- Mardi 26 janvier 2016
- Mercredi 27 janvier 2016
- Audition de Mme Dominique Pouyaud, candidate proposée par le Président du Sénat, en tant que personnalité qualifiée, aux fonctions de membre du Conseil supérieur de la magistrature, en application de l'article 65 de la Constitution
- Communication
- Vote et dépouillement du scrutin sur la proposition de nomination par le Président du Sénat aux fonctions de membre du Conseil supérieur de la magistrature
- Supprimer les missions temporaires confiées par le Gouvernement aux parlementaires et supprimer le remplacement des parlementaires en cas de prolongation d'une mission temporaire - Examen du rapport et des textes de la commission
- Autorités administratives indépendantes et autorités publiques indépendantes - Examen du rapport et des textes de la commission
- Nomination d'un rapporteur
- Prévention et lutte contre les incivilités, contre les atteintes à la sécurité publique et contre les actes terroristes dans les transports collectifs de voyageurs - Examen des amendements au texte de la commission
- Réduction du nombre minimal d'actionnaires dans les sociétés anonymes non cotées - Examen des amendements au texte de la commission
- Renforcer l'efficacité de la lutte antiterroriste - Examen du rapport et du texte de la commission
- Permettre l'application aux élus locaux des dispositions relatives au droit individuel à la formation - Examen du rapport et du texte de la commission
- Inscrire les principes fondamentaux de la loi du 9 décembre 1905 à l'article 1er de la Constitution - Examen du rapport et du texte de la commission
Mardi 26 janvier 2016
- Présidence de M. Philippe Bas, président -La réunion est ouverte à 9 h 05
Information de l'administration par l'institution judiciaire et protection des mineurs - Examen des amendements au texte de la commission
La commission examine les amendements sur son texte n° 294 (2015-2016) pour le projet de loi n° 242 (2015-2016), adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, relatif à l'information de l'administration par l'institution judiciaire et à la protection des mineurs.
M. Pierre-Yves Collombat. - Un de mes amendements a été retardé par le secrétaire général de la présidence, non en raison des articles 40 ou 41 de la Constitution ou du principe de l'entonnoir, mais pour absence de portée législative. Il modifiait le titre de la loi. Puisque l'on considère que les gens qui ont eu affaire à la justice en matière sexuelle sont dangereux, je proposais comme intitulé : projet de loi tendant à remplacer la présomption d'innocence par le principe « pas de fumée sans feu ». Je suis troublé par l'absence de sens du ridicule de cette bureaucratie qui nous surveille ; manifestement, l'initiative lui appartient plutôt qu'aux parlementaires ! Je n'ai pas encore exploré les voies de recours - y en a-t-il ? - mais les bras m'en tombent.
M. Philippe Bas, président. - Vous posez une question sérieuse. On peut s'interroger sur le bien-fondé de cette mise à l'écart. La direction de la séance a peut-être considéré que l'amendement n'avait pas de lien suffisant avec le projet de loi ? Je suis d'accord pour examiner avec vous les conditions de ce refus. Il aurait été très facile de rejeter en commission cet amendement, avec lequel on peut être en désaccord, et d'inviter notre assemblée à le repousser. Le point de procédure a été inutilement soulevé.
M. Pierre-Yves Collombat. - C'est ridicule.
M. Simon Sutour. - Cette affaire pose le problème de l'application de l'article 41, qui doit être codifié rigoureusement ; attention à ce qu'il ne serve pas à bloquer des amendements pour des raisons politiques ! J'appuie la demande de M. Collombat. La procédure, a minima, veut que le rapporteur propose une décision à la commission, laquelle transmet au président du Sénat, qui décide. Lorsqu'une telle procédure est appliquée, nous en souhaitons un compte rendu.
M. Philippe Bas, président. - L'article 41, en l'occurrence, n'a pas été invoqué.
M. Jean-Pierre Sueur. - L'article 41 est clair : « S'il apparaît au cours de la procédure législative qu'une proposition ou un amendement n'est pas du domaine de la loi ou est contraire à une délégation accordée en vertu de l'article 38, le Gouvernement ou le président de l'assemblée saisie peut opposer l'irrecevabilité ». En cas de désaccord, le Conseil constitutionnel tranche. Si l'amendement de M. Collombat présentait un aspect polémique, il paraît normal que le président de la commission en fut saisi, et que la décision ne fut pas prise par la seule direction de la séance.
M. Philippe Bas, président. - Comptez sur moi pour défendre notre droit d'amendement. Il a été fait application de manière contestable de l'article 48 du Règlement du Sénat, qui dispose que « les amendements sont recevables s'ils s'appliquent effectivement au texte qu'ils visent ou, en première lecture, s'ils présentent un lien, même indirect, avec le texte en discussion ». Quelle que soit l'appréciation sur le fond, difficile de nier que l'amendement s'applique au texte.
M. Pierre-Yves Collombat. - Je n'ai pas eu d'explication, si ce n'est un e-mail !
EXAMEN D'UN AMENDEMENT DU RAPPORTEUR
M. François Zocchetto, rapporteur. - L'amendement n° 12 que je vous propose d'adopter répond à la préoccupation exprimée par Mme Imbert dans son amendement n° 3 rectifié, qui propose d'autoriser le parquet à communiquer aux présidents des conseils départementaux les décisions de condamnation et de procédure pénale en cours concernant les personnes habitant au domicile du demandeur d'un agrément d'assistant maternel ou familial. Bonne idée - mais inopérante : il sera difficile pour le parquet de connaître la situation professionnelle du conjoint du mis en cause. Mon amendement prévoit que les présidents des conseils départementaux soient destinataires d'un extrait du bulletin n° 2 du casier judiciaire de chaque majeur vivant chez le demandeur, et non plus du bulletin n° 3 comme actuellement. Cette modification s'inscrit dans la logique du Gouvernement, qui a élargi, par un décret du 30 décembre 2015, la possibilité de communiquer un extrait du bulletin n° 2 aux collectivités territoriales pour le contrôle de l'exercice d'emplois dans leurs services impliquant un contact habituel avec des mineurs.
L'amendement n° 12 est adopté.
EXAMEN DES AMENDEMENTS DE SÉANCE
Article 1er A
La commission émet un avis défavorable aux amendements identiques nos 1, 5 et 9.
M. François Zocchetto, rapporteur. - L'amendement n° 7 de MM. Mézard et Collombat supprime la transmission d'informations au stade présentenciel. Si je comprends cette position, mon avis est néanmoins défavorable.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 7.
M. François Zocchetto, rapporteur. - Retrait de l'amendement n° 3 rectifié, satisfait par celui que nous venons d'adopter.
M. François Pillet. - Il sera opportun de le retirer, en effet.
La commission demande le retrait de l'amendement n° 3 rectifié et, à défaut, y sera défavorable.
M. François Zocchetto, rapporteur. - Avec l'amendement n° 10, le Gouvernement poursuit dans sa logique en retirant les garanties que nous avions apportées en commission qui permettaient au mis en cause de faire valoir ses observations lors de la transmission des informations à l'autorité administrative par le procureur.
M. Philippe Bas, président. - Le Gouvernement souhaite rétablir le texte de l'Assemblée nationale.
M. Alain Richard. - M. le rapporteur peut-il nous donner connaissance des arguments du Gouvernement ?
M. François Zocchetto, rapporteur. - Il serait intéressant d'entendre la ministre tenter de faire valoir ces arguments, assez complexes. Je ne vois pas ce qui s'oppose, en droit, à la transmission des observations du mis en cause, sauf à récuser le principe du contradictoire - logique que je réprouve.
M. Alain Richard. - C'est pourquoi je m'étonne.
M. François Zocchetto, rapporteur. - L'argument principal est que la mesure serait difficile à mettre en oeuvre. Pas plus que le reste, pourtant...
M. François Pillet. - Le Gouvernement craint que cela ne rende la procédure complexe et longue - ce qui n'est pas opportun quand il s'agit d'éviter une trop forte agression d'un grand principe. Le mécanisme proposé par le rapporteur n'est pas si difficile à mettre en oeuvre dans la pratique, et les procédures peu fréquentes. La position du rapporteur conforte l'équilibre de ce texte, j'y souscris.
M. Alain Richard. - On peut songer à des manoeuvres dilatoires des conseils des mis en cause.
M. François Pillet. - Le texte du rapporteur ne prévoit pas de voie de recours après l'écoute des observations. Les possibilités de manoeuvres dilatoires sont limitées.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 10.
M. Philippe Bas, président. - L'amendement n° 11 invoque un argument d'ordre constitutionnel.
M. François Zocchetto, rapporteur. - Nous avons supprimé la faculté pour le parquet d'informer l'administration ou l'employeur dès le stade de la garde à vue. Je comprends mal pourquoi le Gouvernement la rétablit. Avis très défavorable.
M. Jean-Pierre Sueur. - Avec M. Bigot, nous manifesterons notre accord avec le rapporteur sur cette question, même si nous sommes en désaccord sur d'autres mesures telles que les peines automatiques.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 11.
M. François Zocchetto, rapporteur. - L'amendement n° 2 supprime le caractère automatique, sauf décision contraire, du placement sous contrôle judiciaire assorti de l'interdiction d'exercice d'une activité au contact d'un mineur. Par cohérence avec notre position sur l'article 1er, avis défavorable.
La commission émet un avis défavorable aux amendements identiques nos 2 et 4.
La commission adopte les avis suivants :
AMENDEMENT DU RAPPORTEUR
Auteur |
N° |
Avis de la commission |
Article additionnel après l'article 1er |
||
M. ZOCCHETTO, rapporteur |
12 |
Adopté |
AUTRES AMENDEMENTS DE SÉANCE
Déontologie, droits et obligations des fonctionnaires - Examen des amendements au texte de la commission
La commission examine ensuite les amendements sur son texte n° 275 (2015-2016) pour le projet de loi n° 41 (2015-2016), adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, relatif à la déontologie, aux droits et obligations des fonctionnaires.
EXAMEN DES AMENDEMENTS DU RAPPORTEUR
M. Alain Vasselle, rapporteur. - Seule la déclaration d'intérêts du candidat nommé sera transmise par l'autorité de nomination. Mon amendement n° 179 précise que les déclarations d'intérêts des candidats non retenus seront détruites et renvoie à un décret en Conseil d'État le soin d'en fixer les modalités.
L'amendement n° 179 est adopté.
L'amendement de précision n° 180 est adopté.
Article 8
L'amendement de coordination n° 181 est adopté.
Article 9
L'amendement rédactionnel et de coordination n° 182 est adopté, ainsi que l'amendement de coordination n° 183.
Article 9 bis
L'amendement rédactionnel et de coordination n° 184 est adopté.
M. Alain Vasselle, rapporteur. - L'amendement n° 185 prend en compte nos échanges avec le Gouvernement et le Conseil d'État. Il fait disparaître l'obligation de compte rendu écrit à l'issue de l'entretien déontologique, que nous avions introduite, et prévoit que la déclaration d'intérêts pourra être modifiée par le déclarant.
L'amendement n° 185 est adopté.
M. Alain Vasselle, rapporteur. - L'amendement n° 186 prévoit des sanctions en cas de divulgation de la déclaration d'intérêts d'un membre du Conseil d'État ou des informations ou avis du collège de déontologie qui s'y rattachent, sous réserve de la publication éventuelle de ses avis, sous forme anonyme, par le collège.
L'amendement n° 186 est adopté.
Article 9 ter
L'amendement n° 187 est adopté, ainsi que l'amendement n° 188.
Article 9 quinquies
L'amendement n° 189 est adopté, ainsi que l'amendement n° 190.
Article 9 sexies
L'amendement n° 191 est adopté, ainsi que les amendements nos 192 et 193.
M. Alain Vasselle, rapporteur. - L'amendement n° 195 aligne les fonctions publiques territoriale et hospitalière sur l'État : il ajoute les mises à disposition auprès des institutions ou organes de l'Union européenne à la liste des dérogations au principe du remboursement des mises à disposition.
L'amendement n° 195 est adopté.
Article 15 bis A
L'amendement rédactionnel n° 196 est adopté.
Article 19 quater
L'amendement rédactionnel n° 197 est adopté.
M. Philippe Bas, président. - L'amendement n° 198 précise que les facilités accordées pour l'exercice de l'action syndicale le sont sous réserve des nécessités de service.
L'amendement n° 198 est adopté.
Article 24 A
L'amendement de coordination n° 199 est adopté.
Article 24 BA
L'amendement rédactionnel n° 200 est adopté.
EXAMEN DES AUTRES AMENDEMENTS DE SÉANCE
M. Christian Favier. - La commission des finances a rejeté onze de nos amendements au titre de l'article 40 de la Constitution, dont il est fait une utilisation abusive et inégalitaire. À l'Assemblée nationale, nombre d'articles entraînant des charges supplémentaires ont été ajoutés sans que la commission des finances trouve à y redire. Notre propre commission a pris des dispositions sur l'allongement du dispositif de la loi Sauvadet, qui pourraient entraîner des charges supplémentaires - la commission des finances n'a rien dit. Curieusement, ce qui n'est pas le cas pour nos amendements sur la lutte contre la précarité dans la fonction publique, le renforcement de garanties statutaires pour les grévistes et militants syndicaux...
M. Philippe Bas, président. - Il vous en est donné acte.
M. Alain Vasselle, rapporteur. - Sur les onze amendements évoqués, cinq seront examinés.
Avis défavorable à l'amendement n° 34, la dignité étant un principe républicain ancré de longue date dans la jurisprudence administrative, qui garantit l'exemplarité du service public.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 34.
M. Alain Vasselle, rapporteur. - Les amendements identiques nos 35, 95 et 154 sont contraires à la position de la commission. Avis défavorable.
La commission émet un avis défavorable aux amendements identiques nos 35, 95 et 154, ainsi qu'à l'amendement n° 151.
M. Alain Vasselle, rapporteur. - L'objectif de l'amendement n° 2 rectifié - faire respecter la laïcité dans la fonction publique - semble satisfait puisque, comme le rappelait Hugues Portelli dans un rapport de 2007, toute méconnaissance du statut général de la fonction publique peut motiver une sanction disciplinaire. Cet amendement pourrait laisser supposer que le non-respect des autres principes de la fonction publique ne constitue pas un manquement aux obligations professionnelles. Retrait ?
Mme Catherine Troendlé. - Soit.
La commission demande le retrait de l'amendement n° 2 rectifié et, à défaut, y sera défavorable.
M. Alain Vasselle, rapporteur. - Avis défavorable à l'amendement n° 145, qui supprime l'adhésion obligatoire à un ordre professionnel. La commission des affaires sociales a pris la même position sur l'ordre des infirmiers lors de l'examen du projet de loi Santé.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 145 ainsi qu'à l'amendement n° 36.
Article additionnel après l'article 2
M. Alain Vasselle, rapporteur. - L'amendement n° 84 rectifié du Gouvernement transpose les obligations déontologiques des fonctionnaires aux militaires, sous réserve d'adaptation. En particulier, leurs déclarations d'intérêts ne relèveraient pas de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP) mais du rapporteur général de la commission de déontologie des militaires. J'y suis favorable sous réserve de mon sous-amendement n° 178 qui améliore la structure des dispositions codifiées, répare des erreurs matérielles et maintient la position que la commission a adoptée pour les fonctionnaires.
M. Alain Richard. - Je comprends que l'on fasse prévaloir les mêmes règles pour les cadres dirigeants des forces armées et pour les hauts fonctionnaires, s'agissant des déclarations d'intérêts. Mais ces dispositions devraient être inscrites dans le code de la défense, or le Gouvernement, pour des mesures statutaires, est astreint à consulter les instances représentatives des forces armées. Mieux vaudrait demander au Gouvernement de soumettre cette mesure à l'avis des instances représentatives. Cet amendement, qui arrive latéralement, n'a été vu par aucune instance.
M. Alain Vasselle, rapporteur. - Le Gouvernement a procédé aux consultations. Ceci est fait en concertation.
M. René Vandierendonck. - Le Gouvernement a agi avec d'autant plus de diligence que ce projet de loi date de 2013 ! L'appellation « procédure accélérée » ne doit pas induire en erreur...
Monsieur le rapporteur, le Gouvernement s'est-il rapproché de vous concernant cet amendement avant la réunion d'aujourd'hui ?
M. Alain Vasselle, rapporteur. - J'ai rencontré les représentants du Gouvernement il y a huit jours, nous avons échangé sur l'ensemble des amendements.
M. René Vandierendonck. - Très bien.
M. Pierre-Yves Collombat. - Il existe deux catégories de personnes astreintes à des déclarations : le vulgum pecus qui envoie ses documents à la Haute Autorité, et les autres - membres des juridictions administratives et financières, militaires - avec lesquelles on prend mille précautions. Tout se passe entre soi. Sur le plan matériel, cela ne me gêne guère, étant plus inquiet par la construction de la forteresse bureaucratique qui se crée autour de la Haute Autorité, mais sur le plan des principes, je trouve cela étrange.
Le sous-amendement n° 178 est adopté.
La commission émet un avis favorable à l'amendement n° 84 rectifié, ainsi sous-amendé.
M. Philippe Bas, président. - Il est désagréable d'examiner des amendements de cette nature en fin de parcours. L'usage qui est fait de la procédure accélérée conduit à adopter des pans entiers de législation sans avoir le temps d'en délibérer.
M. René Vandierendonck. - Nous avons échappé au pire ! Dans la mouture initiale, le texte renvoyait l'essentiel des mesures à des ordonnances selon l'article 38 de la Constitution. Je remercie le rapporteur d'avoir convaincu le Gouvernement de rapatrier des pans entiers de législation dans le champ de la discussion.
M. Alain Vasselle, rapporteur. - Défavorable à l'amendement n° 149, car il convient de circonscrire précisément le dispositif des lanceurs d'alerte.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 149.
M. Alain Vasselle, rapporteur. - Défavorable à l'amendement n° 152. Il est essentiel que les autorités hiérarchiques des fonctionnaires examinent en premier ressort les alertes afin de couper court aux alertes abusives.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 152.
