- Lundi 28 janvier 2013
- Mardi 29 janvier 2013
- Mercredi 30 janvier 2013
- Création d'un Parquet européen - Communication
- Nomination de rapporteurs
- Suppression de la discrimination dans les délais de prescription prévus par la loi sur la liberté - Examen du rapport et du texte de la commission
- Meilleur équilibre hommes-femmes parmi les administrateurs non exécutifs - Examen du rapport et du texte de la commission
Lundi 28 janvier 2013
- Présidence de M. Jean-Pierre Sueur, président -Haute autorité chargée du contrôle et de la régulation des normes applicables aux collectivités locales - Examen des amendements au texte de la commission
La commission procède à l'examen des amendements sur le texte n° 283 (2012-2013) sur la proposition de loi n° 119 (2012-2013) portant création d'une Haute autorité chargée du contrôle et de la régulation des normes applicables aux collectivités locales.
M. Jean-Pierre Sueur, président. - Nous examinons aujourd'hui les amendements déposés sur le texte adopté mercredi dernier par notre commission, portant création d'une Haute autorité chargée du contrôle et de la régulation des normes applicables aux collectivités locales. La dénomination de celle-ci a changé : il s'agit désormais d'un Conseil national chargé du contrôle et de la régulation des normes applicables aux collectivités locales. Nous commençons par les amendements du rapporteur.
M. Alain Richard, rapporteur. - Il est d'usage de désigner, et non d'élire, les représentants du Parlement dans une autre instance. L'amendement n° 21 modifie les alinéas 11 et 12 en conséquence.
L'amendement n° 21 est adopté.
M. Alain Richard, rapporteur. - Mme Goulet a judicieusement remarqué que, si le Premier ministre détenait le pouvoir de fixer un délai de 72 heures au Conseil national d'évaluation des normes (CNEN) pour examiner les amendements du Gouvernement, rien de tel n'existait pour les amendements parlementaires : aussi l'amendement n° 22 prévoit-il que, lorsque le président d'une assemblée saisirait le CNEN d'un amendement parlementaire, cette saisine entraînerait l'application du même délai.
L'amendement n° 22 est adopté.
M. Alain Richard, rapporteur. - Le deuxième délai de six semaines n'a pas d'utilité. Lorsqu'à l'issue du premier délai, le CNEN rend un avis défavorable, le Gouvernement doit pouvoir présenter un nouveau texte en huit jours s'il en a la capacité, ou en plus de six semaines si nécessaire.
M. Christian Cointat. - Cela n'incite-t-il pas le Gouvernement à enterrer le texte ?
M. Alain Richard, rapporteur. - Il s'agit de ses propres projets de loi. Si enterrement il y a, c'est qu'un autre motif le justifie.
L'amendement n° 23 est adopté.
M. Jean-Pierre Sueur, président. - Nous passons aux autres amendements.
M. Alain Richard, rapporteur. - L'amendement n° 9 rend hommage au travail réalisé par la Commission consultative d'évaluation des normes (CCEN), sous la présidence du président sortant : il vise à conserver leur validité aux avis qu'elle a rendus. S'il est bon de marquer la continuité, la CCEN ne rend que des avis. C'est pourquoi je serais favorable à l'amendement sous réserve d'une rectification sémantique. Il conviendrait d'écrire : « Les avis rendus par la commission visée à l'alinéa précédent demeurent soumis au Gouvernement. »
La commission émet un avis favorable à l'amendement n° 9, sous réserve de sa rectification.
Mme Hélène Lipietz. - L'amendement n° 13 rectifié augmente la taille du CNEN afin d'assurer la représentation de l'ensemble des groupes politiques.
M. Alain Richard, rapporteur. - Je suis défavorable à cet amendement. D'une part, notre commission s'est mise d'accord sur un certain équilibre. Il y a beaucoup d'autres outils de représentation de la diversité politique : au total, vingt-sept membres représentent des assemblées élues. Au demeurant, le texte changerait de portée à chaque modification des groupes parlementaires ; grâce à la stimulante sollicitation de nos amis écologistes, le seuil de constitution d'un groupe sénatorial a été abaissé à dix membres et, comme il est à quinze à l'Assemblée, le nombre potentiel de groupes s'élève à 70...
M. Jean-Pierre Sueur, président. - En outre, le nombre total de parlementaires serait supérieur à celui des représentants des communes...
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 13 rectifié.
Mme Hélène Lipietz. - L'amendement n° 16 rectifié poursuit un objectif de parité.
M. Alain Richard, rapporteur. - Je suggère à la commission de ne pas retenir cet amendement. L'institution aura d'autres préoccupations, notamment celle de représenter les différentes sensibilités politiques. En outre, il va falloir trouver des représentants de collectivités territoriales décidés à se consacrer à cette tâche. Pas de fétichisme ! Il est préférable de faire prévaloir la recherche du consensus entre tous les acteurs.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 13 rectifié.
M. Alain Richard, rapporteur. - L'amendement n° 1 rectifié procède d'un malentendu : le dispositif donne le sentiment d'une assemblée pléthorique. L'objectif du texte est différent : compte tenu du nombre de textes à examiner - projets de loi, amendements, stock des textes existants -, le CNEN travaillera par sections. Son règlement intérieur en précisera le nombre, sans doute deux ou trois. Les chiffres évoqués me semblent justifiés.
M. Jean-Pierre Sueur, président. - Lors de sa précédente réunion, la commission avait choisi de représenter également les départements et les régions par quatre élus. Nous avions atteint un certain équilibre. Il me paraît cohérent de suivre le rapporteur sur ce point.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 1 rectifié.
Mme Hélène Lipietz. - Dans un souci de parité qui n'intéresse apparemment pas notre commission, l'amendement n° 12 porte à quatre le nombre de représentants des organes délibérants des établissements publics de coopération intercommunale.
M. Alain Richard, rapporteur. - Il faut parfois faire confiance aux personnes élues démocratiquement : elles ne sont pas nécessairement ennemies de la parité et sont tout à fait capables d'établir par elles-mêmes un équilibre, sans y être obligées par un texte rigide.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 12 rectifié.
Mme Hélène Lipietz. - Mon amendement n° 17 rectifié est identique à l'amendement n° 21 du rapporteur. Pour une fois, il aurait été favorable à ma proposition...
M. Alain Richard, rapporteur. - J'y reste favorable ! L'objet est ici différent : tout à l'heure, mon amendement concernait le choix des quatre parlementaires ; le vôtre vient en facteur commun à l'ensemble et porte sur les suppléants.
La commission émet un avis favorable à l'amendement n° 17 rectifié.
Mme Hélène Lipietz. - On va encore dire qu'il y a des équilibres, que les hommes respectent toujours la parité... L'amendement n° 14 la garantit néanmoins dans le cas où un membre titulaire est remplacé par son suppléant. Mais, compte tenu des votes intervenus, sans-doute aurais-je dû préciser que le suppléant doit être de sexe opposé...
M. Jean-Pierre Sueur, président. - Considérons dans ce cas que votre amendement n'a plus d'objet et qu'il sera retiré en séance publique.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 14 rectifié.
M. Alain Richard, rapporteur. - Je propose à la commission de ne pas retenir l'amendement n° 4 pour les mêmes raisons que j'opposerai à un amendement ultérieur de Mme Lipietz sur le même thème. Ecrire « le président » dans un texte de droit en français signifie naturellement le président ou la présidente. Si on commence à l'écrire dans tous les textes, à commencer par le code civil, nous entamons alors un travail démesuré et sémantiquement inutile.
M. Philippe Bas. - Je ne voudrais pas passer à côté de ce débat passionnant... Le texte adopté par notre commission concernant la saisine du CNEN dispose que celle-ci peut être le fait de la présidente ou du président d'un groupe parlementaire. Nous n'aurions pas du l'écrire de la sorte. Ou alors, il faut adopter l'amendement de M. Dallier.
M. Alain Richard, rapporteur. - Il faut revenir sur cette erreur de rédaction, ce que propose d'ailleurs l'amendement n° 11 rectifié de Mme Lipietz.
Mme Esther Benbassa. - Un jour, il faudra quand même féminiser l'orthographe. Pourquoi le masculin dominerait-il ? Certes, c'est une règle grammaticale, mais on ne peut conserver éternellement cette conception de l'orthographe héritée de l'époque où seuls les hommes écrivaient. Considérer la femme comme inexistante dans la sphère publique est une vieille histoire de civilisation. En tant que législateurs, nous devons faire un effort, à l'instar de ce que nous enseignons désormais à nos enfants. Que vous n'acceptiez pas cette idée, je le conçois tout à fait, cependant si l'on ne met pas son grain de sel pour éroder le pouvoir masculin, jamais les femmes ne récupéreront leur place.
M. Jean-Pierre Sueur, président. - Je remercie madame la législatrice de son grain de sel.
M. Christian Cointat. - La langue française est plus riche que cela. Il y a le féminin, le masculin et le neutre.
Mme Hélène Lipietz. - Ah bon, lequel ?
M. Christian Cointat. - Qu'il ressemble au masculin n'y change rien, cela reste le neutre. Parler du président, c'est utiliser le genre neutre, et non le masculin. Je vous prie de revenir aux bases de la langue française. On en arrive à la défigurer et à la rendre illisible !
Mme Esther Benbassa. - A cause des femmes ?
M. Christian Cointat. - Non, parce que l'on ne veut pas accepter ce qui est, le neutre.
Mme Esther Benbassa. - Monsieur le président, vous qui êtes un éminent linguiste, expliquez-nous... J'ai enseigné le français à l'école pendant quinze ans, je connais « elle » et « il », pas le neutre.
M. Jean-Pierre Sueur, président. - Monsieur Cointat, vous connaissez l'Aiglon, d'Edmond Rostand. A son précepteur autrichien qui lui reproche d'avoir oublié que le neutre seul serait correct pour la France, le héros répond : « je n'aime pas beaucoup que la France soit neutre »... Il est vrai qu'il n'y a pas de neutre en français. Le masculin est utilisé pour la conjonction des deux genres, sans constituer un neutre comme il y en a dans d'autres langues.
M. Christian Cointat. - C'est un neutre quand même, qui n'est pas que masculin.
M. René Garrec. - En 1942, j'avais été envoyé photographier un bateau allemand, dans la Presqu'île, là où se situe l'Ecole navale - il fallait renseigner la Résistance. Le breton qui me recevait m'a dit : « tu vas photographier la belle bateau ? » En effet, pour les Britanniques, tous les navires de guerre sont féminins.
M. Jean-Pierre Sueur, président. - Ce matin, j'ai fait retaper une lettre qui commençait par « madame la maire » parce que la destinataire refuse qu'on l'appelle autrement que « madame le maire ». De même, je connais une recteur qui refuse obstinément qu'on l'appelle « madame la rectrice ». C'est un sujet sur lequel nous pourrions un jour travailler. Pour féminiser tous les noms dans tous les codes, nous aurions à élaborer quelques dizaines de milliers d'amendements. On ne peut modifier le droit positif par petits morceaux. Je préconise d'en rester à la cohérence actuelle, quitte à édicter un jour une loi générale sur le sujet.
M. Alain Richard, rapporteur. - Il serait plus sage d'éviter une attitude crispée sur ces questions. On peut être en désaccord avec quelqu'un sans pour autant dénaturer sa pensée. Introduire dans notre droit des formulations assurant l'équité entre les représentants des deux genres est une idée qui a tous ses mérites. Toutefois, ceux qui la défendent feraient mieux de regarder comment la mettre en oeuvre dans l'ensemble des codes : ce n'est pas si simple. De plus, ce n'est pas tout à fait l'objet d'une réunion de travail de la commission des lois entre 14h00 et 15h00, alors que l'on examine des amendements extérieurs sur le CNEN.
Mme Hélène Lipietz. - Monsieur le président, vous nous aviez annoncé un colloque sur l'écriture de la loi. Voilà un beau sujet de réflexion...
M. Jean-Pierre Sueur, président. - En effet, vous pourrez l'enrichir d'une communication.
M. Christian Cointat. - Le Petit Larousse donne la définition suivante du neutre : « se dit du genre grammatical qui, dans une classification à trois genres, s'oppose au masculin et au féminin ».
