III. DÉBATS ASSEMBLÉE NATIONALE EN PREMIÈRE LECTURE (VENDREDI 21 OCTOBRE 2011)
M. le président. Sur l'article 29, je suis saisi d'un amendement de suppression n° 438.
La parole est à Mme la ministre.
Mme Valérie Pécresse, ministre. C'est un amendement de suppression de l'article à des fins de coordination avec l'amendement relatif au plafonnement des taxes affectées.
(L'amendement n° 438, accepté par la commission, est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 29 est supprimé.
IV. TEXTE ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE EN PREMIÈRE LECTURE
Article 29 supprimé
V. RAPPORT SÉNAT N° 107 (2011-2012) TOME II
Commentaire : le présent article tend à affecter le produit de la vente des biens confisqués à l'Agence de gestion et de recouvrement des avoirs saisi et confisqués (AGRASC) à concurrence de 1 806 000 euros.
I. LE DROIT EXISTANT
A. LE STATUT ET LES MISSIONS
Afin de mieux appréhender les profits engendrés par la délinquance et le crime organisé et de renforcer l'effet dissuasif de la sanction pénale, la loi n° 2010-768 du 9 juillet 2010 visant à faciliter la saisie et la confiscation en matière pénale a élargi le champ des biens susceptibles d'être saisis et confisqués.
Elle a également créé une procédure de saisie pénale aux fins de confiscation . Cette procédure est plus adaptée que les procédures civiles d'exécution, qui sont complexes et coûteuses.
Parallèlement, la loi précitée du 9 juillet 2010 a prévu la création d'un établissement public administratif (EPA) : l'Agence de gestion et de recouvrement des avoirs saisis et confisqués (AGRASC) . Cette agence est placée sous la double tutelle du ministre de la justice et du ministre chargé du budget.
Elle est en charge de la gestion et du recouvrement des avoirs saisis et confisqués. Elle assure notamment la gestion centralisée de toutes les sommes saisies lors de procédures pénales, l'ensemble des ventes avant jugement de biens corporels saisis, l'ensemble des publications de saisies pénales immobilières ainsi que la gestion et la vente de biens complexes nécessitant, pour leur conservation ou leur valorisation, des actes d'administration : bateaux, immeubles, commerces...
Elle a également une mission d'aide, d'assistance et d'orientation, ainsi que de formation des magistrats français dans le domaine de la saisie et de la confiscation, ainsi que des attributions internationales.
Enfin, elle veille, le cas échéant, au paiement prioritaire des dommages et intérêts dus aux victimes , ainsi qu'à abonder avec le produit des biens confisqués le fonds de concours de la mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie (MILDT) et le budget général de l'Etat.
B. LES RESSOURCES PRÉVUES PAR LA LOI
Selon la loi précitée du 9 juillet 2010, les ressources de l'AGRASC sont les suivantes :
- les subventions, avances et autres contributions de l'Etat et de ses établissements publics, de l'Union européenne, des collectivités territoriales, de leurs groupements et de leurs établissements publics ainsi que de toute autre personne morale publique ou privée ;
- les recettes fiscales affectées par la loi ;
- une partie, déterminée annuellement par la loi de finances, du produit de la vente des biens confisqués ( Cf. supra ) ;
- le produit du placement des sommes saisies ou acquises par la gestion des avoirs saisis et versées sur son compte à la Caisse des dépôts et consignations, dans les mêmes limites et sous les mêmes réserves que pour les ventes visées ci-dessus ;
- le produit des dons et legs.
Dans cette perspective, il convient de rappeler que la plate-forme d'identification des avoirs criminels (PIAC) a évalué la masse totale des avoirs et biens saisis à 154 millions d'euros en 2010 (contre 185 millions d'euros en 2009 et 93 millions d'euros en 2008).
