Mardi 3 mai 2011
- Présidence de Mme Muguette Dini, présidente -Droits et protection des personnes faisant l'objet de soins psychiatriques - Examen du rapport et du texte de la commission
La commission examine le rapport de Mme Muguette Dini sur le projet de loi n° 361 (2010-2011) relatif aux droits et à la protection des personnes faisant l'objet de soins psychiatriques et aux modalités de leur prise en charge.
EXAMEN DU RAPPORT ET DU TEXTE DE LA COMMISSION
Mme Muguette Dini, rapporteure. - Je salue la présence de Jean-René Lecerf, rapporteur pour avis de la commission des lois, qui a elle-même examiné, la semaine dernière, ce texte important, complexe et controversé.
La prise en charge des personnes souffrant de maladies mentales doit respecter un juste équilibre entre la nécessité de soigner le malade dans les meilleures conditions, la protection du malade contre lui-même, la préservation de la sécurité des personnes - parfois menacée par le comportement de certains malades - et l'obligation de ne limiter la liberté que dans des proportions strictement nécessaires pour éviter que le patient ne nuise à lui-même ou à autrui. Dans cette matière particulièrement délicate, le législateur - comme dans le champ de la bioéthique - doit faire preuve d'une grande prudence.
Le statut des malades mentaux a été défini pour la première fois par la loi du 30 juin 1838, qui a fait obligation à chaque département d'avoir un établissement public spécial destiné à recevoir et à soigner les aliénés. Cette loi a défini le régime du placement à la demande de l'entourage, sur avis d'un médecin ne devant pas travailler dans l'hôpital destiné à recevoir le malade et n'ayant aucun lien de parenté avec lui ; et le régime du placement d'office, sur décision du préfet, lorsque la dangerosité du malade est avérée. Ce texte est resté en vigueur pendant cent cinquante ans et n'a fait l'objet d'une refonte qu'avec la loi du 27 juin 1990.
La loi du 30 juin 1838 ne connaissait que les modes de placement sous contrainte ; celle du 27 juin 1990 consacre l'hospitalisation libre comme le régime habituel. Le code de la santé publique reconnaît au patient « les mêmes droits liés à l'exercice des libertés individuelles que ceux reconnus aux malades hospitalisés pour toute autre cause ».
Dans la loi de 1990, deux procédures permettent d'hospitaliser une personne sans son consentement lorsqu'elle souffre de troubles mentaux et n'est plus en mesure de donner son consentement : l'hospitalisation à la demande d'un tiers (HDT) et l'hospitalisation d'office (HO). L'HDT est possible quand des soins immédiats et une surveillance constante en milieu hospitalier sont nécessaires. Le tiers doit avoir un lien personnel avec le malade. Deux certificats médicaux concordants doivent être produits, le premier ne pouvant être établi par un médecin exerçant dans l'établissement d'accueil. A titre exceptionnel, en cas de péril imminent pour le patient, le seul certificat du médecin exerçant dans l'établissement suffit : confirmation devra être apportée par un psychiatre dans les vingt-quatre heures de l'admission, puis dans les trois jours précédant la fin des quinze premiers jours d'hospitalisation, puis chaque mois.
Quant à l'HO, elle peut être prononcée en cas d'atteinte à la sûreté des personnes ou, de façon grave, à l'ordre public. Un seul certificat est nécessaire, qui ne peut émaner d'un psychiatre de l'établissement d'accueil.
Dans les deux cas, l'hospitalisation peut être interrompue par des sorties d'essai décidées, dans l'HDT par un psychiatre de l'établissement, dans l'HO par le préfet sur proposition du psychiatre. Leur durée est de trois mois mais le renouvellement est possible autant de fois que nécessaire.
Enfin, la levée d'hospitalisation relève du psychiatre en cas d'HDT, mais est automatique si le tiers à l'origine de l'hospitalisation demande sa mainlevée. En cas d'HO, la levée relève du préfet sur proposition du psychiatre.
La loi de 1990 prévoyait un bilan après quelques années. En 1997, le groupe d'évaluation a proposé des évolutions importantes, certaines reprises dans le projet de loi, tels les soins sans consentement en dehors de l'hôpital pour remplacer les sorties d'essai. Le groupe proposait aussi de fusionner HO et HDT et de supprimer le trouble à l'ordre public comme critère de l'hospitalisation. Quelques suggestions seulement, portant sur les droits des patients hospitalisés, avaient été reprises dans la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades. Plus tard, en 2005, un rapport de l'inspection générale des affaires sociales (Igas) et de l'inspection générale des services judiciaires a lui aussi recommandé la mise en place des soins ambulatoires sans consentement.
En 2006, le Gouvernement a souhaité intégrer une réforme de la seule hospitalisation d'office dans un projet de loi relatif à la prévention de la délinquance, pour renforcer la place de l'HO par rapport à celle de l'HDT. Le texte confiait au maire la décision d'hospitalisation d'office, le préfet intervenant pour la confirmer, et créait un traitement automatisé des hospitalisations d'office. Des dispositions de cet ordre, inscrites dans un projet de loi sur la prévention de la délinquance, ont suscité de nombreuses protestations ; elles ont été retirées au cours de la navette.
En 2008, à la suite d'un drame survenu à Grenoble, le Président de la République a annoncé un plan de renforcement de la sécurité des hôpitaux psychiatriques, la création de quatre nouvelles unités pour malades difficiles et une réforme de la loi de 1990. Or, en juin 2008, le Gouvernement avait confié à une commission présidée par M. Edouard Couty une réflexion visant à « donner un cadre aux missions et à l'organisation de la psychiatrie et de la santé mentale, intégrant les évolutions et réformes en cours ». Il s'agissait d'examiner les missions de la psychiatrie et de la santé mentale, la démographie médicale et soignante et les collaborations professionnelles, les politiques de santé publique abordées sous l'angle de la santé mentale, la prévention en particulier.
La principale conclusion du rapport de janvier 2009 revêt aujourd'hui une certaine importance : « L'exigence d'une politique de santé mentale alliant l'intégration des malades dans la cité et des prises en charge sécurisées pour la population reste un impératif qui peut apparaître paradoxal. (...) Une loi est nécessaire. Ce texte législatif devrait intégrer les différentes facettes de l'accompagnement et des prises en charge des usagers de santé mentale, des familles et des proches des malades : le repérage et le diagnostic précoces, l'accès aux soins rapide et adapté, le suivi personnalisé et continu, la réhabilitation sociale, la prévention des risques, la recherche autour des déterminants de la santé mentale, l'organisation rénovée de dispositifs nécessaires aux hospitalisations sans consentement, ainsi que l'organisation des soins aux détenus. ».
De son côté l'Office parlementaire d'évaluation des politiques de santé (Opeps), dont le rapporteur était Alain Milon, avait demandé au centre national de l'expertise hospitalière (CNEH) une étude sur la prise en charge psychiatrique en France. L'office a publié, en avril 2009, un rapport qui recommandait l'organisation d'états généraux de la santé mentale puis un projet de loi sur la santé mentale susceptible d'adapter l'organisation territoriale de la psychiatrie aux besoins de la population.
Le 5 mai 2010, le Gouvernement a déposé sur le bureau de l'Assemblée nationale un projet de loi portant exclusivement sur la question des soins sans consentement. Le 28 novembre 2010, le Conseil constitutionnel, saisi d'une question prioritaire de constitutionnalité, a estimé que l'absence de contrôle judiciaire systématique sur les décisions d'hospitalisation à la demande d'un tiers était contraire à la Constitution. Il a, en conséquence, imposé la mise en place d'un tel contrôle juridictionnel avant le 1er août 2011.
Le Gouvernement a alors déposé devant l'Assemblée nationale, le 26 janvier dernier, une lettre rectificative à son projet de loi de mai 2010, prévoyant une intervention du juge sur toutes les mesures d'hospitalisation sans consentement, dès lors qu'elles durent plus de quinze jours. Ce texte a été examiné par l'Assemblée nationale au mois de mars et nous est maintenant soumis. Ses dispositions doivent impérativement entrer en vigueur le 1er août prochain.
En premier lieu, le texte a pour objectif de diversifier les formes de prise en charge des malades faisant l'objet de soins psychiatriques sans leur consentement. Aujourd'hui, seule existe l'hospitalisation complète. Le texte dissocie l'obligation et les modalités. Un régime de « soins sans consentement » est ainsi substitué au régime de l'hospitalisation sans consentement. Il inclurait obligatoirement des soins ambulatoires mais pourrait comprendre des soins à domicile ou des séjours en établissement psychiatrique.
Un protocole de soins serait établi dans les soixante-douze heures de l'admission par un psychiatre de l'établissement. Il définirait le ou les types de soins imposés au malade, les lieux de leur réalisation, leur périodicité. Dans tous les cas, la prise en charge d'un malade sans son consentement débuterait par une période d'observation et de soins de soixante-douze heures sous la forme d'une hospitalisation complète. Deux certificats médicaux devraient alors évaluer la nécessité de soins sans consentement : le premier dans les vingt-quatre heures suivant l'admission, le second dans les soixante-douze heures. Un psychiatre de l'établissement proposerait alors, dans un avis motivé, la forme de prise en charge et le protocole de soins ambulatoires.
En cas d'admission à la demande d'un tiers, le directeur de l'établissement aurait compétence pour retenir la forme de prise en charge proposée par le psychiatre. En cas d'admission sur décision du représentant de l'Etat, le préfet aurait compétence pour décider la forme de prise en charge en tenant compte de la proposition établie par le psychiatre et des exigences liées à la sûreté des personnes et à l'ordre public.
En deuxième lieu, pour tenir compte de la jurisprudence du Conseil constitutionnel, le projet de loi modifie les conditions dans lesquelles le juge des libertés et de la détention (JLD) contrôlera les mesures de soins sans consentement. La saisine du juge est prévue, comme actuellement, à l'initiative de la personne faisant l'objet d'une mesure de soins sans consentement, ou d'autres personnes intéressées, aux fins d'ordonner la levée de cette mesure ; mais aussi, de façon obligatoire, à l'initiative du directeur de l'établissement ou du préfet, aux fins de contrôler la nécessité du maintien en hospitalisation complète, avant l'expiration d'un délai de quinze jours à compter de l'admission, puis tous les six mois. Le juge statuera après débat contradictoire. L'audience pourrait prendre la forme d'une visioconférence.
Les ordonnances du juge pourraient faire l'objet d'un appel devant le Premier président de la cour d'appel ou son délégué - et cet appel pourrait revêtir un caractère suspensif si le juge ordonnait la mainlevée de l'hospitalisation. Par ailleurs, l'Assemblée nationale a prévu une saisine obligatoire du juge des libertés lorsque le préfet refuse de faire droit à une demande de levée de soins psychiatriques émanant du psychiatre.
En troisième lieu, le projet de loi met en place des procédures particulières pour la sortie des soins sans consentement des personnes ayant été déclarées pénalement irresponsables ou ayant fait un séjour en unité pour malades difficiles (UMD). Un collège de soignants composé de trois membres appartenant au personnel de l'établissement - un psychiatre participant à la prise en charge du patient, un psychiatre n'y participant pas, un membre de l'équipe pluridisciplinaire - se prononcerait avant la levée des soins. En outre, deux expertises devraient être réalisées par des psychiatres extérieurs à l'établissement. L'Assemblée nationale a complété ce dispositif pour prévoir qu'il ne s'appliquerait plus après une certaine durée, fixée par décret en Conseil d'Etat.