M. Jean-Pierre Sueur, président. - Oui, mais il ne dit pas qu'une telle classification à trois genres existe en français.
Mme Esther Benbassa. - Le neutre, c'est « on », pas « il ».
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 4, ainsi qu'à l'amendement n° 10 rectifié.
Mme Hélène Lipietz. - L'amendement n° 15 rectifié bis transforme en obligation la possibilité qu'a le président d'une assemblée parlementaire de saisir le CNEN d'une proposition de loi ou d'un amendement déposé par l'un de ses membres. Ainsi, nul risque de passer à côté d'une saisine nécessaire. Toutefois, afin d'éviter l'engorgement du CNEN, je propose que demeure un filtre par l'auteur de la proposition de loi ou de l'amendement.
M. Alain Richard, rapporteur. - Cette formulation ne me paraît pas opportune. Dans la pratique, neuf amendements sur dix - de procédure ou de précision par exemple - ne relèvent pas d'une procédure d'examen du contenu normatif. Dans les autres cas, leur auteur est convaincu qu'il ne pose pas de problème de complexité : lui donner un droit de veto sur la saisine du CNEN revient à la rendre ineffective. L'esprit du texte consiste à donner cette faculté au président d'une assemblée : l'auteur de l'amendement, qui pourra toujours s'y opposer, aura la charge de la preuve contre lui.
M. Jean-Pierre Sueur, président. - Je suis attaché à la liberté des assemblées parlementaires et de leur président. Imposer la saisine du CNEN dans tous les cas, y compris les moins importants, alourdirait exagérément la procédure. Le président doit pouvoir saisir le CNEN lorsqu'il y a vraiment un problème, et si l'auteur le demande, je le vois mal s'y opposer.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 15 rectifié bis.
M. Alain Richard, rapporteur. - Mme Goulet s'est montrée préoccupée du délai d'examen des amendements parlementaires. Je viens de lui apporter une solution que la commission a retenue. Elle en tire comme conséquence que le CNEN ne devrait pas être saisi des amendements aux projets de loi de finances ou de financement de la sécurité sociale. Il ne serait pourtant pas difficile de trouver des exemples d'alourdissement normatif substantiel provoqués par de tels amendements.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 7.
M. Alain Richard, rapporteur. - L'amendement n° 2 rectifié procède de l'idée selon laquelle les présidents de groupes ne sauraient être mentionnés dès lors que leur existence émane des règlements des assemblées. Comme ils y figurent depuis près d'un siècle et demi, ils font partie du droit public français. Ils ont en outre une responsabilité dans la vie parlementaire lorsqu'il s'agit d'enclencher une procédure administrative comme celle dont nous discutons. Je ne vois donc pas d'obstacle à ce qu'une loi ordinaire les mentionne, ni de raison de revenir sur cet élargissement des possibilités de saisine du CNEN.
M. René Garrec. - Je suis convaincu par les arguments du rapporteur.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 2 rectifié.
M. Jean-Pierre Sueur, président. - L'amendement n° 11 rectifié de Mme Lipietz reprend le combat de la parité à front renversé, puisqu'il supprime un titre féminisé introduit par notre commission dans un souci de cohérence.
M. Alain Richard, rapporteur. - Mme Lipietz a semblé réceptive au raisonnement que j'ai essayé de soutenir tout à l'heure. Je soutiens donc cet amendement.
Mme Hélène Lipietz. - Il vise simplement à souligner une incohérence.
M. Alain Richard, rapporteur. - Vous êtes satisfaite à regret...
Mme Jacqueline Gourault. - Il faudra l'expliquer.
La commission émet un avis favorable à l'amendement n° 11 rectifié et un avis défavorable à l'amendement n° 20 rectifié.
M. Alain Richard, rapporteur. - L'amendement n° 6 de Mme Goulet, qui élargit la saisine du CNEN à toute personne ayant intérêt à agir, serait inflationniste...
M. Jean-Pierre Sueur, président. - On n'en sortirait plus.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 6.
M. Alain Richard, rapporteur. - L'amendement n° 5 de Mme Goulet est judicieux. Le CNEN examinera les requêtes et dira s'il est opportun de revoir la réglementation et de quelle façon. D'autres familles d'intérêts défendront inévitablement la réglementation en vigueur. L'idée qu'une saisine soit rendue publique pour que chacun puisse présenter ses arguments me paraît juste. J'invite toutefois Mme Goulet à simplifier son amendement en écrivant que « les saisines du conseil national mentionnées aux deux alinéas précédents donnent lieu à publication ».
La commission émet un avis favorable à l'amendement n° 5, sous réserve de sa rectification.
Mme Hélène Lipietz. - Les avis du CNEN seraient particulièrement pertinents si, dans un but de simplification du droit, ils précisaient, à l'occasion de l'examen d'une norme, quelle autre norme devrait être supprimée. C'est ce à quoi remédie l'amendement n° 19 rectifié.
M. Alain Richard, rapporteur. - Je partage la réflexion de Mme Lipietz. Son amendement ne trouvant à s'appliquer qu'aux dispositions déjà en vigueur, je lui propose la rédaction suivante : « l'avis rendu par le conseil national sur des dispositions réglementaires en vigueur propose des modalités de simplification... ».
La lecture de cet amendement m'a fait prendre conscience que nous n'avions pas débattu de la question de savoir si l'on pouvait toucher au fondement législatif des normes en vigueur. Le bon sens conduirait pourtant à répondre par l'affirmative. Je ne me suis pas senti en droit de proposer au dernier moment un amendement sur cette question clé : nous l'évoquerons en séance cet après-midi.
M. Jean-Pierre Sueur, président. - Si pouvoir de proposition il y avait, il s'adresserait au Gouvernement et au Parlement.
M. René Vandierendonck. - Selon l'avis du Conseil d'Etat remis à notre collègue Eric Doligé, il n'y a pas d'obstacle à demander à un organisme du type CNEN un avis sur des textes de lois à condition que ce soit bien le Parlement qui statue. Alain Lambert a en outre indiqué que la procédure de déclassement de l'article 41 de la Constitution serait bien utile pour réaliser un tri dans le droit positif.
M. Alain Richard, rapporteur. - Je relisais hier le rapport public du Conseil d'Etat de 2006, en partie à l'origine de la révision constitutionnelle de 2008, et qui émettait un cri d'alerte sur la prolifération législative. Il y était fait mention de la désuétude ayant frappé la procédure de déclassement de l'article 41 : celle-ci n'est invoquée devant le Conseil constitutionnel qu'une ou deux fois par an, plus pour des considérations d'opportunité que de recherche de pureté de la loi. A l'évidence, cette disposition n'est pas très populaire au Parlement. Je suis d'autant moins enclin à formuler immédiatement une proposition sur la reprise du dispositif législatif en vigueur qu'il faudrait imaginer un mode de communication qui adresse cette recommandation au Gouvernement et au Parlement.
M. Jean-Pierre Sueur, président. - Nous pouvons espérer que la navette va prospérer. Il serait étonnant que l'Assemblée nationale ne se saisisse pas d'un texte de cette nature, fruit des Etats généraux de la démocratie territoriale.
Mme Jacqueline Gourault. - L'alinéa 32 ne pourrait-il être modifié ?
M. Alain Richard, rapporteur. - Si nous précisons que le droit de proposer de revenir sur le droit en vigueur concerne le domaine législatif, ce qui paraît relever du bon sens, il faudra non seulement modifier tous les éléments du IV, mais aussi voir les conséquences que l'on en tire sur la procédure.
Mme Hélène Lipietz. - Dois-je garder cet aspect des choses pour que le Gouvernement entende un amendement d'appel ?
M. Jean-Pierre Sueur, président. - Bien sûr. Ce sera l'occasion pour le rapporteur et le Gouvernement de vous fournir des précisions. Soulignons l'intérêt de l'amendement et saluons l'esprit dans lequel il est présenté.
M. Alain Richard, rapporteur. - Je propose toutefois à Mme Lipietz de rectifier son amendement en ce sens : « L'avis rendu par le conseil national sur les dispositions réglementaires en vigueur propose des modalités de simplification de ces dispositions et, le cas échéant, l'abrogation de normes devenues obsolètes ».
La commission émet un avis favorable à l'amendement n° 19 rectifié, sous réserve de sa rectification.
M. Alain Richard, rapporteur. - La commission a déjà adopté la réduction d'office à trois jours du délai d'examen des amendements parlementaires. L'amendement n° 8 n'a donc plus d'utilité.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 8.
M. Alain Richard, rapporteur. - L'amendement n° 3 rectifié appelle notre attention sur un point qui n'a pas été débattu. Il y a en réalité au sein du CNEN des représentants de tous les auteurs de textes, parlementaires ou fonctionnaires d'Etat issus des départements ministériels producteurs de normes, ce qui n'est pas sans susciter des conflits d'intérêt : je les vois difficilement s'opposer à un projet de texte, même trop compliqué, émanant de leur propre administration. La mention du Premier ministre dans l'hypothèse d'une deuxième délibération ne vise pas à changer l'équilibre de la commission, mais à s'assurer que le département ministériel auteur du texte a suffisamment tenu compte des objections du CNEN. Cela n'affecterait pas le pluralisme du CNEN. Alain Lambert l'a souligné, la capacité de dialogue et de prise en compte des exigences de simplification varie selon les ministères - certains n'ont d'ailleurs presque plus personne pour écrire un texte en français...
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 3 rectifié.
Mme Hélène Lipietz. - L'amendement n° 18 rectifié vise à désigner, au sein du CNEN, une formation restreinte. L'argument selon lequel seuls les hommes seront motivés pour travailler au sein du CNEN ne me semble plus recevable. Nous arriverions ici à la parité.
M. Alain Richard, rapporteur. - J'attire l'attention sur la complexité de votre pensée. Etes-vous absolument certaine - ce n'est pas mon cas - que les femmes sont plus disposées que les hommes à travailler ?
Mme Hélène Lipietz. - Non, je ne pense pas que les femmes travaillent plus que les hommes.
M. Alain Richard, rapporteur. - S'il s'agit par exemple de représenter des collectivités territoriales détentrices d'équipements sportifs désireuses d'éviter des sujétions sources de charges budgétaires insupportables, on fera alors appel à des vice-présidents de conseil général, à des maires adjoints chargés des sports, et il est certain qu'il y aura au moins autant de femmes que d'hommes.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 18 rectifié.
La commission adopte les avis suivants :
Examen des amendements du rapporteur
Examen des amendements extérieurs
Mardi 29 janvier 2013
- Présidence de M. Jean-Pierre Sueur, président -Exercice par les élus locaux de leur mandat - Examen des amendements au texte de la commission
La commission procède à l'examen des amendements sur le texte n° 281 (2012-2013) de la commission sur la proposition de loi n° 120 (2012-2013) visant à faciliter l'exercice, par les élus locaux, de leur mandat.
M. Jean-Pierre Sueur, président. - Tâchons d'égaler aujourd'hui la qualité de la discussion que nous avons eue hier, dans laquelle certains ont vu un modèle de débat parlementaire. M. Saugey va nous présenter les amendements extérieurs sur une proposition de loi qui suscite un réel intérêt, jusque dans la France profonde.
M. Jean-Jacques Hyest. - En ce moment, c'est surtout le cumul des mandats qui l'intéresse...
AMENDEMENTS DU RAPPORTEUR
M. Bernard Saugey, rapporteur. - Les amendements n°s 47 et 48 sont rédactionnels.
Les amendements n os 47 et 48 sont adoptés.
AMENDEMENTS EXTÉRIEURS
Article additionnel avant l'article 1er
M. Bernard Saugey, rapporteur. - M. Collombat avait déposé un amendement très volumineux, qu'il a fractionné en quatre morceaux : l'amendement 2 rectifié est l'un de ces morceaux. J'en demande le retrait.
M. Jean-Pierre Sueur, président. - Nous avions déjà donné un avis défavorable.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n°2 rectifié.
