Jeudi 23 mars 2023
- Présidence de Mme Micheline Jacques, vice-présidente -
Foncier agricole dans les
outre-mer - Table ronde sur
la situation à
Mayotte
Mme Micheline Jacques, présidente. - J'ai l'honneur de remplacer aujourd'hui le président Stéphane Artano, qui vous prie de l'excuser car il est actuellement à Saint-Pierre-et-Miquelon. Il participe à nos travaux en visioconférence.
Dans le cadre de son étude sur le foncier agricole dans les outre-mer, la Délégation sénatoriale aux outre-mer organise ce matin une table ronde dédiée à Mayotte.
En effet, après une première audition avec la Fédération nationale des sociétés d'aménagement foncier et d'établissement rural (FNSafer), le 2 mars dernier, nos rapporteurs Vivette Lopez et Thani Mohamed Soilihi, ont souhaité aborder la situation à Mayotte qui a la particularité de ne pas avoir de SAFER.
Le président de la FNSafer, M. Emmanuel Hyest, nous a aussi annoncé qu'il se rendrait prochainement sur l'île afin d'écouter les acteurs locaux à ce sujet.
Pour dresser le panorama de la situation à Mayotte, nous allons entendre à tour de rôle ce matin :
- le Conseil départemental, qui en l'absence de M. Ben Issa Ousseni, sera représenté par son chef de cabinet M. Mouhamadi Assani ;
- la Direction de l'alimentation, de l'agriculture et de la forêt de Mayotte (DAAF) représentée par M. Philippe Gout, son directeur, qui est accompagné de M. Bastien Chalagiraud, directeur adjoint ;
- l'Établissement public foncier et d'aménagement de Mayotte (EPFAM) représenté par M. Yves-Michel Daunar, directeur général, qui est accompagné de M. David Vancauteren, directeur du pôle stratégie agricole ;
- la Chambre de l'agriculture, de la pêche et de l'aquaculture de Mayotte (CAPAM) représenté par son directeur, M. Stéphane Allard ;
- la Fédération mahoraise des associations environnementales (FMAE), représentée par M. Naïlane-Attoumane Attibou, secrétaire général ;
- le Syndicat des jeunes agriculteurs de Mayotte, représenté par M. Soumaila Moeva, président, qui est accompagné de Martin Khuu, coordinateur ;
- et enfin la Mutualité sociale agricole (MSA) d'Armorique, représentée par Mme Karine Nouvel, directrice générale, et M. Yohan Auffret, directeur adjoint ; cet organisme gère la protection sociale des exploitants agricoles et de leurs familles depuis 2015.
Dans un premier temps, je vous demanderai dans votre propos liminaire de pointer les éléments principaux caractérisant selon vous le foncier agricole mahorais, puis les rapporteurs interviendront pour des précisions complémentaires sur la base du questionnaire qu'ils vous ont adressé. Enfin, je donnerai la parole à nos autres collègues.
M. Mouhamadi Assani, chef de cabinet du président du Conseil départemental de Mayotte. - Le président a un empêchement de dernière minute qui ne lui permet pas de participer à cette table ronde. Je prends donc la main en compagnie de M. Enfanne Haffidou, directeur général adjoint en charge du développement économique et de M. Saitu Said-Halidi, directeur de l'agriculture, des ressources terrestres et maritimes.
M. Enfanne Haffidou, directeur général adjoint en charge du développement économique. - Avant de vous présenter les actions du département dans le domaine agricole, nous vous communiquons quelques chiffres pour vous permettre de mieux comprendre le contexte de notre département.
La superficie agricole utile est estimée à 20 000 hectares. Elle est composée de terres arables, qui accueillent des cultures maraîchères, vivrières, fourragères, d'arbres fruitiers, de vanille et de café, de surfaces toujours en herbe sous les cocotiers et de surfaces en jachère. Elle n'inclut pas la forêt. Il est difficile d'apprécier l'évolution exacte de la superficie mahoraise car l'observatoire mahorais n'est pas suffisamment alimenté en données.
Le foncier agricole mahorais est détenu à 60 % par le Conseil départemental, à 30 % par des particuliers et à 10 % par l'État.
Le problème structurel de l'indivision successorale n'est toujours pas résolu et empêche tout déploiement d'actions en matière agricole.
M. Philippe Gout, directeur de l'alimentation, de l'agriculture et de la forêt de Mayotte (DAAF). - Nous vous remercions de nous avoir associés à cette table ronde. Le foncier agricole est au coeur de nos préoccupations. L'ensemble des services locaux de l'État s'est approprié cette question sous le prisme du développement d'une agriculture professionnelle au service d'une ambition de souveraineté alimentaire du territoire. C'est dans cette optique que nous abordons, au niveau du ministère de l'agriculture, la question du foncier, dont on a coutume de dire à Mayotte qu'il est rare. Tous les collègues qui sont autour de cette table ronde virtuelle pourront en témoigner.
Cependant, si la question de la rareté du foncier est récurrente à Mayotte, c'est à travers le prisme d'un foncier disponible pour le déploiement et la mise en oeuvre d'une politique publique que nous souhaitons aborder le sujet.
Le foncier agricole existe, nous y reviendrons quand nous aborderons sa superficie. Notre préoccupation est de pouvoir disposer d'un foncier disponible et sécurisé, au sens de la propriété foncière. C'est un enjeu important à Mayotte, que le sénateur Thani Mohamed Soilihi connaît parfaitement, et qui parfois entrave la capacité de certains acteurs à s'investir dans une activité professionnelle sur le territoire.
Je prends quelques instants pour revenir sur la démarche que nous avons conduite depuis quelques années en matière de foncier, dans un environnement qui évolue très rapidement, ce qui est particulièrement éclairant.
À la demande du préfet de Mayotte, nous avons lancé en 2019 les états généraux de l'agriculture en y associant les parlementaires, le président du Conseil départemental, la chambre d'agriculture et l'ensemble des acteurs du territoire autour de 3 thématiques identifiées comme prioritaires : les marchés informels, l'eau et le foncier agricole. Nous nous étions donnés comme ambition de construire des solutions de terrain, pragmatiques et opérationnelles.
Sur le foncier, nous avions recensé des enjeux de sanctuarisation de surfaces significatives de terres agricoles au profit de la mise en oeuvre d'une agriculture professionnelle, la régularisation de l'occupation foncière des agriculteurs professionnels et l'installation.
Parmi les actions validées, je peux citer la mise en place de la réglementation des baux ruraux et donc la sécurisation des conditions juridiques de mise à disposition du foncier de l'État et du Conseil départemental, la conduite d'opérations de régularisation du foncier départemental, la conduite d'une opération d'installation sur un titre appartenant au foncier privé de l'État, des opérations de zones agricoles expérimentales, conduites par l'Établissement public foncier et d'aménagement de Mayotte, le renforcement du Point accueil installation (PAI) sur le territoire et enfin une réflexion pour sécuriser les exploitations agricoles, en permettant notamment aux agriculteurs de vivre sur leur exploitation.
Vous constatez que, dès 2019-2020, ces sujets importants ont été traités. Le sénateur Thani Mohamed Soilihi a beaucoup oeuvré à la mise en oeuvre de ces préconisations. Si le sujet est important et complexe, des avancées très significatives ont été accomplies dans le domaine du foncier en seulement quelques années. Les acteurs locaux se sont appropriés cette question.
