Mme Myriam El Khomri, ministre. … et ce pour deux raisons : il s’agit, d’une part, de soutenir la création d’emplois – en une semaine, 7 000 employeurs ont demandé l’aide en faveur des très petites entreprises et des petites et moyennes entreprises – et, d’autre part, d’accélérer la formation des demandeurs d’emploi les plus éloignés du travail pour répondre à cette question des métiers non pourvus. (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)
M. le président. La parole est à M. Jean-François Husson, pour la réplique.
M. Jean-François Husson. Madame la ministre, ne répondez pas aux questions que je n’ai pas posées ! (Rires sur les travées du groupe Les Républicains.) En revanche, pour répondre aux causes du chômage, faites confiance aux entreprises, celles que M. le Premier ministre a déclaré aimer, et faites-le en mettant en œuvre leurs propositions pour engager la France sur une nouvelle dynamique de l’emploi.
Je ne me résous pas à ce que la « génération Hollande » soit la « génération chômage ». (M. Claude Bérit-Débat s’exclame.)
M. le président. Veuillez conclure, mon cher collègue !
M. Jean-François Husson. Désormais, il faut agir pour l’emploi et en faire une grande cause nationale d’utilité publique. Il faut le faire pour la France ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et de l'UDI-UC.)
nouvelles cartes d’intercommunalité et conséquences en termes de découpage
M. le président. La parole est à Mme Françoise Laborde, pour le groupe du RDSE.
Mme Françoise Laborde. Ma question s'adresse à Mme la ministre de la décentralisation et de la fonction publique.
À l’occasion des dernières élections municipales, les électeurs ont désigné eux-mêmes, et pour la première fois, les représentants de leurs communes au sein des conseils communautaires. Certaines intercommunalités, composées en partie de communes rurales, ont sollicité la possibilité de constituer leurs assemblées sur un système de représentativité « dérogatoire », qui permet aux communes les plus petites d’avoir au moins deux délégués au conseil communautaire. Ces délégués élus au suffrage universel direct ont donc débuté leur mandat au sein des différentes communautés de communes qui maillent notre pays.
Or, dans le même temps, l’application de la loi portant nouvelle organisation territoriale de la République, dite « loi NOTRe », fixe au 31 mars 2016 la publication des nouveaux schémas de coopération intercommunale par les préfets, lesquels procèdent actuellement à la mise en œuvre des fusions et autres modifications de périmètre des EPCI.
Si la fusion des compétences trouve une issue administrative favorable dans l’organisation des nouvelles grandes intercommunalités, il n’en va pas de même pour le système de représentativité des plus petites communes, qui passent de deux à un délégué seulement.
En plus de la question de la représentation des communes rurales au sein des intercommunalités, se pose également, et très clairement, celle de l’interruption soudaine du mandat de nombreux délégués communautaires, élus en 2014 et théoriquement jusqu’en 2020.
En effet, madame la ministre, vous ne pouvez ignorer que, moins de deux ans après les élections, des élus du suffrage universel se verront retirer leur mandat au sein des conseils communautaires le 31 décembre 2016, à minuit. Cette situation inédite suscite des interrogations.
Autant il est possible d’allonger la durée d’un mandat, autant le raccourcir dans de telles conditions pose problème.
Madame la ministre, les préfets ont proposé des schémas sans notifier à chacun des conseillers municipaux les conséquences de ces nouveaux schémas sur la composition des futurs conseils communautaires au 1er janvier 2017.
M. Henri de Raincourt. C’est vrai !
Mme Françoise Laborde. Ma question est donc simple et appelle une réponse simple : oui ou non, madame la ministre, allez-vous donner des instructions précises aux préfets pour qu’ils informent les élus et les collectivités concernés des conséquences découlant de leurs projets de schémas ? (Applaudissements sur les travées du RDSE et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées de l'UDI-UC et du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre de la décentralisation et de la fonction publique.
Mme Marylise Lebranchu, ministre de la décentralisation et de la fonction publique. Madame la sénatrice, vous soulevez une question qui se pose non seulement pour la révision des périmètres des intercommunalités, mais aussi en ce moment même dans un certain nombre de cas en France. Ici, un maire a démissionné et doit être réélu – c’est le cas d’une communauté d’agglomération que je connais bien. Là, une commune nouvelle vient de naître et s’oppose tout d’un coup à l’accord local sur le nombre de représentants.
