Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué chargé du commerce extérieur, de l’attractivité et des Français de l’étranger.

M. Olivier Becht, ministre délégué auprès de la ministre de lEurope et des affaires étrangères, chargé du commerce extérieur, de lattractivité et des Français de létranger. Monsieur le sénateur Cadec, vous avez raison, l’élection du président Lula est une bonne nouvelle pour la relation bilatérale entre la France et le Brésil. Le Président de la République l’a saluée comme telle.

L’accord avec le Mercosur est en négociation depuis l’année 2000, soit depuis vingt-deux ans, entre l’Union européenne et le Brésil. Il n’est à ce jour ni finalisé ni signé, et n’est donc a fortiori pas ratifié.

La France a posé des conditions très claires pour la conclusion de cet accord. Elles sont de trois ordres.

La première a trait à la déforestation. Il y a d’ailleurs lieu de saluer l’adoption, avant-hier, dans le cadre du trilogue européen, du règlement sur la déforestation. Il est hors de question d’importer un seul kilo de bœuf élevé sur de la prairie qui aurait été gagnée sur la forêt amazonienne. Cela vaut pour le bœuf comme pour tout autre produit.

La deuxième condition, c’est le respect par toutes les politiques publiques des pays membres du Mercosur des accords de Paris.

Enfin, la troisième condition, c’est le respect de l’ensemble des normes sanitaires et environnementales de l’Union européenne. (M. Jérôme Bascher mime la brasse coulée.)

Les négociations se poursuivent donc dans ce cadre-là. Le jour où elles auront abouti, et seulement ce jour-là, la France examinera cet accord et se prononcera dans le cadre de la procédure européenne au sein du Conseil de l’Union européenne. Le Parlement européen sera évidemment saisi en vertu de ses pouvoirs propres. Quant aux parlements nationaux, ils seront saisis si les accords devaient être scindés. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

M. Didier Marie. Comme pour le Ceta ?

Mme la présidente. La parole est à M. Alain Cadec, pour la réplique.

M. Alain Cadec. Je vous ai précisé que la Commission européenne allait utiliser l’article 207 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne. Donc, elle ne consultera pas les parlements nationaux.

Certains députés européens de Renaissance, dans une lettre au commissaire européen Dombrovskis, ont prétendu que la procédure choisie par la Commission était illégale. C’est inexact, elle est parfaitement légale. Compte tenu de l’approbation requise du Parlement européen, elle ne peut certainement pas être qualifiée d’outrage démocratique.

Monsieur le ministre, la France, et particulièrement ses agriculteurs, est en grande difficulté sur ce dossier. (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mme Anne-Catherine Loisier applaudit également.)

pénurie de paracétamol pédiatrique

Mme la présidente. La parole est à Mme Annick Jacquemet, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

Mme Annick Jacquemet. Ma question s’adresse à M. le ministre de la santé et de la prévention.

Monsieur le ministre, le porte-parole du Gouvernement, Olivier Véran, est intervenu ce matin à la télévision au sujet des problèmes sur les stocks de Doliprane. Il a tenté de rassurer nos concitoyens en expliquant que la France n’était pas seule concernée, la tension étant mondiale.

Peut-être, mais elle dure depuis quelque temps et touche maintenant les enfants. Au début du mois de novembre, notre collègue Bruno Belin soulevait déjà le problème. Vous aviez alors affirmé prendre la mesure de la situation et vouloir augmenter le volume des stocks et les moyens d’alerte.

Aujourd’hui, c’est le Doliprane pédiatrique qui est en cause. Alors que le froid est arrivé et, avec lui, son cortège d’épidémies saisonnières, nous sommes en rupture. L’impact est particulièrement problématique, car, s’agissant des enfants, le Doliprane est, j’y insiste, le médicament de première intention. Il n’existe aucun substitut. En effet, d’après l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM), l’ibuprofène et l’aspirine sont contre-indiqués pour ces populations.

Le principal fabricant, Sanofi, en situation de quasi-monopole avec 98 % des parts de marché sur la présentation pédiatrique, est en grande difficulté. Aucun concurrent ne peut suppléer à la baisse de sa production.

