salariés des entreprises de la branche établies en France. Par ailleurs, les gens de mer bénéficient obligatoirement du régime de protection sociale d'un État membre.

Dès lors, la commission a considéré que les mesures proposées n'étaient pas de nature à répondre aux problématiques de concurrence sur le marché Corse-continent. Ces enjeux relèvent de l'Union européenne, notamment en ce qui concerne l'usage des pavillons internationaux sur les liaisons intra-européennes. En outre, il existe déjà un régime de sanctions pénales, et l'autorité administrative peut infliger des amendes en cas de non-respect du salaire minimum - encore faut-il que les contrôles aient lieu.

La commission n'a pas été convaincue de la nécessité de conserver les mesures sur le cabotage en Méditerranée : les intentions du législateur risquent d'être brouillées et le texte fragilisé.

Le Sénat, suivant sa position constante, a supprimé les demandes de rapport des articles 3 et 4.

Enfin, nous avons modifié l'intitulé de la proposition de loi pour y inclure la sécurité du transport maritime.

Nous entendons veiller à la proportionnalité des dispositions, d'autant que cette proposition de loi est déjà sous les fourches caudines de l'Union européenne, avant même son vote. Il faut nous assurer de son effectivité : voter une loi d'affichage ferait plus de mal que de bien. Je vous invite donc à voter le texte issu des travaux de la commission. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et INDEP, ainsi que sur des travées du groupe UC)

Mme Nadège Havet, rapporteure pour avis de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable .  - Cinq minutes : c'est le temps dont je dispose pour vous faire part de mon avis sur cette proposition de loi de Didier Le Gac. C'est plus qu'il n'en a fallu à P&O Ferries pour licencier 786 marins, sommés de quitter leur navire sur-le-champ tandis que leurs remplaçants, moins bien rémunérés, attendaient sur le quai pour monter à bord... C'est dire si armateurs, syndicats et gens de mer attendent ce texte.

La concurrence déloyale place les opérateurs historiques devant cette alternative : disparaître ou adopter le nouveau modèle, au risque de voir disparaître le pavillon français.

L'enjeu est la sécurité de la navigation : les navires transmanche accostent dix fois par jour et naviguent de façon perpendiculaire dans l'un des détroits les plus fréquentés au monde. Les journées de travail des marins dépassent souvent seize heures. C'est pourquoi les gens de mer alternent entre une à deux semaines à bord et une à deux semaines de repos. Dans le low cost, ils embarquent pendant six semaines, voire jusqu'à dix-sept, les deux tiers de l'année.

L'épuisement des marins multiplie les risques : n'attendons pas un drame humain pour légiférer.

En outre, la marine marchande sous pavillon français est régulièrement mobilisée lors des interventions militaires françaises ou pour des exercices. Pour cette raison aussi, il est essentiel de la préserver.

Parce que ce texte répond à une urgence, je suggère une adoption conforme, d'autant que, la procédure accélérée n'ayant pas été engagée, le temps pourrait manquer pour une entrée en vigueur au 1er janvier prochain.

La commission des affaires sociales a fait un choix différent, mais je me réjouis qu'elle n'ait pas apporté au texte de modifications substantielles et que le texte ait été inscrit à l'ordre du jour de la session extraordinaire. (Applaudissements sur les travées du RDPI ; Mme Françoise Gatel, MMJean-Michel Houllegatte et Philippe Mouiller applaudissent également.)

Mme Mélanie Vogel .  - (Applaudissements sur les travées du GEST) Le 8 décembre dernier, au petit matin, le capitaine Michael Michieli et ses deux matelots embarquent sur leur bateau de pêche à Jersey. Au même moment, le ferry Commodore Goodwill, battant pavillon des Bahamas et qui effectue des liaisons régulières entre les îles anglo-normandes, le Royaume-Uni et la France, fait route, transportant des camions et cinq passagers. À 5 h 30, le ferry percute le bateau de pêche, qui sombre instantanément. Les trois corps seront retrouvés plus tard.

Cet incident n'est pas isolé dans la Manche, traversée par 25 % du trafic maritime mondial ; 300 000 bateaux de pêche y naviguent, rien que côté français. Or employeurs et armateurs font tout pour réduire le coût de la main-d'oeuvre. Le licenciement en quatre minutes et par vidéo de 786 marins de P&O Ferries en témoigne : contraints de débarquer en trente minutes, ils ont été remplacés par des intérimaires employés dans des conditions dégradées. Quant à Brittany Ferries, elle aurait supprimé 250 emplois en CDI.

Ce dumping est néfaste et dangereux. Il dégrade les conditions de travail, le salaire et la protection sociale. Le remplacement d'employés expérimentés par des intérimaires ou des prestataires connaissant mal les navires accroît les risques.

Le GEST salue cette proposition de loi visant à stopper la course au moins-disant. Je remercie la rapporteure, qui a notamment tenu à ce que le décret intègre la lutte contre la pollution maritime.

Le dumping affectant tous les aspects de l'organisation du travail, un cadre plus complet serait nécessaire, incluant d'autres droits sociaux. Je ne doute pas que nous aurons de riches discussions sur le champ d'application du texte, qui a été étendu à l'Assemblée nationale. La lutte contre le dumping doit être la plus large possible.

Nous regrettons que ce texte ne soit pas accompagné d'une étude d'impact et d'un avis du Conseil d'État.

Quel que soit son point d'arrivée, il marquera une avancée : nous le voterons donc. (Applaudissements sur les travées du GEST)

M. Bernard Buis .  - (Applaudissements sur les travées du RDPI) La proposition de loi du député Le Gac vise à lutter contre le dumping social, à la suite du licenciement brutal, par visioconférence, de 786 marins de P&O Ferries, remplacés majoritairement par des marins philippins, les navires passant sous pavillon chypriote.

La concurrence déloyale est brutale dans le transport transmanche et le Brexit aggrave la situation, sortant les liaisons franco-britanniques du cadre de l'Union européenne.

Cette proposition de loi restaure la justice sociale et renforce la protection des marins, imposant le salaire minimum français quel que soit le pavillon et un repos au moins équivalent à la durée d'embarquement. Un certificat d'aptitude médicale à la navigation est également prévu.

Les députés ont entendu profiter de ce véhicule législatif pour étendre le dispositif antidumping aux liaisons entre deux ports français ou traversant les eaux françaises, sans oublier les navires de travaux et de service pour l'éolien en mer. L'article 1er ter améliore la capacité de sanction de l'administration : nous en proposerons le rétablissement. Nous espérons aussi l'adoption de l'amendement du Gouvernement.

Nous voterons ce texte, en espérant que la navette aboutisse le plus rapidement possible. (Applaudissements sur les travées du RDPI et du groupe INDEP)

M. Jean-Luc Fichet .  - (Applaudissements sur les travées du groupe SER) L'intitulé de la proposition de loi a été complété par notre rapporteur, dont je salue le travail. Ce texte fait suite au licenciement scandaleux par P&O Ferries, battant pavillon chypriote, de 786 marins anglais, sans consultation syndicale, pour les remplacer par une main-d'oeuvre à bas coût et sans respect du droit du travail et du salaire minimum britanniques.

Le 5 novembre 2022 à Saint-Malo, les acteurs français de la liaison transmanche et les élus ont lancé un appel contre le dumping social, relayé par les parlementaires bretons.

La Manche est la zone de transport maritime la plus dense d'Europe, avec l'équivalent d'un camion toutes les cinq secondes, un navire entrant et sortant toutes les trois minutes, et 91 000 personnes traversant quotidiennement. La bonne nouvelle, c'est que la volonté de légiférer est partagée des deux côtés de la Manche.

Le Brexit a permis ces licenciements scandaleux. Le texte protégera tous les marins, peu importe le pavillon, sur les lignes définies par décret. Il prévoit un salaire minimum et un repos équivalent à la durée d'embarquement et luttera aussi contre les pollutions marines. Nous serons attentifs à la rédaction des décrets.

Cette proposition de loi est contrainte, car elle doit respecter la Constitution et le droit de l'Union européenne, notamment du point de vue de la proportionnalité des sanctions.

De plus, ne brouillons pas le message avec des mesures sans lien avec l'objet du texte. Il y a des formes d'esclavage moderne.

Autre disposition à laquelle le groupe SER est favorable, l'alignement des sanctions pénales vis-à-vis des certificats d'aptitude médicale étrangers non conformes. L'adoption de l'amendement de la rapporteure étend cette mesure aux gens de mer autres que les marins.

Favorables à cette proposition de loi, nous serons vigilants sur les décrets, instruits que nous sommes par la propension du Gouvernement à passer en force. Nous le serons aussi sur l'adoption des textes britanniques : une loi a été adoptée, mais les textes réglementaires sont en attente.

Monsieur le ministre, comment le Gouvernement français promouvra-t-il cette législation ?

Le groupe SER votera la proposition de loi. (M. Joël Bigot et Mme Nadège Havet applaudissent.)

Mme Cathy Apourceau-Poly .  - J'ai une pensée pour les 78 personnes qui ont trouvé la mort et pour les centaines de disparus au large du Péloponnèse, la semaine dernière. Je pense aussi à tous les migrants qui laissent leur vie chaque année dans la Manche.

La proposition de loi fixe des normes minimales pour les marins du transmanche, pour lutter contre les compagnies qui tirent les droits sociaux vers le bas, ce qui affecte nos compagnies au départ de la Bretagne, de Normandie, des Hauts-de-France et du port sec de Calais-Eurotunnel. Ce dumping massif s'est fait sous l'égide de l'Union européenne, la concurrence libre et non faussée ayant brisé bien des normes.

Les compagnies ont cassé les prix et les droits sociaux, adoptant le pavillon chypriote, pour s'imposer sur le cabotage transmanche. Le point de départ est le licenciement par visioconférence des marins de la P&O Ferries, remplacés par des équipages payés 6 dollars de l'heure et qui passent jusqu'à 17 semaines consécutives à bord pour 82 heures de travail hebdomadaires, sans prise en compte des repos compensateurs ni des congés payés.

Dès 2014, dans son rapport Le droit en soute : le dumping social dans les transports européens, Éric Bocquet recommandait d'appliquer le droit du pays du port.

En janvier dernier, les députés Jumel et Lecoq ont déposé une proposition de loi qui allait plus loin que celle que nous examinons. Cette dernière représente néanmoins un progrès. Elle prévoit notamment un salaire minimum équivalent au Smic et un temps de repos équivalent au temps en mer. Toutefois, nous restons au milieu du gué, la proposition de loi ne prenant pas en compte le rythme de travail.

Le groupe CRCE votera cette proposition de loi, car il y a urgence. Elle ne réglera pas tout, mais nous la prenons comme un premier pas et demandons, monsieur le ministre, qu'un travail soit mené contre le dumping social. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE ; M. Joël Bigot et Mme Mélanie Vogel applaudissent également.)

M. Jean-Marie Vanlerenberghe .  - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) La Manche est l'une des mers les plus fréquentées du monde. Elle est au coeur de la relation franco-britannique. Le transport de passagers et le fret y sont importants.

Jusqu'à présent, un équilibre entre compagnies françaises et britanniques garantissait des conditions de travail décentes pour les travailleurs, et la sécurité des passagers. Au printemps 2021, les choses ont changé lorsque le transporteur irlandais Irish Ferries a lancé des liaisons low cost sous pavillon chypriote. P&O Ferries a, de son côté, remplacé près de 800 marins par des intérimaires sous-payés, dont une partie étaient colombiens.

Cette concurrence déloyale nuit à la compétitivité des compagnies françaises, mais également aux conditions de travail des gens de mer, multipliant les risques d'accidents et de catastrophe écologique. Le droit en vigueur, insuffisant, le permet par l'application du droit du travail, moins protecteur, du pavillon.

La proposition de loi fait écho à un texte similaire adopté par le Parlement britannique et promulgué le 23 mars. La coordination des efforts des deux pays est nécessaire, pour appliquer les garanties sociales françaises et britanniques aux salariés des compagnies.

Je remercie Catherine Procaccia et Nadège Havet d'avoir éclairci et enrichi la proposition de loi. Ainsi, la sécurité et la pollution marine seront mieux prises en compte pour déterminer la durée d'embarquement des marins. Tous les gens de mer devront avoir un certificat médical valide.

Le groupe UC votera la proposition de loi, qui rétablira un juste équilibre. Les entreprises ne sauraient dicter le droit du travail aux États.

Reste à déterminer le cadre d'application de la loi, notamment les lignes concernées : le texte prévoit un décret en Conseil d'État. Monsieur le ministre, le critère de fréquence de toucher pourrait être aligné sur ce que prévoit le Royaume-Uni : 120 touchers par an.

Le texte doit s'appliquer en priorité, avec discernement, sur le transmanche.

Enfin, il faudra préciser lequel des salaires minimums français ou britannique s'appliquera. La différence est faible, mais il convient d'éviter l'incertitude et l'optimisation.

Le groupe UC votera ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe UC ; Mme Colette Mélot applaudit également.)

M. Christian Bilhac .  - (Applaudissements sur les travées du RDSE) Ce texte répond à la dégradation des conditions de travail embarquées sur le transmanche et à la concurrence déloyale installée par des armateurs étrangers. Il prévoit un double régime de sanctions administratives et pénales, en s'appuyant sur le mécanisme méconnu des lois de police.

Le droit du travail se limite à une simple recommandation de l'organisation internationale du travail (OIT) de fixer à 658 dollars le salaire minimum des gens de mer.

En 2021, l'arrivée d'Irish Ferries sur le marché a provoqué un séisme. La compagnie a embauché à moindre coût ; ses concurrents se sont alignés. La société P&O Ferries, passée sous pavillon chypriote, a licencié 786 salariés pour embaucher des marins principalement philippins dans des conditions moins-disantes : salaire inférieur de 60 % aux salaires français, coûts de production inférieurs de 35 %, durée d'embarquement largement supérieure au temps de repos.

Le droit européen nous autorise à voter des lois de police nationale. L'État côtier peut alors refuser à un bateau contrevenant l'accès à ses eaux. La loi de police est une disposition impérative, justifiée par la sauvegarde des intérêts publics, notamment sociaux et économiques, du pays.

Cette proposition de loi prévoit un salaire minimum et une parité entre temps de repos à terre et à bord. Un décret en Conseil d'État devra déterminer les lignes concernées et entrer en vigueur avant le 1er janvier 2024.

L'interdiction d'accoster dans un port français à la troisième violation de la loi a été abandonnée par la commission des affaires sociales. Je m'interrogeais sur le caractère dissuasif des amendes prévues. Le RDSE a proposé le rétablissement des articles 1er bis et 1er ter. Il faut sanctionner les actions contraires au droit social, mais aussi celles qui mettent en danger la sécurité maritime. Nous devons refuser les pratiques déloyales partout dans les eaux françaises et préserver le pavillon français. Le RDSE votera ce texte protecteur des droits des gens de mer. (Applaudissements sur les travées du RDSE ; Mme Colette Mélot applaudit également.)

Mme Agnès Canayer .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) La Manche est hyperfréquentée, avec 17 millions de voyageurs. Mais le Brexit a ravivé la frontière franco-britannique, et depuis près de deux ans, rien ne va plus. L'exemple le plus frappant du dumping social à l'oeuvre aura été le licenciement de près de 800 marins de P&O Ferries par visioconférence.

Le droit international prévoit un salaire minimum de 658 dollars américains. Les compagnies visées utilisent un modèle social moins-disant : jusqu'à 80 % de différence de charges salariales au détriment des compagnies françaises.

La situation actuelle est inacceptable. Nos armateurs sont inquiets, notamment Brittany Ferries, qui ne peut rivaliser. Le trafic transmanche est une préoccupation du département de la Seine-Maritime, qui a soutenu la liaison Dieppe-Newhaven, aujourd'hui déléguée à DFDS. Mais l'équilibre financier précaire a été mis à mal par la crise sanitaire. Il a été décidé de rembourser l'intégralité des cotisations salariales des ferries battant pavillon français. Or la gestion en délégation de service public (DSP), renouvelée, de la ligne Dieppe-Newhaven exclut DFDS de ces aides. Je regrette que cette différence de traitement ne soit pas abordée dans la proposition de loi.

La Manche est un espace vital. Tout ce qui s'y passe intéresse la France. Je salue le travail de la rapporteure Catherine Procaccia, pour permettre une rémunération et un temps de repos acceptables. Le groupe Les Républicains votera en faveur de cette loi. Nos marins méritent de bien gagner leur vie pour un travail bien fait. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicain; Mme Cathy Apourceau-Poly et M. Yves Détraigne applaudissent également.)

Mme Colette Mélot .  - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) Près de 800 personnes licenciées sans préavis par P&O Ferries en mars 2022 et des familles en difficulté : voilà le résultat du dumping social dans le transmanche.

Cette pratique est possible car les armateurs peuvent choisir les conditions sociales applicables via leur pavillon de rattachement.

Certaines compagnies ne se privent pas de cette opportunité ; trois d'entre elles ont établi leur pavillon à Chypre ou aux Bahamas. Les salariés souffrent de faibles rémunérations et d'un temps d'embarquement bien supérieur au temps de repos. Cela entraîne des risques en matière de sécurité.

Avec ce texte, il est proposé de recourir à une loi de police, seul outil permettant de faire appliquer des règles sociales à des compagnies sous pavillon étranger. Il faut veiller à respecter le critère de proportionnalité à l'objectif poursuivi, condition nécessaire au recours à une loi de police. Ainsi nous éviterons un risque d'inconstitutionnalité.

L'une des principales obligations proposées est le versement d'un salaire minimum, l'autre est le respect d'un temps de repos à terre au moins équivalent au temps d'embarquement.

Nous saluons aussi l'extension à l'ensemble des gens de mer des obligations relatives au certificat médical valide.

Demain, ce dispositif concernera davantage de façades maritimes, avec le développement de l'éolien en mer. Nous entendons les arguments ayant conduit à la suppression des dispositifs de sanction qui ne concernaient pas uniquement le transmanche. Élargir la portée d'un texte n'a rien d'inédit, nous pourrions très bien en étendre les mesures à toutes les façades maritimes françaises. Le groupe INDEP partage l'état d'esprit de ce texte et le votera. (Applaudissements sur les travées du groupe UC et du RDPI)

M. Jean-Michel Houllegatte .  - (Applaudissements sur les travées du groupe SER) La décision de P&O Ferries de licencier 786 marins britanniques pour les remplacer par des salariés venant de pays à bas coût de main-d'oeuvre a provoqué un avis de tempête sur le transmanche. Ce n'est pas le premier coup de tabac : la fin du duty free avait déjà obligé le secteur à revoir son modèle économique, le tunnel sous la manche l'avait fait douter de sa pertinence, la convention internationale pour la prévention de la pollution par les navires (Marpol) sur le soufre et les objectifs de réduction du CO2 lui ont fait revoir la motorisation des navires. Puis sont venus la crise covid et le Brexit, qui ont complètement reconfiguré les échanges. Touché, mais pas coulé.

Les licenciements de P&O Ferries s'assimilent à des actes de piraterie. La libre concurrence peut être faussée par le dumping social et environnemental.

Nous nous félicitions de la taxe carbone instaurée aux frontières de l'Union afin de rétablir un équilibre environnemental dans les échanges. Cette proposition de loi contre le dumping représente un marqueur : promouvoir un modèle européen respectueux de son modèle social, qui apporte une protection statutaire à ses salariés. Ne l'oublions pas : la directive Travailleurs détachés avait oublié les gens de mer.

En réglementant le temps de repos, cette proposition de loi apporte aussi une garantie en termes de sécurité maritime. La Manche est fréquentée par de très nombreux navires transportant parfois des matières dangereuses. Les flux en Manche sont divers : pêche, plaisance, extraction de granulats, pose de câbles, exploitations offshore sont autant d'usages de la mer. C'est aussi sous ce prisme de la sécurité qu'il convient d'examiner ce texte. Le SER y donnera une issue favorable en veillant à ce que l'élargissement de son périmètre ne retarde pas son application. Il y a urgence à agir. (Applaudissements sur les travées des groupes SER et CRCE ; M. Bernard Buis applaudit également.)

M. Didier Mandelli .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Président du groupe d'études Mer et littoral et rapporteur du texte Accélération des énergies renouvelables, je suis heureux d'aborder avec vous la concurrence déloyale dans le trafic de passagers transmanche.

La marine française est confrontée au défi de la compétitivité. Les mesures prises, à l'instar du Net wage, ne suffiront pas à lutter contre le dumping social observé sur le trafic transmanche. En 2021, Irish Ferries entrait sur le marché. En mars 2002, P&O Ferries licenciait massivement des employés britanniques, avec effet immédiat, pour les remplacer par des salariés à des conditions moins-disantes. Pour être légales, ces n'en sont pas moins préjudiciables : le risque est une moindre qualité de service, mais surtout des problèmes de sécurité dans l'un des détroits les plus dangereux du monde.

Les autres compagnies britanniques et françaises, plus respectueuses des droits des gens de mer, sont fragilisées. Il faut préserver le pavillon français et l'emploi maritime. Les Britanniques ont adopté un salaire minimum. Il faut une coopération entre nos pays. Nous aurions pu craindre un report vers la Belgique par exemple, mais cela n'a pas été le cas.

Il est de notre responsabilité collective d'éviter une guerre des prix. Le texte qui nous est soumis va dans la bonne direction. Je remercie Catherine Procaccia et Nadège Havet pour leur travail. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et au banc des commissions ; M. Yves Détraigne applaudit également.)

M. Pascal Allizard .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) En novembre dernier, certains d'entre nous étaient à Saint-Malo pour traiter de ce sujet. La maritimisation de l'économie est devenue une réalité sur les principales routes commerciales. Un bilan s'impose. Je pense aux conséquences environnementales du développement de ce trafic maritime avec la décarbonation et la lutte contre le dégazage sauvage.

Les conséquences sont également sociales, en raison d'une compétition acharnée. De nombreux gens de mer ont été recrutés dans des conditions peu avantageuses avec des rythmes de travail difficiles, en raison d'un droit européen peu exigeant. Les exigences appliquées aux compagnies battant pavillon étranger sont très faibles par rapport à celles qui battent pavillon français.

Les équipages de ces compagnies étrangères sont internationaux, avec des effectifs réduits : cela autorise des billets à prix très inférieurs. Les conditions sont précaires. Les ports de Cherbourg, Caen- Ouistreham, Le Havre et Dieppe sont particulièrement concernés. Depuis l'achat du Pirée par les Chinois, les Européens redécouvrent que les ports sont des actifs stratégiques à préserver. Il faut renforcer nos ports français, déjà devancés par Rotterdam, Anvers ou Hambourg.

Avec des effectifs moins reposés, les risques sont grands en matière de sécurité de navigation. La coopération avec le Royaume-Uni est essentielle. J'avais été rapporteur du projet de loi relatif à l'accord franco-britannique de coopération sur la sûreté maritime et portuaire.

Si la proposition de loi est adoptée et mise en oeuvre rapidement, elle préservera nos intérêts et ceux des salariés employés sous pavillon français. Nous devons résister. L'ubérisation du transport maritime n'est pas une fatalité.

Défendons notre modèle ainsi que notre souveraineté. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; M. Yves Détraigne applaudit également.)