Il aurait presque fallu prendre langue avec Alain Richard, lequel a essayé, avec plusieurs de ses collègues, après une question prioritaire de constitutionnalité ayant conduit à la décision du Conseil constitutionnel Commune de Salbris, de trouver une solution pour que cette décision permette quand même la conclusion d’accords locaux, en particulier pour la représentation des plus petites communes.
Avant même la réforme des EPCI, des vice-présidents d’intercommunalité ou même des conseillers communautaires ne pourront plus exercer leur mandat : ce sera du fait non pas de la loi NOTRe, mais bien de cette décision du Conseil constitutionnel.
Dans certains cas, des accords locaux ont permis d’aboutir à des arrangements, qui sont toutefois d’une autre nature.
Au cours d’un débat qui, s’il ne portait pas sur cette question, n’en était pas moins très intéressant, on m’a demandé si le Gouvernement pouvait proposer un nouveau type de représentation en dehors du véhicule législatif dont Alain Richard a eu l’initiative. Je le rappelle, il n’est en aucun cas possible de contourner une décision du Conseil constitutionnel.
Telle est la situation face à laquelle nous nous trouvons. Les préfets ont, comme les autres acteurs concernés, lu l’instruction dont il s’agit. Ce document a été diffusé le plus vite possible après le 7 août 2015. Il porte non seulement sur les périmètres des EPCI et sur les missions des communes, mais aussi sur les contours des communes nouvelles, qui créent beaucoup plus de surprises encore.
M. Alain Fouché. Faute de concertation !
Mme Marylise Lebranchu, ministre. En l’espèce, nous sommes confrontés à une question de nature constitutionnelle. J’espère que les accords locaux permettront de résoudre un maximum de problèmes, mais, quoi qu’il en soit, la Constitution s’impose à tous. À mon niveau, j’en suis moi aussi la garante ! (Applaudissements sur plusieurs travées du groupe socialiste et républicain.)
renault : tests de pollution
M. le président. La parole est à Mme Aline Archimbaud, pour le groupe écologiste.
Mme Aline Archimbaud. Ma question s'adresse à Mme la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, et porte sur les tests d’émission de polluants automobiles.
Depuis juin 2012, l’Organisation mondiale de la santé, l’OMS, a classé les particules fixes et l’oxyde d’azote, ou NOx, dans la catégorie des cancérogènes certains. On connaît le chiffre de 40 000 morts prématurées liées, chaque année en France, à la pollution de l’air, auxquelles il faut ajouter les innombrables maladies respiratoires et cardiovasculaires.
Après la publication, au début de ce mois, des premiers résultats de la commission technique indépendante mise en place par Mme la ministre de l’écologie, le Gouvernement a tenu à nous rassurer, en nous certifiant que le constructeur Renault n’avait pas fraudé. Nous en prenons acte. Cela étant, sur les vingt-deux premiers véhicules français et européens examinés, la même commission a constaté des dépassements très élevés des normes d’émission – ces seuils seraient franchis au moins trois à cinq fois –, lorsque les véhicules sont utilisés en conditions de circulation réelles.
Faut-il rappeler cette évidence ? Les consommateurs achètent une voiture pour rouler normalement. Or les tests ne sont pas effectués dans des conditions normales : absence de vent, vitesse très basse, pas de changement de température ou de relief, ces critères ne correspondent en rien à l’utilisation réelle des automobiles. Divers constructeurs jouent donc avec la réglementation pour faire homologuer des véhicules qui, en fait, sont bien plus polluants qu’annoncé. Ce n’est pas de la fraude : à ce jour, ces pratiques sont en effet parfaitement légales. Elles n’en sont pas moins totalement inacceptables.
Nous sommes convaincus de la nécessité de consolider notre industrie automobile. Néanmoins, si cette dernière veut être attractive, elle ne peut pas jouer avec la santé et la confiance des populations.
Par ailleurs, des doutes existent quant à l’indépendance des organismes officiels d’homologation, qui, même s’ils ne reçoivent pas de subventions directes des constructeurs, assurent pour leur compte de très nombreuses prestations.
Je poserai donc, à ce sujet, deux questions au Gouvernement.
Premièrement, pour ce qui concerne les tests en conditions réelles de circulation, le Parlement européen doit se prononcer prochainement sur la possibilité d’autoriser des marges de dépassement des normes de pollution qui seraient considérables – jusqu’à 110 %. La France s’oppose-t-elle à ces autorisations ?