M. Saitu Said-Halidi, directeur de l'agriculture, des ressources terrestres et maritimes. - Comme M. Enfanne Haffidou, nous observons que la plupart des parcelles sont en indivision et que des travaux sont en cours pour que les propriétaires puissent obtenir un titre de propriété.
Le foncier agricole mahorais est en majorité valorisé dans un modèle intensif de monoculture commerciale, notamment de manioc et de bananes, mais aussi dans un modèle d'autoconsommation.
L'agriculture familiale reste dominante, souvent sur de petites exploitations de moins d'un hectare. L'agriculture traditionnelle cohabite donc avec l'agriculture commerciale.
La superficie réellement cultivée est de 7 000 hectares. Les fruits sont cultivés sur 3 700 hectares, les légumes sur 1 500 hectares, les superficies restantes accueillant des cultures de féculents, bananes vertes et manioc.
Pour protéger et valoriser le foncier agricole, le Conseil départemental mène de nombreuses actions, souvent en partenariat avec les différentes institutions de développement agricole.
Une grande partie des parcelles agricoles sont occupées de manière irrégulière, par des agriculteurs ou par d'autres personnes pour des activités non agricoles. Une des grandes difficultés du département est d'agir pour mettre ces parcelles à la disposition des agriculteurs. Le Conseil départemental répertorie tous les agriculteurs qui exploitent les parcelles agricoles dont il est propriétaire pour identifier ceux qui souhaitent se professionnaliser et les accompagner. Les parcelles de ceux qui sont plus âgés ou qui ne veulent pas se professionnaliser seront proposées à de jeunes agriculteurs ou à des professionnels.
Le département possède aussi des parcelles de très grande taille. Il envisage de les morceler, de les viabiliser en facilitant l'accès à l'eau et en réhabilitant les pistes agricoles et de proposer des baux à des agriculteurs professionnels. Parmi les atouts dont dispose le territoire, beaucoup de jeunes agriculteurs souhaitent s'installer.
L'autosuffisance alimentaire est un objectif atteignable. L'île est presque autosuffisante en féculents et en fruits et légumes. En revanche, sur d'autres filières, l'autosuffisance semble difficile à atteindre, notamment parce que la taille moyenne des parcelles est de 1 hectare.
Par ailleurs, une grande partie de la production est détruite par les lémuriens et les roussettes, et les agriculteurs sont confrontés à des vols. Le Conseil départemental réfléchit à un plan de protection des exploitations agricoles et à l'identification des animaux d'élevage avec des puces électroniques. C'est une opération coûteuse et il envisage de doter quelques animaux par exploitation.
Mme Micheline Jacques, présidente. - Je vous remercie pour vos propos très éclairants et je redonne la parole à M. Gout.
M. Philippe Gout. - Nous avons bien identifié le foncier comme un défi à relever, de nombreuses actions ont été entreprises pour apporter des solutions à cette problématique qui sera sans doute évoquée par l'ensemble des participants à cette table ronde.
Notre angle d'attaque est de disposer d'un foncier disponible et non d'un foncier occupé, pour déployer une stratégie d'installation, en vue de la souveraineté alimentaire du territoire, qui est la colonne vertébrale de notre action.
À ce titre, l'Établissement public foncier et d'aménagement de Mayotte (EPFAM) a pour mission d'aménager et d'équiper le foncier agricole de l'État. Ce foncier est aujourd'hui occupé par des personnes qui exercent une double activité. La difficulté est de conjuguer l'occupation longue de ce foncier avec la stratégie de l'État pour la souveraineté alimentaire de l'île.
Si le Conseil départemental est le premier propriétaire foncier du territoire, l'État dispose d'un peu plus de 700 hectares de foncier agricole. Ces propriétés de l'État dont la détention est juridiquement sécurisée doivent servir de démonstrateur d'une politique de souveraineté alimentaire.
Mme Micheline Jacques, présidente. - Je vous remercie et je donne la parole au directeur général de l'EPFAM.
M. Yves-Michel Daunar, directeur général de l'Établissement public foncier et d'aménagement de Mayotte (EPFAM). - L'EPFAM a été créé en juin 2017 et a commencé à exercer son droit de préemption en octobre 2019. S'il n'y a effectivement pas de SAFER à Mayotte, l'article L189-41 du code rural indique que les missions des SAFER sont exercées par l'EPFAM, notamment en termes d'acquisitions foncières, de régulation des prix du foncier. L'établissement veille aussi à éviter le mitage et le morcellement du foncier agricole.
En matière d'aménagement agricole, nous travaillons avec la commune de Bandrélé sur l'aménagement de son pôle agricole, avec l'État sur l'aménagement d'une parcelle de 56 hectares. L'objectif est de travailler de manière expérimentale et de voir comment les méthodes peuvent être déclinées à l'échelle du territoire. Nous prenons en compte l'hydraulique agricole dans ces aménagements et nous cherchons à identifier des circuits courts et à mettre en place des fermes urbaines.
Enfin, nous accompagnons l'installation d'agriculteurs, notamment sur le foncier maîtrisé par l'établissement mais aussi dans le développement d'une agriculture biologique.
En termes d'organisation, nous disposons d'un pôle dédié doté de 7 ETP. Les décisions de l'établissement sont prises après avis de la commission départementale ad hoc, comme le prévoit le code rural, et dont la composition est basée sur celle des conseils d'administration des SAFER. L'objectif est d'associer les professionnels de l'agriculture aux décisions qui sont prises sur le territoire, notamment en matière de préemption. Nous pouvons aussi réaliser des acquisitions amiables, les dernières propositions reçues portant sur 250 hectares.
En termes de préemption, nous avons reçu, depuis 2019, 714 déclarations d'intention, portant sur 233 hectares de foncier, avec un prix moyen de 22,78 euros par m2. En 2022, les prix ont atteint environ 30 euros. De nombreuses transactions portent sur de petites parcelles, 85 % couvrant moins de 5 000 m2. C'est pourtant la surface minimum permettant à un maraîcher de vivre. 65 % des parcelles couvrent moins de 1 000 m2, pour une surface médiane de 550 m2. Par conséquent, la majorité des petites parcelles qui sont mises sur le marché n'ont pas une vocation agricole.
La commission départementale nous demande d'intervenir de façon systématique en préemption sur les petites parcelles, ce qui n'est pas sans conséquences sur l'ambiance sociale du territoire. On nous annonce parfois des prix à 40 euros pour que nous ne préemptions pas les parcelles. Par ailleurs, nous ne préemptons pas quand l'achat est réalisé par un agriculteur déclaré. Nous voyons également apparaître des montages avec des sociétés écran à vocation agricole pour échapper à la préemption mais nous sommes très vigilants.
Le foncier est relativement onéreux. L'EPFAM a installé 18 agriculteurs sur les terres dont il est propriétaire, après avoir évalué leur vocation à devenir des agriculteurs professionnels. Si les personnes présentes sur le foncier ne souhaitent pas devenir agriculteurs professionnels, l'établissement les indemnise et installe de nouveaux propriétaires. Certaines personnes disposent parfois d'un titre de propriété qui n'a pas été enregistré, ce qui génère des conflits.