M. Hervé Berville, secrétaire d'État.  - Je vous remercie pour votre implication sur ce sujet très complexe, qui conjugue droit européen, droit de la mer, géographie et urgence. La commission a su apporter des clarifications, et un consensus s'est dégagé sur trois points. D'abord, l'urgence à agir : tout le secteur nous regarde, avec un dumping social qui s'accélère. Ensuite, l'enjeu de souveraineté : voyez l'exemple du Pirée, et l'ubérisation de l'économie maritime. Enfin, au-delà du transmanche, le besoin d'outils pour toutes les façades maritimes.

Discussion des articles

ARTICLE 1er

Mme Céline Brulin .  - Je regrette que la commission ait sorti du champ cet article les éléments sur le temps de travail, et le ratio entre temps passé à bord et à terre...

Mme Catherine Procaccia, rapporteur.  - Pas du tout !

Mme Céline Brulin.  - ... au prétexte que ces dispositions iraient contre le droit européen. Or si nous votons ce texte, c'est bien pour faire bouger ce droit européen.

Le temps d'embarquement doit être égal au temps de repos. Or les disparités sont énormes entre compagnies dans ce domaine. Nous nous appuyons sur le véhicule d'une loi de police, qui autorise des dispositions très fortes en matière de sécurité. On nous dit que tout cela sera dans un décret, mais nous souhaiterions des éclaircissements sur le contenu dudit décret.

M. Michel Canévet .  - La France est un grand pays maritime, et nous tenons bien entendu à ce qu'il le reste ! Nous disposons de grands opérateurs de transport maritime, comme Brittany Ferries, créé par des agriculteurs avec l'objectif de désenclaver le territoire. Mais cela ne peut se faire qu'à des conditions de concurrence non faussée avec les transporteurs étrangers.

Je suis heureux que les armateurs, réunis à Saint-Malo, aient réussi à appeler l'attention des parlementaires et des pouvoirs publics sur la nécessité d'agir. Je remercie tous ceux qui malgré les tempêtes, maintiennent le cap en bons capitaines. (Applaudissements sur les travées du groupe UC ; M. Christian Bilhac applaudit également.)

M. le président.  - Amendement n°3, présenté par le Gouvernement.

I.  -  Alinéa 3

Rédiger ainsi cet alinéa :

« Conditions d'établissement et règles sociales applicables aux lignes régulières entre la France et le Royaume-Uni, ou les îles anglo-normandes

II.  -  Alinéa 6, première phrase

Remplacer les mots :

touchant un port français

par les mots :

entre la France et le Royaume-Uni, ou les i?les anglo-normandes

M. Hervé Berville, secrétaire d'État.  - Il est souhaitable que les dispositions de l'article 1er ne visent que les liaisons transmanche.

Un consensus a émergé au cours de nos débats, et je prends l'engagement que le décret d'application visera clairement le transmanche. Je retire donc l'amendement.

L'amendement n°3 est retiré.

M. le président.  - Amendement n°25, présenté par M. Bacchi et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

I.  -  Alinéa 3

Compléter cet alinéa par les mots :

entre la France et le Royaume-Uni

II.  -  Alinéa 6

Après le mot :

internationales

insérer les mots :

entre la France et le Royaume-Uni,

M. Jérémy Bacchi.  - L'attente est très forte. À Marseille, le syndicat CGT des marins, qui sont en grève reconductible, m'a alerté contre l'extension des règles de l'État d'accueil aux liaisons en Méditerranée. La concurrence des armateurs entraîne une pression sur les droits sociaux. La France devrait imposer des pavillons cohérents avec les liaisons, avec des règles de réciprocité.

M. le président.  - Amendement n°18, présenté par M. Bacchi et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Alinéa 6, première phrase

1° Après le mot :

applicable

insérer le mot :

exclusivement

2° Compléter cette phrase par les mots :

entre la France et le Royaume-Uni

M. Jérémy Bacchi.  - Défendu.

Mme Catherine Procaccia, rapporteur.  - Le ministre ayant pris des engagements, retrait des amendements nos25 et 18.

M. Hervé Berville, secrétaire d'État.  - Même avis.

M. Jérémy Bacchi.  - Préserver un haut niveau de garanties sociales pour les marins est essentiel. L'application de la règle de l'État d'accueil entraînerait la fin du pavillon français du premier registre. Nous sommes donc satisfaits des intentions exprimées par le ministre.

Un accord de coopération entre la France et le Royaume-Uni reste plus que jamais d'actualité.

M. Hervé Berville, secrétaire d'État.  - Le but de ce texte, et celui de mon action, est de renforcer le pavillon français et la protection sociale de nos marins. Le ciblage explicite de la liaison transmanche sera dans le décret, c'est pourquoi j'ai retiré mon amendement.

M. Jérémy Bacchi.  - J'avais compris que l'amendement du Gouvernement excluant les autres façades maritimes était maintenu. S'il est retiré, nous maintenons les nôtres.

L'amendement n°25 n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°18.

M. le président.  - Amendement n°17, présenté par M. Bacchi et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

I.  -  Après l'alinéa 7

Insérer quatre alinéas ainsi rédigés :

« Chapitre ...

« Établissement

« Art. L. 5591-....  -  Tout armateur communautaire ou du Royaume-Uni peut constituer et gérer une entreprise maritime sur le territoire national afin d'y exploiter un ou plusieurs navires sur des services de cabotage maritime réguliers, à passagers, entre la France et le Royaume-Uni, et l'Irlande, dans les conditions prévues par la législation française pour ses propres ressortissants, sous réserve d'être en conformité avec la législation relative aux capitaux et aux paiements définie par le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, au titre de la libre circulation des personnes, des services et des capitaux dans le marché intérieur.

« Les navires effectuant ces liaisons et services maritimes de transport à passagers, au sens de la règlementation française, doivent être immatriculés au pavillon français de premier registre, conformément aux conditions définies par la législation française pour ses propres ressortissants. Le registre international français est exclu. »

II.  -  Alinéas 10 à 14

Rédiger ainsi ces alinéas :

« Art. L. 5592-1.  -  Les dispositions du présent chapitre s'appliquent aux contrats de travail de tous les salariés employés sur les navires des entreprises maritimes établies au Royaume-Uni ou en Irlande, effectuant des liaisons régulières à passagers avec la France, au sens de la règlementation française. 

« Les dispositions légales et les stipulations conventionnelles applicables aux salariés employés sur les navires mentionnés a? l'article L. 5591-1 sont celles applicables aux salariés employés par les entreprises de la même branche d'activité établies en France, pour :

« 1° La détermination du salaire minimum horaire et mensuel sur la base de 8 heures de travail par jour ;

« 2° La détermination et l'acquisition des jours minimums de repos et de congés.

« Les obligations mentionnées au premier alinéa ne s'appliquent que pour les périodes ou? les navires sont exploités sur les lignes régulières internationales mentionnées a? l'article L. 5591-1. »

M. Jérémy Bacchi.  - Plutôt que de recourir à une loi de police, la CGT propose d'imposer aux compagnies des pavillons en rapport avec les liaisons. Les compagnies de transport devraient être domiciliées dans les pays où elles opèrent. La libre prestation de service doit être encadrée. Le Gouvernement doit imposer à Bruxelles une dérogation aux règles de la directive Services ou obtenir une révision des règles en faveur d'un haut niveau de protection sociale.

M. le président.  - Amendement n°19 rectifié, présenté par Mme Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Alinéa 10

Après le mot :

horaire

insérer les mots : 

, le paiement du salaire, y compris les majorations pour les heures supplémentaires, ainsi que pour la durée du travail, les repos compensateurs, les jours fériés, les congés annuels payés et le travail de nuit des jeunes travailleurs

Mme Céline Brulin.  - Nous voulons élargir la prise en compte des heures supplémentaires, et améliorer les conditions salariales et de travail dans le trafic maritime. Les compagnies transmanche font parfois plusieurs rotations journalières - les manoeuvres sont nombreuses, le travail est long, la fatigue persistante, au détriment de la sécurité. Monsieur le ministre, pouvez-vous nous confirmer que le ratio entre temps à terre et temps à bord sera fixé dans le décret ?

Les 800 marins licenciés par P&O Ferries ont été invités à s'inscrire dans de nouvelles agences - l'une d'entre elles est domiciliée à Malte, à la même adresse que 320 autres sociétés... Et on leur demande de revoir leurs exigences à la baisse.

M. le président.  - Amendement n°21 rectifié, présenté par Mme Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Alinéa 10

Après le mot :

horaire

insérer les mots : 

et pour le paiement du salaire, y compris les majorations pour les heures supplémentaires

Mme Céline Brulin.  - Défendu.

M. le président.  - Amendement n°20 rectifié, présenté par Mme Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Alinéa 10

Après le mot :

horaire,

insérer les mots :

ainsi que pour la durée du travail, les repos compensateurs, les jours fériés, les congés annuels payés et le travail de nuit des jeunes travailleurs

Mme Cathy Apourceau-Poly.  - Défendu.

M. le président.  - Amendement n°5, présenté par Mmes M. Vogel et Poncet Monge, MM. Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco et MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé, Parigi et Salmon.

Alinéa 10

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Pour la détermination des indemnités de congés, les articles L. 3141-24 à L. 3141-29 du code de travail et pour la détermination des indemnités compensatrices de congés, l'article L. 3141-28 du même code sont applicables aux salariés employés sur les navires mentionnés à l'article L. 5591-1 du présent code.

Mme Mélanie Vogel.  - Nous souhaitons élargir le socle de protection sociale garanti aux congés payés. C'est un droit fondamental ; les temps de repos ne suffisent pas.

M. le président.  - Amendement n°26 rectifié, présenté par Mme Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Alinéa 12

Rédiger ainsi le début de cet alinéa :

« Art. L. 5592-2.  -  Dans l'intérêt de la sécurité de la navigation et de la lutte contre les pollutions marines, (le reste sans changement)

Mme Cathy Apourceau-Poly.  - Voici un amendement d'appel. Nous ne comprenons pas le renvoi à un décret en Conseil d'État de l'égalité entre durée de repos à terre et durée d'embarquement ; mais nous y souscrivons si nous sommes assurés que les objectifs de sécurité de la navigation et de la lutte contre la pollution marine sous-tendent bien la loi de police.

Mme Catherine Procaccia, rapporteur.  - L'amendement n°17 rectifié crée deux régimes distincts de liaison. Aux armateurs français, il impose le pavillon français et le droit du travail de notre pays, et aux opérateurs irlandais et britanniques, il impose le Smic et des règles de repos et de congés payés. C'est contraire au droit européen et au droit international maritime. Avis défavorable.

Sur le fond, nous comprenons les propositions portées par les nos19 rectifié, 21 rectifié, 20 rectifié et 5, mais ils vont bien au-delà de la lutte contre le dumping social et de la défense des intérêts nationaux. Ils seront difficilement applicables aux contrats étrangers et nous mettent en porte-à-faux avec le droit européen. Avis défavorable.

L'amendement n°26 rectifié revient sur la position de la commission, qui préfère à l'affichage d'objectifs sans impact normatif une durée maximale d'embarquement fixée dans le décret. L'amendement est satisfait. Retrait ou avis défavorable.

M. Hervé Berville, secrétaire d'État.  - Avis défavorable aux six amendements, non sur le fond, mais pour des raisons d'opérationnalité.

Le texte de la commission mentionne bien l'égalité entre temps de travail et temps de repos. Ce qui a été supprimé, c'est la justification. L'essentiel, c'est que le dispositif existe - nous sommes le premier pays européen à agir ainsi.

Salaire minimum équivalent au Royaume-Uni et en France, temps égal en mer et à terre, décret présenté au Conseil supérieur de la marine marchande : tout cela sera dans le dur de la loi.

Monsieur Bacchi, imposer une nationalité de pavillon aux armateurs est contraire au droit européen. En revanche, vous avez raison de dire qu'il faut des conditions de travail alignées.

Mesdames Vogel, Apourceau-Poly et Brulin, concernant les heures supplémentaires et les congés payés, qui trop embrasse mal étreint, comme disait ma grand-mère : vos propositions ne seraient pas conformes au droit européen.

L'amendement n°17 n'est pas adopté, non plus que les amendements nos19 rectifié, 21 rectifié, 20 rectifié, 5 et 26 rectifié.

M. le président.  - Amendement n°8, présenté par Mmes M. Vogel et Poncet Monge, MM. Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco et MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé, Parigi et Salmon.

Alinéa 17

1° Remplacer les mots :

ainsi que les langues dans lesquelles ces documents doivent être disponibles sont fixées

par les mots :

est fixée

2° Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Les documents que l'employeur a l'obligation de mettre à disposition sont établis dans plusieurs langues comprenant notamment le français et l'anglais. Le non-respect de cette obligation est punie d'une sanction dont les modalités sont définies par décret.

Mme Mélanie Vogel.  - Les documents obligatoires destinés aux équipages doivent être au moins disponibles en français et en anglais.

On a beaucoup parlé des salariés de P&O Ferries licenciés par vidéoconférence ; on a moins dit que ces personnes venaient majoritairement de Colombie, et qu'ils ne comprendront pas le français.

Mme Catherine Procaccia, rapporteur.  - Il semble difficile de déterminer par décret un minimum de deux langues. De plus, le terme « notamment » est traditionnellement proscrit au Sénat, car trop imprécis. Enfin, un décret ne peut définir un régime de sanction. Avis défavorable.

M. Hervé Berville, secrétaire d'État.  - Je comprends l'intention, mais avis défavorable. Je m'engage à ce que les documents transmis soient compréhensibles par les équipages, qui comptent souvent quatre à cinq nationalités, avec une attention particulière pour le français et l'anglais. Il y va de la sécurité.

L'amendement n°8 est retiré.

M. le président.  - Amendement n°9, présenté par Mmes M. Vogel et Poncet Monge, MM. Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco et MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé, Parigi et Salmon.

Après les alinéas 23 et 26

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Le fait de porter atteinte a? l'exercice re?gulier des fonctions et missions des agents charge?s des contro?les est puni d'un emprisonnement de six mois et d'une amende de 3 750 euros.

Mme Mélanie Vogel.  - Faire obstacle au contrôle de la durée de repos et du salaire minimal doit être puni. Aujourd'hui, les sanctions ne sont prévues qu'en cas d'irrégularités constatées lors du contrôle : c'est absurde. Il faut dissuader les armateurs de s'opposer au contrôle.

M. le président.  - Sous-amendement n°35 à l'amendement n°9 de Mme M. Vogel, présenté par le Gouvernement.

Amendement n° 9, alinéa 3

1° Après le mot :

contrôles

insérer les mots :

mentionnés à l'article L. 5595-1

2° Remplacer les mots :

de six mois

par les mots :

d'un an

et le nombre :

3 750

par le nombre :

37 500

M. Hervé Berville, secrétaire d'État.  - Avis favorable à l'amendement n°9, sous réserve de l'adoption de ce sous-amendement. Je vous remercie d'avoir repéré cette faille. En réalité, l'opposition au contrôle est déjà plus sévèrement punie, mais la disposition ne s'applique pas aux agents des contrôles maritimes. Cet amendement y remédie.

Mme Catherine Procaccia, rapporteur.  - Le code du travail punit déjà le fait de faire obstacle au contrôle d'un inspecteur du travail de 37 500 euros d'amende et d'un an d'emprisonnement.

De plus, le code des transports donne déjà à l'État du port des prérogatives en matière de contrôle des navires étrangers ; le principe du libre accès à bord y est garanti.

Troisièmement, la nature de l'infraction visée est imprécise : la notion « d'exercice régulier » va bien au-delà de l'obstacle au contrôle.

Enfin, la commission estime qu'alourdir les sanctions déjà prévues mettrait en cause la proportionnalité de la loi de police. Même s'il restreint le champ de l'amendement aux seuls agents des affaires maritimes, le sous-amendement ne lève pas ces réserves. Avis défavorable.

Le sous-amendement n°35 n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°9.

M. le président.  - Amendement n°27 rectifié, présenté par Mme Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Après l'alinéa 23

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« À la troisième infraction constatée, une interdiction d'accoster dans un port français est prononcée à l'encontre des navires appartenant à la compagnie maritime en infraction. Un décret pris en Conseil d'État précise la durée de l'interdiction.

Mme Céline Brulin.  - Nous voulons rétablir le durcissement des sanctions applicables en cas de troisième manquement.

Le montant de la sanction actuelle nous semble insuffisant pour prévenir les comportements de voyou. Nous entendons l'argument sur la fragilité juridique quant à l'interdiction d'accoster, mais l'absence d'équivalent pénal s'explique par la spécificité du droit maritime.

À la suite des affaires de l'Amoco Cadiz et de l'Erika, le principe avait été établi que la sanction des manquements à la réglementation devait être plus coûteuse que le respect de celle-ci.

Mme Catherine Procaccia, rapporteur.  - Avis défavorable, car l'amendement méconnaît les principes constitutionnels d'individualisation des peines et de légalité des délits et des peines. Il faut une loi applicable.

M. Hervé Berville, secrétaire d'État.  - Même avis.

L'amendement n°27 rectifié n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°10, présenté par Mmes M. Vogel et Poncet Monge, MM. Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco et MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé, Parigi et Salmon.

Alinéas 29 à 31

Remplacer ces alinéas par un alinéa ainsi rédigé :

« Art. L. 5595-1.  -  Les infractions au pre?sent titre sont constate?es par les officiers et les fonctionnaires affecte?s dans les services exerc?ant les missions de contro?le de l'application de la le?gislation du travail dans le domaine du transport maritime, conforme?ment aux articles L. 5548-1 a? L. 5548-5.

Mme Mélanie Vogel.  - L'inspection du travail doit être seule autorisée à constater les infractions au salaire minimum et au temps de repos. Or dans la rédaction de la commission, le contrôle serait effectué par des personnes qui ne sont pas spécifiquement formées au droit du travail.

Mme Catherine Procaccia, rapporteur.  - Les effectifs dévolus au contrôle sont faibles, et les cas sont complexes : contrats étrangers, embarquements sous des conditions différentes... Utilisons toutes les expertises. Les inspections du travail et des affaires maritimes seront mobilisées pour contrôler les dispositions de la loi.

Votre amendement est satisfait : ce qui compte, c'est qu'il y ait des contrôles. C'est multiplier les sanctions sans avoir les effectifs pour contrôler qui pose problème.

M. Hervé Berville, secrétaire d'État.  - Devant l'augmentation du trafic maritime, nous devons utiliser toutes les forces en présence : il faut une vraie task force pour le contrôle des navires, et nous élargissons donc cette faculté aux agents des affaires maritimes. Nous allons maritimiser les spécialistes du droit du travail.

L'amendement n°10 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°6, présenté par Mmes M. Vogel et Poncet Monge, MM. Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco et MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé, Parigi et Salmon.

Alinéa 38

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Lorsqu'une amende est prononcée en application du 1° de l'article L. 5596-1, l'autorité administrative informe par tout moyen les organisations syndicales représentatives de la marine marchande et du personnel portuaire.

Mme Mélanie Vogel.  - Lorsqu'une amende est prononcée, l'autorité administrative doit en informer les organisations syndicales représentatives de la marine marchande et du personnel portuaire. En commission, on m'a indiqué que la liste de ces organisations n'était pas claire : quelles organisations, quels pays... Elle me semble au contraire assez précise.

Mme Catherine Procaccia, rapporteur.  - L'avis reste défavorable : à quelles organisations syndicales s'adresser lorsque le navire bat pavillon chypriote et que ses marins sont roumains ? Dans quelle langue ?

M. Hervé Berville, secrétaire d'État.  - Faisons connaître ceux qui sont en infraction. Une convention sera signée entre le ministère de la mer et le ministère du travail afin d'informer le Conseil supérieur de la marine marchande, où siègent les syndicats, du bilan des contrôles. Avis défavorable.

L'amendement n°6 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°4, présenté par le Gouvernement.

Alinéa 43

Après le mot :

écrit

insérer les mots :

l'employeur ou

L'amendement rédactionnel n°4, accepté par la commission, est adopté.

M. Jérémy Bacchi.  - Je regrette que l'amendement du Gouvernement n'ait pas été maintenu : il aurait évité des incompréhensions. Des marins, sur la Méditerranée, viennent de m'annoncer qu'ils se mettront en grève reconductible, ce qui risque de perturber les départs en vacances. (Murmures à droite et au centre) C'est bien dommage. À titre personnel, je ne voterai pas cet article.

M. Hervé Berville, secrétaire d'État.  - Monsieur Bacchi, je vous remercie de votre engagement. Nous sommes clairs sur l'objectif. En l'espace de six mois, nous sommes passés de l'absence d'action politique à une proposition de loi que nous soutenons, et qui garantit la lutte contre le dumping social.

J'avais pris l'engagement d'obtenir un décret excluant le transmanche du RIF ; il est paru aujourd'hui : je tiens mes engagements.

Ce texte n'aura pas d'autres effets, et nous pourrons même être plus précis dans le décret d'application. Je prends l'engagement que sur les liaisons internationales, notamment envers le Maghreb, il n'y aura aucun changement. Nous maintiendrons les standards portés par les marins, les syndicats et les organisations patronales.

Ce texte de loi vise le dumping social dans le transmanche, véritable aberration, mais crée également des outils pour l'éolien en mer et les pratiques déloyales. J'ai tenu mes engagements sur le RIF, je les tiens sur le transmanche, et je les tiendrai sur la Méditerranée.

L'article 1er, modifié, est adopté.

ARTICLE 1er BIS (Supprimé)

M. le président.  - Amendement n°7 rectifié, présenté par Mmes M. Vogel et Poncet Monge, MM. Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco et MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé, Parigi et Salmon.

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

Le chapitre VI du titre VI du livre V de la cinquième partie du code des transports est complété par des articles L. 5566-... et L. 5566-... ainsi rédigés :

« Art. L. 5566-....  -  Est puni de 7 500 euros d'amende le fait pour l'armateur ou l'employeur de payer :

« 1° Des salaires inférieurs au salaire minimum de croissance prévu aux articles L. 3231-1 à L. 3231-12 du code du travail ;

« 2° Des rémunérations inférieures à la rémunération mensuelle minimale prévue à l'article L. 3232-1 du même code ;

« 3° Des salaires inférieurs à ceux fixés par la convention collective ou l'accord collectif étendu applicables aux navires battant pavillon français et exerçant dans la même activité.

« La récidive est punie de six mois d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende.

« Les infractions donnent lieu à autant d'amendes qu'il y a de salariés concernés.

« Art. L. 5566-....  -  Est puni de 7 500 euros d'amende le fait pour l'armateur ou l'employeur de méconnaître les stipulations conventionnelles relatives aux accessoires du salaire prévus par la convention collective ou l'accord collectif de travail étendu applicables aux navires battant pavillon français et exerçant dans la même activité.

« La récidive est punie de six mois d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende.

« Les infractions donnent lieu à autant d'amendes qu'il y a de salariés concernés. »

Mme Mélanie Vogel.  - Nous voulons rétablir l'article 1er bis, afin de sanctionner les armateurs ne respectant pas le salaire minimum.

La loi prévoit certes des sanctions, mais non dissuasives : 200 euros d'amende seulement. Quand on sait qu'Irish Ferries économise 60 % sur chaque trajet, il faut des amendes plus élevées.

