M. Max Brisson. Madame la ministre, drôle de zigzag que le Président de la République fait subir à notre école !
Jean-Michel Blanquer parlait laïcité, autorité et confiance, avant de constater, impuissant, malgré une avalanche de circulaires, la dégringolade de notre école.
Pap Ndiaye passait par-dessus bord les principes chers à son prédécesseur. Sous couvert de mixité sociale, il a sapé les derniers espaces d’excellence de notre école.
Enfin, Gabriel Attal, pendant cinq mois et vingt jours, nous a offert une ode quotidienne à l’école, dont nous attendons toujours la traduction en actes.
Au lieu de zigzag, ne serait-il pas temps de fixer un cap et de s’y tenir dans la durée, avec, pour valeurs cardinales, la liberté, l’autorité, le mérite, l’excellence et la performance ?
M. Bernard Jomier. Comme à Stanislas ? (Sourires sur les travées du groupe SER.)
M. Max Brisson. Telle est la mère des batailles à mener. Toutefois, avec un tel portefeuille, madame la ministre, cette mère des batailles ne risque-t-elle pas, sous le poids de vos responsabilités, de finir noyée ? (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mme Catherine Morin-Desailly applaudit également.)
suite du cyclone belal à la réunion
M. le président. La parole est à Mme Audrey Bélim, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
Mme Audrey Bélim. Monsieur le Premier ministre, La Réunion a connu pour la première fois depuis trente ans le passage de l’œil d’un cyclone. Je profite de ce moment pour exprimer ma solidarité aux Mauriciens, également durement touchés.
À l’heure où nous parlons, le bilan humain fait état de quatre décès. Sur le plan matériel, de nombreux Réunionnais sont sinistrés. Les récoltes des agriculteurs ont été fortement atteintes par le cyclone.
Je salue l’action des élus locaux, qui ont ouvert dans des délais contraints 158 centres d’hébergement d’urgence pour les populations les plus fragiles, mais aussi celle du préfet et du Gouvernement. Vendredi devrait être annoncée la reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle, demandée par l’Association des maires du département de La Réunion, que j’ai soutenue.
Pour l’instant, La Réunion a tenu, mais Belal n’est qu’un avertissement de plus. La prévention des risques et la préparation face aux crises doivent être renforcées.
À court terme se pose la question de l’accompagnement des collectivités. Par exemple, à Saint-Denis, les dépenses post-cyclones s’élèvent à 6 millions d’euros, et ce sans les travaux sur le bâti.
À moyen terme se pose la question de la résilience de notre territoire. De nombreux Réunionnais n’ont plus accès à l’électricité ni à l’eau. Les budgets liés aux réseaux de distribution d’électricité sont-ils à la hauteur des besoins ? Comment se fait-il que les fils électriques ne soient pas enterrés, alors que La Réunion est une terre de cyclones ?
Ce n’est pas une surprise, ce n’est pas imprévisible ! Une succession de cellules de crise ne pourra pas faire une politique.
Se pose aussi la question de notre lutte contre le dérèglement climatique. Nous l’avons vu dans le Pas-de-Calais, nous le voyons aujourd’hui à La Réunion, les tempêtes et cyclones se multiplieront et s’aggraveront. Qu’allez-vous faire pour accélérer en matière de transition énergétique, alors même que le ministère de plein exercice a été supprimé ? La question n’est donc pas de savoir ce qui a été fait, mais bien ce que vous allez faire ! (Applaudissements sur les travées des groupes SER et GEST.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée du renouveau démocratique, porte-parole du Gouvernement.
Mme Prisca Thevenot, ministre déléguée auprès du Premier ministre, chargée du renouveau démocratique, porte-parole du Gouvernement. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, madame la sénatrice Audrey Bélim, à mon tour, au nom du Gouvernement, je me permets de saluer la résilience et la force de capacité d’engagement, aussi bien des habitants de l’île de La Réunion que des forces de secours et de sécurité, ainsi que des nombreux secouristes engagés auprès des associations et des élus locaux.
Je me permets également de saluer, dans un geste de solidarité, les habitants de l’île Maurice, qui ont également été frappés par ce cyclone.