L'établissement loue le foncier dont il est propriétaire environ 1 200 euros par hectare et par an, pour un prix d'achat moyen de 120 000 euros. Il ne pourra donc couvrir le prix d'achat qu'après 100 ans de location.
L'objectif de l'établissement est de permettre aux agriculteurs de s'installer dans de bonnes conditions. Nous les accompagnons également dans l'élaboration de leurs bilans prévisionnels, dans la recherche de financements auprès du Fonds européen agricole pour le développement rural (FEADER) ou des banques. Deux agriculteurs sont enfin financés par des banques de la place et vont débuter leur exploitation, alors qu'un autre va racheter les terres qu'il exploite à l'établissement.
Je rappelle que notre première acquisition en 2019 concernait une exploitation de 5 hectares que l'ancien propriétaire n'arrivait pas à vendre et qu'il commençait à démembrer, alors qu'elle disposait de serres et de réseaux hydrauliques. Nous sommes intervenus pour la maintenir dans l'espace agricole mahorais.
Mme Micheline Jacques, présidente. - Je vous remercie pour ces propos très éclairants. Je donne la parole à M. Naïlane-Attoumane Attibou.
M. Naïlane-Attoumane Attibou, secrétaire général de la Fédération mahoraise des associations environnementales (FMAE). - Je vous remercie pour votre invitation. Je tiens à préciser ce que nous entendons par agriculteur et par cultivateur car les définitions ne sont pas toujours les mêmes. La plupart des Mahorais cultivent des champs qui se transmettent de génération en génération, pas forcément de manière officielle. Cependant, la pratique coutumière consacre l'appartenance de tel terrain à telle famille. Par ailleurs, une partie du foncier agricole est cultivée dans des espaces naturels sensibles, dans des espaces protégés qui parfois bénéficient de subventions publiques.
Des terres agricoles sont aussi situées dans des zones agroforestières extrêmement sensibles et leur exploitation n'est pas compatible avec la réglementation des milieux agricoles protégés. Alors que l'île est confrontée à une crise de l'eau, il y a des champs à proximité directe des périmètres des zones de captages, pourtant protégées. Cette situation se traduit par une pollution diffuse et fait peser un risque sur la sécurité alimentaire en matière d'eau.
Les parcelles sont souvent en indivision et sont occupées et exploitées par des personnes qui n'en sont pas propriétaires.
La réglementation appliquée à Mayotte n'est pas toujours cohérente avec la superficie du territoire. Les normes métropolitaines ne sont pas adaptées à l'île. Par exemple, le code forestier autorise le déboisement de parcelles dans la limite de 4 hectares mais cette superficie est très importante sur un territoire de 375 km2. Les pratiques agricoles ne sont pas suffisamment encadrées alors que la densification de la population renforce le besoin d'encadrer le foncier agricole. Même s'il appartient à l'État ou au département, ces acteurs ne maîtrisent pas forcément ce qui se passe sur le terrain. Les terres sont souvent exploitées par des squatteurs. Il est important d'intégrer cette réalité du territoire et de maîtriser réellement le foncier agricole et le foncier protégé.
J'attire votre attention sur le décalage entre ce qui est officiel et ce qui se passe au quotidien sur le terrain. Nous payons cet écart en termes de biodiversité, de ressource en eau, de diversité des espèces et des espaces.
Mme Micheline Jacques, présidente. - Je vous remercie. Je donne la parole à M. Soumaila Moeva.
M. Soumaila Moeva, président du Syndicat des jeunes agriculteurs de Mayotte. - Je rappelle que 43 % des agriculteurs mahorais ont plus de 60 ans et 10 % ont moins de 40 ans. Si le vieillissement de la population agricole est une problématique nationale, celle-ci est accentuée à Mayotte par le maintien d'une agriculture non professionnelle qui freine l'installation et le développement des filières.
Je rappelle que les aides de la PAC ne sont soumises à aucune restriction d'âge, de type d'activité ou de maîtrise foncière.
Le territoire souffre aussi d'un manque d'incitations financières à la transmission. Les aînés sont contraints de conserver le foncier agricole car ils ne peuvent pas partir en retraite. Par conséquent, les jeunes agriculteurs ont du mal à trouver du foncier.
Par ailleurs, des personnes, en situation régulière ou non, pratiquent une agriculture avec des méthodes peu conventionnelles, en utilisant des produits phytosanitaires interdits en France, qui entrent dans la chaîne alimentaire.
Sur les 15 premiers diplômés du brevet professionnel de responsable agricole (BPRA) à Mayotte, seuls 6 disposent d'un foncier leur permettant de s'installer et de bénéficier du soutien de l'Union européenne. Les 9 autres sont confrontés à un parcours du combattant pour trouver du foncier.
94 % des porteurs de projet, soit environ 200 personnes, se sont adressés au point accueil installation (PAI) et cherchent du foncier agricole. Ils mettent entre 3 et 5 ans pour trouver des terres, certains abandonnent. Cette situation maintient des agriculteurs compétents et diplômés dans une situation de semi-professionnalisation. Ils sont contraints d'exploiter des terres sans bail ou titre, sans possibilité d'investir, ou de trouver un emploi alimentaire. Faute d'une politique forte sur le foncier agricole, c'est la réalité à laquelle sont confrontés les jeunes agriculteurs mahorais.
Sur la maîtrise foncière, le syndicat porte plusieurs propositions.
Sur les terres du Conseil départemental en zone agricole faisant l'objet de revendications au nom de l'occupation coutumière, le syndicat demande qu'un critère de portage de projet agricole soit rendu obligatoire, à savoir le passage par le PAI, une formation à l'agriculture et la rédaction d'un projet agricole. Sans mise en place d'une telle mesure, les terrains sont voués à se diviser et, à terme, à s'ajouter à la dynamique d'urbanisation sauvage. Sur les terres du Conseil départemental en zone agricole (zone A) ne faisant pas l'objet de revendications au nom de l'occupation coutumière, le syndicat réclame une interdiction de cession ou de location à des personnes non agricoles.
Sur les terrains privés en zone A ou en zone N, le syndicat revendique l'application de l'article L181-31 du code rural et de la pêche maritime, et demande la mise en place effective des recommandations du précédent rapport sénatorial, sur la réactivation d'une commission consultative des baux ruraux et la création de groupes fonciers agricoles, qui sont des éléments essentiels du développement du fermage sur le territoire. Aujourd'hui, seuls 1 % des exploitants louent leurs terres.
Par ailleurs, le syndicat demande la mise en place d'une politique de valorisation des terres incultes ou en friche par l'EPFAM avec un soutien du département, sur le modèle de ce qui a été mis en place à La Réunion.
Sur les terrains du Conseil départemental et de l'EPFAM mis en location, le syndicat demande que l'implantation du logement principal sur l'exploitation soit facilitée, ce qui limiterait les vols, ainsi que la mise en place de villages agricoles. En effet, les parcelles louées aux agriculteurs sont souvent dépourvues d'infrastructures. La création de villages agricoles permettrait de viabiliser des parcelles à fort potentiel agricole.