M. Alain Vasselle, rapporteur. - Les amendements nos 148 et 147 élargissent les canaux d'alerte. Avis défavorable. La commission de déontologie peut déjà être considérée comme une autorité administrative et il appartient aux autorités administratives et judiciaires de régler les situations de conflit d'intérêts, non aux associations de lutte contre la corruption.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 148 ainsi qu'à l'amendement n° 147.
M. Alain Vasselle, rapporteur. - L'amendement n° 123 supprime le régime spécifique de dénonciation calomnieuse prévu contre les alertes infondées ou divulguées dans le simple but de nuire. Or ce régime est nécessaire pour lutter contre ce type d'alerte et existe déjà dans une loi sur la transparence de 2013. Avis défavorable.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 123.
M. Alain Vasselle, rapporteur. - Défavorable à l'amendement n° 96, contraire à la position de la commission.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 96.
M. Alain Vasselle, rapporteur. - L'amendement n° 27 rectifié soumet à l'avis de la Haute Autorité les mesures réglementaires fixant les modalités des obligations déclaratives imposées aux fonctionnaires. Ainsi les règles applicables aux fonctionnaires seraient harmonisées avec celles en vigueur pour les responsables publics. Toutefois, il impose une consultation supplémentaire, synonyme de lourdeur procédurale. Sagesse.
M. Pierre-Yves Collombat. - Il me semble naturel que les utilisateurs d'un questionnaire donnent leur avis sur celui-ci. Ils sont les plus à même de juger.
M. Philippe Bas, président. - Cette sagesse est bienveillante.
La commission émet un avis de sagesse sur l'amendement n° 27 rectifié.
M. Alain Vasselle, rapporteur. - Défavorable à l'amendement n° 97, contraire à la position de la commission.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 97.
M. Alain Vasselle, rapporteur. - L'amendement n° 168 prévoit de transmettre la déclaration de situation patrimoniale à la Haute Autorité avec la déclaration d'intérêts, ce qui créerait une confusion entre ces deux outils et une exception au principe selon lequel les déclarations d'intérêts ne seraient transmises qu'en cas de doute de l'autorité hiérarchique. En outre, il n'est pas évident que la situation patrimoniale soit éclairée par la déclaration d'intérêts. Avis défavorable.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 168.
M. Alain Vasselle, rapporteur. - Les amendements identiques nos 98 et 174 sont contraires à la position de la commission.
La commission émet un avis défavorable aux amendements identiques nos 98 et 174, ainsi qu'à l'amendement n° 124.
M. Alain Vasselle, rapporteur. - L'amendement n° 115 est satisfait par le texte de la commission. Retrait ?
La commission demande le retrait de l'amendement n° 115 et, à défaut, y sera défavorable.
Article additionnel après l'article 4
M. Alain Vasselle, rapporteur. - L'amendement n° 173 porte sur les délais impartis à la Haute Autorité. Prudence... Je comprends que nous soyons impatients, mais ne serait-il pas préférable de prévoir une évaluation de l'application de la loi sur la transparence de 2013 ? Nous pourrions ensuite étudier les solutions à proposer. Retrait ou avis défavorable.
M. François Pillet. - Cet amendement soulève une question qui mérite d'être traitée. Il y a en effet matière à y travailler. On ne peut laisser la Haute Autorité sans délai, dans la nature. Je me rallie à la position du rapporteur, à condition que sa proposition ne tombe pas dans l'oubli.
M. Pierre-Yves Collombat. - Actuellement, la Haute Autorité fait ce qu'elle veut, comme elle le veut, quand elle le veut, sans aucun recours possible. Est-il normal que les investigations de la Haute Autorité se poursuivent pendant un an et demi, voire toute la durée d'un mandat ? Des délais sont pourtant inscrits dans la loi. J'ai l'impression que vous ne réalisez pas le pouvoir administratif de ces gens, dont le président est nommé, je le rappelle, par le président de la République. La moindre des choses est que l'état de droit soit respecté.
M. Hugues Portelli. - J'irai dans le même sens. La commission d'enquête sénatoriale sur les autorités administratives indépendantes s'est chargée d'évaluer la Haute Autorité : son avis est très clair ! On ne peut pas laisser une institution travailler en flux continu. À tout moment, vous pouvez recevoir un courrier de sa part ! Il faut prévoir un délai. Tout ceci me rappelle une autre autorité à laquelle nous avions réservé un sort particulier lors de la révision constitutionnelle de 2008. Ces gens-là doivent aussi respecter le droit - comme ils étaient d'ailleurs chargés de le faire dans leur vie antérieure !
M. Alain Vasselle, rapporteur. - Je ne conteste pas que des progrès doivent être effectués : les délais sont devenus beaucoup trop longs ; il faudrait rappeler à la Haute Autorité qu'elle aussi est soumise au droit. Attention toutefois : la modestie de ses moyens humains, associée à des délais trop courts, pourrait la conduire à prendre des décisions préjudiciables. Difficile, dans un premier temps, d'envisager un délai de moins d'un an. Une évaluation de l'application de la loi de 2013 est indispensable.
Mme Catherine Troendlé. - Les décisions de la Haute Autorité sont-elles susceptibles de recours ?
M. Pierre-Yves Collombat. - Non !
Mme Catherine Troendlé. - S'il existe un recours, la Haute Autorité fera attention à ne pas prendre de décision préjudiciable.
M. Pierre-Yves Collombat. - J'attire votre attention sur cette machinerie que l'on met en place. Il faudrait lui donner de plus en plus de moyens, de plus en plus de prérogatives... Je rappelle le titre du rapport de la commission d'enquête sur les AAI : « un État dans l'État ». Est-ce normal ?
M. Alain Richard. - De quoi parle-t-on ? De la description d'un patrimoine, de son analyse et des conséquences éventuelles à en tirer. Dans bien des cas, cela n'entraîne pas beaucoup d'investigations. Dans d'autres cas, la vérification de la description initiale demande davantage d'échanges. Le délai de réponse n'est pas impératif.
M. Pierre-Yves Collombat. - Si !
M. Alain Richard. - Non, je me rappelle très bien de la rédaction. Vous pouvez mettre la lettre dans un tiroir. La sanction finale est la saisine du parquet, contre lequel un recours existe. Quant à ceux dont les déclarations ne posent pas de problème, ils ne sont pas touchés par la procédure.
M. Pierre-Yves Collombat. - Ce n'est pas vrai.
M. François Pillet. - Il existe ailleurs des délais pour l'examen de déclarations de patrimoine. L'administration fiscale dispose d'un an.
M. Philippe Bas, président. - Le silence de la Haute Autorité pendant le délai imparti « vaut accord tacite », dit l'amendement. Mais à quoi ? C'est le grand flou, de part et d'autre...
La commission demande le retrait de l'amendement n° 173 et, à défaut, y sera défavorable.
M. Alain Vasselle, rapporteur. - L'amendement n° 125 est satisfait par le texte de la commission. Retrait.
La commission demande le retrait de l'amendement n° 125 et, à défaut, y sera défavorable.
Article additionnel après l'article 5
M. Alain Vasselle, rapporteur. - Les amendements identiques nos 137 rectifié et 159 reprennent partiellement des propositions de loi organique déposées au Sénat en septembre. Le I et le II sont potentiellement contradictoires : le I interdit à une personne désignée dans le cadre de l'article 13 d'être nommée dans un organe régulant si elle a été dirigeant, salarié ou conseiller d'une société soumise à la juridiction de cet organe, or le II interdit à cette même personne de prendre part à une délibération relative à une société liée à l'organe de régulation ou de contrôle. En outre, cela peut empêcher toute personne issue d'une société contrôlée d'être nommée au sein d'un organe de régulation, et tout membre d'un organe régulateur d'être embauché par une entité contrôlée. Avis défavorable.
M. René Vandierendonck. - Je pense que le rapporteur a raison de souhaiter une rédaction plus précise. Mme Lienemann y reviendra en séance.
La commission émet un avis défavorable aux amendements identiques nos 137 rectifié et 159.
Article 6
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 99.
M. Alain Vasselle, rapporteur. - L'amendement n° 30 interdit le cumul d'activités pour le domaine du conseil ou de l'expertise, ce qui serait complexe à mettre en oeuvre. Avis défavorable.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 30.
Article 7
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 100.
Article 8
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 101.
La commission émet un avis favorable à l'amendement de coordination n° 102.
M. Alain Vasselle, rapporteur. - L'amendement n° 23 rectifié étend la compétence de la commission de déontologie de la fonction publique aux fonctionnaires français détachés auprès d'organisations internationales. Or la loi s'incline devant les conventions internationales applicables. Si l'objectif est louable, la mise en oeuvre de cet amendement serait problématique. Retrait.
M. Alain Richard. - La position du rapporteur pourrait être nuancée. Dans 90 % des cas, les personnes nommées intuitu personae sont proposées par le gouvernement français. S'il devait y avoir un doute sur leur respect de la transparence, il serait dommage qu'on s'en aperçoive après leur nomination, plutôt qu'au moment où leur nom est proposé !
M. René Vandierendonck. - Le groupe socialiste ne soutient pas cet amendement, un peu trop personnalisable...
M. Philippe Bas, président. - Attention à ce qu'il ne puisse y avoir, pour une même personne, deux procédures, celle de la France et celle de l'organisation internationale, débouchant sur des décisions contradictoires.
M. Alain Vasselle, rapporteur. - La commission de déontologie serait de toute façon saisie en cas de détachement.
La commission demande le retrait de l'amendement n° 23 rectifié, et, à défaut, y sera défavorable.
M. Alain Vasselle, rapporteur. - L'amendement n° 172 supprime une précision apportée par la commission, autorisant le président de la commission de déontologie à rendre une décision avec réserve pour les cas où la compatibilité de l'activité privée envisagée s'impose. La commission de déontologie est saisie de cas en série pour lesquels la solution ressort sans ambiguïté de sa jurisprudence. À défaut, elle serait noyée sous le nombre de décisions à rendre. Mieux vaut qu'elle se concentre sur les dossiers délicats, ou conduisant à un avis d'incompatibilité. Avis défavorable.
M. Pierre-Yves Collombat. - La procédure rapide est destinée aux cas sans problème. S'il y a une réserve, c'est qu'il y a un problème. Tout ceci n'est guère logique.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 172, ainsi qu'à l'amendement n° 37.
Article additionnel après l'article 8
M. Alain Vasselle, rapporteur. - L'amendement n° 1 de Mme Di Folco, que je vous avais proposé, a été rejeté par la commission. J'y reste favorable à titre personnel, nous aurons le débat en séance.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 1.
M. Alain Vasselle, rapporteur. - L'amendement n° 28 confie à la Haute Autorité le contrôle de la compatibilité des activités privées des collaborateurs de cabinet du Président de la République, des membres du Gouvernement et des autorités territoriales. La commission de déontologie sera chargée, elle, de les appliquer à toutes les autres personnes. Le partage de compétences actuel est plus équilibré, d'autant qu'il n'empêche pas le dialogue entre les deux instances. Avis défavorable.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 28, ainsi qu'à l'amendement n° 103.
M. Alain Vasselle, rapporteur. - Les amendements nos 121 et 126 maintiennent l'obligation de désigner un référent déontologue. Contrairement à l'amendement ° 121 du Gouvernement, l'amendement n° 126 ne remet pas en cause la position de la commission puisqu'il renvoie au pouvoir réglementaire le soin de définir les modalités de désignation de ces référents. Les plus petites collectivités territoriales pourraient opter pour la mutualisation, avec rattachement du référent au centre de gestion. Le caractère facultatif de la désignation d'un référent serait alors gommé.
La commission émet un avis favorable à l'amendement n° 126 et demande le retrait de l'amendement n° 121 et, à défaut, y sera défavorable.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 29 rectifié.
M. Alain Vasselle, rapporteur. - Sagesse sur l'amendement n° 24.
M. Hugues Portelli. - M. Collombat et moi-même tenons beaucoup à cet amendement. La Haute Autorité ne motive jamais ses décisions. Nous souhaitons qu'elle le fasse, et que ses décisions soient susceptibles de recours. Dans une affaire récente concernant la HATVP, Le Conseil d'État s'est prononcé sur le caractère urgent du recours, mais pas sur le fond. Pourquoi cette autorité administrative indépendante serait-elle la seule contre laquelle aucun recours n'est possible ? Nous demandons son alignement sur le droit commun.
M. Yves Détraigne. - C'est logique.
M. Philippe Bas, président. - Quelles décisions visez-vous ?
M. Pierre-Yves Collombat. - Vous avez la liste aux paragraphes 1° à 7°.
M. Philippe Bas, président. - Certains de ces actes sont des décisions, d'autres non...
M. Alain Richard. - D'autres sont des actes d'instruction.
M. Philippe Bas, président. - D'accord pour dire que toute décision doit être motivée, mais encore faut-il qu'il s'agisse vraiment d'une décision.
M. Pierre-Yves Collombat. - Nous avons réalisé un travail de dentelière. Tout est détaillé : injonctions, appréciations, demandes de communication. D'accord pour sous-amender si le terme de décision est trop restrictif, mais il n'y a pas d'ambiguïté.
M. René Vandierendonck. - C'est savoureux. Le professeur Roger-Gérard Schwartzenberg a consacré sa thèse à l'autorité de la chose décidée, dans laquelle il distingue une décision exécutoire faisant grief d'un acte préparatoire à une décision. Je comprends que la Haute Autorité soit comme le dentifrice qu'on ne peut plus rentrer dans le tube, mais je voudrais que nous fassions du droit !
M. Hugues Portelli. - La jurisprudence du Conseil d'État en matière de décisions susceptibles de recours est assez fournie. Nous nous sommes appuyés sur elle pour rédiger l'amendement. Nous sommes prêts à le sous-amender, mais commencez par le voter !
M. Alain Vasselle, rapporteur. - Sagesse.
M. Philippe Bas, président. - Il s'agit d'une sagesse favorable, qui montre une grande ouverture d'esprit de la part du rapporteur.
La commission émet un avis de sagesse sur l'amendement n° 24.
Article 9 bis
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 90, ainsi qu'aux amendements nos 91 et 127.
Article 9 ter
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 92.
Article 9 quinquies
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 136.
La commission émet un avis favorable à l'amendement n° 85.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 86, ainsi qu'à l'amendement n° 87.
- Présidence de Mme Catherine Troendlé, vice-présidente -
Article 9 sexies
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 88.
M. Alain Vasselle, rapporteur. - Avis défavorable à l'amendement n° 171. L'obligation légale de protection fonctionnelle passe non par des mesures législatives ou réglementaires, mais par la fourniture d'une assistance juridique au fonctionnaire qui en fait la demande, en particulier la prise en charge au moins partielle des frais d'avocat.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 171.
M. Alain Vasselle, rapporteur. - L'amendement n° 3 rectifié est satisfait par l'article 10, qui rappelle que la protection fonctionnelle est due à tout fonctionnaire mis en cause à condition que les faits visés n'aient pas le caractère d'une faute personnelle détachable de l'exercice de ses fonctions. Retrait ?
La commission demande le retrait de l'amendement n° 3 rectifié et, à défaut, y sera défavorable.
Article additionnel après l'article 10
La commission émet un avis favorable à l'amendement n° 79.
Article 10 ter
La commission émet un avis favorable à l'amendement n° 120.
Article additionnel après l'article 10 ter
M. Alain Vasselle, rapporteur. - Avis favorable à l'amendement n° 78 sous réserve de l'adoption du sous-amendement n° 194 garantissant la constitutionnalité et la conventionalité de la disposition. Faire reposer la solution d'un litige sur une pièce non communiquée à l'une des parties risque en effet de porter atteinte aux droits de la défense et au droit à un procès équitable.
Le sous-amendement n° 194 est adopté.
La commission émet un avis favorable à l'amendement n° 78 ainsi sous-amendé.
Article 11
La commission émet un avis favorable à l'amendement n° 133. Elle émet un avis défavorable aux amendements nos 73, 162 et 31.
M. Alain Vasselle, rapporteur. - Retrait de l'amendement n° 4 rectifié. Le régime des concessions de logement de fonction relève du pouvoir réglementaire. S'agissant de l'accès à certains lieux, il appartient au juge de prendre les mesures nécessaires dans le cadre du contrôle judiciaire pour, par exemple, interdire l'accès à un établissement scolaire à un fonctionnaire poursuivi pour agression sur mineur.
La commission demande le retrait de l'amendement n° 4 rectifié et, à défaut, y sera défavorable.
La commission émet un avis défavorable aux amendements nos 169 et 74. Elle émet un avis favorable à l'amendement n° 132.
Article additionnel après l'article 11
La commission émet un avis favorable à l'amendement n° 83.
M. Alain Vasselle, rapporteur. - L'amendement n° 39 ouvre le champ de la priorité supplémentaire de mutation introduite par cet article aux fonctionnaires justifiant de leurs intérêts matériels et moraux dans une collectivité ultramarine. Il poursuit le même objectif que l'amendement n° 104 du Gouvernement. Demande de retrait au profit de celui-ci.
La commission demande le retrait de l'amendement n° 39 et, à défaut, y sera défavorable.
La commission émet un avis favorable à l'amendement n° 104.
Article additionnel après l'article 11 bis A
M. Alain Vasselle, rapporteur. - L'amendement n° 40 modifie les règles de nomination sur des emplois vacants de la fonction publique hospitalière en donnant la priorité à la procédure de changement d'établissement. Gardons la souplesse du détachement. Avis défavorable.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 40.
M. Alain Vasselle, rapporteur. - L'amendement n° 12 propose que le fonctionnaire mis en disponibilité d'office à l'expiration des congés de maladie, de longue maladie et de longue durée, puisse exercer toute activité ordonnée et contrôlée médicalement au titre de la réadaptation. Cette disposition est prévue par l'article 28 du décret du 30 juillet 1987 dans le cas d'un congé de longue maladie ou de longue durée, pris en vertu de l'article 58 de la loi du 26 janvier 1984. La disponibilité d'office, régie par l'article 72 de la loi, n'est pas visée. Des dispositions réglementaires devraient donc être modifiées. La loi le permet-elle ? Demande de retrait.
