Mardi 23 juillet 2024

- Présidence de M. Dominique de Legge, président -

La réunion est ouverte à 15 heures.

Examen du rapport

M. Dominique de Legge, président. - Mes chers collègues, après plus de cinq mois de travaux, je suis heureux de vous retrouver pour l'examen du rapport que notre collègue rapporteur, Rachid Temal, va nous présenter au titre de la commission d'enquête sur les politiques publiques face aux opérations d'influences étrangères, commission dont il a lui-même demandé la création dans le cadre du droit de tirage du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Avant de vous rappeler les règles procédurales relatives à l'examen de ce rapport, je tiens à vous remercier tout particulièrement de votre présence aujourd'hui.

Depuis notre réunion constitutive du 14 février dernier, notre commission d'enquête aura procédé à quarante-six auditions, parmi lesquelles treize ont eu lieu à huis clos en raison de la confidentialité des sujets traités ou de la sécurité des personnes entendues. C'est le signe de la sensibilité des questions que nous abordons, mais aussi l'une des limites des commissions d'enquête, dont les pouvoirs s'arrêtent là où commence le secret de la défense nationale.

J'en remercie d'autant plus les services de l'État qui se sont conformés à l'exercice et accepté que les propos qui peuvent leur être attribués soient publiés. Dans quelques cas - je pense notamment à certaines plateformes de réseaux sociaux -, nous avons pu relever un double langage, un fossé entre leur modèle économique, qui repose sur la publicité, et l'opacité de leur fonctionnement interne. Pour autant, des représentants de Google et de TikTok ont accepté d'être entendus publiquement - à la différence de Meta et de X (ex-Twitter).

Je tiens aussi à souligner que nos auditions ont révélé quelques bonnes surprises : je pense en particulier à certaines tables rondes passionnantes, notamment celle sur les manipulations de l'image et de la voix grâce à l'intelligence artificielle.

Au total, les auditions publiques de la commission d'enquête ont donné lieu à 125 000 vues sur les réseaux sociaux du Sénat. L'audition la plus suivie, par 30 000 internautes, aura été celle de Guy-Philippe Goldstein, dont l'objet était de présenter le rôle des algorithmes et le phénomène de la montée des extrêmes.

Nous avons également organisé cinq déplacements : l'un à Paris pour visiter le service de vigilance et de protection contre les ingérences numériques étrangères (Viginum) et l'Agence nationale de la sécurité des systèmes d'information (Anssi) ; un autre à Rennes pour visiter le Pôle d'excellence cyber, le Comcyber (commandement de la cyberdéfense), et le centre d'expertise DGA-Maîtrise de l'information de la direction générale de l'armement ; un autre encore à Bruxelles auprès de la représentation française, de l'Otan et de la Commission européenne ; enfin, nous nous sommes déplacés en Finlande et en Estonie pour expertiser les modèles de défense et de résilience globale qu'ont développés ces pays face aux menaces hybrides. J'ajoute que le rapporteur a rencontré le ministre des affaires numériques de Taïwan.

En définitive, cent vingt personnalités, dont cinq ministres, ont été auditionnées.

Le rapporteur a également recouru aux outils d'investigation des commissions d'enquête en envoyant des questionnaires dont les réponses ont nourri le rapport.

Avant de passer à l'examen proprement dit du rapport, il me revient de vous rappeler le caractère strictement confidentiel de cette réunion. En effet, conformément à l'ordonnance du 17 novembre 1958, nous devons attendre vingt-quatre heures pour publier notre rapport. C'est le délai pendant lequel le Sénat peut se constituer en comité secret, c'est-à-dire à huis clos, pour statuer sur la publication ou la non-publication de l'ensemble du texte ou de certains passages. Le respect de ce devoir de confidentialité est impératif et soumis à des sanctions disciplinaires et pénales.

S'il est adopté, notre rapport sera publié dans deux jours, à l'issue de la conférence de presse organisée le jeudi 25 juillet à 11 heures. D'ici là, rien ne doit filtrer à l'extérieur, ce qui proscrit toute communication à la presse, à des tiers ou sur les réseaux sociaux à l'issue de cette réunion.

Vous avez eu la possibilité de consulter le projet de rapport depuis le mercredi 17 juillet dernier. Des exemplaires numérotés vous ont été distribués contre émargement ; il vous sera demandé de les restituer à la fin de la réunion.

Après la présentation de notre rapporteur, je céderai la parole à ceux d'entre vous qui souhaiteraient s'exprimer pour un propos liminaire. Nous entamerons ensuite l'examen des propositions de modification qui ont été déposées. Elles ont été distribuées sous la forme d'une liasse, avec un ordre de numérotation et d'examen correspondant à l'ordre de pagination du rapport. Je précise que les propositions de modification de la liste des recommandations figurant au début du rapport seront examinées dans la troisième partie du rapport qui les concerne.