Enfin, le projet de loi crée une nouvelle procédure d'hospitalisation en cas de péril imminent sans demande d'un tiers. Elle vise les personnes isolées ou les cas dans lesquels la famille peine à formuler une demande d'hospitalisation. Le texte renforce le droit à l'information des patients concernés ; il procède à une réécriture des dispositions du code de la santé publique relatives à l'hospitalisation sans consentement des détenus, sans toutefois en modifier le contenu.
J'ai procédé, avec plusieurs d'entre vous, à de nombreuses auditions : représentants des malades et des familles, psychiatres, infirmiers, directeurs d'établissements, magistrats, avocats, représentants des préfets, des pompiers, etc. Je me suis également rendue au centre psychiatrique du Bois de Bondy ainsi qu'au centre hospitalier de Saint-Cyr au Mont d'Or dans le Rhône.
Tout d'abord, je constate que ce projet de loi n'est pas la loi de santé mentale qui avait été préconisée par la commission Couty et le rapport Opeps.
M. Guy Fischer. - On en est bien loin...
Mme Muguette Dini, rapporteure. - Le projet de loi initial ne contenait rien sur l'organisation territoriale de la psychiatrie. Or l'essentiel est pourtant d'assurer le suivi du patient. Les drames surviennent lorsqu'il est perdu de vue, qu'il ne vient plus aux consultations... A quoi bon de nouvelles formes de soins sans consentement si nous ne disposons pas d'un maillage solide et homogène sur le territoire pour le suivi ?
C'est ainsi que l'Assemblée nationale a confié à l'agence régionale de santé (ARS) la responsabilité d'organiser la gestion des urgences psychiatriques en partenariat avec le Samu, les services départementaux d'incendie et de secours (Sdis), les forces de police et de gendarmerie, ainsi que les transporteurs sanitaires agréés. Elle a prévu des conventions établies à l'initiative des directeurs d'établissements psychiatriques avec les préfets, les collectivités territoriales et les ARS sur le suivi et l'accompagnement des patients en soins ambulatoires sans consentement.
Certes, le Gouvernement nous annonce un plan de santé mentale pour l'automne, mais le Parlement est appelé à se prononcer sur le projet de loi sans connaître le contenu du plan ! Une loi nouvelle devrait toujours tendre à simplifier et clarifier les règles, poser des principes à la fois applicables par les professionnels et compréhensibles par les citoyens. Une loi plus large et plus complète serait l'occasion d'un débat approfondi sur l'organisation et l'avenir de la psychiatrie dans notre pays.
Néanmoins, certaines dispositions du projet de loi méritent d'être soutenues. L'introduction d'un contrôle juridictionnel sur les mesures d'hospitalisation sans consentement est unanimement saluée comme un progrès essentiel pour le respect des droits des patients. Le Conseil constitutionnel l'a souligné, il est paradoxal que les personnes dont les facultés sont altérées soient les seules dont la privation de liberté n'est pas soumise au contrôle du juge judiciaire.
Ce contrôle entrera en vigueur dès le 1er août prochain : les difficultés pratiques sont inévitables. Des postes de magistrats et de greffiers vont être créés, mais les titulaires ne seront pas opérationnels à temps. L'organisation des audiences sera compliquée. Le Gouvernement a donc prévu la visioconférence - laquelle risque de devenir systématique pour éviter de transporter les malades au tribunal. Mais toutes les personnes que j'ai interrogées sont hostiles à ce système qui posera des problèmes insurmontables. Pourquoi accorder un nouveau droit tout en retenant des modalités qui le rendent inopérant, voire néfaste pour la santé du patient ? Transporter tous les malades jusqu'au lieu de l'audience apparaît humainement impossible. Et il faut imaginer plusieurs malades attendant leur tour de passer devant le juge, tous en crise psychiatrique majeure, souvent accompagnée d'agitation et de violence... On imagine mal la police intervenir pour maîtriser ou pire, pour menotter l'un d'eux.
Je pensais donc vous proposer un amendement, mais celui de Jean-René Lecerf me paraît excellent, qui subordonne l'utilisation de la visioconférence à une autorisation médicale, prévoit la possibilité pour le juge de se déplacer pour tenir l'audience à l'hôpital et la possibilité du huis clos, au nom du secret médical et pour échapper à l'indiscrétion des médias ou la curiosité du public. N'oublions pas que le juge interroge le malade non sur ce qu'il a fait mais sur ce qu'il est.
D'autres mesures me paraissent devoir être approuvées. La création d'une procédure de péril imminent permettant l'hospitalisation d'une personne en l'absence de tiers susceptible de faire la demande comble un vide. On recourt aujourd'hui à l'hospitalisation d'office pour des cas qui n'en relèvent pas. Toutefois, il faudra veiller à ce que les familles ne cherchent pas systématiquement à utiliser cette procédure pour éviter qu'il soit fait état de leur demande.
En ce qui concerne les dispositions spécifiques prévues pour les personnes ayant séjourné en UMD ou ayant été déclarées pénalement irresponsables, je ne considère pas anormal que des précautions particulières soient prises s'agissant de malades qui ont déjà fait preuve de comportements violents, même si je ne suis pas complètement convaincue de la pertinence de ce « ciblage ». Quoi qu'il en soit, le dispositif retenu apparaît discutable : la composition du collège risque d'être problématique. En outre, c'est au Parlement qu'il revient de fixer le délai d'oubli.
J'en viens au point le plus délicat : les soins sans consentement à l'extérieur de l'hôpital, en ambulatoire. Cette idée a été proposée dans plusieurs rapports et semble intéressante. Aujourd'hui, pendant la sortie d'essai, le patient hospitalisé sans consentement reste sous le régime d'HO ou d'HDT. Il ne semble pas illégitime de prévoir des soins sans consentement autres que l'hospitalisation. Toutefois, quand il s'agit de préciser le régime concrètement, de multiples interrogations se font jour.
Le projet de loi reste très vague sur le contenu du protocole de soins et renvoie à un décret en Conseil d'Etat. Le malade sera-t-il partie prenante à ce protocole ? Quelle fiabilité aura l'engagement de quelqu'un dont l'adhésion au protocole sera le meilleur moyen de sortir de l'hôpital ? Que se passera-t-il après ? Qui aura accès à ce protocole ? Comment pourra-t-il évoluer ? Que fera-t-on si la personne refuse d'ouvrir sa porte ? Quels types de soins seront prodigués ? Autant de questions sans réponse.... Surtout, le contrôle systématique du juge n'est pas prévu alors même que le protocole comportera des mesures très contraignantes.
Tous les médecins le disent, le consentement du malade est à rechercher en permanence car il est la condition essentielle d'une amélioration de son état. Les soins sans consentement en dehors de l'hôpital suscitent donc beaucoup d'inquiétudes. Feront-ils diminuer le nombre des hospitalisations sans consentement ou viendront-ils s'y ajouter ? Le groupe d'évaluation de la loi de 1990, en 1997, suggérait des soins sans consentement en ambulatoire, mais appelait à éviter tout amalgame avec les injonctions de soins et les mesures pénales de suivi sociojudiciaire. Or, le projet de loi n'évite pas cet écueil. Le préfet pourra transformer l'hospitalisation sans consentement en soins ambulatoires en l'absence de toute demande par un psychiatre. Au nom de quoi ? Le préfet peut refuser une levée d'hospitalisation pour un motif de sécurité, mais comment pourrait-il ordonner l'élaboration d'un protocole de soins ? Aujourd'hui, il ne peut prononcer de sa propre initiative une sortie d'essai.
Ces nouvelles dispositions entraînent l'instauration d'une période d'observation de soixante-douze heures en hospitalisation complète qui suscite, elle aussi, beaucoup d'interrogations. Et qui a pour effet de multiplier les certificats médicaux produits par les psychiatres.
Les soins sans consentement sous une autre forme que l'hospitalisation n'ont pas fait l'objet d'une réflexion ni d'une concertation suffisamment approfondies. Ils sont trop novateurs pour être créés dans un texte qui doit impérativement entrer en vigueur dans trois mois. Si le changement est seulement sémantique, il est inutile ; si la modification a une portée réelle, nous n'en percevons pas l'ampleur exacte.
Restons-en aux hospitalisations sans consentement avec sorties d'essai, dans l'attente d'une réflexion globale sur l'avenir de la psychiatrie et son organisation. Notre responsabilité de législateur nous commande la prudence lorsqu'il s'agit d'une question aussi fondamentale que la prise en charge des personnes les plus vulnérables, celles qui ne sont pas en mesure d'apporter un consentement libre et éclairé aux soins qu'il est nécessaire de leur prodiguer.
M. Jean-René Lecerf, rapporteur pour avis de la commission des lois. - La commission des lois a souhaité se saisir pour avis du volet judiciaire de ce projet de loi, aux articles 1er à 5. Cela n'a pas été fait à l'Assemblée nationale : les députés l'ont regretté puisque sont ici visés les libertés individuelles et leurs garanties juridictionnelles, les modalités d'intervention du juge dans la procédure et l'appel suspensif, les effectifs des magistrats - des renforts ont été promis - la répartition des compétences entre les ordres administratif et judiciaire, la protection de l'ordre public.
En outre, à la demande du Conseil constitutionnel, la compétence du juge judiciaire, gardien des libertés individuelles, a été étendue et il revient au législateur de décider où placer le curseur. La commission des lois souhaite doter le juge du pouvoir de transformer l'hospitalisation complète en soins ambulatoires - ce qui est en décalage avec la position qu'exprimait à l'instant Mme la présidente Dini... L'Assemblée nationale quant à elle prévoyait quarante-huit heures, lorsque l'hospitalisation complète faisait l'objet d'une mainlevée, pour mettre en place un protocole de soins sans consentement ambulatoires. Mais cette dernière solution est-elle conforme à la Constitution ? Pendant quarante-huit heures, il y enfermement sans raison... Notre proposition permet de sortir du tout ou rien.
Nous attribuons au juge des libertés un pouvoir de contrôle de plein droit des mesures d'hospitalisation partielle sous contrainte. Le Conseil constitutionnel ne l'exige pas mais ces mesures peuvent être elles aussi très attentatoires aux libertés : hospitalisation vingt-quatre heures sur vingt-quatre cinq jours sur sept, hospitalisation de jour cinq nuits par semaine, hospitalisation de nuit cinq nuits par semaine... L'intervention du juge est souhaitable là aussi.
Allons-nous trop loin dans les missions confiées au juge des libertés dans ces procédures ? Le Garde des sceaux le pense mais pour nous, l'intervention du juge doit être systématique en cas d'opposition entre le préfet et un psychiatre. L'Assemblée nationale a prévu un seul cas, celui où le préfet refuse d'ordonner la levée de l'hospitalisation complète recommandée par le psychiatre. Mais il faut aussi prendre en compte le cas où le préfet souhaite une hospitalisation complète et le psychiatre, des soins ambulatoires ; et celui où le préfet souhaite transformer les soins ambulatoires en hospitalisation complète quand le psychiatre estime les premiers suffisants.
Le contentieux est aujourd'hui éclaté entre deux juridictions, administrative et judiciaire, avec des distinctions byzantines incompréhensibles pour les non initiés : la seule légalité externe au juge administratif, le fond au juge judiciaire - incompétent sur la forme - et les conflits éventuels au Tribunal des conflits. Nous créons donc un bloc de compétence judiciaire, solution discrètement suggérée par le Conseil constitutionnel.
