Mercredi 1er avril 2009
- Présidence de M. Jacques Legendre, président -Audition de M. Olivier Kaeppelin, délégué aux arts plastiques au ministère de la culture et de la communication, et de Mme Nicole Phoyu-Yedid, inspecteur général à la mission permanente d'inspection, de conseil, et d'évaluation de l'enseignement artistique
La commission a procédé à l'audition de M. Olivier Kaeppelin, délégué aux arts plastiques au ministère de la culture et de la communication, et de Mme Nicole Phoyu-Yedid, inspecteur général à la mission permanente d'inspection, de conseil, et d'évaluation de l'enseignement artistique.
M. Olivier Kaeppelin a rappelé, tout d'abord, que les politiques publiques en faveur des arts plastiques avaient été notamment initiées par M. André Malraux. La délégation aux arts plastiques a été créée en 1981. Elle a ensuite été consolidée, en dépit des remises en cause dont la politique d'aide et de soutien à la création contemporaine a pu faire l'objet. La mission de cette délégation se décline selon trois principaux axes : favoriser la création contemporaine et sa diffusion, apporter un soutien aux créateurs et assurer l'organisation de l'enseignement supérieur et de la recherche dans ce domaine.
En 2009, les crédits destinés aux arts plastiques, qui se répartissent dans trois programmes budgétaires, s'établissent à 123,8 millions d'euros en crédits de paiement, soit environ 5,7 % du budget du ministère de la culture. Plus de 40 % de ces crédits sont gérés de façon déconcentrée. Cette enveloppe budgétaire permet par ailleurs de subventionner des établissements publics comme le Mobilier national, la Manufacture nationale de Sèvres et les dix écoles nationales d'art, ainsi que des établissements culturels constitués sous la forme d'associations, comme le Palais de Tokyo ou le Jeu de Paume.
M. Olivier Kaeppelin a souligné que la délégation aux arts plastiques avait développé une politique ambitieuse et volontariste, notamment pour soutenir les artistes, la création et les projets portés par les collectivités territoriales, contribuer à la politique d'aménagement du territoire à travers la commande publique, relancer la pratique du 1 % culturel ou encore promouvoir les métiers d'art. A travers le Fonds national d'art contemporain (FNAC), elle oeuvre, en outre, à enrichir le patrimoine français, dans le souci de valoriser la création contemporaine dans toute sa diversité.
Il a relevé, cependant, que la délégation aux arts plastiques, créée en tant qu'administration de mission, disposait d'un budget et de moyens humains relativement restreints au regard de ces objectifs. Puis il a souligné la nécessité d'une politique partenariale avec les collectivités territoriales dans ce domaine, saluant le rôle de celles-ci dans le cadre des fonds régionaux d'art contemporain (FRAC), du réseau des centres d'art ou des écoles d'art, ancrés historiquement dans les villes.
A l'issue de cette intervention, un débat s'est engagé.
M. Ivan Renar, estimant que le budget des arts plastiques était insuffisant, s'est interrogé sur le devenir de la délégation aux arts plastiques dans le cadre de la révision générale des politiques publiques (RGPP). Il a demandé des précisions sur l'application du 1 % culturel ainsi que sur les évolutions des écoles d'art, rappelant que la loi n° 2006-723 du 22 juin 2006, issue d'une initiative sénatoriale, avait spécifiquement prévu que le directeur d'un établissement public de coopération culturelle (EPCC) puisse délivrer des diplômes. Il s'est interrogé sur la situation du Palais de Tokyo, puis sur les relations entre les arts plastiques et les nouvelles technologies, en particulier dans le domaine de l'image. Relevant que l'art contemporain pouvait faire l'objet d'une certaine méfiance, il a salué le travail accompli par la délégation aux arts plastiques et a souligné, dans ce domaine, la présence indispensable de l'Etat aux côtés des collectivités territoriales.
Soulignant la qualité du réseau des écoles d'art, M. Philippe Nachbar a souhaité connaître le degré d'implication de la délégation aux arts plastiques dans la mise en oeuvre de l'enseignement de l'histoire des arts.
M. Yves Dauge a estimé que, dans le domaine des arts plastiques, l'appui des directions régionales aux affaires culturelles (DRAC) était indispensable aux collectivités territoriales pour la mise en oeuvre de leurs projets. Puis il a jugé nécessaire de favoriser une plus grande circulation des oeuvres des FRAC.
Mme Bernadette Bourzai a indiqué partager ce point de vue, tout en saluant la politique dynamique du FRAC du Limousin. Elle s'est préoccupée de la situation des centres d'art, avant de relever que l'Etat n'avait pas apporté son soutien à une initiative locale, « l'artothèque », permettant pourtant de familiariser les publics scolaires avec les oeuvres.
Mme Françoise Cartron a attiré l'attention sur la situation du FRAC d'Aquitaine.