Après le vote sur ces propositions de modification, nous nous prononcerons sur les recommandations, puis sur le titre du rapport. Nous voterons enfin sur son adoption et sur sa publication.

En tant que de besoin, les groupes politiques ont la possibilité de présenter, dans les vingt-quatre heures suivant la fin de cette réunion, une contribution qui sera annexée au rapport. Enfin, je vous propose que le compte rendu de la présente réunion soit, lui aussi, annexé au rapport de la commission d'enquête.

Il en est ainsi décidé.

M. Rachid Temal, rapporteur. - Monsieur le président, mes chers collègues, à l'issue de ces presque six mois de travaux, il me revient de vous présenter le rapport en vue de son adoption.

M. le président a rappelé les chiffres clés de nos auditions et déplacements ; je tiens à remercier ceux d'entre vous qui ont participé à nos travaux, débats et visites de terrain.

Vous avez pu consulter le projet de rapport depuis mercredi dernier. Plusieurs d'entre vous ont consacré un moment à sa relecture et à la formulation de propositions de modifications, ce dont je vous remercie.

J'en viens au rapport à proprement parler. Celui-ci débute, comme nous en étions convenus à l'entame de nos travaux, par une introduction dédiée à la définition des principales notions abordées - influence, ingérence, menaces hybrides -, afin de retenir un périmètre de travail recentré sur les influences étrangères malveillantes.

C'est autour de cette notion que nous avons identifié le coeur des nouvelles menaces qui s'affranchissent des frontières physiques pour s'attaquer, comme le précise l'intitulé complet de notre commission d'enquête, à « notre vie démocratique », à « notre économie » et aux « intérêts de la France sur le territoire national et à l'étranger ».

C'est également autour de cette notion d'influences étrangères malveillantes que les auditions et les déplacements nous ont permis de mesurer combien la frontière entre, d'une part, l'influence légitime et le soft power et, d'autre part, l'ingérence et la confrontation caractérisée, est devenue floue et a perdu de son sens. Le rapport tend à caractériser les ressorts de l'influence, dont vous trouverez un tableau récapitulatif dans l'introduction.

Nos travaux ont permis d'étayer le constat selon lequel la menace pesant sur le modèle démocratique et les intérêts de la France ne se limite plus à la guerre conventionnelle ou aux ingérences traditionnelles. Le champ de bataille s'est déplacé sur le terrain de la guerre informationnelle et sur celui des plateformes numériques et des réseaux sociaux. Dans tous les champs - diplomatique, économique, militaire, médiatique, ou encore culturel et cultuel - qu'il nous a été possible de couvrir, nos auditions et déplacements nous ont montré le visage d'une bataille des perceptions et des « narratifs », avec les moyens technologiques d'une guerre 2.0 - les algorithmes et l'intelligence artificielle.

Volontairement, j'ai décidé de ne pas cibler, dans le cadre de nos travaux, un pays plutôt qu'un autre, afin que chaque personne auditionnée puisse répondre à nos questions sur l'origine des menaces.

Il en résulte, pour ce rapport, une présentation en trois parties.

Une première partie est consacrée à une cartographie et à une typologie des menaces auxquelles la France est confrontée en raison du durcissement de l'environnement géopolitique.

Une deuxième partie traite de notre politique publique en la matière, dont j'expose les forces et les limites : un dispositif régalien structuré, mais à géométrie variable à mesure que l'on s'éloigne du coeur des ministères et services régaliens, et surtout, sans stratégie globale entre acteurs publics et acteurs de la société civile.

Enfin, une troisième partie vise à formuler la principale proposition du rapport, à savoir une politique publique de lutte contre les influences étrangères malveillantes fondée sur trois piliers, afin d'élaborer une stratégie nationale, globale et interministérielle pour toute la nation, d'engager une dynamique de résilience de la population et de gagner la bataille des narratifs.

À l'appui de cette politique publique, je dresse une feuille de route de quarante-sept propositions à mettre en oeuvre dans différents secteurs pour mieux lutter contre les influences étrangères numériques sur le territoire national, en renforçant Viginum, et pour développer notre influence positive à l'étranger. Nous avons entendu le message selon lequel, si l'on se contente de réagir, on reste toujours en retard. Il nous faut réinvestir le champ de la communication et de la bataille des narratifs pour mieux affirmer la voix de la France.

Ces propositions couvrent également le champ de la diffusion d'une culture de protection dans l'ensemble de l'action publique et de résilience de la société civile, en abordant les sujets de l'éducation aux médias, de la régulation des plateformes, mais aussi de la protection des universités et du maintien de la vigilance à l'égard du financement des cultes. Nous pourrons y revenir plus en détail lors de l'examen des propositions de modification.