Permettez-moi de répondre très rapidement, mais avec précision, aux éléments importants que vous avez évoqués. L’alerte rouge a en effet été levée par le préfet hier à treize heures, heure locale. Les actions de reconnaissance se poursuivent et le déblaiement des voiries a débuté. Les coupures d’électricité, d’eau et de réseaux téléphoniques fixes comme mobiles ont été importantes, mais sont en cours de réparation. Les principaux réseaux routiers ont été rouverts à la circulation. Seuls les réseaux secondaires et la voie d’accès à Cilaos doivent encore faire l’objet de travaux de déblaiement. Sur le plan humain, nous déplorons quatre victimes.
Le Président de la République a décidé l’engagement de moyens nationaux. Des sapeurs-pompiers, des sapeurs-sauveteurs, des gendarmes et des agents d’Enedis sont partis de métropole et de Mayotte pour apporter leur renfort. L’aide de l’État va se poursuivre avec une procédure accélérée de reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle, dont la commission devrait se réunir dès demain, madame la sénatrice.
Avec le concours du préfet, l’ensemble des dispositifs d’appui aux populations exploitantes du monde agricole ou industriel touchées par ce cyclone seront activés, tels que le dispositif de calamité agricole ou le fonds d’aide outre-mer.
Par ailleurs, vous soulevez un point important. Nous devons en effet être en mesure d’anticiper. Pour ce faire, il convient de travailler sur ces enjeux climatiques, qui sont de plus en plus forts et fréquents. Bien évidemment, la France prend toute sa part à cette tâche. À l’échelon européen, un groupe a été mis en place pour travailler sur ces enjeux. La France y aura une voix particulière, au regard du témoignage de ses territoires d’outre-mer. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
politique familiale
M. le président. La parole est à Mme Anne Chain-Larché, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Anne Chain-Larché. Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, mes chers collègues, en 2023, la France a enregistré seulement 678 000 naissances. En un an, c’est une baisse de 7 % ; en treize ans, une chute de 20 %.
Ce crash de la natalité est destructeur pour notre économie et notre système social. Il constitue une menace existentielle pour notre pays, puisque le renouvellement des générations n’est plus assuré.
Le recours à une immigration massive pour compenser ce déficit de naissances serait une très grave erreur. Cela risquerait de détruire la cohésion nationale.
Le nombre d’enfants désirés par les familles reste largement supérieur aux naissances. À cet égard, la responsabilité du Gouvernement est immense.
Que s’est-il passé ces dernières années ? Le quotient familial a été rogné, les allocations ont été rabotées, les coûts de garde d’enfant ont augmenté, la prestation d’accueil du jeune enfant a diminué… et j’en passe !
C’est une véritable guerre contre les familles qui a été menée et nous en payons le prix.
L’annonce d’un « congé de naissance » de six mois, sans que nous connaissions les moyens qui y seront alloués, est encore une mesure « à côté de la plaque », d’autant que ce congé de naissance entraînerait la suppression du congé parental actuel de deux ans. Ainsi, cela aggraverait, pour de nombreuses familles, les problèmes de garde d’enfant.
Ma question est donc simple : quelle est votre politique familiale ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée du renouveau démocratique, porte-parole du Gouvernement.
Mme Prisca Thevenot, ministre déléguée auprès du Premier ministre, chargée du renouveau démocratique, porte-parole du Gouvernement. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je vous prie de bien vouloir excuser Catherine Vautrin, retenue en ce moment même à l’Assemblée nationale.
En effet, madame la sénatrice, la France accuse cette année une baisse de natalité sans précédent, dont les raisons sont multiples : baisse de la fertilité liée à l’arrivée plus tardive du premier enfant, difficulté d’accès aux modes de garde et baisse de la fertilité liée à des facteurs exogènes.
Des mesures ont d’ores et déjà été annoncées et mises en œuvre en 2023 : allongement du congé de paternité à vingt-cinq jours, mise en place de l’entretien prénatal et postnatal précoce, investissement massif dans la recherche contre l’infertilité dans le cadre de France Relance. Il est important de le rappeler, l’infertilité touche aussi bien les femmes que les hommes.
Nous avons par ailleurs levé le tabou de l’endométriose, qui est la première cause d’infertilité féminine et qui touche une femme sur dix.