Deuxièmement, dans le but d’accroître l’indépendance des tests d’homologation, la Commission européenne a annoncé hier son souhait de réaliser elle-même des relevés sur des véhicules déjà en circulation. Elle pourrait ainsi vérifier si ces derniers sont conformes à leur première certification et, le cas échéant, prononcer des sanctions. La France compte-t-elle soutenir cette proposition au sein de l’Union européenne ? (Applaudissements sur les travées du groupe écologiste.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État chargé des relations avec le Parlement.
M. Jean-Marie Le Guen, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement. Madame la sénatrice, avant tout, permettez-moi d’excuser Ségolène Royal (Exclamations sur plusieurs travées du groupe Les Républicains.),…
M. Bruno Sido. Elle ne vient jamais aux questions au Gouvernement, elle nous snobe !
M. Jean-Pierre Raffarin. Mes chers collègues, cessez d’attaquer Ségolène ! (Sourires sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Jean-Marie Le Guen, secrétaire d'État. … qui est aujourd’hui au grand forum des investisseurs de l’économie bas carbone, mis en place lors de la COP 21.
Comme vous l’avez souligné, et comme elle s’y était engagée, Mme la ministre de l’écologie a mis en place une commission technique indépendante chargée d’évaluer les émissions polluantes.
L’organisme désigné par le ministère a bien opéré ces tests, et vous en connaissez déjà un certain nombre de résultats.
Tout d’abord, le protocole de test a conduit à s’interroger sur d’éventuelles fraudes à l’homologation. Il a, hélas ! confirmé l’existence de programmes trompant le cycle réglementaire d’homologation sur deux véhicules Volkswagen testés, sans pour autant établir l’existence de tels logiciels sur les autres véhicules examinés, produits par d’autres marques.
Ensuite, pour ce qui concerne les émissions de polluants, il est exact que les contrôles exercés ont mis à jour des émissions supérieures aux niveaux précédemment attestés.
Ces travaux d’expertise vont se poursuivre dans d’autres pays d’Europe, et la France – je tiens à vous le confirmer – soutient cette démarche de transparence au service du consommateur. Ces tests permettront, en effet, d’éclairer les décideurs européens.
Vous le savez, la France a obtenu l’inscription dans la réglementation d’une clause de revoyure des coefficients, pour renforcer nos ambitions dans un avenir proche. À cet égard, l’objectif, c’est l’entrée en vigueur de ces nouvelles normes dès 2017.
À l’échelle tant nationale qu’européenne, le Gouvernement est donc tout à fait actif pour que la transparence et la qualité des normes soient véritablement respectées ! (Applaudissements sur plusieurs travées du groupe socialiste et républicain.)
situation de jacqueline sauvage
M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour le groupe CRC.
Mme Laurence Cohen. Ma question s'adresse à M. le secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement, et porte sur la situation de Jacqueline Sauvage, qui a tué son mari après avoir été victime, avec ses quatre enfants, durant quarante-sept ans, des violences d’un homme les frappant et les violant régulièrement.
La condamnation de cette femme à dix ans de prison, malgré le calvaire enduré par elle-même, ses trois filles et son fils, qui s’est suicidé, ne peut qu’interpeller.
Bien sûr, je n’entends nullement commenter une décision de justice.
M. Alain Fouché. C’est pourtant ce que vous faites !
Mme Laurence Cohen. Cette décision est le résultat d’une application stricto sensu de l’article 122-5 du code pénal, relatif à la légitime défense. Mais elle traduit surtout la non-prise en compte par l’ensemble de la société du fléau que représentent les violences faites aux femmes.
M. Alain Fouché. Et les hommes battus ?
M. Bruno Sido. Eh oui, qu’en est-il des hommes ?
Mme Laurence Cohen. Faut-il rappeler ici que, en 2014, 134 femmes sont décédées sous les coups de leur conjoint dans notre pays ? Faut-il rappeler que les victimes de violences sont en général dans un tel état de sidération que seulement 10 % d’entre elles environ portent plainte ?
Après la décision de justice, confirmée en cour d’appel, dont elle a fait l’objet, Jacqueline Sauvage n’a plus qu’un seul recours : obtenir la grâce présidentielle. À cette fin, des féministes ont lancé une pétition. Cette dernière circule actuellement et je l’ai signée moi-même, comme des milliers de femmes et d’hommes de toutes sensibilités politiques. Je n’en suis que plus étonnée du brouhaha dans lequel je suis contrainte de m’exprimer… Cette pétition devrait totaliser 500 000 soutiens d’ici à la fin de février prochain.
