Séance du 20 janvier 2000
DÉPÔT DU RAPPORT ANNUEL
DE LA COUR DES COMPTES
M. le président.
L'ordre du jour appelle le dépôt du rapport annuel de la Cour des comptes.
Huissiers, veuillez introduire M. le premier président de la Cour des
comptes.
(M. le premier président de la Cour des comptes est introduit selon le
cérémonial d'usage.)
La parole est à M. le premier président de la Cour des comptes.
M. Pierre Joxe,
premier président de la Cour des comptes.
Monsieur le président, madame
le secrétaire d'Etat, mesdames, messieurs les sénateurs, une semaine après la
parution de notre premier rapport public particulier consacré à la fonction
publique de l'Etat, je viens aujourd'hui vous présenter le rapport annuel de la
Cour des comptes, qui a été remis hier au Président de la République.
Je vous le remets, monsieur le président.
(M. le premier président de la Cour des comptes remet un exemplaire du rapport
à M. le président du Sénat.)
Tous vos collègues en recevront un.
Comme vous pourrez le voir si vous le feuilletez ou si vous le consultez sur
vos ordinateurs, puisque vous pouvez en prendre connaissance par la voie
électronique, cette année encore - et nous le ferons dans l'avenir
systématiquement - un chapitre est consacré aux suites données aux observations
antérieures de la Cour. Nous pensons en effet que c'est ce qui est le plus
utile, ce qui intéresse le plus l'opinion et les parlementaires.
Parfois, ces suites, on vient de le voir, peuvent être observées en cours de
contrôle ou trouvées dans les réponses apportées par les ministères. Par
exemple, avant même que le rapport sur la fonction publique de l'Etat ne
paraisse, un certain nombre de mesures ont été annoncées ou même prises par le
ministre des finances et par le secrétaire d'Etat au budget au cours du
quatrième trimestre de 1999 pour faire droit à un certain nombre d'observations
que nous avions faites.
Mais parfois, au contraire, il faut que de nouvelles enquêtes interviennent
pour que nous puissions insister. Nous l'avons fait, par exemple, sur quatre
thèmes qui vous intéresseront, je pense, qui avaient fait l'objet de contrôles
mais dont les suites ont été examinées par nos soins, en particulier la gestion
budgétaire et la programmation du ministère de la défense, qui représentent
encore maintenant des sommes considérables, les programmes d'armement ayant
parfois un déroulement qui réserve bien des surprises. Il s'agit également des
achats du Commissariat à l'énergie atomique et encore du financement des
charges futures du secteur nucléaire.
Nous essayons, en particulier dans des secteurs qui nécessitent des dépenses
importantes pour des programmes de longue haleine, d'analyser dans quelles
conditions la programmation a été faite, d'abord, réalisée et contrôlée,
ensuite.
Mais vous trouverez aussi dans ce rapport quelques exemples concrets
d'économies rendues possibles ou parfois de reversements et de régularisations
intervenus dans les domaines les plus variés.
Ainsi, par exemple, nous avions fait, en 1998, dans le rapport que je vous
avais remis, quelques préconisations au ministre de l'environnement sur la
politique de l'eau. Et l'année dernière, en 1999, le ministre de
l'environnement a présenté et fait adopter en conseil des ministres des mesures
qui vont exactement dans le sens que nous avions préconisé.
De même, après la publication de notre rapport sur la préfecture de police de
Paris qui comportaient certaines recommandations, notamment en matière
d'organisation des services, la préfecture a pris des mesures qui sont en cours
d'exécution.
J'évoquerai un autre exemple satisfaisant. Nous avions fait observer que
l'achat de Canadair par le ministère de l'intérieur - ces bombardiers d'eau,
hydravions qui servent de pompiers volants - s'était déroulé dans des
conditions qui étaient discutables. Ces conditions ont été renégociées, ce qui
a abouti à un reversement de 100 millions de francs au ministère de
l'intérieur, ce qui est loin d'être symbolique.
J'insiste sur ces différents points parce qu'il nous paraît utile, et même,
d'un point de vue psychologique, nécessaire que chacun, en particulier les
parlementaires, puisse connaître les suites des travaux de la Cour des
comptes.