Le juge doit statuer dans un cadre serein, et non publiquement, sur des affaires sensibles, conflits familiaux, pathologies touchant des personnes connues localement. Il doit pouvoir statuer dans une salle d'audience spécialement aménagée dans l'hôpital. Le recours à la visioconférence mérite d'être encadré : je songe par exemple au milieu carcéral. On connaît la peur panique qu'un malade mental peut éprouver face à un dispositif de visioconférence, il peut se croire espionné par des extraterrestres, etc. Une attestation médicale certifiant que l'état mental de la personne permet de recourir à cette technique est nécessaire. Par ailleurs, les avocats doivent être auprès de leur client et non aux côtés du magistrat lorsque l'audience se déroule par visioconférence.
Le droit à l'oubli souhaité par l'Assemblée nationale devrait être étendu. Séjours en UMD, irresponsabilité pénale, hospitalisation d'office, tout cela devrait retomber dans le droit commun après un certain nombre d'années. Entrent dans cette catégorie aussi les hospitalisations pour lesquelles l'accord explicite du préfet est ici substitué à des décisions implicites.
Nous supprimons la possibilité pour le tuteur ou le curateur d'intervenir à titre personnel, mention qui figure par suite d'une erreur à l'Assemblée nationale. Enfin, nous souhaitons faire évoluer au plus vite l'infirmerie de la préfecture de Paris en hôpital psychiatrique de droit commun car la situation actuelle n'est pas normale.
M. Guy Fischer. - Le rapport de Mme Dini est d'une longueur inhabituelle, celui de Jean-René Lecerf d'une grande densité. Ce qui montre l'importance capitale de ce texte. Il aurait mérité que l'on y consacrât du temps, mais nous travaillons dans des conditions exécrables, nous en sommes tous d'accord.
Le projet de loi est inacceptable en l'état. Le point de départ est un fait divers puis une injonction du Président de la République pour qu'une réponse législative soit élaborée. Dans la région Rhône-Alpes, un étudiant a été poignardé par un malade évadé d'un établissement psychiatrique. Un plan de sécurisation des hôpitaux psychiatriques a aussitôt été demandé. Ce plan inclut des mesures telles que bracelet électronique, multiplication des chambres d'isolement... et simplification de l'hospitalisation sans consentement. Les soins ambulatoires dispensés sans consentement, disposition nouvelle, ne sont pas sans risque.
Nous attendions un véritable texte de santé mentale. Quel parlementaire n'a pas visité d'hôpital psychiatrique ? Nous savons tous que ces établissements ou unités sont touchés par la loi HPST, que leurs moyens sont drastiquement réduits. Et pour comble, on prétend que la future loi soit applicable au 1er août prochain !
Des propositions ont été formulées, certaines critiques font l'unanimité : ainsi la visioconférence - à laquelle nous sommes opposés - pose bien des problèmes. Nous avons tous passé au moins une demi-journée dans un tribunal de grande instance (TGI) ces derniers mois, nous savons combien il serait difficile de dégager les moyens humains pour gérer ces enregistrements.
Nous sommes très critiques face à ce texte inacceptable et sans doute inapplicable, texte d'opportunité, d'affichage. Il faut une véritable loi de santé mentale. Comment traiter sérieusement du sujet dans le cadre de ce projet de loi et dans des délais si brefs ?
M. Alain Milon. - A l'origine, il y eut un constat fait à Antony par le Président de la République. Mais gardons-nous de stigmatiser les troubles mentaux, alors que les incidents de sécurité publique provoqués par des malades mentaux, schizophrènes en particulier, sont infiniment plus rares que les incidents causés par des personnes « normales » ! Nous n'allons pas suffisamment loin avec ce texte, qui présente aussi l'inconvénient de judiciariser une partie de la psychiatrie et qui ne prend pas en considération le rapport Couty ni celui de l'Opeps.
Cette loi vise à garantir les libertés et protéger les patients et leur famille, or elle judiciarise une part importante de la psychiatrie : les fédérations hospitalières, les directeurs d'établissements, les infirmiers, tous sont mécontents. La visioconférence n'est bien sûr pas une solution, filmer des personnes particulièrement excitées n'apportera rien au juge. L'amendement de Jean-René Lecerf me semble excellent, qui prévoit l'accord d'un médecin ayant constaté la capacité du malade à subir cette séance.
Sur les soins sans consentement ambulatoires, Mme la Présidente a tout dit. Je ne vois pas, comme médecin, comment nous pourrions gérer cela !
M. Gérard Dériot. - Je vous le dirai.
M. Alain Milon. - J'ajoute que la composition du collège, pour la sortie d'UMD, me dérange.
M. Jacky Le Menn. - M. Milon a bien résumé les sujets d'inquiétude.
Il y a un malentendu : nous attendions, après la loi de 1990, une grande loi de santé mentale. Ce n'est pas ce que l'on nous présente aujourd'hui ! Les ambiguïtés sont nombreuses. Si bien que peu de nos interlocuteurs, durant les auditions, approuvaient l'économie générale de ce texte. Certains vont certes tenter de le rapiécer, sans que cela ne règle rien au fond. Loi de circonstance... Comme si l'on pouvait aborder des questions aussi profondes sous le coup de l'émotion.
Je n'admets pas, comme ancien hospitalier, que l'on stigmatise la psychiatrie. Toute l'évolution, depuis la loi Esquirol de 1838 jusqu'à la loi de 1990, va dans un sens contraire et l'insertion des structures de soins psychiatriques dans les hôpitaux, au même titre que les autres services, les autres spécialités, vise à combattre la stigmatisation. La judiciarisation qui caractérise ce projet de loi provoquera une assimilation entre dangerosité, délinquance et maladie mentale.
Certes le système actuel est mauvais... mais mieux vaut le conserver que de le troquer pour un pire. La sortie d'essai, on la connaît, on la maîtrise. Comment les soins sans consentement peuvent-ils, eux, fonctionner dans la durée ? Ayons une réflexion globale sur l'avenir de la psychiatrie mais, pour l'heure, gardons l'hospitalisation sans le consentement et la sortie d'essai.
La visioconférence pose plus de problèmes qu'elle n'en résout. Jean-René Lecerf a tenté de définir une position de repli dans son amendement mais marier la carpe et le lapin n'est pas bon. Nos amendements seront l'occasion d'exprimer tout le mal que nous pensons du texte ; et tout le bien qu'une future loi complète apporterait.
En conséquence, nous serons amenés à voter contre un texte qui ne serait amodié qu'à la marge. Ou à nous abstenir, si nous sentons que des efforts réels sont accomplis pour rafistoler ce mauvais projet.
M. Gérard Dériot. - Je partage la première part des propos d'Alain Milon. Comment accepter en effet une telle judiciarisation ? Mais reconnaissons que lorsque l'on évoque les problèmes psychiatriques, la justice entre forcément en jeu...
Sur les soins ambulatoires je veux, pour apporter réponse à une question d'Alain Milon, vous faire part d'une expérience menée depuis plus de cent ans dans mon département. Il s'agit d'un accueil familial thérapeutique et celui-ci conviendrait bien aux soins ambulatoires...
M. Alain Milon. - Avec consentement !
M. Gérard Dériot. - Si toute la famille, tout l'entourage, s'opposent à la démarche, seule est possible, bien évidemment, l'hospitalisation d'office. Mais c'est un cas limite ! L'accueil familial thérapeutique est une bonne solution, peu coûteuse, dont hélas personne ne parle et qui ne semble pas dans la ligne de notre administration. La démarche se fait dans le cadre de l'hôpital, sous la surveillance de psychiatres et d'infirmiers psychiatriques. J'ai invité deux ministres à venir se rendre compte sur place mais rien n'a changé. Il faudra en inviter un troisième.
Le texte de loi est difficile à accepter tel quel. Mais je tenais à vous faire connaître cet accueil thérapeutique qui donne de bons résultats depuis plus de cent ans.
Mme Patricia Schillinger. - Je voulais faire observer que les traitements exigent le plus souvent la prise de médicaments ; or, ceux-ci se présentent plus souvent sous forme de cachets que de produits à injecter. On sait pourtant que les malades, pour la plupart perdus, démunis, respectent difficilement les prises et qu'il serait utile de favoriser le développement de traitements injectables. Les psychiatres ont une part de responsabilité : ils restent dans leur service hospitalier, dans leur cabinet, ils ne voient pas comment vit leur patient. Je maintiens que les traitements ne sont pas adaptés. On enregistre trois suicides par jour de schizophrènes qui n'ont pas pris leurs médicaments... Il faut en parler.
M. Jean-Louis Lorrain. - Le soin est d'abord un dialogue et une relation consentie, entre le patient et le médecin. Il en va ainsi particulièrement dans le domaine de la psychiatrie. Va-t-on forcer la porte du domicile, obliger le patient à avaler son médicament ?
Il est dommage, en outre, d'être tombé dans le contrôle sécuritaire. Nous sommes tous, dans nos fonctions, confrontés à des situations de violence. L'hospitalisation d'office et l'hospitalisation à la demande d'un tiers sont suffisantes. On règle ici un problème de sécurité, nullement un problème sanitaire. Personnellement, je ne me retrouve pas dans ce texte. Environ 30 % des gens à la rue relèvent de la psychiatrie - mais ils ne sont pas tous violents. Comment organiser le suivi des soins auprès de ces personnes ?
La grande loi de santé mentale, c'est comme le Grand Soir, on risque de l'attendre longtemps ! Restons pragmatiques, faisons preuve d'imagination pour améliorer le projet, proposons par exemple de développer des équipes mobiles se déplaçant à domicile, non pour contraindre mais pour faire de la pédagogie. Voyez comment les choses se sont déroulées pour les consultations médicales de rue ! Il convient aussi d'utiliser les maisons-relais pour les personnes en grande exclusion. Enfin, ce projet de loi n'apporte aucun début de solution à un problème auquel nous sommes confrontés chaque semaine, sollicités par des familles dont un enfant a « décroché » et vit dans un total enfermement, dans sa chambre, refusant tout soin. Je ne vois ici aucune réponse, aucun commencement de solution...
Mme Muguette Dini, rapporteure. - Je partage le sentiment de Gérard Dériot : les familles d'accueil constituent effectivement une bonne formule mais il n'en est nullement question dans ce texte. En outre, ces familles accueillent des personnes en hospitalisation libre ou en sortie d'essai ; ce ne me paraît pas correspondre tout à fait à la situation des soins ambulatoires sans consentement.
M. Gérard Dériot. - Tout est possible.
Mme Muguette Dini, rapporteure. - Par ailleurs, nous savons parfaitement que, parmi les psychiatres, il en est de bons et de moins bons, comme dans toute profession d'ailleurs, mais les mauvais psychiatres ne deviendront pas meilleurs avec cette loi. Des directeurs d'hôpitaux nous ont dit qu'ils avaient des équipes formidables et d'autres qui l'étaient moins.
M. Gérard Dériot. - J'ai oublié de parler de l'essentiel : le manque criant de psychiatres en France. Les étudiants qui sont reçus à l'internat ne se bousculent pas pour choisir cette discipline. Il manque mille postes.
Mme Isabelle Debré. - Le problème, ce n'est pas le manque de psychiatres, mais leur mauvaise répartition sur le territoire français.