Toujours selon l’ANSM, ces tensions pourraient encore durer plusieurs semaines. On ne peut pas laisser les choses en l’état, car, au-delà des difficultés causées en ambulatoire par ces pénuries, l’effet domino sera inévitable : de plus en plus d’enfants seront orientés vers les hôpitaux, en particulier vers les services d’urgence, alors que ceux-ci sont déjà saturés.

Monsieur le ministre, à court terme, comment votre gouvernement entend-il garantir que nos enfants ne manqueront pas de Doliprane pédiatrique cet hiver ? À plus long terme, comment comptez-vous éviter que de telles situations ne se reproduisent ? (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué chargé de l’industrie. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. François Bonhomme. Ministre des bobards !

M. Roland Lescure, ministre délégué auprès du ministre de léconomie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de lindustrie. Madame la sénatrice Jacquemet, je vous prie de bien vouloir excuser le ministre de la santé, qui a dû s’absenter.

Vous l’avez dit, cette pénurie est mondiale. Elle est liée à la volatilité de la consommation de médicaments en général, et de paracétamol en particulier. En effet, la crise de la covid-19 a modifié de manière importante les comportements de consommation et la répartition de la distribution entre la ville et l’hôpital.

La France a été parmi les pays les plus rapides à réagir, grâce au système d’alerte Trustmed, qui nous a permis d’identifier des tensions très tôt et de prendre des décisions, notamment l’interdiction de l’exportation et le passage privilégié par les grossistes répartiteurs, ce qui permet d’assurer du mieux possible la distribution dans les pharmacies. Cependant, dans certains cas particuliers, cela n’empêche pas certaines pharmacies d’être en rupture de stock.

J’y insiste, nous ne sommes pas face à une pénurie globale de Doliprane, quelle que soit sa forme. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Roland Lescure, ministre délégué. Dans certaines pharmacies, c’est vrai, le Doliprane pédiatrique vient à manquer.

J’encourage donc les patients à la recherche de Doliprane pour enfants à se rendre dans plusieurs pharmacies. Par ailleurs, nous avons eu la confirmation par les industriels que, s’agissant de ce produit, qui est conditionné en flacon, le problème venait essentiellement des fournisseurs de verre, mais que la situation s’améliorait. La solution est donc proche.

À moyen terme, l’enjeu est de relocaliser la production.

M. Hussein Bourgi. Demandez à Sanofi !

M. Roland Lescure, ministre délégué. C’est ce que nous faisons, notamment à travers un projet d’usine de production de paracétamol à Grenoble, piloté par Seqens, et non par l’entreprise que vous venez de mentionner, monsieur le sénateur.

Nous travaillons pour que, de nouveau, la France soit un pays de production, de consommation et, pourquoi pas, d’exportation de médicaments. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

lutte contre les trafics de stupéfiants

Mme la présidente. La parole est à Mme Annick Petrus, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme Annick Petrus. Ma question s’adresse au ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

La direction générale des douanes et des droits indirects joue un rôle majeur pour la sécurité des Français. En effet, les douanes sont, en autres choses, un acteur majeur de la lutte contre le trafic de drogue. Elles sont ainsi à l’origine de 60 % à 80 % des saisies de stupéfiants sur le territoire national.

De plus, si le rôle des douanes dans la lutte contre le trafic de stupéfiants est encore trop souvent sous-estimé, il est amené à se renforcer. Ce trafic est resté dynamique et n’a que peu souffert de la crise sanitaire. La menace qui lui est liée ne cesse de s’accroître : les flux et les saisies augmentent, tout comme la criminalité connexe ; nos ports et aéroports restent vulnérables. La consommation de drogues demeure également très élevée, ce qui soulève un vrai enjeu de santé publique.

La situation apparaît désormais critique en France, du fait des multiples voies d’entrée de la drogue sur le territoire national : au trafic maritime en provenance d’Amérique du Sud s’ajoutent les échanges terrestres avec les pays frontaliers, ainsi que le fret postal et express depuis l’ensemble du monde.

Nos territoires ultramarins, comme Saint-Martin, sont donc particulièrement vulnérables. Ils doivent faire l’objet d’une attention spécifique du fait de leur situation géographique, à la croisée d’importantes routes maritimes et aériennes vers l’Union européenne.

Saint-Martin, je vous le rappelle, se situe bel et bien au sein du territoire douanier communautaire. Malheureusement, aujourd’hui, ce territoire ne bénéficie d’aucune protection face à ces trafics, faute d’effectifs.