Le produit des ventes de biens confisqués L'affectation d'une partie du produit de la vente des biens confisqués, lorsque l'agence est intervenue pour leur gestion ou leur vente, est prévue par l'article 706-160 du code de procédure pénale, tel qu'il résulte de l'article 4 de la loi précitée du 9 juillet 2010. Cette partie affectée est déterminée annuellement par la loi de finances . Afin de garantir l'exécution de la peine complémentaire de confiscation en application de l'article 131-21 du code pénal, les biens pouvant être saisis sont déterminés par les articles 706-141 à 158 du code de procédure pénale. Il s'agit des numéraires, des immeubles, des biens ou droits corporels comme les comptes ouverts, des parts sociales, des valeurs mobilières, des instruments financiers, des fonds de commerce... En vertu du 2° de l'article 706-160 du code de procédure pénale, tous les numéraires ainsi que toutes les sommes inscrites au crédit de comptes bancaires saisis en France lors de procédures pénales sont centralisés sur le compte de l'AGRASC ouvert auprès de la Caisse des dépôts et consignations (CDC). L'agence procède également à la vente avant jugement des biens lorsqu'elle est décidée par les parquets ou les magistrats instructeurs dans les conditions prévues aux articles 41-5 et 99-2 du code de procédure pénale, conformément au 4° de l'article 706-160 du code de procédure pénale. Enfin, l'agence peut, dans les mêmes conditions, assurer la gestion de biens saisis , procéder à leur vente et à la répartition de son produit en exécution de toute demande d'aide internationale ou de coopération émanant d'une autorité judiciaire étrangère, conformément au sixième alinéa de l'article 706-60 du code de procédure pénale. Le produit de ces ventes constitue l'assiette à partir de laquelle sera déterminée la fraction contribuant aux ressources de l'agence. |
C. LE FINANCEMENT DE L'AGRASC EN 2011 ET 2012
2. Le financement de l'AGRASC en 2011
En 2011 , l'article 75 de la loi n° 2010-1657 du 29 décembre 2010 avait affecté 1,3 million d'euros issus de la vente des biens confisqués et saisis pour assurer le financement de la première année d'activité de l'agence.
Toutefois, compte tenu du démarrage de l'activité de l'agence en février 2011, celle-ci n'a pas pu percevoir de recettes issues de la vente de biens saisis et confisqués, puisqu'elle n'est pas intervenue pour leur gestion ou leur vente en 2010. Par conséquent, elle n'a pas pu se voir affecter la recette de 1,3 million d'euros initialement prévue .
Pour faire face à cette situation et permettre néanmoins le démarrage de l'activité de l'agence, le ministère de la justice lui a accordé une avance de 700 000 euros en avril 2011 , qui devrait être complétée par une nouvelle avance d'environ 500 000 euros pour lui permettre d'assurer son financement jusqu'à la fin de l'année.
Il en résulte que le besoin de financement de l'agence en 2011 correspond globalement à la prévision, même si le mode financement de l'agence s'est avéré plus compliqué que prévu 4 ( * ) .
3. Le financement de l'agence pour 2012
Pour 2012, le Gouvernement juge nécessaire d'augmenter les ressources de l'agence afin de lui permettre de faire face à la très forte montée en charge de son activité . Le Gouvernement estime en effet que près de 12 000 affaires devraient être transmises à l'agence en 2012, contre 6 000 en 2011.
Il est donc prévu de porter ses effectifs de 11 à 20 agents d'ici la fin de l'année 2012.
Cette augmentation de l'effectif implique un déménagement de l'agence. Actuellement installée dans des locaux avenue de Ségur à Paris (7 ème arrondissement), elle devrait déménager dans un immeuble en location mutualisée respectant les normes fixées par France domaine, situé rue de Richelieu (2 ème arrondissement). Elle partagera ces locaux avec une partie des effectifs du Conseil d'Etat et du ministère des finances.