Enfin, dans l'optique d'encourager la transmission et réduire la rétention des terres agricoles, il est nécessaire de réformer les conditions d'attribution de la PAC, tout en assurant un revenu aux agriculteurs retraités, avec la mise en place d'un minimum retraite couplé à des aides à la transmission versées par le département. En effet, ouvrir l'ensemble des terres privées au fermage permettrait d'augmenter rapidement et de façon significative les installations de nouveaux agriculteurs, notamment des jeunes agriculteurs.
Sans initiative forte sur une meilleure maîtrise du foncier agricole, l'agriculture mahoraise est vouée à l'échec. Le syndicat est convaincu que les agriculteurs professionnels, en particulier les jeunes, présents sur leur exploitation, usant de techniques raisonnées, voire biologiques, entretenant les cours d'eau et leurs terrains, sont aujourd'hui les plus à même d'assurer la préservation et le développement de l'agriculture à Mayotte.
Il faut donc nous encourager, en facilitant notre installation sur des terres accessibles et sécurisées.
Mme Micheline Jacques, présidente. - Je vous remercie infiniment pour toutes ces précisions. Je rappelle que nous sommes preneurs des contributions écrites de tous les intervenants pour nourrir nos travaux.
Je donne la parole à M. Stéphane Allard.
M. Stéphane Allard, directeur de la Chambre de l'agriculture, de la pêche et de l'aquaculture de Mayotte (CAPAM). - J'ai écouté l'ensemble des interventions et je partage le constat général sur les difficultés d'accès au foncier pour les agriculteurs qui veulent s'installer. Ces difficultés sont aussi liées à l'histoire. En effet, nous sommes missionnés par le Conseil départemental pour développer le fermage mais ce système ne fonctionne pas du tout à Mayotte, ce qui bloque le développement de l'agriculture. Les exploitations ont une taille moyenne de 1,4 hectare, ce qui est peu, et beaucoup restent sur la culture vivrière.
Une des solutions serait que le Conseil départemental et l'État mettent en place le fermage pour les jeunes agriculteurs, qui disposeront d'un SIRET et qui seront inscrits à la MSA. Il existe un potentiel de foncier mais il n'est pas utilisé.
Enfin, il existe des terres agricoles, par exemple en Tanzanie, disponibles à la location. Pour nourrir la population de Mayotte, on pourrait envisager un développement de l'approvisionnement régional et des investissements d'agriculteurs mahorais en Tanzanie. Une telle approche résoudrait les problèmes d'approvisionnements de Mayotte en produits agricoles frais, de qualité et locaux. Mayotte importe 60 % de son alimentation de métropole, 15 % du Brésil, 5 % d'Argentine et d'Afrique du Sud. Des solutions locales existent, sans doute à Madagascar ou à La Réunion.
Mme Micheline Jacques, présidente. - Je vous remercie pour votre intervention. Nous terminons ce tour de table avec Mme Karine Nouvel de la Mutualité sociale agricole (MSA).
Mme Karine Nouvel, directrice générale de la Mutualité Sociale Agricole (MSA) d'Armorique. - La MSA d'Armorique couvre les populations agricoles du Finistère et des Côtes d'Armor et a la charge de la gestion de la protection sociale des agriculteurs mahorais depuis le 1er janvier 2015. Depuis cette date, ils ont obtenu un statut qui leur permet de bénéficier d'une protection sociale. Sur le volet maladie, ils sont éligibles aux indemnités journalières en cas d'arrêt de travail et à la prise en charge de leurs frais médicaux. Sur le volet retraite, ils bénéficient de la retraite de base.
En 2019, l'assurance accidents du travail et maladies professionnelles a été mise en place, comme la retraite complémentaire obligatoire.
Au 1er janvier 2023, la MSA d'Armorique - Mayotte couvrait 1 338 chefs d'exploitation mahorais. 52 % ont plus de 60 ans. Elle couvre également 350 conjoints collaborateurs et 50 aides familiaux. 2 471 personnes ont donc des droits ouverts en maladie.
Avant 2015, le statut d'agriculteur n'existait pas à Mayotte. Les agriculteurs et leur famille relevaient de la caisse de Sécurité sociale de Mayotte, sans appel de cotisations. Par conséquent, les agriculteurs professionnels n'ont ouvert aucun droit à retraite avant 2015.
À partir de cette date, pour être affilié à la MSA, l'agriculteur devait exploiter une surface pondérée minimum de 2 hectares. La notion d'obligation d'affiliation n'est toujours pas intégrée par la population agricole, d'autant que l'attribution des aides PAC n'est pas soumise à une obligation d'affiliation à la MSA, contrairement aux règles applicables en métropole.
Les cotisations ne sont pas calculées sur les revenus professionnels mais en fonction de la surface pondérée. La loi du 13 décembre 2000 prévoit un certain nombre d'exonérations de cotisations pour les territoires ultramarins, sur les cotisations maladie, prestations familiales et retraite de base.
La cotisation sur les indemnités journalières AMEXA est applicable depuis 2015. C'est une cotisation forfaitaire de 180 euros. La cotisation sur les indemnités journalières ATEXA est applicable depuis 2019. Elle est calculée en fonction de la surface pondérée. Enfin, la cotisation retraite complémentaire obligatoire est applicable depuis 2019. Elle est aussi basée sur la surface pondérée.
Malgré les exonérations, le taux de recouvrement des cotisations reste faible, autour de 20 %. Il a cependant augmenté depuis 2015, notamment grâce à la mise en place du prélèvement bancaire en 2019 et à des opérations de communication locales.
Je laisse la parole à mon directeur adjoint qui détaillera quelques points spécifiques sur l'impact de la structuration du foncier sur la protection sociale des exploitants mahorais.
M. Yohan Auffret, directeur adjoint de la Mutualité Sociale Agricole (MSA) d'Armorique. - Cela a été rappelé, 52 % des chefs d'exploitation couverts par la MSA ont plus de 60 ans et beaucoup d'agriculteurs s'installent à l'âge de la retraite. Ce sont souvent d'anciens fonctionnaires ou d'anciens salariés, qui possédaient un terrain. Seuls 7 % des chefs d'exploitation ont moins de 40 ans.
La structuration et la gestion du foncier à Mayotte peuvent avoir plusieurs impacts sur la protection sociale des agriculteurs affiliés à la MSA.
Il a été constaté, à plusieurs reprises, que des exploitants agricoles ont vu leurs parcelles réduites car ils exploitaient sur le domaine forestier, sur une parcelle devenue inaccessible ou encore sur du foncier victime de l'érosion.
Au-delà de la perte d'exploitation, cela génère une diminution des déclarations de surface pondérée, ce qui entraîne une baisse des cotisations appelées et, à long terme, le versement d'une retraite moins importante.
Une diminution de la parcelle peut également générer une désaffiliation, si la surface exploitée en hectare pondéré descend en dessous du seuil d'affiliation à la MSA qui est de 2 hectares. Les personnes dont l'agriculture est la seule activité seront dès lors sans protection sociale.
Si les droits aux prestations maladie restent acquis pour les frais de santé en cas de désaffiliation, ils ne sont plus couverts pour le risque accident du travail et maladie professionnelle, ne bénéficient plus des indemnités journalières maladie et ne cotisent plus pour leur retraite.