Mme Hélène Lipietz. - L'amendement n° 40 crée, pour les chapitres pertinents du code général des collectivités territoriales, le titre à valeur symbolique de « statut de l'élu ».
M. Jean-Pierre Sueur, président. - L'amendement précédent, identique, a été repoussé.
M. Bernard Saugey, rapporteur. - Je demande le retrait de cet amendement.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n°40.
M. Bernard Saugey, rapporteur. - L'amendement n° 42, qui étend le dispositif du crédit d'heures aux communes de moins de 3 500 habitants, est déjà satisfait par le texte de la commission en son article 2 ter.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n°42.
M. Bernard Saugey, rapporteur. - Les amendements 18 rectifié et 43 sont identiques. Très symboliques, ils suppriment le principe de gratuité des fonctions municipales institué en 1831. Cette suppression, proposée plusieurs fois, a toujours été refusée, pour ne pas engager une professionnalisation de la fonction d'élu. Avis défavorable.
M. Jean-Pierre Michel. - Suivons l'avis du rapporteur, pour ne pas donner lieu à des articles fielleux dans la presse.
M. Alain Richard. - Ce même objectif me conduit à adopter l'avis opposé. Plus qu'un symbole, c'est une question de cohérence. L'ensemble des dispositions relatives à l'indemnisation des élus démontre de façon caractérisée que ces fonctions ne sont pas gratuites. Les indemnités se sont généralisées, et constituent au sens fiscal des rémunérations. Maintenir un texte qui a perdu son sens puisqu'il ne correspond plus à la réalité du statut des élus nous expose à voir publier un article dénonçant notre hypocrisie.
M. Christophe Béchu. - Je suis de l'avis de notre rapporteur sur ce point. Nous ne devons pas examiner le principe de gratuité à l'aune des grands élus, mais en pensant aux quelque cinq cent mille élus des trente-six mille communes de France : pour 95% d'entre eux, la gratuité des fonctions électives est la règle. Ce n'est que dans les communes de plus de 100 000 habitants que les conseillers municipaux bénéficient d'une indemnité. En-dessous de ce seuil, ce n'est possible que par une mutualisation des indemnités dues aux maires et aux adjoints.
La commission émet un avis défavorable aux amendements n° 18 rectifié et 43.
M. Bernard Saugey, rapporteur. - L'amendement 44 de M. Collombat réunit des problématiques différentes. Sur la prise illégale d'intérêt, je suis favorable à ce qu'il propose : j'avais travaillé avec lui à une proposition de loi, qui a été votée à l'unanimité par le Sénat, mais n'a pas été examinée par l'Assemblée nationale - pas davantage que la proposition de loi que Mme des Esgaux et moi-même avions déposée en 2011 sur l'exercice du mandat local, et qui avait aussi été votée à l'unanimité par le Sénat ! Mais il y associe d'autres sujets, sur lesquels je suis en désaccord, en particulier la légalisation de la décision de la cour d'appel de Douai relaxant un maire qui avait giflé un adolescent l'ayant provoqué. Retrait ou avis défavorable.
M. Alain Anziani. - Je comprends l'objectif de la clarification du délit de prise illégale d'intérêt. Mais c'est illusoire ! Remplacer « un intérêt quelconque » par un « intérêt personnel distinct de l'intérêt général » n'aura guère d'impact du point de vue judiciaire, mais provoquera, après les critiques auxquelles le travail de M. Saugey avait donné lieu, une nouvelle discussion sur la place publique : faut-il vraiment, pour une si faible avancée, ouvrir cette porte ?
M. Jean-Jacques Hyest. - Nous avons voté cette proposition de loi à l'unanimité, après avoir eu ce débat. Puisque l'Assemblée nationale ne l'examine pas, revenons à la charge dans ce texte. Sur la responsabilité pénale des décideurs publics, nous avons dû nous y reprendre à deux fois, avec la loi Fauchon, pour faire évoluer la jurisprudence.
M. Simon Sutour. - Le problème se pose de façon totalement différente depuis que le Conseil constitutionnel a supprimé, il y a quelques mois, l'inégibilité automatique en répondant à une question prioritaire de constitutionalité.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n°44.
M. Bernard Saugey, rapporteur. - L'amendement n°1 rectifié reprend la proposition de loi que j'avais déposée, et qui avait été votée à l'unanimité. Il s'agit de faire en sorte que ces dispositions soient examinées par l'Assemblée nationale.
La commission émet un avis favorable à l'amendement n°1 rectifié.
M. Bernard Saugey, rapporteur. - L'amendement n° 9 réintroduit la faculté pour le conseil municipal des communes de moins de 3 500 habitants de fixer l'indemnité du maire en-deçà du taux maximal fixé par la loi, soit le contraire de ce que nous avons voté en commission la semaine dernière. Avis défavorable.
M. René Garrec. - Dans certaines petites communes, le budget est parfois très limité...
M. Jean-Pierre Sueur, président. - Le maire peut - comme tout citoyen, d'ailleurs - faire un don à la commune.
M. René Garrec. - Plus qu'un don, c'est un abandon...
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n°9.
Mme Hélène Lipietz. - Avec l'amendement n° 33, j'enfonce le clou.
M. Bernard Saugey. - Il est déjà satisfait.
M. Jean-Pierre Sueur, président. - Il est en effet superflu : l'indicatif exprime une obligation.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n°33.
Article additionnel après l'article 1er
M. Antoine Lefèvre. - L'amendement n° 19 rectifié bis autorise les conseils municipaux des communes de plus de 10 000 habitants à voter une majoration indemnitaire de 50% aux maires qui ont cessé leur activité professionnelle pour se consacrer à leur mandat.
M. Jean-Pierre Sueur, président. - Je ne sais pas pourquoi cet amendement n'a pas été censuré, au même titre que quelques dizaines d'autres, en vertu de l'article 40... Parce que l'enveloppe reste constante, sans doute.
M. Bernard Saugey, rapporteur. - Avis défavorable.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n°19 rectifié bis.
M. Antoine Lefèvre. - L'amendement n° 21 rectifié bis propose que, dans l'attente d'une refonte des critères justifiant cette faculté de procéder à ces majorations, une disposition trop générale soit supprimée. C'est un amendement d'appel.
M. Alain Richard. - La question des conditions du passage à taux plein des indemnités des maires des communes d'une certaine taille est centrale, notamment parce que le coût qu'il engendre risque d'être difficilement supportable pour les petites communes. Il existe déjà un dispositif de mutualisation qui porte sur le fonds de compensation des pertes de rémunération en fin de mandat. Il serait dommage de ne pas traiter cette question à l'occasion de ce texte : ne pourrait-on pas profiter de la navette pour chercher des solutions créatives ?
M. Bernard Saugey, rapporteur. - Plus de huit cents communes ont perçu la dotation de solidarité urbaine en 2012 : ce n'est donc plus une exception. Avis favorable.
La commission émet un avis favorable à l'amendement n°21 rectifié bis.
M. Bernard Saugey, rapporteur. - L'amendement n° 32 prévoit une majoration de 50% au plus de l'indemnité allouée aux maires des communes de moins de 10 000 habitants qui ont suspendu totalement ou partiellement leur activité professionnelle ; dans ce dernier cas la majoration est calculée au prorata du temps non travaillé. Cette majoration s'inscrivant dans la limite de l'enveloppe indemnitaire, ce dispositif pourrait créer des tensions au sein de l'assemblée délibérante. Avis défavorable.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n°32.
M. Bernard Saugey, rapporteur. - La protection que propose d'accorder l'amendement n° 5 aux candidats à une élection locale est beaucoup trop large, et risquerait de se retourner contre leur intérêt. Elle consiste à interdire le prononcé de toute mesure disciplinaire ou licenciement à l'encontre d'un candidat à une élection régionale, cantonale ou municipale. C'est un peu fort de café !
M. Jean-Pierre Sueur, président. - Certains personnages ne manqueraient pas d'être candidats...
M. Alain Richard. - Il existe un précédent : l'escroc Flatto-Sharon avait réussi, dans les années 1980, à se faire élire à la Knesset, et à gagner ainsi quatre ou cinq ans d'immunité...
M. Christian Favier. - La mesure mérite d'être examinée sérieusement. Il arrive que des salariés qui se présentent à des élections subissent de la part de leur employeur des mesures de rétorsion. Il faut les protéger.
M. Bernard Saugey, rapporteur. - Nous avons voté la semaine dernière l'assimilation d'un élu à un salarié protégé : c'est un pas en avant !
M. Alain Anziani. - La personne qui fait l'objet d'une mesure disciplinaire ou d'un licenciement peut toujours saisir le conseil des prudhommes, qui vérifiera s'il existe un motif réel et sérieux.
M. Christophe Béchu. - On ne peut pas donner un avis favorable à un amendement qui est une véritable incitation à déclarer une candidature pour d'autres raisons que des raisons politiques. Je trouve déjà discutable d'avoir assimilé les élus à des délégués syndicaux, mais si nous décidions de surcroît de considérer tout candidat comme un salarié protégé, que diront toutes celles et tous ceux qui assument véritablement les responsabilités des salariés protégés dans l'entreprise ?
M. Jean-Pierre Sueur, président. - C'est vrai qu'il y a des cas où une protection accrue serait nécessaire, mais on ne peut pas non plus aboutir à un détournement de procédure.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n°5.
M. Bernard Saugey, rapporteur. - L'amendement n° 6 est satisfait par le texte de la commission qui prévoit dans l'article 1er bis le reversement au budget de la collectivité de la part écrêtée des indemnités. Retrait ou avis défavorable. Il y est également proposé la création d'un fonds de péréquation alimenté par les écrêtements, ce qui semble totalement inadapté au vu des sommes en question. Je préconise le même vote pour l'amendement n° 7.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n°6 et à l'amendement n°7.
Article additionnel après l'article 2 ter
M. Philippe Kaltenbach. - Dans les communes de plus de 3 500 habitants, les élus disposent d'une autorisation d'absence pour exercer leur mandat, mais cette absence est à leur charge, puisqu'elle n'est pas rémunérée. L'amendement n° 13 prévoit donc qu'ils puissent conserver le bénéfice de cette rémunération à hauteur de 25%. Ce taux correspond à un nombre d'heures limité : un peu plus de deux heures par trimestre pour les communes de moins de 10 000 habitants, de quatre heures pour les communes moyennes, et de huit heures pour les communes les plus importantes. L'objectif est d'encourager les salariés à se présenter et à consacrer un peu de temps à la vie locale.
M. Bernard Saugey, rapporteur. - Le principe est contestable. Il semble excessif d'attribuer à l'employeur la responsabilité financière d'une garantie bénéficiant à un salarié qui a librement choisi d'exercer un mandat, mandat qui n'a pas de lien avec son activité professionnelle. Avis défavorable.
M. Christophe Béchu. - Je partage l'avis du rapporteur. Cet amendement montre qu'il faudrait un texte sur le statut d'élu. Il existe un mécanisme d'indemnisation des entreprises pour une absence pour cause d'intérêt général, lorsqu'un salarié est pompier volontaire. Une convention assure le reversement d'une partie du coût du salaire par la collectivité. Les élus locaux pourraient être assimilés à des sapeurs-pompiers volontaires dans l'exercice d'une mission, afin que l'entreprise n'ait pas à payer seule, mais bénéficie de l'aide de la commune qui requiert le salarié. Nous pourrions faire oeuvre législative utile et pluraliste sur cette question.
Mme Cécile Cukierman. - L'amendement pose la question du crédit d'heures et de la réalité de son utilisation. Très peu d'heures sont concernées. Peut-être faut-il changer notre regard : il existe aussi des employeurs qui sont très heureux d'avoir des élus au sein de leurs équipes. Est-ce un coût ou un facteur de plus-value ? Nous sommes favorables à l'amendement.