En réponse, M. Olivier Kaeppelin, délégué aux arts plastiques au ministère de la culture et de la communication, a apporté les précisions suivantes :
- dans le cadre de la RGPP, le ministère de la culture et de la communication va se structurer autour d'un secrétariat général et de trois directions générales, relatives au patrimoine, aux industries culturelles et à la création artistique, cette dernière devant réunir la délégation aux arts plastiques et la direction de la musique, de la danse, du théâtre et des spectacles (DMDTS) ;
- à partir des dispositions prévues par la loi de 2006 relative aux EPCC, le processus de reconnaissance du grade de master en faveur du diplôme national supérieur d'expressions plastiques (DNSEP), délivré par les écoles d'art, a pu être engagé, en lien avec le ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche ; cette reconnaissance a été validée à l'issue d'une évaluation réalisée par l'Agence d'évaluation de la recherche et de l'enseignement supérieur (AERES) sur un échantillon de sept écoles ; cependant, le chemin est encore long ; en effet, des prescriptions ont été émises, notamment sur la présence de titulaires de doctorat dans le corps enseignant ou sur la définition de la recherche en art ; à cet égard, M. Olivier Kaeppelin s'est préoccupé du retard pris dans la publication du texte créant des instances d'évaluation propres au ministère de la culture, pourtant validé par les deux ministères concernés ; celles-ci devraient être mises en place en juin ; elles seront chargées de définir une méthodologie d'évaluation, en accord avec l'AERES ;
- environ 4,5 millions d'euros sont consacrés au développement des nouvelles technologies dans le domaine des arts plastiques, auquel contribue notamment l'école du Fresnois ;
- un rapport sur la situation du Palais de Tokyo sera remis à la ministre de la culture dans les prochains jours, ainsi qu'elle l'avait demandé ;
- la mise en oeuvre de l'enseignement de l'histoire des arts repose principalement sur le ministère de l'éducation nationale ; la délégation aux arts plastiques n'y est que très peu associée ;
- afin de favoriser la circulation des oeuvres des FRAC, il serait opportun que l'aide de l'Etat porte non seulement sur l'acquisition des oeuvres mais également sur le fonctionnement de ces fonds, par exemple à l'occasion de l'organisation d'expositions ;
- les « artothèques » relèvent de la responsabilité du ministère de l'éducation nationale.
M. Jacques Legendre, président, a ensuite souhaité que le débat s'engage sur la situation des écoles d'art qui préoccupe la commission.
Après avoir rappelé que ces écoles accueillaient près de 10 000 étudiants, Mme Catherine Morin-Desailly a précisé que leur inscription dans le schéma européen d'enseignement supérieur rendait nécessaire une évolution de leur statut, par leur transformation en EPCC, alors que certaines de ces écoles ont le statut de régies municipales. Elle s'est interrogée sur la façon dont l'Etat envisageait sa participation au sein de ces EPCC. Puis elle a voulu savoir si une évolution du réseau serait engagée en vue d'assurer la cohérence territoriale de l'offre de formation. Elle a demandé des précisions sur les évolutions du statut des enseignants et notamment sur l'impact financier de cette réforme. Enfin, citant les difficultés rencontrées par l'école de Rueil-Malmaison que la municipalité a décidé de ne plus financer, elle a attiré l'attention sur les préoccupations des villes, qui supportent la majeure partie de la charge de ces établissements.
En réponse, M. Olivier Kaeppelin a apporté les précisions suivantes :
- le réseau des écoles d'art est atypique car il réunit quarante-huit écoles territoriales, essentiellement municipales, et dix écoles nationales ; l'ensemble de ces écoles partagent néanmoins le même niveau d'excellence et leurs résultats sont semblables : 75 % des diplômés trouvent un emploi correspondant à leur formation à la sortie de l'école ;
- le ministère de la culture a souhaité demander la reconnaissance de l'ensemble du réseau dans le cadre du processus d'harmonisation européenne dit de Bologne, ce qui rend toutefois nécessaires certaines évolutions de ce réseau ; un précédent projet de réforme, consistant en la mise en place de vingt-deux pôles, avait échoué en raison de l'opposition des élus locaux, attachés au maintien des écoles sur leur territoire ; une mission d'inspection, conduite en avril 2008, a conclu à la nécessité d'aboutir à une rationalisation et à une mise en synergie de l'offre de formation, en accord avec les élus ; une circulaire a été adressée aux directeurs régionaux des affaires culturelles (DRAC) à cet effet, afin qu'ils engagent une réflexion associant les élus ;
- certaines régions seraient prêtes à assumer une part de responsabilité à l'égard des écoles d'art, alors que d'autres estiment que cela ne relève pas de leur compétence ;
- un groupe de travail a été mis en place pour trouver une solution aux difficultés rencontrées par l'école d'art de Rueil-Malmaison ;
- afin de permettre aux écoles d'art d'être habilitées à délivrer des diplômes correspondant au grade de master, leur transformation en EPCC est préconisée ; toutefois, s'il a écarté la mise en place du groupement d'intérêt public (GIP), le ministère de l'enseignement supérieur ne s'est toujours pas prononcé sur cette solution ;
- la constitution d'EPCC de réseaux permettrait de rechercher une complémentarité de l'offre de formation au niveau régional ;
- la procédure d'habilitation des écoles à délivrer des diplômes au grade de master se fera école par école et devrait s'étaler sur un an environ ; cet exercice deviendra récurrent dans la mesure où cette habilitation est délivrée pour quatre ans ;
- la revalorisation du statut des enseignants des écoles territoriales a été approuvée en février 2008 par le Conseil supérieur de la fonction publique territoriale ; l'Etat devrait prendre en charge une partie du coût de cette réforme, dès lors qu'elle sera approuvée par les collectivités territoriales ; un groupe de travail a été mis en place pour en évaluer l'impact budgétaire.
Mme Nicole Phoyu-Yedid, inspecteur général à la mission permanente d'inspection, de conseil et d'évaluation de l'enseignement artistique, a précisé que ce coût devrait être inférieur à trois millions d'euros. Puis elle a indiqué que l'habilitation des écoles à délivrer des diplômes au grade de master se ferait par vagues successives. L'objectif est qu'une douzaine d'écoles soient habilitées à la rentrée 2009.
En conclusion, M. Jacques Legendre, président, a indiqué que la commission des affaires culturelles se montrerait attentive à ces évolutions, et veillerait notamment à ce qu'elles ne suscitent pas des incompréhensions. Rappelant s'être mobilisé, il y a quelques années, pour défendre l'école d'art de Cambrai, il a reconnu, cependant, que le financement quasi exclusif de ces écoles par les communes préoccupait les maires.