Renforcer la lutte contre les violences sexuelles et sexistes (PPL) - Texte déposé - Sénat

N° 279

                  

SÉNAT


SESSION ORDINAIRE DE 2024-2025

                                                                                                                                             

Enregistré à la Présidence du Sénat le 29 janvier 2025

PROPOSITION DE LOI

ADOPTÉE PAR L’ASSEMBLÉE NATIONALE


visant à renforcer la lutte contre les violences sexuelles et sexistes,


TRANSMISE PAR

MME LA PRÉSIDENTE DE L'ASSEMBLÉE NATIONALE

À

M. LE PRÉSIDENT DU SÉNAT



(Envoyée à la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le Règlement.)


L’Assemblée nationale a adopté la proposition de loi dont la teneur suit :

                                                                                                                                             

Voir les numéros :

Assemblée nationale (17e législature) : 669, 845 et T.A. 34.






Proposition de loi visant à renforcer la lutte contre les violences sexuelles et sexistes


Article 1er

(Supprimé)


Article 2

Le code de procédure pénale est ainsi modifié :

1° L’article 7 est ainsi modifié :

a) Après le mot : « derniers », la fin du troisième alinéa est supprimée ;

b) (nouveau) Après le même troisième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Le délai de prescription d’un viol est prolongé, le cas échéant, en cas de commission sur une autre victime par la même personne, avant l’expiration de ce délai, d’un nouveau viol, d’une agression sexuelle ou d’une atteinte sexuelle, jusqu’à la date de prescription de cette nouvelle infraction. » ;

1° bis (nouveau) Au quatrième alinéa de l’article 8, après le mot : « article, », sont insérés les mots : « d’un viol, » ;

2° Le dernier alinéa de l’article 9-2 est ainsi modifié :

a) Les mots : « commis sur un mineur » sont supprimés ;

b) À la fin, les mots : « commises sur un autre mineur » sont supprimés.


Article 3

I. – Après l’article 222-14-3 du code pénal, il est inséré un article 222-14-3-1 ainsi rédigé :

« Art. 222-14-3-1. – Sans préjudice de l’application des articles 223-15-3 et 222-33-2-1, le fait d’imposer un contrôle coercitif sur la personne de son conjoint, du partenaire auquel on est lié par un pacte civil de solidarité ou de son concubin par des propos ou des comportements, répétés ou multiples, portant atteinte aux droits et libertés fondamentaux de la victime ou instaurant chez elle un état de peur ou de contrainte dû à la crainte d’actes exercés directement ou indirectement sur elle-même ou sur autrui, que ces actes soient physiques, psychologiques, économiques, judiciaires, sociaux, administratifs, numériques ou de toute autre nature, est puni de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 € d’amende lorsque ces faits ont causé une incapacité totale de travail inférieure ou égale à huit jours ou n’ont entraîné aucune incapacité de travail.

« Les mêmes peines sont encourues lorsque cette infraction est commise par un ancien conjoint ou un ancien concubin de la victime ou par un ancien partenaire lié à cette dernière par un pacte civil de solidarité.

« Les peines encourues sont portées à cinq ans d’emprisonnement et à 75 000 € d’amende lorsque l’infraction a causé une incapacité totale de travail supérieure à huit jours.

« Les peines encourues sont portées à sept ans d’emprisonnement et à 100 000 € d’amende lorsque l’infraction :

« 1° A créé chez la victime une situation de handicap temporaire ou permanent ;

« 2° A été commise sur une personne particulièrement vulnérable en raison de son âge, de son handicap visible ou invisible ou de son état de santé physique ou psychologique.

« Les peines encourues sont portées à dix ans d’emprisonnement et à 1 000 000 € d’amende lorsque l’infraction :

« a) A été commise en présence d’un mineur ou dans un contexte où un mineur résidait de manière habituelle au domicile de la victime ou de l’auteur ;



« b) A été facilitée par l’usage abusif de dispositifs ou d’institutions, tels que des actions en justice, des lieux de soins, des dispositifs administratifs ou des mesures de protection de l’enfance. »



II (nouveau). – Le code civil est ainsi modifié :



1° Le deuxième alinéa de l’article 373-2-1 est complété par les mots : « , parmi lesquels l’exercice d’un contrôle coercitif, au sens de l’article 222-14-3-1 du code pénal, d’un parent sur l’autre en présence de l’enfant » ;



2° Aux deuxième et dernier alinéas de l’article 373-2-10, le mot : « emprise » est remplacé par les mots : « contrôle coercitif » ;



3° Au début du 6° de l’article 373-2-11, sont ajoutés les mots : « Le contrôle coercitif, » ;



4° La seconde phrase du premier alinéa de l’article 373-2-12 est complétée par les mots : « ainsi que sur un éventuel contrôle coercitif et les psycho-traumatismes associés » ;