Monsieur le secrétaire d’État, le contexte dans lequel Jacqueline Sauvage a commis cet acte doit être pris en compte. Je sais que François Hollande est sensible à ce motif, et qu’il recevra demain les enfants et les avocats de Jacqueline Sauvage. J’ose y voir un signe positif. Votre réponse sera sans doute de nature à nous éclairer.
Au-delà de cette grâce présidentielle très attendue, pouvez-vous nous indiquer quels moyens financiers et humains le Gouvernement entend mobiliser afin de mieux lutter contre les violences faites aux femmes ? (Applaudissements.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État chargé des relations avec le Parlement.
M. Jean-Marie Le Guen, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement. Madame la sénatrice, les applaudissements qu’a suscités votre intervention en témoignent, nous sommes aujourd’hui très nombreux à éprouver de l’émotion…
M. Bruno Sido. C’est vrai.
M. Jean-Marie Le Guen, secrétaire d'État. … face au cas de Jacqueline Sauvage et, bien au-delà, face au grave problème de société qu’il illustre.
Cette mobilisation est forte et nous l’entendons.
Vous l’avez vous-même précisé, vous n’attendez pas du Gouvernement qu’il commente une décision de justice. Bien entendu, je ne peux pas davantage m’avancer quant à l’accueil d’une demande en grâce destinée à obtenir une annulation ou une réduction de peine. Une telle décision est du ressort total et exclusif du chef de l’État.
Je vous le confirme, les représentants du comité de soutien à Jacqueline Sauvage seront, ainsi que des membres de sa famille, reçus demain par le Président de la République.
Au-delà de cette situation et de cette émotion, que nous entendons, vous m’interrogez avec raison quant à la mobilisation du Gouvernement contre les violences faites aux femmes. (M. Alain Gournac s’exclame.)
Mesdames, messieurs les sénateurs, Pascale Boistard est particulièrement impliquée dans ce combat, et elle le livre avec force. Le Président de la République a fait de ce sujet une priorité de son action et de l’action gouvernementale. (M. Alain Gournac s’exclame à nouveau.) Il a renforcé la lutte contre le viol, crime que l’on déplore encore beaucoup trop fréquemment.
Dans cette lutte contre le harcèlement sexiste et les violences sexuelles, le Gouvernement, je le sais, peut compter sur le soutien de nombre d’entre vous. Il peut également compter sur le concours des collectivités territoriales, des associations et de nombreuses entreprises.
En effet, au-delà de l’action, parfaitement légitime, que déploie l’État, une mobilisation de la société tout entière est nécessaire. Il s’agit de mettre véritablement en mouvement des droits que les intéressés ne font malheureusement pas toujours valoir.
M. le président. Veuillez conclure, monsieur le secrétaire d’État.
M. Jean-Marie Le Guen, secrétaire d'État. Il convient d’agir avec détermination contre ces discriminations et ces violences.
Madame Cohen, à cet égard, votre question permet de rappeler une nouvelle fois l’existence du problème et d’amplifier, sur ce front, la mobilisation de chacun ! (Applaudissements sur plusieurs travées du groupe socialiste et républicain. – Mme Annie David et M. Dominique Watrin applaudissent également.)
M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour la réplique.
Mme Laurence Cohen. Monsieur le secrétaire d’État, vous l’avez dit avec raison, ce phénomène nous interroge individuellement, et il interroge collectivement notre société.
Dans ce cas précis, des dysfonctionnements sont à déplorer : malgré divers signalements, malgré plusieurs passages aux urgences, Mme Sauvage n’a pas pu échapper aux mains de son bourreau.
Bien entendu, pour garantir l’exercice de la loi, des moyens humains et financiers sont nécessaires. À ce propos, j’attire votre attention sur le rapport que la délégation sénatoriale aux droits des femmes publiera le 11 février prochain, préconisant notamment des moyens financiers et humains pour assurer une formation de tous les acteurs – magistrats, policiers, personnels de santé – et des observatoires contre les violences aux niveaux départemental et régional.
M. le président. Il faut conclure, ma chère collègue.
Mme Laurence Cohen. Les violences faites aux femmes sont un fléau que la société doit affronter pour pouvoir s’en libérer.