Ce rapport a vocation à tirer des conclusions opérationnelles au constat clairement établi que la France est la cible privilégiée de multiples influences étrangères malveillantes : il nous faut sortir d'une certaine naïveté.

Notre rapport n'a pas vocation à dénoncer des pays en particulier, mais à proposer une politique publique pour que la France dispose d'une stratégie nationale de contre-influence et d'influence efficace.

Nous voulons combattre le double langage de nos compétiteurs et des grands réseaux sociaux. Ce double langage est d'abord celui des puissances étatiques ou des groupes non-étatiques qui profitent de canaux légitimes de communication et de la liberté d'expression de nos sociétés démocratiques pour diffuser officiellement des mensonges, par exemple sur l'envoi de soldats français en Ukraine, et manipuler l'information à grande échelle. C'est aussi, comme le Président l'a évoqué, le double langage des plateformes dont le discours sur les règles de modération des réseaux sociaux sert un modèle économique opaque et des algorithmes qui survalorisent les prises de positions extrêmes.

Il faut se donner les moyens de surmonter un triple paradoxe.

Tout d'abord, la question des ingérences étrangères a longtemps été traitée sous l'angle des seuls services de renseignement, avec la discrétion qui les entoure. Or, pour sensibiliser plus largement la sphère de l'action publique, il est nécessaire de sortir de cette culture du secret pour mieux diffuser les messages utiles.

Autre paradoxe, les influences étrangères malveillantes font l'objet d'investissements massifs à l'étranger - on parle de 1,1 milliard d'euros investis par la Russie dans la propagande, ou encore de 2 millions d'agents en Chine dédiés à la surveillance des réseaux -, mais elles ne sont traitées en France que par un nombre restreint de services régaliens et une poignée d'experts, sans véritable synergie avec les médias qui consacrent des moyens de plus en plus importants à la vérification de l'information.

Enfin, le troisième paradoxe est que chaque citoyen est à la fois la cible des influences, positives ou malveillantes, et l'acteur de son libre arbitre. Or le fait de centraliser la lutte contre les manipulations de l'information ou contre les influences étrangères malveillantes au sein de services étroitement spécialisés ne contribue pas à la sensibilisation de la population. À l'image de la culture de « défense globale » mise en place par les pays nordiques et baltes, il est nécessaire et urgent de bâtir une stratégie de résilience par l'éducation aux médias et la formation de l'esprit critique.

Pour conclure, je vous propose un titre de rapport, qui synthétise l'angle de travail de notre commission d'enquête : « Lutte contre les influences étrangères malveillantes. Pour une mobilisation de toute la Nation face aux prémices de la guerre froide 2.0 ».

Mme Nathalie Goulet. - Je voudrais vous féliciter pour la qualité du rapport, qui reflète fidèlement la teneur des auditions. Le constat auquel nous sommes parvenus est intéressant. Je regrette que la thématique n'ait pas été plus précise. Les propositions de modification que nous avons déposées ne visent qu'à apporter des précisions, les constats établis ayant très souvent déjà fait l'objet de recommandations. Le groupe Union Centriste votera ce rapport.

Mme Vanina Paoli-Gagin. - Je m'associe aux félicitations de ma collègue. Le groupe Les Indépendants - République et Territoires votera en faveur de ce rapport, qui synthétise les travaux que nous avons menés tout en reprenant aussi ceux d'autres institutions, comme par exemple l'Institut des hautes études de défense nationale (IHEDN). Cependant, ne pourrait-on pas considérer qu'il s'agit là d'un rapport d'étape ? En effet, dans un avenir plus lointain, il faudrait envisager de se doter d'un dispositif plus puissant et mieux formalisé pour lutter contre les influences étrangères.

M. Akli Mellouli. - Le groupe Écologiste - Solidarité et Territoires votera ce rapport, malgré certaines réserves. Ainsi, je regrette que les intervenants aient tendance à cibler toujours davantage l'islamisme alors que toutes les religions nourrissent leurs propres extrêmes. Nous aurions pu aller plus loin en donnant la parole à des représentants d'autres institutions. De même, la partie consacrée aux cultes n'est pas complète. Il faudrait sans doute mentionner l'importance des financements provenant des Etats-Unis en soutien de mouvements évangéliques notamment. Toutefois, malgré ces nuances, nous voterons le rapport.

M. Dominique de Legge, président. - Nous en venons à l'examen des propositions de modification.

M. Rachid Temal, rapporteur. - La proposition de modification n° 1 de Mme Goulet vise à préciser que mon déplacement à Taïwan n'a pas été effectué dans le cadre de la commission d'enquête. Je souhaite néanmoins indiquer, par ma proposition de rectification n° 43, que j'ai rencontré lors de ce déplacement des autorités chargées de la lutte contre les influences étrangères.

