EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

En France, la très grande majorité des successions se règlent en ligne directe c'est-à-dire entre parents et enfants ainsi qu'entre ascendants et descendants.

Une minorité est en ligne indirecte, soit entre personnes non directement apparentées, comme entre oncle et neveu, entre cousins, ou entre amis.

Malgré tout, il existe des milliers de successions déclarées vacantes ou en déshérence gérées par l'État via les services du Domaine, et des situations où aucun héritier n'a été identifié, notamment dans les cas où la famille est éloignée, inconnue ou n'a pas manifesté spontanément son intérêt, nécessitant ainsi des recherches pour retrouver d'éventuels ayants droit.

Ce constat posé, il faut rappeler qu'en matière de succession, le notaire joue un rôle central voire obligatoire si la succession comprend un bien immobilier, si le montant de la succession est égal ou supérieur à 5 000 euros et enfin, si un testament a été rédigé.

Selon un rapport de la Cour des comptes intitulé « Les droits de succession », de septembre 2024, près de 98 % des déclarations de succession sont aujourd'hui déposées par un notaire et de façon résiduelle par un avocat.

En l'absence d'héritier apparent et à l'issue d'investigations infructueuses, le notaire peut solliciter les services d'un cabinet de généalogie spécialisé en matière successorale afin de procéder aux recherches nécessaires permettant de trouver un ou plusieurs héritiers.

Cette demande répond à la nécessité pour un notaire de rechercher les ayants droit d'une personne décédée afin de leur faire connaître l'existence de droits successoraux en leur faveur.

La mission du généalogiste est encadrée par l'article 36 de la loi n° 2006-728 du 23 juin 2006 qui impose qu'aucune recherche d'héritier ne peut être menée sans mandat préalable.

Grâce à ce mandat officiel, le généalogiste peut consulter les actes d'état civil et autres archives utiles à la recherche d'héritiers.

Une fois les héritiers retrouvés, le généalogiste leur propose de signer un contrat de révélation qui fixe les conditions de sa rémunération.

Or, cette rémunération est très généralement un pourcentage de l'actif net de la succession. Ainsi, pour des collatéraux ordinaires, tels les cousins, ce ratio peut se situer entre 35 % et 48 % TTC hors frais de constitution de dossier pouvant s'élever entre 95 euros et 240 euros TTC.

Ces proportions sont citées à titre d'exemple car la rémunération varie selon chaque cabinet. En général, en cas d'échec le pourcentage est nul.

Ces émoluments peuvent donc faire l'objet de négociations ; cet élément est rarement porté à la connaissance des héritiers.

Ce système de rémunération peut instaurer une relation déséquilibrée de par la nature même des cocontractants, l'un étant un simple particulier et l'autre, un professionnel.

C'est pourquoi la commission des clauses abusives, dans sa recommandation n° 96-03 du 20 septembre 1996, a relevé notamment que dans des contrats de révélation de succession, la clause relative au paiement des frais de recherche pouvait avoir un caractère abusif.

En effet, au moment de la signature du contrat de révélation, le particulier présumé héritier va signer sans connaître ni l'identité du défunt, ni le degré de parenté avec ce dernier, ni le montant de la succession et encore moins la part de la succession pouvant lui revenir.

Mais par-delà cette question du montant de la rémunération, l'héritier peut signer un mandat, s'apparentant à une procuration générale, au généalogiste afin de le représenter auprès du notaire lors du recouvrement des fonds de la succession.

Charge ensuite au généalogiste de reverser les fonds à l'héritier après prélèvement de ses honoraires.

En signant ce mandat, l'ayant droit ignore que cette pratique est regrettable, comme l'ont démontré des situations où le cabinet de généalogie n'avait pas de compte bancaire distinct entre son propre compte et celui des héritiers.

Le fait que le cabinet possède un compte auprès de la Caisse des dépôts et consignations n'entraîne aucune garantie particulière, sauf dispositions spécifiques.

En cas de faillite, cette confusion ne permet pas de verser les fonds dus aux ayants droit retrouvés.

Le Conseil supérieur du notariat (CSN) a demandé aux notaires de s'assurer que les cabinets de généalogie respectent les règles de collaboration et de déontologie mentionnées dans la convention de partenariat avec les Généalogistes de France ; la dernière convention en date a été signée date du 25 septembre 2024.

Cette convention, d'une durée de trois ans renouvelables, vise à « servir de référence commune aux bonnes pratiques de collaboration interprofessionnelle » et à garantir que les notaires mandatent des généalogistes successoraux dans le respect des règles, notamment celles de l'article 36 de la loi du 23 juin 2006, qui impose l'existence d'un mandat préalable.

Ce texte est un code bonne conduite sans force de loi.

De plus, comme lors d'une vente d'un bien immobilier, il serait cohérent les notaires versent directement aux ayants droit leur part et aux généalogistes, leurs honoraires.

La rémunération de ces derniers sera établie par un barème fixé par décret qui indiquera aussi le montant des vérifications des dévolutions, de plus en plus nombreuses et utiles pour le règlement des successions.

Enfin, à l'heure où les échanges de données personnelles se développent sans réels moyens de limitation et de vérification, la recherche d'héritiers ou d'héritage peut connaître un essor qu'il faut anticiper et donc encadrer.

Par cette proposition de loi, il s'agit d'affirmer les droits et les obligations de l'ensemble des parties prenantes au processus successoral : l'État, les notaires, les généalogistes et bien sûr, les ayants droit.

Elle insère un article 730-6, dans la section 2 « de la preuve de la qualité d'héritier » comprenant les articles 730 à 730-5 du code civil.

Cet article unique porte sur les points suivants :

- fixation des critères de rémunération de la personne à qui a été confié un mandat de recherche des ayants droit ;

- fixation d'un barème par décret tant pour les révélations que pour les vérifications ;

- révélation de leurs droits aux potentiels ayants droit ;

- répartition des fonds et des honoraires uniquement par le notaire en charge de la succession.

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