Mme Catherine Di Folco. - Ces agents sont dans l'impossibilité de travailler et de suivre une formation. Le vide juridique est complet.
M. René Vandierendonck. - Ces cas ne sont pas rares. Le rapporteur suggère la voie réglementaire. Laissons-lui poser la question à la ministre.
M. Alain Vasselle, rapporteur. - J'expliquerai l'avis de la commission et demanderai au Gouvernement des explications.
Mme Catherine Di Folco. - Merci. J'ai prévu d'alerter le Gouvernement sur ce sujet lors de la discussion générale.
La commission émet une demande de retrait de l'amendement n°12.
- Présidence de M. Philippe Bas, président -
Article 12
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 41, ainsi qu'aux amendements nos 153, 42 et 141.
M. Alain Vasselle, rapporteur. - Avis défavorable à l'amendement n° 105 qui revient à la rédaction de l'Assemblée nationale.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 105, ainsi qu'aux amendements nos 175 et 43.
Article additionnel après l'article 12
La commission émet un avis favorable à l'amendement n° 80.
M. Alain Vasselle, rapporteur. - Nous aurons en séance le débat sur l'exclusion temporaire de trois jours. Avis défavorable, car contraires à la position de la commission, aux amendements nos 142, 131, 106, 44, 8, 33 et 176.
Mme Catherine Di Folco. - Mon amendement n° 8 ne porte pas exactement sur le même sujet que les autres. Il est inutilement lourd et coûteux de réunir le conseil de discipline pour les sanctions du premier groupe.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 142, ainsi qu'aux amendements nos 131, 106, 44, 8, 33 et 176.
M. Alain Vasselle, rapporteur. - Je propose une version intermédiaire mixant l'amendement n° 45 et l'amendement n° 134 : si ce dernier renvoie opportunément au décret, il manque son effet d'harmonisation en ne soumettant que la décision de l'autorité territoriale à la commission de recours.
M. René Vandierendonck. - Merci.
La commission émet un avis favorable aux amendements n° 45 et 134, sous réserve de rectification.
La commission émet un avis favorable à l'amendement n° 9.
Article additionnel après l'article 13
La commission demandera l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 146, 46 et 66 rectifié.
La commission émet un avis favorable à l'amendement n° 81.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 82.
M. Alain Vasselle, rapporteur. - Retrait de l'amendement n° 139, qui supprime le doublement du prolongement du plan de titularisation Sauvadet, tel qu'adopté par notre commission.
M. René Vandierendonck. - Si j'ai soutenu l'intérim, je reste favorable à la résorption de l'emploi précaire. Je défends M. Sauvadet, c'est un comble ! Repousser l'échéance de 2016 à 2018, puis à 2020, c'est ce qu'on appelle un exercice de dilution.
La commission demande le retrait de l'amendement n° 139 et, à défaut, y sera défavorable.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 50 rectifié, ainsi qu'aux amendements nos 52, 53, 48, 51 rectifié et 16 rectifié.
La commission demande le retrait des amendements nos165 et 166 et, à défaut, y sera défavorable.
Article 15 bis
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 54.
M. Alain Vasselle, rapporteur. - Favorable aux amendements identiques nos 129 et 144, à condition de renvoyer non à un décret en Conseil d'État mais à un décret simple.
M. René Vandierendonck. - Soit, il faut savoir faire des concessions !
La commission émet un avis favorable aux amendements identiques nos 129 et 144, sous réserve de rectification.
Article 16
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 7 rectifié bis, ainsi qu'aux amendements nos 116 et 49.
Article 17
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 117.
Article 18 bis
La commission émet un avis défavorable aux amendements nos 155 rectifié, 56 et 138, ainsi qu'au sous-amendement n° 177.
Article 18 ter
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 118.
Article 18 quater B
La commission émet un avis défavorable aux amendements identiques nos 57 et 111.
Article 18 quater
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 58.
Article additionnel avant l'article 19 A
La commission demandera l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 61 rectifié, ainsi que sur l'amendement n° 163 rectifié.
Article 19 A
La commission demandera l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 10 rectifié.
La commission émet une demande de retrait de l'amendement n° 59.
Article 19 ter
La commission émet un avis favorable aux amendements identiques nos 135 et 156.
Article additionnel après l'article 19 ter
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n°158 rectifié.
Article 19 quater
La commission émet un avis favorable à l'amendement n° 60.
Article additionnel après l'article 19 sexies
La commission demandera l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 62.
Article additionnel après l'article 20
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 164.
Article additionnel après l'article 20 ter
La commission demande le retrait de l'amendement n° 65 rectifié et, à défaut, y sera défavorable.
Article 20 quater
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 143.
Article additionnel après l'article 20 quater
La commission émet un avis favorable à l'amendement n° 21 rectifié bis.
Article 22
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 113.
Article 23
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 107.
Article additionnel après l'article 23
La commission demandera l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 6 rectifié.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 68, ainsi qu'à l'amendement n° 122.
Article 23 bis
La commission émet un avis favorable à l'amendement n° 89.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 94.
Article 23 ter
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 17.
Article 23 quater
La commission demande le retrait de l'amendement n° 19 et, à défaut, y sera défavorable.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 18.
Article additionnel avant l'article 24 A
La commission émet un avis défavorable au sous-amendement n° 22 et un avis favorable à l'amendement n° 20 rectifié ter.
Article additionnel après l'article 24 BA
La commission émet un avis favorable à l'amendement n° 25 rectifié.
Article 24 B
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 75, ainsi qu'à l'amendement n° 157.
Article 24 C
La commission émet un avis favorable à l'amendement n° 108.
Article 24 G
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 128.
Article 24 M
La commission émet un avis favorable à l'amendement n° 119.
Article 24 O
La commission émet un avis favorable à l'amendement n° 140.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 76 et à l'amendement n° 69.
M. René Vandierendonck. - Très bien.
M. Alain Vasselle, rapporteur. - Retrait de l'amendement n° 32, qui réduirait les nouvelles compétences obligatoires dévolues aux centres de gestion. L'objectif est au contraire de renforcer leur place et de favoriser la mutualisation. Nous aurons le temps d'entendre les petits centres de gestion d'ici la commission mixte paritaire, qui trouvera sans doute un compromis.
M. René Vandierendonck. - Tout à fait d'accord.
La commission demande le retrait de l'amendement n° 32 et, à défaut, y sera défavorable.
Article additionnel après l'article 24 O
La commission émet un avis favorable à l'amendement n° 14 rectifié, sous réserve de rectification.
La commission demandera l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 71.
La commission émet un avis favorable à l'amendement n° 15 rectifié.
La commission demande le retrait de l'amendement n° 150 et, à défaut, y sera défavorable.
- Présidence de Mme Catherine Troendlé, vice-présidente -
La commission demande le retrait de l'amendement n° 167 et, à défaut, y sera défavorable.
M. Alain Vasselle, rapporteur. - Avis défavorable à l'amendement n° 109, sous réserve des explications du Gouvernement sur les mesures envisagées.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 109.
Article 24 bis
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 70, ainsi qu'à l'amendement n° 112.
Article additionnel après l'article 24 bis
La commission émet un avis de sagesse sur l'amendement n° 77 rectifié.
Article 26
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 110.
Article 27
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 114.
Article additionnel après l'article 27
La commission émet un avis favorable à l'amendement n° 93.
M. Yves Détraigne. - L'examen de ce texte me procure un sentiment de malaise. Le législateur rentre vraiment dans le détail du détail ! Quelle liberté reste-t-il dans un pays où tout doit être écrit, où il faut sans cesse se reporter aux textes ? Pourquoi ne pas faire confiance aux gens ? Ce texte est emblématique de cette mauvaise manière de légiférer.
Mme Catherine Troendlé, présidente. - Nous sommes nombreux à partager votre analyse...
M. Alain Vasselle, rapporteur. - Je partage totalement votre sentiment. J'ai eu souvent l'occasion, au cours de mes vingt ans de mandat, d'interpeller les gouvernements successifs pour demander une pause législative afin de toiletter la partie législative des codes. Nous ne devrions légiférer que sur l'essentiel !
M. René Vandierendonck. - Nous aurons ce débat en séance. Mais je note que des collègues de tout bord ont soutenu des amendements qui pourraient être considérés de nature réglementaire...
La commission adopte les avis suivants :
AMENDEMENTS DU RAPPORTEUR
AUTRES AMENDEMENTS DE SÉANCE
La réunion est levée à 10 h 40
Mercredi 27 janvier 2016
- Présidence de M. Philippe Bas, président -La réunion est ouverte à 8 h 30
Audition de Mme Dominique Pouyaud, candidate proposée par le Président du Sénat, en tant que personnalité qualifiée, aux fonctions de membre du Conseil supérieur de la magistrature, en application de l'article 65 de la Constitution
Au cours d'une première réunion tenue dans la matinée, la commission entend Mme Dominique Pouyaud, candidate proposée par le Président du Sénat, en tant que personnalité qualifiée, aux fonctions de membre du Conseil supérieur de la magistrature, en application de l'article 65 de la Constitution.
M. Philippe Bas, président. - Nous avons le plaisir d'accueillir Mme Dominique Pouyaud, dont la désignation est proposée par le Président du Sénat pour exercer les fonctions du membre de Conseil supérieur de la magistrature en remplacement de Mme Jacqueline de Guillenchmidt, démissionnaire.
Mme Dominique Pouyaud est professeur de droit à l'université Paris Descartes depuis l'an 2000. Elle est l'auteur de nombreuses publications sur le droit administratif, dont un ouvrage à paraître sur le droit des contrats. Elle a participé à de nombreux jurys de concours, elle est également membre de l'association française pour la recherche en droit administratif.
Mme Dominique Pouyaud, candidate proposée par le Président du Sénat. - Je suis très honorée que le Président du Sénat m'ait proposée aux fonctions de membre du Conseil supérieur de la magistrature. C'est une lourde responsabilité. Cette organisation est, en effet, chargée de garantir l'indépendance de l'autorité judiciaire aux côtés du Président de la République. Des réformes successives ont renforcé son rôle et son indépendance. Depuis 2008, il n'est plus présidé par le Président de la République ou le garde des sceaux. Depuis 1993, le Conseil comprend une formation sur les magistrats du parquet. Enfin, alors que la réforme de 1993 mettait l'accent sur l'unité du corps judiciaire, celle de 2008 a autorisé sa saisine par les citoyens pour renforcer la confiance dans le système judiciaire.
L'indépendance est la qualité première d'une bonne justice, même si elle ne suffit pas à la garantir. Elle est dans l'intérêt des citoyens qui entretiennent un rapport quotidien avec la justice, que ce soit dans leur vie personnelle ou professionnelle. Surtout, l'autorité judiciaire est gardienne des libertés. Mais si les citoyens demandent toujours à la justice indépendance, impartialité et intégrité, ils la veulent désormais plus accessible, moins inégalitaire et plus rapide. Ces fortes attentes engendrent des déceptions. D'où des critiques parfois contradictoires : on reproche à la justice d'être à la fois trop laxiste et trop sévère. L'irruption du pénal dans la politique a accru ces critiques, avec un problème de fond : les moyens qui lui sont dévolus.
Les membres du Conseil supérieur de la magistrature doivent, comme les juges, être indépendants et impartiaux ; le Conseil constitutionnel l'a rappelé. Professeur d'université, je crois remplir ces conditions. Je n'ai jamais eu d'engagement politique au cours de ma carrière. Je suis vice-doyen, directeur des études, responsable des étudiants de deuxième année, du master 2 de droit public général et des licences à la faculté. Si je remplis des fonctions administratives, j'apprécie surtout le contact avec les élèves.
En prolongement de mes activités à l'université, j'essaie également d'écrire des articles. Le poste de secrétaire général de la Revue française de droit administratif que j'occupe depuis 25 ans - je l'ai également été à la Revue du droit immobilier - me permet de suivre l'actualité de la justice judiciaire. Ce domaine m'a toujours intéressée. J'ai d'ailleurs créé à la faculté un cours sur les institutions juridictionnelles qui me semblait manquer.
Cela dit, mes travaux ne me prédisposent pas particulièrement à siéger au sein du Conseil supérieur de la magistrature. Hormis un petit article sur la responsabilité dans le monde de la justice, mes recherches ont surtout porté sur le droit des contrats.
Pour autant, on attend des personnalités qualifiées un regard extérieur, impartial, que je pense pouvoir porter. Je suis imprégnée de l'intérêt général, qui est en filigrane du droit administratif ; pour avoir fait des études de sociologie et d'histoire, je n'envisage pas les choses sous un angle strictement juridique. Cela me semble essentiel quand le Conseil supérieur de la magistrature a d'abord pour mission de sélectionner environ 2 000 magistrats par an, que ce soit en délivrant une proposition, un avis simple ou conforme. Étudier les dossiers et les comparer, auditionner les candidats m'est familier. On dit que ce travail est de bénédictin, éplucher les arrêts du Conseil d'État l'est aussi... Je participe au recrutement des étudiants du master 2 de droit public général, après avoir siégé huit ans au sein du comité de sélection des maîtres de conférences et professeurs du Conseil national des universités. En outre, je suis membre du comité de l'université qui donne son avis sur l'évolution de la carrière des enseignants. Je fais également partie de jurys de concours : le CFPA depuis 25 ans et autrefois le CAPA, le concours d'administrateur à l'Assemblée nationale depuis une dizaine d'années et, surtout, celui de conseiller des tribunaux administratifs d'appel depuis 5 ans. Cette dernière expérience est fort intéressante : j'ai constaté, avec l'apparition de l'épreuve de motivation depuis trois ans, que les attentes étaient identiques pour les juges administratifs et judiciaires. Si le travail universitaire est souvent solitaire, j'ai appris en participant à ces jurys la collégialité, maître-mot du Conseil supérieur de la magistrature.
Ma connaissance de la jurisprudence administrative pourrait ne pas être inutile, dans la mesure où le Conseil d'État connaît des recours dirigés contre les décisions ou les avis rendus par le Conseil supérieur de la magistrature, en matière disciplinaire ou en matière de nomination.
Voilà les éléments qui, dans une carrière linéaire, purement universitaire, pourraient justifier ma nomination au Conseil supérieur de la magistrature.
M. Philippe Bas, président. - Merci. J'ai apprécié la façon pragmatique dont vous abordez le rôle du Conseil supérieur de la magistrature : sa mission première est, non d'élaborer une doctrine sur la justice du XXIe siècle, mais de participer au choix des magistrats, d'évaluer l'adéquation des profils aux postes à pourvoir. Ce dont vous avez l'expérience, en dépit d'une carrière à première vue éloignée de l'institution judiciaire.
M. Michel Mercier. - Madame le vice-doyen, vous avez insisté sur vos connaissances. Il vous en faudra beaucoup en géographie ! C'est essentiel pour apprécier les demandes de mutation des magistrats...
À votre sens, faut-il aller jusqu'à dessaisir le garde des sceaux de son autorité sur la direction des services judicaires, qui prépare les dossiers soumis au Conseil supérieur de la magistrature pour assurer l'indépendance de la justice ? Certains le pensent.
M. Alain Richard. - Peut-être serait-il bon d'introduire un peu de biodiversité au sein du Conseil national des universités puisqu'il remplit les mêmes fonctions que le Conseil supérieur de la magistrature.
Dans le prolongement des propos de M. Mercier, l'une des principales difficultés des agents publics est d'identifier qui est leur employeur, qui joue le rôle de gestionnaire des ressources humaines. Le Conseil supérieur de la magistrature confronte diplômes et expériences afin de déterminer si le candidat proposé est le bon pour chaque emploi. Ce faisant, il ne valorise les ressources de chacun que par défaut. Ne pensez-vous pas qu'il pourrait consacrer une partie de ses débats à bâtir une politique globale de valorisation du potentiel des magistrats ?
Mme Dominique Pouyaud. - Désolée, je suis titulaire d'une licence d'histoire, non de géographie... Je tâcherai de me rattraper ! Dessaisir totalement le garde des sceaux de son autorité sur les services ? Ce serait une profonde transformation. L'indépendance de la justice passe par l'avis conforme pour les magistrats du siège ; elle est moins sûrement établie pour les magistrats du parquet. Le garde des sceaux actuel s'est engagé à suivre les avis simples du Conseil, mais que fera son successeur ? La Cour européenne des droits de l'homme trouve à y redire ; le juge administratif pourrait aussi considérer qu'une telle pratique est à la limite de l'incompétence négative puisque le ministre abandonne systématiquement sa compétence au profit du Conseil qui lui rend cet avis. Une modification serait souhaitable, on en parle depuis longtemps. Le Conseil supérieur de la magistrature doit-il réfléchir à une politique plus globale de valorisation du potentiel des magistrats ? Sans doute. Ces derniers temps, il a fait un effort de transparence dans ses rapports sur les raisons qui président à ces choix.
La réunion, suspendue à 9 heures, reprend à 9 h 15
Communication
M. Philippe Bas, président. - Notre matinée est incroyablement chargée. Le travail de commission est abrégé, quand le travail en séance dure. Le contraire de l'objectif poursuivi il y a quelques années par le constituant ! C'est paradoxal. Je vous demande donc de tout faire pour aller vite. J'en suis navré.
M. Jean-Pierre Sueur. - Devons-nous nous résigner à expédier des sujets qui ne sont pas minces ? Lutte contre le terrorisme, laïcité... Vous avez écrit, le 14 janvier 2016, une lettre au Président de la République, dans laquelle vous protestez contre l'alourdissement du travail parlementaire. Or vous y avez contribué : nous avions décidé de travailler, de manière consensuelle, sur l'état d'urgence. Le jour même, vous faisiez une conférence de presse annonçant une proposition de loi sur le même sujet ! J'y ai vu une attitude quelque peu partisane.