Parfois, ces suites mettent longtemps avant de se concrétiser ; parfois elles
interviennent très rapidement, mais il est rare qu'il n'y en ait pas. Nous
voulons lutter contre cette idée que notre rapport est comme le tonneau des
Danaïdes, que c'est toujours la même chose. C'est d'autant moins vrai que,
depuis quelques années, la Cour des comptes et ses magistrats coopèrent de plus
en plus avec le Parlement, et pas seulement avec ses commissions des finances.
D'ailleurs, nous avons apporté notre concours à la commission des affaires
sociales du Sénat, qui nous a entendu dans le cadre de sa commission d'enquête
sur l'éducation nationale. Cet exemple montre l'importance de notre fonction
d'assistance au Parlement.
Nous innovons également en insérant cette année une sorte de rapport
d'activités ; nous le développerons au fil des années. Il nous semble, en
effet, légitime que les conditions du fonctionnement de la Cour soient décrites
et rendues publiques.
Je n'entrerai pas plus dans les détails de notre rapport. Je remercie le Sénat
qui, à plusieurs reprises, a contribué à nous accorder les crédits nécessaires
à l'informatisation de la Cour des comptes, ce qui fait qu'aujourd'hui nous
sommes parmi les services publics non pas forcément les plus en avance mais du
moins pas en retard du point de vue de l'informatisation.
M. le président.
Monsieur le premier président, me permettez-vous de vous interrompre ?
M. Pierre Joxe,
premier président de la Cour des comptes.
Je vous en prie, monsieur le
président.
M. le président.
Monsieur le premier président, pour faire écho à certains propos que vous avez
tenus, je profite de ce que vous venez de dire pour vous assurer que le Sénat
fait bien son travail et qu'il n'y a pas de mauvais sénateurs. Nous sommes les
représentants du peuple et nous essayons de remplir consciencieusement la
mission qu'il nous a confiée !
Je vous laisse poursuivre, monsieur le premier président.
M. Pierre Joxe,
premier président de la Cour des comptes.
Je vois à quoi vous voulez
faire allusion, monsieur le président. En fait, plus qu'une interruption, c'est
une admonestation !
(Rires.)
Je me suis peut-être quelque peu emporté en parlant dans une radio de
sénateurs qui étaient meilleurs que d'autres... C'est sans doute cela que vous
évoquez !...
Bien que chacun d'entre nous tende à la perfection, qui est certain d'y
parvenir, qu'il s'agisse d'individus ou de corps ? En ce qui concerne
l'appréciation portée sur les élus, quel que soit le fonctionnement des
chambres régionales des comptes, rien ne m'empêchera de penser que certains
sénateurs sont meilleurs que d'autres. Je reconnais toutefois que je me suis
laissé un peu aller.
M. Jean-Pierre Fourcade.
Les magistrats aussi !
M. Pierre Joxe,
premier président de la Cour des comptes.
Mais comme je sais que cela
vous arrive aussi, je pense que vous me le pardonnez, comme il m'est arrivé de
vous pardonner à Epinal il y a dix-huit mois.
(Nouveaux rires.)
M. le président.
C'est pour cela que j'évite de condamner !
M. Marcel Debarge.
On peut s'en aller ! C'est une boutade !
M. Michel Pelchat.
Ce sont les repentances réciproques !
M. Pierre Joxe,
premier président de la Cour des comptes.
Voilà, c'est cela ! Ce sont les
plus fertiles !
Dans le chapitre consacré à l'activité des juridictions financières, je décris
en particulier les moyens de la Cour des comptes et des chambres régionales des
comptes et je les décris autant que nous pouvons parce que c'est un sujet de
déplaisir.
Notre budget, qui est inclus dans le budget du ministère des finances, ne
retrace pas la totalité des moyens et, en particulier, des rémunérations des
fonctionnaires mis à notre disposition.
En effet, un certain nombre de fonctionnaires mis à disposition de la Cour des
comptes sont rétribués par d'autres ministères.