En effet, deux douaniers seulement sont en poste à ce jour sur l’île, soit un effectif clairement insignifiant pour un territoire de près de 53 kilomètres carrés, dont la zone économique exclusive avoisine les 300 kilomètres carrés.

Dès lors, monsieur le ministre, ma question est simple : allez-vous laisser la France ouverte à toutes sortes de trafics ? Voyez-vous, Saint-Martin, c’est aussi la France ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mme Michelle Gréaume et M. Jean Hingray applaudissent également.)

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué chargé des outre-mer. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Jean-François Carenco, ministre délégué auprès du ministre de lintérieur et des outre-mer, chargé des outre-mer. Madame la sénatrice, comme vous le savez, le problème que vous exposez n’est pas spécifique à Saint-Martin et Saint-Barthélemy, ni même aux îles de la Caraïbe. Le trafic de drogue sévit partout ; le Gouvernement essaye donc aussi de lutter contre ce trafic partout, notamment en Guyane, où je me rendrai à la demande du ministre de l’intérieur la semaine prochaine.

Cette lutte est en effet une priorité de M. Darmanin, qui s’est déjà rendu en Guyane, ainsi qu’à la Martinique ; il a également évoqué l’ensemble des sujets intéressant la Caraïbe avec M. Attal, dont le portefeuille comprend les douanes, ainsi qu’avec M. le ministre de la justice.

N’en doutez pas, ce sujet est pris en considération, de manière globale, par le Gouvernement. Dans la pratique, cela signifie qu’il nous faut coordonner l’action de l’État en mer, sous l’autorité du préfet de la Martinique, responsable de la zone de défense et de sécurité Antilles. Des travaux sont en cours entre l’ensemble des administrations concernées, sous l’autorité de la Première ministre.

Pour répondre à votre question spécifique, madame la sénatrice, sachez que j’ai demandé à M. Attal de renforcer, à Saint-Martin et Saint-Barthélemy, l’effectif des douaniers, qui a certes diminué il y a quelques années.

Nous avons par ailleurs, comme vous le savez, récemment mis en service un nouveau bateau des douanes – je n’en avais jamais vu d’aussi gros ! (Marques d’amusement sur les travées du groupe Les Républicains.) Il est désormais complètement à la manœuvre.

Dès lors, madame la sénatrice, ne doutez pas que M. le ministre Gabriel Attal répondra favorablement à votre demande ! J’en suis sûr, je lui en ai encore parlé il y a quelques jours. (MM. François Patriat et Xavier Iacovelli applaudissent.)

surpopulation carcérale

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

M. Jean-Pierre Sueur. Monsieur le garde des sceaux, la surpopulation dans les prisons a atteint un niveau que nous n’avions jamais connu. Aujourd’hui, 1 350 personnes dorment sur des matelas au sol dans des cellules abritant trois détenus. La situation est telle que la France a été condamnée pour ses conditions indignes de détention par la Cour européenne des droits de l’homme.

Ma question est très simple, monsieur le garde des sceaux : qu’allez-vous faire, quant à cette situation, dans les mois qui viennent ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER et sur des travées du groupe GEST.)

Mme la présidente. La parole est à M. le garde des sceaux, ministre de la justice.

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux, ministre de la justice. Monsieur le sénateur Sueur, ce n’est pas la première fois que vous me posez cette question.

D’abord, je voudrais faire remarquer que cette surpopulation carcérale démontre que ni la politique pénale que je conduis, sous l’égide de Mme la Première ministre, ni la justice, contrairement à ce que certains répètent en permanence, ne sont laxistes.

Ensuite, comme vous le savez, vous n’êtes pas le seul à être préoccupé par cette question. J’ai ainsi très fortement soutenu la loi tendant à garantir le droit au respect de la dignité en détention, issue d’une proposition du président de votre commission des lois, M. François-Noël Buffet.

Alors, de quels leviers disposons-nous ?

À vrai dire, c’est une gageure que de répondre à une question aussi complexe en deux minutes, mais je vais m’y employer.

Le premier levier, c’est la rénovation. À cet égard, je voudrais vous rappeler, sans triomphalisme, que vous ne consacriez que 70 millions d’euros par an aux rénovations de prisons ; pour notre part, nous y consacrons plus de 170 millions d’euros chaque année.