M. Alain Richard. - Il nous reste du travail sur ce sujet ; nous n'échapperons pas à la mutualisation. Cet amendement pose un problème constitutionnel : il y aura un jour ou l'autre une question prioritaire de constitutionalité posée par un employeur, au nom du principe d'égalité devant les charges publiques. Si, comme l'évoque M. Béchu de façon pertinente, l'entreprise perçoit une compensation, c'est différent. Le texte de M. Kaltenbach évite habilement la censure de l'article 40, alors qu'il génère une réduction, à due concurrence de la charge nouvelle, de l'impôt sur les sociétés. Autrement, et notamment pour la mutualisation, nous avons besoin de l'accord du gouvernement. Il faut aussi mettre un ticket modérateur à la charge de la commune, de l'ordre de 15% de la charge complémentaire d'indemnisation du salarié.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n°13.
M. Bernard Saugey, rapporteur. - L'amendement n° 31 propose d'étendre le statut de salarié protégé, ainsi que le droit à la suspension du contrat de travail et à la réintégration professionnelle, aux adjoints au maire des communes de mille habitants et plus. La réalité des fonctions d'adjoint dans ces communes le justifie-t-elle ? Rien n'est moins sûr. Attendons la mise en oeuvre du premier pas que nous avons fait, avant d'en faire un second. Avis défavorable, sans préjudice de l'avenir.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n°31.
M. Jean-Pierre Sueur, président. - L'amendement n° 35 de Mme Lipietz tombe. Il est contraire à ce que la commission a déjà voté.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n°35.
M. Antoine Lefèvre. - L'amendement n° 22 rectifié propose d'étendre le droit à suspension du contrat de travail aux présidents et vice-présidents des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre de 10 000 habitants et plus.
M. Bernard Saugey, rapporteur. - Cet amendement est déjà satisfait par le régime applicable aux exécutifs des EPCI : il s'agit des articles L. 5214-8, L. 5215-16, L. 5216-4 et L. 5217-8 du code général des collectivités territoriales.
Article additionnel après l'article 3
Mme Hélène Lipietz. - L'amendement n° 36 étend le droit à la formation professionnelle et à un bilan de compétences en fin de mandat aux adjoints des petites communes.
M. Bernard Saugey, rapporteur. - Il s'agit d'ouvrir ce droit à l'ensemble des adjoints aux maires, quelle que soit la population de la commune. Cet amendement est partiellement satisfait par ce qu'a déjà voté la commission, qui a étendu le dispositif de la suspension du contrat de travail aux adjoints des communes de 10.000 habitants. Elle a en outre voté le principe d'un droit individuel à la formation ouvert à l'ensemble des membres des assemblées délibérantes. Avis défavorable.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n°36.
M. Jean-Pierre Sueur, président. - L'amendement n° 37 est un amendement de repli.
M. Bernard Saugey, rapporteur. - J'y suis favorable.
La commission émet un avis favorable à l'amendement n°37.
M. Christian Favier. - L'amendement n° 25 modifie le code du travail en y ajoutant une dix-huitième catégorie de bénéficiaires du statut de salarié protégé : les conseillers municipaux, les conseilles généraux et les conseillers régionaux.
M. Bernard Saugey. - Certes, nous avons assimilé les élus à des salariés protégés, mais modifier ainsi le code du travail pourrait soulever des difficultés. Cela risque de tout faire échouer. Je rappelle aussi que dans le texte de la commission, la protection bénéficie aux élus titulaires du droit de suspension du contrat de travail et non à l'ensemble des membres des assemblées délibérantes. Retrait.
M. Jean-Pierre Sueur, président. - Si l'on charge trop la barque, elle peut couler...
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n°25.
M. Antoine Lefèvre. - L'amendement n° 23 rectifié maintient le droit à réintégration au profit des parlementaires jusqu'à l'expiration de deux mandats consécutifs.
M. Bernard Saugey, rapporteur. - Cette proposition a un bien-fondé incontestable, mais elle excède l'objet de la proposition de loi.
M. Jean-Pierre Sueur, président. - C'est une sorte de cavalier.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n°23 rectifié.
M. Christian Favier. - Le droit individuel à la formation a été étendu aux élus communautaires, mais ceux-ci sont déjà concernés en tant que conseillers municipaux. Les établissements publics de coopération intercommunale n'étant pas une nouvelle strate de collectivité territoriale, il n'y a pas lieu de redoubler le droit individuel à la formation.
M. Bernard Saugey, rapporteur. - Le trop est parfois l'ennemi du bien... Le droit à la formation relève de la seule décision de l'élu. C'est lui qui le finance, par une cotisation assise sur ses indemnités. S'il veut cotiser deux fois, laissons-le libre de le faire ! Avis défavorable.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n°27.
M. Christophe Béchu. - J'avais annoncé que je déposerais un amendement. Le nouveau mécanisme du droit à la formation pose en effet plusieurs problèmes. Il porte atteinte à la règle de l'annualité budgétaire, qui est l'un des grands principes de la loi organique relative aux lois de finances. L'obligation de reporter les dépenses de formation non utilisées consacre ce type de dépenses à une place qui ne me semble pas correspondre aux priorités de dépenses des collectivités locales. Dans le contexte actuel des finances publiques, où une diminution de la DGF est annoncée, je ne vois pas comment nous pourrions majorer une obligation de dépense pesant sur l'ensemble des collectivités. Le mécanisme de formation tel qu'il existe mérite sans doute d'être ajusté, mais cet article modifie le droit en profondeur et représente une charge qui me paraît inacceptable.
M. Bernard Saugey, rapporteur. - Nous avons déjà eu ce débat. Le droit à la formation actuel figure dans le code général des collectivités territoriales. Mais pour les petites communes, un montant de 2% ne suffira pas à organiser une formation chaque année. Avis défavorable.
M. Christophe Béchu. - Ce chiffre ne peut être inférieur à 2%, mais il peut être supérieur, dans le cas d'un besoin particulier, et cela permet de ne pas contrevenir au principe de l'annualité budgétaire.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n°16.
M. Christian Favier. - Les amendements n°s28 et 38 proposent de revenir à 3%.
M. Bernard Saugey. - Avis défavorable, car nous en avons décidé autrement en commission.
La commission émet un avis défavorable aux amendements n°s 28 et 38.
M. Christophe Béchu. - L'amendement n° 17 préserve le mécanisme que la commission a adopté pour les communes, mais en reste au droit actuel pour les départements et les régions, car leurs budgets permettent de dégager les sommes éventuellement nécessaires à la formation : le report obligatoire n'est pas nécessaire.
M. Bernard Saugey. - Avis défavorable, pour les mêmes raisons que précédemment.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n°17.
Article additionnel après l'article 6
M. Bernard Saugey, rapporteur. - L'amendement n° 4, quel que soit son bien-fondé, dépasse l'objet de la proposition de loi, puisqu'il concerne le fonctionnement de la collectivité. Je m'en remets à la sagesse de la commission.
M. Jean-René Lecerf. - Cet amendement ne vient peut-être pas à point, mais il pose de véritables problèmes. Les élus d'opposition sont dépourvus de pouvoirs d'information ou même d'expression. La loi « démocratie de proximité » a donné la possibilité à l'opposition de s'exprimer dans les journaux régionaux, départementaux, municipaux. Le résultat obtenu est que l'expression se fait au prorata du nombre d'élus, et que c'est donc la majorité qui en profite le plus !
M. Jean-Pierre Sueur, président. - C'est en effet une littérature assez assommante : l'autosatisfaction y est parfois insupportable.
M. Alain Anziani. - Rien ne me choque dans l'amendement de M. Collombat. Mais il ne faut pas se précipiter : la navette peut nous permettre d'y revenir.
Mme Hélène Lipietz. - J'ai souvent dit l'attachement des élus écologistes aux droits des élus de l'opposition. Mais ce problème mérite une réflexion sur un statut spécifique dans une proposition de loi distincte.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n°4.
M. Jean-Pierre Sueur, président. - Les amendements n°s 8, 15, 24, 29 et 39 portent sur le même sujet.
M. Bernard Saugey, rapporteur. - Ces amendements visent à régler la situation des collaborateurs d'élus locaux ou nationaux en les soumettant à une convention collective de branche unique. Cela excède l'objet du présent texte.
Le cadre d'emploi des assistants parlementaires, qui sont des salariés de droit privé, est fixé par le Bureau de l'Assemblée nationale ou du Sénat, chacun en ce qui le concerne, tout comme l'est le statut des fonctionnaires, afin de respecter l'autonomie des assemblées parlementaires. Les règles ainsi fixées au Sénat sont plus favorables aux assistants que celles du code du travail : minima salariaux, temps de travail minimum, portabilité de l'ancienneté, treizième mois, couverture prévoyance et retraite, épargne salariale... Elles s'imposent à tous les sénateurs, et produisent ainsi les effets d'une convention collective.
La situation des collaborateurs de groupes d'élus dans les collectivités territoriales est régie par le code général des collectivités territoriales et la loi de 1984 relative à la fonction publique territoriale. Ce sont des contractuels de droit public. Ils sont rémunérés par le budget de la collectivité, et leurs conditions d'emploi sont fixées par l'élu responsable du groupe d'élus. Aux termes de l'article 110-1 de la loi du 26 janvier 1984, ils sont recrutés sur des contrats de trois ans au maximum, renouvelables dans la limite du terme du mandat de l'assemblée délibérante concernée. Conformément au droit commun des contrats de droit public, depuis la loi du 12 mars 2012, le contrat renouvelé à l'issue d'une période de six ans ne peut l'être que pour une durée indéterminée.
Les collaborateurs de cabinet, contractuels de droit public, sont recrutés par l'autorité territoriale selon les modalités fixées par l'article 110 de la loi du 26 janvier 1984, complété par un décret du 16 décembre 1987 qui détermine leurs modalités de rémunération et leur effectif. L'autorité territoriale décide des conditions et des modalités d'exécution de leur service.
La convention proposée par ces amendements s'appliquerait à des personnels relevant de statuts différents. Elle supposerait que les élus employeurs adhèrent à une organisation patronale ou en constituent une. Elle soulève enfin la question du respect du principe constitutionnel de la séparation des pouvoirs. Avis défavorable.
M. Jean-Pierre Sueur, président. - Ce sont de vrais sujets. Nous sommes d'ailleurs en contact avec les syndicats et associations représentatifs des collaborateurs parlementaires au Sénat. Il y a certainement un travail à faire sur ce sujet, mais ce n'est pas l'objet de ce texte, qui vise les élus. Il s'agit d'un cavalier.
M. Alain Anziani. - Nos collaborateurs ne gagneraient pas à ce que leur régime soit aligné sur celui des collectivités territoriales.
M. Christophe Béchu. - Avec les dispositions pour le recul de la précarité dans la fonction publique, les collaborateurs des élus minoritaires dans les collectivités locales deviennent fonctionnaires de plein droit et sont donc intégrés dans la fonction publique au terme de quatre ans. Soit on crée un statut qui les sort du droit commun, soit on garde le système actuel, mais sans le doubler d'un tel dispositif.
La commission émet un avis défavorable aux amendements n°s 8, 15, 24, 29 et 39.
Examen des amendements du rapporteur
Examen des amendements extérieurs
Exercice par les élus locaux de leur mandat - Suite de l'examen des amendements au texte de la commission
Au cours d'une seconde séance qui s'est tenue dans l'après-midi, la commission procède à la suite de l'examen des amendements sur le texte n° 281 (2012-2013) sur la proposition de loi n° 120 (2012-2013) visant à faciliter l'exercice, par les élus locaux, de leur mandat.
Examen des amendements extérieurs
M. Jean-Pierre Sueur, président. - Notre commission est comme toujours très sollicitée. Nous sommes saisis de quatre amendements du Gouvernement. J'ai dit à Madame la Ministre qu'il était dommageable qu'ils arrivent tardivement. La ministre s'en est excusée publiquement, ce qui est tout à son honneur, car ce n'est pas toujours le cas.
M. Bernard Saugey, rapporteur. - Il y a plusieurs points dans cet amendement.
Il fixe de droit le montant de l'indemnité du maire au taux maximal dans toutes les communes, quelle que soit leur population, en ouvrant au conseil municipal la faculté de fixer un montant indemnitaire en-deçà de ce taux maximal. Cet amendement vise donc à généraliser ce dispositif.