Nous avons organisé une table ronde autour de la prévention du mal-être. Au-delà des problèmes de vols, la principale difficulté liée au foncier concerne l'accès aux exploitations. Elle entraîne une perte d'exploitation car les parcelles sont difficiles à entretenir et à aménager. Les difficultés d'accès avec un véhicule empêchent également les exploitants de transporter leur production.
Cette perte d'exploitation entraîne, là encore, une incapacité à payer les cotisations. Ils ne bénéficient plus de la couverture des indemnités journalières en cas de maladie ou d'accident du travail. À plus long terme, ils ne pourront pas bénéficier de la retraite complémentaire obligatoire (RCO) sur les périodes non cotisées.
Sur la PAC, contrairement à la métropole, la condition d'affiliation à la MSA ne figure pas parmi les critères d'éligibilité à la PAC. Ce point de réglementation entraîne nécessairement une conservation du foncier agricole par des personnes dont la profession n'est pas agriculteur, ni à titre principal ni à titre secondaire, mais qui bénéficient de la PAC.
Cette situation génère une distorsion de concurrence entre les exploitants affiliés à la MSA, qui ont des charges sociales à payer, vis-à-vis des exploitants « non-officiels », qui n'ont pas de charges sociales mais qui bénéficient, malgré tout, de la PAC.
L'état de la protection sociale peut constituer un frein à l'installation et au maintien des agriculteurs dans leur métier.
Un nombre important de dispositifs de protection sociale ne sont pas mis en oeuvre, ce qui renforce le sentiment d'inégalité vis-à-vis de la métropole pour nos assurés, parfois de rejet de la MSA et accentue les difficultés d'accès aux soins et d'accès aux droits.
La législation prévoit que les exploitants agricoles peuvent bénéficier d'un congé maternité/paternité par le biais d'un service de remplacement. En l'absence de service de remplacement, ils peuvent procéder à une embauche directe. À Mayotte, il n'y a aucun service de remplacement et la possibilité de procéder à une embauche directe est très limitée compte tenu du contexte local. Ainsi, les dispositions réglementaires encourageant le congé maternité/paternité ne sont pas applicables sur le territoire.
Il conviendrait de faire évoluer les textes pour prendre en compte la situation de Mayotte et laisser la possibilité aux exploitants de bénéficier directement des indemnités journalières forfaitaires en cas de maternité/paternité.
En termes de retraite, la retraite agricole de base a été mise en place en 2015. Les exploitants agricoles n'ont donc pu acquérir de points et de validation d'années d'activité que depuis 8 ans. Pour la retraite complémentaire obligatoire, l'obtention de points est encore plus récente, puisqu'elle a été mise en place en 2019. À ce jour, aucun texte ne prévoit une validation gratuite de points pour les années antérieures à 2015.
Si ce sujet dépasse le cadre du champ de responsabilité de la MSA, les représentants des différentes organisations agricoles nous remontent régulièrement cette demande que nous relayons. Cette situation génère de l'incompréhension de leur part et incite les agriculteurs à ne pas s'affilier, car ils considèrent qu'ils ne bénéficieront pas d'une retraite convenable, ou à ne pas prendre leur retraite et donc à ne pas libérer de foncier.
Au 1er janvier 2023, il y avait 4 retraités agricoles à Mayotte, les pensions mensuelles oscillant entre 64,81 euros et 292,40 euros. Les pensions les plus importantes comprennent la part versée au titre de la retraite complémentaire obligatoire.
L'Allocation Spéciale pour personne âgée, différente de l'ASPA versée en métropole, est gérée par la Caisse de Sécurité sociale de Mayotte. Un exploitant peut en bénéficier, à compter de 65 ans, sous conditions de ressources, tout en conservant son activité. Son montant représente la moitié de celui versé en métropole. Il n'est pas incitatif à la cessation d'activité et donc à la libération de terres agricoles. 246 agriculteurs en bénéficient. Je signale également que l'ASPA est récupérable sur la succession.
Le calcul de la retraite agricole est basé sur les années d'activité. Pour rappel, un agriculteur ne peut cotiser que depuis le 1er janvier 2015. L'absence de validation de trimestres et de points gratuits pour les périodes antérieures à 2015 constitue le principal frein au départ à la retraite et par conséquent à la cession du foncier.
Les coefficients de pondération appliqués aux productions déclarées sont inadaptés au contexte. En effet, les cotisations des exploitants agricoles de Mayotte ne sont pas déterminées en fonction des revenus professionnels, mais, à l'instar des autres DOM, selon les productions déclarées auxquelles sont appliqués des coefficients de pondération. Cette inadaptation se traduit par des cotisations appelées trop importantes au regard des revenus générés par l'activité des exploitants. Les cotisations n'étant pas payées, les assurés ne bénéficient pas de droits tels que les indemnités journalières, la retraite complémentaire obligatoire ou l'Atexa.
Par ailleurs, certaines cultures ne sont pas bien identifiées, notamment les cultures maraîchères, pourtant très répandues à Mayotte, qui ne bénéficient pas de coefficient de pondération.
Enfin, la complémentaire santé solidaire n'a pas encore été mise en place à Mayotte. Son déploiement est prévu au 1er janvier 2024. Un dispositif d'exonération du ticket modérateur existe depuis 2019. Il permet aux assurés de bénéficier d'un 100 % santé, sous réserve d'une demande adressée chaque année et de la transmission de l'avis d'imposition, pour vérifier que ses revenus sont en dessous des seuils d'éligibilité.
Cependant, la population que nous couvrons, en raison de la barrière de la langue et de la culture locale, n'est pas toujours en mesure de transmettre les éléments demandés pour pouvoir bénéficier de l'exonération du ticket modérateur.
En 2020, la MSA a sollicité la DGFIP afin d'obtenir, à l'instar de la Caisse de Sécurité sociale de Mayotte, les flux permettant de renouveler automatiquement les droits des assurés éligibles.
Les différentes problématiques exposées peuvent apparaître techniques mais leur résolution est essentielle pour le bon déploiement de la protection sociale des exploitants agricoles et de leurs familles et la professionnalisation du monde agricole.
Mme Micheline Jacques, présidente. - Je vous remercie pour votre intervention. Je donne successivement la parole à nos deux rapporteurs.
M. Thani Mohamed Soilihi, rapporteur. - Merci Mme la présidente. Je salue nos invités dont les interventions ont énormément enrichi notre réflexion. Mes collègues sont édifiés par ce qu'ils ont entendu, notamment au cours des deux dernières interventions. Je remercie la MSA d'avoir insisté pour participer à cette table ronde.
C'est au travers de vos auditions que la délégation aux outre-mer aura une idée plus précise de ce qui se passe dans ce jeune département. Cette étude a été proposée par Victoire Jasmin, sénatrice de la Guadeloupe, que je remercie, dans le prolongement des études que nous avons effectuées de 2015 à 2017 sur le foncier en outre-mer. Elle a proposé à la délégation, qui l'a accepté à l'unanimité, cette étude complémentaire sur le foncier agricole à l'aune des crises que nous venons de traverser et qui mettent en évidence la nécessité de réduire les importations et de produire davantage localement, pour tendre vers l'autosuffisance agroalimentaire.