La solution serait peut-être que vous renonciez à cette proposition de loi, au bénéfice du projet de loi. Mme Troendlé a bien dit hier qu'un seul texte suffisait ! Nous ne saurions nous résigner à un examen superficiel de ces sujets.
M. Philippe Bas, président. - Je ne connais qu'un texte en matière de répression du terrorisme : c'est celui que j'ai déposé. Il résulte de travaux entamés début 2015, après les attentats de janvier. J'ai écrit au Premier ministre pour lui indiquer des pistes - il ne m'a toujours pas répondu. Il faut bien que le Parlement prenne l'initiative pour remédier à la carence gouvernementale. Le Gouvernement a décidé, finalement, de présenter son propre texte - qui viendra sans hâte. Il nous sera toujours loisible alors de reverser dans le projet de loi les dispositions que nous aurons adoptées ici.
Vote et dépouillement du scrutin sur la proposition de nomination par le Président du Sénat aux fonctions de membre du Conseil supérieur de la magistrature
La commission procède au vote sur la proposition de nomination par le Président du Sénat aux fonctions de membre du Conseil supérieur de la magistrature.
M. Philippe Bas, président. - Que nos deux collègues les plus jeunes, Mme Cécile Cukierman et M. Thani Mohamed Soilihi, veuillent bien me rejoindre en tant que scrutateurs.
M. Philippe Bas, président. - Voici les résultats du scrutin :
Nombre de votants : 40
Bulletins blancs : 5
Nombre de suffrages exprimés : 35
Pour : 35
Contre : 0
La commission a donné un avis favorable à la nomination de Mme Dominique Pouyaud pour siéger au sein du Conseil supérieur de la magistrature.
Supprimer les missions temporaires confiées par le Gouvernement aux parlementaires et supprimer le remplacement des parlementaires en cas de prolongation d'une mission temporaire - Examen du rapport et des textes de la commission
Puis la commission examine le rapport de M. Hugues Portelli pour les propositions de loi organique n° 3 (2015-2016) visant à supprimer les missions temporaires confiées par le Gouvernement aux parlementaires et n° 4 (2015-2016) visant à supprimer le remplacement des parlementaires en cas de prolongation d'une mission temporaire, présentées par M. Jacques Mézard et plusieurs de ses collègues et le texte qu'elle propose pour la proposition de loi organique n° 3.
M. Hugues Portelli, rapporteur. - Le parlementaire en mission est apparu sous la seconde République. Alexis de Tocqueville avait un ami proche, Francisque de Corcelle. En mars 1849, Tocqueville est ministre des affaires étrangères, Corcelle est député : il sera désigné comme envoyé officiel en Italie, avec rang de ministre plénipotentiaire - tout en restant député ! Première entorse au principe strict de séparation des pouvoirs. La loi du 15 mars 1849 a créé les parlementaires en mission - avec une limitation à six mois. Sous la Vème République, le législateur organique fixe des règles d'incompatibilité assez strictes entre le mandat parlementaire et les activités non électives, seuls les professeurs d'université et les ministres des cultes d'Alsace-Moselle bénéficiant d'une dérogation.
Or, dès octobre 1958, apparaît la pratique des parlementaires en mission - avec une limite de six mois, comme en 1849. Il s'agit d'une fonction publique non élective ; le parlementaire reste pleinement parlementaire pendant cette mission ; celle-ci ne donne lieu à aucune indemnité. Le contrôle de la nomination par le juge administratif est pour le moins léger, de même que pour la prolongation. Le Conseil constitutionnel a été saisi une fois, en l'occurrence, de la prolongation d'Edgar Faure, parlementaire en mission chargé des célébrations du bicentenaire de 1989. Cette mission ayant duré plus de six mois, un électeur du Doubs a saisi le Conseil constitutionnel - qui a décliné de se prononcer faute pour le bureau de l'assemblée d'origine du parlementaire d'avoir été préalablement saisi.
Le Conseil d'État a une jurisprudence aussi prudente. Dans l'arrêt Mégret de 1998, il estime qu'une mission temporaire est effective si elle s'est achevée par la remise d'un rapport. Or, ce n'est pas toujours le cas...
Certains cas sont plus surprenants : pour Christian Nucci, nommé Haut-commissaire en Nouvelle-Calédonie pendant six mois, puis, après une interruption, à nouveau nommé pour une seconde mission identique, l'Assemblée nationale a considéré qu'il s'agissait d'une seule et même mission...
Le nombre de parlementaires en mission s'accroît. Certains exercent de facto une mission sans être nommés officiellement - pour préparer une proposition de loi, assurer le suivi d'une loi en vigueur, préparer une transposition de directive. Deuxième cas de figure : un décret est pris et publié au Journal officiel, sans forcément indiquer la lettre de mission...
M. Mézard estime que ces pratiques sont contraires à l'esprit de la Constitution, puisqu'elles conduisent le parlementaire à exercer à la fois une mission parlementaire et une mission administrative, chacune à plein temps. Pour son mandat parlementaire, il peut déléguer son vote à l'Assemblée nationale. Récemment, on a ainsi vu apparaître in extremis quatre délégations de vote de parlementaires en mission - qui ont fait basculer le résultat du vote !
Depuis la révision constitutionnelle de 2008, un député nommé ministre revient au Parlement quand il quitte le Gouvernement : exit les remaniements ministériels, place au turn over continu, on l'a vu encore ce matin. De même, nous avons des parlementaires en mission continue, qui tournent... La proposition de loi organique de M. Mézard me paraît parfaitement justifiée.
M. Pierre-Yves Collombat. - Bravo.
M. Hugues Portelli, rapporteur. - La première proposition de loi organique supprime le parlementaire en mission. La seconde est une solution a minima, qui prévoit une élection législative ou sénatoriale partielle plutôt que la nomination du suppléant ou du suivant de liste. J'y suis également favorable.
M. Jacques Mézard. - M. Portelli a parfaitement résumé la situation. Nous avons eu très récemment l'illustration de certaines dérives. Il est temps de remettre les pendules à l'heure, ce sera un progrès dans la transparence.
M. Alain Richard. - Notre rapporteur a méconnu une composante de la genèse de la Constitution de 1958 : la grande admiration de Michel Debré pour le système britannique, où des secrétaires parlementaires jouent le rôle d'adjoint du ministre, tout en restant parlementaires. L'Allemagne fait de même.
Exercer à plein temps plusieurs missions, c'est vrai pour beaucoup de parlementaires, dans leur département ou leur ville... Gardons-nous par conséquent d'aller trop loin dans ce raisonnement. L'important est que nommer un parlementaire en mission ne perturbe pas la vie parlementaire.
C'est une exagération théorique que de voir dans cette situation une aberration. Beaucoup de parlementaires sont intéressés par ces missions. Je reconnais toutefois qu'il faudrait supprimer la possibilité de prolonger les missions, et d'installer, par ce biais, le suppléant. Mais supprimer le parlementaire en mission serait un appauvrissement de la vie institutionnelle.
Le second texte, en revanche, ne me pose pas de problème.
M. Alain Vasselle. - Quelles seraient les conséquences de l'adoption de cette proposition de loi organique ? Le rapporteur invoque, comme principal argument, le cumul des missions. Est-ce considérer que le mandat de parlementaire ne peut être cumulé avec quelque activité que ce soit ? C'est apporter de l'eau au moulin des partisans du non-cumul, voire de ceux qui prônent l'interdiction de toute activité professionnelle. Pour ma part, je suis encore agriculteur en activité. Appuyons-nous plutôt sur la distinction entre pouvoir exécutif et législatif, puisque le parlementaire a aussi pour mission de contrôler le Gouvernement et l'application des lois !
M. Pierre-Yves Collombat. - La Constitution de 1958-1962 n'est pas celle d'aujourd'hui, où tous les pouvoirs, y compris législatifs, sont à l'Élysée ! Les parlementaires en mission sont un des outils du pouvoir exécutif, qui ne fait plus appel au référendum - sinon pour s'asseoir dessus. La première proposition de loi organique me convient.
M. René Vandierendonck. - M. Bignon et moi-même allons être désignés parlementaires en mission pour effectuer, dans un délai précis, un travail qui s'ajoutera au travail parlementaire, et qui ne donnera lieu à aucune indemnisation. Cela dit, j'estime, m'exprimant à titre personnel, qu'il est temps de mettre fin à une situation choquante, paradoxale sur les modalités de remplacement des parlementaires en mission. On pourrait citer des exemples de cooptation... Je voterai le deuxième texte et m'abstiens sur le premier.
M. Hugues Portelli, rapporteur. - Au Royaume-Uni, tout membre du Gouvernement doit être parlementaire. Les secrétaires parlementaires sont les assistants du ministre. La situation n'est en rien comparable à la nôtre.
Difficile d'être à la fois du côté du Parlement, qui vote les lois, et du Gouvernement, qui les applique. La situation est schizophrénique ! On sait, quand on est rapporteur, les pressions du Gouvernement, du président du Conseil constitutionnel, pour faire retirer tel ou tel amendement. Entorses scandaleuses au principe de séparation des pouvoirs ! Aujourd'hui, le ministre est un parlementaire en mission : son suppléant lui rend son siège dès qu'il quitte le Gouvernement... Pour mettre un point d'arrêt à cette dérive, il faut voter la proposition de loi organique.
M. Jean-Pierre Sueur. - Je demande une brève suspension de séance.
La réunion, suspendue à 10 heures, reprend à 10 h 05
M. Philippe Bas, président. - Il y a 3 amendements, rédactionnel, de cohérence et de coordination, présentés par le rapporteur. Nous lui faisons confiance.
Article 1er
Les amendements COM-1 et COM-3 sont adoptés.
Article 2
L'amendement COM-2 de suppression est adopté.
La proposition de loi organique n° 3 est adoptée dans la rédaction issue de ses travaux.
M. Philippe Bas, président. - Compte tenu du vote intervenu sur le premier texte, le second texte perdrait son objet en séance.
M. Jacques Mézard. - Je retirerai le second texte.
M. Jean-Pierre Sueur. - Si le premier texte n'était pas voté en séance publique, il serait utile d'adopter le second.
M. Philippe Bas, président. - M. Mézard devrait le retirer.
M. Jean-Pierre Sueur. - Notre groupe aurait voté le deuxième texte, s'il avait été mis au vote.
M. Philippe Bas, président. - Il vous en est donné acte.
Mme Jacqueline Gourault. - J'aurais voulu reprendre ce deuxième texte, que j'aurais voulu voter.
M. Philippe Bas, président. - Pour la séance publique, vous pouvez toujours rédiger un amendement au premier texte qui vient d'être adopté pour arriver au résultat du second texte.
Le sort des amendements examinés par la commission pour la proposition de loi organique n° 3 est retracé dans le tableau suivant :
Auteur |
N° |
Objet |
Sort de l'amendement |
Article 1er |
|||
M. PORTELLI, rapporteur |
1 |
Rédactionnel |
Adopté |
M. PORTELLI, rapporteur |
2 |
Coordination |
Adopté |
Article 2 |
|||
M. PORTELLI, rapporteur |
3 |
Coordination |
Adopté |
Autorités administratives indépendantes et autorités publiques indépendantes - Examen du rapport et des textes de la commission
Puis la commission examine le rapport de M. Jacques Mézard et les textes qu'elle propose pour la proposition de loi n° 225 (2015-2016), présentée par Mme Marie-Hélène Des Esgaulx, MM. Jean-Léonce Dupont et Jacques Mézard portant statut général des autorités administratives indépendantes et des autorités publiques indépendantes et sur la proposition de loi organique n° 226 (2015-2016), présentée par Mme Marie-Hélène Des Esgaulx, MM. Jean-Léonce Dupont et Jacques Mézard relative aux autorités administratives indépendantes et autorités publiques indépendantes.
M. Philippe Bas, président. - Nous saluons notre collègue Philippe Bonnecarrère, rapporteur pour avis de la commission de la culture.
M. Jacques Mézard, rapporteur. - Ce texte découle des travaux de la commission d'enquête, dont le rapport a été adopté à l'unanimité. Ce travail s'inscrit dans la suite de celui de notre ancien collègue, le doyen Gélard, qui avait déposé deux propositions de loi, dont nous nous sommes largement inspirés.
Notre but n'est pas de détruire les autorités administratives indépendantes (AAI). Nous avons entendu la quasi-totalité de présidents d'autorités, compétents et intelligents. Mais il y a manifestement une dérive. Depuis 1978, on crée une AAI par an en moyenne, sans critères, avec des règles de fonctionnement très différentes, des chevauchements... Cette prolifération fait peser un risque d'éclatement de l'action de l'État et d'illisibilité des institutions, et freine le contrôle parlementaire. Plusieurs AAI tiennent leur qualité non de la loi mais de la doctrine administrative. Tel M. Jourdain, le Parlement découvre qu'il a créé, sans le savoir, des AAI !
Le périmètre a varié. Ainsi, le champ des règles établies en 2013 sur les déclarations d'intérêt et de situation patrimoniale reste incertain : plus de 15 % des membres de collèges ont d'ailleurs refusé de s'y plier, sans conséquences particulières. Qu'aurions-nous entendu si des parlementaires avaient réagi ainsi !
Les interprétations différentes font varier la liste des AAI, en fonction de la volonté supposée du législateur... Il nous est donc apparu souhaitable de dresser la liste dans la loi - comme M. Gélard le proposait dès 2006 - en fixant un socle de règles transversales garantissant leur indépendance et leur impartialité, comme nous y a incités M. Sauvé, vice-président du Conseil d'État.
Cette proposition de loi a pour vocation de fixer le statut général des AAI et autorités publiques indépendantes (API). Nous l'avons accompagnée d'une proposition de loi organique, notamment sur les incompatibilités. La compétence exclusive du législateur doit être affirmée pour la création de ces AAI. Il est temps de rationaliser le paysage des AAI en limitant à 20 leur nombre.
Ce texte ne modifie pas les attributions des AAI et ne propose pas de fusion. Les deux textes harmonisent simplement le statut de ces autorités, en prévoyant une consolidation des règles communes et des dérogations motivées.
Sur l'organisation des AAI et API, nous limitons les mandats à six ans, non révocables et non renouvelables ; pour assurer la continuité, les membres seraient renouvelés de façon échelonnée dans le temps. Un membre ne pourrait exercer qu'un seul mandat au sein d'une seule AAI. En outre, il ne pourrait parallèlement siéger au sein du collège et de la commission des sanctions, conformément à une exigence constitutionnelle.
Certains ont vécu l'absence de leur autorité de la liste comme un désaveu, une déchéance - c'est révélateur !
En matière de déontologie, les membres doivent s'abstenir de siéger quand il y a situation de conflit d'intérêts, notion désormais définie par la loi. Leurs déclarations d'intérêts et de situation patrimoniale seraient consultables par les autres membres, mais non publiées. Dans le socle commun figurent le devoir de réserve, la disponibilité à temps plein des présidents - ce qui ne va pas de soi, apparemment - ainsi que l'incompatibilité avec certains mandats et fonctions juridictionnelles, nécessaire à la diversification des recrutements, pour mettre fin à une certaine consanguinité.
Il est prévu un contrôle par la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP) car on relève certains problèmes déontologiques, quand par exemple un mandat dans une AAI se cumule avec une activité rémunérée par une entreprise du secteur concurrentiel. Certains cumuls posent des problèmes déontologiques. Un cadre déontologique s'appliquerait à leurs personnels. Les directeurs généraux et les secrétaires généraux seraient tenus aux mêmes obligations déclaratives que les membres.
Des règles particulières doivent s'appliquer à la HATVP : les déclarations d'intérêts et de situation patrimoniale de ses membres seraient, par exception, rendues publiques.
La loi fixerait des principes de fonctionnement des AAI : liberté de recrutement, le personnel étant placé sous la seule autorité du président ; liberté d'engagement des dépenses, sous le contrôle de la Cour des comptes, que certaines AAI contestent !
Quant au contrôle parlementaire, il doit s'appliquer aussi aux AAI, qui rendront un rapport annuel d'activité. Leurs présidents devront être nommés dans le cadre de la procédure fixée par l'article 13 de la Constitution.
Bref, nous proposons un régime cohérent applicable aux AAI et aux API, qui ne devront plus être créées autrement que par le législateur. Leur définition doit être précisée, aussi. Comme l'avait relevé le doyen Gélard, certaines ne sont actuellement ni indépendantes... ni des autorités !
Le Secrétariat général du Gouvernement nous a dit que la situation actuelle est satisfaisante, mais nous ne botterons pas en touche, quel que soit le lobbying de certains organismes.
Je voudrais rappeler que certains disposent de garanties d'indépendance sans être des AAI : Haut Conseil des finances publiques, Caisse des dépôts et consignations, AFP... Ils n'ont pas la qualité d'AAI sans qu'on leur dénie leur indépendance.
M. Philippe Bas, président. - Merci. Vous créez un statut commun pour certains des organismes aujourd'hui appelés AAI. Pour les autres, le mode de fonctionnement ne sera pas modifié. Ce qui importe ce n'est pas le « standing », réel ou supposé, que confère l'appellation d'AAI. Quels organismes doivent figurer dans cette liste ? Nous le verrons en séance.
M. Philippe Bonnecarrère, rapporteur pour avis de la commission de la culture. - La commission de la culture, de l'éducation et de la communication a approuvé l'esprit et les principes de ce texte. Les six amendements que nous vous soumettons expriment cette approbation, apportent des points de détail et formulent deux réserves.
Nous vous suivons sur le retrait de l'appellation d'AAI à la Commission nationale d'aménagement cinématographique, ainsi qu'aux médiateurs (du livre, du cinéma, bientôt de la musique) qui sont des personnes individuelles. Nous proposons quelques améliorations, notamment sur les règles de confidentialité des débats du Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA).