M. Alain Gournac. Très bien !
Mme Laurence Cohen. Chacune et chacun d’entre nous, à commencer bien entendu par les membres du Gouvernement, doit prendre ses responsabilités ! (Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste et républicain, ainsi que sur certaines travées du groupe Les Républicains.)
rapport badinter sur le droit du travail
M. le président. La parole est à Mme Nicole Bricq, pour le groupe socialiste et républicain.
Mme Nicole Bricq. Ma question s'adresse à Mme la ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social.
Madame la ministre, depuis votre prise de fonctions en septembre dernier, vous avez beaucoup travaillé, vous avez consulté et vous avez agi. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)
Vous avez agi avec pour objectif de présenter lors du conseil des ministres du 1er mars prochain votre projet de loi relatif au droit du travail, qui est très attendu.
Vous avez agi, notamment, en lançant la consultation publique relative au compte personnel d’activité, dont il convient à présent de définir le contour et le périmètre. Bien sûr, plus ce périmètre sera ambitieux, plus cet outil garantira l’émancipation individuelle. Dès lors, nos concitoyens pourront définir eux-mêmes leur trajectoire professionnelle.
J’ai assisté au lancement du compte personnel d’activité, que vous avez confié à France Stratégie. En cette circonstance, j’ai pu observer beaucoup d’enthousiasme, notamment de la part de jeunes gens qui, après avoir subi des ruptures dans leur activité professionnelle, disaient tout le bien qu’ils pensaient d’un tel outil.
En outre, M. le Premier ministre et vous-même avez reçu lundi dernier le rapport du comité Badinter, synthétisant les principes essentiels et fondamentaux de notre droit du travail. C’est sur cette base que vous allez écrire votre projet de loi.
Ce texte traitera du temps de travail, sujet qui a déjà fait couler beaucoup d’encre et beaucoup de paroles.
M. Jean-Pierre Vial. Eh oui !
Un sénateur du groupe Les Républicains. Et votre question ?
Mme Nicole Bricq. De plus, il y sera question de la liberté laissée aux entreprises pour conclure des accords bons pour l’emploi, l’activité et l’innovation, qu’elle soit sociale ou technologique.
Dès lors, madame la ministre, ma question est très simple. (Ah ! sur les travées du groupe Les Républicains et sur plusieurs travées de l’UDI-UC.)
M. Philippe Dallier. « Qu’allez-vous en faire ? » (Sourires sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Nicole Bricq. Dites-nous comment vous allez tirer le meilleur parti de tout ce travail dont vous disposez ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain. –Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains et sur plusieurs travées de l’UDI-UC.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre du travail, de l’emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social.
Mme Myriam El Khomri, ministre du travail, de l’emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social. Madame la sénatrice, vous l’avez dit, Robert Badinter et ses collègues chargés de cette mission nous ont remis lundi dernier leur rapport contenant soixante et un principes.
Dans notre société, il est important de réaffirmer les principes qui constituent le socle du droit des travailleurs. Il s’agit d’une sorte de déclaration des droits des travailleurs. C’est important, parce que nous affirmons ainsi ce à quoi il n’est pas possible de déroger.
La loi relative à l’avenir du travail, que je prépare et qui sera présentée en conseil des ministres le 9 mars prochain, répond à l’enjeu de mieux prendre en compte les mutations du travail. Le compte personnel d’activité en fait partie. Il s’agit d’un véritable progrès social.
Aujourd’hui, on n’entre plus dans une entreprise à dix-huit ans pour en sortir à soixante ans (M. Michel Bouvard s’exclame.), en ayant connu un seul et même employeur. Nos parcours professionnels sont faits de nombreux employeurs, ils sont nourris par notre capacité à passer d’un statut à un autre, à exercer parfois plusieurs activités.
Il me semble essentiel, afin de mieux sécuriser ces parcours professionnels, que la rupture ne soit pas un échec, mais une occasion de rebondir. Il faut pour cela conférer aux individus les moyens de rebondir, c’est-à-dire des conseils en évolution professionnelle, et leur permettre d’utiliser à cette fin leur compte personnel de formation. C’est cela, réécrire notre modèle social.
Il s’agit d’un enjeu majeur. Je vous invite toutes et tous à participer à ce débat public, qui se poursuivra jusqu’au 20 mars prochain.
Le second point concerne l’adaptation de notre droit du travail. À partir de ce socle de principes, auxquels des dispositions législatives devront donner chair, il importe de définir la place à ménager à la négociation collective.