Il tire les conséquences de ce principe sur la compétence du conseil municipal désormais directement compétent pour les seuls adjoints et les membres de la délégation spéciale faisant fonction d'adjoint.
L'amendement prévoit également une majoration automatique de 10 % de l'indemnité du maire qui cesse d'exercer son activité professionnelle. Il la prévoit aussi dans les communes dont la population est comprise entre 10 000 et 99 999 habitants.
Sur le premier point, l'amendement du Gouvernement rejoint le souci de nos collègues Jean-Claude Peyronnet et Philippe Dallier.
Parallèlement, l'amendement prévoit le versement d'indemnités aux membres du conseil de la communauté de communes. Sur ce point, il est satisfait puisque cette harmonisation est déjà prévue par le II de l'article 1er de la proposition de loi.
L'objet de l'amendement indique que ces dispositions entreront en vigueur à compter du prochain renouvellement des conseils municipaux sans prévoir de dispositions spécifiques.
J'estime que cet amendement détourne l'esprit initial de la proposition de loi qui vise à s'occuper en priorité des petites communes.
M. Jean-Pierre Sueur, président. - Il existe une tradition républicaine selon laquelle le conseil municipal délibère des indemnités du maire et des adjoints. Nous avons proposé une exception à ce principe, à la demande de l'Association des Maires de France, pour les communes de moins de 3 500 habitants. Dans ces petites communes, de nombreux maires n'osent pas demander leur indemnité. En généralisant cette disposition, la philosophie change complètement de sens. Cela se transformerait en un avantage mécanique qui s'appliquerait automatiquement aux maires. On ne comprend pas pourquoi ce dispositif ne s'appliquerait pas également aux adjoints.
Je ne suis pas défavorable à l'extension de cette disposition aux communes de 10 000 ou 20 000 habitants. Toutefois, je reste attaché à l'esprit de notre proposition de loi qui vise à prendre en compte la situation spécifique des petites communes.
Mme Jacqueline Gourault. - Dans une précédente proposition de loi que j'avais déposée ainsi que dans un amendement que j'avais défendu sur la proposition de loi de nos collègues Bernard Saugey et Marie-Hélène Des Esgaulx, je proposais de limiter cette possibilité aux seules communes de moins de 1 000 habitants. Je justifiais ce choix par la participation de l'État au budget de ces communes via la dotation élu rural destinée à indemniser les maires mais qui, bien souvent, alimentent le budget municipal. J'avais eu beaucoup de mal à faire accepter cette disposition.
Aujourd'hui, on veut étendre cette disposition à l'ensemble des communes. C'est une erreur. Dans les grandes communes se dégagent des majorités, ce qui ne pose pas le problème du vote de la délibération des indemnités des élus. Pour les petites communes, en raison du panachage, nous sommes en présence de majorités politiques difficiles, hétéroclites.
Par ailleurs, bien qu'il ne faille pas légiférer en fonction des réactions médiatiques, je crains qu'une telle généralisation donne un mauvais signal et qu'elle soit perçue comme une protection excessive des élus.
M. François Pillet. - Je ne m'inscris pas dans cette optique. Il nous faut sortir de cette ambiguïté embarrassée sur la rémunération des élus locaux. Cette généralisation ne me choque pas car, sur le terrain, le maire aura toujours la possibilité d'y renoncer et de reverser à la fin de l'année ce qu'il a perçu au centre communal d'action sociale, au budget eau ou au budget assainissement.
J'aurais préféré quelque chose de net et précis. Cela dit, c'est nécessairement un mieux.
Mme Cécile Cukierman. - Nous sommes dans un climat qui rend ce débat, au moins pour les petites communes allant de 3 500 jusqu'à 20 000 habitants, compliqué, parfois complexe au sein même des équipes municipales. Dans les majorités municipales, même dans celles où s'applique le scrutin proportionnel pour lesquelles il n'existe pas toujours de majorité claire, cette question se pose et représente d'ailleurs le premier acte qui est mis en discussion.
Par rapport aux adjoints et au reste du conseil municipal, pour les communes de 3 500 à 15 000 habitants environ, le maire, au sein du conseil municipal, fait souvent le choix de répartir les indemnités entre plusieurs bénéficiaires : le maire accepte une moindre indemnité au profit des conseillers municipaux ayant reçu une délégation, afin de mieux répartir les responsabilités, les implications et les disponibilités au sein du conseil municipal. Il s'agit d'un partage du pouvoir.
Sur cet amendement du Gouvernement, nous pensons que cet élargissement peut se comprendre. Doit-il cependant s'appliquer à l'ensemble des communes, quelle que soit leur taille ? Cela se discute. En rester à 3 500 habitants n'est pas une bonne solution car cela pose toujours un problème pour les petites et les moyennes communes. La situation sociale et économique en 2014 rendra encore plus compliquée, dans ces strates de communes, la question de l'indemnité du maire, qui n'est pas un plus mais un droit qui récompense l'implication d'un élu au profit de l'intérêt général.
M. Philippe Bas. - Je partage votre point de vue, Monsieur le Président. Je n'ai pas d'opposition de principe à cet amendement mais c'est le fait de changer de système qui comporte certains inconvénients. Cela implique que, dans les communes dont les indemnités du maire sont inférieures à celles du tableau proposé par l'amendement, celles-ci seront augmentées automatiquement, sauf décision contraire du conseil municipal. Il ne me semble pas bon, compte-tenu de la période actuelle, d'augmenter systématiquement les indemnités des élus. Cet amendement n'est pas un mauvais système mais ses implications sont délicates, en raison du climat de populisme dans lequel nous vivons.
Par ailleurs, une disposition de cet amendement mérite un débat approfondi, car l'enfer est souvent pavé de bonnes intentions : celle qui dispose que « lorsque le maire cesse d'exercer son activité professionnelle et dans les communes dont la population est comprise entre 10 000 et 99 999 habitants, les indemnités de fonctions ont majorées de 10 % ». C'est une très bonne idée qui pourrait toutefois entraîner un effet pernicieux. Notre collègue Philippe Dallier nous a rappelé combien il était difficile pour un salarié du secteur privé de retrouver un emploi lorsqu'il a abandonné toute activité professionnelle pour se consacrer à son mandat municipal. Il faut y réfléchir.
M. Jean-Pierre Sueur, président. - Il y a un peu de bricolage dans cet amendement car pourquoi cette disposition ne s'appliquerait-elle pas aux communes entre 3 500 et 10 000 habitants ou à celles au-delà de 100 000 ?
Nous avons conçu un texte cohérent reposant sur certains principes, d'ailleurs discutés par certains. C'est pourquoi, sur cette question, la navette parlementaire sera nécessaire.
M. Alain Anziani. - On sera critiqués dans tous les cas, donc autant poser une question de principe.
Pour répondre à notre collègue Philippe Bas, le texte ne s'appliquera qu'à partir du prochain renouvellement municipal. Donc, on ne touche pas au barème actuel des indemnités.
S'agissant des 10 %, qui peuvent étonner, ils correspondent, d'après mes informations, à l'impact du PLFSS. Sur le principe, ma position diffère de celle de notre président. Ce qui est choquant, c'est le fait que les indemnités puissent varier d'une collectivité territoriale à une autre. Tous les élus locaux ont les mêmes charges. Comme l'a rappelé Cécile Cukiermann, il s'agit d'un droit et, à ce titre, il revient au législateur de fixer les droits et les devoirs qui s'appliquent à l'ensemble des collectivités. En outre, si une commune le souhaite, elle pourra modifier les montants des indemnités pour une meilleure répartition entre les conseillers municipaux, dans le cadre des limites fixées par la loi.
C'est pourquoi je suis favorable à cet amendement bien qu'il paraisse bricolé.
M. Pierre-Yves Collombat. - La meilleure façon de lutter contre la démagogie n'est pas de raser les murs. J'ai été maire pendant 22 ans et je ne pense pas avoir coûté à ma commune.
Ces discussions m'insupportent. Si nos électeurs ne sont pas satisfaits de notre travail, ils ont la possibilité de ne pas nous réélire.
La démocratie a un coût et il faut le dire.
Mme Jacqueline Gourault. - Pour répondre à Pierre-Yves Collombat, la démocratie consiste à s'exprimer. Je ne rase pas les murs en disant ce que je pense.
M. Pierre-Yves Collombat. - On s'excuse par rapport à l'extérieur.
M. Jean-Pierre Sueur, président. - Il y a des positions différentes dans cette commission, tout le monde doit s'exprimer.
M. Bernard Saugey, rapporteur. - Je suis gêné par cet amendement. Je propose d'en rester à ce que Jacqueline Gourault et Jean-Pierre Sueur avaient proposé : aider en priorité les petites communes. Cet amendement ne s'inscrit plus dans l'état d'esprit de la proposition de loi initiale. Dans les petites communes, la fixation de l'indemnité de fonction du maire ne serait plus laissée à la libre appréciation du conseil municipal mais serait automatique aux termes de son article premier. Cet amendement revient sur ce principe d'automaticité.
M. Jean-Pierre Sueur, président. - Les points de vue sont pluriels sur cet amendement, y compris au sein de chaque groupe. La navette parlementaire sera utile sur cette question.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 51.
Article additionnel après l'article 1er
M. Bernard Saugey, rapporteur. - Cet amendement impose la majoration des indemnités du maire ou du président de la délégation spéciale dans les cinq cas aujourd'hui ouverts par le code général des collectivités territoriales à la faculté, pour le conseil municipal, de majorer lesdites indemnités : communes chefs-lieux de département, d'arrondissement et de canton, communes sinistrées, communes touristiques, communes dont la population a augmenté à la suite de la mise en route de travaux publics d'intérêt national et communes attributaires de la dotation de solidarité urbaine au cours de l'un au moins des trois exercices précédents.
Je vous rappelle que la commission a donné un avis favorable à l'amendement supprimant ce cinquième cas de majoration.
Le conseil municipal retrouverait sa compétence pour majorer les indemnités des adjoints et membres de délégation spéciale faisant fonction d'adjoint.
Je vous propose un avis défavorable.
M. Jean-Pierre Sueur, président. - Cet amendement me choque. Pourquoi l'indemnité du maire doit-elle être majorée dans une commune touristique ? Où se situe l'égalité ? Je le comprends davantage pour les communes bénéficiant de la dotation de solidarité urbaine ou les communes rurales en grande difficulté.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 50.
Article additionnel après l'article 6 bis
M. Bernard Saugey, rapporteur. - Cet amendement rend obligatoire, pour les élus percevant une indemnité de fonction, l'adhésion à un régime de retraite par rente, aujourd'hui facultative.
Pourquoi ne pas laisser la liberté aux élus locaux ? Pourquoi les faire obligatoirement cotiser à un système par rente ? Par principe, je n'y suis pas favorable.
M. Jean-Pierre Sueur, président. - Lors des cérémonies des voeux, j'ai été à plusieurs reprises pris à parti en raison de l'obligation généralisée par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2013, pour les élus locaux percevant une indemnité de fonction, de souscrire au régime général car cela représente une charge pour l'intéressé et pour la commune.
M. Antoine Lefèvre. - Par cet amendement, on ne règle pas la possibilité pour certains élus qui sont affiliés au régime général de la sécurité sociale de pouvoir se constituer une rente. C'est doublement non.
Mme Cécile Cukierman. - Cette question mériterait de figurer dans un autre texte qui traiterait plus globalement de la retraite des élus et de leur protection sociale. A force de vouloir régler cette question au détour d'un texte, on est à la source de mécontentements là où on pensait apporter le bonheur.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 49.
M. Jean-Pierre Sueur, président. - Cet amendement propose de supprimer le gage financier.
M. Bernard Saugey, rapporteur. - On ne peut qu'y être favorable.
La commission émet un avis favorable à l'amendement n° 52.
Mercredi 30 janvier 2013
- Présidence de M. Jean-Pierre Sueur, président -Création d'un Parquet européen - Communication
Enfin, la commission a entendu une communication de Mlle Sophie Joissains, relative à ses travaux sur la création d'un Parquet européen.