Mme Muguette Dini, rapporteure. - Il est certain que les difficultés se rencontrent plus dans les hôpitaux ruraux que dans ceux des grandes agglomérations.
Mme Nora Berra, secrétaire d'Etat à la santé. - Les amendements de la rapporteure ne reflètent pas les échanges que nous avons pu avoir car ils modifient profondément ce texte qui tente de promouvoir les libertés. Ses amendements suppriment l'alternative à l'hospitalisation complète comme forme de soin pour les personnes incapables de consentir. Vous en revenez à la sortie d'essai, qui n'est pas une forme de soin mais seulement un essai de sortie, une expérience de sortie pour les malades au long cours. Ce faisant, vous contraignez les malades à être soignés dans un service hospitalier fermé alors que le projet de loi envisage d'autres soins, proches des lieux de vie des malades.
Votre position est un peu paradoxale : alors que dans l'exposé des motifs vous dites votre accord sur la diversification des modes de prise en charge, vous supprimez l'ensemble des dispositions qui les rendent possible. Vous estimez que certains points doivent être précisés : il y en a, bien sûr, et le Gouvernement est disposé à soutenir les améliorations du texte, comme il l'a fait à l'Assemblée nationale.
D'ailleurs, la concertation se poursuit, comme on vient de le voir avec le communiqué signé par quinze grands acteurs de la psychiatrie. Nous sommes donc prêts à envisager des améliorations de ce dispositif, qui sera mis en oeuvre par des professionnels en qui nous avons toute confiance.
Avec ces amendements, vous semblez faire vôtres les craintes de certaines associations minoritaires qui ont été les premières, il y a quelques mois, à fustiger le retard pris pour l'examen du texte de Mme Bachelot ! Vous savez que tout ce qui tourne autour de la psychiatrie est rarement prioritaire et je redoute que votre attitude ne nous fasse passer à côté d'une formidable occasion de rénover le dispositif juridique de la prise en charge psychiatrique. Grâce à la question prioritaire de constitutionnalité, nous avons la chance d'avoir un débat de fond. Ne renvoyons pas la réforme de la psychiatrie aux calendes grecques ! Les malades, les familles et les professionnels risquent de nous accuser de n'avoir rien fait.
Avec ces amendements, ne restent du texte que la réponse à la question prioritaire de constitutionnalité, avec la présence du juge au bout de quinze jours et de six mois d'hospitalisation complète, et ce qui a trait aux malades sensibles, au collège, à la décision explicite du préfet pour les sorties de courte durée. En revanche, tout ce qui concerne la nouvelle prise en charge ambulatoire des personnes incapables de consentir est supprimé. Or, ces dispositions sont demandées par les professionnels, par les familles, par les malades. On nous demande d'aller plus loin, mais certainement pas de refuser de légiférer sur l'hospitalisation sans consentement.
Je préfère un dispositif qui progresse plutôt que d'attendre une hypothétique réforme parfaite.
M. Alain Gournac. - Le Grand Soir !
Mme Nora Berra, secrétaire d'Etat. - Il est temps de passer à l'action en travaillant sur le fond des choses. Nous ne pouvons pas proposer aux acteurs de la psychiatrie une réforme qui ne ferait qu'introduire le contrôle du juge et des dispositions particulières pour les malades sensibles et, pour le reste, les renvoyer à un futur débat que nous ne pouvons leur garantir.
Le terme de judiciarisation a tout son sens dans ce texte dans la mesure où nous parlons de patients privés de liberté. A partir du moment où le Conseil constitutionnel nous impose de recourir au juge des libertés, il y a de fait une judiciarisation de la prise en charge, puisque nous parlons de la privation de liberté des patients et que l'intervention d'un juge est nécessaire.
Certes, les modalités de prise en charge ne figurent pas dans le projet de loi, notamment l'accueil familial thérapeutique et les équipes mobiles. Quant à la forme galénique des traitements et au choix de produits injectables, ils incombent aux seuls professionnels de la santé. Vous avez évoqué des modalités de prise en charge ouvertes aux malades sans consentement : ces mesures seront bien évidemment examinées lors de l'élaboration du plan psychiatrie. A Marseille, Vincent Girard, psychiatre bien connu, se rend auprès des patients, dans leur lieu de vie et il propose des prises en charge pour les personnes en situation précaire. Les formules sont nombreuses ; à nous de savoir les conjuguer, dans le cadre du plan de santé mentale et psychiatrique sur lequel nous travaillons et que nous vous proposerons à l'automne.
Pour ce qui concerne la démographie médicale, je vous rappelle que la France est le deuxième pays au monde, après la Suisse, pour la densité de ses psychiatres. En revanche, la répartition pose effectivement problème et nous y travaillerons avec les ARS.
Non, les préfets ne pourront pas orienter les protocoles de soins ! Il s'agit bien d'une approche médicale qui relève du psychiatre et non du préfet. Le préfet propose une hospitalisation, mais il n'a aucun droit sur la modification du protocole.
Mme Muguette Dini, rapporteure. - Vous mettez en opposition les sorties d'essai et les soins sans consentement en ambulatoire, madame la ministre, en disant que dans le premier cas, on ne surveille pas le malade alors que, dans le second, la surveillance sera effective. Or, quand il y a une sortie d'essai, la loi actuelle prévoit déjà une surveillance médicale.
Mme Nora Berra, secrétaire d'Etat. - Le projet de loi organise une prise en charge qui va au-delà de la surveillance. On est bien dans le cadre d'un « contrat » entre le psychiatre et le patient.
Mme Muguette Dini, rapporteure. - De quel « contrat » parlons-nous puisqu'il s'agit de soins sans consentement ? Le problème, ce n'est pas seulement le principe de soins sans consentement, mais la manière dont il est envisagé : on ne sait rien du contenu du protocole, de la manière dont celui qui fera l'objet de soins sans consentement en ambulatoire pourra les accepter.
En outre, seule la partie judicaire de ce texte doit entrer en oeuvre le 1er août. Certaines dispositions nous semblent inintelligibles et il nous faudrait un peu plus de temps pour les améliorer. Je fais remarquer au Gouvernement que ce projet de loi a été déposé le 10 mai 2010 sur le bureau de l'Assemblée nationale : pourquoi avoir attendu autant de temps avant de le faire examiner par le Parlement ? Quand le Gouvernement veut faire passer un texte, il y parvient sans problème !
Vous estimez, madame la ministre, que si mon premier amendement est adopté, il ne restera rien du projet de loi. Ce n'est pas exact et vous le savez bien. Ceci étant, nous ne savons rien des moyens que vous mettrez à la disposition des hôpitaux pour que cette loi soit applicable. J'ai présidé le conseil d'administration d'un hôpital psychiatrique de cinq cents lits pendant plusieurs années et je suis retournée récemment le visiter pour rencontrer les psychiatres, le directeur et le responsable financier. On nous a dit que pour remplir les obligations administratives qu'impliquera cette loi, il faudrait une à deux personnes à temps plein. Comme ce texte sera sans doute appliqué à moyens constants, il faudra ponctionner ces postes sur le personnel soignant.
Dans un autre ordre d'idée, le ministre de la justice se demande bien comment il va mettre en oeuvre cette loi : il ne pourra pas financer la vidéoconférence qui implique deux circuits indépendants, l'un pour le juge et le patient et l'autre pour l'avocat et le patient. Tout cela est un peu incohérent.
Vous avez parlé des professionnels qui ont signé un communiqué de presse : je les ai rencontrés et ils estiment que ce texte sera inapplicable.
On dit aussi que les familles attendent de cette loi qu'elle permettra une intervention systématique en cas de graves difficultés avec leurs malades. Mais ce problème n'est pas réglé dans ce texte.
Certes, le préfet ne peut pas imposer de protocole, mais il peut imposer le passage de soins hospitaliers en soins ambulatoires sans consentement en l'absence de toute demande du psychiatre.
M. Alain Milon. - Nous sommes le deuxième pays européen en nombre de psychiatres mais la répartition n'est pas excellente puisqu'il y avait, en 2009, plus de psychiatres dans le XVIe arrondissement de Paris que dans la région Bretagne ! Le vrai problème, c'est le nombre de psychiatres en milieu hospitalier public et surtout le nombre d'infirmiers psychiatriques qui aident les psychiatres à travailler dans l'urgence.
Mme Muguette Dini, rapporteure. - Nous avons rencontré des médecins privés qui étaient assez favorables à cette loi, mais ils nous ont dit qu'ils n'avaient dans leurs cliniques qu'un seul HO ou HDT. Ils ne sont donc pas trop concernés.
M. Guy Fischer. - Nous avons organisé, il y a un an, un colloque sur la psychiatrie et nous avons eu des contacts avec les syndicats de psychiatres qui s'accordent pour estimer que la loi sera inapplicable.
La Commission nationale consultative des droits de l'homme a proposé de limiter la réforme de la loi du 27 juin 1990 proposée par ce texte à la décision du Conseil constitutionnel sur les hospitalisations à la demande d'un tiers. Nous aurions eu alors le temps d'aborder les autres problèmes dans de meilleures conditions.
Mme Muguette Dini, rapporteure. - Nous allons passer à l'examen des amendements.
EXAMEN DES ARTICLES
Mme Muguette Dini, rapporteure. - Même si le projet de loi soulève des interrogations, il ne faut pas adopter cette question préalable. Le contrôle juridictionnel imposé par le Conseil constitutionnel doit entrer en vigueur le 1er août prochain. Il n'est plus temps d'envisager le dépôt d'un nouveau texte. Avis défavorable.
M. Guy Fischer. - Vous vous contredisez, madame la rapporteure. Vous critiquez ce texte et vous ne voulez pas le repousser !
Mme Muguette Dini, rapporteure. - Toutes les personnes que nous avons rencontrées sont favorables à l'aspect judiciaire du texte. Nous ne pouvons accepter que l'ensemble de la loi soit rejeté.
L'amendement n° 29 est rejeté.
Mme Muguette Dini, rapporteure. - Nous en arrivons à l'amendement n° 187 présenté au nom de la commission des lois.
M. Jean-René Lecerf, rapporteur pour avis. - La commission des lois souhaitait modifier l'intitulé du livre II de la troisième partie du code de la santé publique « Lutte contre les maladies mentales » par un intitulé moins stigmatisant pour les personnes atteintes d'un trouble mental. Mais, à la réflexion, la cohérence globale du code de la santé publique s'en trouverait troublée, ce qui rend cet amendement peu opportun. Je n'insisterai pas.
L'amendement n° 187 est rejeté.
Mme Muguette Dini, rapporteure. - Cet amendement n° 1 est central. Le projet de loi prévoit la création de soins psychiatriques sans consentement sous autre forme que l'hospitalisation complète. Cette proposition, qui figurait dans plusieurs rapports sur la psychiatrie, vise, selon l'exposé des motifs du projet de loi, à « adapter la loi aux évolutions des soins psychiatriques et des thérapeutiques aujourd'hui disponibles qui permettent à de nombreux patients d'être pris en charge autrement qu'en hospitalisation à temps plein ».
Si l'objectif de diversification des modes de prise en charge peut être partagé par tous, les soins psychiatriques sans consentement sous une autre forme que l'hospitalisation complète ne font l'objet d'aucune définition précise dans le projet de loi et soulèvent de nombreuses interrogations, alors même que le dispositif est censé entrer en application dès le 1er août prochain.
