Lundi 12 mai 2025

- Présidence de Mme Muriel Jourda, présidente -

La réunion est ouverte à 14 heures 45.

Proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, relative à l'organisation et aux missions des professionnels de santé, vétérinaires, psychothérapeutes et psychologues professionnels et volontaires des services d'incendie et de secours - Procédure de législation en commission - Examen des amendements au texte de la commission

Mme Muriel Jourda, présidente. - Mes chers collègues, nous examinons les amendements au texte de la commission sur la proposition de loi relative à l'organisation et aux missions des professionnels de santé, vétérinaires, psychothérapeutes et psychologues professionnels et volontaires des services d'incendie et de secours. Nous commençons par un amendement du rapporteur.

EXAMEN DE L'AMENDEMENT DU RAPPORTEUR

Article 7 bis A

Mme Françoise Dumont, rapporteur. - L'amendement n° 2 vise à assurer une coordination compte tenu du transfert de la compétence en matière de sécurité civile à la Nouvelle-Calédonie en 2012.

L'amendement n° 2 est adopté.

EXAMEN DE L'AMENDEMENT AU TEXTE DE LA COMMISSION

Article 8

Mme Françoise Dumont, rapporteur. - L'amendement n°  1 du Gouvernement vise à supprimer le gage.

La commission émet un avis favorable à l'amendement n° 1.

Le sort de l'amendement du rapporteur examiné par la commission est retracé dans le tableau suivant :

Auteur

Objet

Sort de l'amendement

Article 7 bis A 

Mme DUMONT,

rapporteur

2

Coordination

Adopté

La commission a également donné l'avis suivant sur l'autre amendement dont elle est saisie, qui est retracé dans le tableau ci-après :

Auteur

Objet

Avis de la commission

Article 8

Le Gouvernement

1

Coordination

Favorable

Proposition de loi tendant à confier à l'Office français de l'immigration et de l'intégration certaines tâches d'accueil et d'information des personnes retenues - Examen des amendements au texte de la commission

Mme Muriel Jourda, présidente. - Nous passons à l'examen des amendements au texte de la commission sur la proposition de loi tendant à confier à l'Office français de l'immigration et de l'intégration (Ofii) certaines tâches d'accueil et d'information des personnes retenues.

EXAMEN DE L'AMENDEMENT DU RAPPORTEUR

L'amendement de coordination outre-mer n° 12 est adopté.

EXAMEN DES MOTIONS

Exception d'irrecevabilité

M. David Margueritte, rapporteur. - La commission émet un avis défavorable à la motion n°  1 tendant à opposer l'exception d'irrecevabilité. Comme cela est indiqué dans le rapport, la proposition de loi ne pose aucun problème constitutionnel, conventionnel ou jurisprudentiel et ne remet pas en cause le droit à un recours effectif.

La commission émet un avis défavorable à la motion n° 1 tendant à opposer l'exception d'irrecevabilité à la proposition de loi.

Question préalable

La commission émet un avis défavorable à la motion n°  3 tendant à opposer la question préalable à la proposition de loi.

EXAMEN DES AMENDEMENTS AU TEXTE DE LA COMMISSION

Article 1er

M. David Margueritte, rapporteur. - Avis défavorable aux amendements identiques nos  5, 7 et  9 visant à supprimer l'article 1er.

La commission émet un avis défavorable aux amendements identiques nos 5, 7 et 9.

M. David Margueritte, rapporteur. - L'amendement n°  4 tend à fixer dans la loi la délégation de mission qui concerne les personnes morales et les associations, aujourd'hui déterminée par voie réglementaire. La commission émet un avis défavorable à cet amendement.

La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 4.

M. David Margueritte, rapporteur. - L'amendement n°  11 a pour objet de confier à l'Ofii les missions d'assistance juridique aux demandeurs d'asile.

La commission émet un avis favorable à l'amendement n° 11.

Article 2

La commission émet un avis défavorable aux amendements identiques de suppression nos  6, 8 et  10.

Le sort de l'amendement du rapporteur examiné par la commission est retracé dans le tableau suivant :

Auteur

Objet

Sort de l'amendement

Article additionnel après l'article 1er

M. MARGUERITTE, rapporteur

12

Coordination outre-mer

Adopté

La commission a également donné les avis suivants sur les autres amendements dont elle est saisie, qui sont retracés dans le tableau ci-après :

Auteur

Objet

Avis de la commission

Motion

M. BROSSAT

1

Exception d'irrecevabilité

Défavorable

M. BENARROCHE

3

Motion préalable

Défavorable

Article 1er

Mme NARASSIGUIN

5

Suppression de l'article

Défavorable

Mme MARGATÉ

7

Suppression de l'article

Défavorable

M. BENARROCHE

9

Suppression de l'article

Défavorable

Mme NARASSIGUIN

4

Nouvelle rédaction de l'article

Défavorable

Le Gouvernement

11

Délégation à l'OFII de la mission d'assistance juridique aux demandeurs d'asile en rétention

Favorable

Article 2

Mme NARASSIGUIN

6

Suppression de l'article

Défavorable

Mme MARGATÉ

8

Suppression de l'article

Défavorable

M. BENARROCHE

10

Suppression de l'article 

Défavorable

La réunion est close à 14 heures 50.

Mardi 13 mai 2025

- Présidence de Mme Muriel Jourda, présidente -

La réunion est ouverte à 18 heures 30.

Projet de loi de programmation pour la refondation de Mayotte et projet de loi organique relatif au Département-Région de Mayotte - Audition de M. Manuel Valls, ministre d'État, ministre des outre-mer

Mme Muriel Jourda, présidente. - Monsieur le ministre d'État, nous vous accueillons aujourd'hui dans le cadre de nos travaux sur les projets de loi organique et ordinaire pour la refondation de Mayotte. Vous le savez, ces textes attendus de longue date par nos concitoyens mahorais sont rendus encore plus indispensables en raison des dégâts occasionnés par le cyclone Chido.

Ces deux textes mobilisent quatre commissions : outre notre commission des lois, dont Agnès Canayer et Olivier Bitz ont été nommés rapporteurs, la commission des affaires économiques et la commission des affaires sociales se sont saisies de ces textes, désignant respectivement Micheline Jacques et Christine Bonfanti-Dossat comme rapporteurs pour avis, ainsi que la commission des finances, qui a choisi nos collègues Georges Patient et Stéphane Fouassin pour assurer ce rôle. Avant que notre commission ne se réunisse demain matin pour examiner les amendements et adopter ses textes, il nous est apparu indispensable que vous puissiez nous éclairer sur l'ambition de ces deux textes. Je vous laisserai la parole pour une intervention liminaire d'une quinzaine de minutes, avant de donner aux rapporteurs puis à nos collègues le soin de vous interroger, mais permettez-moi auparavant de formuler quelques interrogations.

Certains de nos collègues mahorais ont posé la question du bilan humain du passage du cyclone Chido. En application de l'article 35 de la loi du 24 février 2025 d'urgence pour Mayotte, le Gouvernement a remis le 27 mars dernier un rapport sur le sujet, qui dénombre quarante décès et une quarantaine de disparitions s'apparentant à des décès supplémentaires. Ces chiffres, très en deçà des premières estimations faites alors par le préfet, vous paraissent-ils robustes ? Comment le Gouvernement compte-t-il améliorer les dispositifs de prévention et d'alerte ?

Les services de l'État à Mayotte rencontrent les plus grandes difficultés pour faire face à l'afflux des demandes de titre de séjour et pour exécuter les décisions d'éloignement. L'accès au bureau des étrangers de la préfecture est en outre régulièrement bloqué par un collectif d'habitants qui réclame notamment la fin du visa territorialisé. Quels moyens l'État prévoit-il de mobiliser pour reprendre en main la situation migratoire à Mayotte ?