Le deuxième, c’est la construction de places de prison : 15 000 places seront construites. Nous en aurons la moitié en 2024 et, je vous le dis, nous continuons dans cette voie.

Ensuite, il convient bien sûr de rappeler aux procureurs généraux le « bloc peines » issu de la loi du 23 mars 2019 – je le fais, bien sûr, dans toutes les circulaires que je leur adresse –, mais aussi de développer les peines alternatives, notamment le travail d’intérêt général, et de lutter contre la récidive. Hier, avec le sénateur Hussein Bourgi, nous avons inauguré une structure d’accompagnement vers la sortie (SAS), type d’établissement pénitentiaire qui permet d’éviter la récidive.

Le dernier levier, c’est, bien sûr, la prévention. Ce matin, j’ai reçu la délégation sénatoriale aux droits des femmes, qui m’a remis son rapport absolument extraordinaire sur la pornographie. (Mme Nassimah Dindar applaudit.)

Ce rapport a le mérite de placer ce sujet dans le débat public. Des enfants de 11 ans – c’est la moyenne d’âge de la première exposition – ont accès librement à la pornographie !

Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Quel est le rapport ?

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. Eh bien, lutter efficacement contre cela, c’est naturellement lutter contre la délinquance et c’est aussi régler la question de la surpopulation carcérale ! (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, pour la réplique.

M. Jean-Pierre Sueur. Monsieur le garde des sceaux, je ne vous interrogeais pas sur la pornographie, bien que celle-ci soit un réel fléau… (Rires et applaudissements sur des travées des groupes SER et Les Républicains.)

Monsieur le garde des sceaux, j’espère que vous avez lu le rapport du comité des États généraux de la justice, qui vous a été remis par M. Jean-Marc Sauvé.

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. Bien sûr, je l’ai lu !

M. Jean-Pierre Sueur. Vous lirez dans ce rapport que si, depuis trente ans, on construit des prisons, la surpopulation ne décroît pas pour autant. Selon M. Sauvé, la réponse n’est pas là : elle est dans ce qu’il nomme une « régulation ».

Simplement, cette régulation, il faut la penser, par une réflexion avec l’ensemble des acteurs concernés. Nous aimerions donc que vous vous penchiez sur la mise en œuvre de cette régulation, ce que, pour le moment, vous ne faites pas.

Vous dites, comme toujours, que c’est « la faute à avant » – on connaît la chanson – et qu’il faut des peines alternatives, des peines aménagées, etc. Mais on ne sent pas chez vous de volonté de répondre au jugement qui condamne la France parce que l’indignité est réelle dans un certain nombre de nos prisons : la surpopulation atteint 150 % dans trente-six d’entre elles !

Or si l’on n’agit pas fortement dans ce sens, on ne préparera pas la réinsertion, car cet état d’indignité dans les prisons, c’est justement ce qui fait qu’il n’y a pas de réinsertion, donc qu’il y a de la récidive ! (Applaudissements sur les travées des groupes SER et GEST, ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains.)

cop15

Mme la présidente. La parole est à M. Guillaume Chevrollier, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Guillaume Chevrollier. Ma question s’adresse à Mme la Première ministre.

Après la COP27 sur le climat, qui n’a pas été satisfaisante, hier s’est ouverte la COP15, sur la diversité biologique, qui apporte l’espoir d’un possible accord ambitieux permettant d’enrayer le déclin de la biodiversité.

Nous souhaitons tous ici un tel accord, tant le Sénat est mobilisé sur les questions de biodiversité et de climat, qui sont liées. Je salue d’ailleurs l’accord européen qui vient d’être trouvé sur l’interdiction d’importation des produits liés à la déforestation, enjeu majeur pointé par la Haute Assemblée.

La COP15 instaure indéniablement un dialogue utile entre les gouvernements, en lien avec les citoyens et les entreprises.

On fait face à un taux d’extinction des espèces supérieur de 100 à 1 000 fois au taux naturel. Les populations de vertébrés ont chuté de 69 % en moins de cinquante ans. Aujourd’hui, plus d’un million d’espèces animales et végétales sont menacées à court terme, soit une espèce sur huit.

