Mercredi 19 juin 2019
- Présidence de Mme Catherine Morin-Desailly, présidente -
La réunion est ouverte à 9 h 30.
Désignation d'un rapporteur
La commission nomme M. Claude Kern rapporteur du projet de loi portant ratification de l'ordonnance n° 2019-207 du 20 mars 2019 relative aux voies réservées et à la police de la circulation pour les Jeux olympiques et paralympiques de 2024.
Proposition de loi tendant à créer un droit voisin au profit des agences de presse et des éditeurs de presse (deuxième lecture) - Examen du rapport et du texte de la commission
Mme Catherine Morin-Desailly, présidente. - Nous examinons ce matin le rapport de notre collègue David Assouline sur la proposition de loi tendant à créer un droit voisin au profit des agences de presse et des éditeurs de presse, qui sera examinée en séance le 3 juillet prochain.
M. David Assouline, rapporteur. - Le 24 janvier 2019, le Sénat a adopté à l'unanimité la proposition de loi tendant à créer un droit voisin au profit des agences de presse et des éditeurs de presse.
Cette proposition de loi, vous vous en souvenez, visait à répondre à une situation d'urgence. L'irruption d'internet et la domination sans partage de quelques grands groupes mondiaux a fragilisé l'édifice déjà peu solide de notre presse, conçu à la Libération. La baisse des ventes de 4,5 % par an et la chute des recettes publicitaires, de 7,5 % par an - alors que le marché progresse de 12 % par an - ont en effet asséché les sources de financement des éditeurs et agences de presse.
Une étude publiée par News Media Alliance aux États-Unis en juin 2019 estime à 4,7 milliards de dollars le montant tiré en 2018 par Google de l'utilisation des informations produites par les médias, sans rémunération. Si la méthodologie de cette étude est contestée, elle fournit une estimation de l'ampleur des revenus captés par Google et qui ne bénéficient pas au secteur de la presse.
Ce scandale absolu ne met pas seulement en danger un secteur économique. Il s'attaque à la liberté de la presse, à ses conditions mêmes d'existence. Sammy Ketz, grand reporter à l'AFP, a eu des mots très forts dans sa tribune du 27 août dernier, cosignée par plus de cent journalistes de 27 pays : « De nombreuses fois, j'ai rencontré des gens assiégés, isolés, sans défense, qui demandaient seulement une chose: "racontez ce que vous avez vu, ainsi nous aurons une chance d'être sauvés". Dois-je leur dire : "Non, perdez vos illusions, nous sommes les derniers journalistes, bientôt vous n'en verrez plus car ils vont disparaître, faute?de moyens?? » Être reporter sur les terrains difficiles, cela exige des moyens. Faute de les obtenir, ils sont de moins en moins nombreux.
Une solution existait mais n'avait jamais pu être mise en oeuvre : les droits voisins. J'avais déjà exploré cette piste en 2016 en déposant une proposition de loi qui n'avait, hélas, pas été discutée par notre assemblée. Les droits voisins consistent à doter les éditeurs et les agences de presse de la capacité juridique de contester l'utilisation qui est faite sans autorisation de leurs productions. Les précédentes tentatives de les instaurer, en Espagne et en Allemagne, avaient échoué, pour une raison simple qu'il nous faut garder à l'esprit : l'influence et le pouvoir sur l'accès à l'information des Google et Facebook leur permet d'imposer leurs conditions s'ils ne trouvent pas face à eux un front large et uni à l'échelle d'un continent - tant leur puissance dépasse celle de nombreux États !
L'Europe a commencé à avancer, dans le cadre de la discussion de la directive sur les droits d'auteur. En janvier dernier, j'avais souhaité prendre le risque d'anticiper sur l'adoption, alors loin d'être acquise, de cette directive. Nous avons alors travaillé en bonne intelligence avec les groupes du Sénat ainsi qu'avec le Gouvernement. Le texte issu des travaux du Sénat se présentait comme un véhicule législatif adapté à une transposition rapide ou bien, si la directive n'était pas été adoptée, une réponse nationale déjà construite. Nous pouvons donc nous féliciter que le pari que constituaient le dépôt et l'inscription en séance publique de cette proposition de loi se soit avéré gagnant.