On estime qu'entre 5 000 et 10 000 mineurs isolés se trouvent à Mayotte, souvent livrés à eux-mêmes. Leur poids dans la délinquance est très élevé. Alors que les services de l'aide sociale à l'enfance (ASE) sont évidemment saturés par le nombre exceptionnellement élevé de ces mineurs non accompagnés , le projet de loi de programmation pour la refondation de Mayotte ne comporte aucune disposition à ce sujet : que compte-t-on faire de ces mineurs, dont beaucoup ont de la famille aux Comores, à 70 kilomètres de là ? N'aurait-il pas été opportun de prévoir dans le projet de loi un mécanisme de remise de ces mineurs non accompagnés aux autorités comoriennes ? À défaut, cela ne pourrait-il pas faire l'objet d'une convention bilatérale avec les Comores ?

M. Manuel Valls, ministre d'État, ministre des outre-mer. - Il y a moins de quatre mois, lors de mon audition par la commission des affaires économiques du Sénat sur le projet de loi d'urgence pour Mayotte, j'avais indiqué que la situation de l'archipel s'était imposée dès ma nomination comme une urgence immédiate et constituait la priorité de mon action. Elle l'est restée et elle l'est encore, même si les défis demeurent immenses : je le dis sans détour, nous n'avons pas laissé tomber Mayotte.

Ainsi, je me suis rendu sur place à quatre reprises en quatre mois, dont la dernière fois aux côtés du Président de la République. Par ailleurs, le Parlement a adopté à l'unanimité le projet de loi d'urgence pour Mayotte, promulgué le 24 février dernier. En outre, je réunis très régulièrement l'ensemble des élus du territoire - vos collègues Salama Ramia et Saïd Omar Oili peuvent en témoigner. De plus, la mission dirigée par le général Pascal Facon rattachée à mon cabinet est quotidiennement à la tâche, au ministère ou sur place, pour accélérer la reconstruction de l'île et penser sa refondation. Cette mission travaille actuellement à une stratégie quinquennale, qui me sera présentée la semaine prochaine. J'ai également demandé au général Facon de mener aux côtés du préfet Bieuville des concertations au sujet de la convergence sociale, travail qui peut compter sur l'engagement et la vigilance de la sénatrice Salama Ramia, placée en mission à mes côtés.

Depuis ma prise de fonctions, j'ai identifié trois phases de réponse à la crise : premièrement, la gestion des urgences vitales ; deuxièmement, la reconstruction ; troisièmement, la refondation. L'engagement sans faille des services de l'État et des élus - je tiens à le souligner, au-delà des critiques - a permis de stabiliser la première phase de réponse à la crise, celle des urgences vitales. Je vous confirme le nombre de décès que vous avez indiqué, madame la présidente, très éloigné de celui qui a été avancé durant les premières heures. Ce nombre ne devrait pas augmenter : il n'y a pas eu de disparus, de charnier ou de corps revenus par la mer. Nous sommes donc très loin des rumeurs et des fantasmes sur ce sujet. L'île de La Réunion, plus souvent touchée par les cyclones, a une culture de la prévention, ce qui n'est pas le cas à Mayotte, qui a été détruite : il faut mieux se préparer à ce risque.

Dans les premiers jours et les premières semaines, nous avons rétabli les capacités en eau, en électricité et en télécommunication. Plus spécifiquement, en ce qui concerne l'eau, le taux de remplissage des deux retenues collinaires s'est amélioré à la fin de la saison des pluies. Deux millions de bouteilles d'eau ont été livrées. Deux millions de litres seront acheminés par voie maritime au cours de ce mois de mai et feront l'objet d'une distribution organisée par la préfecture, en lien avec les centres communaux d'action sociale (CCAS), des associations et les mosquées. Nous avons récupéré notre capacité de production habituelle de 38 000 mètres cubes par jour. Pour les mois qui viennent, avec l'arrivée de la saison sèche, l'eau est le premier sujet de préoccupation. Nous ne pouvons pas nous satisfaire de la situation, car, depuis l'avant-Chido, persiste un écart entre l'offre et la demande de la population.

Avant même que ce projet de loi de programmation pour la refondation de Mayotte ne soit déposé, nous commencions à voir plus loin. Plus de 900 fuites d'eau ont été réparées par le génie militaire, mais il nous faut encore définir un mode opératoire pour résorber les fuites dans les foyers. La première pierre de la future station d'épuration de Mamoudzou Sud a été posée le 7 mai, et l'arrêté d'autorisation des travaux pour la partie terrestre du chantier de construction de l'usine de dessalement d'Ironi Bé a été signé par le préfet il y a quelques jours. Nous engageons également une réflexion sur des dispositifs innovants, et nous lancerons bientôt un appel à projets pour trouver des solutions nouvelles, mobilisant par exemple l'eau atmosphérique. Avant de disposer de toutes les infrastructures en matière d'usine ou de retenues, nous devons nous reposer sur ces dispositifs durant environ deux ans pour ne pas revivre la crise de l'eau de 2023.

Nous tiendrons l'objectif de résorption complète des déchets dus au passage de Chido d'ici au mois d'août 2025, qui constituait une autre de mes préoccupations. Grâce au second casier d'enfouissement de l'installation de stockage de déchets non dangereux inauguré au début du mois d'avril, nous évacuons plus de 800 tonnes de déchets par jour. Je salue à ce titre l'action des collectivités territoriales et du syndicat intercommunal d'élimination et de valorisation des déchets de Mayotte (Sidevam), qui bénéficiera d'ici à la fin de la semaine de crédits d'amorçage pour faire face à ses problèmes de trésorerie.

En matière de santé, plus de 1 000 professionnels ont été projetés sur place. L'hôpital, que j'ai visité il y a quelques semaines aux côtés du chef de l'État, fonctionne à 80 % de ses capacités. Il connaîtra d'importants travaux de réparation et de sécurisation, qui s'ajouteront à ceux qui étaient prévus avant Chido, pour s'achever au cours de l'année 2026. Sept dispensaires sur huit sont ouverts, celui de Sada, très endommagé par le cyclone, étant en travaux. Tous les centres médicaux de référence sont également ouverts, la question étant de savoir si les médecins, les aides-soignants et les infirmiers sont capables de recevoir le public.

Les rentrées scolaires de mars et de ce lundi ont eu lieu, ce qui n'était pas évident. Dans le premier degré, 95 % des élèves sont rescolarisés dans les mêmes conditions très insatisfaisantes que celles d'avant-Chido. Tous les établissements du second degré sont ouverts, mais des rotations ont lieu dans deux lycées, le temps d'achever les travaux d'ici l'automne prochain. Plusieurs parlementaires m'avaient légitimement alerté sur la question des fournitures et des mobiliers scolaires, pour lesquels trois navires ont été affrétés. Deux d'entre eux sont déjà arrivés, le 21 avril et le 12 mai ; le dernier arrivera le 26 mai. Tout comme sur l'eau, nous sommes revenus à la situation d'avant-Chido. La phase de gestion de crise est terminée mais nous ne pouvons pas nous satisfaire de la situation. Les rotations scolaires sont inacceptables en République ; le rapport annexé au projet de loi fixe l'objectif d'y mettre fin à l'horizon de 2031.