S'agissant de la liste des AAI, qui figure en annexe de l'article 1er, nous ne vous suivons pas sur l'Autorité de régulation de la distribution de la presse (ARDP) et la Haute autorité pour la diffusion des oeuvres et la protection des droits sur internet (Hadopi). La toute récente loi du 17 avril 2015, adoptée à l'unanimité au Sénat, a confirmé le statut d'AAI de l'ARDP. À l'occasion d'une question prioritaire de constitutionnalité transmise par la Cour de cassation, le Conseil constitutionnel a reconnu le 7 janvier le statut d'AAI à l'ARDP. Cette autorité comporte quatre magistrats qui veillent à l'application de la loi de 1947, selon laquelle la presse d'information générale doit être disponible partout dans le pays. Les dizaines de procédures qu'elle suscite sont régulées par l'ARDP dans des conditions satisfaisantes. Ne portons pas atteinte à un système qui fonctionne bien.
Nous avons adopté il y a quelques mois un rapport de M. Loïc Hervé et Mme Corinne Bouchoux favorable au travail de la Hadopi. Son rôle est, d'après le Conseil d'État, « pré-pénal » en quelque sorte, puisqu'elle peut saisir le parquet et appliquer des « mesures techniques de protection » à caractère semi-pénal. Dès lors, il n'est sans doute pas souhaitable de lui ôter le statut d'AAI.
M. Philippe Bas, président. - Merci pour cet exposé précis. Ce texte ne retire de pouvoir à aucune institution.
M. Alain Richard. - Ce statut général aurait des avantages, et reflète l'évolution annoncée par les dernières créations d'AAI qui ont montré des convergences. Cela dit, les petites AAI peuvent s'en trouver gênées : lorsqu'elles se réunissent tout au plus dix fois par an, leur président peut-il être à temps plein ? Cela signifiera qu'on choisira une personne à la retraite. Heureusement, l'article 3 de la proposition de loi prévoit la possibilité d'adaptations. La liste des AAI retenues est sujette à débat. Quelques-unes y manquent, je crois. D'où mon amendement COM-13, qui inclut notamment la Commission nationale du débat public, la Commission des participations et des transferts, la Commission des sondages... De même, la Commission consultative du secret de la défense nationale (CCSDN) a beau n'être que consultative, son avis a toujours été suivi. Elle est à la charnière du pouvoir exécutif et du pouvoir judiciaire. Aussi doit-elle rester une AAI, comme la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement (CNCTR).
M. Jean-Yves Leconte. - Je suis entièrement d'accord avec mon collègue Alain Richard, notamment en raison du rôle de son président lors des perquisitions. L'article 15 de la proposition de loi doit être plus précis. Permet-il des mises à disposition ? Celles-ci limitent la capacité de choix lors des recrutements.
M. Alain Vasselle. - Pour poursuivre nos débats d'hier en séance sur le projet de loi relatif à la déontologie des fonctionnaires, pourquoi n'avoir pas prévu les délais dans lesquels la HATVP doit se prononcer ?
M. Yves Détraigne. - Les AAI se sont multipliées. Ce texte est donc bienvenu : le législateur reste souverain !
Mme Cécile Cukierman. - Ce texte répond à une exigence démocratique en identifiant les AAI, en les alignant sur les mêmes règles de fonctionnement et en restreignant leur nombre. Que les membres ne siègent pas dans plusieurs AAI, ce qui créerait une sorte de cursus honorum entre elles, est un gage de leur indépendance.
M. Alain Marc. - La Haute Autorité de santé (HAS) a pris des décisions qui ont fait débat. L'avez-vous auditionnée ? L'Agence nationale de sécurité du médicament lui est-elle liée ? Cette proposition de loi évitera-t-elle les conflits d'intérêts qui ont récemment défrayé la chronique, au préjudice de la sécurité sociale et même parfois de la santé de nos concitoyens ?
Mme Catherine Tasca. - Je salue ce travail, dont j'approuve les orientations. Il faut lutter contre la prolifération des AAI, qui révèle une défiance croissante envers le fonctionnement de l'État et une déresponsabilisation dangereuse de celui-ci dans certains domaines. Toutefois, quelles que soient les limites de l'action de la Hadopi, il ne serait pas judicieux de la retirer de la liste des AAI car ce label confère de l'autorité - dont elle a grand besoin !
M. Alain Anziani. - Quid pour les AAI non retenues dans la liste ? Qui créera les futures AAI ?
M. Alain Richard. - Le législateur !
M. Alain Anziani. - Le texte n'interdit pas à un parlementaire de présider une AAI. Les indemnités afférentes sont-elles cumulables ?
M. Jacques Mézard, rapporteur. - Aucun d'entre vous ne remet en cause l'interdiction pour l'avenir de créer une AAI autrement que par une loi. Notre commission d'enquête a auditionné chacun des 42 présidents. Celui de la HAS a démissionné quelques jours après son audition sans que cette démission soit liée à l'audition...
M. Alain Richard. - Les autres sont restés !
M. Jacques Mézard, rapporteur. - Bien sûr, nous n'avons pas prétendu évaluer l'activité de chaque AAI. Oui, la prolifération est dangereuse. Et encore, nous nous sommes cantonnés aux AAI et API - alors que les hauts conseils et autres commissions pullulent... Sur les délais obligatoires de la HATVP, nous y réfléchirons.
Seul le législateur pourra créer des AAI et les parlementaires qui y siègent ne touchent pas d'indemnité, comme l'a voulu le législateur organique en 2013. Depuis cette date, la présidence d'une AAI ou d'une API est également incompatible avec le mandat parlementaire. À titre personnel, je pense même qu'un parlementaire n'a pas à siéger dans une AAI.
Le projet de loi de finances fixe un plafond d'emplois. Les mises à disposition restent des décisions administratives.
M. Jean-Yves Leconte. - Il faut éviter que les recrutements soient imposés, via un plafond d'emploi réduit et la faculté de mises à disposition.
M. René Vandierendonck. - C'est important.
M. Jacques Mézard, rapporteur. - Le « jaune » budgétaire informera le Parlement sur ce point.
EXAMEN DES AMENDEMENTS DE LA PROPOSITION DE LOI
M. Jacques Mézard, rapporteur. - Les amendements COM-13, COM-1 et COM-2 modifient la liste. A ce stade, je préconise le retrait : nous devons avoir ce débat en séance publique, ne serait-ce que pour recueillir toutes les contributions écrites sollicitées auprès des AAI concernées.
Les amendements COM-13, COM-1 et COM-2 sont retirés.
M. Jacques Mézard, rapporteur. - Mon amendement COM-16 prévoit le remplacement d'un membre huit jours au moins avant l'expiration de son mandat. C'est un amendement de bonne administration !
L'amendement COM-16 est adopté.
M. Alain Richard. - L'amendement COM-7 traite les cas de manquement aux obligations des membres d'une AAI en simplifiant la procédure.
M. Jacques Mézard, rapporteur. - L'idée est pertinente mais je demande le retrait afin de trouver une rédaction appropriée d'ici la séance, puisque celle-ci ne prend pas en compte la situation particulière du président.
L'amendement COM-7 est retiré.
Article additionnel après l'article 9
M. Alain Richard. - Cet amendement fixe un cadre pour les rémunérations et indemnités des membres des AAI.
M. Jacques Mézard, rapporteur. - Avis favorable
L'amendement COM-11 est adopté et devient un article additionnel.
M. Jacques Mézard, rapporteur. - Avis favorable à l'amendement COM-8.
L'amendement COM-8 est adopté.
M. Jacques Mézard, rapporteur. - Mon amendement COM-18 tire la conséquence du fait que les parlementaires sont déjà soumis à des règles particulières d'incompatibilité pour les mandats électifs locaux.
L'amendement COM-18 est adopté.
Article 13
L'amendement de précision COM-28 est adopté.
Article 15
L'amendement de précision COM-19 est adopté.
Article 17
L'amendement COM-15 est adopté.
M. Jacques Mézard, rapporteur. - Avis favorable à l'amendement COM-12.
L'amendement COM-12 est adopté.
M. Alain Richard. - Il est paradoxal que le Parlement se fasse une obligation à lui-même.
M. Jacques Mézard, rapporteur. - Nous écrivons que le rapport « peut » donner lieu à un débat en séance... Il n'y a pas d'obligation.
M. Alain Richard. - Cela renforce mon argument !
M. Jacques Mézard, rapporteur. - Sagesse.
L'amendement COM-9 est adopté.
M. Philippe Bonnecarrère, rapporteur pour avis. - Par cohérence, je suis d'accord pour retirer l'amendement COM-3, nous en reparlerons en séance publique.
L'amendement COM-3 est retiré.
Article 27
L'amendement de précision COM-22 est adopté.
Article 30
L'amendement COM-27 de correction d'une erreur matérielle est adopté.
Article 33
L'amendement de correction d'une erreur matérielle COM-23 est adopté.
Article 36
L'amendement de correction d'une erreur matérielle COM-24 est adopté.
Article 37
L'amendement de précision COM-29 est adopté.
Article 38
L'amendement de coordination COM-25 est adopté.
Article 39
Les amendements de coordination COM-26 et COM-14 sont adoptés. L'amendement COM-4, satisfait, n'est pas adopté.
M. Jacques Mézard, rapporteur. - Avis favorable à l'amendement COM-5.
L'amendement COM-5 est adopté.
Article 44
L'amendement de précision COM-20 est adopté.
Article 46
L'amendement de coordination COM-21 est adopté.
M. Jacques Mézard, rapporteur. - L'amendement COM-6 maintient plusieurs médiateurs à des obligations déclaratives en faveur de la transparence, même si elles ne sont plus des AAI. Avis favorable.
M. Philippe Bonnecarrère, rapporteur pour avis. - Il va dans votre sens...
L'amendement COM-6 est adopté.
M. Jacques Mézard, rapporteur. - Mon amendement COM-17 maintient la nomination du président de la Commission de la sécurité des consommateurs à la procédure de l'article 13 de la Constitution.
L'amendement COM-17 est adopté.
M. Jacques Mézard, rapporteur. - Avis favorable à l'amendement COM-10, mais je propose de rédiger le début de cet amendement ainsi : « À défaut d'option dans le délai prévu au présent alinéa ou à l'article 6 de la loi organique relative aux AAI et aux API... »
M. Alain Richard. - J'accepte de rectifier en ce sens.
L'amendement COM-10 rectifié est adopté.
La proposition de loi est adoptée dans la rédaction issue des travaux de la commission.
EXAMEN DES AMENDEMENTS DE LA PROPOSITION DE LOI ORGANIQUE
M. Philippe Bas, président. - Nous en venons aux amendements sur la proposition de loi organique.
Article 3
L'amendement de précision COM-3 est adopté.
M. Philippe Bas, président. - L'amendement COM-2 maintient la procédure de l'article 13 pour la nomination du président de la Commission de la sécurité des consommateurs.
L'amendement COM-2 est adopté.
Article 5
L'amendement de coordination COM-4 est adopté.
M. Jacques Mézard, rapporteur. - Par cohérence, avis favorable à l'amendement COM-1.
L'amendement COM-1 est adopté.
Article 6
L'amendement de précision COM-5 est adopté.
La proposition de loi organique est adoptée dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Le sort des amendements examinés par la commission sont retracés dans les tableaux suivant :
AMENDEMENTS SUR LA PROPOSITION DE LOI
AMENDEMENTS SUR LA PROPOSITION DE LOI ORGANIQUE
Nomination d'un rapporteur
M. Christophe Béchu est nommé rapporteur sur la proposition de loi organique n° 278 (2015-2016) et la proposition de loi n° 279 (2015-2016), adoptée par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, de modernisation des règles applicables à l'élection présidentielle.
Prévention et lutte contre les incivilités, contre les atteintes à la sécurité publique et contre les actes terroristes dans les transports collectifs de voyageurs - Examen des amendements au texte de la commission
La commission examine ensuite les amendements sur son texte n° 316 (2015-2016) pour la proposition de loi n° 281 (2015-2016), adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, relative à la prévention et à la lutte contre les incivilités, contre les atteintes à la sécurité publique et contre les actes terroristes dans les transports collectifs de voyageurs.
EXAMEN DES AMENDEMENTS DU RAPPORTEUR
Article 1er
L'amendement n° LOIS-1 est adopté.
Article 2
L'amendement n° LOIS-2 est adopté.
Article 6 bis AA
L'amendement n° LOIS-3 est adopté.
EXAMEN DES AMENDEMENTS DE SÉANCE
Article 1er
La commission émet un avis défavorable sur les amendements nos 17, 19 et 36.
Article additionnel après l'article 1er
Mme Éliane Assassi. - L'amendement n° 20 précise que les services internes de la RATP ou de la SNCF ne sauraient faire l'objet d'une privatisation. Nous visons bien sûr les missions de sécurité...
M. Philippe Bas, président. - Question sensible !
M. René Vandierendonck. - Ce travail pose les vraies questions et s'inscrit dans la suite des travaux menés précédemment sur la sécurité. Ainsi, avec la proposition de loi de Mme Troendlé relative à la protection des mineurs, le rapport réalisé avec mon collègue François Pillet sur les polices territoriales, ou le débat demandé par Mme Assassi sur la police municipale en 2013, nous avons tranché plusieurs débats. La baisse de fréquentation de certaines lignes et leur coût pour les collectivités territoriales posent problème. Le ministre de l'Intérieur me reprochera de poser la même question que naguère avec l'amendement que j'ai déposé visant à transférer au président de l'intercommunalité les attributions lui permettant de réglementer la police des transports, quand l'intercommunalité est compétente en la matière : évidemment, puisque je n'ai pas reçu de réponse précise à la question de savoir quand la proposition de loi relative aux polices territoriales, votée par le Sénat en 2014 sera examinée.
M. François Bonhomme, rapporteur. - Avis défavorable.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 20.
Article 1er ter
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 26.
Elle émet un avis favorable à l'amendement n° 1 rectifié bis.
Article 2
La commission émet un avis défavorable aux amendements nos 18, 2 rectifié bis, 21 et 37 ; et un avis favorable à l'amendement n° 31.
Article additionnel après l'article 2
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 27.
Article 3
La commission demandera au président du Sénat de prononcer l'irrecevabilité des amendements nos 22 et 32 rectifié au titre de l'article 41 de la Constitution.
Le sous-amendement n° 40 du Gouvernement devient sans objet.
Article 3 bis
La commission donne un avis défavorable aux amendements nos 3 rectifié et 33 rectifié.
Article additionnel après l'article 3 bis
La commission donne un avis défavorable à l'amendement n° 13.
Article 4
La commission s'en remettra à la sagesse du Sénat sur l'amendement n° 4 rectifié bis.
Article 4 bis
La commission émet un avis favorable aux amendements nos 5 rectifié bis et 16 rectifié.
Article additionnel après l'article 4 bis
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 29.
Article 5
La commission émet un avis favorable à l'amendement n° 6 rectifié bis.
Article 6
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 23.
Articles additionnels après l'article 6 bis AA
La commission émet un avis favorable à l'amendement n° 7 rectifié ter. Elle demandera au président du Sénat de prononcer l'irrecevabilité de l'amendement nos 28 au titre de l'article 41 de la Constitution.
Article 7
La commission demandera le retrait de l'amendement n° 8 rectifié et à défaut, y sera défavorable.
Article 8
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 14.
Article 8 bis
La commission émet un avis défavorable aux amendements nos 38 et 24.
Article 9
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 25.
Elle émet un avis favorable aux amendements nos 9 rectifié, 30 et 10 rectifié bis.
Articles additionnels après l'article 9
La commission émet un avis défavorable aux amendements nos 11 rectifié bis et 15.
Article 12
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 39 et un avis favorable à l'amendement n° 35.
Article additionnel après l'article 13
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 12 rectifié bis.
Article 14 (supprimé)
La commission demandera au président du Sénat de prononcer l'irrecevabilité de l'amendement n°34 rectifié au titre de l'article 41 de la Constitution.
Mme Catherine Troendlé. - À propos de l'amendement n° 15, M. Karoutchi dit que des mutuelles incitent à la faute en promettant de payer l'amende. Que faisons-nous contre cela ?
M. François Bonhomme, rapporteur. - La sanction proposée par M. Karoutchi est disproportionnée ; cela devrait plutôt faire l'objet d'une contravention de 5ème classe.
La commission donne les avis suivants :
AMENDEMENTS DU RAPPORTEUR
AMENDEMENTS DE SÉANCE
Réduction du nombre minimal d'actionnaires dans les sociétés anonymes non cotées - Examen des amendements au texte de la commission
Puis la commission examine ensuite les amendements sur son texte n° 296 (2015-2016) pour le projet de loi n° 222 (2015-2016) ratifiant l'ordonnance n° 2015-1127 du 10 septembre 2015 portant réduction du nombre minimal d'actionnaires dans les sociétés anonymes non cotées.
M. André Reichardt, rapporteur. - La commission a modifié le projet de loi en complétant son article unique, ce que le Gouvernement a accepté, comme il accepte ces deux nouveaux amendements. L'amendement n° 1 précise le périmètre des sociétés anonymes tenues au minimum de sept actionnaires et l'amendement n° 2 assure l'application à Wallis-et-Futuna.
Les amendements nos 1 et 2 sont adoptés.
Renforcer l'efficacité de la lutte antiterroriste - Examen du rapport et du texte de la commission
La commission examine ensuite le rapport de M. Michel Mercier et le texte qu'elle propose sur la proposition de loi n° 280 (2015-2016) présentée par M. Philippe Bas et plusieurs de ses collègues tendant à renforcer l'efficacité de la lutte antiterroriste.
M. Michel Mercier, rapporteur. - La proposition de loi dont nous sommes saisis aujourd'hui a pour objet de renforcer l'efficacité de la lutte antiterroriste...
M. Pierre-Yves Collombat. - Sans compter toutes les suivantes !
M. Philippe Bas, président. - Un seul texte est aujourd'hui en discussion au Parlement sur la répression du terrorisme, celui-ci. Un projet de loi est en préparation : enfin ! Nous le réclamions depuis le début de l'année...