Le besoin de financement de l'AGRASC pour 2012 correspond ainsi à 1,8 million d'euros se ventilant comme suit :
- une masse salariale de 1,29 million d'euros pour les 20 agents que l'agence comportera fin 2012, avec une montée en charge progressive au cours de l'année ;
- une hypothèse de loyer annuel de 0,15 million d'euros ;
- des charges de fonctionnement estimées à de 0,07 million d'euros ;
- des charges liées à l'activité de l'agence (frais inhérents à la gestion des biens confiés à l'AGRASC) de 0,3 million d'euros.
Le montant de l'affectation de produit prévu par le présent article répond donc bien au besoin de financement de l'AGRASC pour 2012 .
Il convient de souligner que le produit du placement des sommes saisies ou acquises par la gestion des avoirs saisis et versés sur le compte de l'agence à la CDC (un solde de 49 millions d'euros était enregistré au 30 juin 2011) n'est pas, à lui seul, à la hauteur du besoin de financement de l'agence.
Par ailleurs, il faut rappeler qu'il était attendu de la mise en place de l'agence et de son mode de financement incitatif une augmentation des biens confisqués et du produit de leur vente. A cet égard, les premiers mois d'activité de l'AGRASC démontrent une augmentation du nombre des saisies pénales, notamment immobilières, ainsi que des ventes avant jugement. L'absence de structure spécialisée limitait en effet auparavant le nombre de saisies, les juridictions hésitant à les prononcer sachant qu'elles sont une source importante de difficultés et de frais de justice.
Il s'agit ainsi de renforcer l'effet dissuasif de la sanction pénale et, en facilitant la saisie pénale des biens qui sont susceptibles d'être confisqués par la juridiction de jugement, d'éviter que les délinquants n'organisent leur propre insolvabilité au cours de l'enquête.
II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ
Le présent article propose d' affecter le produit de la vente des biens confisqués à l'AGRASC à concurrence de 1 806 000 euros . Le produit de cette vente est affecté sauf dans le cas, prévu par le 3° de l'article 706-163 du code de procédure pénale, où la « loi prévoit la restitution intégrale à la personne saisie de ce produit et des intérêts échus le cas échéant » et « sous réserve de l'affectation de ce produit au fonds de concours recevant les recettes provenant de la confiscation des biens mobiliers ou immobiliers des personnes reconnues coupables d'infractions en matière de trafic de stupéfiants ».
III. LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE
A l'initiative du Gouvernement et avec l'avis favorable de la commission des finances, l'Assemblée nationale a adopté un amendement de suppression de l'article à des fins de coordination avec le dispositif de l'article 16 ter du présent projet de loi de finances.
Ce dispositif organise en effet le plafonnement des ressources affectées à un certain nombre d'opérateurs de l'Etat, donc l'AGRASC. Le plafond retenu pour les recettes affectées en application de l'article 706-163 du code de procédure pénale est fixé au même niveau que celui prévu par le présent article, soit 1 806 000 euros.
VI. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES
La suppression du présent article a été motivée par la redondance qui aurait résulté de la coexistence dans le projet de loi de finances des dispositions de l'article 16 ter sur le plafonnement des « impositions » affectées aux opérateurs et des dispositions du présent article, relatives à l'affectation non pas d'une taxe mais d'une fraction du produit des ventes des biens confisqués, dont le code de procédure pénale prévoit qu'elle est décidée chaque année en loi de finances. La fraction du produit de ces ventes bénéficiant au budget général est inscrite en recettes non fiscales de l'Etat.
Il est tout à fait concevable que l'AGRASC figure dans le dispositif global de plafonnement , dès lors que ses ressources sont déjà soumises à une procédure de même esprit. Cependant, il faudrait alors préciser que le dispositif de plafonnement s'applique non seulement aux impositions affectées, mais aussi à d'autres types de ressources affectées . Votre commission des finances ayant adopté un amendement en ce sens à l'article 16 ter , la suppression de cet article peut être confirmée.
Décision de la commission : votre commission vous propose de confirmer la suppression de cet article.
* 4 La question de savoir si l'agence devra rembourser cette avance, et dans quels délais, ou si celle-ci sera finalement transformée en subvention du ministère de la justice, n'est pas encore tranchée.