Moins de cinq mois après le passage du cyclone Chido, l'impression générale renvoyée par le territoire est celle d'une stabilisation, voire d'une amélioration de la situation sur certains points, malgré les remarques des élus et des médias, lesquels soulignent ce qui ne va pas - c'est bien normal dans une démocratie. Ceux qui se sont récemment rendus dans l'archipel constatent que la végétation se régénère rapidement. Les axes routiers ont été rapidement rétablis, les commerces ont rouvert progressivement, et la chaîne portuaire et logistique fonctionne de nouveau. Pour autant, même dans les domaines que je viens d'évoquer, tout n'est pas parfait, loin de là : les enjeux de l'eau, de la gestion des déchets, de l'école et des déplacements entre Petite-Terre et Grande-Terre restent criants, mais la première phase de réponse, celle de gestion des urgences vitales, est clairement terminée. Tous ceux qui y ont participé - services de l'État, élus, parlementaires - peuvent et doivent le dire.

La mission dirigée par le général Facon puis la promulgation de la loi d'urgence pour Mayotte le 24 février dernier ont ensuite permis de déployer les premiers outils et les premières actions concrètes de la deuxième phase de réponse à la crise et de commencer la reconstruction. Ainsi, malgré les critiques relatives à l'absence de l'État, un bataillon de 326 militaires est mobilisé au quotidien pour réparer et rebâtir les bâtiments publics. Il participe activement au déblaiement des routes et des cours d'eau, à la sécurisation des bâtiments et au soutien logistique, ayant notamment oeuvré pour les écoles ou les équipements sportifs. Des chantiers de reconstruction d'immeubles d'habitation sortent déjà de terre, en mobilisant le concours d'entreprises mahoraises, comme la loi d'urgence le prévoyait, même s'il reste possible de progresser sur ce point.

Le soutien financier est également au rendez-vous, avec 100 millions d'euros du fonds d'amorçage ainsi qu'avec le déploiement du fonds de secours pour l'outre-mer, qui comporte notamment 15 millions d'euros destinés à la filière agricole. Je pense également aux mesures pour l'activité partielle votées dans le cadre de la loi d'urgence : 1 311 demandes d'indemnisation ont été validées, ce qui représente 996 138 heures et 9,1 millions d'euros. Enfin, je pense aux prêts à taux zéro (PTZ), désormais lancés dans l'ensemble des établissements bancaires pour aider les particuliers à reconstruire leur toit. Aux côtés de Mme Salama Ramia, le Président de la République et moi-même nous inquiétions de l'attitude des banques, mais aujourd'hui la dynamique est lancée. Toutes les banques instruisent les dossiers, à l'exception de la Banque Postale, qui sera opérationnelle à la mi-mai une fois ses équipes formées. Un suivi du déploiement du PTZ avec les banques de Mayotte est réalisé par la préfecture, en lien avec la direction générale du Trésor et la direction de l'habitat, de l'urbanisme et des paysages (DHUP). Par ailleurs, Raffaele Fitto, vice-président de la Commission européenne, s'est rendu sur place et m'a confirmé que la France recevrait bientôt une avance de 23,7 millions d'euros au titre du fonds de solidarité de l'Union européenne pour financer des opérations d'urgence et de remise en état.

Avec les deux projets de loi que vous allez examiner, nous entamons donc la troisième phase de réponse au cyclone : celle de la refondation. Si le cyclone a ravagé Mayotte, il a surtout exacerbé les calamités, les problèmes et les défis qui existaient déjà. Le sous-développement des infrastructures économiques et des services publics est entretenu par les deux fléaux qui rongent l'île depuis des années : l'habitat illégal et l'immigration clandestine. Je l'ai indiqué dès le départ, il est hors de question de se contenter d'un travail de reconstruction qui ferait au mieux revenir à la situation très insatisfaisante de l'avant-Chido. Cela reviendrait à ne pas honorer la promesse républicaine attendue depuis la départementalisation. Dès le 30 décembre 2024, le Premier ministre s'engageait ainsi, au moment de la présentation du plan Mayotte debout à ce qu'un projet de loi plus structurel soit déposé pour redéfinir l'avenir de l'archipel. Le Gouvernement tient parole avec ce projet de loi de programmation pour la refondation de Mayotte, que je suis heureux de présenter au Sénat.

Avant de revenir sur ses principales mesures, un mot de la méthode. Ainsi que François Bayrou l'a demandé, ce projet de loi a été élaboré en concertation avec les élus et la société civile. Je me suis rendu à quatre reprises à Mayotte, à la fin du mois de décembre, à la fin du mois de janvier, et deux fois au mois d'avril ; j'ai reçu les parlementaires mahorais à plusieurs reprises à Paris ; dès la fin du mois de février, j'ai écrit à tous les élus, au président du Conseil économique, social et environnemental de Mayotte et aux présidents des chambres consulaires pour recueillir leurs propositions. Enfin, les 20 mars et 26 mars derniers, j'ai réuni tous les élus du territoire en visioconférence. Le Président de la République l'a évoqué dans la salle du conseil départemental il y a quelques semaines, nous avançons ensemble, même quand il y a - et c'est normal - des désaccords. Ces échanges ont permis d'enrichir et de modifier le texte. Par rapport à la version initialement transmise au Conseil d'État, nous avons notamment largement restreint le champ de l'article 19, qui facilite la prise de possession anticipée des terrains pour accélérer la réalisation des infrastructures essentielles, sur la demande des élus.

Ce projet de loi comprend trente-quatre articles, répartis en six titres. Le titre I comporte un article unique, visant à approuver le rapport annexé au projet de loi : il présente l'ensemble des politiques publiques qui constituent les priorités de l'État pour garantir la reconstruction et la refondation du territoire. Il comprend notamment les engagements du Gouvernement qui ne nécessitent pas directement de mesures législatives ou des précisions au sujet des infrastructures à réaliser de manière prioritaire. Il comporte également des éléments de programmation financière, à hauteur de 3,7 milliards d'euros pour sept ans. Au regard des travaux de la mission inter-inspections chargée d'évaluer les dégâts et de nos échanges avec les élus, il faudra sans doute affiner et compléter cette programmation financière au cours des débats parlementaires, pour que les chiffres correspondent davantage à la réalité des besoins en matière de reconstruction, même si le débat sur les finances publiques et les engagements de l'État pour les années à venir ne vous auront pas échappé. Le Gouvernement sera sûrement en mesure de vous proposer une réévaluation de ces sommes la semaine prochaine, lors de la séance publique.

Puisque nous évoquons les infrastructures, permettez-moi d'évoquer un instant le dossier de l'aéroport. Lors de son déplacement officiel du 21 avril dernier, le Président de la République a écarté l'option de le situer sur Petite-Terre, pour privilégier la construction d'une longue piste d'atterrissage sur Grande-Terre, suivant l'hypothèse technique privilégiée par la direction générale de l'aviation civile (DGAC). Un plan d'attractivité sera nécessaire pour valoriser les nombreux atouts de Petite-Terre. Le Gouvernement proposera des amendements lors de l'examen du texte en séance publique pour tirer les conséquences de ce choix, qui recueille l'assentiment d'une large majorité des élus. J'ai demandé que la prochaine réunion du comité de pilotage ait lieu le 28 mai prochain. J'ai également demandé que les études de la DGAC, très complètes, soient transmises à l'ensemble des élus mahorais ainsi qu'à vos rapporteurs. En outre, à ma demande, les résultats de la mission inter-inspections chargée d'évaluer les dégâts ont été transmis aux mêmes personnes.