Cette étude transpartisane est menée sans parti pris, avec tous les groupes politiques du Sénat. Yves-Michel Daunar a mentionné le texte qui a créé l'EPFAM et qui lui a confié la préemption des terres. Je connais d'autant plus ce texte que c'est la délégation aux outre-mer qui a proposé la création des EPFA de Guyane et de Mayotte. Après deux ans d'existence, l'EPFA de Guyane a émis le souhait de mettre en place une SAFER. La question se pose pour Mayotte, notamment en entendant la Fédération mahoraise des associations environnementales. En effet, la protection des espaces naturels figure parmi les missions des SAFER.
Notre île est minuscule par rapport à d'autres territoires. Elle s'étend sur 374 km2 et est très densément peuplée. Il faut à la fois construire des logements, des routes, mais aussi développer l'agriculture.
Dans le rapport que nous rédigerons avec ma collègue Vivette Lopez, nous émettrons un certain nombre de préconisations, enrichies par vos éclairages, pour améliorer la situation.
Comme l'a rappelé la présidente, nous vous remercions de nous transmettre par écrit les réponses au questionnaire que nous vous avons fait parvenir.
En écoutant certains d'entre vous, nous pouvons avoir l'impression que tout va bien. Le Conseil départemental a prévu une excellente programmation pour attribuer des parcelles aux agriculteurs. S'il y parvient, ce sera une très bonne nouvelle. Les services de l'État ont eux aussi mis en place un programme pour faciliter l'attribution de terres agricoles.
Or, les jeunes agriculteurs n'ont pas accès aux terres agricoles. Comment pouvez-vous mieux coordonner vos actions, pour améliorer la situation et dans quels délais ? Depuis la crise sanitaire et la guerre en Ukraine, l'obligation de produire en local se fait plus que jamais ressentir et il est essentiel d'aider les agriculteurs qui sont prêts à s'investir pour développer la production locale.
Mme Vivette Lopez, rapporteur. - Je suis heureuse de conduire cette mission avec Thani Mohamed Soilihi. Nous avons absolument besoin de nos agriculteurs. Je les remercie de produire les aliments nécessaires à notre existence.
J'ai noté que le foncier agricole était aussi une de vos priorités. M. Naïlane-Attoumane Attibou a distingué le foncier protégé et le foncier agricole. Qu'en est-il du foncier protégé ? Est-il vraiment nécessaire de le protéger ? Une partie de ce foncier pourrait-elle servir au foncier agricole ?
Je n'ai pas très bien compris si les agriculteurs avaient le droit ou non de construire un hangar et une habitation sur leur propriété agricole, notamment pour surveiller leurs cultures. Que se passe-t-il quand un agriculteur vend sa maison à quelqu'un qui n'est pas agriculteur ? Est-il autorisé à procéder à cette transaction ?
Vous avez parlé du service de remplacement pour le congé parental. Ce service pourrait-il servir pour des congés ou pour remplacer les agriculteurs malades ?
Quelles sont les menaces que le changement climatique fait peser sur Mayotte ?
Enfin, au regard de l'objectif d'autosuffisance alimentaire et des caractéristiques du foncier agricole mahorais, quels sont les handicaps et les atouts de Mayotte, notamment pour l'installation des jeunes ? Les normes européennes constituent-elles un frein à l'installation de jeunes agriculteurs ?
Mme Micheline Jacques, présidente. - Je donne la parole à M. Yves-Michel Daunar.
M. Yves-Michel Daunar. - Si vous avez eu l'impression que tout allait bien au niveau du foncier, M. le sénateur, c'est que je me suis sans doute mal exprimé.
Tout ne va pas bien et nous rencontrons de grandes difficultés sur le terrain. J'ai parlé de la problématique du morcellement, avec des ventes de terrains de 200 m2, en plein espace agricole ou naturel. Je rejoins la position de M. Soumaila Moeva pour la mise en place d'une commission sur le morcellement agricole.
Les préemptions réalisées par l'établissement sont très mal vécues sur le territoire. Nous avons réuni hier les notaires et les géomètres, qui, compte tenu de la politique de l'établissement en matière de préemption, sont de plus en plus menacés par leurs clients, d'autant que nous avons une action en révision de prix quasi systématique, dès que le prix du foncier dépasse 40 euros. L'action de l'établissement n'est pas admise par le territoire.
Je crois que la mise en place de la SAFER en Guyane répondait au « mouvement des 500 frères ». Je ne suis pas certain qu'elle soit complètement en activité, d'autant plus que la dotation de l'État de 200 000 euros ne lui a pas permis de commencer à travailler.
L'EPFAM travaille sur le foncier agricole que l'État met gracieusement à sa disposition pour la réalisation de chemins d'exploitation et d'aménagements divers.
Nous menons notre action sans dotation de l'État. Le préfet de Mayotte et la DAAF se sont beaucoup investis pour que nous puissions bénéficier d'une dotation. C'est grâce à la volonté du Conseil d'administration que nous avons réussi à fonctionner.
Je rappelle qu'une SAFER est une société anonyme, qui ne fonctionne donc pas uniquement avec les subsides de l'État ou des collectivités territoriales.
Sur le dernier exercice, l'EPFAM a acquis pour près de 3 millions d'euros de foncier et perçu des recettes de location à hauteur d'environ 10 000 euros. Le foncier est occupé, les difficultés de libération de ce foncier sont réelles. Nous avons recruté des agents de terrain, pour identifier les agriculteurs, dans des conditions qui ne sont pas toujours très simples. En faisant preuve de persuasion, parfois dans des délais assez longs, nous parvenons à récupérer du foncier pour installer de jeunes agriculteurs. Je précise que tous les agriculteurs qui se sont installés à Mayotte au cours des dernières années ont bénéficié du soutien de l'établissement.
L'accès à l'eau pose aussi des difficultés. Nous allons mener des tests avec la DAAF sur le secteur de Trévani et essayer d'installer des agriculteurs.
Les agriculteurs ne sont pas les seuls à rencontrer des difficultés d'accès au foncier. Le président d'Abattoir de Volailles de Mayotte (AVM) cherche 24 hectares de foncier mais l'État, qui possède 350 hectares de foncier à Trévani n'est pas en mesure de l'aménager car le foncier est squatté par 132 agriculteurs, dont seule une dizaine est « siretisée » et cotise. Nous cherchons à récupérer ce foncier pour installer de jeunes agriculteurs professionnels pour un développement agricole du territoire.
Nous devons trouver des solutions pour récupérer le foncier agricole appartenant au Conseil départemental et y installer, dans des conditions satisfaisantes, des agriculteurs et leur permettre de dégager des revenus suffisants, tout en contribuant à l'autonomie alimentaire du territoire.
Pour attribuer le foncier de l'établissement à des agriculteurs, nous mettons en place des appels à projet. Un certain nombre d'invités à cette table ronde participent aux commissions d'attribution.
La situation n'est pas facile mais nous sommes convaincus que nous parviendrons à l'améliorer.
Mme Micheline Jacques, présidente. - Je vous remercie. Qui souhaite intervenir pour répondre aux questions posées par les deux rapporteurs ?
M. Saitou Said-Halidi. - Le réchauffement climatique a un effet direct sur la production agricole. La saison des pluies est de plus en plus courte, ce qui impacte la production vivrière. Les rendements des productions de bananes et de manioc sont en nette baisse en raison de la sécheresse.