Mlle Sophie Joissains, rapporteur. - La proposition de résolution européenne sur la création d'un Parquet européen a été adoptée à l'unanimité par la commission des affaires européennes, sur ma proposition, en décembre dernier, et est devenue résolution du Sénat le 15 janvier dernier.
L'idée d'un Parquet européen a été avancée dès la fin des années 1990 par un groupe d'experts réuni sous la direction de Mme Mireille Delmas-Marty, puis dans un Livre vert de la Commission européenne de 2001. Notre Assemblée, à plusieurs reprises, s'est exprimée en faveur d'une telle institution, sujet cher à nos anciens collègues MM. Pierre Fauchon, Robert Badinter et Hubert Haenel. Le Conseil d'État lui a consacré un rapport très riche en 2011, et l'Assemblée nationale a adopté en août 2011 une résolution en ce sens.
Ce sujet est d'autant plus d'actualité que, depuis l'entrée en vigueur du traité de Lisbonne, les traités communautaires autorisent la création d'un Parquet européen. La Commission européenne prévoit de présenter une proposition en 2013, après avoir publié une étude d'impact et lancé une consultation. M. Robert Badinter a été chargé d'une mission pour évaluer la position des États membres.
D'abord, le contexte. La protection des intérêts financiers de l'Union européenne est un des objectifs des institutions communautaires, clairement apparu en 1970, avec la création de ressources propres aux Communautés européennes. Des instruments juridiques spécifiques ont progressivement été mis en place, comme l'Office de lutte anti-fraude (OLAF) en 1999.
Les atteintes aux intérêts financiers de l'Union européenne auraient atteint 600 millions d'euros en 2010, mais ce montant est probablement sous-évalué. Or, le dispositif actuel de protection des intérêts financiers de l'Union présente des insuffisances. Les autorités judiciaires nationales n'ouvrent pas systématiquement une enquête pénale à la suite d'une recommandation de l'OLAF (seulement 7% des dossiers de l'OLAF), alors qu'elles sont pourtant les seules à pouvoir agir. De grandes différences subsistent également entre les États membres dans la définition des infractions pénales concernées, telles que le détournement de fonds ou l'abus de pouvoir. Le taux de condamnation varie de 14% à 80% selon les États. Pour y remédier, la Commission européenne a présenté, le 11 juillet dernier, une proposition de directive qui définit des infractions communes à tous les États membres et les sanctions applicables, conformément aux recommandations déjà formulées par Mme Mireille Delmas-Marty.
Le projet de création d'un Parquet européen s'inscrit en outre dans le cadre d'un renforcement de la coopération judiciaire en matière pénale au sein de l'Union européenne. Depuis le Conseil européen de Tampere en 1999, le principe de reconnaissance mutuelle - qui implique la confiance mutuelle - constitue la pierre angulaire de la coopération judiciaire européenne. La principale réalisation demeure le mandat d'arrêt européen, créé en 2002, grâce auquel 11 630 suspects ont été remis entre États membres, selon des formalités simplifiées et des délais réduits.
Cependant, la disparité des normes d'incrimination et de sanction, tout comme de procédure pénale, demeurent de réels obstacles à l'approfondissement de cette coopération. C'est tout l'enjeu de la « feuille de route », annexée au Programme de Stockholm en décembre 2010, visant à rapprocher les droits procéduraux entre les systèmes judiciaires des différents États membres.
La coopération judiciaire s'est aussi développée à travers les magistrats de liaison et le réseau judiciaire européen. Un système européen d'information sur les casiers judiciaires a été créé en 2009. Le rôle d'Eurojust pour développer la coopération judiciaire pénale s'est affirmé. Europol apporte une aide précieuse à la coopération policière entre États membres, notamment en termes de renseignements sur les phénomènes criminels. Enfin, les équipes communes d'enquête ont montré tout leur intérêt.
L'instauration d'un Parquet européen aurait ainsi vocation à prendre appui sur l'ensemble de ces outils progressivement mis en place au cours des dix dernières années.
Quelles sont les perspectives ouvertes par le traité de Lisbonne ? Fruit d'un compromis, la rédaction de l'article 86 du TFUE, relatif au Parquet européen, laisse la voie ouverte à de nombreuses interprétations.
En premier lieu, la création du Parquet européen reste, en l'état, une option, qu'il appartiendrait au Conseil de mettre en oeuvre à l'unanimité, après approbation du Parlement européen. Une telle unanimité paraît très difficile à obtenir : le Royaume-Uni y est opposé, illustration du conflit entre le droit napoléonien et le droit anglo-saxon ; nous avons par ailleurs pu constater, lors du déplacement de notre commission des lois à Bruxelles l'année dernière, les réticences exprimées à l'époque par la Représentation permanente allemande.
En l'absence d'unanimité, le traité autorise toutefois la mise en oeuvre d'une coopération renforcée, réunissant au moins neuf États membres volontaires. Il stipule également que le Parquet européen devra être créé « à partir d'Eurojust ». Il sera compétent pour rechercher, poursuivre et renvoyer en jugement les auteurs et complices d'infractions portant atteinte aux intérêts financiers de l'Union. Il exercera devant les juridictions compétentes des États membres l'action publique relative à ces infractions - infractions qui ne sont cependant pas définies et devront l'être par règlements. Toutefois, le Conseil européen pourra décider, simultanément ou ultérieurement, d'étendre les attributions du Parquet européen à la lutte contre la criminalité grave ayant une dimension transfrontalière.
Quels sont les contours que pourrait prendre ce Parquet européen ?
En premier lieu, notre résolution soutient une démarche ambitieuse : nous souhaiterions que, dès sa création, le Parquet européen soit compétent à la fois en matière de protection des intérêts financiers de l'UE et de lutte contre la criminalité transfrontalière, comme la traite des êtres humains ou les trafics de drogue par exemple. La résolution adoptée par l'Assemblée nationale soutenait également une telle solution. La lutte contre la grande criminalité pourra donner au projet de Parquet européen une dimension susceptible de concrétiser une Europe des projets répondant aux attentes des citoyens. En outre, la distinction entre protection des intérêts financiers de l'Union et lutte contre la criminalité transfrontalière peut parfois paraître artificielle.
Il faut néanmoins être réaliste et pragmatique : face aux réticences de certains États membres, commençons par limiter le champ de compétences du Parquet européen à la protection des intérêts financiers de l'Union. Cette première étape, sorte de période expérimentale, fournira la preuve concrète de la plus-value qu'apporterait la création d'un Parquet européen à la coopération judiciaire en matière pénale.
A défaut d'unanimité, la voie de la coopération renforcée devrait être examinée sérieusement, ainsi que le permettent d'ailleurs expressément les traités. La Belgique, le Luxembourg, les Pays-Bas, l'Espagne, la Grèce, l'Italie, le Portugal et la Slovénie pourraient s'engager dans une telle démarche. A l'inverse, l'Allemagne se montre prudente, notamment en raison des réserves émises par la Cour de Karlsruhe sur de nouveaux transferts de compétences au niveau européen. Il sera toutefois difficile d'avancer sans l'accord de l'Allemagne, principal contributeur au budget européen. Des garanties solides, notamment sur l'articulation entre Parquet européen et parquets nationaux, devront lui être données. A cet égard, la déclaration du Conseil des ministres franco-allemand qui s'est tenu la semaine dernière à l'occasion du 60ème anniversaire du traité de l'Élysée indique que « [la France et l'Allemagne] oeuvreront également à la mise en place d'un parquet européen dans le cadre d'un groupe de travail ouvert aux autres États-membres et développeront des actions de formation conjointe de magistrats français et allemands ». Cela me paraît être un signe encourageant.
Quelle forme revêtirait ce Parquet européen ? Le traité prévoit qu'il soit créé « à partir d'Eurojust ». Sans doute, Eurojust ne constituera pas le Parquet européen. Il s'agit d'une unité de coopération, qui joue actuellement un simple rôle de coordination et de mise en réseau. Mais Eurojust a accès aux bases de données des États membres, notamment au casier judiciaire, et il a acquis une expertise qui sera précieuse au Parquet européen. Parallèlement, une évolution d'Eurojust est souhaitable, notamment pour mieux répondre aux défis posés par la criminalité transfrontière. Sa présidente nous a indiqué, lors de son audition, que les coopérations bilatérales d'État à État avaient beaucoup progressé dans ce domaine.
Le Parquet européen devrait avoir une forme collégiale, c'est-à-dire être composé d'un représentant par État membre. Les traités font mention d'un « parquet » européen, non d'un « procureur ». La solution d'un parquet collégial qui élirait en son sein son président, le cas échéant avec une rotation par pays, paraît la plus susceptible de recueillir l'accord des États membres. Toutefois, dans le discours qu'il a prononcé lors de l'audience solennelle de rentrée de la Cour de cassation, M. Jean-Claude Marin préconise la désignation d'« un » procureur, incarnation du Parquet européen.
L'hypothèse d'un Parquet centralisé suscite de fortes réserves dans les États membres. En outre, une telle structure serait extrêmement lourde sur le plan financier ; seule une structure légère permettrait à chaque État d'y participer. Enfin, une structure centralisée rendrait sans doute plus difficile le lien avec les services d'enquête nationaux.
Une structure décentralisée, option privilégiée par la Commission européenne soucieuse d'éviter de créer une « usine à gaz », semble plus adaptée. Elle serait fondée sur un Procureur européen, d'une part, et sur des Procureurs européens délégués ayant une « double casquette » dans les États membres, d'autre part. Outre l'aspect linguistique, une telle solution permettrait une représentation plus aisée du Parquet européen auprès des juridictions nationales. Plusieurs délégués nationaux seraient susceptibles d'être nommés sur une même affaire. En France, le parquet financier de Paris pourrait, par exemple, être désigné comme délégué national du Parquet européen, tant qu'il ne traitera que des aspects financiers.
Il importe que le Parquet européen bénéficie de garanties d'indépendance afin que son pouvoir d'instruction sur les délégués nationaux soit, dans son domaine de compétence, exclusif de toute autre instruction que ces délégués pourraient recevoir des autorités nationales. Il mènerait ses investigations en s'appuyant essentiellement sur les services d'enquête nationaux et, subsidiairement, en recevant l'aide d'un service d'enquête européen, éventuellement constitué à partir de l'OLAF et d'Europol. Les juridictions nationales des États membres resteraient compétentes pour se prononcer sur le fond, ce qui implique la fixation de critères précis pour désigner la juridiction de renvoi.
Toutefois, les actes du Parquet européen devraient pouvoir faire l'objet d'un contrôle juridictionnel, soit en cours de procédure, soit devant la juridiction de jugement. S'agissant des actes adoptés durant l'enquête - perquisitions, interceptions téléphoniques, etc. -, le contrôle juridictionnel pourrait être exercé par une juridiction spécialisée de l'Union européenne, ou éventuellement une chambre spécialisée de la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE), le traité autorisant la création d'une telle juridiction.
De plus, il est fondamental de mettre en place, corrélativement, un socle minimal de règles harmonisées au niveau européen, concernant en particulier la définition des infractions et l'admissibilité des preuves. De grandes disparités subsistent entre États membres. Au-delà, le principe de reconnaissance mutuelle entre les États membres devra pleinement jouer.
Enfin, une évaluation parlementaire des activités du Parquet européen est nécessaire.
M. Patrice Gélard. - Quelle serait l'articulation avec les procureurs de la Cour de Justice de l'Union européenne ?
Mlle Sophie Joissains, rapporteur. - Aucun lien n'est prévu, chaque État membre devant proposer un procureur.
M. Patrice Gélard. - Ce n'est pas simple car l'initiative des poursuites appartiendra à la CJUE, donc au Procureur auprès de la CJUE.
Mlle Sophie Joissains, rapporteur. - Il n'y a pas de lien. Si l'OLAF découvre une infraction, il saisira le Parquet européen, qui pourra faire appel aux délégués nationaux des États concernés.