Il faut aller plus loin dans l’accompagnement des parents : 200 000 nouvelles solutions de garde doivent être trouvées d’ici à la fin du quinquennat. La nouvelle convention d’objectifs et de gestion qui lie l’État à la Caisse nationale des allocations familiales (Cnaf) prévoit près de 6 milliards d’euros supplémentaires consacrés à la petite enfance d’ici à 2027.
Nous allons également accélérer la lutte contre la pénurie de professionnels de la petite enfance et renforcer l’attractivité des métiers. Tel est l’enjeu des revalorisations salariales annoncées, que nous allons mettre en œuvre en lien avec les branches et les communes.
Enfin, le Président de la République a annoncé hier la mise en place d’un nouveau congé de naissance. Plus court, mieux rémunéré que le congé parental actuel, il permettra d’augmenter le temps de présence auprès des enfants sur les 1 000 premiers jours de la vie sans pénaliser les ménages d’un point de vue financier et en rééquilibrant la charge dans le couple. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à Mme Anne Chain-Larché, pour la réplique.
Mme Anne Chain-Larché. Je m’adresse à ce nouveau gouvernement : arrêtez de dépenser de l’argent public à coups de chèques et de subventions bidon, mais investissez pour la petite enfance et le pouvoir d’achat, soutenez financièrement et fiscalement toutes les familles, faites coexister congé parental court bien rémunéré et congé long moins rémunéré, soutenez la création de places de crèche et redonnez un ministère à la famille !
Ce sont les familles d’aujourd’hui qui préparent la France de demain. Il faut leur redonner espoir et confiance. Agissez vite et agissez fort, ou notre pays disparaîtra ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
protection des maires et sanctions contre leurs agresseurs
M. le président. La parole est à Mme Sylvie Vermeillet, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
Mme Sylvie Vermeillet. Monsieur le président, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, au matin de Noël, puis au matin du Nouvel An, Gabriel Bremond, maire d’Eclans-Nenon, dans le Jura, découvre des tags partout dans le village et sur les murs de sa mairie : « Sale PD », « Travelot », « Le maire s’envoie en l’air », « Nik ta mère le maire », « Gabriel en porte-jarretelles », « Bremond tête de con ».
Ces injures homophobes, attaques personnelles d’une violence inouïe, ont choqué et choquent encore tout un village, mais aussi bien au-delà du Jura.
Gabriel Bremond est un maire sans histoires, apprécié de ses administrés. Il est solide. Il a déposé plainte et il fait face. Mais comment ?
Les témoignages de sympathie de ses administrés lui apportent un réconfort salutaire, comme ceux des maires de toute la France, qui témoignent de la solidarité des membres de cette grande famille républicaine qu’il a choisi de servir et qui n’en finit pas d’être maltraitée : 2 600 agressions l’an passé, 50 % de plus qu’il y a deux ans !
Malgré les indignations, malgré les textes votés, la dérive est implacable, insupportable.
Monsieur le Premier ministre, vous avez déclaré, à Dijon, le week-end dernier : « Nous sommes un gouvernement qui va continuer d’agir contre les discriminations, contre l’homophobie et en faveur des droits de tous. »
Mais – le voyez-vous ? – ces attaques démontrent que leurs auteurs n’ont ni peur des forces de l’ordre ni peur de la justice ! Notre République ne sait pas protéger ses maires. Monsieur le Premier ministre, qu’allez-vous changer pour qu’ils soient respectés ? (Bravo ! et applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe INDEP.)
M. le président. La parole est à M. le garde des sceaux, ministre de la justice.
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux, ministre de la justice. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, madame la sénatrice Sylvie Vermeillet, nous sommes tous unis, en cet instant, dans la même indignation, dans la même colère, dans la même révolte, face à cette agression doublement infâme en ce qu’elle est homophobe et vise un élu.
Je dis au maire d’Eclans-Nenon qu’il a tout le soutien du gouvernement auquel j’appartiens.
