ARTICLE 18 A : MODIFICATION DU MODE DE CALCUL DE LA DCRTP
I. DÉBATS SÉNAT PREMIÈRE LECTURE DU 23 NOVEMBRE 2010
Article additionnel avant l'article 18
M. le président. L'amendement n° I-449, présenté par M. Marini, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Avant l'article 18, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - L'article 78 de la loi n° 2009-1673 du 30 décembre 2009 de finances pour 2010 est ainsi modifié :
1° Le 1° du 1 du II du 1.1. est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Majorée du montant de taxe professionnelle que la commune ou l'établissement public aurait perçu en 2010 au titre des installations terrestres de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent mentionnées à l'article 1519 D du code général des impôts, dont le permis de construire a fait l'objet d'une demande adressée avant le 1 er janvier 2010 et a été accordé par la commune d'établissement dans des termes strictement identiques à ceux de ladite demande, en particulier au regard du nombre d'installations, de leur puissance électrique installée et de leur localisation. » ;
2° Le 1° du 1 du II du 1.2. est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Majorée du montant de taxe professionnelle que le département aurait perçu en 2010 au titre des installations terrestres de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent mentionnées à l'article 1519 D du code général des impôts, dont le permis de construire a fait l'objet d'une demande adressée avant le 1 er janvier 2010 et a été accordé par la commune d'établissement dans des termes strictement identiques à ceux de ladite demande, en particulier au regard du nombre d'installations, de leur puissance électrique installée et de leur localisation. » ;
3° Après le quatrième alinéa du 1° du 1 du II du 1.3., il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Majorée du montant de taxe professionnelle que la région aurait perçu en 2010 au titre des installations terrestres de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent mentionnées à l'article 1519 D du code général des impôts, dont le permis de construire a fait l'objet d'une demande adressée avant le 1 er janvier 2010 et a été accordé par la commune d'établissement dans des termes strictement identiques à ceux de ladite demande, en particulier au regard du nombre d'installations, de leur puissance électrique installée et de leur localisation. »
II. - La perte de recettes résultant pour l'État de la majoration des dotations de compensation de la réforme de la taxe professionnelle prévue au I est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Il s'agit d'un petit correctif à l'un des nombreux dispositifs issus de la très complexe réforme de la taxe professionnelle. (Mme Nicole Bricq s'exclame.)
Le présent amendement vise à modifier très légèrement le mode de calcul de la dotation de compensation de la réforme de la taxe professionnelle, la DCRTP, pour tenir compte d'une difficulté pratique dans la mise en oeuvre de la composante de l'imposition forfaitaire sur les entreprises de réseaux, ou IFER, sur les éoliennes.
L'IFER est une innovation liée à la suppression de la taxe professionnelle. Outre que son produit en 2010 devrait être inférieur aux prévisions avec 1,28 milliard d'euros au lieu de 1,6 milliard d'euros, les retours d'expérience et les travaux de la commission des finances au premier semestre ont mis en évidence certaines difficultés et situations potentiellement inéquitables. La commission a donc diffusé un rapport d'information le 29 juin dernier intitulé « Mise en oeuvre de la contribution économique territoriale : la trajectoire de la réforme ».
J'en viens au point qui me préoccupe plus particulièrement.
Certaines collectivités accueillant des installations éoliennes sont confrontées à une situation transitoire qui peut leur être préjudiciable, lorsque le projet de construction a été engagé avant 2010 sous le régime de la taxe professionnelle, fiscalement plus favorable pour les collectivités, mais finalisé en 2010 sous le régime de l'IFER. L'équilibre financier de l'opération peut être remis en cause si les nouvelles ressources fiscales résultant de ces installations sont sensiblement moindres que celles initialement attendues de la taxe professionnelle.
Le présent amendement introduit donc, dans le mode de calcul de la dotation de compensation de la réforme de la taxe professionnelle dont bénéficient les trois niveaux de collectivités, un mécanisme de reconstitution et de maintien du produit de taxe professionnelle qui aurait été perçu sur de nouvelles installations.
Cependant, afin d'éviter tout effet d'aubaine, nous souhaitons fixer des conditions d'éligibilité très strictes.
Premièrement, le dépôt de la demande de permis de construire doit être effectué avant le 1 er janvier 2010.
Deuxièmement, si l'octroi de ce permis est intervenu après le 1 er janvier 2010, il faut que le permis ait été délivré dans des conditions strictement conformes à ce qui figurait dans la demande de permis de construire en ce qui concerne le nombre d'installations, leur puissance et leur implantation.