Rien n'est dit sur le contenu du protocole de soins, sur les conditions de sa mise en oeuvre, sur les conséquences du non-respect du protocole ou sur la liste des personnes qui peuvent avoir connaissance du protocole de soins.
Beaucoup de questions restent sans réponse : les familles, qui ne sont pas mentionnées dans ce texte - 40 % des malades ont un environnement familial attentif - en attendent des solutions à leurs angoisses : elles pensent qu'elles seront systématiquement informées du contenu du protocole. Où sera la liberté du malade ? Elles imaginent que, s'il n'est pas respecté, le malade sera soigné « de force » puisque sans consentement.
Si le malade ne se rend pas à l'un de ses trois rendez-vous hebdomadaires au centre médico-psychologique (CMP), les équipes soignantes devront-elles ou seront-elles tentées, pour se couvrir, de déclencher un branle-bas de combat pour le faire réhospitaliser, car il n'est pas question pour elles de s'introduire de force au domicile du malade ?
Pour l'instant, avec la sortie d'essai, la négociation est possible et aboutit souvent entre le psychiatre et le malade. Elle sera aussi possible si on adopte les soins sans consentement en ambulatoire sauf que, par définition, il n'y aura pas consentement du malade.
En somme, d'un côté on considère le malade comme un être responsable, capable de répondre au juge, de l'autre, on lui impose un protocole de soins sans lui demander sa collaboration puisque, par définition, c'est sans son consentement.
Enfin, le texte offre la possibilité au préfet de transformer, de sa propre initiative, une mesure d'hospitalisation complète en une mesure de soins sans consentement sous une autre forme. Une telle possibilité introduit une confusion entre soins et sécurité. Aujourd'hui, le préfet ne peut ordonner une sortie d'essai d'un malade s'il n'est pas saisi d'une proposition en ce sens par un psychiatre.
Trop d'interrogations subsistent aujourd'hui sur la notion de soins sans consentement sous une autre forme que l'hospitalisation complète et il serait souhaitable qu'une véritable concertation soit opérée avant de légiférer sur ce point. Il est préférable, à ce stade, d'en rester à l'hospitalisation sans consentement assortie de sorties d'essai lorsque l'état du patient le permet.
M. Guy Fischer. - Notre groupe votera cet amendement, car nous partageons la quasi-totalité des arguments que vous venez d'exposer.
M. Jean Desessard. - Vous avez également convaincu les écologistes !
Mme Christiane Demontès. - Le groupe socialiste et apparenté votera aussi cet amendement car il y a trop d'incertitudes sur les soins ambulatoires sans consentement. Pour la sortie d'essai, on sait au moins comment cela fonctionne.
Mme Nora Berra, secrétaire d'Etat. - Le Gouvernement est défavorable à cet amendement car il vide le texte de sa substance. Aujourd'hui, la seule réponse qui est proposée, c'est l'hospitalisation. En ce début de XXIe siècle, il est normal que les modes de prise en charge évoluent, comme ce fut le cas dans d'autres disciplines médicales. Alors que vous parlez de modernisation de la prise en charge, vous la refusez ici ! Les malades même non consentants ont le droit d'être traités dans leur environnement, d'autant que les chances de succès thérapeutiques sont alors bien plus élevées. Pourquoi refuser une prise en charge plus moderne des malades ?
L'amendement n° 1 est adopté.
L'amendement n° 188 devient sans objet, ainsi que les amendements n°s 42, 43, 189, 44, 45, 47, 49 et 50.
L'amendement de coordination n° 2 est adopté.
L'amendement n° 190 devient sans objet.
L'amendement de coordination n° 3 est adopté.
Mme Muguette Dini, rapporteure. - L'amendement n° 52 propose une obligation d'information de la famille du patient ou de la personne de confiance désignée par celui-ci avant chaque décision prononçant le maintien des soins ou définissant la forme de la prise en charge.
Prévoir une information systématique de la famille sur les projets de décision concernant le malade pourrait être contreproductif. Dans certains cas, le malade ne souhaite pas que sa famille soit informée et ce n'est pas toujours son intérêt. Avis défavorable.
L'amendement n° 52 est rejeté.
Mme Muguette Dini, rapporteure. - Le texte prévoit déjà que l'information doit être donnée de manière appropriée à l'état de la personne. La rédaction de l'amendement n° 51 est cependant plus précise et peut donc être utile. Avis favorable.
L'amendement n° 51 est adopté.
Prévoir, comme le fait l'amendement n° 53, une représentation de la personne malade par un avocat à chaque fois qu'elle est informée d'un projet de décision de maintien des soins apparaît un peu irréaliste. Le recours systématique au juge permettra bien entendu au malade d'être assisté par un avocat. Avis défavorable.
L'amendement n° 53 est rejeté.
L'amendement de coordination n° 4 est adopté, ainsi que les amendements de coordination nos 5, 6 et 7.
L'amendement n° 54 devient sans objet.
L'amendement de coordination n° 8 est adopté.
Mme Muguette Dini, rapporteure. - L'amendement n° 223 propose l'aménagement du collège qui doit se prononcer sur la sortie des personnes en unité pour malades difficiles (UMD) ou irresponsables. Le texte prévoit que ce collège sera composé d'un psychiatre suivant le patient, d'un psychiatre ne suivant pas le patient et d'un membre de l'équipe pluridisciplinaire. Toutes les auditions ont montré qu'une telle composition créerait des difficultés. Comment imaginer que le membre de l'équipe pluridisciplinaire puisse se poser en arbitre des deux médecins psychiatres ?
Cet amendement prévoit que le collège sera composé de l'équipe pluriprofessionnelle dans son ensemble et d'un psychiatre ne suivant pas le patient. Ainsi, l'équipe rendra un avis collégial au cours d'une réunion de synthèse à laquelle participera un psychiatre extérieur.
Ce dispositif permettra d'atteindre l'objectif de collégialité, sans mettre en difficulté le membre de l'équipe pluridisciplinaire initialement prévu.
Mme Patricia Schillinger. - Pourquoi ne pas mettre dans ce collège le médecin référent ou le médecin de famille ?
Mme Muguette Dini, rapporteure. - Il s'agit de personnes ayant séjourné en unité pour malades difficiles ou ayant fait l'objet d'une déclaration d'irresponsabilité. Il ne s'agit pas de malades lambda.
Mme Colette Giudicelli. - Je n'ai pas bien compris le rôle de ce collège. Est-il responsable en cas de difficultés postérieures à la sortie qu'il aurait autorisée ?
Mme Muguette Dini, rapporteure. - C'est le préfet qui décide de la sortie, après avis de ce collège et avis de deux experts.
Mme Colette Giudicelli. - C'est donc le préfet qui sera responsable ?
Mme Muguette Dini, rapporteure. - En dernier ressort, c'est lui qui prend la décision et il peut aller à l'encontre des avis qui lui seront donnés.
Mme Nora Berra, secrétaire d'Etat. - Nous voulions qu'un membre de l'équipe pluridisciplinaire donne son avis, mais dans la mesure où toute l'équipe pourra se prononcer, nous sommes favorables à cet amendement.
L'amendement n° 223 est adopté.
L'amendement n° 55 devient sans objet.
Les amendements de coordination nos 9 et 10 sont adoptés.
L'amendement n° 56 devient sans objet.
Mme Muguette Dini, rapporteure. - L'amendement n° 11 a un double objet : il vise à prendre en compte la décision de supprimer les soins sans consentement sous une autre forme que l'hospitalisation complète dans l'article du code de la santé publique relatif aux autorisations de sortie accompagnée. De plus, il tend à rétablir le droit actuel en ce qui concerne le régime des autorisations de sortie accompagnées. Actuellement, le préfet est informé des autorisations de sortie accompagnée et peut s'y opposer ; en l'absence de réponse du préfet, la décision est réputée favorable.
Le projet de loi prévoit qu'il faudra désormais une autorisation explicite du préfet pour les autorisations concernant des personnes ayant séjourné en UMD ou ayant été déclarées pénalement irresponsables. Une telle disposition est contestable car le préfet pourrait systématiquement garder le silence, ce qui empêcherait toute sortie. Je trouve donc préférable d'en revenir au droit actuel, d'autant qu'il s'agit de sorties ponctuelles, de douze heures maximum, et toujours accompagnées.
L'amendement n° 11 est adopté.
L'amendement n° 58 est satisfait par l'amendement n° 11.
L'amendement n° 191 devient sans objet.
Mme Muguette Dini, rapporteure. - L'amendement n° 63 propose de laisser au président du tribunal de grande instance la possibilité d'assumer lui-même ou de déléguer cette tâche à un ou plusieurs juges. Le juge des libertés et de la détention (JLD) est spécialisé dans les questions relatives aux libertés et l'on ne voit pas quel progrès apporterait la saisine du président du tribunal
Mme Christiane Demontès. - Le JLD ne sera pas forcément disponible !
L'amendement n° 63 est rejeté.
L'amendement de coordination n° 12 est adopté.
L'amendement n° 192 devient sans objet, ainsi que l'amendement n° 66.
L'amendement de coordination n° 13 est adopté, ainsi que l'amendement de coordination n° 14.
Mme Muguette Dini, rapporteure. - L'amendement n° 69 mentionne la personne de confiance parmi celles qui peuvent saisir le JLD : cette précision est utile. Avis favorable.
L'amendement n° 69 est adopté.
L'amendement de coordination n° 15 est adopté.
Mme Muguette Dini, rapporteure. - L'amendement n° 71 propose une compétence liée du directeur de l'établissement afin qu'il saisisse le juge, chaque fois qu'une discordance de position serait constatée entre la prescription médicale et la décision du représentant de l'Etat.
Le texte adopté par l'Assemblée nationale prévoit déjà une saisine du juge des libertés et de la détention en cas de désaccord entre le médecin et le préfet sur la levée de l'hospitalisation. Ce dispositif apparaît redondant dans la mesure où la commission supprime par ailleurs les soins sans consentement dispensés hors de l'hôpital. Avis défavorable.
L'amendement n° 71 est rejeté.
Mme Muguette Dini, rapporteure. - L'amendement n° 74 vise à renforcer la protection des droits de la personne en faisant intervenir le juge dès l'admission en hospitalisation. Je suis défavorable à cet amendement car le juge doit de toute façon être saisi pour procéder à l'examen de la situation du malade avant l'expiration du délai de quinze jours. Une information antérieure ne présenterait pas d'utilité évidente.
L'amendement n° 74 est rejeté.
Mme Muguette Dini, rapporteure. - Le juge des libertés et de la détention peut procéder aux investigations qu'il estime utiles et notamment à des expertises. La précision proposée par l'amendement n° 76 apparaît donc inutile. Retrait ou avis défavorable.
L'amendement n° 76 est rejeté.
L'amendement de coordination n° 16 est adopté.
Mme Muguette Dini, rapporteure. - L'amendement n° 17 déplace, dans le texte, des dispositions relatives à la procédure particulière applicable aux personnes ayant séjourné en UMD ou ayant fait l'objet d'une déclaration d'irresponsabilité pénale.
L'amendement n° 17 est adopté.
Mme Muguette Dini, rapporteure. - Nous en arrivons à l'amendement n° 193 présenté par la commission des lois.
M. Jean-René Lecerf. - Je vais le retirer au profit des amendements de la commission qui le reprennent et qui intègrent en outre le délai de dix ans pour le « droit à l'oubli ».
L'amendement n° 193 est retiré.