De même, un certain nombre de crédits circulent entre la Cour des comptes et
le ministère des finances. Ainsi, ce que vous avez pu lire dans
le Canard
enchaîné
d'hier ne reflète pas la réalité. Il ne s'agit pas du tout de
crédits qui ont été retirés à la Cour des comptes pour être reversés à
l'administration des finances. En vertu de ce système incroyablement compliqué,
des agents figurent au tableau d'effectifs de la Cour des comptes, les crédits
relatifs à ces agents sont inscrits au budget de la Cour des comptes, mais ces
agents sont en fait payés par d'autres services du ministère des finances, ce
qui fait que, chaque année, interviennent des régularisations, qu'un rédacteur
du journal en question a interprétées de façon malicieuse, mais erronée.
M. Claude Estier.
Comme d'habitude !
M. Pierre Joxe,
premier président de la Cour des comptes.
Je ne m'étendrai pas sur le
rapport sur la fonction publique de l'Etat, le premier rapport que nous avons
publié, la presse s'en étant déjà largement fait l'écho. Je vous dirai
simplement que nous avons l'intention de continuer ce travail dont d'ailleurs
le Sénat, ou du moins les sénateurs de la commission d'enquête sur l'éducation
nationale ont été les premiers informés, puisque nous avons eu l'occasion, le
président de la troisième chambre et moi-même,...
M. Adrien Gouteyron,
président de la commission des affaires culturelles.
Effectivement !
M. Pierre Joxe,
premier président de la Cour des comptes.
... de venir apporter un
certain nombre d'informations en cours de contrôle.
M. le président.
Le président de la commission des affaires culturelles donne acte et confirme
l'appréciation que vous venez de porter.
M. Adrien Gouteyron,
président de la commission des affaires culturelles.
Je remercie M. le
premier président de la Cour des comptes parce que cela a été une excellente
audition.
M. Pierre Joxe,
premier président de la Cour des comptes.
Je vous remercie. Je préfère ce
genre d'interruption à la précédente !
(Sourires.)
M. Adrien Gouteyron,
président de la commission des affaires culturelles.
Elles ne sont pas
exclusives !
M. Pierre Joxe,
premier président de la Cour des comptes.
Non, c'est vrai !
Qu'il s'agisse d'emplois, du nombre des effectifs, de modes de rémunérations,
de modes de gestion, ce qui prévaut actuellement dans la fonction publique est
trop complexe, trop divers, trop hétérogène, et je pense que les travaux que
nous avons commencé à accomplir et à publier après trois ans de travail seront
utiles au Parlement, en particulier, mais aussi au Gouvernement pour rapprocher
un peu plus, au moment du vote du budget, l'analyse des objectifs et la
répartition des moyens.
Monsieur le président, je ne m'étendrai pas davantage sur ce sujet. Vous êtes
tous très informés de nos travaux puisque nous avons des relations fréquentes.
Simplement, je voudrais, en conclusion, concernant notre propre mode de
fonctionnement, vous recommander la prochaine réforme qui va vous être soumise
puisque le Gouvernement a adopté le projet de réforme du statut des magistrats
des chambres régionales des comptes.
J'étais présent dans les tribunes lorsque, voilà maintenant trois ans, la
réforme du statut des magistrats des tribunaux administratifs a été discutée et
adoptée. Les magistrats des chambres régionales des comptes attendent, en
effet, avec impatience un projet de loi qui vous sera bientôt soumis et qui
rétablirait une forme d'équilibre comme l'un d'entre vous, qui est ici présent,
l'avait rappelé à l'époque lors du débat en séance publique.
Enfin, je profite, mais pas abusivement, de la présence d'un nouveau
secrétaire d'Etat au budget, pour lui dire que les parlementaires trouveraient
normal que le budget de la Cour des comptes et celui des chambres régionales
des comptes décrivent la totalité des moyens de la Cour des comptes.
(Applaudissements.)
M. le président.
Monsieur le Premier président, le Sénat vous donne acte du dépôt de ce
rapport.
La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Alain Lambert,
président de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes
économiques de la nation.
Monsieur le président du Sénat, monsieur le
Premier président de la Cour des comptes, madame la secrétaire d'Etat au budget
- je vous souhaite, après M. le président du Sénat, la bienvenue à la Haute
Assemblée, en particulier devant sa commission des finances, où vous serez
accueillie avec courtoisie et écoutée avec beaucoup d'intérêt - mes chers
collègues, le Parlement est composé de deux assemblées, l'Assemblée nationale
et le Sénat. Chacun le sait ici, mais il est bon aussi que les Français ainsi
que toutes les institutions de notre pays le sachent.