M. Patrice Gélard. - Je comprends les réticences de certains Etats membres !
M. Simon Sutour. -La création d'un Parquet européen s'inscrit dans la logique du mandat d'arrêt européen. L'exigence de l'unanimité pose la question d'un nouveau traité car elle constitue un obstacle sur la voie de nouvelles avancées. La Commission européenne devrait présenter des propositions.
Je souligne l'excellente collaboration entre la commission des lois et la commission des affaires européennes. Ce n'est pas un hasard si Mlle Sophie Joissains, qui appartient aux deux commissions, a été chargée du dossier !
Je me félicite enfin de la procédure retenue : la résolution ayant été adoptée à l'unanimité par la commission des affaires européennes, il n'était sans doute pas utile que la commission des lois désigne à son tour un rapporteur et procède à nouveau à une série d'auditions.
M. Alain Richard. - Je salue le travail de Mlle Joissains. La règle de l'unanimité peut-elle être contournée? Je n'en suis pas sûr...Il s'agit en effet de transférer à l'Union européenne des compétences régaliennes qui appartiennent aux États et non à l'Union européenne. Leur consentement semble requis. De plus, le rôle du Parquet européen étant de requérir devant les juridictions nationales, le dossier n'a pas avancé car de nombreux États s'interrogent sur la cohérence de ce système avec leur propre système de poursuites. Ainsi le Parquet européen ne pourra que s'insérer avec modestie dans le dispositif des Etats membres. La seule solution consisterait à lui donner comme base un traité qui ne rassemblerait pas tous les États. En matière de droit pénal, où l'enclenchement des poursuites obéit à des considérations d'opportunité, les implications seront très différentes selon les États. Un accord limité me paraît nécessaire pour que cette idée ait un avenir.
Mlle Sophie Joissains, rapporteur. - Une coopération pénale renforcée est possible à partir de neuf Etats membres volontaires.
M. Alain Richard. - Elle suppose l'accord des autres États.
Mlle Sophie Joissains, rapporteur. - Non, en revanche l'unanimité est requise pour la création du Parquet européen dans le cadre du Traité.
Nomination de rapporteurs
M. Anziani est nommé rapporteur sur la proposition de loi n° 753 (2011-2012), présentée par M. Jean-Pierre Sueur et plusieurs de ses collègues, tendant à modifier l'article 689-11 du code de procédure pénale relatif à la compétence territoriale du juge français concernant les infractions visées par le statut de la Cour pénale internationale.
M. Patrice Gélard. - J'ai été rapporteur du texte initial. Je me tiens à la disposition du rapporteur.
M. Jean-Pierre Sueur, président. - Nous connaissons votre obligeance et votre disponibilité.
M. François Zocchetto est nommé rapporteur sur la proposition de loi n° 156 (2012-2013), adoptée par l'Assemblée nationale, visant à reconnaître le vote blanc aux élections.
Mme Eliane Assassi est nommée rapporteure sur la proposition de loi n° 169 (2012 -2013) présentée par Mme Annie David, portant amnistie des faits commis à l'occasion de mouvements sociaux et d'activités syndicales et revendicatives.
M. Jean-Pierre Sueur, président. - Le rapporteur sur le projet de loi organique et le projet de loi relatifs à l'application de l'article 11 de la Constitution sera nommé la semaine prochaine. Un délai de réflexion est nécessaire.
Suppression de la discrimination dans les délais de prescription prévus par la loi sur la liberté - Examen du rapport et du texte de la commission
La commission examine le rapport et le texte qu'elle propose pour la proposition de loi n° 122 (2011-2012), adoptée par l'Assemblée nationale, relative à la suppression de la discrimination dans les délais de prescription prévus par la loi sur la liberté de la presse du 29 juillet 1881.
Mme Esther Benbassa, rapporteure. - Les dispositions modifiées par cette proposition de loi relèvent de la loi de 1881 sur la liberté de la presse, mais les infractions visées ne la concernent que de manière marginale. Il s'agit essentiellement de propos tenus en public ou d'écrits rédigés par des particuliers sans lien avec la presse. Notre législation traite différemment les propos discriminatoires selon qu'ils ont un caractère racial, ethnique ou religieux, ou qu'ils portent sur le sexe, l'orientation ou l'identité sexuelle, ou le handicap. Le rapporteur de l'Assemblée nationale l'a qualifiée de « discriminatoire ». L'harmonisation des délais de prescription mettrait fin à cette différence de traitement entre victimes. Elle fait l'objet d'un consensus parmi les personnes auditionnées. Ainsi, le Défenseur des Droits avait suggéré cette unification dès 2011 dans sa proposition de réforme n° 11-R009. De même, le droit européen n'établit pas de distinction entre les discriminations. L'article 14 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales interdit les discriminations fondées sur le sexe, sur l'appartenance à une minorité nationale ou « sur toute autre situation ». Quant à l'article 13 du Traité instituant la Communauté européenne, il dispose que le Conseil « peut prendre les mesures nécessaires en vue de combattre toute discrimination fondée sur le sexe, la race ou l'origine ethnique, la religion ou les convictions, un handicap, l'âge ou l'orientation sexuelle ». Le droit français devrait donc s'en inspirer.
La loi du 9 mars 2004 dite loi « Perben II » a introduit une exception en portant à un an le délai de prescription de certaines infractions telles que les provocations à la discrimination, les incitations à la violence, les diffamations ou les injures, lorsqu'elles sont liées à l'appartenance d'une personne à une communauté ethnique, raciale ou religieuse. Le législateur a souhaité adapter le droit à l'évolution de la criminalité sur Internet qui rend plus difficile et la détection et la répression de tels actes.
La présente proposition de loi, déposée par M. Jean-Marc Ayrault et Mme Catherine Quéré, votée à l'Assemblée nationale à une très large majorité le 22 novembre 2011, propose de porter de trois mois à un an, le délai de prescription pour les faits de provocation à la haine, à la violence et aux discriminations, de diffamations ou d'injures relatives au sexe, à l'identité ou à l'orientation sexuelle, ou à un handicap. L'examen de ce texte intervient dans le contexte particulier du débat sur le mariage de personnes de même sexe qui donne lieu à un climat homophobe et à des propos intolérables.
La présente proposition de loi remédie à une anomalie juridique : un délit présentant des caractéristiques très proches sera désormais poursuivi dans les mêmes conditions. La prescription des délits commis par voie de presse repose sur un régime dérogatoire afin de protéger la liberté de la presse. Les délais sont de trois mois, contre trois ans pour les délits et un an pour les contraventions de droit commun. Notre objectif n'est pas de porter atteinte à la liberté de la presse. Ayant été éduquée aux Etats-Unis, j'avoue avoir, à titre personnel, un faible pour le 1er article du Bill of Rights. Ce 1er amendement de la Constitution américaine, qui ne pose pas de limite à la liberté d'expression, est entré dans les moeurs par le jeu de l'éducation et d'une tradition séculaire. La pédagogie qui l'a accompagné a permis d'encadrer une liberté en principe totale. En France néanmoins, où la menace de la sanction est brandie dès les premières années de l'enfance, il semble difficile de s'en remettre à une telle mesure. La différence de délais de prescription en matière de délits de presse fragilise les actions menées en matière de répression des discriminations. Tout comme en 2004, le texte ne concerne que marginalement les délits commis par voie de presse : sa portée est plus large, visant tous les propos publics, écrits ou oraux. L'extension du délai de prescription constituerait une avancée pour la protection des droits des personnes autant qu'une simplification d'un régime peu lisible. Confrontées à une multiplication des propos discriminatoires sur Internet, les victimes bénéficieraient de la même protection. L'essor des réseaux sociaux facilitant la diffusion de ces propos, il est nécessaire d'harmoniser les régimes de la provocation à la discrimination, de la diffamation ou de l'injure publique. Le rapport à un écran est déshumanisant. Ainsi, l'Association des Paralysés de France souligne la multiplication des propos blessants à l'égard des handicapés. Internet relève de l'instantané, et les infractions sont prescrites immédiatement. Mais faute de « cimetière des propos mis en ligne », ceux-ci demeurent perpétuellement. Internet bénéficie du régime favorable de la loi de 1881 sans pour autant s'accompagner d'une déontologie comparable. Cette situation avait déjà été soulignée par MM. Hyest, Portelli et Yung dans leur rapport d'information paru en 2007 sur le régime des prescriptions civiles et pénales. La brièveté des délais se justifiait par le caractère éphémère de l'infraction. Avec Internet, cette argumentation n'est plus recevable car l'infraction ne disparaît plus : paradoxalement, le temps bref, qui était celui de la presse imprimée, s'est allongé.
Je vous propose d'adopter cette proposition de loi avec trois modifications. Mon premier amendement est un amendement de coordination avec la loi n° 2012-1432 du 21 décembre 2012 relative à la sécurité et à la lutte contre le terrorisme qui a modifié l'article 65-3 de la loi de 1881 après l'adoption par l'Assemblée nationale du présent texte. Un deuxième amendement a pour objet de permettre l'application de la proposition de loi à Wallis-et-Futuna, en Polynésie française et en Nouvelle-Calédonie, faute de quoi le droit antérieur perdurerait. Enfin je propose de modifier le titre de la loi pour mieux en expliciter l'objet.
M. Jean-Pierre Sueur, président. - Merci pour votre rapport qui est aussi un plaidoyer convaincu.
M. Jean-Jacques Hyest. - Vous avez évoqué les libertés d'opinion et d'expression américaines. Mais cette liberté peut être la meilleure comme la pire des choses : voyez les effets de la législation sur les armes ! N'oublions pas également que les délais de prescription ont été mis en place en 1881 pour protéger les journaux de poursuites permanentes et donc pour préserver la liberté de la presse. Avec Internet, certains journaux ont disparu dans leur version imprimée ; il faut donc être très prudent. Aligner les délais de prescription, comme ce fut le cas pour le terrorisme dernièrement, est une bonne chose. Lors des travaux de la mission d'information, qui a abouti à la réforme des prescriptions en matière civile, nous avions avancé avec prudence en ce qui concerne la loi sur la presse. Les différences de prescription peuvent sembler choquantes. Mais prenons garde qu'une augmentation trop importante des délais ne nuise à la liberté de la presse.
Mme Catherine Tasca. - Je salue le travail de notre rapporteure et son engagement. Le sujet le mérite. L'harmonisation des délais est justifiée : la presse de 2013 n'a plus rien à voir avec celle de 1881. A l'ère du multimédia, toute rumeur, toute agression, toute diffamation se voit propagée aussitôt dans le monde entier. Les dommages sont sans comparaison. Néanmoins, cette matière est sensible pour le fonctionnement de notre démocratie. Je ne crois pas que cette proposition de loi porte atteinte à la liberté de la presse, mais nous devons rester vigilants. Quelle est la position des représentants de la presse - éditeurs, journalistes - que vous avez auditionnés ? Internet ouvre des horizons pour la liberté d'expression et accueille dans le même temps des tombereaux de vilénies. Il est urgent de donner aux citoyens les armes pour se défendre.
M. Jean-Pierre Michel. - La presse a longtemps été muselée. La loi de 1881 est une des lois de liberté votées par la IIIe République. Aujourd'hui la presse a changé avec Internet, les réseaux sociaux, la numérisation et la disparition des versions imprimées de certains titres : Médiapart, par exemple, est un pure player.... Dans ces conditions, des délais de prescription très courts constituent une entrave à l'action des victimes. Enfin, le premier amendement proposé par Mme Benbassa est certes utile, mais un vote conforme ne serait-il pas préférable pour permettre une mise en oeuvre dans les meilleurs délais ?
Mme Cécile Cukierman. - Le rapport est excellent. Depuis 1881, non seulement les titres et les supports ont évolué, mais le rapport aux médias a changé, associant lecture immédiate et possibilité de lecture différée grâce aux progrès de l'archivage. Il nous faut donc maintenir l'équilibre entre protection des personnes et liberté du journaliste, tout en harmonisant le traitement des discriminations. Nous soutiendrons ce texte.