Mme Muguette Dini, rapporteure. - Il n'apparaît pas nécessaire de préciser que le juge fixe les délais dans lesquels les avis et expertises doivent lui être remis. Il s'agit de l'application du droit commun, d'où l'amendement n° 19.
L'amendement n° 19 est adopté.
Mme Muguette Dini, rapporteure. - Le projet de loi prévoit des procédures renforcées pour la levée des hospitalisations des personnes ayant séjourné en UMD ou ayant été déclarées pénalement irresponsables. Un avis d'un collège de soignants est nécessaire ainsi que deux expertises psychiatriques.
L'Assemblée nationale a souhaité prévoir un droit à l'oubli en prévoyant que cette procédure ne s'applique plus après un certain délai suivant le séjour en UMD ou la déclaration d'irresponsabilité. Elle a renvoyé la fixation de ce délai à un décret en Conseil d'Etat.
Compte tenu de l'importance de cette disposition, il m'est apparu souhaitable que le Parlement établisse lui-même le délai : l'amendement n° 20 propose donc de le fixer à dix ans.
Bien entendu, le passage en UMD ou la déclaration d'irresponsabilité continueront à figurer au dossier médical après ce délai et pourront être pris en compte dans la décision, mais la procédure renforcée, particulièrement lourde, ne s'appliquera plus.
Cet amendement intègre par ailleurs la réécriture des dispositions sur le droit à l'oubli proposée par plusieurs amendements de Jean-René Lecerf.
Mme Nora Berra, secrétaire d'Etat. - Le Gouvernement est favorable.
L'amendement n° 20 est adopté.
Mme Muguette Dini, rapporteure. - Nous en arrivons à l'amendement n° 21. Le texte adopté par l'Assemblée nationale prévoit que lorsque le juge ordonne la mainlevée d'une mesure d'hospitalisation complète, sa décision prend effet dans un délai maximal de quarante-huit heures permettant l'élaboration éventuelle d'un protocole de soins.
Une telle disposition, consistant à maintenir en hospitalisation une personne alors que le juge a ordonné la mainlevée de la mesure, apparaît douteuse sur le plan constitutionnel. En outre, elle devient inutile avec la suppression des soins sans consentement sous une autre forme que l'hospitalisation.
L'amendement n° 21 est adopté.
L'amendement de coordination n° 22 est adopté.
L'amendement n° 194 devient sans objet.
L'amendement de coordination n° 23 est adopté.
Mme Muguette Dini, rapporteure. - Avis défavorable sur l'amendement n° 79. Le contrôle du JLD après quinze jours puis tous les six mois sera particulièrement difficile à mettre en oeuvre, compte tenu des moyens qu'il nécessite. Un contrôle tous les trois mois serait totalement irréaliste.
Peu de malades restent hospitalisés six mois : à l'hôpital de Saint-Cyr, sur 460 malades, seuls trois ou quatre étaient encore présents au bout de six mois, des cas particulièrement lourds....
L'amendement n° 79 est rejeté.
Les amendements de coordination nos 24 et 25 sont adoptés.
L'amendement n° 26 est adopté.
Les amendements de coordination nos 27, 28, 30, 31, 32 et 33 sont adoptés.
L'amendement n° 195 devient sans objet.
M. Jean-René Lecerf, rapporteur pour avis. - Mon amendement n° 196 précise que le JLD, lorsqu'il se prononce sur une mesure de soins psychiatriques sous contrainte, peut appliquer la loi du 5 juillet 1972 qui permet au juge civil de ne pas statuer publiquement mais en chambre du conseil, cela afin d'éviter des conséquences désastreuses, par exemple en cas de conflits familiaux.
L'amendement n° 196 est adopté.
L'amendement de coordination n° 35 est adopté.
Mme Muguette Dini, rapporteure. - Avis défavorable à l'amendement n° 81 car sa rédaction est trop rigide : dans beaucoup de circonstances, l'avocat ne pourra pas être présent. Je demande le retrait de l'amendement n° 82, qui supprime le recours à la visioconférence, car il sera largement satisfait par celui déposé par la commission des lois.
L'amendement n° 81 est rejeté.
M. Jean-René Lecerf, rapporteur pour avis. - Mon amendement n° 197 modifie l'alinéa 94. Il a deux objets : d'une part, il prévoit que si une salle d'audience a été spécialement aménagée sur l'emprise de l'hôpital psychiatrique pour assurer la clarté, la sécurité et la sincérité des débats et permettre au juge de statuer publiquement, celui-ci peut statuer dans cette salle. Cet aménagement spécial peut être sommaire mais il est essentiel pour garantir que la salle soit clairement identifiée comme un lieu de justice. D'autre part, l'amendement encadre le recours à la visioconférence. En premier lieu, il précise qu'elle n'est possible que si l'hôpital psychiatrique a spécialement aménagé, en son sein, une salle d'audience dans les conditions évoquées plus haut. Autrement dit, que le juge soit physiquement présent dans cette salle ou qu'il intervienne à distance depuis le palais de justice, les exigences portant sur l'aménagement des lieux doivent être identiques. En second lieu, l'amendement prévoit que le juge des libertés et de la détention ne pourrait décider que l'audience se déroule par visioconférence que si un avis médical a attesté que l'état mental de la personne n'y fait pas obstacle et que, en conséquence, elle est capable d'exprimer son opposition à ce procédé, comme le prévoit le projet de loi. Il appartiendra ainsi au médecin d'évaluer, en fonction de l'état du patient, dans quelle mesure les inconvénients de la visioconférence sont ou non contrebalancés par ceux d'un transport au palais de justice et d'une présentation devant le juge, qui peuvent constituer des expériences traumatisantes.
Mme Muguette Dini, rapporteure. - Avis favorable.
Mme Christiane Demontès. - C'est une avancée mais c'est tout de même un repli par rapport à notre amendement n° 82 que nous maintenons.
L'amendement n° 82 est rejeté.
L'amendement n° 197 est adopté.
M. Jean-René Lecerf, rapporteur pour avis. - Mon amendement n° 198, lui aussi, encadre le recours à la visioconférence en prévoyant que si le patient est assisté d'un avocat, celui-ci ne peut se tenir qu'auprès de l'intéressé. C'est une suggestion du Conseil national des barreaux.
Mme Muguette Dini, rapporteure. - Je comprends votre argument mais je crains que cette mesure soit difficilement applicable. Pendant le week-end, les avocats de permanence au tribunal auront bien du mal à se rendre dans les hôpitaux psychiatriques si ceux-ci sont éloignés, d'autant qu'ils auront d'autres dossiers à traiter au sein même du tribunal ou dans les locaux de police.
M. Jean-René Lecerf, rapporteur pour avis. - La situation est la même pour les gardes à vue. Il faut respecter la confidentialité du contact avocat-client. Si l'avocat est du côté des magistrats, c'est impossible. Le CNB a proposé cette mesure tout en étant conscient de sa rigidité.
Mme Muguette Dini, rapporteure. - Alors, j'y suis favorable.
L'amendement n° 198 est adopté.
L'amendement n° 199 est retiré.
Mme Muguette Dini, rapporteure. - Je suis favorable à l'amendement de clarification n° 200 sur la procédure applicable en appel, à condition qu'on y supprime la référence à l'article L. 3211-12-1-1, dont nous avons refusé la création.
L'amendement n° 200, ainsi rectifié, est adopté.
Mme Muguette Dini, rapporteure. - L'amendement n° 83 du groupe socialiste supprime le recours suspensif à l'encontre des décisions du JLD. Ce recours suspensif, qui existe en matière de détention provisoire ou de rétention des étrangers, peut paraître choquant s'agissant de malades. En réalité, il est appelé à ne servir que dans des situations rarissimes ou il apparaîtrait que la sécurité des personnes pourrait être mise en cause par une décision de levée d'une hospitalisation sans consentement. Avis défavorable.
L'amendement n° 83 est rejeté.
L'amendement de coordination n° 36 est adopté.
M. Jean-René Lecerf, rapporteur pour avis. - A la première phrase de l'alinéa 97, mon amendement n° 201 supprime la mention suivant laquelle le procureur de la République agit sur la demande du directeur de l'établissement ou du préfet lorsqu'il demande que le recours revête un caractère suspensif. L'amendement n° 203 supprime des mots inutiles.
Les amendements nos 201 et 203 sont adoptés.
L'amendement de coordination n° 37 est adopté, de même que l'amendement n° 202 de clarification rédactionnelle.
Mme Muguette Dini, rapporteure. - Favorable à l'amendement n° 204 qui harmonise la procédure d'appel avec celle suivie devant le juge des libertés, sous réserve de la suppression du mot « complète ».
L'amendement n° 204 rectifié est adopté, ainsi que l'amendement n° 205.
Mme Muguette Dini, rapporteure. - Mon amendement n° 38 supprime les alinéas 99 et 100, compte tenu de la suppression des soins sans consentement sous une autre forme que l'hospitalisation.
L'amendement n° 38 est adopté.
L'amendement n° 206 devient sans objet.
L'amendement de coordination n° 39 est adopté.
L'article 1er est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Article 2
Les amendements de coordination nos 40, 46, 48 et 57 sont adoptés.
Mme Muguette Dini, rapporteure. - Je retire mon amendement n° 60 au profit du n° 207 de Jean-René Lecerf.
L'amendement n° 60 est retiré.
M. Jean-René Lecerf, rapporteur pour avis. - Mon amendement n° 207 prévoit que la personne chargée de la protection du majeur peut es qualité, et non à titre personnel, être le tiers qui demande des soins sans consentement.
Mme Muguette Dini, rapporteure. - Il faut toutefois rectifier cet amendement pour remplacer « demande de soins » par « demande d'hospitalisation ».
L'amendement n° 207 ainsi rectifié est adopté.
Les amendements de coordination nos 61, 62, 64, 65, 67, 68, 70 et 72 sont adoptés.
L'amendement de précision n° 73 est adopté, ainsi que les amendements de coordination nos 75, 77, 78, 80, 89, 90, 92, 94, 95, 97, 98, 99, 101, 102, 103, 105, 106, 108, 109, 111 et 112.
L'article 2 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Article 3
Les amendements de coordination nos 114, 115, 116 et 117 sont adoptés.
Les amendements nos 208 et 85, satisfaits, sont retirés.
L'amendement de coordination n° 118 est adopté.
Les amendements nos 86 et 209 deviennent sans objet.
L'amendement de coordination n° 119 est adopté.
M. Jean-René Lecerf, rapporteur pour avis. - L'article L. 3213-2 du code de la santé publique prévoit une mesure d'hospitalisation d'office dérogatoire du droit commun : l'hospitalisation d'office en urgence. Prononcée, à Paris, par les commissaires de police et, dans les autres départements, par les maires, cette mesure, d'une durée maximale de quarante-huit heures, est soumise à deux conditions cumulatives : la personne doit présenter un comportement révélant « des troubles mentaux manifestes » et il doit exister un « danger imminent pour la sûreté des personnes, attesté par un avis médical ou, à défaut, par la notoriété publique ». A Paris, les personnes sont conduites à l'infirmerie psychiatrique de la préfecture de police (IPPP), service médico-légal d'accueil et de diagnostic psychiatrique d'urgence. Or, dans un avis rendu public le 15 février 2011, le contrôleur général des lieux de privation de liberté a estimé que cette infirmerie, en tant que lieu de privation de liberté, ne présentait pas des garanties suffisantes pour les droits de la personne.