Après des négociations très complexes, durant lesquelles la voix de la France a été soutenue par le vote unanime du Sénat, la directive du Parlement européen et du Conseil du 17 avril 2019 sur le droit d'auteur et les droits voisins dans le marché unique numérique est entrée en vigueur. Son article 29 précise que la transposition en droit national doit se faire au plus tard le 7 juin 2021. Si l'essentiel des dispositions de la directive devrait être traité dans le cadre de la future loi audiovisuelle, notre initiative, et le soutien qu'elle a recueilli, permettra à la France d'être le premier État européen à transposer les dispositions de la directive relatives aux droits voisins dans son droit national. Nous allons donc servir de modèle aux autres pays, et je crois important que notre travail soit le plus achevé et consensuel possible.
L'Assemblée nationale a accepté de participer à ce travail commun, et j'en remercie le rapporteur du texte Patrick Mignola ainsi que Bruno Studer, président de la commission des affaires culturelles et de l'éducation. Nous avons veillé à ce que les termes soient autant que possible alignés sur ceux de la directive afin que la navette soit rapidement conclusive. Le ministre de la culture avait lui-même appuyé cette position, évoquant en séance publique un travail de coconstruction avec l'Assemblée nationale.
La directive a finalement été adoptée, son article 11 devenant un article 15 dans la version finale. Elle pose les fondements des droits voisins pour toute l'Europe. Le dernier alinéa de son considérant 55 prend bien en compte les agences de presse, ce dont je me félicite car ce n'était pas évident durant la négociation.
L'Assemblée nationale a examiné la proposition de loi du Sénat lors de sa séance du 9 mai 2019, dans une niche du groupe Modem. J'ai ainsi été consulté sur les amendements adoptés à l'Assemblée nationale, ce qui m'a permis de bien m'assurer de la convergence de vue entre les deux chambres du Parlement.
Pour l'essentiel, l'Assemblée nationale a transposé fidèlement les dispositions de la directive. Je voudrais mentionner deux points que nous avions évoqués au mois de janvier. D'une part, la question épineuse des exceptions au droit voisin, c'est-à-dire la définition des éléments qui resteraient autorisés au nom de la liberté de navigation en ligne. Selon les termes précis de la directive, restaient ainsi autorisés « l'utilisation de mots isolés ou de très courts extraits ». En séance publique, une heureuse précision a été apportée à l'initiative du groupe socialiste, qui fait écho au considérant 58 de la directive disposant que « cette efficacité est notamment affectée lorsque l'utilisation de très courts extraits se substitue à la publication de presse elle-même ou dispense le lecteur de s'y référer ». Toute ambiguïté est ainsi écartée. D'autre part, la durée des droits attachés. En janvier, la France était, dans la négociation européenne, favorable à cinq ans, durée un peu optimiste. La directive et sa transposition ont arrêté un délai de deux ans. Cela peut sembler court, mais les Allemands plaidaient pour six mois...
Je milite à présent pour une adoption rapide de la proposition de loi et, surtout, une application rapide afin que les éditeurs entament sans tarder les discussions en vue de la constitution de la ou des sociétés de gestion collective des droits, prélude indispensable aux négociations à venir avec les grands acteurs de l'internet.
Il reste néanmoins des améliorations à apporter au texte, qui justifient les trois amendements que j'ai déposés. Ceux-ci ont fait l'objet de négociations complexes avec les parties prenantes. Si nous voulons que le texte soit adopté rapidement, il faut en effet trouver un accord qui soit en mesure de rassembler le Sénat, l'Assemblée nationale, le Gouvernement et les nombreuses personnes intéressées. C'est un travail de diplomatie et de conviction que je mène ces derniers jours.
Ces amendements règleront d'abord la question des agences de presse, qui ont eu le sentiment d'être exclues du dispositif. La rédaction que je propose permettra de bien inclure dans le champ du texte leurs productions photographiques, les vidéogrammes, et garantira que toute utilisation, même partielle, de leurs publications ouvre droit à rémunération. Ensuite, il faut clarifier les éléments qui serviront à orienter la rémunération due aux éditeurs et aux agences, afin de bien tenir compte des investissements consentis, de la participation au débat démocratique et de l'audience. La rédaction que je propose permet à tous les types de presse de percevoir les droits voisins, y compris la si importante presse du savoir et de la connaissance. Il subsistait enfin un oubli relatif à la rémunération des auteurs non-salariés : mon troisième amendement y remédie.
