EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Les Gouvernements de l'Union des Comores, de Djibouti, de Madagascar, de Maurice et des Seychelles ont signé le 29 avril 2018 à Balaclava, à l'île Maurice, deux accords régionaux concernant la coopération dans le domaine de la sécurité maritime dans l'océan Indien occidental et portant l'un sur la coordination des opérations en mer et l'autre sur l'échange et le partage d'informations maritimes. La France et le Kenya ont signé ces accords le 26 novembre 2018 à Nairobi.

Dans le contexte de la crise de la piraterie qui a sévi de manière particulièrement aiguë au cours de la décennie écoulée, de multiples initiatives se sont créées, visant à renforcer la sécurité maritime dans l'océan Indien occidental. Pays riverain de l'océan Indien, la France est particulièrement concernée, avec deux départements, plus d'un million de ressortissants dans la région, le troisième port militaire français, à Port-des-Galets, et l'essentiel de ses flux d'approvisionnement transitant par la zone.

Toutes les initiatives qui ont été développées présentent cependant le double inconvénient de dépendre d'une impulsion extérieure à la région et de se focaliser sur un type seulement de menace maritime. Les présents accords ont au contraire été élaborés par les États riverains et se veulent une réponse globale à l'ensemble des menaces.

L'accord régional sur la coordination des opérations en mer se compose d'un préambule, d'une annexe et de vingt-quatre articles répartis en quatre chapitres. L'accord sur le mécanisme d'échange et de partage de l'information maritime est constitué d'un préambule, d'une annexe et de vingt-deux articles répartis en trois chapitres.

Les deux préambules font référence à la convention de 1982 sur le droit de la mer, à celle de 1988 contre le trafic illicite de stupéfiants, à celle de 1988 pour la répression d'actes illicites contre la sécurité de la navigation maritime, à celle de 1973 pour la prévention de la pollution par les navires et celle de 1974 pour la sauvegarde de la vie en mer, ainsi qu'à la stratégie maritime africaine.

Le préambule de l'accord sur le mécanisme d'échange et de partage de l'information maritime se réfère également à la convention des Nations unies de 2000 contre la criminalité transnationale organisée. Il souligne par ailleurs que le renforcement de la coopération doit se faire dans le respect de la souveraineté nationale, de l'intégrité territoriale et de la non-ingérence dans les affaires intérieures.

La nature et le champ d'application des accords sont décrits aux articles 1 er à 6 pour l'accord régional sur la coordination des opérations en mer et aux articles 1 er à 4 pour le mécanisme d'échange et de partage de l'information maritime :

- la définition de certaines expressions fondamentales, notamment « navire suspect » ou « zone d'opération régionale » pour le premier accord et « information maritime » ou « espace maritime régional » pour le deuxième, fait l'objet des deux articles 1 er ;

- le statut et la différenciation entre « Parties » (États signataires, ainsi que Somalie, Tanzanie et potentiellement Afrique du Sud et Mozambique) et « Partenaires » font l'objet des deux articles 2 . Toute nouvelle adhésion doit être approuvée par consensus des Parties et fait l'objet d'un accord spécifique fixant les conditions du partenariat ;

- les objectifs sont énumérés aux deux articles 3 ;

- l' article 4 de l'accord sur la coordination des opérations en mer précise les mesures facilitant la réalisation des objectifs de l'article précédent ;

- le champ d'application des accords est indiqué à l' article 5 de l'accord sur la coordination des opérations en mer et à l' article 4 du mécanisme d'échange et de partage de l'information maritime. Le premier préserve les immunités des navires et aéronefs d'État, qui ne peuvent être considérés comme suspects. Le deuxième insiste sur le fait que tout échange d'information reste à la discrétion des États. Dans les deux cas, il y est rappelé que les présents accords ne modifient pas les autres instruments juridiques internationaux, en particulier la convention sur le droit de la mer ;

- l' article 6 de l'accord sur la coordination des opérations en mer énumère, de façon non exhaustive, la nature des missions d'intérêt régional qui peuvent entrer dans le cadre de l'accord.

Les opérations coordonnées d'intérêt régional sont traitées dans les articles 7 à 12 de l'accord sur la coordination des opérations en mer :

- les missions coordonnées d'intérêt régional sont des missions d'action de l'État en mer ( article 7 ) déclenchées à la demande d'un des États Parties directement concerné, lors d'une atteinte prévisible à l'intérêt collectif, ou dès lors qu'elle s'inscrit dans le cadre de l' article 6 . Les opérations conduites restent soumises au droit international, aux législations nationales et ne peuvent contrevenir aux droits souverains découlant du droit de la mer ;

- les États Parties s'engagent à répondre rapidement aux demandes de vérification de nationalité et aux autorisations d'arraisonnement et de fouille ( article 8 ) ;

- l' article 9 prévoit la possibilité d'embarquer des agents d'une Partie sur les aéronefs et navires d'une autre Partie et établit une liste des prérogatives qui pourraient leur être confiées. ;