Le titre II regroupe les mesures de lutte contre l'immigration clandestine et l'habitat illégal. En ce qui concerne le volet migratoire, l'article 2 durcit les conditions d'accès au séjour pour l'immigration familiale en les adaptant à la situation particulière de Mayotte. Aux articles 3 à 5, le texte améliore les dispositifs de lutte contre les reconnaissances frauduleuses de paternité et de maternité. L'article 6 étend quant à lui l'aide au retour volontaire à Mayotte, tandis que l'article 7 prévoit la possibilité de placer un étranger accompagné d'un mineur dans un lieu adapté à la rétention des familles. L'article 8 prévoit le retrait des titres de séjour des parents lorsque leurs enfants constituent une menace pour l'ordre public. Enfin, l'article 9 conditionne les flux financiers depuis le département à la vérification préalable de la régularité du séjour du client par les intermédiaires chargés d'opérer les transferts. Je le sais, les rapporteurs de la commission des lois, Agnès Canayer et Olivier Bitz, proposeront des améliorations de ces dispositifs, que nous regarderons avec bienveillance et intérêt.

Madame la présidente, j'ajoute que le blocage du bureau des étrangers de la préfecture est contre-productif. Les mouvements à l'origine de ce blocage dénoncent l'immigration clandestine, mais comment les fonctionnaires peuvent-ils traiter les obligations de quitter le territoire français (OQTF) s'ils ne peuvent accéder à leurs bureaux ? Ce blocage est également néfaste pour l'économie locale : comment traiter les dossiers des travailleurs étrangers en situation régulière, dont la présence est nécessaire pour Mayotte ? Je condamne ce mouvement, et le préfet est fortement mobilisé pour lever ce blocage. Les services du ministère de l'intérieur ont été saisis pour renforcer les services de la préfecture en matière de gestion des étrangers.

Pour ce qui concerne les mineurs comoriens non accompagnés, des discussions doivent se tenir sur ce sujet sensible. Encore faut-il démontrer que ces mineurs disposent d'une famille aux Comores. Le projet de loi ne comporte certes pas de mesure spécifique sur ce sujet, mais la création de lieux spécialement adaptés à la prise en charge des besoins de l'unité familiale, pour reprendre le relais des centres de rétention administrative (CRA) en 2027, peut fournir une première réponse à cette préoccupation.

J'imagine que nous reviendrons sur le sujet des titres de séjour territorialisés. Avec les ministres de l'intérieur et de la justice, nous avons été extrêmement fermes pour maintenir ces titres qui rencontrent, il est vrai, l'opposition de l'immense majorité des élus et des collectifs. Nous avons aussi avancé sur le sujet de l'immigration sans attendre ce projet de loi : la loi visant à renforcer les conditions d'accès à la nationalité française à Mayotte, récemment promulguée, établit désormais qu'un enfant né à Mayotte de parents étrangers ne pourra accéder à la nationalité française que si, à sa naissance, ses deux parents résident régulièrement en France depuis au moins un an, le Conseil constitutionnel ayant déclaré cette disposition conforme à la Constitution.

L'article 10 permet de mieux lutter contre les bidonvilles en facilitant les opérations de résorption de l'habitat informel. Micheline Jacques, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, proposera un amendement pour conforter la constitutionnalité du dispositif sans lui faire perdre sa dimension opérationnelle, sur lequel le Gouvernement émettra un avis favorable.

Au sujet de la lutte contre l'immigration irrégulière et l'habitation illégale, permettez-moi d'ajouter trois points fondamentaux. Le combat est d'abord une question d'effectifs et de moyens pour les forces de sécurité intérieure. Nous montons déjà en puissance, et continuerons de le faire. J'ai choisi d'informer les parlementaires et de les associer aux décisions prises, raison pour laquelle cette question est abordée dans le rapport annexé. Ensuite, la lutte contre l'immigration irrégulière à Mayotte est conditionnée à un rapport plus ferme envers les Comores. Là encore, j'ai voulu associer les parlementaires à cette dimension diplomatique, en évoquant la question dans le rapport annexé.

Enfin, le resserrement de notre arsenal juridique ne doit pas laisser croire que l'État n'agirait pas déjà. Ainsi, début avril, nous avons démoli soixante-treize constructions illégales à Dzoumogné, mettant fin à des conditions de vie indignes et libérant des terrains destinés à la construction d'une nouvelle école communale.

Le titre III du projet de loi revêt une dimension sécuritaire. Les articles 11 et 12 renforcent le contrôle des armes, tandis que l'article 13 facilite la lutte contre l'emploi d'étrangers sans titre, notamment en simplifiant la traversée des bidonvilles.

Le titre IV comprend une série de mesures économiques, sociales et d'aménagement durable du territoire. L'article 15, cher à Christine Bonfanti-Dossat, habilite le Gouvernement à légiférer par ordonnance pour accélérer la convergence sociale, avec une effectivité prévue au plus tard en 2031, selon une trajectoire progressive et soutenable. Cette mesure, attendue depuis des années par les Mahorais, permettra - enfin ! - de progresser vers l'égalité réelle.

J'ai missionné le préfet Bieuville et le général Facon pour mener les concertations indispensables à cette avancée. Le rapport annexé fournit les premières indications, et un rapport sera prochainement remis au Parlement, conformément à l'article 36 de la loi d'urgence pour Mayotte.

L'article 19, dont le champ a été restreint après concertation avec les élus mahorais, facilitera la prise de position anticipée de terrains pour accélérer la construction d'infrastructures essentielles. Nous avons besoin de cet article.

Le titre IV prévoit également la création d'une zone franche globale à Mayotte à l'article 22, conformément à l'engagement du Premier ministre. Un chapitre entier est consacré à l'accompagnement de la jeunesse mahoraise, dans lequel sont prévues, à l'article 26, la prise en charge des mineurs par l'Agence de l'outre-mer pour la mobilité (Ladom) et, à l'article 27, et la création d'un fonds de soutien au développement des activités périscolaires.

Les articles 28 et 29 visent à renforcer l'attractivité du territoire pour les fonctionnaires, en prévoyant une bonification d'ancienneté et une extension de la priorité légale de mutation.

Le titre V consolide le statut de collectivité unique de Mayotte, qui prendra le nom de « Département-Région de Mayotte », et révise le mode de scrutin pour prévoir l'élection des conseillers à l'assemblée de Mayotte à la représentation proportionnelle dans une circonscription électorale unique composée de cinq sections. L'article 30 est actuellement une habilitation à légiférer par ordonnance ; le Gouvernement, si vous en êtes d'accord, déposera en commission des amendements pour inscrire le dispositif directement dans le projet de loi.

Le titre VI prévoit les dispositions transitoires et l'entrée en vigueur.

Le projet de loi organique procède à une série de coordinations pour accompagner la modification des dispositions institutionnelles électorales prévues par le projet de loi ordinaire.

Ces projets de loi constituent une étape déterminante pour engager la refondation de Mayotte. Ils sont attendus depuis des années - mes prédécesseurs y ont travaillé - et témoignent de l'engagement du Gouvernement envers l'archipel. Nous le devons aux Mahorais, qui ont maintes fois exprimé leur attachement à la France. Je suis convaincu que vos travaux en commission et en séance permettront d'améliorer ce texte.

Mme Agnès Canayer, rapporteur. - L'ambition de cet acte III pour Mayotte se lit dans l'intitulé du projet de loi de « programmation pour la refondation de Mayotte ». Votre feuille de route se décline principalement dans le rapport annexé, sur lequel nous serons particulièrement vigilants, notamment en ce qui concerne la déclinaison pluriannuelle des engagements financiers et le suivi de leur mise en oeuvre.

Le texte contient également un certain nombre de réformes structurelles. Vous avez accepté d'inscrire directement dans le projet de loi la modernisation du statut institutionnel de Mayotte, plutôt que de procéder, comme le prévoit actuellement l'article 30, par une habilitation à légiférer par ordonnance - ce que nous apprécions peu au Sénat. Pourriez-vous nous présenter les grandes lignes de l'amendement que vous déposerez demain en commission ?