Je voudrais également dire un mot des craintes qui ont été relayées par certains acteurs de l'internet, en particulier hexagonaux, que j'ai reçus longuement. Il n'est en effet pas question de créer une situation d'instabilité juridique susceptible de décourager certains, notamment les plus vertueux. Dès lors, s'il n'est pas envisageable, pour des raisons juridiques et d'acceptation par la profession, d'instaurer une gestion collective obligatoire ni de subordonner le bénéfice des droits voisins à l'inscription sur une liste, les négociations à venir permettront de régler ces derniers points.
Il est temps que la partie législative des droits voisins s'achève et que s'engagent enfin les négociations entre les éditeurs, les agences de presse et les services de communication au public en ligne.
Je serai très attentif à ce que cette initiative du Sénat ne soit pas dénaturée par le comportement des uns ou des autres. Les négociations à venir seront complexes, je sais de source sûre que les grandes plateformes fourbissent déjà leurs armes juridiques, mais le texte est solide et, si les éditeurs et les agences demeurent unis, ils seront en excellente position pour trouver un accord avantageux en s'appuyant sur ce texte.
Mme Catherine Morin-Desailly, présidente. - Que les plateformes fourbissent déjà leurs armes juridiques, nous n'en doutons pas. Il est donc important que nous avancions vite, et que la France soit suivie par les autres États membres. À cet égard, le calendrier du projet de loi de réforme de l'audiovisuel public nous inquiète quelque peu.
Mme Sylvie Robert. - Je salue le travail que le rapporteur a entrepris avec l'Assemblée nationale pour mettre le texte en conformité avec la directive. Nous étions à Bruxelles hier et avant-hier, dans le cadre de la commission d'enquête sur la souveraineté numérique : le directeur général au numérique de la Commission a salué comme un grand succès l'adoption de cette directive et le rôle de la France, qui sera le premier État membre à la transposer. Il nous a cependant dit que la vigilance restait de mise car les réseaux d'influence s'activaient de nouveau...
Il faudra rester vigilant dans la navette. J'ai été assez surprise que la durée des droits voisins soit fixée à deux ans ; comparée à nos 50 ans, c'est très court.
Le caractère de la gestion collective, facultatif ou obligatoire, fait-il encore l'objet de débats ?
Notre pays prendra une importante responsabilité en étant le premier à appliquer la directive.
M. Michel Laugier. - Je veux dire au rapporteur toute la confiance que nous plaçons en lui. Un important travail a été accompli. Il est certes difficile de faire plaisir à tout le monde ; le numérique, comme la presse, est un sujet complexe... Les dernières précisions et les amendements du rapporteur permettront-ils cependant de traiter tout le monde équitablement ? La presse spécialisée semble en douter.
Mme Françoise Laborde. - Merci, monsieur le rapporteur, pour le travail réalisé sur ce texte, que nous commençons à connaître. J'apprécie la diplomatie et le calme dont vous avez fait montre. En votant ces amendements, nous prenons le risque de les voir malmenés à l'Assemblée nationale - à moins que le rapporteur ait obtenu des assurances... Ils sont toutefois nécessaires, car la presse et les auteurs non-salariés ne doivent pas être oubliés. Marie-Christine Blandin et Corinne Bouchoux seraient en outre ravies de voir que les photos et vidéogrammes ont été inclus dans le champ du texte. Merci encore pour le travail accompli.
M. Pierre Ouzoulias. - Je remercie à mon tour le rapporteur pour tout le travail réalisé. Nous sommes à un moment stratégique : le bloc des Google, Amazon, Facebook, Apple et Microsoft, que nous pensions inébranlable, semble subir quelques vibrations - ce ne sont pour l'heure que des vibrations - et risque de réagir aussi brutalement qu'il se sentira menacé. Sous ce rapport, risquer une nouvelle navette serait dangereux. Poussons au contraire notre avantage. Même si les amendements du rapporteur sont intéressants, facilitons le parcours législatif de ce texte en le votant conforme.
M. Jean-Pierre Leleux. - Je salue à mon tour le travail du rapporteur, qui aboutira sans doute à un vote consensuel. Je veux attirer l'attention sur l'hésitation que nous avons parfois à légiférer sur le terrain d'une directive en cours d'élaboration ; tantôt nous faisons pression sur l'Union européenne, tantôt nous attendons pour transposer ses normes...
Je comprends le souhait que le texte soit adopté conforme. Si le rapporteur a des garanties que ses amendements seront approuvés par l'Assemblée nationale et que la proposition de loi peut être adoptée avant l'été, il conviendrait de voter les améliorations qu'il propose.