Madame la rapporteure, vous avez dit craindre une fragilisation du texte, ces sanctions risquant d'être considérées comme non proportionnées.

Mais l'article 25 de la Convention de Montego Bay consacre le principe de l'État d'accueil, le règlement Rome I autorise des sanctions pour préserver l'intérêt national et la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) accepte le principe des sanctions depuis 1999.

M. le président.  - Amendement identique n°28 rectifié, présenté par MM. Guérini, Requier, Bilhac, Cabanel, Fialaire, Guiol et Roux.

M. Jean-Claude Requier.  - Défendu.

L'amendement identique n°30 est retiré.

M. le président.  - Amendement identique n°32, présenté par M. Canévet.

M. Michel Canévet.  - Défendu.

Mme Catherine Procaccia, rapporteur.  - La commission est défavorable au rétablissement d'un article qu'elle a supprimé. Nous n'avons pas voulu nier les risques existant pour les liaisons Corse-continent, mais ils ne sont pas de même nature. Un régime de sanction exorbitant du droit commun serait injustifié, et le droit européen n'est pas nécessairement ce que nous voudrions pour la France en la matière - je n'ai jamais été une fanatique de l'Europe... (Sourires sur les travées du groupe CRCE)

Monsieur le ministre a parlé du RIF : certes, l'Italie permet une utilisation plus large de son pavillon. Mais la question doit être discutée avec nos voisins européens, et non dans le cadre de cette proposition de loi. Avis défavorable.

M. Hervé Berville, secrétaire d'État.  - Avis défavorable, même si je partage l'intention. Il serait étrange de ne pas étendre à d'autres façades maritimes les outils dont nous avons besoin pour réglementer les activités liées notamment à l'éolien en mer. Mais nous aurons l'occasion d'en rediscuter autour du rétablissement de l'article 1er ter.

Les amendements identiques nos28 rectifié et 32 sont retirés.

L'amendement n°7 rectifié n'est pas adopté.

L'article 1er bis demeure supprimé.

ARTICLE 1er TER (Supprimé)

M. le président.  - Amendement n°29 rectifié, présenté par MM. Guérini, Requier, Bilhac, Cabanel, Fialaire, Guiol et Roux.

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

Le titre VI du livre V de la cinquième partie du code des transports est complété par un chapitre ... ainsi rédigé :

« Chapitre ...

« Sanctions administratives

« Art. L. 5568-1.  -  L'autorité administrative compétente peut, sur le rapport des agents de contrôle de l'inspection du travail mentionnés à l'article L. 8112-1 du code du travail, sous réserve de l'absence de poursuites pénales, soit adresser à l'employeur ou à l'armateur un avertissement, soit prononcer à l'encontre de l'employeur ou de l'armateur une amende en cas de manquement :

« 1° Aux règles relatives aux dispositions légales et aux stipulations conventionnelles applicables aux salariés employés par les entreprises de la même branche d'activité établies en France pour les matières mentionnées aux 3°, 4°, 6°et 8° de l'article L. 5562-1 ;

« 2° Aux règles relatives à la protection sociale mentionnée à l'article L. 5563-1 ;

« 3° À l'article L. 5562-2 relatif au contrat conclu entre l'armateur, l'employeur et chacun des salariés relevant des gens de mer ;

« 4° Aux règles relatives à la déclaration des accidents survenus à bord, mentionnées à l'article L. 5563-2 ;

« 5° À la présentation aux agents de contrôle de l'inspection du travail des documents sollicités en application de l'article L. 5565-2 ou de ne pas les présenter en français.

« Art. L. 5568-1-1.  -  L'autorité administrative compétente peut, sur le rapport des officiers et des fonctionnaires affectés dans les services exerçant des missions de contrôle dans le domaine des affaires maritimes sous l'autorité ou à la disposition du ministre chargé de la mer et des personnes mentionnées aux 1° à 3°, 8° et 10° de l'article L. 5222-1, sous réserve de l'absence de poursuites pénales, soit adresser à l'employeur ou à l'armateur un avertissement, soit prononcer à l'encontre de l'employeur ou de l'armateur une amende en cas de manquement : 

« 1° Aux règles relatives aux personnels désignés pour aider les passagers en situation d'urgence mentionnées à l'article L. 5564-1 ;

« 2° À la présentation aux officiers et des fonctionnaires affectés dans les services exerçant des missions de contrôle dans le domaine des affaires maritimes sous l'autorité ou à la disposition du ministre chargé de la mer et des personnes mentionnées aux 1° à 3°, 8° et 10° de l'article L. 5222-1 des documents sollicités en application de l'article L. 5565-2 ou de ne pas les présenter en français.

« Art. L. 5568-2.  -  Lorsqu'une amende est prononcée en application des articles L. 5568-1 et L. 5568-1-1, l'autorité compétente informe par tout moyen le procureur de la République des suites données au rapport des agents mentionnés aux articles L. 5568-1 et L. 5568-1-1.

« Art. L. 5568-3.  -  Le montant maximal de l'amende prononcée en application des articles L. 5568-1 à L. 5568-1-1 est de 4 000 euros et peut être appliqué autant de fois qu'il y a de manquements constatés au titre du 5° de l'article L. 5568-1 et du 2° de l'article L. 5568-1-1 ou qu'il y a de travailleurs concernés au titre des 1° à 4° de l'article L. 5568-1 et 2° de l'article L. 5568-1-1.

« Le plafond de l'amende est porté au double en cas de nouveau manquement constaté dans un délai de deux ans à compter de la notification de l'amende concernant un précédent manquement de même nature.

« Il est majoré de 50 % en cas de nouveau manquement constaté dans un délai d'un an à compter de la notification d'un avertissement concernant un précédent manquement de même nature.

« Art. L. 5568-4.  -  Pour déterminer si elle prononce un avertissement ou une amende prévue aux articles L. 5568-1 et L. 5568-1-1 et, le cas échéant, pour fixer le montant de l'amende, l'autorité compétente prend en compte les circonstances et la gravité du manquement, le comportement de son auteur ainsi que ses ressources et ses charges.

« Art. L. 5568-5.  -  Avant toute décision, l'autorité compétente informe par écrit l'employeur ou l'armateur de la sanction envisagée, en portant à sa connaissance le manquement retenu à son encontre et en l'invitant à présenter ses observations dans un délai d'un mois.

« À l'expiration de ce délai, l'autorité compétente peut, par décision motivée, prononcer l'amende prévue aux articles L. 5568-1 et L. 5568-1-1 et émettre le titre de perception correspondant.

« Art. L. 5568-6.  -  La décision d'infliger une amende administrative ne peut être prise plus de deux ans après le jour où le manquement a été commis.

« Art. L. 5568-7.  -  La décision d'infliger une amende administrative ne peut pas faire l'objet d'un recours hiérarchique.

« Art L. 5568-8.  -  L'amende prononcée en application des articles L. 5568-1 et L. 5568-1-1 est recouvrée selon les modalités prévues pour les créances de l'État étrangères à l'impôt et au domaine. »

M. Jean-Claude Requier.  - Nous voulons des sanctions administratives en cas de non-respect des normes sociales françaises dans nos eaux territoriales, afin de lutter contre le dumping, dans le trafic transmanche, l'éolien et le transport entre la Corse et le continent.

M. le président.  - Amendement identique n°31, présenté par M. Hassani et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants.

M. Bernard Buis.  - Il faut des sanctions en cas de manquement concernant la durée du travail, le paiement des heures supplémentaires, la protection sociale, la déclaration des accidents et les personnels désignés pour aider les passagers en cas d'urgence.

M. le président.  - Amendement identique n°33, présenté par M. Canévet.

M. Michel Canévet.  - Défendu.

Mme Catherine Procaccia, rapporteur.  - Nous n'aimons guère rétablir des amendements supprimés en commission, mais vous proposez un texte mieux écrit que celui voté par l'Assemblée... (Sourires) La présidente Deroche et moi n'avons pas voulu réunir la commission en urgence ; l'avis de la commission était défavorable, mais à la lumière de ces éléments, je donne un avis de sagesse.

Mme Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales.  - Sagesse favorable...

M. Hervé Berville, secrétaire d'État.  - Avis favorable. Je vous remercie d'avoir déposé ces amendements, et salue l'ouverture de Mme la rapporteure. La loi doit être opérationnelle et dissuasive, ce qui est le cas des sanctions administratives.

Sur les moyens, je m'engage à y revenir lors de l'examen des lois budgétaires. Des marins nous écoutent : saisissons cette opportunité législative. Je remercie votre éminente institution d'accepter le rétablissement.

Mme Mélanie Vogel.  - Nous aurions aussi apprécié le rétablissement de l'article 1er bis, mais nous nous réjouissons de celui de l'article 1er ter. Paradoxalement, les sanctions administratives sont plus dissuasives encore, car elles s'appliquent rapidement. L'adoption de cet amendement rendra donc le texte plus efficace.

M. Jean-Luc Fichet.  - Nous voterons ces amendements. Notre préoccupation, depuis le début, c'est la compatibilité avec le droit européen. Compte tenu de l'urgence, cette loi doit être votée et appliquée rapidement.

Les amendements identiques nos29 rectifié, 31 et 33 sont adoptés et l'article 1er ter est rétabli.

L'article 2 est adopté.

ARTICLE 3 (Supprimé)

M. le président.  - Amendement n°23 rectifié, présenté par Mme Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

Dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur l'état des pratiques relatives au « dumping social » sur les lignes régulières de ferrys au sein de l'espace communautaire européen. 

Mme Cathy Apourceau-Poly.  - Je demande le rétablissement de cette demande de rapport introduite par l'Assemblée nationale, sur l'initiative de notre collègue Sébastien Jumel : une grande opacité règne, ce qui favorise les pratiques de dumping social. Nous n'en légiférerons que mieux, tout en protégeant notre économie maritime.

Mme Catherine Procaccia, rapporteur.  - Avis défavorable. Les rapports ne sont jamais remis. Vous auriez pu au moins, sans déjuger votre collègue député, rétablir l'article avec un délai plus long : six mois, c'est vraiment très court !

Croyez-en mon expérience personnelle : rapporteur sur le service minimum dans les transports, j'ai demandé un rapport en 2007 ; je l'ai obtenu en 2012...

M. Hervé Berville, secrétaire d'État.  - L'objectif me convainc, mais pas le chemin : six mois, c'est très ambitieux, et nous avons déjà accompli un énorme travail sur le dumping social dans le transmanche. Un groupe de travail sur la marine marchande, présidé par Jean-Marc Roué, y travaille. Je m'engage à ce que les sénateurs puissent participer à ces travaux, si vous le souhaitez.

Mme Cathy Apourceau-Poly.  - Nous acceptons votre belle proposition. Je suis certaine que vous ferez de même avec Sébastien Jumel. De ce fait, nous retirons cet amendement.

L'amendement n°23 rectifié est retiré.

L'article 3 demeure supprimé.

ARTICLE 4 (Supprimé)

M. le président.  - Amendement n°24 rectifié, présenté par Mme Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

Dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport recensant les besoins humains et financiers des services en charge de l'inspection du travail maritime pour assurer leurs missions, notamment dans la lutte contre le phénomène de « dumping social ».

Le rapport précise également les pistes d'amélioration de la formation des agents en charge de l'inspection du travail maritime en matière de droit du travail maritime.

Mme Céline Brulin.  - Mme la rapporteure, selon vos propres mots, plus que de nouvelles sanctions, nous avons besoin de renforcer le contrôle et d'appliquer les sanctions existantes.

C'est pour contourner l'article 40 que nous demandons des rapports. Monsieur le ministre, je ne doute pas que vous nous donniez rendez-vous aux prochains débats budgétaires. Un tel rapport vous donnerait des arguments, qui ne sont jamais de trop face à Bercy pour demander plus de moyens. Le Sénat, par conviction, ayant réintégré l'article 1er ter, je ne doute pas d'un même succès pour cet amendement.

Mme Catherine Procaccia, rapporteur.  - Avis défavorable.

M. Hervé Berville, secrétaire d'État.  - Avis défavorable.

L'amendement n°24 rectifié n'est pas adopté.

L'article 4 demeure supprimé.

INTITULÉ DE LA PROPOSITION DE LOI

M. le président.  - Amendement n°12, présenté par M. Hassani et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants.

Supprimer les mots :

sur le transmanche

M. Bernard Buis.  - Par cohérence avec l'amendement n°31, adopté, l'intitulé de la proposition de loi doit être modifié.

M. le président.  - Amendement identique n°34, présenté par M. Canévet.

M. Michel Canévet.  - La lutte contre le dumping s'entend sur l'ensemble du territoire national, pour refléter les travaux du Sénat.

M. le président.  - Amendement n°11, présenté par Mmes M. Vogel et Poncet Monge, MM. Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco et MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé, Parigi et Salmon.

Remplacer les mots :

sur le transmanche

par les mots :

du personnel des ferries internationaux

Mme Mélanie Vogel.  - C'est la même idée : la proposition de loi comporte des dispositions ne s'appliquant pas au seul transmanche.

Mme Catherine Procaccia, rapporteur.  - Nous avons déjà intégré la sécurité maritime à l'intitulé. Avis défavorable. Je rappelle l'intitulé retenu par la commission, qui mentionne le dumping dans le transmanche, mais aussi la sécurité maritime, ce qui indique bien que le périmètre est plus large.

M. Hervé Berville, secrétaire d'État.  - Le Gouvernement a retiré son amendement qui tendait à circonscrire explicitement le texte au transmanche.

Afin de calmer les inquiétudes de M. Bacchi, je propose aux auteurs des trois amendements de retirer leur amendement, afin que l'intitulé mentionne bien le transmanche. Toutes nos façades maritimes étant concernées par les enjeux de sécurité, nous conservons la mention indiquée par Mme la rapporteure. Nous voyons là combien le cheminement de ce texte au Sénat est important. Retrait.

M. Bernard Buis.  - Même si les explications de M. le ministre sont tarabiscotées, je retire mon amendement... (Sourires)

Les amendements nos12, 34 et 11 sont retirés.

Interventions sur l'ensemble

M. Jacques Fernique .  - Je salue ce texte, qui va dans le bon sens, tout en regrettant qu'il ne soit pas un projet de loi : une étude d'impact et un avis du Conseil d'État n'auraient pas été de trop. Ce texte manque d'ambition sur les sanctions pénales et sur les indemnités de congés. Il nous faudra encore évoquer la transition écologique.

Mme Céline Brulin .  - Cette proposition de loi est un pas dans la lutte contre le dumping social dans le transmanche, où certaines compagnies redoublent leur offensive, tirant le droit du travail vers les fonds marins, ce qui est douloureux pour une activité économique importante dans les Hauts-de-France, en Bretagne ou en Normandie, où je suis élue.

La proposition de loi sera utile, mais elle n'épuise pas le sujet. Monsieur le ministre, il serait bon que ce texte soit promulgué en même temps que le texte britannique qui entre en vigueur en janvier prochain : aurons-nous les mêmes délais ? Pourquoi ne pas avoir engagé la procédure accélérée, pourtant fréquente ?

M. Jean-Luc Fichet .  - Nous sommes satisfaits de ce texte. Nous revenons de loin : les conditions de travail des gens de mer sont souvent déplorables. La question de la convergence avec les législations britannique et européenne nous invite à la prudence : c'est pourquoi le groupe SER n'a pas voté certaines mesures, pour être sûr que le texte soit applicable au 1er janvier 2024, dans l'intérêt des marins. Nous souhaitons que cette proposition de loi soit votée à l'unanimité.

M. Bernard Buis .  - Je salue à mon tour cette proposition de loi qui est une réponse au licenciement brutal de 786 marins en mars 2022, qui nous avait tous choqués : je souhaite qu'elle aille à son terme au plus vite.

Mme Colette Mélot .  - Tout est bien qui finit bien. Les conditions de travail de tous les marins et gens de mer seront améliorées.

M. Pascal Allizard .  - Je salue le travail de la commission et de nos deux rapporteures : l'équilibre est subtil, jusqu'aux arbitrages de dernière minute. Monsieur le ministre, nous comptons sur vos services pour rendre le texte opérationnel. Au-delà du signal politique, il fallait un texte qui fonctionne, notamment au regard du droit européen, même s'il a fallu sacrifier quelques bonnes intentions.

J'étais à la réunion de travail de Saint-Malo : nous avons fait un pas décisif.

M. Jean-Marie Vanlerenberghe .  - Moi aussi, je salue le travail des rapporteures. Nous sommes tous conscients qu'il fallait lutter, dans le cadre du droit européen, contre le dumping social. Je me réjouis de l'accord trouvé.

Monsieur le ministre, vous avez su couper la poire en deux sur l'article 1er bis : c'est ce que je souhaiterais voir pour d'autres textes, au bénéfice de nos concitoyens.

Mme Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales .  - Je remercie Catherine Procaccia, dont c'est le dernier texte, pour son travail remarquable. (Applaudissements) Après avoir obtenu satisfaction au bout de neuf ans sur les mutuelles étudiantes, je savais qu'elle travaillerait avec détermination. J'espère une adoption conforme par l'Assemblée nationale. (Applaudissements)

À la demande du RDPI, l'ensemble du texte est mis aux voix par scrutin public.

M. le président. - Voici le résultat du scrutin n°310 :

Nombre de votants 343
Nombre de suffrages exprimés 342
Pour l'adoption 342
Contre     0

La proposition de loi est adoptée.

(Applaudissements)

M. Hervé Berville, secrétaire d'État.  - Je vous remercie pour cette unanimité, qui fait honneur à votre institution et à la tradition maritime française. Madame la rapporteure Procaccia, je vous remercie de votre travail. On dit souvent qu'il faut des civils pour faire des militaires : il fallait une personne issue d'un territoire non littoral pour améliorer ainsi la vie de nos marins.

Je remercie Mme la présidente de la commission des affaires sociales et l'ensemble des sénateurs s'étant impliqués.

L'attractivité du secteur maritime, fierté de notre pays, sera renforcée. La puissance maritime ne dépend pas du nombre de navires, mais de l'attention qu'on porte à ceux qui la font vivre. Madame Procaccia, vous serez toujours bienvenue en Bretagne pour constater les avancées. (Applaudissements)

La séance est suspendue quelques instants.

Industrie verte (Procédure accélérée - Suite)

M. le président.  - L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi relatif à l'industrie verte.

Discussion des articles (Suite)

ARTICLE 2 (Suite)

M. le président.  - Amendement n°74 rectifié bis, présenté par Mme Préville et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Après l'alinéa 26

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Le commissaire enquêteur doit avoir suivi une formation spécifique portant notamment sur la procédure d'enquête publique prévue à l'article L. 123-1 et de l'instruction de l'autorisation environnementale prévue aux articles L. 181-9 et L. 181-10, dans des conditions définies par arrêté.

Mme Angèle Préville.  - L'article 2 met le commissaire enquêteur au coeur du nouveau dispositif de consultation du public pour les procédures d'autorisation environnementale. Compte tenu du rôle majeur qui sera le sien, il convient de s'assurer de sa compétence et de sa neutralité. Nous proposons donc qu'il suive obligatoirement une formation spécifique, d'autant que le droit de l'environnement est particulièrement changeant.

M. Fabien Genet, rapporteur pour avis de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable.  - Les commissaires enquêteurs doivent déjà répondre à un certain nombre d'exigences, d'ordre réglementaire. En particulier, une commission départementale les auditionne pour s'assurer de leur compétence. Il n'est pas nécessaire d'aller au-delà. Avis défavorable.

M. Roland Lescure, ministre délégué chargé de l'industrie.  - Je souhaite exprimer, au nom du Gouvernement, ma solidarité aux personnes blessées dans l'explosion survenue non loin d'ici, dans le Ve arrondissement. Je témoigne aussi ma gratitude aux services de secours en cours d'intervention.

Madame la sénatrice, votre amendement est satisfait au niveau réglementaire. Le code de l'environnement prévoit une obligation de formation pour les commissaires enquêteurs. En cas d'absence de formation, la radiation du commissaire enquêteur peut être prononcée. Retrait, sinon avis défavorable.

L'amendement n°74 rectifié bis est retiré.

M. le président.  - Amendement n°75 rectifié bis, présenté par Mme Préville et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Après l'alinéa 26

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Dans un délai d'une semaine après sa désignation, le commissaire enquêteur indique au président du tribunal administratif les activités exercées au titre de ses fonctions précédentes ou en cours qui pourraient être jugées incompatibles avec les fonctions de commissaire enquêteur en application de l'article L. 123-5, et signe une déclaration sur l'honneur attestant qu'il n'a pas d'intérêt personnel au projet, plan ou programme. Le manquement à cette règle constitue un motif de radiation de la liste d'aptitude de commissaire enquêteur.

Mme Angèle Préville.  - Il faut également s'assurer que le commissaire enquêteur n'est pas en situation de conflit d'intérêts du fait de ses fonctions antérieures ou en cours. L'article L. 123-5 du code de l'environnement apporte un début de réponse, mais nous proposons d'aller plus loin. Le commissaire, pierre angulaire du dispositif de participation du public, devra remettre une déclaration sur l'honneur attestant qu'il n'a pas de conflit d'intérêts.

M. Fabien Genet, rapporteur pour avis.  - L'article R. 123-4 du code de l'environnement satisfait cet amendement. Retrait ou avis défavorable.

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - Même avis.

L'amendement n°75 rectifié bis est retiré.

M. le président.  - Amendement n°56 rectifié, présenté par MM. Sautarel, Burgoa et Cambon, Mme Belrhiti, M. Panunzi, Mme Dumont, M. Reichardt, Mmes Goy-Chavent, Bellurot, Estrosi Sassone et Ventalon, MM. Tabarot et E. Blanc, Mme Gruny, MM. Brisson, Lefèvre, Meurant, Klinger, Mouiller, Gueret, Charon, Belin, Laménie, Mandelli, Darnaud et Bascher, Mme F. Gerbaud, MM. C. Vial, Bouchet et de Nicolaÿ, Mmes Joseph et Gosselin et MM. B. Fournier, Piednoir et Rapin.

Alinéa 29, seconde phrase

Remplacer cette phrase par trois phrases ainsi rédigées :

La durée maximale de la phase d'examen et de consultation est de trois mois à compter de la date d'accusé de réception du dossier. Elle peut être portée à quatre mois sur décision motivée de l'autorité compétente. Lorsque l'avis de l'autorité environnementale est requis, celle-ci dispose d'un mois de plus que le délai de deux mois imparti pour rendre son avis.

M. Stéphane Sautarel.  - Une incertitude juridique entoure la durée maximale de la phase d'examen : il n'est pas suffisamment explicite qu'elle est comprise dans le délai maximal de trois mois. Cet amendement de clarification précise que le délai imparti à l'autorité environnementale, lorsque son avis est requis, est de deux mois.

M. le président.  - Amendement identique n°108 rectifié quater, présenté par M. Canévet, Mme N. Goulet, MM. Bonnecarrère, Folliot et Duffourg, Mme Saint-Pé, MM. Bonneau et Kern, Mmes Billon et Doineau, M. Détraigne, Mmes Férat, Gacquerre, Jacquemet et Havet, M. Moga, Mme Gatel et MM. Le Nay, Cigolotti, Delcros, Maurey et J.M. Arnaud.