5° Le troisième alinéa de l’article 378 est complété par deux phrases ainsi rédigées : « Néanmoins, s’il s’agit d’une condamnation reposant sur l’existence d’un contrôle coercitif, la juridiction ordonne le retrait total de l’autorité parentale, sauf décision contraire spécialement motivée. Si elle ne décide pas le retrait total de l’autorité parentale, la juridiction ordonne le retrait partiel de l’autorité parentale ou le retrait de l’exercice de l’autorité parentale, sauf décision contraire spécialement motivée. » ;



6° Au premier alinéa de l’article 378-1, après le mot : « témoin », sont insérés les mots : « d’un contrôle coercitif, » ;



7° À l’article 378-2, après les deux occurrences du mot : « crime », sont insérés les mots : « ou un délit reposant sur l’existence d’un contrôle coercitif » ;



8° L’article 515-11 est ainsi modifié :



a) À la première phrase du premier alinéa, après le mot : « allégués », sont insérés les mots : « , y compris un contrôle coercitif exercé sur la victime, » ;



b) Le 5° est complété par une phrase ainsi rédigée : « Lorsque l’ordonnance de protection est prise en raison du contrôle coercitif exercé par la victime, l’absence de suspension de l’exercice de l’autorité parentale et des droits de visite et d’hébergement fait l’objet d’une décision spécialement motivée » ;



9° L’article 1140 est complété par une phrase ainsi rédigée : « Une telle contrainte peut résulter du contrôle coercitif imposé au cocontractant. »


Article 4 (nouveau)

Dans un délai d’un an à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur l’évaluation et l’amélioration des politiques publiques en matière de lutte contre l’inceste et d’accompagnement des victimes. Ce rapport doit :

1° Analyser les dispositifs existants en matière de prévention, de communication et de sensibilisation sur l’inceste ;

2° Étudier les freins à la prise de parole des mineurs victimes, notamment ceux liés à la temporalité psychique des traumatismes, tels que la dissociation, la honte ou la peur, et à l’absence d’identification précoce des faits ;

3° Proposer des mesures pour renforcer l’accompagnement des victimes, avec un accent sur la réparation juridique et psychologique adaptée aux délais nécessaires à l’émergence de la parole ;

4° Évaluer la formation des professionnels en contact avec les enfants, comme les enseignants, le personnel de santé, les éducateurs, les policiers ou les magistrats, pour détecter et signaler les cas d’inceste ;

5° Formuler des recommandations pour améliorer l’accessibilité et l’efficacité des dispositifs d’écoute et de signalement, en particulier pour les enfants et les jeunes adultes ;

6° Définir une stratégie nationale de sensibilisation du grand public sur les conséquences de l’inceste et l’importance de briser le silence.

Le rapport inclut également une évaluation des besoins en formation initiale et continue concernant l’accueil des victimes, la prise de plainte dans les commissariats de police et les brigades de gendarmerie ainsi que les spécificités de ces infractions à l’attention des magistrats.


Article 5 (nouveau)

Le code pénal est ainsi modifié :

1° L’article 222-24 est ainsi modifié :

a) Le 9° est ainsi rétabli :

« 9° Avec préméditation ou avec guet-apens ; »

b) Le 10° est ainsi rédigé :

« 10° Lorsqu’il est commis dans un local d’habitation en pénétrant dans les lieux par ruse, effraction ou escalade ; »

2° Après le même article 222-24, il est inséré un article 222-24-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 222-24-1. – Le viol défini aux articles 222-23, 222-23-1 et 222-23-2 est puni de trente ans de réclusion criminelle lorsqu’il est commis en concours avec un ou plusieurs viols commis sur d’autres victimes.

« Les deux premiers alinéas de l’article 132-23 relatif à la période de sûreté sont applicables à l’infraction prévue au présent article. »


Article 6 (nouveau)

Après le II de l’article 63 du code de procédure pénale, il est inséré un II bis ainsi rédigé :

« II bis. – Si les nécessités de l’enquête ou de l’instruction relative aux infractions définies au 9° de l’article 221-4, à l’article 221-5 et au 11° de l’article 222-24 du code pénal l’exigent, la garde à vue d’une personne peut, à titre exceptionnel, faire l’objet d’une prolongation supplémentaire de vingt-quatre heures.

« Cette seconde prolongation est autorisée, par décision écrite et motivée, soit par le juge des libertés et de la détention à la requête du procureur de la République, soit par le juge d’instruction.

« La personne doit être présentée, avant cette décision, au magistrat qui statue sur la prolongation.

« Lorsque cette seconde prolongation de vingt-quatre heure est décidée, la personne gardée à vue est examinée par un médecin désigné par le procureur de la République, le juge d’instruction ou l’officier de police judiciaire. Le médecin délivre un certificat médical par lequel il doit notamment se prononcer sur l’aptitude au maintien en garde à vue et qui est versé au dossier. La personne est avisée par l’officier de police judiciaire du droit de demander un nouvel examen médical. Ces examens médicaux sont de droit. Mention de cet avis est portée au procès-verbal et émargée par la personne intéressée ; en cas de refus d’émargement, il en est fait mention. »

Délibéré en séance publique, à Paris, le 28 janvier 2025.

La Présidente,

Signé : Yaël BRAUN-PIVET

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