La proposition n° 1, ainsi modifiée, est adoptée.

M. Rachid Temal, rapporteur. - Plusieurs propositions de modification portent sur la question de l'Azerbaïdjan et de l'Arménie. Les propositions de modification nos 2 et 3 visent à apporter des éléments de contexte concernant la position de la France. Or le rapport n'a pas vocation à fournir des circonstances atténuantes à un compétiteur hostile à la France. Avis défavorable.

Mme Nathalie Goulet. - Dans les deux cas, ces propositions reprennent des éléments issus de notre audition avec les représentants de l'agence Viginum.

M. Rachid Temal, rapporteur. - Nous mentionnons explicitement ces éléments dans le rapport.

Les propositions de modification nos 2, 3 et 4 sont retirées.

M. Rachid Temal, rapporteur. - Par la proposition de modification n° 5, Mme Goulet propose d'intégrer dans le rapport la thèse selon laquelle l'interdiction d'AJ+ serait entravée par des intérêts économiques. Or personne ne nous a dit cela lors des auditions, pas même au sujet des investissements potentiels du Qatar.

En outre, cette modification porte une critique des positions diplomatiques de la France en laissant entendre que cette dernière braderait ses intérêts au profit d'une influence économique étrangère. Avis défavorable.

La proposition de modification n° 5 est retirée.

M. Dominique de Legge, président. - Dans ma proposition de modification n° 42, je propose de réécrire les pages 91 et 92 du rapport pour intégrer les préoccupations formulées dans les propositions de modification nos 6, 7 et 8 de Mme Goulet.

M. Rachid Temal, rapporteur. - La rédaction proposée est plus claire et fidèle à nos auditions. Avis favorable.

M. Dominique de Legge, président. - En réalité, le sujet est double. Il porte, d'une part, sur les actions d'entités étrangères vis-à-vis de leurs ressortissants présents en France, qui donnent lieu à des éléments tangibles très repérables, et, d'autre part, sur le vecteur d'influence que représentent les communautés religieuses présentes en France. Une initiative a été prise par le Gouvernement pour mieux les identifier.

M. Akli Mellouli. - Les phénomènes de radicalisation affectent toutes les religions et tous les radicalismes sont dangereux pour la France - n'oublions pas, à cet égard, les mormons et les témoins de Jéhovah. Il ne faudrait pas en venir à diaboliser une fraction de notre population du fait de sa religion.

M. Dominique de Legge, président. - Cette nouvelle formulation tient compte de travaux antérieurs menés au Sénat, notamment par Nathalie Goulet. Il s'agit, à mon sens, d'une rédaction consensuelle et équilibrée.

Les propositions de modification nos 6, 7 et 8 sont retirées et la proposition de modification n° 42 est adoptée.

M. Rachid Temal, rapporteur. - La proposition de modification n° 9 de Mme Goulet assure une clarification rédactionnelle.

La proposition de modification n° 9 est adoptée.

M. Rachid Temal, rapporteur. - J'émets un avis défavorable sur la proposition de modification n° 10. Etidal est un organisme saoudien ; or - chacun en conviendra - les réglementations française et saoudienne diffèrent sensiblement, notamment quant au traitement des données. Nous avons demandé via l'ambassade un rendez-vous avec les représentants d'Etidal. Cette rédaction laisse supposer que nous avons refusé un échange avec eux, ce qui n'est pas vrai. Nous avons évoqué avec Viginum la possibilité de s'inspirer d'Etidal, mais la réponse obtenue a été assez clairement négative.

Mme Nathalie Goulet. - Certes, Viginum ne travaille pas avec Etidal, mais cet organisme n'en passe pas moins au crible un certain nombre de données, notamment celles de Telegram. À mon sens, un travail de comparaison serait utile. Toutefois, je me range aux raisons de M. le rapporteur.

La proposition de modification n° 10 est retirée.

M. Rachid Temal, rapporteur. - Je suis favorable à la proposition de modification n° 11 de Mme Goulet, sous réserve de l'adoption de ma proposition de rectification n° 44 : nous prenons acte de la complexité de la situation évoquée, sans prendre parti ni préconiser d'évaluation supplémentaire.

La proposition n° 11, ainsi modifiée, est adoptée.

M. Rachid Temal, rapporteur. - La proposition de modification n° 45 tend à fusionner les propositions de modification nos 12 et 13.

Mme Nathalie Goulet. - Très bien !

La proposition de modification n° 45 est adoptée et les propositions de modification nos 12 et 13 deviennent sans objet.

M. Rachid Temal, rapporteur. - La proposition de modification n° 14 de Mme Goulet reçoit un avis favorable.

La proposition de modification n° 14 est adoptée.