Mme Annick Billon.  - M. Canévet propose de simplifier et d'accélérer la procédure, sans remise en cause de celle-ci.

M. le président.  - Amendement identique n°123 rectifié, présenté par Mme N. Delattre, MM. Artano, Roux, Fialaire, Guiol, Requier, Bilhac, Cabanel et Gold et Mme Guillotin.

M. Henri Cabanel.  - Défendu.

M. le président.  - Amendement n°100 rectifié bis, présenté par MM. Levi, Bonhomme, Decool, Burgoa, Tabarot, Laugier, Folliot et Bonneau, Mme Saint-Pé, M. Kern, Mmes Gacquerre et Vermeillet, MM. Pellevat, Sautarel et Henno, Mme Gosselin, MM. Détraigne, Mizzon, J.M. Arnaud, Belin, S. Demilly, Canévet et Le Nay, Mme Gatel, MM. Cigolotti et Duffourg, Mme Morin-Desailly et M. P. Martin.

Alinéa 29, seconde phrase

Remplacer cette phrase par trois phrases ainsi rédigées :

La durée maximale de la phase d'examen et de consultation est de trois mois à compter de la date d'accusé de réception du dossier. Elle peut être portée à quatre mois sur décision motivée de l'autorité compétente. Lorsque l'avis de l'autorité environnementale est requis, celle-ci dispose d'un mois de plus que le délai imparti pour rendre son avis.

M. Pierre-Antoine Levi.  - Défendu.

M. Fabien Genet, rapporteur pour avis.  - Nous sommes soucieux d'accélérer la procédure, mais ne confondons pas vitesse et précipitation. La fixation d'une durée maximale à trois mois n'est pas opportune pour permettre un examen dans des conditions satisfaisantes. Quant à la fixation du délai d'autorisation environnementale à deux mois, elle est satisfaite par le code de l'environnement. Avis défavorable.

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - Même avis. L'amendement risquerait d'être contre-productif, en conduisant à un nombre important de refus automatiques.

Les amendements identiques nos56 rectifié, 108 rectifié quater et 123 rectifié, ainsi que l'amendement n°100 rectifié bis, sont retirés.

M. le président.  - Amendement n°76 rectifié bis, présenté par M. Gillé et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Alinéa 34

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Une remise de ces observations et propositions peut être effectuée sous forme physique dans les maisons de services au public des territoires concernés ;

Mme Angèle Préville.  - Nous avons prévu en commission que des observations pourraient être formulées par voie postale. Il s'agit de compléter le dispositif pour permettre également un dépôt physique dans les maisons de services au public, afin de toucher le plus grand nombre.

M. Fabien Genet, rapporteur pour avis.  - Nous sommes sensibles à l'argumentation, mais le dispositif permet déjà des remises sous forme physique et la notion de maison de services au public est imprécise. Avis défavorable.

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - Même avis, pour les mêmes raisons.

L'amendement n°76 rectifié bis n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°77 rectifié bis, présenté par Mme Préville et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Alinéa 39

Après le mot :

motivées

insérer les mots :

en précisant si elles sont favorables, favorables sous réserves ou défavorables au projet,

Mme Angèle Préville.  - Le commissaire enquêteur doit exprimer clairement son avis sur le projet concerné : favorable, favorable sous réserves ou défavorable. Il est essentiel que le grand public puisse accéder instantanément à cette information, sans avoir à lire entre les lignes.

M. Fabien Genet, rapporteur pour avis.  - Le commissaire enquêteur doit remettre des conclusions motivées, le conduisant à émettre un avis sur le projet : l'amendement est donc satisfait. Avis défavorable.

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - Le règlement prévoit déjà l'avis du commissaire enquêteur. Retrait de l'amendement, satisfait, ou avis défavorable.

Mme Angèle Préville.  - Les conclusions motivées prendront-elles la forme claire d'un avis favorable, favorable sous réserves ou défavorable ? Je le répète, la lecture doit être immédiate pour le grand public.

L'amendement n°77 rectifié bis n'est pas adopté.

L'amendement n°46 rectifié n'est pas défendu.

M. le président.  - Amendement identique n°170, présenté par Mme Micouleau, MM. Anglars et Belin, Mmes Bellurot, Belrhiti et Bonfanti-Dossat, MM. Bouchet, Brisson, Burgoa, Cambon et Charon, Mmes Dumont, Garriaud-Maylam, Gosselin et Imbert, MM. Karoutchi et Klinger, Mme Lherbier, MM. Mandelli, Mouiller et Panunzi, Mme Procaccia et MM. Savary, Segouin, Sol et C. Vial.

Mme Béatrice Gosselin.  - L'exercice d'un recours administratif ne doit pas prolonger le délai ouvert pour le recours contentieux.

M. le président.  - Amendement identique n°199 rectifié ter, présenté par MM. Marseille, Bonnecarrère, Folliot et Laugier, Mmes Herzog et Devésa, M. Levi, Mmes Létard, Vérien, Vermeillet et Billon, MM. S. Demilly, Détraigne et Moga, Mme Jacquemet, MM. Cigolotti et Canévet, Mmes Guidez et Gatel, MM. Janssens, Longeot et Lafon, Mme Perrot et MM. Kern, Henno, Cazabonne, Duffourg, L. Hervé, Le Nay et Capo-Canellas.

Mme Annick Billon.  - M. Marseille propose que le recours administratif n'entraîne pas la prorogation du recours contentieux. Cela pourrait réduire les délais de deux mois en moyenne.

M. Fabien Genet, rapporteur pour avis.  - Cette règle, de nature réglementaire, a déjà été adoptée dans le décret sur les énergies renouvelables. Au Gouvernement d'agir pour éviter les contentieux abusifs. Retrait ?

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - Sur le principe, le Gouvernement est favorable à cette disposition, qui figure dans des décrets d'application de lois déjà votées. Nous envisageons de faire de même pour ce texte. Dans ces conditions, je suggère un retrait.

Les amendements identiques nos170 et 199 rectifié ter sont retirés.

L'amendement n°355 rectifié n'est pas défendu.

M. le président.  - Amendement n°58 rectifié bis, présenté par MM. Sautarel, Burgoa et Cambon, Mme Belrhiti, M. Panunzi, Mme Dumont, M. Reichardt, Mmes Goy-Chavent, Bellurot et Ventalon, MM. Tabarot et E. Blanc, Mme Gruny, MM. Brisson, Lefèvre, Meurant, Klinger, Mouiller, Pointereau, Gueret, Charon, Belin, Laménie, Anglars, Mandelli, Darnaud, Bascher, C. Vial et Bouchet, Mme Gosselin, MM. B. Fournier et Piednoir, Mme Borchio Fontimp et M. Rapin.

Après l'alinéa 45

Insérer deux alinéas ainsi rédigés :

L'article L. 181-17 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Lorsque le droit de former un recours contre une de ces décisions est mis en oeuvre dans des conditions qui traduisent un comportement abusif de la part du requérant et qui causent un préjudice au bénéficiaire de l'autorisation, celui-ci peut demander, par un mémoire distinct, au juge administratif saisi du recours de condamner son auteur à lui verser des dommages et intérêts. La demande peut être présentée pour la première fois en appel. » ;

Mme Béatrice Gosselin.  - Défendu.

L'amendement n°47 rectifié n'est pas défendu.

M. le président.  - Amendement n°124 rectifié, présenté par Mme N. Delattre, MM. Artano, Roux, Fialaire, Guiol, Requier, Bilhac, Cabanel et Gold et Mme Guillotin.

Après l'alinéa 45

Insérer deux alinéas ainsi rédigés :

...° La section 5 du chapitre unique du titre VIII du livre Ier du code de l'environnement est complétée par un article L. 181-18-... ainsi rédigé :

« Art. L. 181-18-....  -  Lorsque le droit de former un recours contre une autorisation environnementale est mis en oeuvre dans des conditions qui traduisent un comportement abusif de la part du requérant et qui causent un préjudice au bénéficiaire de l'autorisation, celui-ci peut demander, par un mémoire distinct, au juge administratif saisi du recours de condamner l'auteur de celui-ci à lui allouer des dommages et intérêts. La demande peut être présentée pour la première fois en appel. » ;

M. Henri Cabanel.  - Les recours contentieux occasionnent des retards dans les projets industriels et d'énergie renouvelable. Il est proposé de sanctionner les recours abusifs, en s'inspirant de l'article 80 de la loi Élan, qui permet de demander au juge administratif de condamner l'auteur du recours abusif à verser des dommages et intérêts. La durée des contentieux devient un critère déterminant pour le choix d'un pays d'implantation.

L'amendement identique n°169 rectifié n'est pas défendu.

M. le président.  - Amendement identique n°198 rectifié ter, présenté par MM. Marseille, Bonnecarrère et Folliot, Mme Herzog, M. Laugier, Mme Devésa, M. Levi, Mmes Létard, Vérien, Vermeillet et Billon, MM. Détraigne et S. Demilly, Mme Saint-Pé, M. Moga, Mme Jacquemet, MM. Janssens, Cigolotti et Canévet, Mmes Guidez et Gatel, MM. Longeot et Lafon, Mme Perrot et MM. Kern, Henno, Cazabonne, Duffourg, L. Hervé, Capo-Canellas et Le Nay.

Mme Annick Billon.  - La reconnaissance des recours abusifs existe déjà dans le code de l'urbanisme. Nous souhaitons étendre ce dispositif aux autorisations environnementales nécessaires à la réalisation d'un projet industriel.

M. Fabien Genet, rapporteur pour avis.  - Relisons Paul Éluard : il faut toujours abuser de sa liberté... (On apprécie la référence sur les travées du groupe Les Républicains.) Un certain nombre d'entreprises souhaitent limiter les délais liés à des recours abusifs, mais la rédaction proposée nous semble difficile à mettre en oeuvre.

Le code de l'urbanisme prévoit un dispositif, peu appliqué. Il n'apparaît pas judicieux de le transposer dans le droit de l'environnement. Il faut néanmoins se pencher sur la question des délais contentieux. Retrait, sinon avis défavorable.

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - Je citerai non un écrivain, mais un cinéaste : Billy Wilder et ses Sept ans de réflexion... Sept ans, c'est la durée moyenne des recours abusifs. Les juges, reconnaissons-le, sont parfois frileux pour reconnaître ce caractère abusif. Le Gouvernement est favorable à l'extension de ce dispositif. C'est un signal que nous enverrions, y compris à l'administration, pour faire vite et mieux. Avis favorable.

M. Stéphane Sautarel.  - Je me réjouis de l'avis de M. le ministre. Cette mesure, qui est la transcription de la loi Élan, rassurerait les investisseurs. Je tends une perche au rapporteur pour autoriser cette expérimentation. Comme nous y invite René Char, saisissons notre chance ! (Sourires)

M. Fabien Genet, rapporteur pour avis.  - Et courons vers notre risque ! (Nouveaux sourires)

Mme Annick Billon.  - Sans en abuser, nous usons de notre liberté d'amender en maintenant l'amendement n°198 rectifié ter... (Mêmes mouvements)

M. le président.  - Tant de vers pour un sujet si peu poétique !

L'amendement n°58 rectifié bis n'est pas adopté, non plus que les amendements identiques nos124 rectifié et 198 rectifié ter.

M. le président.  - Amendement n°242, présenté par Mme Cukierman et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Alinéa 51

Après le mot :

environnementale

insérer les mots :

pour des projets situés sur des espaces en friche commerciale, industrielle ou militaire, au sens de l'article L. 111-26 du code de l'urbanisme,

Mme Cécile Cukierman.  - Nous proposons de faciliter les procédures d'instruction en les réservant aux friches industrielles : au nombre de 8 300, elles représentent entre 90 000 et 150 000 hectares - mais il y a un enjeu de recensement. Proposons des mesures concrètes pour résorber ces friches ! En ciblant des sites militaires, industriels ou commerciaux, nous accélérerons les choses. La relocalisation est indispensable pour retrouver une souveraineté, mais aussi rapprocher les consommateurs des producteurs.

M. le président.  - Amendement n°241, présenté par Mme Cukierman et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Alinéa 51

Après le mot :

environnementale

insérer les mots :

pour des projets situés sur des espaces en friche commerciale, industrielle ou militaire, au sens de l'article L. 111-26 du code de l'urbanisme, depuis plus de dix ans,

Mme Cécile Cukierman.  - Cet amendement, qui peut être vu comme un repli, vise à concentrer l'effort sur les friches les plus anciennes. Nous avons à l'esprit le ZAN (zéro artificialisation nette), dans la mise en oeuvre duquel le Gouvernement doit s'engager à ne pas pénaliser les collectivités territoriales. Il faut redonner du sens à la transition écologique pour tous les territoires. S'appuyer sur les friches anciennes est un moyen de redynamiser sans artificialiser. C'est une économie de foncier pour les collectivités et un atout pour le développement économique.

M. Fabien Genet, rapporteur pour avis.  - Nous sommes d'accord sur l'importance de reconquérir les friches industrielles, mais il serait dommage de restreindre l'article 2 à ces zones. Les friches les plus anciennes sont souvent dans les enveloppes urbaines des villes, d'où parfois des difficultés à accueillir de nouvelles industries. Avis défavorable.

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - Vous défavoriseriez les zones dépourvues de friches industrielles, avec un risque pour l'égalité des territoires face à la réindustrialisation. Nous devons accélérer la réindustrialisation dans tous les territoires, friches ou non.

Oui, il faut mettre à niveau un certain nombre de friches - 2 000 hectares -, avec l'appui de la Banque des territoires. Les délais, en revanche, doivent concerner tout le monde.

Mme Cécile Cukierman.  - Nous n'avons pas la même définition de l'égalité des territoires. En permettant à tous d'accélérer, nous allons favoriser des territoires, mais laisser des friches et des verrues dans d'autres. Les 22 départements du Massif central comptent nombre de friches. Ces vieux territoires industriels qui ont fait la grandeur de la France ne doivent pas être les grands oubliés. Oui, il y a urgence à réindustrialiser tout de suite, mais n'aggravons pas les inégalités territoriales. La Loire ne sera pas le département cocu !

Si nous ne réglons pas le problème des friches, ces territoires se replieront, coincés entre désindustrialisation et ZAN.

Mme Sophie Primas.  - Je suis très sensible au discours de Mme Cukierman. Nous avons tous des friches dans nos territoires. L'investissement dans ces zones coûtant plus cher, je ne serais pas dérangée qu'il soit récompensé par des délais plus courts.

Certes, l'État, via le fonds friches, nous aide pour les réhabiliter, mais je m'inquiète des conséquences de la suppression de la moitié de la CVAE : elle a conduit à retirer 1 milliard d'euros du fonds vert pour compenser le manque à gagner des départements. Si vous prenez 1 milliard de plus l'année prochaine, le fonds vert sera asséché, et le fonds friches avec lui !

En m'excusant de ne pas en avoir prévenu le rapporteur, je suggère à Mme Cukierman de rectifier son amendement pour que les facilités de l'article 2 bénéficient à tous les projets sur des friches, industrie verte ou non. (M. Daniel Salmon manifeste sa désapprobation.)

M. Fabien Genet, rapporteur pour avis.  - Je le répète, nous partageons la priorité donnée à la reconquête des friches industrielles dans le cadre du ZAN. L'article 2 s'applique à l'ensemble des projets : la précision suggérée par Mme Primas est donc superfétatoire.

Mme Sophie Primas.  - C'est entendu.

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - Je suis, moi aussi, très sensible aux arguments de Mme Cukierman. Oui, nous devons mettre le paquet dans les vieux territoires industriels. Mais votre proposition n'est pas le meilleur moyen d'arriver à vos fins. Les fonds consacrés aux friches doivent rester destinés à la revitalisation de celles-ci. (Mme Sophie Primas manifeste qu'elle y tient.) La Banque des territoires, responsable du développement du foncier, entend consacrer 1 milliard d'euros au même objectif. Comme l'a dit le rapporteur pour avis, la proposition de Mme Primas, c'est l'article 2 tel qu'il est rédigé. C'est dans le cadre du ZAN - j'ose à peine prononcer cet acronyme... - que les friches auront plus d'intérêt que jamais pour les porteurs de projet.

Les amendements nos242 et 241 sont retirés.

M. Daniel Salmon.  - Nous voterons contre cet article. La procédure en vigueur avait un sens : il s'agissait d'éclairer le public. Si l'instruction se fait en même temps que la consultation du public, il y aura un recul. De plus, on parle d'industrie verte, mais, en l'absence de définition précise de cette notion, nous allons ouvrir les friches à toutes sortes de projets. Quant aux durées d'instruction, elles tiennent souvent au manque de moyens des administrations : nous y reviendrons dans le projet de loi de finances.

L'article 2 est adopté.

La séance est suspendue à 20 h 10.

Présidence de Mme Pascale Gruny, vice-président

La séance reprend à 21 h 40.

ARTICLE 2 BIS

Mme le président.  - Amendement n°305, présenté par le Gouvernement.

Alinéa 3

Après le mot :

date

Rédiger ainsi la fin de cet alinéa :

de dépôt du dossier complet et régulier. En cas de circonstances exceptionnelles, elle peut être prorogée de six mois sur décision motivée de l'autorité compétente. » ;

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - Nous souhaitons rétablir le texte initial dans sa philosophie. La commission a adopté un article 2 bis, qui relève en fait du règlement. Le délai d'instruction du dossier ne peut commencer que dès lors que le dossier est complet, et pas seulement déposé. Surtout, la directive RED III est ainsi intégrée, car nous conservons une souplesse de six mois. Ne soyons pas contre-productifs, nous risquerions des rejets de projet.

Mme Sophie Primas.  - Heureusement que vous êtes là...

M. Fabien Genet, rapporteur pour avis.  - L'amendement introduit des dérogations dans les zones d'accélération pour les énergies renouvelables. La directive RED III impose en réalité des conditions beaucoup plus strictes pour accorder des souplesses. La prorogation de six mois qui est proposée viderait le dispositif de sa substance et serait contraire au droit européen. Avis défavorable.

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - Je propose de rectifier mon amendement pour préciser que les six mois en question ne seraient mobilisables qu'en cas de circonstances exceptionnelles.

Mme le président.  - L'amendement n°305 devient ainsi l'amendement n°305 rectifié.

M. Fabien Genet, rapporteur pour avis.  - À titre personnel, avis favorable.

M. Jean-François Longeot, président de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable.  - La commission ne s'est pas réunie, mais j'émets également un avis favorable. (M. André Reichardt s'en félicite.)

L'amendement n°305 rectifié est adopté.

Mme le président.  - Amendement n°306, présenté par le Gouvernement.

Alinéas 4 et 5

Supprimer ces alinéas.

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - La commission a introduit un délai maximum de six mois pour certains projets d'extension de parcs éoliens. Cependant, six mois, c'est trop court quand l'extension est importante, par exemple quand on passe de 5 à 7 éoliennes.

Mme le président.  - Amendement n°202, présenté par M. Genet.

Alinéa 5

1° Supprimer le mot :

projets d'

2° Remplacer le mot :

renouvellement

par le mot :

rééquipement

M. Fabien Genet.  - Il s'agit d'une correction rédactionnelle.

Mme Sophie Primas.  - Excellent !

Mme le président.  - Amendement n°220 rectifié, présenté par Mme N. Delattre, MM. Artano, Roux, Fialaire, Guiol, Requier, Bilhac, Cabanel et Gold et Mme Guillotin.

Alinéa 5

Après le mot :

renouvellement

insérer les mots :

, consistant dans le remplacement total ou partiel d'un parc éolien existant,

M. Henri Cabanel.  - Nous précisons la qualification des opérations de renouvellement d'un parc éolien terrestre.

M. Fabien Genet, rapporteur pour avis.  - Avis défavorable à l'amendement n°306. Le délai est prévu dans la loi Énergies renouvelables. Sur l'amendement n°220 rectifié, la notion de rééquipement est un terme juridique déjà employé dans d'autres circonstances à l'article 9 de la loi Énergies renouvelables et dans le règlement européen 2022/2577 établissant un cadre en vue d'accélérer le déploiement des énergies renouvelables au niveau européen. Avis défavorable.

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - L'amendement n°202 est un amendement de coordination judicieux. Avis défavorable. Concernant l'amendement n°220, même avis que le rapporteur.

M. Fabien Genet, rapporteur pour avis.  - Vous retirez votre amendement ?

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - Je vais à la défaite le coeur léger... (Sourires)

L'amendement n°220 rectifié est retiré.

L'amendement n°306 n'est pas adopté.

L'amendement n°202 est adopté.

L'article 2 bis, modifié, est adopté.

APRÈS L'ARTICLE 2 BIS

Mme le président.  - Amendement n°357 rectifié, présenté par Mmes Paoli-Gagin et Mélot et MM. Decool, Lagourgue, Menonville, Chasseing et A. Marc.

Après l'article 2 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le chapitre XIV du titre VII du livre VII du code de justice administrative, il est inséré un chapitre ... ainsi rédigé :

« Chapitre ...

« Le contentieux des projets d'intérêt national majeur pour la souveraineté nationale ou la transition écologique

« Article L. 77-15-... Font l'objet d'une procédure préalable d'admission, dans les conditions précisées par voie réglementaire, les recours dirigés contre les autorisations et déclarations préalables prises en application du titre II du livre IV du code de l'urbanisme, ainsi que des recours dirigés contre les décisions prises en application du chapitre II du titre I du livre V du code de l'environnement, lorsque les décisions attaquées sont prises dans le cadre d'un projet industriel et d'amélioration des chaînes d'approvisionnements. »

Mme Vanina Paoli-Gagin.  - Nous voulons appliquer une procédure préalable d'admission aux recours contentieux sur les projets industriels et d'amélioration des chaînes d'approvisionnement, permettant au tribunal de vérifier le bien-fondé technique des recours.

M. Fabien Genet, rapporteur pour avis.  - Il n'est pas opportun de transposer cette procédure du niveau de la cassation à la première instance. Chacun doit pouvoir recourir à un juge. Avis défavorable.

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - Avis défavorable.

L'amendement n°357 rectifié est retiré.

Mme le président.  - Amendement n°356 rectifié, présenté par Mme Paoli-Gagin, M. Decool, Mme Mélot et MM. Lagourgue, Menonville, Chasseing et A. Marc.

Après l'article 2 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le chapitre Ier du titre Ier du livre III du code de justice administrative est complété par un article L. 311-... ainsi rédigé :

« Art. L. 311-....  -  Les tribunaux administratifs sont compétents pour connaître en premier et dernier ressort des recours dirigés contre les autorisations et déclarations préalables prises en application du titre II du livre IV du code de l'urbanisme, ainsi que des recours dirigés contre les décisions prises en application du chapitre II du titre I du livre V du code de l'environnement, lorsque les décisions attaquées sont prises dans le cadre d'opérations tendant à la réalisation d'un établissement dont la destination est une activité des secteurs secondaire ou tertiaire.

« Les opérations mentionnées au premier alinéa sont précisées par voie réglementaire ».

Mme Vanina Paoli-Gagin.  - Nous voulons supprimer un degré de juridiction, pour raccourcir la durée des contentieux : 13 820 requêtes ont été enregistrées devant les tribunaux administratifs en 2021 en matière d'urbanisme.