Cette perte massive de biodiversité a des conséquences directes sur notre économie et concerne de nombreux secteurs : l’agriculture, avec le déclin des pollinisateurs ; la pêche, avec la surexploitation et le blanchiment des coraux ; le tourisme, affecté par les paysages en souffrance ; enfin, la gestion de l’eau.

Le sujet est à la fois international et profondément local. Nos collectivités et leurs élus ont à cœur de protéger leur territoire. La diplomatie environnementale ne peut pas tout régler ; nous devons donc continuer d’accompagner nos collectivités et de protéger ce sur quoi nous avons une réelle emprise, par des solutions fondées sur la nature.

À l’heure où notre pays souhaite porter un message d’exemplarité à l’international, la France, nation verte, doit éviter d’avoir le verbe haut et l’action faible.

Madame la Première ministre, quels engagements concrets la France défend-elle à l’échelle internationale ? Qu’en est-il de l’objectif de zéro perte nette de biodiversité inscrit dans la loi française ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe GEST.)

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires. (M. Emmanuel Capus applaudit.)

M. Christophe Béchu, ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires. Monsieur le sénateur Chevrollier, j’aimerais vous remercier pour votre question, mais aussi pour votre présence, il y a quelques jours, au ministère de la transition écologique, où vous avez représenté le Sénat et témoigné de votre attachement au succès de la COP15 quand j’y ai reçu, avec Bérangère Couillard, toutes les ONG mobilisées. Je sais que vous serez personnellement un des acteurs de cette COP15, qui a commencé ses travaux à Montréal il y a quelques heures.

Son ambition est simple. Vous avez rappelé des chiffres qui font froid dans le dos. Un million d’espèces sont menacées, 75 % de la surface de la planète est altérée par la pollution, 85 % des zones humides ont disparu. Ce constat nécessite une mobilisation à la hauteur de ces menaces et de ces extinctions.

Il ne faudrait pas opposer le climat et la biodiversité, parce que les deux sont liés : quand le climat se dérègle, cela accélère la disparition des espèces ; quand la forêt rétrécit, ses capacités de piégeage du carbone diminuent d’autant. À l’inverse, quand on investit sur des solutions fondées sur la nature, on se donne les moyens de lutter contre le dérèglement climatique.

À la COP15, nous serons, en compagnie du Royaume-Uni et du Costa Rica, à la tête d’une coalition de 112 pays pour définir et défendre l’objectif « 30x30 » : préserver 30 % des terres et 30 % des mers à l’horizon de 2030.

Nous le ferons avec des engagements financiers : nous sommes l’un des trois seuls pays, pour le moment, à avoir indiqué sa volonté de s’engager de la sorte.

Nous le ferons de manière cohérente, avec l’annonce d’un One Forest Summit réuni dans quelques mois avec les pays africains pour étudier comment préserver le bassin du Congo et ses réserves de biodiversité ; avec, aussi, le refus exprimé par le Président de la République de l’exploitation des fonds marins ; avec, enfin, la perspective de planification écologique voulue par Mme la Première ministre, qui nous permettra de relier tout cela.

À court terme, 150 millions d’euros consacrés à la biodiversité pourront être dégagés dans le cadre du fonds vert. Je salue à ce propos Mme la sénatrice Lavarde ; je sais l’attachement attentif qu’elle porte à ce fonds (Sourires.), qui nous permettra d’accompagner de manière concrète nos territoires, en particulier les 1 756 sites Natura 2000 et la centaine de parcs naturels nationaux, maritimes et régionaux dont nous disposons. (Applaudissements sur des travées du groupe INDEP.)

Mme la présidente. La parole est à M. Guillaume Chevrollier, pour la réplique.

M. Guillaume Chevrollier. Nous soutenons les 30 % d’aires protégées, mais nous voulons une effectivité réelle, pour laquelle le fonds vert ne suffira pas ! Monsieur le ministre, donnons-nous vraiment les moyens d’assurer notre pleine souveraineté dans notre espace maritime, notamment en outre-mer !

aide sociale à l’enfance

Mme la présidente. La parole est à Mme Brigitte Lherbier, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme Brigitte Lherbier. Madame la secrétaire d’État chargée de l’enfance, l’Unicef a rendu dernièrement un rapport très inquiétant sur la protection de l’enfance en France.

Il y constate qu’un enfant est tué par ses parents tous les cinq jours et que les hospitalisations pour violences physiques commises par les parents ont augmenté de 50 % entre 2017 et 2020.