M. Rachid Temal, rapporteur. - Nous émettons en revanche un avis défavorable sur sa proposition de modification n° 15 au profit des propositions relatives au même thème, au titre de la troisième partie.

Les propositions de modification nos 15 et 16 sont retirées.

M. Rachid Temal, rapporteur. - Ma proposition de modification n° 46 vise à traiter des territoires ultramarins de manière globale.

Le groupe d'initiative de Bakou a accusé l'État français de colonialisme et de torture en Nouvelle-Calédonie...

Mme Nathalie Goulet. - Ainsi que d'islamophobie !

M. Rachid Temal, rapporteur. - Nous apporterons cette précision dans un autre paragraphe du rapport.

La proposition de modification n° 46 est adoptée.

M. Rachid Temal, rapporteur. - Nous sommes défavorables à la proposition de modification n° 17. Non seulement ce sujet n'est pas au coeur de notre travail, mais la proposition de loi de nos collègues Nathalie Goulet et Catherine Morin-Desailly visant à créer dans chaque assemblée une délégation parlementaire au numérique doit suivre son cheminement législatif.

Mme Nathalie Goulet. - Catherine Morin-Desailly proposait déjà, en 2015, la création de cette instance. La panne informatique mondiale que nous venons de connaître nous le confirme, si besoin était : il est indispensable de diffuser la culture du numérique.

M. Dominique de Legge, président. - L'organisation des travaux du Sénat est du ressort du Bureau. Je vois mal une commission d'enquête empiéter sur ce champ de compétences. Cela étant, nous pouvons relever que nous nous sommes interrogés sur l'opportunité de créer une telle délégation.

Mme Nathalie Goulet. - Je l'indiquerai dans la contribution de notre groupe politique.

M. Rachid Temal, rapporteur. - Cette réflexion peut également figurer dans le corps du rapport.

M. Claude Raynal. - La faire figurer dans la contribution du groupe me semble approprié.

M. Rachid Temal, rapporteur. - Soit.

La proposition de modification n° 17 est retirée.

M. Rachid Temal, rapporteur. - Ma proposition de modification n° 47, qui m'a été suggérée par Mme Sylvie Robert, vise à clarifier la recommandation n° 5 ainsi que le deuxième paragraphe de la page 249. Elle précise que le membre du gouvernement chargé de la lutte contre les influences étrangères malveillantes est placé auprès du Premier ministre, et non auprès d'un autre ministre.

M. Claude Raynal. - J'ai quelques réserves de principe. On se plaint toujours du nombre de ministres délégués et de secrétaires d'État... Ne pourrait-on pas inscrire « ministre ou haut-commissaire », ou, du moins, une formulation plus souple ?

M. Rachid Temal, rapporteur. - Nous indiquons qu'il s'agit d'un « membre du gouvernement ».

M. Dominique de Legge, président. - Il était question d'inscrire « secrétaire d'État ». J'y étais opposé, pour les mêmes raisons que M. Raynal. Cela aurait laissé à penser qu'il s'agit au fond d'une affaire de seconde zone. Il paraissait donc important de rappeler que cette politique est prise en charge par le secrétariat général de la défense et de la sécurité nationale (SGDSN), sous l'autorité du Premier ministre. En revanche, que ce membre du Gouvernement soit placé auprès du Premier ministre, ce qui donne une connotation plus politique qu'administrative à sa fonction, ne me choque pas.

M. Rachid Temal, rapporteur. - Nous avions simplement oublié de rappeler dans la recommandation n° 5 que ce membre du Gouvernement était placé auprès du Premier ministre, alors que le corps du texte le précisait bien.

La proposition de modification n° 47 adoptée.

M. Rachid Temal, rapporteur. - Je suis défavorable à la proposition de modification n° 18 de Mme Nathalie Goulet pour une raison simple : le corps du texte mentionne le décret en question. Il n'est pas nécessaire de l'intégrer à la recommandation.

Mme Nathalie Goulet. - Il me semblait intéressant de le préciser dans la recommandation, afin de ne pas devoir chercher le contenu du décret dans le corps du rapport.

M. Rachid Temal, rapporteur. - Cela alourdirait la recommandation.

La proposition de modification n° 18 n'est pas adoptée.

M. Rachid Temal, rapporteur. - La proposition de modification n° 19 de Mme Nathalie Goulet est intéressante, mais la commission n'a pas travaillé de manière approfondie sur la question des plans cadastraux, des biens mal acquis ou de la corruption.

Par ailleurs, l'objet de la nouvelle recommandation proposée est déjà pour partie satisfait par la recommandation n° 9, qui devrait permettre un meilleur suivi des investissements étrangers en France poursuivant un but d'influence.