Vous le savez, madame la sénatrice, dès mon arrivée à la Chancellerie, j’ai pris un certain nombre de circulaires claires pour demander expressément à tous les procureurs de notre pays une réponse systématique, une réponse ferme, une réponse rapide. Les trois budgets que le Sénat a votés – je l’en remercie – nous permettent de mobiliser désormais des effectifs supplémentaires, magistrats, greffiers, contractuels devenus attachés de justice. À Besançon, dans une cour d’appel dont je sais, madame la sénatrice, qu’elle vous est chère, cinquante-huit de ces personnels vont arriver.
J’ai par ailleurs demandé à tous les procureurs de ce pays de dire à chaque élu concerné quelle était l’issue de la plainte qu’il avait déposée.
Nous avons de surcroît mis en place, grâce aux contractuels devenus attachés de justice, un lien qui doit être privilégié entre les élus locaux et les parquets.
Pour vous rassurer totalement, même si l’on déplore, bien sûr, le nombre d’agressions, je veux vous donner quelques chiffres. En 2022, mesdames, messieurs les sénateurs, le taux de réponse pénale s’élève, pour les infractions commises contre des élus, à 98 %. À gravité égale, pour des faits de violences, le taux de prononcé d’un emprisonnement ferme est de 51 % lorsque la victime est un élu, de 25 % lorsque la victime n’est pas un élu. Le taux de défèrement est cinq fois plus élevé, le taux de délivrance d’un mandat de dépôt quatre fois plus élevé, lorsque la victime est un élu.
Soyez assurée, Madame la sénatrice, Mesdames, Messieurs les sénateurs, que le combat continue et que notre engagement dans la défense des élus est total, car s’attaquer à un élu, c’est s’attaquer à la République. (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI, INDEP, RDSE, UC, ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à Mme Sylvie Vermeillet, pour la réplique.
Mme Sylvie Vermeillet. Je vous remercie, monsieur le garde des sceaux, de vos propos.
Toutefois, tous ici nous continuons de constater qu’énormément de plaintes sont classées sans suite. La clé, c’est la fermeté ! Toute agression doit donner lieu à une sanction. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe UC.)
transition écologique dans le secteur du logement
M. le président. La parole est à Mme Laurence Muller-Bronn, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Laurence Muller-Bronn. Monsieur le président, monsieur le ministre de la transition écologique, mes chers collègues, le Conseil d’analyse économique (CAE), rattaché au Premier ministre, a révélé la semaine dernière que l’étiquette énergie des logements, notée de A à G, qui définit leur valeur et les autorise ou non à être loués, repose en réalité sur des calculs purement théoriques et sur une modélisation très approximative.
Ainsi, le fameux « diagnostic de performance énergétique », ou DPE, transformé en quête du Graal climatique, pour lequel l’État investit des milliards d’euros, ne reflète pas la consommation réelle des logements ni les gains énergétiques réellement obtenus à l’issue de travaux.
Or c’est bien ce même DPE qui aggrave aujourd’hui une crise du logement sans précédent, notamment pour les locataires et propriétaires les plus modestes. Depuis le 1er janvier 2023, tous les logements classés G+ sont interdits à la location, et cette décision repose sur un algorithme biaisé. Que dites-vous, monsieur le ministre, aux propriétaires et aux locataires qui en font d’ores et déjà les frais ?
Si l’on persiste dans les échéances annoncées, 11 millions de logements classés F et G vont être interdits à la location dans les dix années à venir, sans véritable raison.
Une fois de plus, cette machine à exclure retombera sur les maires, eux-mêmes dépassés par la pénurie de logements et par les contraintes liées à la construction.
Monsieur le ministre, qu’allez-vous faire pour supprimer et remplacer cet outil défaillant, qui paralyse le secteur du logement ? (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.
M. Christophe Béchu, ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, madame la sénatrice Muller-Bronn, c’est à grands traits que vous avez résumé le rapport du Conseil d’analyse économique publié le 10 janvier dernier, car ce n’est pas exactement ce qu’il dit.
Il souligne une différence entre la consommation théorique et la consommation réelle. Pour faire simple, plus les gens vivent dans des passoires, moins ils chauffent ; à l’inverse, les gens qui vivent dans des logements très isolés peuvent avoir tendance, par « effet rebond », à se chauffer à des températures moyennes plus élevées, donc à payer des factures plus élevées. En d’autres termes, compte tenu des effets d’une rénovation sur les factures, il peut arriver que la baisse des émissions soit moins forte qu’attendu.