M. Fabien Genet, rapporteur pour avis.  - Cette absence de recours pourrait porter préjudice à l'exploitant. Avis défavorable.

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - Retrait ou avis défavorable. Nous sommes ouverts à des évolutions pour réduire les délais, mais elles relèvent du pouvoir réglementaire.

L'amendement n°356 rectifié est retiré.

ARTICLE 3

Mme le président.  - Amendement n°65, présenté par MM. Fernique, Salmon, Breuiller, Benarroche, Dantec, Dossus, Gontard et Labbé, Mme de Marco, M. Parigi et Mmes Poncet Monge et M. Vogel.

Supprimer cet article.

M. Jacques Fernique.  - Cet article 3 franchit une ligne rouge. Il propose la mutualisation de débats publics, qui affaiblirait la consultation démocratique. C'est une fausse bonne idée. Les débats en seraient dilués, donc incompréhensibles. N'affaiblissons pas la compréhension de la planification territoriale. Comprendre les impacts des projets demande des évaluations fines.

Mme le président.  - Amendement identique n°243, présenté par Mme Varaillas et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Mme Marie-Claude Varaillas.  - Une nouvelle fois, ce projet de loi considère que la consultation publique est un frein au bon déroulement des projets.

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - Au contraire !

Mme Marie-Claude Varaillas.  - Or ces consultations permettent justement de s'approprier les projets, y compris pour les collectivités qui ne peuvent parfois s'y opposer. Des entreprises locales sont parfois menacées par de nouveaux projets. L'exonération proposée serait pour dix ans, car la situation peut évoluer entre-temps. De plus, nous risquerions d'accorder des blancs-seings abusifs. Supprimons cet article.

M. Fabien Genet, rapporteur pour avis.  - Je vous trouve un peu durs, chers collègues, surtout sur la rédaction de la commission ! Nous allons en fait améliorer cette participation du public. Quand les projets sont similaires, une procédure commune de concertation est la bienvenue. La qualité du débat sera préservée. Nous avons trouvé le point d'équilibre entre l'accélération de l'implantation industrielle et une meilleure participation du public. Avis défavorable.

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - L'article 3 prévoit une concertation globale pour que le public ait une vision globale du projet. Au cas où un projet similaire serait présenté dans les dix ans, si la Commission nationale du débat public (CNDP) souhaite mener un débat public, il pourra avoir lieu. Avis défavorable.

À la demande du GEST, les amendements identiques nos65 et 243 sont mis aux voix par scrutin public.

Mme le président. - Voici le résultat du scrutin n°311 :

Nombre de votants 343
Nombre de suffrages exprimés 279
Pour l'adoption   28
Contre 251

Les amendements identiques nos65 et 243 ne sont pas adoptés.

Mme le président.  - Amendement n°36 rectifié, présenté par Mme Paoli-Gagin, MM. Capus, Guerriau et A. Marc, Mme Mélot et MM. Lagourgue, Grand, Chasseing, Wattebled, Malhuret, Decool et Menonville.

Après l'alinéa 1

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

...° Au premier alinéa du I de l'article L. 121-8, après les mots : « d'équipement » sont insérés les mots : « autres que les projets industriels » ;

Mme Vanina Paoli-Gagin.  - Amendement de repli. Nous proposons d'exclure les projets industriels du champ d'intervention de la CNDP.

M. Fabien Genet, rapporteur pour avis.  - La CNDP contribue à assurer l'acceptabilité sociale des projets en organisant le débat public et la consultation préalable. Exclure les projets industriels de son périmètre constituerait une régression. Avis défavorable.

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - Parfois, la concertation en amont permet d'améliorer l'acceptabilité des projets. Retrait, à défaut avis défavorable.

L'amendement n°36 rectifié est retiré.

Mme le président.  - Amendement n°307, présenté par le Gouvernement.

Alinéas 4 et 5

Remplacer ces deux alinéas par un alinéa ainsi rédigé :

« Lorsqu'un débat global ou une concertation préalable globale a eu lieu pour un ensemble de projets envisagés sur un territoire délimité et homogène, ces projets, ainsi que ceux envisagés ultérieurement sur le même territoire et cohérents avec sa vocation, sont dispensés de débat public propre ou de concertation préalable propre si leur mise en oeuvre débute dans les dix ans suivant la fin de ce débat global ou de cette concertation globale.

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - L'objectif est d'établir le non-recours systématique à une enquête publique au cas où un projet similaire serait présenté dans les dix ans qui suivent. Si la CNDP le souhaite, le débat public serait cependant de droit.

Mme le président.  - Amendement n°79 rectifié bis, présenté par Mme Préville et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Alinéa 4

Remplacer le mot :

dix

par le mot :

cinq

Mme Angèle Préville.  - L'article 3 prévoit déjà des cas dans lesquels le délai est allongé. Le délai de dix ans semble beaucoup trop long. Il faut une cohérence dans le temps, notamment en raison des effets du changement climatique : en dix ans, beaucoup de choses peuvent changer.

Soit les projets démarrent dans les cinq ans suivant la consultation globale, soit ils devront faire l'objet d'un nouveau débat public propre ou d'une concertation préalable propre.

Mme le président.  - Amendement n°203, présenté par M. Genet.

Alinéa 5

Après les mots :

débat public propre

insérer les mots :

prévu au 1° de l'article L. 121-9 

M. Fabien Genet, rapporteur pour avis.  - Avis défavorable à l'amendement n°307 : le ministre a synthétisé à l'extrême sa position, car les projets ne seraient pas similaires. Par ailleurs, notre rédaction est plus protectrice. L'amendement n°79 rectifié bis viderait le dispositif de sa portée. Le délai de dix ans nous semble approprié. Les entreprises ne disposeraient pas d'une visibilité suffisante pour prendre des risques si le délai était raccourci à cinq ans.

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - Notre amendement évoque effectivement des projets envisagés ultérieurement sur le même territoire et cohérents avec leur vocation initiale.

Avis de sagesse à l'amendement n°203, avis défavorable à l'amendement n°79 rectifié bis.

L'amendement n°307 n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°79 rectifié bis.

L'amendement n°203 est adopté.

Mme le président.  - Amendement n°80 rectifié bis, présenté par Mme Préville et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Alinéa 6, seconde phrase

Supprimer cette phrase.

Mme Angèle Préville.  - L'alinéa 6 de l'article 3 permet à la CNDP de se saisir, quoi qu'il arrive, de certains projets si elle l'estime nécessaire. Nous sommes très favorables au maintien de cette possibilité, mais sans qu'elle ait à se justifier.

Mme Sophie Primas.  - C'est l'inverse de ce que vous défendiez !

M. Fabien Genet, rapporteur pour avis.  - On peut changer d'opinion avant et après le repas... Il ne faudrait plus désormais motiver les décisions. Motiver les décisions permet à l'exploitant de les comprendre. S'agissant d'une compétence discrétionnaire de la CNDP, cette dernière motiverait de toute façon ses décisions. Avis défavorable.

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - Soumettre un projet exempté à consultation est une décision lourde de conséquences. Elle serait motivée, mais cela va mieux en le disant. Avis défavorable.

L'amendement n°80 rectifié bis n'est pas adopté.

Mme le président.  - Amendement n°81 rectifié bis, présenté par Mme Préville et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Alinéa 8

Supprimer cet alinéa.

Mme Angèle Préville.  - Le code de l'environnement précise que lorsqu'un projet a fait l'objet d'un débat public depuis moins de cinq ans, il est dispensé de débat public ou de concertation préalable. L'article 3 propose de porter ce délai à dix ans, suivant le souhait du Gouvernement d'accélérer les procédures. Or rien ne garantit que les projets concernés visent un objectif de développement durable.

Mme le président.  - Amendement identique n°102, présenté par MM. Fernique, Salmon, Breuiller, Benarroche, Dantec, Dossus, Gontard et Labbé, Mme de Marco, M. Parigi et Mmes Poncet Monge et M. Vogel.

M. Jacques Fernique.  - Au regard des enjeux environnementaux, sociaux et économiques, il faut en rester au délai, raisonnable, de cinq ans.

M. Fabien Genet, rapporteur pour avis.  - Organiser un nouveau débat public ou une nouvelle concertation préalable sur un même projet ne paraît pas indispensable, le public s'étant déjà exprimé. Avis défavorable. Dans quelques années, lorsqu'on pourra implanter des projets en douze ou dix-huit mois, peut-être pourrons-nous nous reposer la question.

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - Même avis.

Les amendements identiques nos81 rectifié bis et 102 ne sont pas adoptés.

L'article 3, modifié, est adopté.

APRÈS L'ARTICLE 3

Mme le président.  - Amendement n°48 rectifié bis, présenté par Mme Paoli-Gagin, MM. Capus, Guerriau et A. Marc, Mme Mélot et MM. Lagourgue, Grand, Chasseing, Wattebled et Decool.

Après l'article 3

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le code de l'environnement est ainsi modifié :

1° Le second alinéa du IV de l'article L. 122-1 est complété par les mots et une phrase ainsi rédigés : « dans un délai de deux mois. Le silence gardé par l'autorité à expiration de ce délai vaut acceptation. » ;

2° À la première phrase du 3° du IV de l'article L. 211-3, après le mot : « demander », sont insérés les mots : « , dans un délai de deux mois, ».

Mme Vanina Paoli-Gagin.  - L'accélération des délais de réponse de l'administration pour les modifications ou extensions de travaux soumis à évaluation environnementale est une mesure attendue. Cet amendement oblige les autorités administratives à répondre dans un certain délai.

Mme le président.  - Amendement identique n°174, présenté par Mme Micouleau, MM. Anglars et Belin, Mmes Bellurot, Belrhiti et Bonfanti-Dossat, MM. Bouchet, Brisson, Burgoa, Cambon et Charon, Mmes Dumont, Garriaud-Maylam et Gosselin, M. Grosperrin, Mme Imbert, MM. Karoutchi et Klinger, Mme Lherbier, MM. Mandelli et Mouiller, Mme Procaccia et MM. Savary, Segouin, Sol et C. Vial.

Mme Béatrice Gosselin.  - Défendu.

L'amendement identique n°187 rectifié bis n'est pas défendu.

Mme le président.  - Amendement identique n°253, présenté par Mme Cukierman.

Mme Cécile Cukierman.  - Cet amendement est issu d'une proposition de la Fédération nationale des travaux publics (FNTP). Au-delà des postures, il faut apporter des réponses pour que les travaux soient réalisés avant qu'un « encombrement » citoyen ne les empêche...

Nous souhaitons introduire des obligations en matière de délai de réponse de la part des autorités administratives. Il y a deux manières de voir cet amendement : soit c'est un laisser-faire, laisser-passer, soit une invitation pour l'État à renforcer ses moyens.

M. Fabien Genet, rapporteur pour avis.  - En cette fête de la musique, je salue la polyphonie sur nos travées... (Sourires)

L'amendement est satisfait par l'article R. 122-2-1 du code de l'environnement sur le délai, puisque l'autorité compétente a quinze jours pour informer le maître d'ouvrage.

Concernant la règle du silence valant acceptation, la règle de droit commun satisfait votre demande.

Enfin, dans le cas d'ouvrages présentant des dangers pour les ressources en eau et les écosystèmes, le fait générateur pour le délai de deux mois n'est pas précisé dans l'amendement. Avis défavorable.

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - Retrait ou avis défavorable. Les délais sont fixés par voie réglementaire. Le délai de deux mois crée une incertitude juridique inacceptable.

Mme Cécile Cukierman.  - Le travail de parlementaire est aussi un travail d'alerte, vous le savez. Une fois qu'on a lancé l'alerte, soit on s'arrête là, soit le Gouvernement apporte une réponse. La réponse selon laquelle cela relève du réglementaire n'est pas satisfaisante.

À un an du renouvellement des instances européennes, veillons à ne pas renvoyer la faute sur un droit européen qui serait immuable. Nous risquerions de nous réveiller un jour avec la gueule de bois, avec une Europe qui ne serait pas celle que nous aurions souhaitée. Les républicains que nous sommes, sur l'ensemble de ces travées et malgré nos oppositions, devons rester vigilants.

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - Le rapporteur avait précisé que ces délais existaient déjà dans un règlement. Le Gouvernement a fait son travail. Oui, il faut des moyens pour faire respecter ces délais. Avec Bruno Le Maire et Christophe Béchu, nous sommes prêts à augmenter les moyens et à renforcer l'efficacité des procédures de traitement.

L'amendement n°253 est retiré.

Mme Vanina Paoli-Gagin.  - Il y a le domaine du réglementaire, mais aussi le réel. Si nous sommes saisis de ces questions dans nos circonscriptions, c'est que ces dispositions réglementaires ne doivent pas être bien appliquées. Nous comptons sur vous pour établir une homothétie parfaite entre le réel et le réglementaire.

Les amendements identiques nos48 rectifié bis et 174 sont retirés.

Mme le président.  - Amendement n°171 rectifié, présenté par Mme Micouleau, M. Belin, Mmes Bellurot, Belrhiti et Bonfanti-Dossat, MM. Bouchet, Brisson, Burgoa, Cambon et Charon, Mmes Dumont, Garriaud-Maylam, Gosselin et Imbert, MM. Karoutchi et Klinger, Mme Lherbier, MM. Mouiller et Panunzi, Mme Procaccia et MM. Savary, Segouin, Sol et C. Vial.

Après l'article 3

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

À titre expérimental, pour une période de trois ans à compter de l'entrée en vigueur de la présente loi, les législations nouvelles au code de l'environnement, hors textes de transposition européenne, assurent une stabilité normative.

Ainsi, un texte législatif nouveau créant de nouvelles obligations en matière d'environnement ne pourra être adopté.

Le Gouvernement remet chaque année au Parlement un rapport dressant le bilan de la mise en oeuvre de cette stabilité normative.

M. Philippe Mouiller.  - Cet amendement vise à assurer à titre expérimental une stabilité législative des normes environnementales pour trois ans. L'attente est grande !

Mme le président.  - Amendement identique n°252 rectifié, présenté par Mme Cukierman.

Mme Cécile Cukierman.  - Monsieur le rapporteur, la fête de la musique avait pour objectif de créer un cadre d'écoute pour tous les styles de musique !

Il s'agit certes d'un amendement d'appel. La question n'est pas de défendre tel ou tel modèle. On nous alerte sur le terrain : pour pouvoir investir, se projeter, créer de la richesse, accorder du droit ou de la protection sociale, il faut de la visibilité. Construire un projet industriel avec la crainte que ce qui était vrai un jour ne le soit plus six mois plus tard est anxiogène. Cela nuit à l'investissement et au développement industriel. (M. Philippe Mouiller acquiesce ; Mme Sophie Primas applaudit.)

Mme Françoise Gatel.  - Très bien !

Mme Sophie Primas.  - Les bras m'en tombent ! (Sourires ; M. Laurent Somon propose à Mme Cécile Cukierman de le rejoindre sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Fabien Genet, rapporteur pour avis.  - On approche de la musique expérimentale... (Rires)

Qu'une assemblée parlementaire veuille se faire hara-kiri pendant trois ans, voilà qui est surprenant ! La commission est très défavorable à cette possibilité d'empêcher toute nouvelle disposition législative en la matière. (Applaudissements sur les travées du GEST)

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - Je souhaite également pouvoir continuer à travailler à l'Assemblée nationale au cas où j'y reviendrais... (Sourires) J'entends votre logique : avant d'introduire de nouvelles dispositions, faisons une pause et vérifions que cela fonctionne dans les territoires. Avis défavorable à cet amendement, d'ailleurs inconstitutionnel. Certes, nous devons systématiquement nous interroger. Le Président de la République avait parlé de « pause », ce qui avait fait lever des yeux au ciel ; il avait raison. Avant d'ajouter des contraintes, demandons-nous si les contraintes existantes suffisent à développer nos territoires et à protéger la planète.

M. Olivier Rietmann.  - Je bois du petit-lait !

Avec Gilbert-Luc Devinaz et Jean-Pierre Moga, nous avons présenté un rapport sur la compétitivité des entreprises grâce à la simplification normative. Cette simplification doit venir de l'administration, mais aussi du Parlement. En vingt ans, nous avons voté plus de 94 000 articles de loi modifiant la norme, soit 76 % de normes supplémentaires ! Il ne s'agit pas de tout figer sur les années à venir.

Nos chefs d'entreprise, premiers investisseurs, ont besoin de stabilité. C'est par là que cela commence. Pour des machines qui sortiront dans quinze à vingt ans, il faut une stabilité normative avant de réaliser des investissements. Nous devons maîtriser la législation.

L'amendement n°171 rectifié est retiré.

Mme Cécile Cukierman.  - Il n'est nullement question de se faire hara-kiri en tant que parlementaires, mais évitons de surréagir à l'actualité (Mme Françoise Gatel acquiesce) et évitons la suraccumulation normative. Loin de moi l'idée de mettre le pays à l'arrêt. Je suis plus matérialiste qu'idéaliste, mais imaginons : et si le Parlement se donnait, pendant un an, pour seule mission de faire de l'évaluation ? C'est un doux rêve impossible...

Sommes-nous là pour voter des lois chaque semaine, sans jamais prendre le temps de faire une pause et de nous demander : qu'avons-nous fait en dix ans ?

Mme Françoise Gatel.  - Puisqu'on parle musique, je me joins au choeur des gens raisonnables. L'inconstitutionnalité est une arme massive, je l'entends ; mais nous avons un vrai problème de boulimie normative. Le Sénat a d'ailleurs récemment signé avec le Gouvernement une charte pour simplifier des normes applicables aux collectivités. Avons-nous besoin de produire de nouvelles normes, les textes en vigueur ne suffisent-ils pas ? Il faut faire de l'expérimentation et de l'évaluation.

De grâce, arrêtons les discours pleins de bonnes intentions et cessons de nous mettre des bâtons dans les roues. Ce rappel est salutaire pour nos entreprises et nos emplois.

M. Jacques Fernique.  - Il me semble que nous avons précisément défini le périmètre de ce projet de loi sur l'industrie verte. Or cet amendement prévoit, à titre expérimental, l'impossibilité d'introduire tout ajout au code de l'environnement. Non seulement c'est anticonstitutionnel, en imposant un moratoire au travail parlementaire, mais le lien au périmètre du texte est contestable.

L'amendement n°252 rectifié est retiré.

Mme le président.  - Amendement n°394 rectifié bis, présenté par MM. Cabanel et Artano, Mme Pantel, MM. Roux, Fialaire, Guiol, Requier, Bilhac et Gold et Mme Guillotin.

Après l'article 3

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport étudiant la possibilité de définir un garant dans le débat public couvrant toutes les phases de projets d'infrastructure en lien avec l'industrie verte.

M. Henri Cabanel.  - Nous souhaitons étudier la possibilité de couvrir toutes les phases de projets d'infrastructure, sous l'égide d'un garant désigné par la CNDP. Cet amendement reprend une recommandation issue des travaux de la mission d'information sur la démocratie représentative, conduite en 2017, dont j'étais le président.

M. Fabien Genet, rapporteur pour avis.  - Nous saluons votre travail ; mais puisqu'il s'agit d'une demande de rapport, avis défavorable.

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - Avis défavorable au rapport, mais favorable sur le fond. Nous avions prévu dans la rédaction initiale que le garant puisse être le commissaire enquêteur.

M. Michel Canévet.  - Avec ma collègue Nathalie Goulet, nous appelons l'attention du Gouvernement sur la nécessité que le commissaire enquêteur trouve bien sa place dans cette forme de consultation rénovée.

M. Henri Cabanel.  - M. Bonnecarrère, rapporteur de cette mission, était très soucieux d'accélérer les procédures. Nous avions fait une dizaine de propositions très pertinentes, qui répondaient aux ambitions de ce texte.

L'amendement n°394 rectifié bis est retiré.

AVANT L'ARTICLE 4 A

Mme le président.  - Amendement n°339 rectifié bis, présenté par MM. Devinaz et Bourgi, Mmes Harribey et Monier et MM. Pla et Tissot.

Avant l'article 4 A

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.  -  L'État remet, dans l'année suivant la promulgation de la présente loi, un document de planification concernant les filières stratégiques définies par décret en Conseil d'État.

Ce document vise à anticiper les besoins en ressources et propose une structuration adaptée de ces filières sur l'ensemble du cycle de vie des matières.

II.  -  Les modalités de mise en oeuvre sont fixées ultérieurement par décret.

M. Gilbert-Luc Devinaz.  - Nous souhaitons un document de planification sur les filières stratégiques définies par un décret en Conseil d'État. De la formation à la gestion des déchets, la planification permet d'intégrer toute la chaîne de valeur. C'est le meilleur moyen de maîtriser les risques économiques et environnementaux.

M. Fabien Genet, rapporteur pour avis.  - Une meilleure planification est tout à fait louable, mais cette intention ne relève pas de la loi. Avis défavorable.

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - La feuille de route sur l'économie circulaire prévoit déjà un plan de programmation sur les ressources les plus stratégiques. En février 2019, un plan de programmation des ressources minérales de la transition bas-carbone a été lancé : pour construire les infrastructures énergétiques indispensables, nous avons besoin de ressources minérales dont certaines peuvent être critiques.

Un appel à projets national a été lancé en janvier 2022 dans le cadre du plan d'investissements France 2030, ciblé sur les métiers critiques à destination des filières industrielles.

Le plan France 2030 mobilisera 1 milliard d'euros, dont 500 millions d'euros d'aides d'État et 500 millions d'euros de fonds propres pour renforcer l'approvisionnement des chaînes industrielles en métaux rares. Une fonction de délégué interministériel aux métaux stratégiques a été créée.

L'amendement est donc satisfait : retrait ou avis défavorable.

L'amendement n°339 rectifié bis n'est pas adopté.

Mme le président.  - Amendement n°85 rectifié ter, présenté par M. Gillé et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Avant l'article 4 A

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport portant sur les mesures prises relatives à l'accompagnement et l'incitation des industriels vers un changement de modèle de production tenant compte de la raréfaction des ressources et du cycle de vie des produits.

Mme Angèle Préville.  - La grande absente de ce projet de loi est l'économie circulaire. Il faut intégrer la dimension durable dans l'ensemble du cycle de vie du produit ; cela devrait être l'alpha et l'oméga de nos réflexions. L'article 45 nous empêche cependant d'avoir un tel débat. Cet amendement est d'appel.

Mme le président.  - Amendement identique n°179 rectifié, présenté par Mmes Micouleau et Estrosi Sassone, MM. Bacci et Belin, Mmes Belrhiti et Bonfanti-Dossat, MM. Bouchet, Brisson, Burgoa, Cambon et Charon, Mmes Di Folco, Dumont, Garriaud-Maylam, Imbert et Joseph et MM. D. Laurent, Mandelli, Milon et Tabarot.

Mme Dominique Estrosi Sassone.  - Défendu.

Mme le président.  - Amendement identique n°248 rectifié, présenté par Mme Varaillas et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Mme Marie-Claude Varaillas.  - Les insuffisances du texte sont nombreuses. Il est nécessaire de produire autrement, pour tenir compte de la raréfaction des ressources. Voyez les pénuries de médicaments. Le groupe CRCE apportera sa contribution à de tels travaux.