D'une part, elle ne dispose d'aucune autonomie : c'est un simple service de cette préfecture, dépendant de la direction des transports et de la protection du public. Ses ressources lui sont assurées par la préfecture de police. Le rapport précise qu'à supposer que les médecins qui y exercent ne soient pas sous l'autorité hiérarchique de la préfecture de police de Paris, ils sont rémunérés par elle, les conditions matérielles de leurs fonctions et la gestion de leur carrière en dépendent. L'établissement n'a donc rien à voir avec un centre hospitalier habilité à accueillir des malades mentaux. Par conséquent, les dispositions propres aux droits des personnes accueillies en hôpital ne s'y appliquent pas et aucune autorité de santé n'est compétente pour y vérifier les contenus et les modalités de soins.
D'autre part, dès lors qu'elle ne ressortit pas à la catégorie des établissements hospitaliers qui relèvent de l'article L. 3222-1 du code de la santé publique, l'infirmerie psychiatrique n'est pas obligatoirement visitée par les magistrats des tribunaux compétents et, notamment, par le parquet. En conséquence, précise le contrôleur, le dispositif entretient le doute sur la distance entre considérations d'ordre public et considérations médicales. Le rapport recommande ainsi de mettre fin à cette confusion, qui n'a aucun équivalent dans une autre ville de France.
C'est pourquoi, mon amendement n° 210 prévoit que lorsque l'hospitalisation d'office en urgence est prononcée, la personne ne peut être prise en charge que dans le cadre d'un établissement psychiatrique de droit commun. Cet amendement obligera donc l'IPPP à évoluer en un établissement hospitalier de droit commun. En effet, sur le plan des principes, une situation pathologique, fût-elle d'urgence, ne doit pas être prise en charge par une institution relevant d'une institution de police, sauf à alimenter la confusion - toujours regrettable - entre troubles psychiatriques, délinquance et dangerosité. Un amendement présenté à l'article 14 laisse à la préfecture de police jusqu'au 1er septembre 2012 pour procéder à ce changement de statut.
Mme Muguette Dini, rapporteur. - Je partage votre analyse mais si nous adoptons un tel amendement qui fait référence à l'article L. 3222-1, cela ne concernera pas que Paris mais aussi d'autres communes qui ne sont pas proches d'un hôpital psychiatrique. C'est pourquoi je préfère l'amendement n° 113 du groupe socialiste qui propose, dans un article additionnel, la remise, dans un délai de six mois, d'un rapport sur le fonctionnement de l'IPPP.
M. Jean-René Lecerf, rapporteur pour avis. - On pourrait préciser qu'il ne s'agit pas forcément d'un hôpital psychiatrique. Le ministère de l'intérieur lui-même y serait favorable. Et la commission des lois n'aime pas beaucoup la multiplication des rapports...
Mme Nora Berra, secrétaire d'État. - Je préfère moi aussi l'amendement socialiste.
L'amendement n° 210 est retiré.
Les amendements de coordination nos 120, 121, 122 et 123 sont adoptés.
L'amendement n° 211 devient sans objet.
L'amendement de coordination n° 124 est adopté.
Mme Muguette Dini, rapporteure. - L'amendement n° 87 du groupe socialiste propose que, dans le cadre de l'hospitalisation d'office - puisque les soins psychiatriques sans consentement ont été supprimés -, le maintien de l'hospitalisation soit subordonné au renouvellement mensuel du certificat médical - comme c'est le cas pour l'hospitalisation sur demande d'un tiers -, alors qu'actuellement, celui-ci est renouvelé au terme de trois mois, puis de six mois. Cette différence de périodicité entre l'HO et l'HDT s'explique par le fait que les personnes qui sont en HO ont souvent des troubles plus lourds ; elles ont d'ailleurs des durées d'hospitalisation nettement plus longues et mettent plus de temps à se stabiliser. En outre les certificats dont il est question ici sont des certificats imposés. Mais à tout moment, si le patient va mieux, le médecin peut établir ce que l'on appelle un « certificat de situation » attestant que les motifs de l'hospitalisation ne sont plus réunis. Avis défavorable.
L'amendement n° 87 est rejeté.
Les amendements de coordination nos 125, 126, 127 et 128 sont adoptés.
L'amendement n° 88 devient sans objet.
M. Jean-René Lecerf, rapporteur pour avis. - Mon amendement n° 212 prévoit que le juge des libertés et de la détention, quand il est saisi de plein droit en cas de désaccord entre le préfet et le corps médical, doit se prononcer dans un délai de trois jours à compter de sa saisine.
Mme Muguette Dini, rapporteure. - Avis défavorable. Cette obligation est difficilement applicable compte tenu de la charge de travail des JLD.
Mme Nora Berra, secrétaire d'État. - Effectivement, un délai de trois jours est excessivement restrictif. La jurisprudence prévoit un « bref délai ».
L'amendement n° 212 est rejeté.
Les amendements de coordination nos 129 et 130 sont adoptés.
M. Jean-René Lecerf, rapporteur pour avis. - L'amendement n° 213 précise l'article L. 3213-7 du code de la santé publique portant sur les HO prononcées par le préfet à la suite d'une saisine des autorités judiciaires. Il clarifie le dispositif en vigueur : le préfet, saisi par l'autorité judiciaire, n'est pas tenu de prononcer une HO. Il doit, en revanche, ordonner sans délai la production d'un certificat médical circonstancié portant sur l'état actuel du malade, au vu duquel il peut prononcer cette HO selon les conditions du droit commun.
Mme Muguette Dini, rapporteure. - J'y suis favorable à condition qu'on en modifie la dernière phrase en remplaçant « soins psychiatriques sans consentement » par « hospitalisation d'office ».
L'amendement n° 213, ainsi rectifié, est adopté.
Les amendements de coordination nos 131, 132, 133, 134, et 135 sont adoptés.
L'article 3 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Article 4
Les amendements de coordination nos 136 et 137 sont adoptés.
L'amendement n° 214 est satisfait.
Mme Muguette Dini, rapporteure. - Les dispositions du projet de loi ne modifient pas le droit actuel, qui prévoit déjà l'hospitalisation dans des unités spécialement aménagées, sans que cela ne pose de difficultés alors même que le programme d'aménagement des UHSA n'est pas achevé. Avis défavorable.
L'amendement n° 91 est rejeté.
L'amendement de coordination n° 138 est adopté
Mme Muguette Dini, rapporteure. - Le texte du projet de loi est ambigu quant aux conditions de la levée d'hospitalisation des détenus malades mentaux. Toutefois, l'amendement n° 215 de Jean-René Lecerf apporte les clarifications nécessaires. Je demande donc le retrait de l'amendement n° 93.
L'amendement n° 93 est retiré.
L'amendement de clarification n° 215 est adopté.
Les amendements de coordination nos 139 et 140 sont adoptés.
M. Jean-René Lecerf, rapporteur pour avis. - L'amendement n° 216 est une clarification. Le texte pourrait laisser penser que le certificat médical exigé dans le cadre de l'hospitalisation d'une personne détenue peut émaner du psychiatre exerçant dans l'établissement d'accueil, ce qui constituerait un recul par rapport au droit en vigueur.
Mme Muguette Dini, rapporteure. - J'y suis favorable à condition de remplacer « la mesure de soins psychiatriques » par « l'hospitalisation ».
L'amendement n° 216, ainsi rectifié, est adopté.
Les amendements nos 141 et 142 deviennent sans objet.
L'amendement de coordination n° 143 est adopté.
L'article 4 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Article 5
L'amendement n° 145 est adopté.
Les amendements de coordination nos 144, 146, 147, 148, 149 et 150 sont adoptés.
L'article 5 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Article additionnel après l'article 5
M. Jean-René Lecerf, rapporteur pour avis. - L'amendement n° 217 unifie le contentieux en matière d'hospitalisation sous contrainte. En effet, ce contentieux se caractérise par un éclatement entre le juge judiciaire et le juge administratif : le juge administratif est compétent pour examiner la seule régularité de la procédure d'admission en soins. Il n'examine donc que les cas d'ouverture de légalité externe et ne se prononce pas sur le fond. Le juge judiciaire, gardien de la liberté individuelle, est quant à lui compétent pour statuer sur le bien-fondé de la mesure d'hospitalisation sous contrainte. Lui seul peut prononcer sa mainlevée.
Comme l'a indiqué le Conseil constitutionnel dans sa décision du 26 novembre 2010, il est loisible au législateur d'unifier le contentieux de l'hospitalisation sous contrainte dans le souci d'une bonne administration de la justice. Cette unification ne peut se faire qu'au profit du juge judiciaire, gardien des libertés individuelles. Une telle réforme garantirait qu'un juge se prononce à bref délai sur la mesure de soins sans consentement, tant en ce qui concerne son bien-fondé que sa régularité formelle. Elle mettrait fin à une situation complexe dans la mesure où le patient souffrant de troubles mentaux ne peut qu'être dérouté par la dualité des juridictions ; il doit en effet choisir l'ordre de juridiction en fonction des moyens qu'il entend invoquer : s'il souhaite contester la régularité de la procédure d'admission en soins, il devra s'adresser au juge administratif mais s'il entend remettre en cause le bien-fondé de la mesure, il devra se tourner vers le juge judiciaire...
Toutefois, la réforme du droit de l'hospitalisation sous contrainte va, dès le 1er août 2011, exiger des juridictions et de l'ensemble des acteurs judiciaires une mobilisation considérable : il serait, dans ces conditions, difficile d'y ajouter la création d'un bloc de compétence judiciaire qui aurait pour conséquence d'élargir le champ d'intervention du JLD. C'est pourquoi un amendement, présenté à l'article 14, propose qu'une telle unification n'intervienne que le 1er septembre 2012. Ce délai permettra de former les JLD, qui aujourd'hui ne peuvent pas connaître de la régularité des actes administratifs, et d'anticiper la charge de travail supplémentaire entraînée par cette évolution.
Mme Muguette Dini, rapporteure. - Cet amendement unifie le contentieux des hospitalisations sans consentement au profit du juge judiciaire. C'est une évolution souhaitable car les règles actuelles sont complexes et difficilement compréhensibles. Toutefois, cela signifie que le JLD devrait examiner, dans des délais très brefs, non seulement le bien fondé de la mesure mais également la légalité de tous les actes administratifs associés à celle-ci. Le risque est sérieux que cette unification soulève des difficultés pratiques considérables, même avec le report de l'entrée en vigueur de la mesure au 1er septembre 2012.
Ne vaudrait-il pas mieux faire une première évaluation de la judiciarisation prévue par le projet de loi un an après son entrée en vigueur et décider alors une éventuelle unification du contentieux ? En ce sens, je vous proposerai un amendement prévoyant une évaluation de la loi soumise au Parlement avant le 1er septembre 2012. Nous pourrions décider l'unification après avoir pris connaissance de cette évaluation.
Mme Nora Berra, secrétaire d'État - Je fais les mêmes réserves. Cela alourdirait le travail du JLD et le détournerait de sa tâche principale. Et, en outre, cela fournirait aux avocats l'occasion de soulever un nouveau motif de recours ne portant pas sur une question de fond.
M. Jean-René Lecerf, rapporteur pour avis. - Je le retire mais je le redéposerai à titre personnel. La saisine du juge administratif est toujours possible. Donc, si on n'unifie pas, vous aurez l'un et l'autre. Les juges administratifs y étaient favorables et les juges judiciaires jugeaient l'augmentation de travail minime.