J’ajoute que l’étude porte sur un échantillon de 170 000 logements.
Le CAE conclut que les étiquettes sont cohérentes : A, c’est mieux que B, qui est mieux que C, qui est mieux que D, etc. Je vous invite à lire le rapport lui-même et non les articles de presse qui sont parus à l’occasion de sa publication.
Tout en quantifiant un biais de mesure de la consommation par le DPE ainsi qu’un effet d’ajustement des comportements, les auteurs du rapport précisent que l’analyse de cet outil, dont le mode de calcul a été révisé en 2021, ne s’en trouve pas modifiée.
Premièrement, nous avons besoin de faire des travaux de rénovation pour répondre à des enjeux climatiques, mais aussi de pouvoir d’achat.
Vous parlez des propriétaires et des locataires, madame la sénatrice : la facture d’un locataire qui vit dans une passoire énergétique est en moyenne deux fois plus lourde que celle d’un locataire qui vit dans un bien classé comme performant.
Deuxièmement, les chiffres que vous évoquez mélangent logements occupés par leurs propriétaires, logements vacants – plus de 10 % des passoires énergétiques –, résidences secondaires et logements locatifs, ces derniers étant les seuls à être concernés par un calendrier d’interdiction.
Troisièmement, vous évoquez des marges d’amélioration. Il y en a plusieurs, à commencer par la formation des diagnostiqueurs. Je m’apprête par ailleurs à faire des annonces en vue de corriger les biais induits par les DPE pour ce qui concerne les petites surfaces, c’est-à-dire les biens de moins de quarante mètres carrés, ceux pour lesquels en effet il y a matière, sur la base, entre autres, du rapport du CAE, à améliorer le dispositif. Je préciserai dans quelques jours – le Premier ministre m’y a autorisé – les nouvelles règles qui vont s’appliquer. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI, ainsi que sur des travées du groupe INDEP.)
M. le président. La parole est à Mme Laurence Muller-Bronn, pour la réplique.
Mme Laurence Muller-Bronn. Monsieur le ministre, ce n’est pas la première fois que l’on fonde une politique majeure sur des modélisations un peu fumeuses…
Les Français perdent une nouvelle fois confiance dans cet État qui s’appuie sur un dispositif qui n’est bienveillant ni pour eux ni pour la planète.
Hier, comme beaucoup d’entre nous, j’ai entendu le Président de la République s’inquiéter de la baisse de la natalité. Or la première des sécurités, quand on veut élever des enfants, c’est bien le logement ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
enseignement public et privé
M. le président. La parole est à Mme Colombe Brossel, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER. – M. Pierre Ouzoulias applaudit également.)
Mme Colombe Brossel. Madame la ministre de l’éducation nationale, vos propos ont choqué, heurté, blessé la communauté éducative.
Parlons école !
Parlons de l’école de la République, l’école publique, laïque, gratuite et obligatoire. Cette école, c’est celle qui scolarise 80 % des élèves de ce pays, d’où qu’ils viennent. C’est vers elle que votre énergie devrait être tournée, afin de garantir la réussite de tous, élèves comme personnel, car les défis sont immenses et vous êtes au pouvoir depuis plus de six ans.
Vous avez, de fait, posé la question des « parts de marché » respectives de l’enseignement public et de l’enseignement privé. Or cette mise en concurrence, puisque c’est de cela qu’il s’agit, n’est même pas libre et non faussée : aucun contrôle des fonds publics qui financent l’école privée n’est effectué par l’État, et ce alors que l’enseignement privé est financé à plus de 70 % par l’État. La Cour des comptes, très récemment, vous rappelait à vos obligations en la matière.
Madame la ministre, quels moyens allez-vous enfin donner à l’école publique pour la renforcer ? (Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE-K et GEST.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse, des sports et des jeux Olympiques et Paralympiques.
Mme Amélie Oudéa-Castéra, ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse, des sports et des jeux Olympiques et Paralympiques. Madame la sénatrice, je crois vraiment que l’on ne doit pas opposer l’école publique et l’école privée. (Rires et applaudissements sarcastiques sur les travées des groupes SER, CRCE-K et GEST.)