Mme le président.  - Amendement identique n°333 rectifié, présenté par MM. Chasseing et Verzelen, Mme Mélot, MM. Lagourgue, Decool, Wattebled et Capus, Mme Paoli-Gagin, M. Folliot, Mmes Vermeillet et F. Gerbaud et M. Fialaire.

Mme Vanina Paoli-Gagin.  - Défendu.

Mme le président.  - Amendement identique n°371 rectifié bis, présenté par Mme N. Delattre, M. Artano, Mme Pantel, MM. Guiol, Requier, Bilhac, Cabanel et Gold et Mme Guillotin.

M. Henri Cabanel.  - Défendu.

M. Fabien Genet, rapporteur pour avis.  - Retrait ou avis défavorable. Je trouve vos propos sévères : l'article 45 a limité le périmètre du texte, mais sur le terrain le besoin d'économie circulaire est de mieux en mieux compris. Un changement d'état d'esprit est à l'oeuvre.

Mme Sophie Primas.  - Excellent !

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - Retrait ou avis défavorable. Merci d'évoquer un sujet qui nous est cher. Moi aussi, je préfère l'action aux rapports. Dès vendredi, la Première ministre réunira le conseil national de l'industrie (CNI), où je présenterai un plan de décarbonation des 50 sites les plus émetteurs. Les mentalités évoluent, y compris chez les industriels, qui sont désormais prêts à agir.

Les amendements nos179 rectifié et 371 rectifié bis sont retirés.

Les amendements identiques nos85 rectifié ter, 248 rectifié et 333 rectifié ne sont pas adoptés.

ARTICLE 4 A

Mme le président.  - Amendement n°316, présenté par le Gouvernement.

Supprimer cet article.

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - Cet article introduit les projets territoriaux d'industrie circulaire. Or c'est une industrie nationale : ainsi, un opérateur du recyclage du plastique qui s'apprête à s'installer dans le Nord utilisera des matériaux venant de tout le territoire. Des projets territoriaux très localisés ne sont pas adaptés.

M. Fabien Genet, rapporteur pour avis.  - Je suis étonné par le changement de pied du ministre : l'économie circulaire, oui, mais l'industrie circulaire, non...

C'est M. Fernique qui nous avait convaincus de la pertinence de reprendre les modèles des projets alimentaires territoriaux dans le domaine de l'industrie circulaire. Cela compléterait des dispositifs comme les schémas régionaux d'aménagement, de développement durable et d'égalité des territoires (Sraddet). Avis défavorable.

M. Jacques Fernique.  - Je ne comprends pas ! N'opposons pas le niveau national et le niveau territorial. Dès que l'on passe au concret, le Gouvernement s'oppose. Nous voulons valoriser les ressources au plus près de la demande. Nous proposons un levier qui n'est pas contradictoire avec la grande industrie. Les programmes Territoires d'industrie répondent aux besoins d'ingénierie ; ils n'ont en commun avec les projets territoriaux d'industrie circulaire que le nom. S'il vous plaît, pas de couac !

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - Loin de moi de remettre en cause les compétences et capacités des territoires pour développer l'industrie. Territoires d'industrie permet aux élus de s'organiser localement pour développer l'industrie ; rien n'empêche d'y inclure les enjeux d'industrie circulaire.

En forçant des programmes territoriaux spécifiquement liés à l'industrie circulaire, vous risquez d'obérer des programmes d'envergure nationale, car ces derniers ont besoin d'approvisionnements très importants. Utilisons le programme Territoire d'industrie. Adoptons cet amendement sans couac, dans l'harmonie et la douceur ! (Sourires)

L'amendement n°316 n'est pas adopté.

L'article 4 A est adopté.

APRÈS L'ARTICLE 4 A

L'amendement n°382 n'est pas défendu.

ARTICLE 4

Mme le président.  - Amendement n°315, présenté par le Gouvernement.

Alinéa 5

Remplacer les mots :

des conditions mentionnées au I du présent article

par les mots :

que le résidu n'aura pas d'incidences globales nocives pour l'environnement ou la santé humaine

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - Nous devons développer une filière du recyclage et du réemploi local. Nous avons sur-transposé la directive européenne en la matière avec une définition explicite des déchets en réemploi, au lieu d'une définition implicite. Si bien qu'il faut un an de procédure pour recycler un tee-shirt en chiffon, et le faire sortir du statut de déchet.

C'est un article de simplification destiné à faire changer l'économie circulaire de dimension. L'amendement revient à une rédaction très proche de la rédaction initiale.

M. Fabien Genet, rapporteur pour avis.  - Le texte initial présentait des difficultés au regard du droit européen. Les qualifications de sous-produit et de déchet sont mutuellement exclusives. Il n'est pas possible d'y ajouter une troisième qualification, or c'est ce que fait cet article : il prévoit la sortie du statut de déchet, sans référence à la notion de sous-produit.

La commission a préféré une meilleure articulation des définitions. En amendant, le Gouvernement s'inscrit dans notre logique, mais imparfaitement : il crée une nouvelle catégorie de sous-sous-produit, toujours problématique au regard du droit européen. Avis défavorable.

Mme Sophie Primas.  - À regret...

L'amendement n°315 n'est pas adopté.

Mme le président.  - Amendement n°95 rectifié bis, présenté par MM. Gold et Artano, Mmes Pantel et N. Delattre, MM. Guiol, Fialaire, Requier, Bilhac et Cabanel et Mme Guillotin.

Après l'alinéa 11

Insérer trois alinéas ainsi rédigés :

...° Après le IV du même article L. 541-4-3, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :

« ... - Dans le cadre de leurs transferts entre États membres, les substances ou objets ayant cessé d'être des déchets dans un État membre de l'Union européenne, conformément aux dispositions de l'article 6 de la directive 2008/98/CE du Parlement européen et du Conseil du 19 novembre 2008 relative aux déchets et abrogeant certaines directives, prévu par la directive 2006/112/CE, en faveur des assujettis qui ne sont pas établis dans l'État membre du remboursement, mais dans un autre État membre, conservent leur statut de produit lors de leur entrée sur le territoire français.

« En cas de non-conformité aux dispositions de la directive-cadre, l'autorité administrative compétente peut remettre en cause la sortie du statut de déchet de la substance ou objet sur le territoire français. »

M. Henri Cabanel.  - L'absence de reconnaissance en droit français du statut de produits aux objets sortis du statut de déchet dans les autres États de l'Union européenne pénalise notre tissu industriel. Nous sommes en effet dépendants de l'importation de nombreuses matières premières.

Cet amendement maintient, sur le territoire français, le statut de produit aux substances ou objets ayant fait l'objet d'une sortie de statut de déchets dans un pays de l'Union européenne

Mme le président.  - Amendement n°133 rectifié ter, présenté par Mme M. Mercier, MM. Bacci et Belin, Mmes Bellurot et Billon, MM. Bouchet, Brisson, Burgoa et Cambon, Mmes Di Folco et Dumont, M. Folliot, Mmes F. Gerbaud et Gosselin, MM. Gremillet et Henno, Mmes Imbert et Joseph, MM. Levi et Moga, Mme Perrot et MM. Piednoir, Sautarel, Savary et Sido.

Après l'alinéa 11

Insérer trois alinéas ainsi rédigés :

...° Après le IV du même article L. 541-4-3, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :

«....  -  Dans le cadre de leurs transferts entre États membres, les substances ou objets ayant cessé d'être des déchets dans un État membre de l'Union européenne, conformément aux dispositions et conditions de l'article 6 de la directive 2008/98/CE du Parlement européen et du Conseil du 19 novembre 2008 relative aux déchets et abrogeant certaines directives, conservent leur statut de produit lors de leur entrée sur le territoire français.

« L'autorité administrative compétente peut, le cas échéant, vérifier la conformité de la sortie du statut déchet aux dispositions de l'article 6 de la directive cadre européenne sur les déchets. En cas de non-conformité auxdites dispositions, l'autorité administrative compétente peut remettre en cause la sortie du statut de déchet de la substance ou objet sur le territoire français. » ;

M. Daniel Gremillet.  - Il y a un vrai problème de distorsion au sein de l'Union européenne.

M. Fabien Genet, rapporteur pour avis.  - Avis défavorable, justement à cause du risque de distorsion. (Mme Sophie Primas manifeste sa déception.)

Il revient aux États membres de définir les modalités de sortie du statut des déchets : imposer une reconnaissance automatique, c'est renoncer à notre souveraineté réglementaire. Nous serions contraints d'adopter les mêmes normes que des pays tiers, sans réciprocité.

Peut-être les industriels pourraient-ils justifier au cas par cas, ou envisager une extension des règles de sortie du statut de déchets, pour les harmoniser au niveau européen. Monsieur le ministre, qu'en pensez-vous ?

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - Nous risquerions de favoriser les déchets étrangers par rapport aux déchets français. Or nous avons besoin d'une quantité croissante de déchets, par exemple pour la biomasse ou le carburant durable.

Un industriel peut déjà demander, en France, la sortie du statut de déchet pour les déchets importés. Une harmonisation au niveau européen sera un combat utile, mais long et douloureux. En attendant, retrait, sinon avis défavorable.

L'amendement n°95 rectifié bis n'est pas adopté.

L'amendement n°133 rectifié ter est retiré.

Mme le président.  - Amendement n°120 rectifié, présenté par Mme Paoli-Gagin.

Alinéa 14

Remplacer cet alinéa par deux alinéas ainsi rédigés :

a) Le I de l'article L. 541-3 est ainsi rédigé :

« I. - Lorsque des produits usagés ou déchets sont abandonnés, déposés ou gérés contrairement aux dispositions des sous-section 2 et 3 de la section 2 du présent chapitre ou aux prescriptions du présent chapitre, et des règlements pris pour leur application, à l'exception des prescriptions prévues au I de l'article L. 541-21-2-3, l'autorité titulaire du pouvoir de police compétente avise le producteur ou détenteur de déchets des faits qui lui sont reprochés ainsi que des sanctions qu'il encourt et, après l'avoir informé de la possibilité de présenter ses observations, écrites ou orales, dans un délai de dix jours, le cas échéant assisté par un conseil ou représenté par un mandataire de son choix, peut lui ordonner le paiement d'une amende au plus égale à 15 000 € et le mettre en demeure d'effectuer les opérations nécessaires au respect de cette réglementation dans un délai déterminé. » ;

Mme Vanina Paoli-Gagin.  - Le renforcement des sanctions traduit la nécessité de lutter contre les filières de déchets illicites. Il faut sanctionner les acteurs qui alimentent les filières illégales en sortant du cadre réglementaire sécurisé.

M. Fabien Genet, rapporteur pour avis.  - Cet amendement, qui prévoit des sanctions pour les déchets et produits usagés, serait source de confusion et d'insécurité juridique. Le droit de l'environnement ne reconnaît que deux catégories : le déchet et le sous-produit. Avec le produit usagé, vous en créez une nouvelle, mal définie. Avis défavorable.

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - L'amendement fragilise le dispositif de sanction des transferts illicites vers l'étranger que vous avez renforcé en commission. Retrait, sinon avis défavorable.

L'amendement n°120 rectifié est retiré.

Mme le président.  - Amendement n°379 rectifié bis, présenté par MM. Gremillet, Rietmann et Perrin, Mme Berthet, M. Brisson, Mmes Jacques, Thomas, Dumont, Malet et Gosselin et M. Sido.

Après l'alinéa 14

Insérer deux alinéas ainsi rédigés :

...) Après l'article L. 541-4-4, il est inséré un article L. 541-4-... ainsi rédigé :

« Art. L. 541-4-....  -  Un résidu de production, s'il est utilisé dans un processus de production, n'a pas le statut de déchet quand ce résidu de production est similaire à une substance ou un matériau qui aurait été produit sans avoir recours à des déchets. L'exploitant de l'installation de production s'assure du respect des conditions mentionnées aux points a) à d) du I de l'article 6 de la directive 2008/98/CE. » ;

M. Daniel Gremillet.  - Cet amendement devrait vous satisfaire. En sortant du statut de déchet un résidu de production similaire à une substance ou un matériau qui aurait été produit sans avoir recours à des déchets, nous conservons sur nos territoires une capacité de production industrielle qui, sinon, serait partie dans d'autres pays européens.

M. Fabien Genet, rapporteur pour avis.  - Si nous vous suivions, nous serions en contradiction avec la directive européenne, qui prévoit deux catégories : le déchet, ou le sous-produit. Il n'y a pas de place pour une troisième catégorie.

Si ces résidus de production sont des sous-produits, alors l'amendement est satisfait : les résidus ne seraient pas des déchets. En revanche, s'il s'agit de déchets, alors cet amendement pourrait desserrer les exigences environnementales : il faciliterait le contournement des critères de sortie du statut de déchet. Or ce statut a un rôle essentiel : limiter les risques pour l'environnement et la santé publique. Avis défavorable.

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - Avis favorable à cet amendement de bon sens, qui permet aux industriels d'utiliser des déchets qui n'en sont pas vraiment. Je ne trouve pas d'exemple concret, mais cet amendement me semble utile.

Mme Sophie Primas.  - On va vous en trouver, des exemples !

Mme Marta de Cidrac.  - Entre le déchet et le sous-produit, il n'y a pas de troisième voie. L'économie circulaire suppose des précautions vis-à-vis de certains produits. N'ouvrons pas la boîte de Pandore, suivons notre rapporteur.

M. Olivier Rietmann.  - Voici un exemple, monsieur le ministre. Avec Mme Primas, nous avons visité dans le Jura une entreprise spécialisée dans les emballages alimentaires. La loi interdit d'utiliser des plastiques recyclés comme emballages alimentaires ; mais elle empêche aussi cette entreprise d'utiliser ses rebuts - des plastiques neufs, qui n'étaient simplement pas au standard mais ne sont pas sortis de l'usine ! Ils deviennent des déchets, et sont souvent réutilisés à l'étranger.

Je voterai cet amendement : il faut libérer les énergies. (M. Pierre Louault applaudit.)

M. Daniel Gremillet.  - Merci monsieur le ministre. Mesurons l'importance de ce sujet en termes économiques. Avec cet amendement, nous n'inventons pas de troisième voie. Prenons l'exemple des pneumatiques : des entreprises comme Michelin ne peuvent réutiliser des matières qui sont pourtant dans le processus de production. Quel gâchis ! On s'est fixé un objectif de recyclage pour 2028 qui ne pourra être atteint si cet amendement n'est pas voté.

Sécurisons cet amendement au cours de la navette, mais n'appauvrissons pas l'industrie française. Il y va de l'emploi et l'attractivité de nos territoires.

Mme Angèle Préville.  - Je suis d'accord avec le rapporteur. En effet, les rebuts ne peuvent revenir dans le process alimentaire, et c'est normal. (MM. Olivier Rietmann et Laurent Somon lèvent les bras au ciel.) Pour réutiliser un plastique, il faut obtenir le grade alimentaire. C'est une question de santé publique et de préservation de l'environnement.

Mme Sophie Primas.  - Et les pneus ?

M. Fabien Genet, rapporteur pour avis.  - N'accréditons pas l'idée qu'il y aurait ceux qui défendraient le développement économique et ceux qui utiliseraient tous les moyens juridiques pour s'y opposer. C'est un procès d'intention que je refuse. Nous sommes tous attachés à développer l'économie circulaire.

Lors de nos auditions, les entrepreneurs ont surtout réclamé la sécurité juridique ; or les meilleures intentions du monde ne la garantissent pas. Nous avons beaucoup travaillé pour comprendre cette législation, qui est complexe, mais pour de bonnes raisons : la protection de l'environnement et la sécurité sanitaire.

Les textes en vigueur sont suffisants : il existe des procédures de sortie du statut de déchet - certes réglementées. Mais certains voudraient peut-être faire sauter toutes les réglementations ?

M. Olivier Rietmann.  - Les faire évoluer.

M. Fabien Genet, rapporteur pour avis.  - L'adjectif « similaire » est dans la définition du statut implicite de sortie du statut de déchet. Créer une troisième catégorie ne rendrait service à personne. Elle serait frappée d'insécurité juridique par rapport à la directive-cadre européenne. Avis défavorable.

M. Fabien Gay.  - Nous voterons cet amendement. Au moment où il faut réutiliser, réemployer, recycler - et personne ne peut m'accuser de vouloir alléger les règles sociales de ce pays (MM. Fabien Genet, Michel Canévet et Olivier Rietmann le confirment en souriant), cet amendement semble de bon sens ; il pourra être revu dans la navette, et il précise bien que l'exploitant doit s'assurer de l'absence de conséquences environnementales. (M. Olivier Rietmann lève les bras en signe d'évidence.) Franchement, jeter au rebut des tonnes et des tonnes de pneus me semble farfelu. Si les règles ne sont pas bonnes, changeons-les : nous sommes là pour ça !

M. Daniel Salmon.  - Ce débat est intéressant, car complexe. Le mot « similaire » ne veut pas dire « identique ». Revenons à l'exemple du plastique. Chaque fois qu'on travaille un plastique, on le fait évoluer. En le thermoformant, on modifie ses caractéristiques. C'est la raison pour laquelle on ne peut le réutiliser de la même manière. Le terme « similaire » est problématique. Je me rangerai à l'avis du rapporteur. Sans doute faut-il regarder de plus près les procédures, mais cet entre-deux pose des problèmes.

Mme Vanina Paoli-Gagin.  - Nous voterons cet amendement. Il fut un temps, nous appelions cela tout simplement des chutes. (M. Olivier Rietmann le confirme ; Mme Marta de Cidrac proteste.) Dès lors que cet amendement contient des garde-fous, il me semble raisonnable.

Vous êtes venu chez Petit Bateau, monsieur le ministre ; souvenez-vous combien les chutes de tissus étaient nombreuses. Revenons au bon sens.

M. Didier Mandelli.  - J'apporte mon soutien total au rapporteur. Il a beaucoup auditionné et analysé cet amendement. Il y a un risque de dérives importantes : qu'est-ce qu'une chute ? Quel est leur volume ? D'où viennent-elles ?

Si nous votions cet amendement, le Gouvernement prendrait sans doute ses responsabilités et le remettrait en question plus tard. Suivons le rapporteur.

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - Cette disposition ne figurait pas dans le texte initial. Cet ajout du sénateur Gremillet nous semble élargir et simplifier l'utilisation de matières premières recyclées.

Si demain les industriels avaient peur de l'insécurité juridique, ils pourraient toujours demander une sortie explicite du statut de déchet.

Quant aux risques que cela amplifie les risques sanitaires, l'amendement contient des garde-fous. Le Gouvernement reste favorable à cet amendement.

L'amendement n°379 rectifié bis est adopté.

Mme le président.  - Amendement n°72 rectifié, présenté par M. Chevrollier, Mme Belrhiti, MM. Belin, E. Blanc, Brisson, Burgoa et Charon, Mmes Demas et Di Folco, M. B. Fournier, Mmes Garriaud-Maylam, F. Gerbaud, Gosselin et Imbert, M. Laménie, Mme Lassarade, MM. Mandelli, de Nicolaÿ, Piednoir, Pointereau, Sol et Tabarot, Mme Ventalon et MM. C. Vial et J.P. Vogel.

Après l'alinéa 14

Insérer deux alinéas ainsi rédigés :

...) Après le a du 3° du I de l'article L. 541-7, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« a ...) Les déchets non dangereux ; » ;

M. Louis-Jean de Nicolaÿ.  - Renforçons la traçabilité des déchets non dangereux en l'alignant sur celle qui s'applique aux déchets dangereux, via la mise en place de Trackdéchets.

Mme le président.  - Amendement identique n°228 rectifié ter, présenté par MM. Longeot, Moga, Levi, S. Demilly et Détraigne, Mme Vermeillet, M. Bacci, Mmes Létard, Dindar et Canayer, MM. Capo-Canellas, Poadja, Le Nay, Cigolotti et Kern, Mme Muller-Bronn, M. L. Hervé, Mme Billon, MM. Duffourg, J.M. Arnaud et Folliot, Mme Férat, M. P. Martin et Mme Perrot.

M. Jean-François Longeot.  - Défendu.

M. Fabien Genet, rapporteur pour avis.  - Je partage les objectifs des auteurs : améliorer la lutte contre les transferts illicites de déchets et renforcer l'économie circulaire. Mais je m'interroge sur la proportionnalité et l'applicabilité de cette disposition. Qu'en pense le Gouvernement ?

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - J'entends l'objectif, mais le registre national des déchets, Trackdéchets, a moins d'un an d'existence. Retrait ou avis défavorable : laissons le temps à cet outil de prouver son efficacité sur les déchets dangereux.

M. Fabien Genet, rapporteur pour avis.  - Je me fie à la sagesse du Sénat. (Mme Sophie Primas s'exclame.)

Les amendements identiques nos72 rectifié et 228 rectifié ter sont retirés.

Mme le président.  - Amendement n°86 rectifié bis, présenté par Mme Préville et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Après l'alinéa 14

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

...) Après l'article L. 541-41, il est inséré un article L. 541-41-... ainsi rédigé :

« Art. L. 541-41-....  -  L'exportation de produits textiles d'habillement contenant des fibres plastiques devenant des déchets dans le pays destinataire est assimilée au transfert illicite de déchets. »

Mme Angèle Préville.  - Parlons d'un phénomène que chacun connaît : notre surconsommation - elle a doublé en quinze ans - des textiles jetables, qui, très peu portés, terminent dans des bennes, sont transportés en Afrique et, parce qu'ils ne sont pas portables, deviennent immédiatement des déchets. Assimilons ce phénomène à un transfert illicite de déchets, que la convention de Bâle interdit dans les pays qui n'ont pas de capacité de retraitement. En Afrique, on voit ainsi des monceaux de déchets sur les plages ou au bord des rivières, qui, sous l'action du soleil et du vent, se décomposent en microfibres et polluent l'environnement. Empêchons ces exportations, qui sont un véritable fléau.

M. Fabien Genet, rapporteur pour avis.  - Le règlement européen du 14 juin 2006 fondé sur la convention de Bâle vise à garantir le retraitement des déchets exportés. Cet amendement entre donc dans un champ qui relève de la compétence de l'Union européenne. Avis défavorable.

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - Même avis. L'objectif est louable, mais l'amendement n'est pas opérationnel. La commission a porté l'amende pour l'exportation de déchets illicites à cinq fois la valeur de leur retraitement : je préfère cela. Nous n'avons pas les moyens d'effectuer des contrôles sur place. Retrait ou avis défavorable.

Mme Angèle Préville.  - Quand ces vêtements quittent notre pays, ils ne sont pas considérés comme des déchets. C'est un amendement d'appel, mais nous ne pouvons fermer les yeux, notre responsabilité est trop grande. Quelle honte ! La question va nous revenir à la figure. Au moins, posons le principe de l'interdiction.

M. Pierre Louault.  - Sur le fond, Mme Préville a vraiment raison. Ce ne sont pas des déchets qui partent de France, mais des vêtements, qui, à 90 % deviennent des déchets. Pour les récupérateurs, c'est un moyen de se débarrasser à peu de frais de déchets importants.

M. Fabien Gay.  - Voilà un amendement extrêmement intéressant. Il interroge la manière dont nous consommons et nous achetons. Les enseignes concernées produisent à très bas prix ; comme les salaires sont bas, les gens les achètent, mais ne les portent que deux ou trois fois. Certaines enseignes présentent une trentaine de collections par an, alors qu'il y en avait deux dans notre enfance !