Le Sénat assure, au même titre que l'Assemblée nationale, la représentation
des Français et il exprime la volonté générale. C'est pourquoi le Premier
président de la Cour des comptes dépose son rapport annuel sur le bureau du
Sénat comme sur celui de l'Assemblée nationale.
Au Sénat, madame la secrétaire d'Etat, nul ne conteste la prééminence
constitutionnelle de l'Assemblée nationale en matière de finances publiques ;
mais nul n'envisage non plus de renoncer à son indépendance à l'égard du
Gouvernement, quel que soit ce Gouvernement. C'est en effet cette indépendance
qui est le gage d'un contrôle sans concession, exclusivement dicté par
l'intérêt général, par l'intérêt d'un peuple qui voit la moitié du produit de
son travail prélevé et géré par la puissance publique.
Notre peuple a le droit de savoir comment, en son nom, l'Etat emploie le
produit de ces prélèvements. Or, ce droit lui est ajourd'hui disputé par ce que
j'appelle « la culture du secret », qui est celle du Gouvernement auquel vous
appartenez comme celle des précédents - les choses doivent être claires -
culture du secret qui confine parfois à la dissimulation, quand elle ne
s'agrémente pas de mépris - en tout cas, nous le percevons parfois ainsi - ou
de leçons de morale.
Cette pratique de la dissimulation, nous n'avons cessé de la dénoncer à cette
tribune, d'ailleurs sans grand écho à l'extérieur, malgré tant de communiqués
de presse ignorés des médias. Or, la Cour des comptes vient de la mettre à jour
fort à propos dans son rapport particulier sur la fonction publique, qui n'est
pas le rapport qui vient d'être déposé par le Premier président.
L'indépendance du Sénat n'est pas d'aujourd'hui ; il la manifeste depuis
toujours. Pour l'illustrer, je cite l'exemple repris par la Cour à propos des
ressources cachées, dites extrabudgétaires, perçues par certains ministères
pour accroître leurs moyens, en particulier pour rémunérer leurs
fonctionnaires.
Dès 1995 - c'était un autre gouvernement - le Sénat a demandé la réintégration
au budget général. Il l'a fait lors de trois discussions budgétaires
successives, sous les deux derniers gouvernements et sous l'impulsion d'un
rapporteur général de la majorité sénatoriale et de rapporteurs spéciaux de la
minorité du Sénat. L'Assemblée nationale, quelle qu'ait été sa composition -
elle n'a pas toujours été la même - ne nous a alors pas suivis jusqu'au bout,
puisqu'il a fallu une décision du Conseil constitutionnel pour que cette
réintégration intervienne.
Lors du dépôt du précédent rapport de la Cour des comptes, j'avais manifesté
le souhait de donner un nouvel élan au contrôle et à l'évaluation des
politiques publiques, ainsi que vous nous y invitiez, monsieur le président. La
commission des finances a donc procédé à une audition contradictoire avec un
gestionnaire de fonds publics, il s'agissait d'un membre de la Caisse des
dépôts et consignations, et la Cour des comptes ; monsieur le Premier
président, vous assistiez à cette audition.
L'expérience sera prochainement renouvelée, notamment dans le prolongement de
l'enquête sur la fonction publique, si cela vous agrée. Cette enquête confirme
en effet que le vote du Parlement sur les crédits de la fonction publique, qui
représentent rien moins que 40 % du budget de l'Etat, est fondé sur des
chiffres systématiquement erronés. Ce n'est d'ailleurs pas une découverte pour
notre commission, puisqu'elle n'a cessé de dénoncer cet état de fait, mais avec
beaucoup moins de succès que vous, monsieur le Premier président.
Cette situation ne peut pas durer plus longtemps, selon nous. C'est d'ailleurs
ce que j'ai voulu dire à cette tribune le soir du vote final du budget lorsque
j'ai déclaré que nous ne pouvions plus continuer de cette manière car accepter
cette situation reviendrait à remettre en cause des principes de la démocratie
représentative.
Nous évoquons depuis plusieurs années la nécessité de réformer l'ordonnance de
1959. Au mois de juin dernier, j'ai demandé une contribution sur ce thème à la
Cour des comptes. Celle-ci m'a été remise au mois de décembre.