La proposition de modification n° 19 n'est pas adoptée.

M. Rachid Temal, rapporteur. - La proposition de modification n° 20 de Mme Nathalie Goulet vise à remplacer le terme « créer » par « identifier » dans la recommandation n° 17. Néanmoins, elle aurait selon moi pour effet d'affaiblir la recommandation : s'il s'agit d'identifier des profils artistiques, c'est bien pour créer ensuite une Pléiade d'influence.

La proposition de modification n° 20 n'est pas adoptée.

M. Rachid Temal, rapporteur. - Ma proposition de modification n° 48 a pour objet de compléter le corps du rapport aux pages 281 et 282 et de préciser la rédaction de la recommandation n° 25. Je préfère cette solution à celle que suggère Mme Goulet dans sa proposition de modification n° 21, car elle répond mieux aux enjeux en question.

Mme Nathalie Goulet. - Je ne suis pas d'accord. Ma proposition de modification n° 21 a trait au contrôle de l'identité numérique, et vise à répondre aux initiatives de faux comptes empruntant les codes de médias existants. Or la proposition de modification n° 48 ne mentionne pas l'identité numérique. Les travaux de notre commission ont pourtant montré l'ampleur des problèmes soulevés par ces usurpations. Il s'agit, selon moi, d'un sujet à part entière.

M. Rachid Temal, rapporteur. - Les insertions proposées aux pages 281 et 282 mentionnent précisément l'usurpation de l'identité visuelle de médias existants. Nous nous sommes interrogés sur la nécessité d'intégrer cette mention à la recommandation n° 25, mais il nous a semblé que sa portée en aurait été limitée. Nous avons donc choisi de ne l'inscrire que dans le corps du texte.

Il importe d'abord que le Digital Services Act (DSA) soit pleinement appliqué et, surtout, que les plateformes se donnent les moyens de lutter contre les manipulations de l'information. D'où la rédaction retenue pour la recommandation n° 25, qui nous semble répondre à l'ensemble de la problématique.

La proposition de modification n° 21 n'est pas adoptée. La proposition de modification n° 48 est adoptée.

M. Rachid Temal, rapporteur. - La proposition de modification n° 22 de Mme Morin-Desailly vise à mentionner expressément, dans la recommandation n° 26, le rapport d'information « Amplifier la législation européenne sur les services numériques (DSA) pour sécuriser l'environnement en ligne », qu'elle a cosigné avec Mme Florence Blatrix Contat. Dans ma proposition de modification n° 49, je suggère, au contraire, de faire référence à ces travaux dans le corps du rapport, au dernier paragraphe de la page 281.

La proposition de modification n° 22 n'est pas adoptée. La proposition de modification n° 49 est adoptée.

M. Rachid Temal, rapporteur. - L'insertion d'une nouvelle recommandation par la proposition de modification n° 23 de Mme Goulet ne me paraît pas nécessaire, la recommandation n° 27 intégrant déjà cette question dans sa rédaction actuelle. Mais je suggère, avec ma proposition de modification n° 50, d'intégrer une partie du texte proposé par notre collègue dans le corps du rapport, au niveau de la section relative à la souveraineté numérique.

La proposition de modification n° 23 n'est pas adoptée. La proposition de modification n° 50 est adoptée.

M. Rachid Temal, rapporteur. - Nous avons eu de nombreux échanges sur la question de la transparence financière de la vie politique. La proposition de modification n° 24 de Mme Goulet vise à insérer, dans le texte de la recommandation n° 29, une référence à une proposition de loi qu'elle a déposée le 10 juillet dernier sur le sujet. La mention de ce texte très récent, postérieur à l'audition de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (CNCCFP) et non inscrit à l'ordre du jour ne paraît pas indispensable pour appuyer la recommandation de la commission d'enquête.

Mme Nathalie Goulet. - En réalité, cette proposition est plus ancienne. Le président de la CNCCFP était intervenu plusieurs fois sur le sujet, notamment dans des journaux, et ce bien avant le début des travaux de notre commission d'enquête.

La proposition de modification n° 24 n'est pas adoptée.

M. Rachid Temal, rapporteur. - Ma proposition de rectification n° 51 vise à clarifier la rédaction de la recommandation n° 29, notamment eu égard au risque d'ambigüité soulevé par M. André Reichardt dans sa proposition de modification n° 25. La recommandation n° 29 n'a pas pour objet d'empêcher les nationaux résidant à l'étranger de cotiser aux partis politiques.

La proposition n° 25, ainsi modifiée, est adoptée.

La proposition de modification n° 26 de Mme Nathalie Goulet n'est pas adoptée.