M. Michel Mercier, rapporteur. - Au fil des années, un droit dérogatoire se construit pour lutter contre cette forme particulière de criminalité que constitue le terrorisme. Sous l'empire de l'état d'urgence, que le Gouvernement envisage de proroger une nouvelle fois, la menace n'a pas baissé d'intensité. Le comité de suivi créé par notre commission l'a vérifié auprès des services de lutte antiterroriste. Notre pays est visé tout particulièrement par les organisations terroristes : il faut leur montrer notre détermination à nous protéger et à la combattre, dans le respect de l'État de droit.
L'an dernier, plusieurs textes ont renforcé l'action administrative contre le terrorisme ; le volet judiciaire, lui, n'a pas fait l'objet de la même adaptation. La proposition de loi du président Philippe Bas a précisément cet objectif : dans la conduite de l'enquête, dans les incriminations, comme dans le régime d'application des peines, il était nécessaire de mieux armer le juge judiciaire.
Nous avons complété le travail des auteurs de la proposition de loi par de nombreuses auditions, auxquelles certains membres du comité de suivi ont participé. Notre objectif est que les procédures de droit commun, hors état d'urgence, soient efficaces.
L'enquête judiciaire est menée par le procureur ou par le juge d'instruction. Nous donnons aux magistrats les mêmes pouvoirs que ceux que nous avons prévus pour les services spécialisés de renseignement. Mieux vaut que certaines techniques soient utilisées par le juge judiciaire. Il me paraît plus souhaitable que la « sonorisation d'un lieu d'habitation », jolie formule, soit décidée par un magistrat, en l'occurrence le juge de la détention et des libertés quand l'enquête est menée par le parquet. Dans le domaine de la police administrative à vocation préventive, le juge administratif contrôle a posteriori l'usage des mesures de police et l'action de l'autorité administrative, créant une jurisprudence et donc un encadrement. A contrario, dans le domaine judiciaire, l'autorisation d'agir est préalable. Toute utilisation d'une technique d'enquête doit être préalablement décidée par un magistrat, ce qui constitue une différence importante.
Nous avons réfléchi à l'amélioration de la procédure d'enquête afin de supprimer toute interruption de ce processus : entre l'enquête de flagrance ou préliminaire et la suite de la procédure avec la saisine des magistrats instructeurs, il peut exister un vide puisque tous les actes d'enquête autorisés par le procureur doivent être clos, à charge pour le juge d'instruction de les autoriser, le cas échéant, à nouveau. Cet intervalle peut occasionner des interruptions dans les mesures d'enquête et être mis à profit par les personnes poursuivies les plus averties. Avec un amendement que je vous présenterai, les décisions du procureur pourront continuer à s'appliquer pendant quarante-huit heures après la saisine du juge d'instruction.
La proposition de loi crée de nouvelles infractions pénales pour coller à la réalité de l'action terroriste, par exemple en ce qui concerne la consultation habituelle de certains sites faisant l'apologie du terrorisme. Je tiens d'ailleurs à souligner, comme cela a été rappelé lors de nos auditions, que les nouvelles technologies jouent un rôle essentiel dans cette forme de criminalité : la règle de droit doit en conséquence lui être adaptée. Les attentats du Bataclan ont été planifiés et organisés depuis la Syrie. Il faut armer nos magistrats pour lutter contre ce phénomène : c'est pour cela, par exemple, que le texte crée une incrimination pour les personnes qui séjournent sur place dans le but d'entrer en contact avec les organisations terroristes.
La procédure relative à l'application des peines doit également bénéficier d'une base juridique spécifique : regroupement dans certains quartiers pénitentiaires des individus radicalisés, inscription au fichier des personnes recherchées, par exemple. De même, faut-il prévoir que la peine de contrainte pénale est applicable aux infractions terroristes ?
M. Jean-Pierre Sueur. - Aucun juge ne l'utilise dans ce cas.
M. Michel Mercier, rapporteur. - Raison de plus pour la supprimer s'agissant de ces infractions. Je le répète, ce texte arme le juge judiciaire, pour répondre aux demandes des magistrats que nous avons entendus. Certes, une décision du Conseil constitutionnel en 1999 a précisé le champ d'application de l'article 66 de la Constitution, mais le juge judiciaire doit jouer tout son rôle. En tout état de cause, quel que soit le domaine dans lequel se situe l'action de lutte antiterroriste, tout conflit est tranché par un juge, administratif ou judiciaire, c'est une garantie pour tous les citoyens.
M. Philippe Bas, président. - Co-auteur de ce texte, je veux dire quelques mots de son contenu. Il y a deux cadres juridiques bien distincts : l'autorité administrative, lorsque l'état d'urgence est déclaré, est autorisée à prendre des mesures pour limiter la liberté d'aller et venir ou pour interdire des réunions publiques, autant de mesures qui me semblent être tout autant attentoires aux libertés publiques que les perquisitions ou les assignations à résidence. Ces mesures n'ont pas de lien direct avec l'enquête menée par le parquet national antiterroriste. La prorogation de l'état d'urgence n'en a pas plus. Cette proposition de loi ne traite pas de l'état d'urgence mais des pouvoirs du parquet, de la définition des crimes et délits liés au terrorisme et de l'exécution des peines.
Mme Catherine Troendlé. - Ce texte arrive à point nommé. À la fin de cette première période d'application de l'état d'urgence, il est opportun de vérifier quelles mesures sont susceptibles de faire défaut à la procédure de droit commun, précisément pour pouvoir sortir de l'état d'urgence. Je remercie le rapporteur pour cet énorme travail qui a visé à identifier tous les moyens de lutter contre le terrorisme hors période d'exception. Nos interlocuteurs ont été convergents sur les outils qui font défaut à notre législation. Le rapporteur a réussi à traduire ces demandes dans les amendements qu'il va nous présenter. Dans ces conditions, je m'interroge sur l'utilité de la révision constitutionnelle envisagée par le Gouvernement.
M. François Zocchetto. - Il faut intervenir avec parcimonie dans le domaine pénal. Certaines faiblesses sont apparues, corrigeons-les afin qu'elles ne deviennent pas fatales. Les vingt-quatre articles de la proposition de loi sont issus des auditions de magistrats, fort productives. Il faut en effet sortir de l'état d'urgence. Du reste, même sous ce régime exceptionnel, l'institution judiciaire est démunie pour traiter de certaines situations. Ce travail mené par la commission doit être accepté par le Gouvernement. Hier soir, celui-ci nous a présenté un projet de loi... que nous avions adopté comme proposition de loi de Mme Troendlé il y a déjà plusieurs mois ! Par pitié, cessons de perdre ainsi un temps précieux.
Mme Esther Benbassa. - Ce texte est uniquement répressif, et nous plonge dans un monde orwellien de contrôle absolu. Qu'apporte la proposition de loi ? Les actes terroristes s'amplifient, se multiplient, quels que soient les textes législatifs que nous adoptions. Des lois ne peuvent régler un problème si complexe... Mon groupe a toujours été hostile à de telles mesures d'exception. Mais peut-être faut-il voir là une monnaie d'échange entre l'exécutif et la majorité sénatoriale, pour faire accepter par celle-ci la réforme constitutionnelle ?
Mme Catherine Troendlé. - Scandaleux !
Mme Esther Benbassa. - Ajoutez un article disant : « Il est interdit de parler » !
Un article donne au procureur la possibilité de recevoir des données au moyen d'un IMSI catcher, lesquelles seront ensuite exploitées par les services de renseignement. Nous allons encore plus fort dans l'atteinte à la vie privée !
M. Jacques Mézard. - J'ai participé aux travaux du comité de suivi de l'état d'urgence : nous avons demandé aux magistrats quels outils leur manquaient, et les articles qui y pourvoient sont utiles. Mais nous assistons aussi à une course à la mer. L'état d'urgence vient après la loi sur le renseignement : tout pouvoir a été donné au juge administratif. On veut dès lors rétablir l'équilibre au profit du juge judiciaire... au détriment de principes auxquels nous sommes attachés. D'autant qu'il ne suffit pas, Mme Benbassa a raison, de voter des textes répressifs pour arrêter les terroristes. Mon groupe fera le tri entre les dispositions utiles - l'intervention du juge des libertés est positive, par exemple - et les pouvoirs accrus du parquet.
Mme Éliane Assassi. - Je ne partage pas toutes les orientations de ce texte, largement marqué par le tout répressif. Je rejoins les propos de M. Mézard. Dans les auditions, la place du juge des libertés et de la détention est constamment revenue, évoquée par tous nos interlocuteurs. Il a fallu en tenir compte. Quant à l'éradication de Daesh et la lutte contre le terrorisme, tout reste à faire, malgré la pléthore de textes.
Sur le fond, cette proposition de loi nous inquiète. Renforcer les pouvoirs de la justice, soit, mais certaines mesures - rétention de sûreté, allongement de la détention provisoire à trois ans, y compris pour les mineurs - posent vraiment problème. Le Gouvernement n'aura bientôt plus besoin d'instaurer l'état d'urgence : celui-ci sera devenu le droit commun ! Nous voterons contre, mais présenterons des amendements. Et cessons l'hypocrisie : beaucoup d'entre nous ne voteront pas la révision constitutionnelle.
M. Michel Mercier, rapporteur. - Laquelle ? Le texte du projet de loi constitutionnelle a changé ce matin...
M.
Pierre-Yves Collombat. - Je m'étonne de ce
nouveau texte. Le terrorisme
- Action directe en 1987, attentats dans
le RER dans les années quatre-vingt-dix - n'est pas, lui, un
phénomène récent. Cette proposition de loi est-elle un
message aux terroristes ? Ou à l'opinion publique ? Les
terroristes seront-ils impressionnés par la déchéance de
nationalité ?
Mme Esther Benbassa. - Énormément !
M. Pierre-Yves Collombat. - Le traitement du terrorisme par ces seules mesures me semble léger. Il faut se préoccuper de la dimension sociale. Ah non, interdit le Premier ministre, expliquer, ce serait excuser !
Toute comparaison historique est délicate. Cependant souvenons-nous de Clemenceau qui, face à l'explosion de la criminalité dans les années 1910, a entièrement réorganisé la police, pour la moderniser. Un peu moins de lois, un peu plus d'action et de moyens. Le Président de la République demandait au lendemain des attentats que le pacte de sécurité l'emporte sur le pacte de stabilité... mais M. Macron n'est pas d'avis d'augmenter les budgets.
M. Philippe Bas, président. - Il y a des dispositions à prendre, par exemple pour éviter des interruptions de procédure qui obligent à recommencer le travail à zéro.
M. René Vandierendonck. - Compte tenu des revirements du Gouvernement, il n'était pas inutile que le Sénat se mobilise : à la place de nos collègues de la majorité sénatoriale, j'aurais fait de même. M. Urvoas devient aujourd'hui garde des sceaux, cela devrait favoriser les discussions.
Mme Éliane Assassi et Mme Esther Benbassa. - Ah oui ?
M. René Vandierendonck. - Oui, si l'on arrête l'hypocrisie, on peut discuter. La question de la révision ou non de la Constitution est subsidiaire. La répression des infractions est une préoccupation de nos concitoyens. Revisiter les moyens du juge judiciaire est intéressant. Il n'est pas exclu de trouver une majorité pour voter de façon pluriannuelle les moyens de la justice...
Mme Jacqueline Gourault. - Très bien.
M. Jacques Bigot. - Lorsque la République est attaquée, elle doit se protéger... sans remettre en cause l'État de droit. Le contrôle de l'autorité judiciaire est fondamental. Il faut s'adapter aux actes terroristes tels qu'ils sont aujourd'hui, organisés de l'étranger, faisant appel à des « soldats » qui attaquent leur propre pays. Identifier les candidats au djihad est crucial mais compliqué, il y faut des moyens nouveaux, dans le respect des règles de droit. Nous aurons un débat avec le ministre de la justice, qui reviendra avec un texte. Ce pré-débat sera précieux. Nous devons prendre en considération la place du juge des libertés et de la détention - souvenez-vous de notre débat sur ce sujet lors de l'examen du projet de loi organique relatif à l'indépendance de la magistrature. Autre question importante : comment, durant l'incarcération, travailler à éviter une future récidive ? Ce texte répond-il complètement à ces préoccupations ? Je n'en suis pas certain. Des infractions nouvelles sont-elles nécessaires ? Elles compliquent le travail des magistrats. Nous y reviendrons à l'article 10. Malgré les difficultés, la démocratie doit se défendre contre ceux qui veulent la détruire.
Mme Esther Benbassa. - Et détruire les libertés...
M. Philippe Bas, président. - Il est piquant que des parlementaires préfèrent l'initiative gouvernementale à l'initiative parlementaire...
M. Michel Mercier, rapporteur. - Le juge judiciaire, gardien des libertés, doit avoir les moyens de poursuivre les terroristes et de les condamner. Ce n'est pas faire entrer l'état d'urgence dans le droit commun ! Le juge administratif contrôle et parfois suspend une assignation à résidence, on l'a vu récemment. Le juge judiciaire ne contrôle pas a posteriori, il autorise a priori. Nous ne sommes pas dans un monde orwellien ! Dans la loi sur le renseignement, nous avons encadré l'utilisation des techniques de surveillance, dont certaines étaient mises en oeuvre depuis fort longtemps sans fondement légal, c'est ce qui nous distingue d'un monde orwellien. Nous avons la chance d'avoir des magistrats remarquables qui aiment leur travail et le font bien.
EXAMEN DES AMENDEMENTS
Articles additionnels avant l'article 1er
M. Michel Mercier, rapporteur. - Les amendements COM-8 et COM-9 ont un rapport très lointain avec la proposition de loi... Retrait, ou avis défavorable.
M. Jean Louis Masson. - Je les maintiens. Ils n'ont pas moins de rapport avec le texte que d'autres. Ils posent deux problèmes fondamentaux. Récemment, la famille d'un terroriste s'est portée partie civile.
Les amendements COM-8 et COM-9 ne sont pas adoptés.
M. Michel Mercier, rapporteur. - Les juges judiciaires ont réclamé des outils pour lutter contre le terrorisme. L'enquête ne doit pas s'interrompre lorsque le procureur passe la main au juge d'instruction. Aussi l'amendement COM-10 prolonge-t-il de 48 heures la durée de validité des décisions du procureur une fois le juge d'instruction saisi.
M. Alain Richard. - J'approuve cet amendement, qui montre l'importance d'un peu de réflexion pour l'amélioration de nos textes.
M. Philippe Bas, président. - Il y avait eu « un peu de réflexion » déjà auparavant, cher collègue. Parlez plutôt de réflexion supplémentaire.
L'amendement COM-10 est adopté.
M. Michel Mercier, rapporteur. - L'amendement COM-11 est un amendement de précision à cet article 2 qui autorise les perquisitions de nuit dans les lieux à usage d'habitation dans le cadre des enquêtes préliminaires en matière de lutte contre le terrorisme.
L'amendement COM-11 est adopté.
Article 3
L'amendement de précision juridique COM-12 est adopté.
M. Michel Mercier, rapporteur. - L'amendement COM-13 permet au juge d'instruction d'utiliser l'IMSI catcher. Là encore, il s'agit de lui donner des outils : on ne peut lui demander de faire toute la lumière en ne mettant à sa disposition que des boîtes d'allumettes !
L'amendement COM-13 est adopté.
M. Michel Mercier, rapporteur. - Mon amendement COM-14 simplifie le texte et impose au juge des libertés et de la détention une ordonnance motivée pour autoriser les opérations de sonorisation.
Mme Esther Benbassa. - Je vote pour.
L'amendement COM-14 est adopté, ainsi que l'amendement de précision juridique COM-15.
M. Jean-Pierre Sueur. - Quelle est la position du rapporteur sur l'article 7 ? Pourquoi les juridictions interrégionales spécialisées (JIRS) ne peuvent-elles pas continuer à exercer cette mission ?
M. Michel Mercier, rapporteur. - C'est une question de bonne administration de la justice. Il faut un suivi centralisé à Paris ; en revanche, les juridictions de droit commun continueront de traiter des infractions les moins graves.
M. Jean-Pierre Sueur. - Il y a un problème de moyens. La cybercriminalité est un océan. Centraliser la lutte contre ce fléau a des implications considérables.
M. Philippe Bas, président. - Cela concerne uniquement les affaires de cybercriminalité les plus graves.
Article 8
L'amendement de précision COM-16 est adopté.
Article additionnel avant l'article 10
M. Michel Mercier, rapporteur. - Les amendements nos COM-6 et COM-7 seront partiellement satisfaits par l'amendement que je présenterai à l'article 11. Retrait.
Les amendements COM-6 et COM-7 ne sont pas adoptés.
Article 10
L'amendement de précision n° COM-17 est adopté.
M. Jean-Pierre Sueur. - Pourquoi la création d'un nouveau délit ? Il existe déjà une sanction. Le problème est de réunir les moyens pour détecter la consultation régulière de sites faisant l'apologie du terrorisme. L'augmentation du quantum ne changera rien.
M. Michel Mercier, rapporteur. - L'augmentation du quantum concerne le délit d'entrave au blocage.
L'amendement COM-17 est adopté.
M. Michel Mercier, rapporteur. - Les auditions ont attiré notre attention sur l'écrasement des peines : en effet le tribunal correctionnel ne peut condamner au-delà de dix ans d'emprisonnement, ce qui ne permet pas de différencier finement la peine en fonction de la gravité des faits... La proposition de loi proposait de criminaliser l'infraction d'association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste. Or une cour d'assises mobilise sept magistrats professionnels. Comment criminaliser davantage sans paralyser la cour d'assises spéciale de Paris ?
L'amendement COM-18 permet de criminaliser seulement une partie des comportements qui relèvent de l'association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste, en prévoyant la création d'une circonstance aggravante. Par ailleurs, cet amendement étend la possibilité pour la cour d'assises d'assortir ses condamnations d'une période de sûreté, qui pourrait être « incompressible » pour les condamnations à la perpétuité.
M. Jean-Pierre Sueur. - Cela ne pose-t-il pas un problème d'échelle des peines ? Ne craignez-vous pas de surcharger gravement la cour d'assises spécialisée ?