Il s’agit véritablement de permettre des adaptations au plus près des territoires, en développant les accords d’entreprise, mais aussi en repositionnant les accords de branche, qui sont essentiels afin d’éviter la concurrence déloyale.
Pour tout cela, il faudra redynamiser le dialogue social…
M. le président. Il va falloir conclure !
Mme Myriam El Khomri, ministre. … en donnant plus de force à ceux qui sont chargés de le mener, c’est-à-dire aux organisations syndicales. Il s’agit non pas de les contourner, mais d’essayer de créer cet espace de respiration. Tel est l’objectif de mon projet de loi. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)
encadrement des essais cliniques
M. le président. La parole est à M. Olivier Cigolotti, pour le groupe UDI-UC.
M. Olivier Cigolotti. Ma question s’adresse à Mme la ministre de la santé.
Le 15 janvier dernier, nous apprenions l’hospitalisation de patients au CHU de Rennes à la suite d’un essai clinique. Deux jours plus tard, l’un des volontaires hospitalisés décédait. Quatre autres présentent encore des risques de conserver des séquelles neurologiques irréversibles.
En France, les essais cliniques ont la réputation d’être parfaitement encadrés, mais cette affaire comporte de nombreuses zones d’ombre.
Les experts s’interrogent en particulier sur le protocole du laboratoire pharmaceutique qui a été opéré par le centre d’essais thérapeutiques et validé par l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé, l’ANSM. Ce protocole semble en effet comporter certaines anomalies et à ce jour l’ANSM se refuse à le rendre public.
De nombreuses questions restent sans réponse, notamment concernant la taille importante de l’échantillon de volontaires ainsi que sa composition.
Le test réalisé en amont n’ayant pas été publié, les experts se demandent si le laboratoire n’a pas tenté de gagner du temps pour passer directement à l’étape suivante.
Les délais de sécurité n’ont pas été respectés dès le premier palier. Les volontaires étaient en effet traités par intervalles de vingt-quatre heures, un délai jugé très court.
Pourquoi un tel empressement ? Était-ce par souci d’économie ? En effet, superposer plusieurs schémas d’administration d’une molécule peut permettre d’économiser jusqu’à un an d’expérimentation ! Cette pratique semble malheureusement se développer, au détriment de la sécurité des volontaires.
Un porte-parole du centre d’essais cliniques déclarait : « On ne rémunère pas un risque, mais une contrainte. » Madame la ministre, tout essai clinique comporte des risques. Les minimiser constitue une faute grave !
Aussi, madame la ministre, comptez-vous proposer une évolution des standards en vigueur pour les essais cliniques de médicaments, afin d’éviter de tels drames et de permettre de mieux informer les volontaires des risques encourus ? (Applaudissements sur les travées de l’UDI-UC et sur certaines travées du groupe Les Républicains. – M. Alain Bertrand applaudit également.)
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État chargée de la famille, de l’enfance, des personnes âgées et de l’autonomie.
Mme Laurence Rossignol, secrétaire d’État auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargée de la famille, de l’enfance, des personnes âgées et de l’autonomie. Monsieur le sénateur, je vous prie d’abord d’excuser l’absence de Marisol Touraine (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.),…
Mme Nicole Bricq. Elle était là hier !
Mme Laurence Rossignol, secrétaire d’État. … qui, avec le Président de la République, reçoit le Président iranien. (M. Alain Fouché s’exclame.)
M. Bruno Sido. Tout va très bien, madame la marquise !
Mme Laurence Rossignol, secrétaire d’État. Le sujet que nous évoquons est sérieux et grave !
Un accident grave est survenu à Rennes, il y a deux semaines, dans le cadre d’un essai clinique de phase 1 sur une nouvelle molécule.
Six personnes ont été admises au CHU de Rennes. L’une d’entre elles est décédée. L’état des cinq autres volontaires s’est, quant à lui, amélioré : ils ont tous pu quitter le CHU et sont désormais rentrés chez eux ou sont suivis par des hôpitaux locaux de proximité.
Dès qu’elle a eu connaissance de cet accident, Marisol Touraine s’est rendue sur place pour rencontrer les victimes et leur famille afin de leur témoigner du soutien total des pouvoirs publics face à cette situation dramatique (M. Alain Gournac s’exclame.) et de s’assurer de leur prise en charge sanitaire et sociale.
Elle a immédiatement annoncé le lancement de deux enquêtes sur le site du laboratoire, indépendamment des procédures judiciaires engagées par le parquet de Rennes et le pôle de santé publique du parquet de Paris.