M. Manuel Valls, ministre d'État. - Le choix de procéder par ordonnance a été arrêté en réunion interministérielle pour des raisons de légistique. Cependant, ce mode opératoire a été contesté lors des échanges avec les élus, ce que nous comprenons parfaitement. La direction générale des outre-mer a donc élaboré un amendement pour inscrire directement dans le projet de loi les dispositions de l'article 30. Cette rédaction, initialement partagée avec les élus mahorais, est dense - près de 22 pages ! - et avait été écartée dans un premier temps par le cabinet du Premier ministre.

L'amendement codifie au sein du code général des collectivités territoriales les dispositions relatives à la collectivité de Mayotte. Il définit l'organisation et le fonctionnement de la collectivité, les compétences de ses organes et précise les règles applicables à l'assemblée de Mayotte. Les organes du futur Département-Région comprendront l'assemblée de Mayotte et son président, assistés du conseil économique, social, environnemental, de la culture et de l'éducation de Mayotte. L'amendement consacrera également le nom de Département-Région.

Il réaffirme la compétence de Mayotte en matière de coopération régionale, conformément aux attentes des élus.

Les amendements aux articles 32 et 34 permettront de mettre en cohérence ces dispositions avec celles de l'article 30.

M. Olivier Bitz, rapporteur. - Je me réjouis que vous ayez annoncé la levée de deux irritants : la communication du rapport inter-inspections à tous les élus concernés et son intégration dans le débat public, ainsi que la réunion du comité de pilotage et des études de la DGAC sur la piste longue.

Par ailleurs, nous soutenons le maintien du titre territorialisé ; pourriez-vous nous expliquer davantage les raisons qui conduisent le Gouvernement à ne pas proposer sa suppression ? Nous proposerons un amendement au rapport annexé visant à établir un point d'étape sur la situation migratoire à mi-mandat, dans trois ans, afin d'évaluer la pertinence du maintien de ce titre spécifique à Mayotte.

M. Manuel Valls, ministre d'État. - Je suis conscient que ces irritants subsisteront dans le débat en séance publique. J'incite les services de l'État et les différents cabinets à faire preuve de la plus grande transparence, notamment dans le cadre d'une relation de confiance avec le Parlement. Le rapport inter-inspections, de grande qualité, est en cours de finalisation. Nous avons également besoin de tous les éléments concernant l'aéroport, car le passage de Petite-Terre à Grande-Terre soulève de nombreuses questions.

Pourquoi le Gouvernement n'envisage-t-il pas de revenir sur les dispositions dérogatoires ? L'article L. 441-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (Ceseda) prévoit la délivrance à Mayotte de titres de séjour d'exception, valables uniquement sur ce territoire - ils ne donnent donc pas accès à d'autres parties du territoire national ou de l'espace Schengen. Cette spécificité vise à réduire l'attractivité de Mayotte et à limiter la pression migratoire locale.

Des aménagements existent toutefois. Cette limitation ne concerne pas l'ensemble des titres de séjour, notamment les cartes de résident. Les étrangers titulaires d'un titre de séjour limité peuvent solliciter une autorisation spéciale pour circuler dans l'espace Schengen. Par ailleurs, les conjoints, partenaires liés par un pacte civil de solidarité, descendants directs de moins de 21 ans ou à charge, et ascendants directs à charge de citoyens français sont dispensés de cette autorisation spéciale.

Nous devons évaluer ce dispositif en fonction de l'évolution de la reconstruction de Mayotte et de nos relations avec les Comores, dont nous avons récemment constaté les limites lors de la réunion de la commission de l'océan Indien à Madagascar. Pour le moment, une telle évolution n'est pas possible, le ministère de l'intérieur est très clair sur ce sujet. Cependant, il est nécessaire de disposer des moyens d'évaluation de ce dispositif.

Mme Agnès Canayer, rapporteur. - L'article 7 prévoit que, à partir du 1er janvier 2027, date d'entrée en vigueur de l'interdiction de placement en rétention des mineurs, les enfants accompagnés pourront néanmoins être placés dans des unités adaptées aux familles en vue de leur éloignement. Cette mesure nous paraît indispensable, compte tenu de la situation propre à Mayotte.

Toutefois, le délai de 48 heures fixé par l'article 7 peut s'avérer trop court en cas de circonstances imprévisibles - intempéries, état de la mer, etc. Nous proposerons donc par amendement d'ajouter une prorogation possible de 24 heures dans de telles circonstances. Quelle est la position du Gouvernement sur ce point ?

M. Manuel Valls, ministre d'État. - Le Gouvernement souscrit à votre objectif de clarification. La prorogation de 24 heures que vous proposez, en cas d'impossibilité matérielle d'éloignement liée à des facteurs extérieurs, notamment météorologiques, paraît effectivement pertinente. L'autorité judiciaire serait immédiatement informée d'une telle prolongation.

Je précise que la durée moyenne de rétention à Mayotte est particulièrement courte : environ 24 heures. Le recours à la prorogation resterait donc exceptionnel, comme le prévoit d'ailleurs la rédaction de votre amendement. Le Gouvernement y est favorable et en assume la charge.

M. Olivier Bitz, rapporteur. - J'en viens à un autre sujet touchant à la charge des collectivités cette fois-ci : la centralisation à Mamoudzou de l'enregistrement des actes de reconnaissance de paternité. Cela représentera une charge supplémentaire pour la commune, assumée pour l'ensemble de Mayotte. Nous souhaiterions donc proposer un amendement prévoyant une compensation financière pour la commune de Mamoudzou : quelle serait la position du Gouvernement sur une telle compensation ?

M. Manuel Valls, ministre d'État. - L'article 3 du projet de loi prévoit cette centralisation ; notre objectif est clair : dissuader les reconnaissances frauduleuses. Cela devrait mécaniquement réduire le nombre de reconnaissances.

Pour autant, cette centralisation accroîtra l'activité de la commune de Mamoudzou. Toutefois, dans la mesure où les maires agissent ici en qualité d'agents de l'État, le droit à compensation des transferts de compétences ne s'applique pas.

Nous examinerons néanmoins votre amendement avec attention, afin de voir comment organiser au mieux cette nouvelle charge pour la commune.

Mme Christine Bonfanti-Dossat, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales. - Rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales, je m'exprimerai sur les articles 15 à 18.

Tout d'abord, vous avez évoqué à juste titre l'attente forte des Mahorais en matière de convergence sociale. Quelle est, dans ce contexte, l'intention du Gouvernement concernant l'extension de l'aide médicale de l'État (AME) ?

Ensuite, je m'interroge sur les moyens de financer cette convergence. En 2023, le taux d'emploi à Mayotte s'établissait à seulement 23 %, soit environ 50 000 personnes en activité. Dans un tel contexte, comment assurer le financement durable des mesures prévues ?

Les pharmaciens sont totalement opposés à l'article 17 ; ils proposent d'attendre le recensement de 2026. Ils estiment que l'économie pharmaceutique est aujourd'hui trop fragile. Ils soulignent, notamment, que l'hôpital fournit aussi des médicaments aux assurés sociaux, ces derniers refusant parfois de payer le reste à charge en pharmacie. Comment inciter ces personnes à se tourner vers les officines ?

Enfin, les syndicats de pharmaciens regrettent l'absence de concertation ; que peut-on leur répondre pour les rassurer ?

M. Manuel Valls, ministre d'État. - Une proposition de loi d'Estelle Youssouffa, du groupe Libertés, Indépendants, Outre-mer et Territoires (Liot), visant à étendre l'AME à Mayotte, sera examinée jeudi à l'Assemblée nationale. Le Gouvernement, à ce stade, y est opposé. Nous partageons donc la logique que vous défendez par votre amendement.