M. Philippe Bas, président. - C'est un vrai problème...
M. Michel Mercier, rapporteur. - Oui. C'est pourquoi nous créons la circonstance aggravante, qui évite de criminaliser toutes les associations de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste. Si nous ne modifions pas le code pénal, il y a cependant un problème car alors la peine maximale encourue est de dix ans. Oui, il y a un problème de moyens. Ceux-ci ont été renforcés par la ministre mais, pour l'heure, les postes créés ne sont pas pourvus... Quant à l'échelle des peines, le terrorisme n'est pas un crime comme les autres, il est normal de lui appliquer des règles spécifiques !
M. François Pillet. - Sur l'échelle des peines, le code pénal est souvent ubuesque. Cela mérite un travail global sur le code.
M. Michel Mercier, rapporteur. - Aussi avons-nous renoncé à prévoir une peine de quinze ans pour l'infraction.
L'amendement COM-18 est adopté.
Article additionnel après l'article 11
M. Michel Mercier, rapporteur. - Nous proposons de supprimer la rétention et la surveillance de sûreté prévues par la proposition de loi, pour instituer la « perpétuité réelle » et permettre aux juridictions de jugement, avec cet amendement COM-19, de prononcer le suivi socio-judiciaire pour les personnes condamnées pour terrorisme.
M. Alain Vasselle. - Où est l'article 11 bis ? Ces mesures ne seront pas dissuasives. Mieux vaut protéger nos concitoyens par des mesures de rétention et un suivi socio-judiciaire. Pourquoi, dès lors, le verbe « peuvent » ? Cela doit être automatique, et les intéressés peuvent toujours faire une demande pour que les mesures soient levées.
M. Michel Mercier, rapporteur. - L'amendement COM-19 deviendra l'article 11 bis si nous l'adoptons. Quant au verbe « peuvent », il répond à un principe aussi fondamental que la présomption d'innocence : l'individualisation des peines. Toute autre solution serait contraire à la Constitution.
L'amendement COM-19 est adopté et devient article additionnel.
Article 12
L'amendement de précision COM-20 est adopté.
M. Jean-Pierre Sueur. - L'article 12 de la proposition de loi est-il nécessaire ?
M. Michel Mercier, rapporteur. - Il lève des ambiguïtés, ou pour le dire comme M. David Bénichou, juge d'instruction au pôle antiterroriste que nous avons auditionné, il comble des « angles morts ». Mme Laurence Le Vert partageait cette analyse. Par ailleurs, il s'agit d'une mesure alternative à la proposition du Gouvernement d'instaurer un régime de droit commun d'assignation à résidence pour les personnes de retour de la zone syro-irakienne.
Article 13
L'amendement de coordination COM-21 est adopté.
Article 14
L'amendement de coordination COM-22 est adopté.
M. Michel Mercier, rapporteur. - Il n'y a aucune peine complémentaire automatique. Cela serait anticonstitutionnel. Simplement, le juge devra se prononcer sur la peine complémentaire. Retrait, ou avis défavorable.
M. Alain Richard. - Cette discussion est difficile. Si le législateur écrit que le juge doit se prononcer sur la peine complémentaire, cela signifie qu'il doit prononcer une peine, ou se justifier de ne pas en prononcer. Cela oriente forcément la décision du juge. Cette mode est fâcheuse, car elle peut aboutir à une automaticité de la peine. Gardons-nous de telles dispositions !
M. Jacques Bigot. - Le texte n'impose rien, mais il enferme le juge dans une forme d'obligation. Acceptons-nous que celui-ci ait un vrai pouvoir ?
L'amendement COM-1 n'est pas adopté.
M. Michel Mercier, rapporteur. - L'article 16 de la proposition de loi modifie le régime de la détention provisoire pour les mineurs. L'amendement COM-23 limite aux seuls mineurs d'un âge compris entre 16 et 18 ans, qui sont les plus concernés parmi les mineurs visés par une information judiciaire en matière de terrorisme, l'augmentation de la durée de cette détention provisoire pour l'instruction des crimes terroristes.
M. Jean-Pierre Sueur. - Réfléchissons : allonger la détention provisoire pour les mineurs pose problème. Est-ce compatible avec la convention internationale des droits de l'enfant ? Prudence.
M. Jacques Bigot. - Quel est l'intérêt de passer de deux à trois ans ?
M. François Pillet. - L'ordonnance du 2 février 1945 relative à l'enfance délinquante doit être révisée.
Mme Esther Benbassa. - A-t-on des statistiques par âge ?
M. Michel Mercier, rapporteur. - Seize mineurs font actuellement l'objet d'une mise en examen pour des infractions à caractère terroriste. Quatre d'entre eux sont placés en détention provisoire. Sur ces seize mineurs, douze étaient âgés de plus de seize ans au moment des faits. Par ailleurs, sur ces seize mises en examen, deux concernent des faits de nature criminelle. Les durées de détention provisoire actuellement applicables aux mineurs ne sont pas de nature à permettre une instruction sereine des affaires, qui présentent une certaine complexité.
Mme Esther Benbassa. - Un texte pour seize personnes ?
M. Michel Mercier, rapporteur. - Quatre terroristes peuvent tuer 130 personnes.
L'amendement COM-23 est adopté. L'amendement COM-2 devient sans objet.
Article 17
L'amendement de coordination COM-24 est adopté.
M. Jean-Pierre Sueur. - Nous avons travaillé, dans le cadre de la commission d'enquête sur la lutte contre les réseaux djihadistes, sur les unités pénitentiaires regroupant les personnes radicalisées. M. Reichardt ne me contredira pas. Le comportement de certains détenus est susceptible de créer de graves désordres dans les établissements pénitentiaires. Nous avons préconisé la création d'unités ne regroupant pas plus de dix personnes, avec un encellulement individuel. Mais une telle problématique relève-t-elle de la loi ? Ce sujet est complexe.
En tout état de cause, nous proposons, a minima, que l'affectation dans ces unités relève d'une décision du chef d'établissement et ne soit pas automatique.
M. André Reichardt. - La contamination des idées radicales au sein des établissements pénitentiaires plaide pour le maintien du caractère automatique. Mais, l'amendement que vous proposez permet au texte d'être équilibré et de respecter la liberté d'appréciation du chef d'établissement. La décision du chef d'établissement dépendra du comportement de la personne concernée.
Mme Esther Benbassa. - Certes, mais le mot « contamination » me gêne. Parlons plutôt d'embrigadement. Les mots comptent.
M. Michel Mercier, rapporteur. - Le dispositif de l'article 17 relève parfaitement du domaine de la loi car il s'applique au régime de la détention, ainsi que l'avait précisé le Conseil constitutionnel dans sa décision sur la loi pénitentiaire. La décision d'affectation dans une unité dédiée peut d'ailleurs faire l'objet d'un recours devant la juridiction administrative. Il est bon de laisser aux directeurs d'établissement une marge d'appréciation... dans le cadre défini par la loi. Nous sommes parvenus à un bon équilibre. Avis favorable à l'amendement COM-3.
L'amendement COM-3 est adopté.
Article 18
Les amendements identiques de suppression COM-25 et COM-4 sont adoptés.
Article 19
L'amendement de coordination COM-26 est adopté.
M. Michel Mercier, rapporteur. - L'amendement COM-27 règle le problème de l'application des peines. La juridiction d'application des peines peut s'opposer à la libération conditionnelle si l'ordre public est gravement menacé par la libération. Avis défavorable à l'amendement COM-5.
L'amendement COM-27 est adopté, ainsi que l'amendement COM-28.
L'amendement COM-5 n'est pas adopté.
M. Philippe Bas, président. - L'amendement COM-29 rend ce texte, pour ainsi dire, chimiquement pur, en le concentrant sur la lutte antiterroriste dans le domaine judiciaire.
L'amendement de suppression COM-29 est adopté.
Article 22
L'amendement de suppression COM-30 est adopté.
Article 23
L'amendement rédactionnel COM-31 est adopté.
M. François Grosdidier. - Les modalités d'organisation des fouilles dans les établissements pénitentiaires depuis l'entrée en vigueur de la loi pénitentiaire de 2009 empêche de lutter contre l'introduction de produits stupéfiants et de téléphones mobiles. Or pour lutter contre le terrorisme, il faut plus d'imams et moins d'iphones dans nos prisons ! Qu'en pense notre rapporteur ?
M. Michel Mercier, rapporteur. - La loi pénitentiaire de 2009 a précisé le cadre juridique...
M. François Grosdidier. - Sans régler ce problème...
M. Michel Mercier, rapporteur. - Elle interdit simplement les fouilles systématiques. Je connais bien ce sujet, et je sais que le métier d'agent pénitentiaire est difficile. Certains appareils peuvent se substituer aux fouilles, mais ils coûtent cher. Lorsque j'ordonnais des fouilles, on trouvait de très nombreux téléphones... parfois jusqu'à 150 ou 200 !
M. François Pillet. - Ces sujets touchent aux libertés individuelles. Vous avez bien fait d'entendre, sur ce texte, les magistrats, et de leur demander les outils dont ils avaient besoin. Cela me rassure et j'approuve la méthode : je voterai ce texte.
M. Jacques Bigot. - Oui, l'initiative parlementaire est importante. La réforme constitutionnelle pourrait aboutir bientôt. Comme le Gouvernement va déposer un texte qui va dans le même sens que le vôtre, nous nous abstiendrons.
La commission adopte le texte de la proposition de loi dans la rédaction issue de ses travaux.
Le sort des amendements examinés par la commission est retracé dans le tableau suivant :
Permettre l'application aux élus locaux des dispositions relatives au droit individuel à la formation - Examen du rapport et du texte de la commission
Puis la commission examine le rapport de Mme Catherine Di Folco et le texte qu'elle propose sur la proposition de loi n° 284 (2015-2016) présentée par M. Jean-Pierre Sueur visant à permettre l'application aux élus locaux des dispositions relatives au droit individuel à la formation.
Mme Catherine Di Folco, rapporteur. - Ce sujet sera plus léger ! Le droit individuel à la formation (DIF) pour les élus locaux, adopté dans la loi du 31 mars 2015, est constitué à raison de vingt heures par an et est financé par une cotisation obligatoire assise sur les indemnités de fonction. Il bénéficie à tous les élus, qu'ils perçoivent ou non des indemnités et soient donc appelés ou non à cotiser pour le DIF. Sa mise en oeuvre relève de l'initiative de chaque intéressé, dans la perspective de son mandat ou pour préparer sa reconversion. Le décret en Conseil d'État prévu par la loi du 31 mars pour en fixer les modalités n'a pas encore été publié. Il est apparu nécessaire, pour déterminer l'organisme collecteur de la cotisation, de recourir à la loi pour conforter la compétence règlementaire.
Le nouveau dispositif, entré en vigueur le 1er janvier, concerne 550 000 élus locaux, pour 14 millions d'euros collectés sur les 190 000 conseillers percevant une indemnité de fonction. C'est la CDC qui gèrera les fonds et instruira les demandes - sans se prononcer sur le fond ou l'opportunité de la formation choisie. Le Comité des finances locales sera informé chaque année de la gestion du fonds. La demande de formation devra être introduite avant expiration du mandat, mais il me semble nécessaire de permettre que la formation elle-même puisse être effectuée après puisque les droits sont constitués jusqu'à l'expiration du mandat. Le coût des formations prises en charge devrait être plafonné.
Deux de mes amendements sont de précision. Je vous propose de compléter ce texte pour reprendre l'article 115 de la loi de finances rectificative, concernant le régime indemnitaire des présidents et vice-présidents de syndicat, qui a été censuré par le Conseil constitutionnel car il constituait un cavalier budgétaire. Il visait à reporter l'entrée en vigueur de la réforme opérée par la loi NOTRe. Le Gouvernement a déposé un amendement reportant au 9 août 2017 l'application de ces dispositions. Du coup, je retire mon amendement n° COM-3 qui reprenait le texte de l'article 115, lequel fixait le report au 1er janvier 2017. J'ai demandé au Gouvernement de repousser l'application de ces dispositions jusqu'à la fin des mandats municipaux en cours. Il ne l'a pas souhaité, estimant qu'il est nécessaire que ce texte soit voté à l'unanimité dans les deux chambres afin d'entrer rapidement en application. Je comprends cet argument, mais interpellerai la ministre en séance sur ce point.
Il faut changer en conséquence le titre de cette proposition de loi. Le Gouvernement propose un titre plus resserré que le mien. J'y suis favorable et retire donc l'amendement no COM-6.
M. Jean-Pierre Sueur. - Bravo pour ce rapport, que je vous remercie d'avoir rédigé dans un état d'esprit proche de celui que j'avais en présentant ce texte. Il y a une contrainte de temps : la mesure instituant le DIF ayant pris effet le 1er janvier, il faut mettre en place l'organisme qui la gèrera. Sur le titre, nous devons effectivement nous garder de susciter par une formulation maladroite des amendements inutiles. Il serait mieux, enfin, d'aller jusqu'à la fin des mandats actuels avant de mettre en application la réforme des régimes indemnitaires des syndicats. Mais nous ne pouvons imposer une telle mesure du fait de son irrecevabilité financière au titre de l'article 40 de la Constitution.
M. Philippe Bas, président. - Il serait étrange que la ministre nous le refuse.
M. Pierre-Yves Collombat. - Les indemnités des élus locaux ayant baissé, en termes réels, depuis 2002, leur faire financer leur formation et leur reconversion ne manque pas d'air ! Est-ce cela, votre nouveau statut de l'élu ? Je ne voterai certes pas ce texte.
M. Philippe Kaltenbach. - Le DIF aidera à la reconversion. Tous les élus locaux en bénéficieront.
Si un élu respecte la limite de vingt heures, la CDC sera-t-elle obligée de lui accorder sa demande de formation ?
Les 14 millions d'euros prélevés ne seront peut-être pas utilisés. Mais le plafonnement du coût des formations ne va-t-il pas bloquer certaines demandes ? Quand les élus pourront-ils commencer à déposer des dossiers ?
Mme Jacqueline Gourault. - Notre groupe attend cette proposition de loi. Il faut un report de la réforme des régimes indemnitaires des syndicats jusqu'à la fin de l'actuelle mandature municipale. L'article 40 nous contraint, mais nous pouvons insister auprès de la ministre.
M. René Vandierendonck. - L'opération doit être faite en deux temps. Gare à la tentation électoraliste ! Les Républicains ont une proposition de loi toute prête sur le sujet. Que Mme Di Folco ait le bénéfice politique de ce texte et donnons acte aussi à la ministre de ce qu'elle a fait. Comme on devient écrivain par les mots qu'on refuse, soyons commissaires aux lois par les tentations électoralistes que nous nous interdirons.
Mme Catherine Di Folco, rapporteur. - L'instauration d'un plafond de la prise en charge des formations a été évoquée par les représentants de la Caisse des dépôts et consignations que j'ai rencontrés, dans le souci d'éviter que quelques élus consomment tous les crédits disponibles du fonds !
Le Fonds sera alimenté par les cotisations à partir de septembre prochain. Et il faut un an pour accumuler 20 heures de droits à formation.
M. Philippe Bas, président. - Les informations pratiques viendront en leur temps.
L'amendement n°5 rectifié, de clarification, est adopté. Il en va de même de l'amendement n°4 rectifié.
L'amendement n°3 est retiré.
L'amendement n°1 est adopté.
L'amendement n°6 est retiré.
L'amendement n°2 est adopté.
La proposition de loi est adoptée dans la rédaction issue des travaux de la commission.
M. Philippe Bas, président. - Il nous reste un texte à examiner. Il ne peut être abordé à la sauvette. Je vous propose donc de nous réunir ce soir à 20 heures pour en traiter.
Le sort des amendements examinés par la commission est retracé dans le tableau suivant :
La réunion est suspendue à 13 h 35
La réunion est reprise à 19 h 36
Inscrire les principes fondamentaux de la loi du 9 décembre 1905 à l'article 1er de la Constitution - Examen du rapport et du texte de la commission
Au cours d'une seconde réunion tenue dans la soirée, la commission examine ensuite le rapport de M. François Pillet sur la proposition de loi constitutionnelle n° 258 (2015-2016), présentée par M. Jacques Mézard et plusieurs de ses collègues, visant à inscrire les principes fondamentaux de la loi du 9 décembre 1905 à l'article 1er de la Constitution.
M. Philippe Bas, président. - Nous sommes à nouveau appelés à examiner une proposition de loi constitutionnelle, s'ajoutant à de nombreuses autres auxquelles nous n'avons pas toujours reconnu le mérite de la clarté.
M. François Pillet, rapporteur. - La loi de 1905 a 110 ans. C'est à l'occasion sans doute de cet anniversaire que notre collègue Jacques Mézard et plusieurs membres de son groupe ont déposé la proposition de loi constitutionnelle qui nous est soumise. Cette initiative n'est pas sans relation avec les propositions formulées, lors de la campagne pour l'élection présidentielle de 2012, par le président François Hollande, qui a précisé sa pensée le 5 février 2015 en indiquant que la laïcité, définie comme « la séparation de l'État et des cultes », doit « être comprise pour ce qu'elle est, c'est-à-dire la liberté de conscience et donc la liberté des religions ».
Une telle initiative provoque un débat pertinent dans le contexte particulier que traverse notre pays. Mais il appartient à notre commission de s'extraire des querelles de l'instant pour revenir aux principes fondateurs. Aussi limiterai-je mon propos à une analyse juridique rigoureuse.
Les délais impartis m'ont conduit à réduire le nombre de mes auditions. Outre le ministère de la justice, j'ai entendu des constitutionnalistes qui avaient déjà mené des travaux sur la question, et dont les opinions se sont d'ailleurs parfois révélées divergentes.
Laïciser l'État en assurant sa neutralité, sans vouloir pour autant, dans le respect des convictions religieuses de chacun, laïciser la société, tel est l'acquis durable et bénéfique de cette loi fondatrice de la République française. Pour éclairer votre opinion, j'ai avant tout choisi de rechercher, dans une optique strictement juridique, ce que la proposition ne changerait pas et ce qu'elle modifierait.