Si ces conditions sont remplies, il nous semble équitable, monsieur le ministre, que les communes - il s'agit en général de petites communes rurales - continuent à bénéficier du régime de la taxe professionnelle, que nous regrettons bien.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Baroin, ministre. Monsieur le rapporteur général, je ne peux être favorable à cette proposition - mais vous vous en doutiez.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Absolument pas !
M. François Baroin, ministre. Il en est ainsi pour les raisons suivantes.
D'abord, il paraît difficilement envisageable d'intégrer un produit virtuel dans le calcul de la dotation de compensation de la réforme de la taxe professionnelle, la DCRTP. Celle-ci permet de garantir le produit effectif avant réforme de chacune des collectivités et non les ressources potentielles. Même si on suivait votre logique et que l'on fut d'accord sur le principe consistant à retenir un produit virtuel, ce serait inapplicable. En effet, on ne voit pas très bien comment pourrait être déterminé le montant en question, puisque, par définition, la base de ces éoliennes n'est pas connue de l'administration. La mesure que vous proposez pose un réel problème de mise en oeuvre.
Néanmoins, pour bien montrer que nous avons réfléchi à la façon dont nous pouvions accompagner le maintien des bases et des recettes pour les communes qui disposaient de projets d'installation de parcs éoliens sur le finage de leur territoire, je rappelle que la clause de revoyure a apporté déjà très largement des réponses à ces situations. D'une part, elle porte le tarif de l'IFER éolien de 2,973 euros par kilowatt de puissance installée à 5 euros ; d'autre part, la répartition de l'IFER éolien est modifié pour être affecté à 20 % à la commune et à 50 % à l'établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre, le solde, soit 80 % ou 30 %, étant affecté au département dans le cadre de la péréquation départementale.
Cette modification de la répartition de l'IFER, neutre pour les départements, améliore de beaucoup le rendement de l'IFER pour les communes et, surtout, pour les établissements publics de coopération intercommunale. Elle renforce ainsi le lien avec le territoire. En tout état de cause, l'installation de nouvelles éoliennes conduira bien à une augmentation du produit fiscal pour les collectivités concernées ; c'est une évidence.
Donc, nos point de vue divergent, monsieur le rapporteur général, à regret.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. On ne peut pas toujours être d'accord avec le Gouvernement. C'est la vie ! (Sourires.)
Monsieur le ministre, plus sérieusement, je rappelle qu'il s'agit là d'une toute petite fenêtre et de cas isolés que nous rencontrons dans nos départements. Une collectivité a engagé une opération sous le régime de la taxe professionnelle. Pour des raisons souvent administratives, le permis de construire n'a pas été délivré avant le 31 décembre. Pour autant, il ne s'agit absolument pas de rouvrir un guichet. Nous proposons simplement de solder les procédures en cours, en posant la condition suivante : que ce permis de construire, qui en général a été accordé quelques semaines après le 1 er janvier, soit strictement conforme aux termes de la demande ; la puissance, le nombre de moulins et leur implantation restent inchangés.
Le nombre de cas concernés est très faible, mais nous pouvons en connaître dans nos territoires. Dans mon département, j'en connais un, mais je ne peux rien répondre au maire : il subit une injustice totale !
Monsieur le ministre, permettez-nous de nourrir encore pendant quelques jours un peu espoir pour ces petites communes si nous votons cet amendement. Peut-être pourrons-nous convaincre vos services. D'ailleurs, à vous dire le vrai, je pensais que c'était déjà le cas.
Quant aux principaux fictifs, ces impôts que l'on ne recouvre pas et par rapport auxquels on calcule des références, nous savons faire depuis plusieurs centaines d'années ! Notre fiscalité tout entière repose sur les principaux fictifs, les centimes additionnels. C'est d'ailleurs la plus merveilleuse invention de la fiscalité. Philippe Dominati, s'il était encore dans cet hémicycle, serait d'accord. Les impôts fictifs sont des impôts que l'on n'a pas besoin de recouvrer. C'est donc une notion à laquelle on peut tout à fait se rattacher.
Bref, monsieur le ministre, ne m'en veuillez pas de maintenir, à ce stade, l'amendement, en espérant pouvoir convaincre vos excellents collaborateurs et, surtout, nos collègues de l'Assemblée nationale lors de la commission mixte paritaire.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° I-449.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, avant l'article 18.