Concernant l'article 17, l'incitation à fréquenter les officines passe par le développement de l'offre de soins de ville. Il faut effectivement vérifier que les syndicats de pharmaciens ont bien été consultés. Peut-être l'ont-ils été via le conseil économique, social et environnemental de Mayotte ou les chambres consulaires ; nous le vérifierons. J'ajoute que cette mesure a été soutenue par les élus locaux.

Concernant le financement du chantier de convergence sociale, vous avez raison : la faiblesse du taux d'emploi complique les choses. C'est précisément pour cette raison que nous avons prévu une trajectoire entre 2026 et 2031, avec le temps nécessaire pour négocier et mettre en oeuvre les dispositifs sans créer de fausses promesses. Ce sujet reviendra assurément lors du débat en séance.

M. Stéphane Fouassin, rapporteur pour avis de la commission des finances. - Nous avons rendu un avis favorable sur six articles en commission des finances, mais plusieurs points appellent notre attention.

L'article 9 nous préoccupe : il confie aux banques un rôle de contrôle renforcé des titres de séjour, ce qui nous a semblé constituer un transfert de compétences régaliennes. Nous l'avons néanmoins validé.

Nous saluons en revanche l'extension des zones franches d'activité nouvelle génération à Mayotte, une mesure attendue.

Sur la piste longue, le montant de 1,2 milliard d'euros nous interpelle. Aucune étude fine ne semble avoir été menée sur les infrastructures aéroportuaires périphériques nécessaires. Or ce montant couvre uniquement la construction de l'aéroport et d'une piste pour gros porteurs. Il est indispensable qu'un comité de pilotage soit mis en place, mais il faut aussi que les dépenses soient programmées annuellement. Aujourd'hui, nous connaissons l'enveloppe globale de 3,2 milliards d'euros, sans visibilité sur les échéances. Une programmation pluriannuelle serait donc indispensable.

M. Manuel Valls, ministre d'État. - S'agissant de l'article 9, la mesure vise à lutter contre le travail illégal et l'immigration irrégulière à Mayotte, en encadrant plus strictement les conditions d'envoi d'argent à un tiers à l'étranger. Ce dispositif répond à un problème bien identifié : les circuits financiers organisés entre Mayotte et l'extérieur. Il s'agit non pas d'un transfert de compétences, mais d'une obligation de vérification renforcée confiée aux établissements bancaires.

Concernant la piste longue, des vérifications - techniques et financières - s'imposent. J'espère que le comité de pilotage et les éléments transmis aux élus permettront d'avancer concrètement.

Je l'ai indiqué précédemment, lors des débats de la semaine prochaine, nous devrions être en mesure de fournir davantage de précisions sur la pluriannualité des engagements financiers et sur les montants mobilisés. Dans le contexte budgétaire actuel, que chacun connaît, je reste extrêmement prudent. Chaque projet de loi de finances devra évidemment prendre en charge une part de ces engagements.

Il est néanmoins essentiel, et vous avez raison de le rappeler, que la présentation du texte s'accompagne d'une visibilité claire, non seulement sur les projets, mais aussi sur leur calendrier de mise en oeuvre et sur les montants alloués. Cette exigence s'impose au vu des dégâts causés par le cyclone Chido et des retards structurels que Mayotte connaissait bien avant cette catastrophe.

Ces précisions devront être apportées progressivement. Je vous remercie, en tout cas, du travail accompli et du soutien que vous avez exprimé.

Mme Cécile Cukierman. - Comme plusieurs de mes collègues, je m'interrogeais sur la frilosité du projet de loi, qui prévoyait, à l'article 30, de légiférer par ordonnance sur l'uniformisation des règles applicables aux collectivités territoriales. Cette méthode contraste fortement avec la volonté manifeste d'avancer rapidement sur les titres II et III.

En lisant le texte, nous avons l'impression que vous vous souciez davantage de la question des étrangers que de celles qui touchent les citoyens français de Mayotte, lesquels apparaissent relégués au second plan. Or, rappelons-le, plus de 77 % des Mahorais vivent sous le seuil de pauvreté. L'objectif d'harmonisation des droits est fixé à l'horizon 2030-2031, alors même que l'urgence sociale est patente.

Le cyclone Chido a - malheureusement - montré à la France entière, si ce n'est au monde entier, l'extrême précarité des conditions de vie à Mayotte.

Vous avez annoncé que l'article 30 ne relèverait plus d'une ordonnance : c'est une bonne chose. Il demeure cependant un certain déséquilibre dans les rythmes d'intervention : la célérité sur les titres II et III contraste avec la lenteur sur les titres IV et V.

Pour ma part, et au nom du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste - Kanaky (CRCE-K), je n'oppose pas ces priorités. Elles doivent être traitées de manière globale, et c'est d'ailleurs tout l'intérêt d'un projet de loi de refondation.

Enfin, en l'état actuel du texte, et sauf modification substantielle, notre groupe s'abstiendra.

Mme Corinne Narassiguin. - L'ambition globale de ce projet de loi s'inscrit dans la continuité du texte d'urgence adopté à la suite du cyclone Chido. Cela pointe une distinction essentielle entre, d'une part, ce qui relève de l'urgence conjoncturelle, et d'autre part, ce qui relève des enjeux structurels de long terme, liés à l'objectif d'égalité réelle.

Cette égalité réelle est un objectif fixé depuis la départementalisation de Mayotte. Or force est de constater que les gouvernements successifs, depuis l'origine, ont sous-estimé l'ampleur des efforts nécessaires. Le cyclone Chido a été un révélateur brutal du niveau de précarité, et de la profondeur des carences accumulées.

Il est donc indispensable que ce projet de loi, qui se veut un texte de refondation, s'inscrive dans une vision de long terme. Cela suppose des garanties solides sur le financement de sa mise en oeuvre. Or nous examinons un projet de loi de programmation sans programmation financière. Comment, dès lors, s'assurer que les mesures prévues ne resteront pas lettre morte ? S'agira-t-il de crédits inscrits dans les prochains projets de loi de finances ? De quelle manière les engagements seront-ils suivis dans la durée ?

Je ne passerai pas en revue tous les dispositifs du texte, mais je souhaite insister sur deux points spécifiques.

Le premier concerne les dispositions liées au contrôle des flux migratoires et à l'immigration irrégulière. Le projet de loi s'inscrit dans une logique déjà bien connue : restreindre davantage les droits des étrangers à Mayotte afin, théoriquement, de réduire l'attractivité du territoire. C'est la même logique que celle qui est portée par la récente proposition de loi sur la restriction du droit du sol à Mayotte.

Or cette stratégie repose sur une hypothèse - celle de l'attractivité juridique - qui n'a jamais été démontrée. Aucun rapport, aucune statistique n'étaye l'idée que les dispositifs spécifiques du Ceseda ou les règles relatives à la nationalité expliqueraient l'ampleur des flux migratoires.

Les visas territorialisés, en vigueur depuis des années, n'ont pas produit l'effet escompté. La levée de ce dispositif reste pourtant une demande unanime, transpartisane, portée par les élus locaux depuis longtemps. Or, plutôt que d'y répondre, le projet de loi ajoute de nouvelles restrictions, notamment sur les parents d'enfants français, ce qui risque de précariser encore davantage ces familles - sans les rendre expulsables ni régularisables. Cela ne résoudra rien.

Ne conviendrait-il pas d'envisager la dimension européenne des accords migratoires ? La migration vers Mayotte ne concerne plus uniquement les Comores, mais également des pays de la Corne de l'Afrique, avec lesquels la France a moins de liens historiques que d'autres pays européens. L'intégration de Mayotte dans une approche migratoire européenne, via une éventuelle déterritorialisation des visas, pourrait permettre de construire des outils plus adaptés, plus efficaces et plus solidaires.