M. René Vandierendonck. - Excellent programme.
M. François Pillet, rapporteur. - Il faut rappeler que la loi de 1905 intervenait dans le cadre d'une laïcisation progressive des services publics, entre 1880 et 1901. La Chambre des députés n'examinera pas moins de huit propositions de loi avant de parvenir au texte de la loi, au reste modifiée depuis à plusieurs reprises. Vous trouverez dans mon rapport l'intéressant historique de l'élaboration de cette loi.
La constitutionnalisation de cette loi - dans laquelle n'apparaît pas le mot de laïcité et où le mot de séparation ne figure que dans l'intitulé - ne consacrerait pas l'introduction de la laïcité et de la liberté de conscience dans la Constitution, principes qui y sont déjà contenus. Loi de séparation des Églises et de l'État, elle ne règle pas les relations entre les particuliers et l'État et donc l'éventuelle application d'un principe de laïcité, restant à définir, dans la sphère privée, que ce soit au sein des entreprises ou dans l'espace public : elle ne règle en aucun cas les comportements, signes ou attitudes à connotation religieuse des citoyens hors de leur domicile.
La constitutionnalisation de la loi de 1905 est-elle bien de nature, dans ces conditions, à répondre aux questions que suscitent les débats actuels sur la laïcité ?
Voyons à présent les modifications qu'elle introduirait dans notre droit. Si notre Constitution devait être modifiée dans la rédaction ici retenue - qui pose au demeurant problème -, les particularités locales anciennes bénéficiant à certains cultes en Alsace-Moselle et outre-mer - Polynésie française, Nouvelle-Calédonie, Guyane, Mayotte, Wallis-et-Futuna... - deviendraient inconstitutionnelles.
Mme Catherine Troendlé. - Bien sûr !
M. François Pillet, rapporteur. - Le principe selon lequel la République ne subventionne aucun culte, inscrit à l'article 2 de la loi de 1905, n'étant pas retenu par le Conseil constitutionnel dans sa définition du principe de laïcité en 2013, n'a qu'une valeur législative : il peut donc y être dérogé par la loi. L'interdiction de rémunérer le ministre d'un culte doit ainsi être distinguée de l'interdiction de subventionner un culte, à laquelle le législateur n'est pas tenu. En retenant cette distinction dans son explicitation du principe de laïcité, le Conseil constitutionnel n'a donc pas invalidé les dispositions législatives qui permettent, de façon directe ou indirecte, de subventionner les cultes, contribuant ainsi à préserver une situation pacifiée entre les cultes et l'État.
Adopter cette proposition de loi constitutionnelle rendrait inconstitutionnels les avantages fiscaux accordés aux associations cultuelles, la déductibilité des dons, les baux emphytéotiques ou les garanties d'emprunt que peuvent consentir les collectivités territoriales et les diverses aides directes ou indirectes reconnues par la jurisprudence du Conseil d'État ; sans parler des conventions passées avec l'enseignement privé confessionnel.
Je pourrais affiner encore cette analyse juridique, qui appelle, à mon sens, une vigilance toute particulière. Le droit des cultes, auquel s'attache la loi de 1905, aboutit aujourd'hui à une séparation apaisée, tempérée par certaines dérogations. Il me paraît essentiel de préserver cet équilibre, sans susciter les controverses juridiques que soulèverait immanquablement l'introduction des deux premiers articles de la loi de 1905 dans notre Constitution.
Depuis la dernière révision de 2008, l'idée de réviser la Constitution devient une pratique un peu inflationniste. Pas moins de cinq textes ont été déposés depuis 2012, dont aucun n'a abouti, sans compter celui dont nous serons bientôt saisis. N'oublions pas que la Constitution est notre loi fondamentale et évitons de la transformer, en lui imprimant un mouvement constant, à l'image du code civil ou du code pénal, en un simple « code de la République ».
Si nous pouvons très largement partager les préoccupations qui motivent la proposition de loi constitutionnelle de nos collègues, introduire dans notre Constitution le titre Ier de la loi de 1905 n'y répondrait pas. C'est pourquoi je vous invite à repousser ce texte, pour envisager d'autres solutions propres à répondre aux préoccupations bien réelles que soulève le communautarisme.
M. Philippe Bas, président. - Voilà une présentation une fois de plus éblouissante. Nos collègues ont entendu inscrire les principes du titre Ier de la loi de 1905 dans la Constitution. Ces principes veulent que la République ne reconnaisse ni ne subventionne aucun culte, par où l'on voit, aussi fondamentaux soient-ils, combien ils sont liés à une étape de la fondation de la République qui est, sans doute fort heureusement, largement derrière nous.
Notre rapporteur nous a clairement rappelé que depuis l'adoption de la loi de 1905, d'autres textes sont intervenus, à commencer par ceux qui ont permis, en 1924, de consolider le statut concordataire en Alsace-Moselle. À quoi s'ajoute tout un ensemble de dispositions, telles que celles qui sont relatives aux cadis à Mayotte, celles qui ont trait aux relations entre l'Église et les collectivités publiques en Guyane, celles qui autorisent les baux emphytéotiques concernant des immeubles affectés au culte, etc. Si bien que la proposition qui nous est faite présente l'inconvénient de remettre en cause nombre de dispositions postérieures à la loi de 1905, alors même que les questions essentielles du début du XXIème siècle en France sur les rapports entre la sphère publique et le religieux sont d'une toute autre nature qu'en 1905. Notre collègue a évoqué la question du communautarisme : peut-on tirer de son appartenance à une religion, voire à un groupe linguistique ou à une région, des droits sur la République ? Telle est la question de notre modernité, quand celle du subventionnement des cultes est réglée, avec minutie, dans des termes qui ne sont pas strictement ceux de la loi de 1905. Je rappelle que, dans notre ordre constitutionnel, les principales références à l'Église ont été supprimées par la révision constitutionnelle de 1884. Ainsi de la mention qui, dans la loi constitutionnelle du 16 juillet 1875 sur les rapports des pouvoirs publics, prévoyait que le dimanche suivant la rentrée parlementaire, « des prières publiques seront adressées à Dieu dans les églises et dans les temples pour appeler son secours sur les travaux des assemblées ».
M. Alain Richard. - C'est d'ailleurs la même loi constitutionnelle qui a supprimé les sénateurs inamovibles, à défaut de supprimer le Sénat, ce qui eût été dommage.
M. Philippe Bas, président. - En effet, une suppression par extinction naturelle, si bien que certains ont survécu jusqu'à la veille de la Première Guerre mondiale...
Cette étape est derrière nous : dans notre ordre constitutionnel, la seule référence à Dieu qui subsiste est celle qui figure dans la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, placée, à titre liminaire, « sous les auspices de l'Être suprême », et qui qualifie ces droits de « sacrés », ainsi qu'il est à nouveau mentionné à l'article 17, qui fait de la propriété un droit « inviolable et sacré ». Sachant qu'il a fallu attendre 1971 pour que cette Déclaration acquière une portée constitutionnelle positive, il n'y a pas été touché, et personne depuis ne s'aviserait d'ailleurs de proposer la modification de ce texte fondateur de notre pacte républicain.
Ce n'est donc pas sous l'angle de la constitutionnalisation des principes de la loi de 1905 qu'il convient d'aborder aujourd'hui la question des relations entre les croyances religieuses et la loi de la République. Il importe bien plutôt de s'interroger sur la question du communautarisme. Est-ce la règle commune découlant de la loi républicaine qui doit prévaloir ou celle que certains pourraient invoquer pour s'en affranchir ? Une question dont le législateur a commencé de s'emparer avec la loi de 2004 sur le port de signes religieux ostensibles à l'école de la République, et qui donne lieu aujourd'hui encore à de graves questions, à laquelle on n'a apporté d'autre réponse que celle de la jurisprudence constitutionnelle, laquelle, pour importante qu'elle soit, n'est pas inscrite dans le marbre de notre Constitution. Telle est la mise au point que j'entendais faire, dans le sillage de notre rapporteur.
M. André Reichardt. - Je félicite à mon tour notre rapporteur pour la qualité et la clarté de son exposé. Comme lui, si j'ai peine à voir ce qu'apporte cette proposition de loi constitutionnelle, je vois bien, en revanche, ce qu'elle enlèverait à une région qui, de même qu'à Catherine Troendle, m'est chère.
M. Philippe Bas, président. - Elle nous est chère à tous...
M. André Reichardt. - C'est pourquoi je m'opposerai à ce texte avec la plus grande énergie. En Alsace-Moselle, notre laïcité est certes différente de celle qui prévaut dans ce que nous avons coutume d'appeler l'outre-Vosges, mais nous tenons à cette laïcité apaisée comme à la prunelle de nos yeux. Avec la mission d'information sur l'islam, que nous devons à l'initiative du groupe centriste, on se rend compte de tout l'intérêt que présente le cadre qui est le nôtre pour gérer des situations qui ne trouvent pas, ailleurs, de solution. De quelle religion parlons-nous quand on évoque l'islam ? Quelles sont les diverses obédiences en son sein ? Combien en France pratiquent le culte musulman ? Autant de questions auxquelles le directeur des libertés publiques du ministère de l'intérieur nous a indiqué, cet après-midi même, qu'il ne saurait répondre, ne pouvant tout au plus procéder que par estimation, les règles attachées au principe de laïcité ne lui permettant pas de recueillir ces informations. Une telle faculté n'est reconnue qu'en Alsace-Moselle, ajoutait-il, en vertu du concordat. Certes, l'islam ne fait pas partie des quatre cultes reconnus par l'État, mais grâce à la tradition que ce concordat nous a permis d'élaborer au fil du temps, nous avons pu l'associer, à la satisfaction générale, à notre démarche.
Encore une fois, la population est très attachée à cette approche apaisée de la laïcité, à laquelle l'adoption de ce texte porterait gravement atteinte, sans rien apporter au plan national.
M. Philippe Bas, président. - J'entends bien votre souci de souligner qu'il ne s'agit nullement pour vous de mettre en cause le principe de laïcité.
M. Didier Marie. - Ce texte se situe dans la ligne qu'ont toujours tenue les radicaux et, même s'ils ne sont pas les seuls à avoir défendu la laïcité, leur engagement historique en sa faveur mérite d'être salué.
En un temps où la résurgence du communautarisme et l'essor des fondamentalismes nous interpellent, il n'est pas inutile de rappeler ce que sont les fondements de notre laïcité. La loi de 1905 est d'abord une loi de liberté, qui pose un principe d'organisation de la société, par le peuple - laos, par opposition à klericos -, comme l'indique clairement l'étymologie du mot de laïcité. Ainsi que le soulignait Jean Jaurès dans son fameux discours de Carmaux sur l'école, laïcité et démocratie vont de pair, se nourrissant l'une l'autre. La France est une République laïque qui, plaçant tous les cultes sur un pied d'égalité, établit la liberté de conscience. La loi de 1905 s'est voulue avant tout comme une loi de concorde et d'apaisement, le moyen de vivre ensemble dans nos différences, que l'on soit croyant ou athée.
Cela dit, si je suis de ceux qui pensent qu'il est bon de réaffirmer ce principe de laïcité, j'estime, contrairement aux auteurs de ce texte, qu'il n'est pas nécessaire d'en préciser la portée, car cela a déjà été fait. À lire leur exposé des motifs, on a le sentiment que la valeur constitutionnelle de la laïcité est imparfaitement reconnue. Or la décision du Conseil constitutionnel du 21 février 2013, qui faisait suite à une saisine de l'association pour la promotion et l'expansion de la laïcité, pour étendre la loi de 1905 aux départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle, a précisé la valeur constitutionnelle de la loi de 1905, ainsi que je m'en expliquerai en séance.
J'ajoute qu'inscrire le titre Ier de la loi de 1905 dans la Constitution soulèverait nombre de difficultés, ainsi que l'a clairement exposé le rapporteur. Au premier rang desquelles le fait de viser dans la Constitution, comme le fait la rédaction proposée, une loi ordinaire. Qu'en serait-il si, demain, les articles de cette loi étaient modifiés ? Inscrire le titre Ier de la loi de 1905 dans la Constitution remettrait de surcroît en cause les dispositions dérogatoires qui s'appliquent à certains territoires, métropolitains ou ultramarins. De même que se poserait la question du financement des cultes. Rappelons que la loi de 1905 a été modifiée onze fois depuis son adoption, pour y introduire quelque tempérance et répondre à des situations vivantes. La loi de 1905 posait trois interdictions : reconnaître les cultes, salarier les clercs, subventionner les cultes. Mais seules les deux premières, ainsi que l'a rappelé le rapporteur, ont valeur constitutionnelle, tandis qu'à la troisième ont été apportées nombre de dérogations, recensées dans le rapport d'Hervé Maurey sur les collectivités territoriales et le financement des lieux de culte, qui permettent de subventionner la restauration des bâtiments cultuels, de garantir un emprunt, etc. Or l'adoption du texte qui nous est proposé les remettrait en cause, au risque de rompre un équilibre chèrement acquis. Si bien que, m'inspirant de ce que disait Yvon Collin, signataire du présent texte, lors du débat en séance sur le rapport d'Hervé Maurey, je suis tenté de lancer cet appel : la loi, toute la loi, rien que la loi.
Portons haut et fort le principe de laïcité, mais gardons-nous de modifier des équilibres qui sont l'expression d'une laïcité pleine et entière. C'est la raison pour laquelle le groupe socialiste s'abstiendra.
M. René Vandierendonck. - Je serai sobre. André Diligent, dont j'ai eu l'honneur d'être le directeur de cabinet à la mairie de Roubaix, rappelait, à l'occasion de la mise en place de Marseille Espérance, ce propos de Jean Jaurès, qui mérite que l'on s'en inspire : apaiser la question religieuse pour poser la question sociale.
Mme Jacqueline Gourault. - Pas plus que mes collègues, je ne saisis l'apport de ce texte, alors que la laïcité est totalement intégrée aux esprits. Elle n'a besoin ni d'être définie, ni d'être qualifiée. Il y aurait beaucoup trop de risques à toucher à l'héritage de la loi de 1905, au-delà même des difficultés que cela poserait en Alsace-Moselle et outre-mer. Il serait sage d'en rester là.
M. Jacques Bigot. - Je prends acte du fait que notre rapporteur n'entend pas signer l'acte de décès du système concordataire.
Mme Catherine Troendlé. - Nous étions vigilants.
M. Jacques Bigot. - Je précise que le principe concordataire n'est pas contraire à la laïcité, mais l'organise différemment. Nous avions, à l'époque, fait valoir au Président de la République que le concordat ne saurait être supprimé au nom de grands principes et que la laïcité pouvait être respectée selon diverses modalités.
Mme Catherine Troendlé. - Tout à fait.
M. Jean-Pierre Sueur. - Je suis en plein accord avec ce qu'a exposé Didier Marie au nom de mon groupe. Nous approuvons les objections soulevées par notre rapporteur, tout en souhaitant manifester notre attachement à la laïcité, d'où notre choix de l'abstention.
La laïcité suscite bien des débats...
Mme Jacqueline Gourault. - Parfois excessifs...
M. Jean-Pierre Sueur. - ... et je salue le rappel de René Vandierendonck à la conception de Jean Jaurès, qui n'était pas celle de Jules Guesde, député du Nord, sans parler de celle d'Émile Combes. Ou de celle de René Viviani, qui déclarait devant la Chambre des députés : « Nous avons éteint dans le ciel des étoiles qu'on ne rallumera plus ». Des propos un peu excessifs...
M. Philippe Bas, président. - Et surtout très pessimistes.
M. Jean-Pierre Sueur. - ... qui ont suscité une colère mémorable de Charles Péguy...
M. François Pillet, rapporteur. - Je salue l'avis quasiment unanime de notre commission. Je vois cependant un intérêt à ce texte : le débat qui aura lieu en séance publique sera l'occasion pour le Sénat de rappeler l'attachement des parlementaires à la laïcité.
M. François Pillet, rapporteur. - L'amendement COM-1 vise à préserver le concordat dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle. Je pourrai lui être favorable, dans la mesure où il oublie les dispositions particulières qui s'appliquent outre-mer ou qui permettent de subventionner les cultes.
M. Philippe Bas, président. - Vous nous appelez donc à le repousser, même si nous n'en devons pas moins prendre en compte l'hypothèse où le texte serait adopté.
M. André Reichardt. - Nous ne pouvons pas nous opposer à un amendement qui protège le concordat !
M. François Pillet, rapporteur. - Si l'hypothèse, fort improbable, évoquée par le président devait se préciser, je vous proposerais alors un amendement de séance destiné à protéger les territoires et les dérogations concernés.
M. Philippe Bas, président. - En revanche, adopter cet amendement reviendrait à adopter un texte de la commission. Autant nous avons voulu éviter d'interdire le débat en séance, autant nous n'entendons pas proposer un texte à son examen.
Mme Catherine Troendlé. - Compte tenu de l'engagement que vient de prendre le rapporteur, nous pouvons le suivre.
M. Jacques Bigot. - À supposer que le texte passe, l'amendement n'est en tout état de cause pas satisfaisant, puisqu'il oublie les textes en vigueur outre-mer.
M. Philippe Bas, président. - Sans compter qu'il est d'autres dispositions encore qui mériteraient d'être protégées, comme celles qui autorisent les baux emphytéotiques par exemple.
L'amendement COM-1 n'est pas adopté.
M. Philippe Bas, président. - Il reste que ce texte soulèvera un débat intéressant, qui sera l'occasion de réaffirmer la suprématie de la loi de la République sur toute autre règle. Des initiatives constructives pourront naître, de là, d'ici à la séance.
La proposition de loi constitutionnelle n'est pas adoptée.
Le sort de l'amendement examiné par la commission est retracé dans le tableau suivant :
Auteur |
N° |
Objet |
Sort de l'amendement |
Article unique |
|||
M. MASSON |
1 |
Prise en compte du régime
particulier |
Rejeté |
La réunion est levée à 20 h 20