Il y a 40 000 points de collecte. Seul un quart est destiné au recyclage. Et le reste ? On ne sait pas quoi en faire.

Monsieur le ministre, ne pourrait-on pas, d'ici 2030, construire les filières industrielles de recyclage et de réemploi ? Bien sûr, aujourd'hui, c'est moins cher pour le capital d'envoyer ces textiles en Afrique. Mais même avec de la bonne volonté, il nous manquerait aujourd'hui les filières.

M. André Reichardt.  - La préoccupation de Mme Préville est tout à fait légitime. Mais dans sa rédaction, l'amendement ne fonctionne pas. Il part du principe que les vêtements concernés deviennent automatiquement des déchets. Mais des récupérateurs vendent quelques-uns de ces vêtements comme vêtements. On ne sait pas à l'avance si tous ces vêtements deviendront ou non des déchets. Espérons que la navette permettra d'améliorer cet amendement ; mais je ne peux pas le voter en l'état.

M. Daniel Salmon.  - Je remercie Mme Préville de soulever un tel débat. Nous avons tous en tête, en Afrique, ces montagnes de vêtements issus de la fast fashion, source d'une pollution généralisée. Il nous faudrait définir une responsabilité élargie du producteur (REP), mais aussi de l'importateur. L'amendement n'est sans doute pas parfait, mais je le voterai pour qu'il entre dans la navette. J'espère que nous pourrons trouver la réglementation adéquate pour arrêter cette exportation indigne.

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - Nous avons tous vu les images de ces montagnes de textiles par milliers sur les plages du Ghana. Vous parlez de trente collections par an ; mais certaines marques sortent une collection par jour ! (On le confirme sur plusieurs travées.)

Oui, il faudrait recycler chez nous ! Mais les Relais vêtements doivent faire face à des procédures d'un an pour transformer un t-shirt en chiffon. Il faut donc simplifier. (M. Daniel Salmon proteste.) Ensuite, il faut construire la filière du recyclage. Enfin, il faut sanctionner davantage les producteurs qui mentiraient sciemment dans leur déclaration de douane. Avec le texte de la commission, la sanction sera cinq fois supérieure au coût du retraitement en France !

Mais avec votre amendement, vous allez trop loin. Monsieur Gay, je suis prêt à travailler sur la fast fashion.

L'amendement n°86 rectifié n'est pas adopté.

Mme le président.  - Amendement n°82 rectifié bis, présenté par Mme Préville et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Alinéa 29

Supprimer cet alinéa.

Mme Angèle Préville.  - Nous sommes assez dubitatifs face au délai pour infliger une amende après le constat d'un transfert illicite de déchets. Nous proposons donc de supprimer l'alinéa 29. Que se passera-t-il demain, si le ministre ne pouvait pas appliquer une sanction dans les trois ans ? Les responsables en sortiraient indemnes ?

Mme le président.  - Amendement identique n°193, présenté par MM. Fernique, Salmon, Breuiller, Benarroche, Dantec, Dossus, Gontard et Labbé, Mme de Marco, M. Parigi et Mmes Poncet Monge et M. Vogel.

M. Jacques Fernique.  - Les travaux d'investigation peuvent être très longs. Il ne faut pas limiter le délai de prescription.

Mme le président.  - Amendement identique n°249, présenté par Mme Varaillas et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Mme Marie-Claude Varaillas.  - L'article 4 est louable. Le réemploi peut être coûteux au début du processus, mais à terme il est très vertueux. Les dérogations prévues dans cet article doivent être encadrées, pour éviter les fraudes. Dès lors, pourquoi l'État ne disposerait-il que de trois ans pour sanctionner ? La recherche des responsables peut être bien plus longue. Supprimons l'alinéa 29.

M. Fabien Genet, rapporteur pour avis.  - Notre commission a fait passer le délai d'un à trois ans. Les procédures d'investigation peuvent être lourdes, mais la suppression de tout délai serait excessive. Avis défavorable.

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - Même avis. Il faut une forme de prescription. Si un an était peut-être insuffisant, trois ans suffisent. La prescription est un principe général du droit. Retrait ou avis défavorable.

Les amendements identiques nos82 rectifié bis, 193 et 249 sont retirés.

Mme le président.  - Amendement n°84 rectifié bis, présenté par Mme Préville et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Alinéa 30

Remplacer le mot :

plus

par le mot :

moins

Mme Angèle Préville.  - Le montant des sanctions devrait être « au moins égal » et non pas « au plus égal » à cinq fois le coût du retraitement. Remplaçons le plafond par un plancher afin de s'assurer que la sanction soit dissuasive.

M. Fabien Genet, rapporteur pour avis.  - Avis défavorable. Je vois que certains se rallient aux peines planchers... (Rires sur les travées du groupe CRCE)

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - Après l'imprescriptibilité, les peines planchers : cela va loin ! (Sourires) Avis défavorable.

L'amendement n°84 rectifié bis n'est pas adopté.

Mme le président.  - Amendement n°83 rectifié bis, présenté par Mme Préville et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Alinéa 30

Remplacer le mot :

cinq

par le mot :

dix

Mme Angèle Préville.  - La commission a voté notre amendement portant de trois à cinq fois le montant maximal de l'amende. Nous proposons de le porter à dix fois le coût du retraitement. Rien n'obligerait le Gouvernement à aller aussi loin. Les opérateurs économiques concernés ont des moyens financiers importants.

M. Fabien Genet, rapporteur pour avis.  - Nous maintenons notre position. Dix fois, c'est excessif. Avis défavorable.

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - Je rappelle que le montant de l'amende est cinq fois le coût du retraitement en France. C'est suffisamment dissuasif. Retrait ou avis défavorable.

L'amendement n°83 rectifié bis est retiré.

L'article 4, modifié, est adopté.

APRÈS L'ARTICLE 4

Mme le président.  - Amendement n°49 rectifié, présenté par Mme Paoli-Gagin et M. Malhuret.

Après l'article 4

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

À la première phrase du II de l'article L. 541-9 du code de l'environnement, les mots : « peut être » sont remplacés par le mot : « est ».

Mme Vanina Paoli-Gagin.  - Nous souhaitons instaurer des objectifs d'incorporation des matières premières recyclées dans la fabrication de certains produits et matériaux. Selon l'Ademe, cette incorporation permet de réduire de 58 % pour l'acier et 92 % pour l'aluminium les émissions de gaz à effet de serre.

M. Fabien Genet, rapporteur général.  - Le pouvoir réglementaire peut déjà imposer des ratios d'incorporation. De plus, cela relève aussi du droit européen. Avis défavorable.

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - Je partage votre objectif, mais c'est un instrument à manier d'une main tremblante. En inscrivant une telle mesure dans la loi, nous risquons de fragiliser des filières. Développons auparavant le recyclage et les filières REP, puis généralisons. Retrait ou avis défavorable.

L'amendement n°49 rectifié est retiré.

Mme le président.  - Amendement n°87 rectifié bis, présenté par Mme Bonnefoy et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Après l'article 4

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le troisième alinéa de l'article L. 541-15-8 du code de l'environnement, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :

« Les produits textiles d'habillement, les chaussures ou le linge de maison neufs destinés aux particuliers ayant été retournés par les clients à leur distributeur ou plate-forme en ligne ne peuvent faire l'objet ni d'une destruction en France ni d'une exportation à des fins de destruction à l'étranger.

« Les distributeurs et plates-formes de vente en ligne sont tenus de mettre à nouveau à la vente ces produits ou de les réemployer notamment par le don à des associations de lutte contre la précarité et des structures de l'économie sociale et solidaire bénéficiant de l'agrément « entreprise solidaire d'utilité sociale » tel que défini à l'article L. 3332-17-1 du code du travail, de les réutiliser ou de les recycler lorsque ces produits demeurent invendus, dans le respect de la hiérarchie des modes de traitement mentionnée à l'article L. 541-1 du présent code. »

Mme Angèle Préville.  - Nicole Bonnefoy avait déjà déposé cet amendement en 2021. Les importations deviennent massives avec le développement du commerce électronique. Les conséquences écologiques sont désastreuses. L'e-commerce engendre plus de retours et d'invendus que le commerce traditionnel, notamment en matière textile. Nous voulons interdire la destruction ou l'exportation pour destruction des marchandises neuves du secteur de l'habillement. On nous avait dit que ces dispositions étaient satisfaites depuis la loi Agec. Qu'en est-il ? Les contrôles et les amendes sont trop faibles, donc peu dissuasifs. De plus, la majorité de la destruction n'a pas lieu en France, mais dans les pays fabricants, où la loi Agec ne s'applique pas.

M. Fabien Genet, rapporteur pour avis.  - Cet amendement nous semble bien satisfait par l'article 35 de la loi Agec. Avis défavorable.

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - Retrait ou avis défavorable : adoptée, cette disposition ne ferait que répéter ce que dit déjà la loi Agec Mais peut-être est-il temps d'évaluer cette dernière ?

L'amendement n°87 rectifié bis n'est pas adopté.

Mme le président.  - Amendement n°180 rectifié, présenté par Mmes Micouleau et Estrosi Sassone, MM. Bacci et Belin, Mmes Belrhiti et Bonfanti-Dossat, MM. Bouchet, Brisson, Burgoa, Cambon et Charon, Mmes Di Folco, Dumont, Garriaud-Maylam, F. Gerbaud, Imbert et Joseph et MM. D. Laurent, Milon et Tabarot.

Après l'article 4

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le troisième alinéa de l'article L. 541-21-2 du code de l'environnement, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Tout manquement à ces obligations est sanctionné par une amende dont le montant est précisé par décret. »

Mme Dominique Estrosi Sassone.  - Au vu de la faible application du décret du 16 juillet 2021 relatif au tri des déchets - papier, métal, plastique, verre et textiles, notamment - , Mme Micouleau propose de sanctionner son non-respect d'une amende.

Mme le président.  - Amendement identique n°191 rectifié, présenté par Mme Havet, M. Buis, Mme Schillinger, M. Rohfritsch, Mmes Duranton et Phinera-Horth et M. Mohamed Soilihi.

M. Bernard Buis.  - Amendement identique de Mme Havet.

Mme le président.  - Amendement identique n°258, présenté par Mme Cukierman et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Mme Cécile Cukierman.  - Je poursuis la métaphore musicale... Cet amendement et l'amendement n°259, c'est un peu comme dans une boîte de nuit : deux salles, deux ambiances. Il s'agit de deux façons de rendre plus efficaces le tri, le recyclage et l'économie circulaire. La première option consiste à renforcer les sanctions contre ceux qui ne respectent pas les règles, la seconde à valoriser ceux qui font des efforts via une attestation annuelle mise en ligne sur une plateforme dédiée. Vous avez le choix...

Mme le président.  - Amendement n°259, présenté par Mme Cukierman et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Après l'article 4

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Afin de garantir le respect du décret n° 2021-950 du 16 juillet 2021 relatif au tri des déchets de papier, de métal, de plastique, de verre, de textiles, de bois, de fraction minérale et de plâtre, l'attestation annuelle de collecte et de valorisation des sept flux de déchets concernés est mise en ligne sur une plateforme dédiée, consultable par le grand public. Les modalités seront fixées ultérieurement par décret.

M. Fabien Genet, rapporteur pour avis.  - En cas de non-respect du tri 7 flux, le code de l'environnement prévoit des astreintes journalières jusqu'à 1 500 euros ou une amende pouvant atteindre 150 000 euros. Des sanctions pénales sont également prévues, jusqu'à deux ans d'emprisonnement et 75 000 euros d'amende. Les amendements identiques sont donc satisfaits : avis défavorable. Avis défavorable également à l'amendement n°259.

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - Nous sommes clairement défavorables à l'amendement n°259, disproportionné. Les autres sont, en effet, satisfaits : retrait, sinon défavorable.

Les amendements identiques nos180 rectifié, 191 rectifié et 258, ainsi que l'amendement n°259, sont retirés.

AVANT L'ARTICLE 5

Mme le président.  - Amendement n°146, présenté par M. Redon-Sarrazy et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Avant l'article 5

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article L. 151-4 du code de l'urbanisme est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Il établit un inventaire des friches potentiellement mobilisables. Cette disposition entre en vigueur lors de la prochaine modification ou révision du document d'urbanisme. »

M. Christian Redon-Sarrazy.  - Nous abordons la réhabilitation des friches. Le code de l'urbanisme dispose que le projet d'aménagement et de développement durable (PADD) du PLU tient compte de la capacité à mobiliser les friches. Nous voulons encourager les territoires à s'emparer de leurs friches industrielles. L'identification précise de ces friches est un préalable essentiel ; elle s'appuiera sur l'outil mis à disposition par le Cerema, Cartofriches. Il est proposé que cette mesure soit mise en oeuvre lors de la prochaine modification ou révision des documents d'urbanisme. C'est utile dans la perspective du ZAN.

M. Laurent Somon, rapporteur de la commission des affaires économiques.  - Les communes sont déjà tenues de tenir compte des friches dans leur PLU. Nombre de communes se sont engagées dans cet inventaire. Le Cerema les recense dans Cartofriches. N'imposons pas de charges supplémentaires à des communes qui en ont suffisamment. Avis défavorable.

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - Ne chargeons pas en effet les petits territoires. Nous avons missionné la Banque des territoires pour faire ce travail. Son résultat sera aisément disponible pour les investisseurs potentiels. Par ailleurs, la Banque des territoires mobilise 1 milliard d'euros pour dépolluer plus de 2 000 hectares de friches. Avis défavorable.

L'amendement n°146 n'est pas adopté.

ARTICLE 5

Mme Cécile Cukierman .  - Nous avons besoin d'une réelle évaluation des friches - on parle de 90 000 à 150 000 hectares -, mais aussi de leur état et du coût de leur requalification. Mme Primas évoquait le devenir du fonds friches : c'est en effet un enjeu fondamental pour les prochaines années. En deux ans, 2 700 hectares ont été recyclés. Même en prenant la fourchette basse de 90 000 hectares, il reste donc un vrai gap à franchir. Quand une friche est requalifiée, elle fait revivre le territoire communal. Il y a urgence à activer ce levier pour éviter une fracture territoriale.

Mme le président.  - Amendement n°309, présenté par le Gouvernement.

I.  -  Alinéa 3

Remplacer le mot :

autorisées

par les mots :

pour lesquelles une autorisation est demandée

et les mots :

, ou d'évolutions en cours des documents d'urbanisme

par les mots :

en vigueur à la date de saisine de cette personne publique

II.  -  Alinéa 7

Remplacer le mot :

autorisées

par les mots :

pour lesquelles un enregistrement est demandé

et les mots :

ou d'évolutions en cours des documents d'urbanisme

par les mots :

en vigueur à la date de saisine de cette personne publique

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - Rappelons l'objectif : faire plus vite. L'article 5 prévoit plusieurs leviers pour mettre des terrains à disposition. Le préfet pourra par exemple accélérer les cessations d'activité. La procédure de tiers demandeur sera renforcée. Je partage les propositions de la commission et m'interroge sur la sécurité juridique du dispositif.

Mme le président.  - Amendement n°407, présenté par M. Somon, au nom de la commission des affaires économiques.

I. - Alinéa 3

Remplacer le mot :

autorisées

par les mots :

pour lesquelles une autorisation est demandée

II. - Alinéa 7

Remplacer le mot :

autorisées

par les mots :

pour lesquelles un enregistrement est demandé

M. Laurent Somon, rapporteur.  - Amendement de précision juridique.

Sur l'amendement n°309, le préfet n'est contraint par aucun document pour les remises en état.

Nous avons introduit la possibilité pour le maire de signaler au préfet que l'usage futur est incompatible avec des prescriptions de pollution qui seraient suffisantes pour un usage industriel. Les collectivités territoriales doivent pouvoir faire évoluer comme elles l'entendent les documents d'urbanisme. Compte tenu des délais d'évaluation de ces documents, nous avons précisé que si une consultation est en cours, le maire peut le signaler au préfet.

Le préfet gardera un pouvoir d'appréciation. Nous faisons confiance à son bon sens : allez-vous nous le reprocher ? Avis défavorable sur l'amendement n°309.

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - Je suggère un retrait de votre amendement au profit de celui du Gouvernement.

L'amendement n°309 n'est pas adopté.

L'amendement n°407 est adopté.

Mme le président.  - Amendement n°37 rectifié, présenté par Mme Paoli-Gagin, MM. Capus, Guerriau et A. Marc, Mme Mélot et MM. Lagourgue, Grand, Chasseing, Wattebled, Malhuret, Decool et Menonville.

Alinéas 5 et 9

Remplacer l'année :

2022

par l'année :

2023

Mme Vanina Paoli-Gagin.  - C'est, en quelque sorte, un amendement anti larsen... L'article 5 comporte des dispositions permettant un effet rétroactif pour les cessations d'activité, tout en limitant les risques d'effet d'aubaine. Nous proposons d'intégrer une année supplémentaire dans cette disposition « voiture-balai », afin de rendre davantage de sites éligibles.

M. Laurent Somon, rapporteur.  - Depuis le 1er juin 2022, le recours à un tiers certifié est obligatoire en application de la loi d'accélération et de simplification de l'action publique (Asap). Avis défavorable.

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - Même avis. Nous risquerions de revenir à des dispositions qui prévalaient avant la loi Asap.

L'amendement n°37 rectifié est retiré.

Mme le président.  - Amendement n°185 rectifié, présenté par MM. Menonville, Médevielle et Verzelen, Mme Mélot, MM. Lagourgue, Decool et Chasseing, Mme Paoli-Gagin et MM. Capus et Wattebled.

Alinéa 11

1° Au début

Insérer les mots :

Dans le but de faciliter l'implantation d'activités industrielles,

2° Compléter cet alinéa par les mots :

, dans des conditions déterminées par un décret en Conseil d'État

Mme Vanina Paoli-Gagin.  - La restriction au droit de propriété prévue pour faire procéder à la cessation d'une activité inexploitée se justifie par son objectif d'intérêt général : faciliter les implantations d'activités industrielles. Elle doit être limitée à ce seul objectif et encadrée par le Conseil d'État.

M. Laurent Somon, rapporteur.  - Le recours au Conseil d'État ne paraît pas nécessaire. Il n'y a pas d'atteinte au droit de propriété. Avis défavorable.

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - Même avis. L'article ne contrevient pas au droit de propriété : on n'exproprie pas le détenteur du site, on lui enjoint de dépolluer. Retrait ou avis défavorable.

L'amendement n°185 rectifié est retiré.

Mme le président.  - Amendement n°308, présenté par le Gouvernement.

Alinéas 13 à 15

Rédiger ainsi ces alinéas :

a) Le I est ainsi rédigé :

« I.  -  Dès la notification de la cessation d'activité d'une installation classée pour la protection de l'environnement, un tiers intéressé peut demander au représentant de l'État dans le département de se substituer à l'exploitant, avec son accord, pour réaliser les travaux de réhabilitation en fonction de l'usage que ce tiers envisage pour le terrain concerné.

« Le tiers intéressé peut également demander, selon les mêmes modalités que celles prévues au précédent alinéa, à se substituer à l'exploitant pour réaliser, outre la réhabilitation, tout ou partie des mesures de mise en sécurité de l'installation. » ;

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - Il s'agit de corriger une disposition adoptée en commission, qui, pour le coup, touche au droit de propriété. Le tiers demandeur pourrait interrompre l'activité d'un exploitant qui ne l'a pourtant pas cessée. Nous souhaitons qu'il puisse intervenir dès que possible, mais après l'arrêt de l'activité.

M. Laurent Somon, rapporteur.  - Dès lors qu'il y a suspicion d'arrêt, il s'agit de l'anticiper pour essayer d'accélérer davantage. Votre amendement restreindrait la possibilité pour le tiers demandeur d'intervenir en amont de la cessation d'activité.

Certes, le préfet pourrait avoir du mal à se prononcer très en amont sur la viabilité du projet. Mais il lui est loisible de refuser l'autorisation s'il juge que le projet est trop incertain - c'est d'ailleurs ce qu'il fait aujourd'hui.

Par ailleurs, les garanties financières peuvent être revues en cas de modification des mesures initialement prévues.

Il serait contre-productif de bloquer par principe cette possibilité d'anticipation. Avis défavorable.

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - Ce qui m'inquiète, c'est que le préfet ou les services de l'État seraient dépositaires du risque d'exploitation. Mieux vaut attendre que l'exploitant ait cessé son activité avant de prendre la main.

L'amendement n°308 n'est pas adopté.

Mme le président.  - Amendement n°234 rectifié, présenté par Mmes Loisier et Vermeillet, MM. Bonneau, Savary, de Nicolaÿ et Henno, Mmes Billon et Vérien, MM. Canévet, J.M. Arnaud, Le Nay, L. Hervé et Duffourg, Mme Morin-Desailly, M. Lafon, Mme Férat, M. Détraigne et Mme de La Provôté.

Alinéa 20

Compléter cet alinéa par les mots :

et de la réhabilitation nécessaire pour placer le terrain d'assiette dans un état permettant un usage comparable à la dernière période d'activité, dans le respect des intérêts mentionnés à l'article L. 511-1 et, le cas échéant, à l'article L. 211-1

M. Michel Canévet.  - L'exploitant d'une installation classée protection de l'environnement (ICPE) est tenu à sa remise en l'état, mais peut la confier à un tiers demandeur. Dans le cas où celui-ci est défaillant, la responsabilité doit revenir au dernier exploitant.

M. Laurent Somon, rapporteur.  - L'autorisation donnée au tiers demandeur est conditionnée à l'obligation de constituer des garanties. Les défaillances sont rarissimes, les tiers demandeurs s'engageant sur des projets rentables. Le risque de devoir assumer la réhabilitation est un frein important pour les exploitants à s'engager dans une procédure de tiers demandeur. Le texte apporte un équilibre entre responsabilité des pollueurs et efficacité du dispositif. Retrait, sinon avis défavorable.

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - Même avis.

L'amendement n°234 rectifié n'est pas adopté.

L'article 5, modifié, est adopté.

APRÈS L'ARTICLE 5

Mme le président.  - Amendement n°136 rectifié, présenté par MM. Kern, Levi et Détraigne, Mme Billon, MM. Henno et Louault, Mme Jacquemet, M. Canévet, Mmes Vermeillet et Gacquerre et MM. Folliot, Duffourg, Le Nay, L. Hervé et J.M. Arnaud.

Après l'article 5

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Les collectivités territoriales compétentes en matière d'urbanisme peuvent prévoir, dans leurs documents d'urbanisme, que les terrains qui ont fait l'objet d'une réhabilitation à la suite d'une cessation d'activité de tout ou partie de l'installation classée pour la protection de l'environnement sont destinés à un usage industriel prioritairement orienté vers les activités de gestion de déchets exercées par les structures de l'économie sociale et solidaire.

M. Michel Canévet.  - Il faut orienter les réhabilitations de friches vers les structures de l'économie sociale et solidaire.

M. Laurent Somon, rapporteur.  - Nous voulons réinstaller prioritairement des activités industrielles sur les zones anciennement industrielles, mais votre amendement risque d'avoir un effet contraire. Il faut du temps pour modifier un PLU. Il y a d'autres moyens de soutenir les activités de gestion des déchets. Avis défavorable.