M. Rachid Temal, rapporteur. - Dans sa proposition de modification n° 27, M. Reichardt suggère une correction de la recommandation n° 33, estimant que l'échéance de 2027 prévue par la loi visant à prévenir les ingérences étrangères en France est trop éloignée. Or un premier bilan d'étape sera établi en 2025. Je propose donc de clarifier la portée de la recommandation n° 33, en prévoyant expressément que le rapport relatif à la menace liée aux ingérences étrangères prévu par la loi comprenne un bilan de la mise en oeuvre du dispositif de contrôle des représentants d'intérêts agissant pour le compte de mandants étrangers. C'est le sens de ma proposition de rectification n° 52.

La proposition n° 27, ainsi modifiée, est adoptée.

M. Rachid Temal, rapporteur. - La proposition de modification n° 28 de Mme Goulet est satisfaite, puisque la loi visant à prévenir les ingérences étrangères en France prévoit déjà la remise d'un rapport au 1er juillet de l'année suivant sa promulgation, soit 2025.

La proposition de modification n° 28 n'est pas adoptée.

M. Rachid Temal, rapporteur. - La proposition de modification n° 29 de Mme Goulet ajoute une recommandation, qui fait suite à notre entretien avec Mme Nathalie Loiseau. Aucun rapport ne concerne ce sujet...

Mme Nathalie Goulet. - Si, il existe un rapport, et elle a déposé des amendements, qui ont été adoptés par le Parlement européen. Ce que le Gouvernement accepte à Bruxelles, il le refuse chez nous...

M. Rachid Temal, rapporteur. - Cette proposition de modification excède le champ du rapport.

La proposition de modification n° 29 n'est pas adoptée.

M. Rachid Temal, rapporteur. - La proposition de modification n° 30 de Mme Goulet soulève plusieurs sujets. La rédaction de la recommandation n° 40 peut être améliorée, comme nous le faisons dans la proposition de modification n° 53, en l'écrivant ainsi : « Combler les lacunes du cadre juridique issu de la loi du 24 août 2021 confortant les principes de la République en matière de contrôle de financement étranger des cultes. »

La proposition de modification n° 30 n'est pas adoptée. La proposition de modification n° 53 est adoptée.

M. Dominique de Legge, président. - Les propositions de modification de Mme Goulet nos 31, 32 et 33 sont satisfaites.

Les propositions de modification nos 31, 32 et 33 ne sont pas adoptées, non plus que la proposition de modification n° 34 de Mme Nathalie Goulet.

M. Rachid Temal, rapporteur. - Les auteurs de la proposition de modification n° 35 estiment que la mise en garde au lendemain d'élection est sans intérêt, que mieux vaut prévenir avant les élections. Ils ajoutent qu'il ne faut pas créer plus de contraintes pour les élus, et qu'une formation consacrée à la commande publique est inutile. S'agissant de la dimension temporelle de la formation, la faire intervenir avant l'élection ne paraît pas opportun. Il s'agit de former les élus locaux et non les candidats aux élections locales, qui sont beaucoup plus nombreux. S'agissant du contenu de la formation, la dimension consacrée à la commande publique permet de porter l'accent sur un champ dans lequel les opérations d'influence sont particulièrement susceptibles d'intervenir.

Je propose cependant, par ma proposition de rectification n° 54, de clarifier la recommandation n° 46 en la rédigeant ainsi : « Sensibiliser les élus locaux et nationaux aux risques d'influence malveillante au lendemain de chaque élection sur les enjeux liés aux influences étrangères malveillantes (commande publique, cybersécurité...). »

La proposition n°35, ainsi modifiée, est adoptée.

M. Rachid Temal, rapporteur. - La proposition de modification n° 36 de Mme Goulet vise à supprimer la recommandation relative à l'habilitation des responsables publics au motif qu'elle serait irréaliste et dangereuse. L'objectif est, comme l'a suggéré le ministre de l'intérieur, d'habiliter davantage ces responsables, exposés dans leurs fonctions aux risques d'influence, pour mieux les informer sur les opérations potentielles ou en cours. Habiliter un président d'université lui permettrait ainsi de pouvoir prendre connaissance et d'être plus efficace face aux actions d'influence actives ou passées dans son établissement. Je propose toutefois, dans ma proposition de modification n° 55, une rectification de la recommandation n° 47, afin de préciser qu'il ne s'agit en rien d'un assouplissement des conditions d'habilitation.

Mme Vanina Paoli-Gagin. - Il faut utiliser la notion de besoin d'en connaître.

M. Rachid Temal, rapporteur. - Oui, dans la limite de leurs fonctions.

Mme Vanina Paoli-Gagin. - Cette notion est bien connue dans le monde du renseignement.

M. Claude Raynal. - En effet.

La proposition de modification n°36 n'est pas adoptée. La proposition de modification n° 55 est adoptée.