Mme Hélène Lipietz. - Ne faudra-t-il pas refondre la loi de 1881 pour tenir compte des délits favorisés par Internet ? Il ne s'agit pas seulement de la mondialisation ni des perspectives d'un archivage indéterminé, il s'agit surtout d'un archivable impérissable, accessible à tous à tout moment. Le droit à l'oubli a disparu. Grâce aux moteurs de recherche, toute information peut être retrouvée aisément. La loi sur la presse concerne aussi bien la presse papier et la presse numérique que les feuilles de choux locales ! Ce sont là pourtant trois domaines très différents.
Pour Internet, une fois les délais allongés à un an, ne pourrions-nous prévoir qu'une fois la prescription acquise, un second délai recommence à courir si, dans les années suivant la prescription, une demande de retrait de termes diffamatoires intervient ? La prescription recommencerait à courir, une dernière fois, pour un an. Il y a en effet, sur Internet, des articles que personne n'a consultés depuis cinq ans : pourtant, en dépit des atteintes à l'honneur ou à la dignité qu'ils causent, ils demeurent. Si le délai de prescription d'un an est dépassé, il est impossible d'en effacer le contenu.
Inventera-t-on un jour un délai de prescription spécifique à internet ?
M. François Pillet. - Nous soutiendrons ce texte. Puisqu'il est fait référence aux pratiques américaines, un code de déontologie comportant des sanctions, à l'image de ceux que se sont donnés certaines professions, ne permettrait-il pas de résoudre un grand nombre de problèmes ?
Mme Esther Benbassa, rapporteure. - Une fois n'est pas coutume, je partage l'analyse de M. Hyest.
Madame Tasca, cette loi ne concerne pas les journalistes, qui ont leur déontologie, y compris sur les sites Internet, dont les contenus sont passés au tamis et immédiatement retirés en cas de problème. Elle vise avant tout des particuliers qui tiennent des propos inacceptables, notamment sur Internet. De plus, nous n'avons eu qu'une journée à consacrer à nos auditions.
Madame Lipietz, même aux Etats-Unis, il n'a pas été possible d'instituer une déontologie propre à Internet. Internet est incontrôlable, parce que les sites sont très difficiles à localiser. Les plaintes en justice s'égarent, même celles qui visent Facebook : vous êtes d'abord envoyé en Irlande, puis aux Etats-Unis, où votre demande de suppression est finalement rejetée. Des règles de déontologie s'imposent ; sinon, comment combattrions-nous un réseau qui s'étend de façon non maîtrisable ? Peut-être devrions-nous légiférer sur Internet, ce qui suppose de trouver des modalités applicables et rationnelles.
Madame Tasca, nous avons auditionné le vice-président de la 17ème chambre du TGI, spécialisé dans les affaires impliquant la presse : il nous a encouragés.
Je ne suis pas contre un vote conforme, Monsieur Michel, mais si nous n'adoptons pas l'amendement n° 1, nous perdons le bénéfice des modifications apportées par la loi sur le terrorisme de décembre 2012 ; De même, sans l'amendement n° 2, Wallis-et-Futuna et la Nouvelle Calédonie ne bénéficieraient pas de cette harmonisation. Enfin, l'amendement n° 3, qui clarifie le titre, a des vertus pédagogiques. Cela dit, je m'en remets à la sagesse de la commission.
M. Alain Richard. - La réalité nous contraint à la modestie : sur Internet, aucune nation n'est en mesure d'imposer son système juridique. Le dispositif américain qui s'oppose à toute restriction de la liberté d'expression et le système français, avec son empilement de mesures protectrices par secteur, vont se livrer concurrence sous nos yeux : nous verrons qui l'emportera. Un système qui réagit aux propos discriminatoires ou diffamatoires par la confrontation citoyenne des idées plutôt que par la justice pénale n'est pas forcément moins efficace pour faire progresser la pensée humaniste.
Mme Esther Benbassa, rapporteure. - Je souscris à ces propos, mais que faire ? Bien sûr, le constat invite à la modestie, d'autant qu'il met en évidence nos limites. La loi n'est pas toute puissante !
M. Jean-Pierre Sueur, président. - Il fut un temps où certains partis appelaient à une gouvernance de la planète ; la question de la régulation est de plus en plus d'actualité.
Nous en arrivons à l'examen des amendements de la rapporteure.
Mme Esther Benbassa, rapporteure. - J'ai déjà présenté l'amendement n° 1 de coordination avec la loi du 21 décembre 2012.
L'amendement n° 1 est adopté.
Article additionnel après l'article 2
M. Jean-Pierre Sueur, président. - L'amendement n° 2 applique la proposition de loi à Wallis-et-Futuna, en Polynésie française et en Nouvelle-Calédonie.
M. Jean-Pierre Michel. - Les assemblées territoriales ont-elles été consultées ?
M. Jean-Pierre Sueur, président. - En la matière, la loi s'applique sans consultation des assemblées territoriales.
L'amendement n° 2 est adopté.
Intitulé de la proposition de loi
M. Jean-Pierre Sueur, président. - L'amendement n° 3 a été défendu par la rapporteure lors de son exposé liminaire.
M. Jean-Yves Leconte. - Je comprends la volonté de la rapporteure d'indiquer le sens de la discrimination dans le titre ; je doute cependant que le nouveau titre soit plus clair que le précédent qui se contentait de se référer à la discrimination.
M. Jean-Jacques Hyest. - Parler de « suppression de la discrimination » ne veut rien dire. La formule « suppression de discriminations » serait préférable.
M. Jean-Yves Leconte. - La formulation, selon moi, devrait indiquer que sont visées les infractions commises « en raison du sexe, de l'orientation ou de l'identité sexuelle ou du handicap », mais elle serait beaucoup plus longue : il faudrait l'alléger.
M. Jean-Pierre Michel. - Ce débat n'a aucun intérêt : le titre disparaîtra une fois la loi promulguée et insérée dans le code. Qui s'en soucie ?
M. Jean-Pierre Sueur, président. - La rapporteure maintient-elle son amendement ?
Mme Esther Benbassa, rapporteure. - Oui. Vos amendements en séance seront les bienvenus.
M. René Garrec. - Pourquoi « et prévues » ?
M. Jean-Jacques Hyest. - En effet.
Mme Esther Benbassa, rapporteure. - Il s'agit d'éviter toute confusion.
M. René Garrec et M. Jean-Jacques Hyest. - Nous préférons une virgule.
Mme Esther Benbassa, rapporteure. - Nous pouvons insérer une virgule après « handicap » : l'essentiel, c'est que le titre soit clair.
M. Jean-Pierre Sueur, président. - La formulation la plus simple n'est-elle pas : « proposition de loi visant à harmoniser les délais de prescription des infractions prévues par la loi sur la liberté de la presse du 29 juillet 1881, commises en raison du sexe, de l'orientation ou de l'identité sexuelle ou du handicap » ?
Mme Esther Benbassa, rapporteure. - Très bien !
L'amendement n° 3 rectifié est adopté.
La proposition de loi est adoptée dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Le sort des amendements examinés par la commission est retracé dans le tableau suivant :
Meilleur équilibre hommes-femmes parmi les administrateurs non exécutifs - Examen du rapport et du texte de la commission
La commission examine le rapport de Mme Catherine Troendle sur la proposition de résolution européenne n° 267 (2012-2013) présentée par Mme Catherine Troendle, au nom de la commission des lois, sur la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil relative à un meilleur équilibre hommes-femmes parmi les administrateurs non exécutifs des sociétés cotées en bourse et à des mesures connexes (E 7881).
Mme Catherine Troendle, rapporteur. - Mon rapport a été présenté en commission il y a quinze jours. Aucun amendement n'a été déposé. Je propose donc l'adoption de la proposition de résolution, sous réserve d'une remarque : le texte de cette directive est a minima par rapport au droit français. Mais compte tenu des réticences de certains pays, il est sans doute préférable de procéder ainsi pour fédérer petit à petit les pays autour de cette question.
M. Simon Sutour. - Considérant que cette directive était un bon texte, la commission des affaires européennes n'a pas souhaité l'examiner. J'étais moi-même absent il y a quinze jours : maintenant, il est trop tard pour déposer un amendement ! Je voterai la proposition, mais je crains que son point 13 n'affaiblisse la proposition de résolution : [le Sénat] « désapprouve les mesures figurant à l'article 4, destinées à encadrer le processus de recrutement des administrateurs, inadaptées à la réalité, fortement intrusives dans l'organisation des sociétés privées et sans doute contraires au principe constitutionnel de la liberté d'entreprendre ».
M. Jean-Jacques Hyest. - Réjouissons-nous de ce que la législation française ait servi de modèle à cette proposition de directive.
La Commission européenne a une réelle difficulté à appréhender le droit des sociétés. Chaque pays a ses spécificités en la matière, et le risque de trop encadrer n'est pas négligeable. Quid, par exemple, de la notion de siège statutaire ? Quid des administrateurs salariés ? Quant aux sociétés à directoire ou conseil de surveillance, il est difficile de les mettre dans le même sac. Quid encore de la notion de valeur, des actions et obligations ? Sur tous ces points, la directive laisse à désirer... L'objectif de fond, c'est qu'il n'y ait pas plus de 60 % d'administrateurs d'un même sexe dans les conseils d'administration : il s'agit de favoriser la parité et l'émergence des responsabilités quel que soit le sexe : c'est une très bonne chose. De toute façon, si la directive est approuvée, nous sommes en règle : félicitons-nous en.
Cela dit, je demeure méfiant sur l'harmonisation du droit des sociétés. Avec des systèmes aussi différents, l'entreprise est très délicate. La désignation des administrateurs ne se passe pas de la même façon dans tous les pays.
Je pense qu'il faut laisser dans la résolution tout ce qui s'y trouve.
Mme Hélène Lipietz. - Nous avons pris comme objectif la parité, soit un homme pour une femme. Parler de « meilleur équilibre entre les hommes et les femmes » aurait constitué un meilleur objectif. Nous avons une vision extrêmement égalitariste de la parité, la vision de l'Europe est plus pragmatique et nous fait passer pour des passionarias ! Ce que nous voulons, c'est une amélioration de la situation. Mais nous y reviendrons...
M. Pierre-Yves Collombat. - Pour une fois que la commission est en retrait sur une question de libéralisme, je soutiendrai la position de M. Sutour : nous n'avons aucune raison de nous élever contre des mesures « fortement intrusives dans l'organisation des sociétés privées ». Ce point 13 mériterait en effet d'être supprimé.
M. Jean-Jacques Hyest. - Certainement pas.
M. Jean-Pierre Sueur, président. - Cette discussion est fort intéressante. J'observe cependant qu'aucun amendement n'a été déposé, et que le délai limite est dépassé.
M. François Zocchetto. - La proposition de directive est moins stricte que le texte français. A l'époque, nous avions eu une discussion sur les seuils. La proposition de directive ne retient que les sociétés cotées de plus de 250 salariés réalisant plus de 50 millions d'euros de chiffre d'affaires ou dont le bilan total atteint 43 millions d'euros. Considérant que de très nombreuses sociétés cotées ont moins de 250 salariés, compte tenu de leur structure en holding, nous avions retenu toutes les sociétés cotées.
Toutes les holdings seront-elles exclues de la proposition de directive ? J'ai l'impression que beaucoup de sociétés vont passer à travers les mailles du filet...
Mme Catherine Troendle, rapporteur. - Je me suis longuement expliquée il y a quinze jours. Je comprends les arguments de MM. Sutour et Collombat, mais il n'existe rien de tel dans le droit français. Ce qui me semblait difficile à appliquer, c'est le partage des candidats ayant exactement le même niveau de qualification. Il fallait établir des critères clairs, univoques, et si ce n'était pas possible, choisir au bénéfice du sexe sous-représenté. La personne qui n'aurait pas été retenue aurait eu la possibilité de demander au conseil d'administration de justifier son choix. Cela allait très loin, et c'est pourquoi je vous ai proposé une réserve.
La proposition de résolution est adoptée sans modification.
M. Jean-Pierre Sueur, président. - En application de l'article 73 quinquies du règlement, cette résolution deviendra résolution du Sénat dans un délai de trois jours francs, sauf s'il est demandé qu'elle soit soumise à l'assemblée plénière.