Mon second point concerne le foncier. L'article 19 suscite de nombreuses inquiétudes, notamment quant à la facilitation des procédures d'expropriation.

Certes, la nécessité de construire des infrastructures impose parfois le recours à l'expropriation. Toutefois, à Mayotte, l'État est déjà propriétaire d'une part importante du foncier. Avant d'envisager d'exproprier, encore faudrait-il optimiser l'usage de ce foncier public. Par ailleurs, toute politique foncière ambitieuse suppose de résoudre, en amont, le problème ancien et massif de la régularisation des propriétés. Ce problème, plus que centenaire, n'a jamais été réglé. Il s'impose aujourd'hui avec une acuité redoublée dans le contexte post-Chido.

De nombreux Mahorais se trouvent confrontés à une situation dramatique : ils ont souscrit des assurances pour leur logement, mais, n'ayant jamais eu de titre de propriété formel, se voient refuser toute indemnisation après la destruction de leur maison. Comment accepter, dans ces conditions, qu'on leur impose demain des procédures d'expropriation facilitées ?

Tant que ce problème fondamental de la régularisation foncière n'est pas traité, il sera politiquement et humainement très difficile d'imposer ces mesures d'expropriation.

Enfin, sur l'article 30, même si je salue le fait que vous ne souhaitiez plus passer par voie d'ordonnance - une méthode que les parlementaires apprécient rarement -, je tiens à soulever un problème de méthode : l'amendement que vous proposez est extrêmement dense, et nous ne l'avons reçu qu'hier. Cela ne permet pas un travail parlementaire de qualité. Or cet article visait initialement à consulter la collectivité et à recueillir l'avis du Conseil d'État. Aujourd'hui, nous avons un amendement de 22 pages, sans avis du Conseil d'État...

M. Manuel Valls, ministre d'État. - Madame Cukierman, ce texte important vient après un premier projet de loi, dit d'urgence, adopté à l'unanimité par le Sénat, et après l'action déjà déployée par l'État. Il s'agit d'un texte équilibré, comme j'ai essayé de le démontrer tout à l'heure. Il contient évidemment des mesures de lutte contre l'immigration illégale : c'est un préalable nécessaire. Il n'y a là aucune obsession particulière, mais on constate, sur place, dans les discussions avec les élus, avec les collectifs et avec les Mahorais en général, que ce thème est incontestablement un sujet de préoccupation.

On ne peut pas dire, néanmoins, que ce projet de loi ne contient pas de mesures sociales. Dès l'article 1er portant approbation du rapport annexé et par toutes les mesures relatives à l'école, à la jeunesse ou à l'économie qui y sont inscrites, il porte la convergence sociale tant attendue.

Je préfère que nous fassions les choses bien, en nous donnant le temps nécessaire de la concertation et du dialogue social et en privilégiant la convergence du Smic sur celle des prestations sociales, afin de favoriser le travail - et je n'oublie pas la remarque qui a été faite tout à l'heure sur le taux d'emploi.

Ce texte de loi, au-delà des articles concernant les questions de sécurité et d'immigration, est bel et bien le texte de la convergence sociale et d'un chemin tracé vers l'objectif difficile - très difficile - d'égalité.

Madame Narassiguin, j'ai distingué trois phases. L'ambition de ce texte est structurelle, beaucoup plus large que la seule gestion du post-Chido. Pour ce qui est du financement, j'irai dans votre sens : je me bats, comme les rapporteurs, pour que nous soyons plus précis et plus complets le plus vite possible, en associant les élus à ce travail. Dans le domaine scolaire ou dans celui de l'eau, en effet, il est temps de donner des perspectives à Mayotte.

Sur les questions d'immigration, j'ajoute à ce que j'ai déjà dit que la problématique de la lutte contre l'immigration clandestine doit s'apprécier dans sa globalité.

L'article 2 rend opposable l'entrée régulière sur le territoire national pour l'obtention des titres « parents d'enfants français » et « liens privés et familiaux » et il porte de trois à cinq ans le délai de résidence habituelle. Quant à nos capacités de surveillance, de détection et d'interception, elles sont en cours de reconstitution, ce qui mobilise des financements très importants, l'objectif étant de passer de 25 000 à 35 000 éloignements par an. Il y a là une demande unanime des élus, qu'expriment très fortement les Mahorais.

Cela dit, tant que nous n'aurons pas réglé la question de notre rapport avec les Comores - coopération, équilibre nécessaire, rapports de force, développement de ce pays voisin -, une réelle difficulté demeurera, qui est liée à l'histoire. Au-delà de ce que peut faire l'État - fermeté, « rideau de fer », éloignements -, la proximité même d'Anjouan - quand il fait beau, on voit très bien cette île depuis Mayotte - oblige à une coopération régionale. Cela vaut aussi, du reste, pour la côte est de l'Afrique : de véritables défis se posent à toute la région.

J'en viens à l'article 19 : cette disposition vise à accélérer la construction des infrastructures essentielles à Mayotte. Elle tient compte des difficultés d'identification des propriétaires qui peuvent intervenir sur ce territoire et permet de prendre possession des terrains dans des conditions telles que les travaux ne sont pas bloqués, tout en garantissant, bien sûr, les droits attachés à la propriété privée.

Cette procédure n'est pas une nouveauté : elle est déjà prévue par le code de l'expropriation pour cause d'utilité publique pour les travaux intéressant la sécurité nationale et pour un certain nombre d'infrastructures routières. Elle est élargie, à Mayotte, à d'autres cas jugés stratégiques pour la refondation du territoire. Elle est mise en oeuvre de manière très précise et protectrice des propriétaires ou des personnes qui pourraient revendiquer la propriété des terrains concernés. Elle vise les projets déclarés d'utilité publique, et la prise de possession est autorisée uniquement en cas de difficultés d'exécution des travaux, par un décret pris sur l'avis conforme du Conseil d'État. Le juge peut de surcroît attribuer une indemnisation spéciale aux personnes intéressées qui justifient d'un préjudice causé par la rapidité de la procédure. Une indemnité provisionnelle d'expropriation est versée au propriétaire ou, en cas d'obstacle au paiement - je pense au cas de l'identification non certaine du propriétaire -, consignée. Cette disposition est valable dans un délai de dix ans à compter de l'entrée en vigueur de la loi.

Nous avons donc là, juridiquement parlant, une mesure extrêmement encadrée, garantissant les droits des personnes concernées, assortie d'un contrôle du juge intervenant à plusieurs étapes - contrôle de la déclaration d'utilité publique, contrôle des conditions de la prise de possession anticipée, prononcé d'une indemnité spéciale -, et circonscrite dans le temps. Je souligne que les élus du territoire ont été entendus, à juste titre, les projets pouvant faire l'objet de cette procédure ayant été strictement définis.

Nous travaillons sur la régularisation de la propriété foncière pour accélérer la rénovation de l'habitat dégradé : tel est l'objet de l'article 20, dont la rédaction a été travaillée avec la sénatrice Salama Ramia. Si l'on veut refonder Mayotte, il faut prendre en compte ce point essentiel qu'est la maîtrise du foncier. À défaut, la réalisation des infrastructures essentielles - nous parlions tout à l'heure de la construction du nouvel aéroport à Grande-Terre - se heurtera à un vrai frein. Cela vaut aussi pour la troisième retenue collinaire : la phase de maîtrise du foncier va prendre une année, une année perdue pour agir et répondre à la situation de stress hydrique que connaît d'ores et déjà le territoire.