Une remarque enfin. Les droits des opérateurs de communication audiovisuelle font aussi partie des droits voisins. Or les radios indépendantes ne perçoivent pas de rémunération pour la diffusion de leurs programmes dans les lieux publics dont l'entrée n'est pas payante, tels que les bars ou les salons de coiffure. Il faudra donc modifier ce texte pour instaurer cette mesure de justice.
M. Claude Malhuret. - Je remercie à mon tour le rapporteur, qui suit ce texte depuis le début. Le groupe Les Indépendants y est très favorable, ainsi qu'aux amendements du rapporteur, et souhaite qu'il soit rapidement adopté par les députés. La durée de deux ans semble un peu courte mais elle reste raisonnable.
Mme Laure Darcos. - Je remercie également le rapporteur pour son travail. J'avais déposé un amendement relatif à la presse de la connaissance. Je fais certes confiance au rapporteur sur l'usage du terme « notamment », mais je regrette que la presse magazine ne soit pas explicitement mentionnée. L'objet de l'amendement évoque certes la « presse utile au débat démocratique », mais attention à ne pas restreindre le champ d'application de la directive, dont le considérant 54 indique qu' « une presse libre et pluraliste est indispensable pour garantir un journalisme de qualité et l'accès des citoyens à l'information. Elle apporte une contribution fondamentale au débat public et au bon fonctionnement d'une société démocratique ». La presse d'information politique et générale bénéficiera d'un plan de financement important ; pour un même article sur Notre-Dame de Paris, Connaissance des arts doit bénéficier du même traitement que Le Monde ou Le Figaro.
M. David Assouline, rapporteur. - Merci à tous. Les acteurs du secteur ont été nombreux à monter au créneau. Je leur ai d'abord dit que la loi n'était pas le seul moyen de prévenir leurs inquiétudes, les renvoyant aux propos du ministre, au décret ou encore à la charte que les éditeurs devront adopter pour monter une société de perception de droits. Je leur ai aussi indiqué que si le montant escompté des droits s'élevait à 300 millions d'euros, chaque mois de perdu représentait 20 à 25 millions d'euros. Ce discours, ils l'entendent.
Mon souhait était donc d'aller vite mais, étant parlementaire, je ne saurais décourager l'exercice par mes collègues de leur droit d'amendement pour adopter ce texte plus vite... De plus, je me devais de répondre aux agences de presse comme l'AFP, qui me disaient se sentir exclues de ce texte. C'est en effet leur travail que pillent les plateformes, auxquelles elles sont livrées en pâture. Leur répondre de négocier avec les autres acteurs sans leur donner d'armes de négociation n'était pas envisageable.
En outre, la presse d'information politique et générale, qui a concouru depuis la Libération à notre démocratie, avait également raison de déplorer sa faiblesse face au développement des « fermes à clic ». En l'état du texte en effet, l'audience prime, ce qui privilégiera la presse « people » ou « les fermes à clic » au détriment des grands titres qui créent le contenu. D'où l'amendement qui précise les critères relatifs à la rémunération des éditeurs et agences de presse, dont la rédaction a été pesée au mot près jusqu'à la dernière minute.
Trois critères sont prévus : d'abord, les investissements humains et financiers - ce qui sera profitable aux titres qui ont investi dans le numérique et qui emploient des journalistes. Ensuite, la contribution au débat démocratique, ce qui inclut la presse spécialisée. Enfin, l'audience. Sans compter que ces critères sont précédés du mot « notamment », dont j'ai horreur, mais qui permet de n'exclure personne !
La presse spécialisée n'a pas manqué de m'appeler. Je leur ai rappelé, d'une part, que le texte excluait la presse universitaire et scientifique et, d'autre part, que les trois critères n'étaient nullement exclusifs. J'ai échangé avec les patrons de chaque grand titre, dont le souci est simplement de n'être pas moins bien traité que la presse people. Si le portrait d'un grand couturier réalisé par Raphaëlle Bacqué dans Le Monde, est moins bien rémunéré que celui qu'aurait publié un autre titre où la photo aura suscité davantage de clics, nous n'aurons pas rempli notre mission ! Je rappelle que ce texte vise à sauver la presse, le débat démocratique et l'information des citoyens... Nous n'excluons bien sûr pas la presse de loisir, mais le clic ne doit pas dominer.