M. Rachid Temal, rapporteur. - Les propositions de modification nos 37 et 38 de Mme Goulet sont satisfaites. D'ailleurs, prévoir la rédaction d'un rapport n'est pas vraiment une recommandation...

Les propositions de modification nos 37 et 38 ne sont pas adoptées.

M. Rachid Temal, rapporteur. - Avis défavorable à la proposition de modification n° 39 de Mme Goulet. Ce sujet n'a pas été évoqué dans nos débats.

Mme Nathalie Goulet. - Je l'ai abordé à plusieurs reprises lors des auditions.

M. Rachid Temal, rapporteur. - Certes, mais pas les experts entendus. En outre, le cas des cabinets conseils ne relève pas en tant que telle des influences étrangères.

Mme Nathalie Goulet. - Ça l'est dans le cas de McKinsey !

La proposition de modification n° 39 n'est pas adoptée.

M. Rachid Temal, rapporteur. - La proposition de modification n° 40 de Mme Goulet vise à insérer une recommandation afin de poursuivre au niveau national le travail entrepris par les eurodéputés Nathalie Loiseau et Vladimir Bilcik. Pour autant, deux arguments s'opposent à cette modification.

D'une part, la rédaction de cette nouvelle recommandation sous-entend que la France serait en retard par rapport aux règles en vigueur au sein du Parlement européen. Or le cadre déontologique applicable au sein du Parlement européen est particulièrement faible par rapport au régime français. De plus, il est mal appliqué.

D'autre part, le rapport recommande déjà que le Gouvernement porte au niveau européen une position en faveur d'une harmonisation à haut niveau.

La proposition de modification n° 40 n'est pas adoptée.

M. Rachid Temal, rapporteur. - La proposition de modification n° 41 de Mme Goulet vise à insérer une recommandation afin de prioriser les politiques publiques sur les questions de souveraineté alimentaire et de souveraineté liées à l'industrie du médicament. Ces enjeux n'entrent pas dans le champ de la commission d'enquête.

Mme Nathalie Goulet. - Je me permets quand même de le proposer...

La proposition de modification n° 41 n'est pas adoptée.

Les recommandations, ainsi modifiées, sont adoptées.

M. Rachid Temal, rapporteur. - Le titre proposé pour le rapport est : « Lutte contre les influences étrangères malveillantes. Pour une mobilisation de toute la Nation face aux prémices de la guerre froide 2.0 ».

Mme Vanina Paoli-Gagin. - Qu'est-ce qui motive cette référence au « 2.0 » ?

M. Rachid Temal, rapporteur. - C'est une référence à notre dernière audition.

M. Claude Raynal. - « 2.0 », ça date un peu !

Mme Vanina Paoli-Gagin. - En effet !

M. Rachid Temal, rapporteur. - Ce faisant, on veut faire référence à une seconde guerre froide. Mais pourquoi pas « 4.0 » !

Mme Gisèle Jourda. - « 2.0 » ou « 4.0 », est-ce que cela parle vraiment aux gens ?

Mme Nathalie Goulet. - En plus, une telle référence tend à circonscrire quelque peu le champ de la commission d'enquête, qui ne concerne pas que les influences numériques.

M. Rachid Temal, rapporteur. - Parlons alors des « prémices d'une nouvelle guerre froide ».

Mme Vanina Paoli-Gagin. - D'une « néo-guerre froide » ?

Mme Nathalie Goulet. - Faisons simple. Parlons d'une « nouvelle guerre froide ».

Mme Vanina Paoli-Gagin. - Parler d'une « néo-guerre froide » plutôt que d'une « nouvelle guerre froide », c'est signifier que nous faisons face à une guerre froide, cyber et hydride, qui n'est pas la simple réédition de celle que nous avons connue dans le passé.

Mme Nathalie Goulet. - Cette nouvelle guerre froide est en effet multidimensionnelle. Nous devons faire face à des opérations tous azimuts.

Mme Vanina Paoli-Gagin. - Si l'on veut communiquer sur ce rapport, il faut un titre un peu accrocheur.

M. Claude Raynal. - « Néo-guerre froide », cela me paraît bien.

M. Dominique de Legge, président. - Nous retenons donc ce titre : « Lutte contre les influences étrangères malveillantes. Pour une mobilisation de toute la Nation face à la néo-guerre froide ».

Le titre du rapport, ainsi modifié, est adopté.

La commission d'enquête adopte, à l'unanimité, le rapport ainsi modifié et en autorise la publication.

M. Dominique de Legge, président. - Je vous remercie tous pour votre contribution aux travaux de cette commission d'enquête - en particulier M. le rapporteur, qui était encore à la tâche tard hier soir.

La réunion est close à 16 h 25.