Avec la DAAF, nous essayons de rendre certaines exploitations autonomes en eau. Sur chaque bâtiment d'élevage, nous mettons en place un système de récupération des eaux de pluie qui permet d'alimenter cet élevage en eau.
Le département dispose également d'un centre de recherche agronomique qui travaille sur des variétés locales, délaissées par les agriculteurs, par exemple sur des variétés de tomates cerises ou des aubergines beaucoup plus résistantes aux maladies et au déficit hydrique.
Enfin, sur l'autosuffisance alimentaire, nous travaillons à l'augmentation de la production des élevages en important des fourrages déshydratés de Madagascar pour nourrir les animaux. Ce projet est complété par un projet d'importation de vaches de race de métropole pour l'amélioration génétique de nos cheptels.
Mme Karine Nouvel. - Pour favoriser l'installation des jeunes agriculteurs, il est essentiel de favoriser les départs en retraite des agriculteurs en activité. 52 % des agriculteurs du territoire ont plus de 60 ans. Pour qu'ils libèrent des terres, il faut améliorer le niveau des retraites. Je rappelle que le dispositif de retraite de base a été mis en place en 2015 et que le dispositif de retraite complémentaire obligatoire date de 2019. Les droits sont donc très limités. En absence d'octroi de points gratuits pour valoriser les retraites, des agriculteurs poursuivent leur activité et conservent le foncier.
Il nous semble également important de renforcer les obligations d'affiliation. Elles ne sont pas bien assimilées, alors qu'elles sont essentielles pour ouvrir les droits en cas d'accident du travail, les indemnités journalières en cas de maladie et les droits retraite. Il est important de renforcer la communication sur ce sujet et de conditionner l'octroi des aides de la PAC à l'affiliation à la MSA. Elles ne seront ainsi attribuées qu'aux agriculteurs professionnels et leur montant pourra être revalorisé.
Mme Micheline Jacques, présidente. - Je vous remercie pour ces précisions. M. Philippe Gout souhaite intervenir.
M. Philippe Gout. - Je ne veux pas paraphraser Yves-Michel Daunar, mais je confirme que tout ne va pas bien. Cependant, tous les acteurs ont mis en place un dispositif qui permet d'aller vers une action publique plus ciblée, plus cohérente, avec les baux ruraux, la commission permettant de sécuriser la propriété, la commission départementale de préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers (CDPENAF) qui protège les espaces naturels et forestiers, etc.
Dans une situation que nous considérons tous comme très difficile, nous avons su, collectivement, avec l'aide du législateur, mettre en place des outils sur lesquels nous pouvons nous appuyer pour développer des politiques publiques de masse.
C'est aussi parce que la fluidité naturelle du marché de la transmission n'est pas garantie à Mayotte, pour les raisons qui ont été parfaitement évoquées, que l'État a souhaité mobiliser son foncier agricole. Nous avons commencé à le faire en validant, avec les services de la direction des finances publiques, une délégation de gestion de ce foncier vers l'EPFAM, notamment sur la parcelle n° 40 de 56 hectares dont nous avons parlé. Les enquêtes au niveau local visent à déterminer qui, en termes d'occupation, a vocation à y rester au titre de l'agriculture professionnelle, et qui a vocation à être relocalisé pour libérer des terres à l'installation. Nous devrons être imaginatifs puisque nous entrons dans une logique de conflit d'usage avec des Mahorais qui occupent ces terrains dans le cadre d'une occupation coutumière, ancestrale. Ils occupent des terrains sur le foncier agricole de l'État. Notre souci n'est pas d'alimenter le conflit mais de trouver collectivement, y compris avec nos collègues jeunes agriculteurs qui peuvent peut-être faciliter la démarche, la manière de résoudre ces conflits d'usage et libérer des parcelles suffisamment importantes pour installer de jeunes agriculteurs. Un occupant pourrait consentir à occuper moins d'espace dès lors que les terrains seront aménagés, viabilisés, ce qui sécurisera la production.
Nous espérons que cette stratégie se concrétisera et nous aurons peut-être besoin de l'éclairage de tous, y compris du législateur, pour avancer sur ce chemin.
Pour répondre aux questions de Mme Vivette Lopez, nous observons une atteinte aux espaces protégés par une agriculture clandestine, notamment dans les espaces forestiers, par le défrichement de parcelles.
Les services de l'État travaillent en collaboration avec les services du département et ceux de l'ONF, accompagnés par les forces de l'ordre, pour essayer de lutter contre ce défrichement. Nous intervenons sur les parcelles défrichées en détruisant les productions agricoles illicites pour juguler la propension à dénaturer les espaces naturels.
Je rappelle que la forêt représente un réservoir d'eau important. Par conséquent, la déforestation est particulièrement nuisible à l'eau. Par ailleurs, le conflit d'usage entre l'eau domestique et l'eau agricole sera nécessairement tranché en faveur de l'eau domestique.
Pour rebondir sur les propos de mon collègue représentant les associations environnementales, nous sommes aujourd'hui dans une situation catastrophique à Mayotte, avec une saison des pluies peu abondante. Nous approchons de la fin de la saison des pluies et les réservoirs sont vides ! Cette situation est inédite. Jusqu'à présent, les réservoirs servaient à faire le tampon entre le début de la saison sèche et la saison des pluies. Les mois qui viennent seront sans doute difficiles.
En termes de logement sur le foncier agricole, la Commission départementale de préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers (CDPENAF) examine régulièrement des projets de construction pour améliorer les outils d'exploitation et le logement sur le foncier agricole. Nous donnons des autorisations dès lors que la Commission est en mesure de s'assurer de la légitime prétention des demandeurs à exercer une véritable activité agricole. C'est une façon de sécuriser la production face à la prédation des roussettes et à la prédation humaine. Il est particulièrement choquant de voir le travail d'un agriculteur détruit en quelques instants par quelques personnes pillant sa production. Le devenir de ces constructions en cas d'arrêt d'activité des agriculteurs n'est pour l'instant pas notre sujet.
Enfin, les aides européennes ne sont en effet pas conditionnées à l'affiliation. Je rappelle que 80 % de la production agricole de Mayotte est de nature vivrière. Les aides de la PAC, telles qu'elles ont été jusqu'à présent attribuées, ont une logique d'accompagnement social de tout petits producteurs sur quelques centaines ou milliers de m2. C'est une façon d'accompagner cette agriculture vivrière, qui participe de l'autonomie alimentaire du territoire.
Nous sommes bien sûr focalisés sur une agriculture professionnelle, notamment pour alimenter demain les marchés, la restauration collective et la restauration scolaire. Chaque jour, ce sont 100 000 repas qui pourraient être servis à nos jeunes.
Avec la mobilisation du foncier public, nous soutenons l'agriculture professionnelle, mais nous ne devons pas négliger l'agriculture vivrière qui est un fort amortisseur social, un moyen de subsistance unique pour des centaines ou des milliers de tout petits producteurs, qui n'auront pas vocation, compte tenu des surfaces qu'ils occupent, à s'engager dans une agriculture professionnelle. Les aides PAC sont versées à environ 700 personnes sur les 6 000 « agriculteurs ». Nous pouvons réfléchir à l'infléchissement de ces aides mais cela ne résoudra pas les difficultés que nous connaissons.