M. Pierre Ouzoulias. C’est une autocritique !
Mme Amélie Oudéa-Castéra, ministre. Depuis la loi Debré du 31 décembre 1959, adoptée sous la présidence du général de Gaulle, qui établit la liberté d’enseignement dans notre pays, celui-ci vit et vit bien avec des écoles publiques et avec des écoles privées. Les premières accueillent 10 millions d’élèves, les autres 2 millions, soit un élève sur six, et toutes deux concourent au service public de l’éducation.
Dans les établissements privés, je le rappelle, les programmes et les volumes horaires sont ceux du public.
Une voix sur les travées du groupe SER. Même en matière de lutte contre l’homophobie et le sexisme ?
Mme Amélie Oudéa-Castéra, ministre. Dans l’ensemble des établissements sous contrat, les enseignants sont rémunérés par l’État et recrutés avec les mêmes exigences de qualification que dans le public. La moitié des familles ont eu recours au moins une fois à l’enseignement privé pour au moins un de leurs enfants ; il faut respecter ces choix de scolarisation et non pas les stigmatiser (Exclamations ironiques sur les travées des groupes SER, CRCE-K et GEST.),…
M. Hussein Bourgi. Répondez sur les moyens !
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. C’est vous qui les stigmatisez !
Mme Amélie Oudéa-Castéra, ministre. … non pas forcer les parents d’élèves à se justifier, mais comprendre ce qu’il y a derrière leur décision et faire en sorte que le choix d’une école publique ou d’une école privée ne soit pas la résultante de déceptions ou de frustrations, mais qu’il soit, pour chacun, un véritable choix d’adhésion, le choix du libre arbitre. (Ce n’est pas la question ! sur les travées du groupe SER.)
Pour l’école publique, madame la sénatrice, j’ai la plus grande des ambitions, d’abord celle de l’exigence : choc des savoirs, autorité renforcée de nos professeurs. Je poursuivrai à cet égard toutes les réformes dont Gabriel Attal a donné l’impulsion en matière de revalorisation des carrières, d’amélioration des conditions de travail et d’organisation des remplacements.
M. Hussein Bourgi et Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Avec quels moyens ?
Mme Amélie Oudéa-Castéra, ministre. Quant à l’école privée, je veux veiller à ce qu’elle soit toujours et partout au rendez-vous des principes et des valeurs de la République,…
M. Mickaël Vallet. Répondez à la question !
Mme Amélie Oudéa-Castéra, ministre. … que l’on y renforce aussi souvent que nécessaire le contrôle pédagogique (Brouhaha sur les travées du groupe SER.),…
Mme Audrey Linkenheld. Et les moyens de l’école publique ?
Mme Amélie Oudéa-Castéra, ministre. … et que, partout dans notre service public de l’enseignement, l’on assure la cohérence de l’offre éducative et la mixité sociale et scolaire.
Mmes Émilienne Poumirol et Laurence Rossignol. Ce n’est pas vraiment la priorité de l’école privée !
Mme Amélie Oudéa-Castéra, ministre. Mesdames, messieurs les sénateurs, réussir l’école avec toute la communauté éducative, c’est-à-dire faire réussir toutes les écoles de notre pays, nous allons le faire. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. Max Brisson. Langue de bois !
M. le président. La parole est à Mme Colombe Brossel, pour la réplique.
Mme Colombe Brossel. Madame la ministre, peut-être n’est-ce pas l’usage de parler avec son cœur dans un hémicycle, mais excusez-moi de vous dire combien il est troublant que vous soyez incapable de répondre à la question simple que je vous ai posée.
Vous vous êtes mise toute seule dans une situation faite de polémiques et de mensonges. L’impuissance que vous projetez aujourd’hui est délétère pour l’école, alors que les enfants, les enseignants, l’ensemble des personnels, les parents, ont besoin de force et de confiance.
Les solutions existent : recrutez des professeurs remplaçants pour pallier les absences de courte durée dans le primaire ! Annulez toutes les suppressions de postes qui ont été votées ici même pendant l’examen du budget pour 2024 !
La mixité ? Nous la faisons vivre, dans nos territoires, en définissant des secteurs multi-collèges ou en adossant le financement du privé au respect de critères de mixité sociale et scolaire !