Je précise que j'ai eu l'assurance du Gouvernement, du président de la commission des affaires culturelles de l'Assemblée nationale et de son rapporteur Patrick Mignola que le texte pourra être adopté avant la fin de l'été. Cette loi sera une loi de la République quand nous partirons en vacances, chers collègues.
EXAMEN DES ARTICLES
M. David Assouline, rapporteur. - L'amendement n° COM-7 prend en compte les préoccupations exprimées par les agences de presse.
L'amendement n° COM-7 est adopté.
M. David Assouline, rapporteur. - L'amendement n° COM-5 est relatif aux critères dont j'ai parlé. Je le redis, il ne vise pas que la presse d'information politique et générale.
Mme Laure Darcos. - Pardonnez-moi d'insister : la presse de la connaissance est visée mais n'est pas explicitement mentionnée. Ne peut-on ajouter « et professionnelle » après « contribution des publications de presse à l'information politique et générale » ? Cela changerait tout. Je n'ignore toutefois pas que le décret d'application et la charte préciseront les choses.
M. Jean-Pierre Leleux. - Cet amendement a été pesé au trébuchet et accepté par l'Assemblée nationale. Je comprends le souci de Mme Darcos, mais la rédaction est restée volontairement proche de celle de la directive, et l'énumération des critères, non exclusifs, lui donnent satisfaction sur le fond. Mieux vaudrait, à mon sens, le voter tel que présenté par le rapporteur.
M. David Assouline, rapporteur. - J'ai précisément veillé à ne pas mentionner telle ou telle catégorie de presse car il s'en serait toujours trouvé une pour regretter d'avoir été oubliée. Je vous le répète : je me suis systématiquement assuré de l'accord de l'Assemblée nationale, du Gouvernement et des parties prenantes. Ce n'est donc pas un coup de force appelé à être contré par nos collègues députés. Notez qu'il est assez rare que l'Assemblée nationale accepte de voter tel quel un de nos textes !
Mme Catherine Morin-Desailly, présidente. - Ils y ont intérêt, cela dit.
M. Stéphane Piednoir. - Ne sommes-nous pas en train de nous faire plaisir en élaborant cette liste de critères, dont je ne doute pas qu'elle puisse être allongée en séance par d'autres, tous plus vertueux les uns que les autres ? La pondération de chacun de ces critères n'est en outre pas précisée, et le « notamment » introduit un flou. Le texte n'est-il pas ainsi rendu lourd et inapplicable ?
M. David Assouline, rapporteur. - Je ne crois pas. L'intérêt de légiférer pour transposer une directive est aussi d'introduire un esprit français, donc démocratique, dans des principes généraux. Sinon, nous donnerions les acteurs du secteur en pâture aux grandes plateformes. Ne pas préciser le bénéfice des droits voisins, c'est laisser s'appliquer la loi du plus fort. Notre proposition consiste à refuser que seul le sensationnel, le nombre de clics, prévale. L'audience de la presse quotidienne régionale est départementale ; elle n'a donc rien à voir avec le nombre global de clics. Si seule l'audience est prise en compte, nous abandonnons la presse qui fait vivre notre pays, la sève qui irrigue notre démocratie. Le premier critère que je propose, par exemple, encourage la vraie presse, faite par des journalistes professionnels, salariés. Donc non, nous ne sommes pas en train de nous faire plaisir, nous donnons des indications pour les négociations à venir et pour éviter les contentieux.
L'amendement n° COM-5 est adopté.
M. David Assouline, rapporteur. - L'amendement n° COM-6 comble un trou dans la raquette : le cas des auteurs non-salariés, comme les pigistes, qui sont nombreux, et dans la plus grande précarité.
L'amendement n° COM-6 est adopté.
L'article 3 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
La proposition de loi est adoptée dans la rédaction issue des travaux de la commission.
M. David Assouline, rapporteur. - Restons vigilants pour que les choses se passent bien à l'Assemblée nationale. Les bénéficiaires des droits voisins continuent par ailleurs à se concurrencer et à poursuivre leurs intérêts propres. Or les agences de presse et les éditeurs de presse gagneraient à s'unir car à défaut, la loi s'appliquera difficilement. Je voudrais donc en conclusion leur lancer un appel à faire front commun.
Mme Catherine Morin-Desailly, présidente. - Je vous remercie.
La réunion est close à 10 h 30.