L'amendement n° 217 est retiré.
Article 6
L'amendement rédactionnel n° 151 est adopté.
L'amendement n° 96 devient sans objet.
Mme Muguette Dini, rapporteure. - L'amendement n° 104 propose, d'une part, de préciser que le dispositif mis en place par l'ARS dans chaque territoire de santé devra répondre aux urgences psychiatriques mais aussi prévenir leur survenance, d'autre part, d'ajouter à la liste des participants à ce dispositif les établissements participant à la sectorisation psychiatrique. S'agissant du premier point, il est préférable de distinguer la gestion des urgences psychiatriques de celle de la prévention des crises psychiatriques. Un malade en crise psychiatrique aiguë ne peut pas être réceptif à une action de prévention. En outre, ces questions devraient être traitées dans le cadre d'une loi de santé mentale. Le second point paraît inutile. La référence aux « établissements mentionnés à l'article L. 3222-1 », c'est-à-dire aux établissements chargés de la mission de service public d'accueil des personnes hospitalisées sans leur consentement, est suffisante puisque cette mission leur a été attribuée par l'ARS sur la base de critères géographiques de répartition de l'offre de soins. Je demande donc le retrait de l'amendement. A défaut, j'y serai défavorable.
L'amendement n° 104 est rejeté.
Mme Muguette Dini, rapporteure. - L'amendement n° 100 propose que le dispositif de réponse aux urgences psychiatriques, organisé par l'ARS dans chaque territoire de santé, soit « compatible avec la sectorisation psychiatrique ». Cette mention ne me semble pas nécessaire ; il relève en effet du bon sens que l'ARS prenne en compte les secteurs psychiatriques lors de l'élaboration de ce dispositif. En outre, d'un point de vue purement rédactionnel, le terme « compatible » n'est pas très approprié. Surtout, le sujet de la sectorisation mériterait d'être abordé dans le cadre d'une loi plus large et plus complète sur l'organisation et l'avenir de la psychiatrie dans notre pays. Avis défavorable.
L'amendement n° 100 est rejeté.
M. Alain Milon. - Mon amendement n° 186 propose que les groupements de psychiatres libéraux organisés en pôle de santé puissent participer au dispositif de réponse aux urgences psychiatriques mis en place par l'ARS. Cela devrait encourager les interactions entre la psychiatrie publique et la psychiatrie privée.
Mme Muguette Dini, rapporteure. - J'y suis favorable.
L'amendement n° 186 est adopté.
Les amendements de coordination nos 152, 153, 154 et 155 sont adoptés.
M. Jean-René Lecerf, rapporteur pour avis. - Mon amendement n° 218 prévoit que les visites des hôpitaux psychiatriques aient lieu « au moins » une fois par an pour permettre au procureur de la République de s'y rendre, s'il le souhaite, plusieurs fois par an comme le droit en vigueur le permet.
Mme Muguette Dini, rapporteure. - J'y suis favorable.
L'amendement n° 218 est adopté.
Les amendements de coordination nos 156, 157, 158, 159, 160 et 161 sont adoptés.
Mme Muguette Dini, rapporteure. - L'amendement n° 107 propose que la commission départementale des hospitalisations psychiatriques (CDHP) adresse chaque année son rapport d'activité au contrôleur général des lieux de privation de liberté et évalue les conditions dans lesquelles la présente loi est mise en oeuvre. La transmission du rapport d'activité des CDHP au contrôleur général est une idée intéressante, qui permettra la remontée d'informations locales. En revanche, il n'est pas du ressort de ces commissions départementales de contrôler l'application de cette loi. Cette mission relève du Parlement. Je propose donc aux auteurs de rectifier leur amendement sur deux points : en corrigeant la référence au contrôleur général des lieux de détention puisqu'il s'agit du « contrôleur général des lieux de privation de liberté » ; en supprimant les mots : « et évalue les conditions dans lesquelles la présente loi est mis en oeuvre ».
L'amendement n° 107, ainsi rectifié, est adopté.
Les amendements de coordination nos 162 et 163 sont adoptés.
L'article 6 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Article additionnel après l'article 6
Mme Muguette Dini, rapporteure. - L'amendement n° 110 propose que les membres de la CDHP désignés par le représentant de l'Etat dans le département soient désormais désignés par le directeur de l'ARS. Oter ce pouvoir de désignation au préfet n'est pas compatible avec le rôle central qu'il joue dans le dispositif d'hospitalisation d'office. Avis défavorable.
Mme Nora Berra, secrétaire d'État. - Même avis.
L'amendement n° 110 est rejeté.
Article 7
Les amendements de coordination nos 164, 165 et 166 sont adoptés.
L'article 7 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Article 8
Les amendements nos 167, 168 et 169 sont adoptés.
L'article 8 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Article additionnel après l'article 8
M. Alain Milon - Mon amendement n° 185 permet la coordination avec la loi HSPT en ce qui concerne la psychoéducation.
Mme Muguette Dini, rapporteure. - En dépit de l'intérêt de cet amendement, c'est un cavalier. J'en demande le retrait.
L'amendement n° 185 est retiré.
Mme Muguette Dini, rapporteure. - Mon amendement n° 170 supprime l'article 8 bis, introduit par les députés, et qui prévoit la remise d'un rapport sur l'état de la recherche médicale française en psychiatrie. Il semble préférable de traiter cette question dans une loi plus générale sur la psychiatrie.
L'amendement n° 170 est adopté et l'article 8 bis est supprimé.
Article additionnel après l'article 8 bis
Mme Muguette Dini, rapporteure. - L'amendement n° 113 du groupe socialiste propose la remise, dans un délai de six mois, d'un rapport sur le fonctionnement de l'infirmerie psychiatrique de la préfecture de police de Paris. Avis favorable.
L'amendement n° 113 est adopté et devient un article additionnel.
Article 9
Les amendements rédactionnels et de coordination nos 171, 172, 173, 174, 175, 176, 177 et 178 sont adoptés.
L'article 9 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Article 10
L'amendement de coordination n° 179 est adopté.
L'article 10 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Les articles 11 et 12 sont adoptés sans modification.
Article 13
Les amendements de coordination nos 180, 181, 182 et 183 sont adoptés.
L'article 13 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Article 14
L'amendement n° 219 est retiré
Les amendements nos 220, 222 et 221 deviennent sans objet.
Les amendements de coordination nos 184, 226 et 227 sont adoptés.
L'article 14 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Article additionnel après l'article 14
Mme Muguette Dini, rapporteure. - Mon amendement n° 225 prévoit une évaluation de la loi dans un délai rapide, notamment pour vérifier que la mise en oeuvre du contrôle juridictionnel se déroule correctement.
L'amendement n° 225 est adopté et devient article additionnel.
Intitulé du projet de loi
L'amendement de coordination n° 224 est adopté.
L'amendement n° 41 devient sans objet.
VOTE SUR L'ENSEMBLE
La commission rejette le texte résultant de ses travaux.
EXAMEN DES AMENDEMENTS
Motion de procédure
Auteur |
N° |
Objet |
Avis de la commission |
Fischer, Pasquet, David, Hoarau et Autain |
29 |
Motion tendant à opposer la question préalable |
Rejeté |
Amendements
Article(s) additionnel(s) après article 5 |
|||
Auteur |
N° |
Objet |
Avis de la commission |
Lecerf au nom de la commission des lois |
217 |
Unification du contentieux des soins sans consentement |
Retiré |
Article(s) additionnel(s) après article 8 |
|||
Auteur |
N° |
Objet |
Avis de la commission |
Milon |
185 |
Psychoéducation |
Retiré |
Article 8 bis |
|||
Auteur |
N° |
Objet |
Avis de la commission |
Rapporteure |
170 |
Suppression de l'article |
Adopté |
Article additionnel après l'article
14 |
|||
Auteur |
N° |
Objet |
Avis de la commission |
Rapporteure |
225 |
Evaluation de la loi avant le 1er septembre 2012 |
Adopté |
Mercredi 4 mai 2011
- Présidence de Mme Muguette Dini, présidente -Expulsions locatives et garantie d'un droit au logement effectif - Examen de l'amendement
La commission procède à l'examen de l'amendement sur la proposition de loi (n° 300, 2010-2011) relative aux expulsions locatives et à la garantie d'un droit au logement effectif, présentée par Mme Odette Terrade et les membres du groupe CRC-SPG, dont Mme Isabelle Pasquet est la rapporteure.
AMENDEMENT
Mme Isabelle Pasquet, rapporteure. - Cet amendement tend à une nouvelle rédaction de l'article 2 de la proposition de loi. Il propose un moratoire temporaire, jusqu'au 16 mars 2012, des expulsions de personnes reconnues prioritaires au titre du Dalo tant qu'elles n'on pas reçu une offre de relogement.
Je note que, de toute façon, entre le 1er novembre 2011 et le 15 mars 2012, s'appliquera la trêve hivernale prévue par l'article L. 613-3 du code de la construction et de l'habitation, pendant laquelle il ne peut y avoir d'expulsion sans relogement. Concrètement, il est donc proposé un moratoire qui s'appliquerait jusqu'au 31 octobre de cette année et qui inciterait à accentuer l'effort pour la mise en oeuvre du Dalo. Comme le soulignent les auteurs de l'amendement, le secrétaire d'Etat chargé du logement avait pris des engagements pour le relogement en 2011 des ménages prioritaires d'Ile-de-France, soit depuis le 1er janvier 2008, environ 41 700 demandes reconnues prioritaires pour moins de 15 000 offres : c'est un vaste chantier ! Pour la seule année 2010, l'Ile-de-France a représenté 61 % des demandes Dalo, avec un peu plus de 15 500 demandes prioritaires et 7 968 offres.
J'observe toutefois que la portée de l'amendement est beaucoup plus restreinte que celle de l'article 2 de la proposition de loi, qui interdit de manière générale le concours de la force publique pour les expulsions sans proposition de relogement. De plus, il n'est pas non plus cohérent avec l'article 3 de la proposition de loi qui reprend, je le rappelle, les propositions communes du comité de suivi du Dalo et du Conseil économique, social et environnemental. Je vous propose donc de demander le retrait de l'amendement ou, sinon, de donner un avis défavorable à son adoption.
Mme Christiane Demontès. - J'entends ce que dit notre rapporteure.
Ceci étant, tel qu'il est rédigé dans la proposition de loi, l'article 2 risque d'être frappé d'inconstitutionnalité. Nous avons donc essayé de rédiger l'article pour éviter cet écueil, en insistant effectivement sur le fait que les personnes qui sont reconnues prioritaires par la commission de médiation ne peuvent être expulsées si aucune offre de logement ne leur est faite. J'insiste aussi, mais je le dirai en séance, que nous savons tous, et en particulier quand nous sommes maires, qu'il est des gens qui délibérément ne payent pas leurs loyers alors qu'ils ont les moyens de le faire. Il faut aussi faire très attention à ces situations. Notre rédaction vise donc à ne toucher que les personnes qui rentrent dans le cadre du Dalo.
Mme Annie David. - Pour ma part, je suivrai l'avis de la rapporteure. J'entends bien les problèmes soulevés, notamment d'inconstitutionnalité éventuelle, mais j'observe que le droit au logement a également valeur constitutionnelle.
La commission donne un avis défavorable à l'amendement n° 1.