Monsieur le Premier président, c'est un document précieux, il montre combien
la Cour des comptes et la commission des finances sont souvent en accord,
notamment s'agissant de la présentation du budget de l'Etat en section de
fonctionnement et en section d'investissement ou sur la pertinence d'une
présentation consolidée des comptes publics.
Nous allons poursuivre nos travaux, nous allons même les amplifier. Et, d'ici
à quelques mois, en concertation avec la commission des finances de l'Assemblée
nationale, nous proposerons de réformer l'ordonnance organique et, plus
généralement, d'instaurer des relations nouvelles entre le Gouvernement et le
Parlement pour l'élaboration et l'exécution du budget.
S'agissant d'une loi organique, les deux assemblées devront dialoguer dans un
respect mutuel de leurs prérogatives propres, sauf à paralyser leurs
initiatives. Mais je suis confiant dans notre aptitude à coopérer loyalement
pour permettre à la représentation nationale d'accomplir mieux la mission qui
lui a été confiée par les Français.
J'ai voulu aussi que les rapporteurs spéciaux donnent à l'activité de contrôle
la place qu'elle mérite, en application des pouvoirs étendus qui leur sont
confiés par la Constitution. Ils effectuent désormais un suivi systématique des
observations de la Cour des comptes sur les crédits qu'ils sont chargés de
rapporter ainsi qu'un suivi régulier des apports particuliers relatifs aux
organismes publics.
Leur activité de contrôle atteint désormais un excellent niveau. Je citerai,
pour 1999, l'Office national des anciens combattants, la restructuration de
l'industrie aéronautique civile, le Fonds national de développement du sport,
l'ambassade de France à Berlin et il s'agira bientôt de la direction générale
des impôts.
Je souhaite cependant que notre commission offre au Sénat une plus grande
visibilité qu'aujourd'hui. C'est pourquoi nous rendrons public, lors d'une
prochaine réunion de la commission, le programme de travail des rapporteurs
spéciaux pour ce semestre.
Dans l'immédiat, je souhaite que soit donné un contenu plus substantiel à la
mission d'assistance que la Cour des comptes doit au Parlement, notamment au
droit qui lui est reconnu de demander l'ouverture d'enquêtes. Je dois dire à ce
sujet qu'une meilleure connaissance des perspectives pluriannuelles de la Cour
peut nous y aider.
Cette possibilité de contrôle de la Cour sur notre initiative n'est pas
suffisamment exploitée. Il faudra qu'elle le soit davantage et je m'y
appliquerai, monsieur le premier président, lors d'une rencontre avec vous.
Je m'adresserai maintenant plus particulièrement à Mme la secrétaire d'Etat.
Il nous faut réfléchir également à la levée des obstacles au contrôle posés par
les administrations elles-mêmes. Ces refus multiples et les manoeuvres
dilatoires, les parlementaires et les rapporteurs spéciaux en subissent encore,
et c'est inadmissible.
Mais je relève que, aujourd'hui, les sanctions prévues sont soit inexistantes
soit tellement disproportionnées qu'elles sont inapplicables.
Au-delà du contrôle, et dans l'hypothèse où les constatations et les demandes
demeurent sans effet, restent les suites. N'est-il pas nécessaire de poser
clairement le principe des sanctions publiques à infliger à tout ministre, à
tout fonctionnaire qui viendrait à manquer aux exigences de sa charge, en
particulier à la sincérité des comptes qu'il présente, quelle que soit la
juridiction de laquelle il relève ?
Sans doute cette réaffirmation de la sanction apparaîtra-t-elle comme une
provocation, mais n'est-elle pas la contrepartie du respect que chaque
ordonnateur doit, pour l'usage de ses deniers, au peuple français et, par là
même, à sa représentation nationale, c'est-à-dire au Parlement ? En fait, mes
chers collègues, c'est cela la démocratie.
(Applaudissements.)
M. le président.
Huissiers, veuillez reconduire M. le premier président de la Cour des
comptes.
(M. le premier président quitte la salle des séances.)
M. le président.
Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pendant quelques
instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à seize heures quarante, est reprise à seize heures
quarante-cinq, sous la présidence de M. Guy Allouche.)