La police, la gendarmerie, les procureurs font régulièrement état de cette violence intrafamiliale, qui a atteint une ampleur particulièrement grave pendant le confinement. Adrien Taquet, alors secrétaire d’État chargé de l’enfance et des familles, y était très attentif et se montrait inquiet pour l’avenir.

Les violences faites aux femmes sont désormais combattues avec véhémence par tous. Cette lutte est devenue une priorité nationale. C’est parfait, mais qu’en est-il de la maltraitance envers les enfants ?

Si la situation de crise que traverse l’aide sociale à l’enfance est très préoccupante à l’échelle nationale, notamment du fait du nombre important des mineurs étrangers isolés, elle l’est particulièrement dans mon département du Nord, premier département français pour le nombre d’enfants placés.

La moitié des décisions des juges des enfants concernent des mesures de protection de l’enfance. La presse locale expose, toutes les semaines, des situations préoccupantes où les professionnels du secteur tirent la sonnette d’alarme. Actuellement, dans le Nord, 270 ordonnances de placement ne peuvent être honorées faute de places d’hébergement pour ces enfants en détresse. Ceux-ci restent exposés aux dangers qui les menacent chez eux.

Le rapport de l’Unicef est un nouveau signal d’alarme. Un véritable plan national de protection de l’enfant hors de son foyer et de veille à domicile doit être mis en œuvre par le Gouvernement pour épauler les départements.

Une stratégie globale nationale est nécessaire pour assurer une protection renforcée. C’est un devoir de solidarité nationale à apporter aux départements submergés par la précarité des familles, l’afflux de mineurs isolés étrangers et, surtout, par la violence rencontrée dans tous les coins de France. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe UC. – M. Xavier Iacovelli applaudit également.)

Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d’État chargée de l’enfance.

Mme Charlotte Caubel, secrétaire dÉtat auprès de la Première ministre, chargée de lenfance. Oui, madame la sénatrice Brigitte Lherbier, le dispositif de protection de l’enfance est en tension.

Oui, les signaux enregistrés à la sortie de la crise sanitaire sont au rouge, et même au rouge vif, tant sur les violences commises sur les enfants que sur la santé mentale de nos enfants ou que sur le nombre de placements. Celui-ci est bien en forte augmentation, de plus de 10 % dans le département du Nord comme dans bien d’autres départements et territoires particulièrement affectés par les conditions socio-économiques.

Tel est bien le cas, en dépit de ce qui a été fait au cours du précédent quinquennat – vous y avez fait allusion, madame la sénatrice –, en dépit aussi de l’investissement très fort des départements sur cette politique prioritaire.

C’est pourquoi le Président de la République et le Gouvernement ont décidé de faire de l’enfance et de sa protection une priorité du nouveau quinquennat. Lors de la récente réunion, autour de la Première ministre, du comité interministériel à l’enfance, 40 actions et 50 priorités ont été définies ; tous les ministères sont engagés et j’assurerai la coordination de cette politique.

Il m’appartient aussi, madame la sénatrice, de mettre en œuvre la loi du 7 février 2022 relative à la protection des enfants, dont vous conviendrez que l’adoption est assez récente, qui offre une forte impulsion.

Le groupement d’intérêt public (GIP) France enfance protégée permettra une meilleure coordination des acteurs au niveau national. Les comités départementaux de protection de l’enfance permettront quant à eux une action mieux coordonnée à l’échelle départementale. Il ne faut pas que l’État soit le seul acteur, mais il faut plus d’État, aux côtés des départements : c’est bien le rôle de ces comités, qui seront mis en place à partir du 1er janvier prochain dans les départements prioritaires – le président du conseil départemental du Nord m’a dit qu’il en créerait un.

Reste bien sûr la question, très complexe, des hommes et des femmes qui prennent en charge ces enfants. Vous savez que la politique de revalorisation des travailleurs sociaux est une priorité du Gouvernement. Nous sommes mobilisés ! Nous le sommes tous, pour prendre en charge les publics les plus vulnérables, pour les protéger, pour les accompagner, pour leur assurer un avenir et renforcer l’égalité des chances. C’est notre priorité, vous pouvez donc compter sur mon engagement. (M. Xavier Iacovelli applaudit.)

proposition de référendum sur l’alsace