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - Ce type de dispositions peut concerner des secteurs, pas des statuts d'entreprise. En précisant que c'est un statut qui prévaut, vous allez au-delà des dispositions autorisées dans le cadre du PLU. Retrait ?

L'amendement n°136 rectifié est retiré.

Mme le président.  - Amendement n°247, présenté par Mme Cukierman et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Après l'article 5

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Dans un délai de six mois, le Gouvernement remet au Parlement un rapport concernant les moyens nécessaires à la requalification des friches de plus de dix ans, en faveur de la réindustrialisation et des enjeux de lutte contre l'artificialisation induits par les objectifs mentionnés à l'article article 191 de la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets.

Mme Cécile Cukierman.  - Les communes sont souvent démunies face au défi de la requalification des friches. Les friches ont amené, bien souvent, d'autres friches, fragilisant à terme des territoires et entraînant la fermeture de services publics.

Il est urgent d'amplifier les actions engagées : 2 700 hectares de friches requalifiées, c'est trop peu au regard des défis auxquels nous faisons face en matière d'aménagement du territoire.

Il n'y a pas une unique urgence, qui serait la lutte contre l'artificialisation. Je considère qu'il y en a quatre, sans hiérarchie : souveraineté alimentaire, logement, industrie et environnement - des friches requalifiées, ce sont des sols renaturés, qui gardent l'eau.

Il faut aussi rétablir le remboursement du fonds de compensation de la TVA pour les dépenses du compte 212.

M. Laurent Somon, rapporteur.  - Vous souhaitez un rapport. Une règle vaut par ses exceptions... Votre amendement vise un aspect essentiel non abordé dans le projet de loi : la gestion des anciennes friches. L'exploitant a souvent disparu et les coûts de dépollution sont parfois importants pour la collectivité.

Nous n'avons pas eu un débat suffisant sur le financement, car le Gouvernement l'a reporté au projet de loi de finances.

Le fonds vert sera-t-il abondé et fléché pour que les collectivités puissent mener à bien la requalification de ces friches et y réinstaller de l'industrie ? J'émettrai, étonnamment, un avis favorable.

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - Je reconnais votre volonté de réindustrialiser les territoires délaissés, à savoir les friches de plus de dix ans. J'ai confié au préfet Rollon Mouchel-Blaisot la mission d'identifier les terrains disponibles, de les qualifier et de les rendre disponibles pour les industriels. Nous attendons le rapport avant la fin du mois de juillet. Votre amendement est donc satisfait. Vous pourrez auditionner le préfet.

L'amendement n°247 est adopté et devient un article additionnel.

Les articles 5 bis et 5 ter sont successivement adoptés.

APRÈS L'ARTICLE 5 TER

Mme le président.  - Amendement n°244, présenté par Mme Varaillas et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Après l'article 5 ter

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Dans un délai d'un an, le Gouvernement remet au Parlement un rapport concernant l'opportunité d'un financement de la rénovation et de la modernisation des industries, par le rachat du foncier par les établissements publics de coopération intercommunale ou par des sociétés d'économie mixte communales ou intercommunales, avec l'aide de l'État.

Mme Marie-Claude Varaillas.  - Nous demandons un rapport, pour prendre en compte l'enjeu de la modernisation des industries existantes. Intercommunalités de France souhaite des financements innovants, par exemple en autorisant le rachat des espaces fonciers par les EPCI ou des sociétés d'économie mixte, afin de favoriser à terme des rénovations vertueuses des industries.

M. Laurent Somon, rapporteur.  - Qui serait propriétaire ? Les foncières de ce type peuvent être utiles, mais le lien avec la modernisation des industries reste ténu. Avis défavorable.

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - Même avis. Avis défavorable.

L'amendement n°244 n'est pas adopté.

ARTICLE 6

Mme le président.  - Amendement n°164 rectifié, présenté par M. Montaugé et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

I.  -  Alinéas 3 et 4

Remplacer le montant :

15 000 €

par le montant :

45 000 €

II.  - Après l'alinéa 3

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

...) A la première phrase du 1° du I, le montant « 1 500 » est remplacé par le montant : « 4500 » ;

III.  -  Après l'alinéa 16

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

...) À la première phrase du 4° du II de l'article L. 171-8, le montant : « 15 000 » est remplacé par le montant : « 45 000 » et le montant : « 1500 » est remplacé par le montant : « 4500 » ;

M. Franck Montaugé.  - Les amendes doivent être proportionnées au trouble causé à l'environnement ; il faut porter le plafond de l'amende administrative de 15 000 à 45 000 euros maximum.

Mme le président.  - Amendement identique n°310, présenté par le Gouvernement.

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - Cet article a pour objectif - nous avons des divergences avec la commission - de faire payer les pollueurs et que l'État et les collectivités ne paient pas toute la réhabilitation des sites. Nous sanctionnons ceux qui ne respectent pas les règles. Certes nous supprimons la garantie financière - elle ne fonctionne pas - mais nous introduisons la créance envers la planète, nous en faisons une créance privilégiée qui passera avant les créances fiscales. Nous sanctionnons les contrevenants. Nous consignons des sommes en cas de non-respect des mesures conservatoires en cas d'exploitation illégale, car actuellement 20 millions d'euros manquent aux compagnies d'assurances.

M. Laurent Somon, rapporteur.  - Le montant de 15 000 euros est le résultat d'un parallèle avec les manquements des entreprises à leurs obligations environnementales. Cependant, nous n'avons aucune objection à remonter le plafond, dans la mesure où l'amende reste proportionnée à la gravité des faits.

Les amendements identiques nos164 rectifié et 310 sont adoptés.

Mme le président.  - Amendement n°311, présenté par le Gouvernement.

Alinéa 17

Rétablir cet alinéa dans la rédaction suivante :

3° Au premier alinéa de l'article L. 516-1, les mots : « installations définies par décret en Conseil d'État présentant des risques importants de pollution ou d'accident » sont remplacés par les mots : « installations mentionnées aux articles L. 515-36 et L. 229-32 » ;

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - Nous souhaitons supprimer la garantie, qui est inopérante. Elle coûte aux industriels, notamment à ceux de bonne volonté. Revenons à la rédaction initiale.

M. Laurent Somon, rapporteur.  - Nous sommes sensibles à la compétitivité et aux surtranspositions, comme vous. Nous attendrons le budget pour savoir si les collectivités seront aidées à juste mesure. Avis défavorable.

L'amendement n°311 n'est pas adopté.

L'article 6, modifié, est adopté.

ARTICLE 6 BIS

Mme le président.  - Amendement n°313, présenté par le Gouvernement.

Supprimer cet article.

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - Il faut supprimer une mesure qui existe déjà dans le code de l'environnement.

M. Laurent Somon, rapporteur.  - Cet article relève d'une bonne politique. Pour ne pas complexifier le droit, avec l'accord de l'auteur de l'amendement à l'origine de cet article additionnel, avis favorable.

L'amendement n°313 est adopté et l'article 6 bis est supprimé.

ARTICLE 7

Mme le président.  - Amendement n°291, présenté par M. Buis et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants.

Alinéas 5, 6, 8, 11 et 13

Remplacer les mots :

de restauration et de renaturation

par les mots :

de compensation, de restauration et de renaturation

M. Bernard Buis.  - Amendement de clarification.

Mme le président.  - Amendement n°231 rectifié, présenté par Mmes Loisier et Vermeillet, MM. Bonneau, Savary, de Nicolaÿ et Henno, Mmes Billon et Vérien, MM. Canévet, J.M. Arnaud, Le Nay, L. Hervé et Duffourg, Mme Morin-Desailly et MM. Lafon et Folliot.

I.  -  Alinéas 6 et 8

Remplacer les mots :

sites naturels de restauration et de renaturation

par les mots :

sites de restauration de la nature

II.  -  Alinéa 11

Remplacer les mots :

site naturel de restauration et de renaturation

par les mots :

site de restauration de la nature

M. Michel Canévet.  - Cet amendement veut simplifier encore plus la dénomination des sites. Il est proposé de renommer les sites naturels de compensation en « sites de restauration de la nature ».

M. Fabien Genet, rapporteur pour avis.  - Le Conseil national de la transition écologique (CNTE) s'est inquiété d'une confusion entre les termes dans l'amendement n°291. En commission, nous avions créé deux sections du code de l'environnement pour ne pas confondre la compensation et la renaturation. Avis défavorable.

Avis défavorable à l'amendement n°231 rectifié, qui supprime le terme de renaturation, car il réduirait le champ des sites prévus à l'article 7, ce qui n'est pas l'intention du projet de loi. Les sites naturels de restauration et de renaturation pourraient contribuer à l'atteinte de l'objectif du ZAN à horizon 2050.

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - L'amendement n°291 me paraissait bienvenu. Avis favorable, et avis défavorable à l'amendement n°231 rectifié.

L'amendement n°291 n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°231 rectifié.

Mme le président.  - Amendement n°66, présenté par MM. Fernique, Salmon, Breuiller, Benarroche, Dantec, Dossus, Gontard et Labbé, Mme de Marco, M. Parigi et Mmes Poncet Monge et M. Vogel.

I.- Alinéa 6 

Remplacer les mots :

restauration ou 

par le mot :

restauration et

II.- Alinéa 8

Remplacer le mot : 

attendu

par les mots :

précisément obtenu

M. Jacques Fernique.  - Ces amendements sont inspirés par le Conseil national de protection de la nature (CNPN).

La suppression des sites naturels de compensation (SNC) au profit de sites naturels de restauration et de renaturation (SNRR) nous laisse sceptiques, les garanties apportées n'étant pas suffisantes. L'obligation de résultat est remplacée par une obligation de moyens.

Les actions de compensation doivent être cumulatives : compenser, et développer la biodiversité.

Mme le président.  - Amendement n°206, présenté par MM. Fernique, Salmon, Breuiller, Benarroche, Dantec, Dossus, Gontard et Labbé, Mme de Marco, M. Parigi et Mmes Poncet Monge et M. Vogel.

Alinéa 6

Supprimer les mots :

publiques ou

M. Jacques Fernique.  - Les opérations de restauration volontaire ne doivent concerner que le secteur privé. Concentrons-nous sur l'existant, plutôt que de multiplier les initiatives mal exécutées.

M. Fabien Genet, rapporteur pour avis.  - Le régime juridique des sites de SNC a été très peu utilisé, car la démarche d'agrément, qui repose sur l'évaluation d'un gain écologique théorique, est trop complexe. Avis défavorable.

Monsieur Fernique, la commission a prévu l'utilisation des SNC au titre de la compensation des atteintes à la biodiversité, qui implique une obligation de résultat. C'est de nature à lever vos inquiétudes.

Pourquoi brider les initiatives des personnes publiques ? Avis défavorable à l'amendement n°206.

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - Même avis. De plus, l'interdiction toucherait les ports, qui sont des acteurs importants.

L'amendement n°66 n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°206.

Mme le président.  - Amendement n°312, présenté par le Gouvernement.

I.  -  Alinéa 7

Remplacer les mots :

la délivrance

par les mots :

l'identification

II.  -  Après l'alinéa 8

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Les personnes qui les mettent en oeuvre peuvent vendre des unités de restauration ou de renaturation à toute autre personne publique ou privée.

III.  -  Alinéa 9, seconde phrase

Supprimer cette phrase.

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - Amendement de coordination juridique, qui rend le dispositif plus opérationnel.

M. Fabien Genet, rapporteur pour avis.  - Vous acceptez donc notre réécriture, en l'améliorant. Quel beau travail de coconstruction ! Avis très favorable.

L'amendement n°312 est adopté.

Mme le président.  - Amendement n°232 rectifié bis, présenté par Mmes Loisier et Vermeillet, MM. Bonneau, Savary, de Nicolaÿ et Henno, Mmes Billon et Vérien, MM. Canévet, J.M. Arnaud, Le Nay, L. Hervé et Duffourg, Mme Morin-Desailly, MM. Lafon et Folliot, Mme Férat, M. Détraigne et Mme Pluchet.

Après l'alinéa 8

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

Les sites de restauration et de renaturation peuvent donner lieu à l'attribution de crédits carbone au titre du label ?Bas-Carbone? sous réserve de respecter les principes fixés à l'article L. 229-55.

M. Michel Canévet.  - Il faut articuler le label bas-carbone avec la notion de SNRR.

Mme le président.  - Amendement n°233 rectifié, présenté par Mmes Loisier et Vermeillet, MM. Bonneau, Savary, de Nicolaÿ et Henno, Mmes Billon et Vérien, MM. Canévet, J.M. Arnaud, Le Nay, L. Hervé et Duffourg, Mme Morin-Desailly, MM. Lafon et Folliot et Mme Férat.

Après l'alinéa 8

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Les sites de restauration de la nature ont vocation à développer les services écosystémiques, et participent à la réalisation des politiques publiques de conservation de la nature et d'adaptation au changement climatique.

M. Michel Canévet.  - Cet amendement porte sur les services écosystémiques des SNRR.

Mme le président.  - Amendement n°230 rectifié, présenté par Mmes Loisier et Vermeillet, MM. Bonneau, Savary, de Nicolaÿ et Henno, Mmes Billon et Vérien, MM. Canévet, J.M. Arnaud, Le Nay, L. Hervé et Duffourg, Mme Morin-Desailly, MM. Lafon, Folliot et Chasseing, Mme Férat, M. Détraigne et Mmes de La Provôté et Pluchet.

Après l'alinéa 11

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

...° Au III de l'article L. 163-1, après le mot : « biodiversité », sont insérés les mots : « ou des émissions de carbone » ;

M. Michel Canévet.  - À la compensation des atteintes à la biodiversité, nous ajoutons la compensation des émissions carbone des sites.

M. Fabien Genet, rapporteur pour avis.  - La multifonctionnalité des SNRR et l'ouverture à d'autres objectifs contribuera à leur équilibre financier : le label bas carbone est intéressant pour eux. Avis favorable à l'amendement n°232 rectifié bis.

Avis défavorable à l'amendement n°233 rectifié, qui est juridiquement imprécis.

Sur l'amendement n°230 rectifié, l'article L163-1 du code de l'environnement mentionne la compensation des atteintes à la biodiversité, mais pas celle des émissions de carbone. Avis défavorable.

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - L'amendement n°232 rectifié bis relève du domaine réglementaire. Retrait ou avis défavorable, mais le Gouvernement est favorable à l'octroi de crédits carbone aux SNRR. Avis défavorable aux deux amendements suivants.

L'amendement n°232 rectifié bis est adopté.

L'amendement n°233 rectifié n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°230 rectifié.

Mme le président.  - Amendement n°91 rectifié bis, présenté par M. Gillé et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

....  -  Dans le cadre de leurs compétences concernant les espaces naturels sensibles, les départements produisent un rapport ayant pour but d'évaluer la qualité environnementale des sites de restauration et de renaturation.

Mme Angèle Préville.  - Les départements ont une expérience de la gestion des espaces naturels sensibles ; il convient de rappeler qu'ils peuvent avoir un rôle de conseil dans le choix des sites de renaturation.

M. Fabien Genet, rapporteur pour avis.  - Nous sommes sensibles au rôle des départements en matière de protection de la biodiversité. Pour autant, faut-il leur confier un rôle de contrôle de la qualité des sites en question ? La charge technique, voire financière, serait trop grande. Avis défavorable.

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - Même avis. Je rappelle que les départements font partie des comités de suivi. Ils sont régulièrement informés.

L'amendement n°91 rectifié bis n'est pas adopté.

L'article 7, modifié, est adopté.

APRÈS L'ARTICLE 7

Mme le président.  - Amendement n°21 rectifié ter, présenté par M. Buis, Mmes Havet et Schillinger, MM. Marchand et Dennemont, Mme Duranton et MM. Dagbert et Mohamed Soilihi.

Après l'article 7

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.  -  Au second alinéa du 2° du II de l'article L. 110-1 du code de l'environnement, les mots : « d'absence de perte nette de biodiversité, voire tendre vers un gain de biodiversité » sont remplacés par les mots et deux phrases ainsi rédigées : « de régénération du patrimoine commun de la nation générateur de services écosystémiques tel que défini en I. Les activités régénératrices contribuent à ce que le patrimoine commun de la nation génère davantage de services écosystémiques. Elles s'appuient sur une approche économique, sociale ou technologique qui favorise la résilience des écosystèmes ».

II.  -  Le I entre en vigueur le 1er janvier 2030.

M. Bernard Buis.  - Cet amendement met en valeur le principe de régénération et donne du crédit aux activités qui en relèvent.

M. Fabien Genet, rapporteur pour avis.  - C'est un principe essentiel, mais il convient de ne toucher au droit de l'environnement que d'une main tremblante... Avis défavorable.

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - Ma main tremble aussi. Retrait ?

L'amendement n°21 rectifié ter est retiré.

Mme le président.  - Amendement n°250, présenté par Mme Varaillas et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Après l'article 7

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le deuxième alinéa de l'article L. 163-1 du code de l'environnement est complété par une phrase ainsi rédigée : « Si l'autorité environnementale constate la possibilité de réduire ou d'éviter les atteintes par la réalisation d'un projet similaire sur un site alternatif, le projet n'est pas autorisé en l'état. »

Mme Marie-Claude Varaillas.  - Il convient d'être plus regardants sur les projets de compensation en donnant à l'autorité environnementale la possibilité de ne pas autoriser un projet si un site alternatif, plus écologique, est identifié.

M. Fabien Genet, rapporteur pour avis.  - En vertu de la séquence « éviter, réduire, compenser », la compensation des atteintes à la biodiversité ne doit intervenir qu'en dernier recours. L'amendement est satisfait. Avis défavorable.

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - Même avis.

L'amendement n°250 n'est pas adopté.

Mme le président.  - Amendement n°1 rectifié, présenté par MM. Salmon, Fernique, Breuiller, Benarroche et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Gontard, Labbé et Parigi et Mmes Poncet Monge et M. Vogel.

I.  -  Après l'article 7

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Les grandes entreprises et les entreprises de taille intermédiaire mentionnées à l'article 51 de la loi n° 2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l'économie et qui bénéficient, pour leurs projets industriels, des dispositifs prévus dans la présente loi ou dans la stratégie de réindustrialisation verte du pays rendent publics leurs engagements et actions concourant à la réduction de l'impact de leur entreprise sur la biodiversité.

Dans un délai de trois mois à compter de la promulgation de la présente loi, un décret conjoint du ministre chargé de l'économie et du ministre chargé de l'environnement fixe les conditions et les modalités de présentation de ces stratégies biodiversité des entreprises concernées, le rythme de leurs mises à jours, et vise à la cohérence et à la complémentarité avec les dispositifs en application de la directive (UE) 2022/2464 du Parlement européen et du Conseil du 14 décembre 2022 modifiant le règlement (UE) 537/2014 et les directives 2004/109/CE, 2006/43/CE et 2013/34/UE en ce qui concerne la publication d'informations en matière de durabilité par les entreprises.

L'autorité administrative sanctionne financièrement les entreprises concernées qui ne respectent pas les obligations de publication prévues par le présent article dans des conditions fixées par décret en Conseil d'État.

II.  -  En conséquence, faire précéder cet article d'une division additionnelle et de son intitulé ainsi rédigés :

Chapitre ...

Favoriser le respect de la biodiversité

M. Daniel Salmon.  - Comme l'a souligné Bruno Le Maire, la diminution de l'impact environnemental de l'économie ne doit pas se limiter aux enjeux climatiques, mais doit intégrer également les enjeux de la biodiversité. (On s'amuse à droite.) Ce n'est pas si souvent que nous partageons ses vues !

La biodiversité doit donc devenir un critère d'éligibilité pour les industries françaises qui bénéficierons des dispositifs prévus dans la stratégie et la loi industrie verte. Elles pourraient également communiquer sur ce qu'elles font dans ce domaine.

Mme le président.  - Amendement identique n°92 rectifié ter, présenté par Mme Préville et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Mme Angèle Préville.  - Nous voulons également inclure la prise en compte de la biodiversité comme critère d'éligibilité aux aides publiques.

En accord avec la Ligue de protection des oiseaux (LPO), les entreprises bénéficiant des aides pourraient rendre publiques leurs actions ayant un impact positif sur la biodiversité.

Mme le président.  - Amendement n°104 rectifié, présenté par Mmes Muller-Bronn, Noël, Chain-Larché et F. Gerbaud, M. Bouchet, Mmes Dumont, Belrhiti, Joseph et Ventalon, M. Mandelli, Mme Garriaud-Maylam, MM. Pellevat, B. Fournier et Cambon, Mme Demas et MM. Charon et Reichardt.

Après l'article 7

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Les grandes entreprises et les entreprises de taille intermédiaire, telles qu'elles sont définies à l'article 3 du décret n° 2008-1354 du 18 décembre 2008, et qui bénéficient, pour leurs projets industriels, des dispositifs prévus dans la présente loi ou dans la stratégie de réindustrialisation verte du pays, rendent publics leurs actions et leurs objectifs de réduction de leur impact sur la biodiversité.

M. Didier Mandelli.  - Je plaide depuis longtemps pour l'écoconditionnalité des aides, même si je connais l'avis réservé du rapporteur sur cet amendement. Ici, l'objectif de notre collègue Muller-Bronn est d'alerter sur les enjeux de la biodiversité.

M. Fabien Genet, rapporteur pour avis.  - Nous partageons les intentions des auteurs. Malheureusement, l'amendement nous semble inapplicable, car il est juridiquement compliqué d'identifier les entreprises concernées - voyez les difficultés à définir l'industrie verte elle-même. Avis défavorable.

M. Roland Lescure, ministre délégué.  - Ces trois amendements ne faisant qu'accélérer les dispositions de la directive Droits des actionnaires (SRD), aujourd'hui prévue pour les entreprises de plus de 250 salariés, avis favorable.

M. Daniel Salmon.  - J'ai oublié de dire que notre amendement avait été travaillé par le Medef et la LPO - cela n'est pas si fréquent ! Cela pourrait en convaincre certains... (Mme Sophie Primas proteste.) Les entreprises ont tout intérêts à rendre public ce qu'elles font de bien.

Les amendements identiques nos1 rectifié et 92 rectifié ter ne sont pas adoptés, non plus que l'amendement n°104 rectifié.

Mme le président.  - Nous avons examiné 96 amendements sur ce texte au cours de la journée. Il en reste 139 à examiner.

Prochaine séance aujourd'hui, jeudi 22 juin 2023, à 10 h 30.

La séance est levée à 1 h 10.

Pour le Directeur des Comptes rendus du Sénat,

Rosalie Delpech

Chef de publication

Ordre du jour du jeudi 22 juin 2023

Séance publique

À 10 h 30, 14 h 30 et le soir

Présidence : M. Roger Karoutchi, vice-président, Mme Laurence Rossignol, vice-présidente, M. Vincent Delahaye, vice-président

Secrétaires : M. Jean-Claude Tissot - Mme Marie Mercier

1. Suite du projet de loi relatif à l'industrie verte (procédure accélérée) (texte de la commission, n°737, 2022-2023)

2. Nouvelle lecture de la proposition de loi maintenant provisoirement un dispositif de plafonnement de revalorisation de la variation annuelle des indices locatifs (n°755, 2022-2023)