Mme Micheline Jacques, présidente. - Je vous remercie. Avant de donner la parole à M. Yohan Auffret, je salue notre collègue Abdallah Hassani qui nous a rejoints en visioconférence.
M. Yohan Auffret. - Le sénateur Vivette Lopez nous a interrogés sur le service de remplacement. En métropole, un service de remplacement ne sert pas uniquement aux congés maternité ou paternité. En termes de législation de la Sécurité sociale, pour bénéficier d'un congé maternité ou paternité et d'indemnités journalières, il faut passer par un service de remplacement puis par une embauche directe. Ce n'est pas le cas pour les autres motifs d'utilisation du service de remplacement auquel les agriculteurs de métropole peuvent recourir librement. Ce service sert aussi d'accompagnement social pour les personnes en difficulté.
La création d'un tel service de remplacement à Mayotte permettrait d'éviter à des femmes enceintes de 8 mois d'aller tous les jours sur leur exploitation.
La condition d'affiliation à la MSA ne concerne pas que la PAC, mais tous les autres types d'accompagnement, comme la mise à disposition de récupérateurs d'eau de pluie.
Au-delà de l'affiliation, il faut aussi s'assurer que les personnes accompagnées règlent leurs cotisations sociales. Nous devons veiller à ce que les aides portent sur des exploitations viables, affiliées, pour éviter toute distorsion de concurrence par rapport à des exploitants qui ne seraient pas affiliés.
Mme Micheline Jacques, présidente. - Je vous remercie pour ces précisions. Je laisse la parole à M. Soumaila Moeva.
M. Soumaila Moeva. - Je suis d'accord avec les différentes interventions sur l'habitat et l'installation.
Je précise néanmoins que l'installation est directement liée au foncier. Sur la programmation de la PAC 2014-2020, nous n'avons pu installer que 10 agriculteurs. La principale difficulté est liée au foncier mais ceux qui obtiennent des terres sont confrontés à des problèmes de financement. Nous avons besoin de renouveler les générations et nous devons offrir aux anciens de bonnes conditions pour les inciter à partir, notamment en termes de retraite.
Au niveau des formations, le brevet professionnel responsable d'entreprise agricole (BPREA) a remplacé en 2021 la capacité professionnelle agricole (CPA). Or, il n'y a eu qu'une seule promotion en 2022. Ces formations sont normalement financées par le Conseil départemental mais l'offre de formation 2023 n'a toujours pas été publiée et le lycée agricole ne peut pas lancer les inscriptions pour cette formation essentielle. En effet, pour bénéficier des fonds européens, un jeune agriculteur doit être titulaire du BPREA.
Nous souhaitons également que le département ou l'EPFAM puisse garantir du foncier aux agriculteurs diplômés du BPREA. Ces derniers ont besoin d'un accompagnement efficace !
Nous nous transmettrons une contribution écrite synthétisant nos positions.
Mme Micheline Jacques, présidente. - Merci Monsieur le président. Permettez-moi de vous féliciter pour votre engagement. Je suis très attachée à la formation des jeunes et, à titre personnel, je n'hésiterai pas à relayer et à appuyer votre demande. Je donne la parole à notre rapporteur pour une dernière question.
M. Thani Mohamed Soilihi, rapporteur. - Ma question s'adresse à la DAAF. Parmi les améliorations à apporter à la situation du foncier à Mayotte, avez-vous identifié des évolutions législatives ? Nos rapports sont lus très attentivement, notamment par le Gouvernement, et nos préconisations passées ont fait l'objet de projets de loi ou d'amendements du Gouvernement, comme la création de l'EPFAM.
M. Philippe Gout. - Ce qui nous paraît important, et qui a été rapporté par nos collègues de la MSA et par le président du Syndicat des jeunes agriculteurs, c'est l'accès à la retraite pour les agriculteurs âgés. Le législateur pourrait s'emparer de cette problématique qui permettrait de rentrer dans une logique de transition/installation, en veillant à ce qu'un agriculteur disposant d'un foncier sécurisé, puisse partir à la retraite dans de bonnes conditions.
Je rappelle que près de 80 % des habitants du territoire vivent sous le seuil de pauvreté et que le « petit foncier » dont jouissent les anciens les aide à survivre. Tant qu'ils ne disposeront pas d'une retraite leur permettant de subvenir à leurs besoins, nous n'arriverons pas à engager ce processus d'installation/transmission.
Pour le reste, pour le travail que nous menons sur le foncier avec l'EPFAM, il est possible que les services de l'État reviennent vers le législateur pour envisager quelques modifications de la législation. Pour l'instant, nous essayons de faire valoir cette intelligence collective sur le territoire entre des occupants, des prétendants et une logique de souveraineté alimentaire.
Mme Micheline Jacques, présidente. - Je vous remercie. Avant de conclure cette table ronde, je donne la parole à M. Naïlane-Attoumane Attibou.
M. Naïlane-Attoumane Attibou. - Vous nous avez demandé si une agriculture pouvait être envisagée dans les zones protégées. La réponse est non dans les réserves naturelles nationales qui viennent d'être mises en place. Pour les autres zones, la réponse dépend de l'existence d'occupations antérieures. Il existe des conventions agroforestières autorisant des agriculteurs sur des zones adaptées, pour des pratiques agricoles compatibles avec les milieux naturels.
Sur le changement climatique, Mayotte est dans une situation dramatique en matière d'eau. L'accompagnement à l'installation agricole n'intègre presque jamais la problématique de l'eau. Des agriculteurs prélèvent de l'eau dans les rivières et sont verbalisés par l'administration, qui les a installés, pour prélèvements illégaux dans les rivières. Il est donc essentiel que la problématique de l'eau soit intégrée en amont de l'installation pour éviter tout conflit d'usage.
Je ne pense pas que l'agriculture vivrière soit un obstacle direct à l'installation des jeunes agriculteurs.
Par rapport à l'installation, les Mahorais ont une relation particulière à la terre. En effet, à la naissance, le placenta est enterré. Il est donc peu probable que des anciens, même s'ils ne sont plus en mesure de les exploiter, acceptent de céder leurs terres à une personne extérieure à leur famille. Le foncier est destiné à être transmis à la génération suivante. Il faut trouver le moyen de rassurer les propriétaires ou encourager l'exploitation des terres par leur famille.
Nous essayons d'encourager et d'encadrer des pratiques pour parvenir à l'autosuffisance alimentaire.
Mme Vivette Lopez, rapporteur. - Je salue le directeur de la Chambre d'agriculture qui est originaire de ma région et je remercie tous les intervenants pour leurs explications.
Mme Micheline Jacques, présidente. - J'ai noté qu'il était nécessaire d'adapter la législation aux réalités du territoire. La différenciation territoriale est la colonne vertébrale des travaux de notre délégation. Elle a été le cheval de bataille de notre ancien président, Michel Magras, et nous y sommes très attachés.
Je vous remercie pour vos interventions, qui ont été particulièrement éclairantes. Je remercie Thani Mohamed Soilihi pour son implication sans faille au service de Mayotte et Abdallah Hassani, qui défend ardemment son territoire.
Nous sommes preneurs de vos contributions écrites. Cette table ronde est la preuve que le Sénat est une assemblée à l'écoute des territoires.