- l'arraisonnement et la fouille par des équipes d'une des Parties peuvent être réalisées à partir des aéronefs et navires d'une autre Partie, selon les modalités définies entre elles ( article 10 ) ;

- l' article 11 prévoit une coopération dans le domaine judiciaire en incitant les Parties à mettre en place les outils et procédures permettant l'établissement d'une compétence juridictionnelle (toutes les atteintes à la sécurité maritime n'étant pas toujours prévues dans les législations nationales), l'admissibilité des preuves recueillies par les autres Parties et l'entraide judiciaire. Ces dispositions ne peuvent contrevenir aux garanties et droits d'un justiciable lors d'une procédure judiciaire ;

- le droit de visite, d'inspection ou de déroutement accordé par le droit international n'est pas modifié par le présent accord ( article 12 ) ;

Le Centre régional de coordination des opérations (CRCO) est créé par l'accord sur la coordination des opérations en mer ( article 13 ). Il est situé aux Seychelles et chargé de planifier les opérations définies à l'article 6, en collaboration avec le Centre régional de fusion de l'information maritime. Il accueille un officier de liaison de chacune des Parties et sa gouvernance est régie par les dispositions indiquées en annexe de l'accord.

Le Centre régional de fusion de l'information maritime (CRFIM) est créé par l'accord sur le mécanisme d'échange et de partage de l'information maritime ( article 5 ). Il est situé à Madagascar et reçoit, stocke, traite, fusionne, partage et échange des informations maritimes aux fins de sécurité maritime, en collaboration avec le Centre régional de coordination des opérations. Il accueille un officier de liaison de chacune des Parties et sa gouvernance est régie par les dispositions indiquées en annexe de l'accord.

Les États hôtes s'engagent à accorder au centre régional qu'ils hébergent les moyens budgétaires, humains et matériels nécessaires à son fonctionnement ( articles 14 de l'accord sur la coordination des opérations en mer et article 7 de l'accord sur le mécanisme d'échange et partage de l'information maritime).

Les autres modalités d'échange d'informations maritimes sont traitées dans les articles 6, puis 8 à 12 de l'accord sur le mécanisme d'échange et de partage de l'information maritime :

- les Parties adoptent une réglementation interne permettant le partage des données, tout en en assurant la confidentialité et l'intégrité ( article 6 ) ;

- les Parties et les Partenaires échangent des informations maritimes qui sont fusionnées par le Centre régional de fusion de l'information maritime (CRFIM) ( article 8 ) ;

- l' article 9 détermine les conditions d'accès aux informations maritimes et rappelle que le partage avec un tiers doit recevoir l'aval des Parties ;

- l'échange d'informations maritimes est effectué par voie électronique sécurisée ( article 10 ) ;

- l' article 11 encadre les mesures de protection des informations et l' article 12 l'utilisation de celles-ci dans une enquête judiciaire.

Les dispositions finales font l'objet des articles 15 à 24 de l'accord sur la coordination des opérations en mer et 13 à 22 de l'accord sur le mécanisme d'échange et de partage de l'information maritime :

- les présents accords ne supposent aucune acceptation de revendications territoriales ( articles 15 du premier accord et 13 du second) ;

- ils prévoient la possibilité d'amendements et règlent la question des différends, des réserves, déclarations, suspensions, retrait et entrée en vigueur (signature par trois Parties) ;

- le dépositaire des accords est la Commission de l'océan Indien ( articles 23 du premier accord et 21 du second).

Chaque accord comporte une annexe qui fixe les dispositions concernant la gouvernance des centres régionaux visés aux articles 13 de l'accord sur la coordination des opérations en mer et 5 de l'accord sur le mécanisme d'échange et de partage de l'information maritime. Leur contenu, identique est le suivant :

- le comité de pilotage est commun aux deux centres. Composé d'un représentant de chacune des Parties et à présidence élue, il constitue l'instance dirigeante qui fixe les grandes orientations et s'assure de l'application des deux accords et du correct fonctionnement des centres régionaux ;

- dans chaque centre régional, un comité technique veille à l'application des décisions du comité de pilotage. Il est composé du directeur du centre concerné, du directeur adjoint et des officiers de liaison présents, afin de garantir la collégialité des décisions prises ;

- chacun des deux directeurs est responsable de son propre centre. Leurs conditions de désignation, ainsi que celles des directeurs adjoints, n'ont pas encore été décidées ;

- les Partenaires qui s'associeraient aux présents accords au sens de l'article 2 sans être des Parties ne disposent pas de droit de vote au sein du comité technique ;

- outre le budget accordé par les États hôtes, les centres régionaux peuvent bénéficier d'autres contributions financières, à condition qu'elles ne portent pas atteinte à l'autonomie du centre, qu'elles soient en adéquation avec les objectifs et mandat du centre et que le comité de pilotage l'approuve.

Telles sont les principales observations qu'appellent l'accord régional sur la coordination des opérations en mer dans l'océan Indien occidental et l'accord pour la mise en place d'un mécanisme d'échange et de partage de l'information maritime dans l'océan Indien occidental.

Page mise à jour le

Partager cette page