Au regard de l'urgence, je ne comprends pas les amendements de suppression de l'article 19.

L'amendement que nous avons déposé à l'article 30 vise à répondre à la demande légitime de vos rapporteurs.

M. Olivier Bitz, rapporteur. - Je le confirme !

M. Manuel Valls, ministre d'État. - L'ordonnance dont il est question dans le texte initial serait de facto passée devant le Conseil d'État, car telle est la procédure. En tout état de cause, un travail aura lieu en séance publique au Sénat, puis à l'Assemblée nationale, jusqu'à la réunion de la commission mixte paritaire, avant que, le cas échéant, le Conseil constitutionnel ait à se prononcer. Sans dévoiler les secrets des réunions interministérielles, je peux vous dire que notre intention était d'aller vite. Je suis satisfait néanmoins que le débat ait lieu, à la demande des rapporteurs. Le sujet des institutions n'est sans doute pas celui qui passionne le plus les Mahorais, mais il est important. Nous avons voulu le maintenir dans le texte : si nous ne saisissons pas cette occasion pour faire évoluer les institutions de Mayotte, nous n'y arriverons pas plus tard.

Mme Cécile Cukierman. - Je n'ai pas dit qu'il n'y avait pas dans ce texte de volonté sociale, de volonté de convergence des droits ; j'ai simplement souligné une différence de calendrier de mise en oeuvre entre les différents titres du projet de loi.

M. Manuel Valls, ministre d'État. - Dont acte, madame la sénatrice.

M. Olivier Bitz, rapporteur. - Un grand merci, monsieur le ministre d'État, pour les éléments que vous nous avez apportés ce soir et pour la préparation du débat en séance - nous aurons encore un certain nombre d'échanges d'ici à la semaine prochaine.

Il est un autre sujet qui préoccupe beaucoup la commission des lois, sur lequel je souhaitais vous interroger à l'occasion de votre audition, qui était prévue jeudi matin, par la délégation aux outre-mer ; mais, l'agenda du Gouvernement ayant évolué, un conseil des ministres se tiendra à la même heure. Ce sujet est celui de la situation en Nouvelle-Calédonie : j'aimerais connaître votre lecture de ce qui s'est passé ces dernières semaines. Je vous saisis au pied de l'avion pour vous poser la question suivante : et maintenant, que faire ?

M. Manuel Valls, ministre d'État. - Je serai présent devant le groupe de contact sur la Nouvelle-Calédonie, qui se réunira mercredi prochain autour du président Larcher. Et je reste évidemment disponible auprès de la commission des lois comme de la délégation présidée par Micheline Jacques. Je me suis entretenu avec le président du Sénat ce week-end sur ce sujet, et je ne doute pas que j'aurai demain à répondre à des questions d'actualité sur la Nouvelle-Calédonie, au Sénat comme à l'Assemblée nationale.

La situation économique et sociale reste très préoccupante du fait, vous le savez, des destructions occasionnées par les émeutes d'il y a tout juste un an : plus de 2 milliards d'euros de dégâts. La machine a du mal à repartir, même si tous les dossiers de reconstruction des infrastructures scolaires et sportives ont commencé d'être instruits, le montant de l'enveloppe que vous avez votée dans le cadre du projet de loi de finances étant de 200 millions d'euros - c'est plutôt une bonne nouvelle pour le secteur du BTP. 15 % à 20 % du PIB ont été détruits, le moral des entrepreneurs et des entreprises est extrêmement bas et le risque de départs, de non-reconstruction ou de non-investissement est au plus haut.

La situation d'une partie de la jeunesse et les problèmes de chômage - le chômage partiel va s'arrêter le 30 juin - et de logement - le nombre de personnes sans domicile fixe a doublé à Nouméa - emportent un risque d'explosion ou d'implosion sociale. Cette dégradation du climat est préoccupante. Comment attirer les investisseurs - je pense notamment au secteur du nickel -, dans une telle situation d'instabilité politique ? C'est pourquoi j'avais posé l'alternative : « un accord ou le chaos », non pour faire peur, mais tout simplement parce que l'instabilité politique ne permet pas la reconstruction économique dans de bonnes conditions.

La situation sécuritaire me semble, à ce stade, relativement maîtrisée, mais je reste extrêmement prudent. Sur place sont mobilisés une vingtaine d'escadrons de gendarmerie mobile, des forces de la police nationale, des unités d'élite, Raid et groupe d'intervention de la Gendarmerie nationale (GIGN). Je note beaucoup d'appels au calme, mais nous ne sommes jamais à l'abri d'un accident, d'un incident, d'une provocation. Je sens une population inquiète, meurtrie, qui espérait sans doute un accord, pour retrouver de l'espoir, mais qui n'a pas envie - c'est normal - de reconnaître ce qui s'est passé il y a un an.

Sur le plan politique, les débats que nous avons eus depuis quatre mois, et encore ces derniers jours, ont été utiles. Je serai franc : il y a eu échec, dès lors qu'il n'y a pas eu d'accord. Pour autant, il y a beaucoup de points de convergence, bien que les divergences soient profondes entre l'aspiration à la souveraineté pleine et la volonté de rester dans la République, dans la France. Il y a des points de convergence, disais-je, sur l'idée d'une loi fondamentale, sur la citoyenneté, sur la composition et le rôle du congrès et du gouvernement, et sur les six engagements que j'ai proposés : il faut reconstruire la société et l'économie calédoniennes ; des réformes institutionnelles, financières et budgétaires importantes sont indispensables ; les questions de la sécurité et de la démocratie doivent être réglées. Mais la « clé de voûte », comme je l'ai appelée, rend difficile, à ce stade, un accord et un apaisement durable.

Cependant, je veux nuancer immédiatement ce que je viens de dire : les discussions continuent entre partenaires politiques et avec l'État. Je suis revenu dans l'Hexagone, nous avons constaté un échec, mais, au-delà des prises de position des uns et des autres, qui présentent toujours un caractère un peu définitif, il reste une marge de discussion.

Cette discussion pourrait-elle aboutir vite à un accord qui permettrait une réforme du corps électoral et un report des élections provinciales ? Je vous parle avec franchise : je ne sais pas - je l'espère. Des initiatives seront-elles prises en ce sens ? C'est le rôle du Président de la République et des présidents des assemblées - et c'est évidemment mon rôle - que de s'y atteler. Nous allons nous concerter pour voir comment avancer.

Le chemin est difficile, car les partis politiques sont entrés dans la perspective des élections provinciales. Faute d'accord, je vois mal comment on peut envisager que ces élections n'aient pas lieu avant la fin de l'année. Refaire une réforme du corps électoral sans l'accord d'une partie des protagonistes serait prendre des risques que, pour ma part, j'inviterais à ne pas prendre. J'ai mis un texte sur la table, qui a fait couler beaucoup d'encre, mais qui me paraît une base susceptible, demain, de rapprocher les points de vue. Ma conviction est que, contrairement à ce que l'on croit, cela est possible. En tout cas, le Front de libération nationale kanak et socialiste (FLNKS) et les organisations indépendantistes ont accepté un projet qui n'était pas le leur.

Et je ne crois pas avoir proposé que la France abandonne la Nouvelle-Calédonie : je pense avoir proposé une méthode qui permettrait au contraire de maintenir un lien fort entre la France et la Nouvelle-Calédonie. Dans le contexte géopolitique international comme dans le contexte financier et politique national, le moment est venu, en effet, de créer les conditions d'un lien très fort, en posant un premier principe : la situation de la Nouvelle-Calédonie est profondément différente de celle des autres territoires ultramarins.

On ne relèvera pas le défi considérable auquel est exposée la société calédonienne, au-delà des questions économiques et sociales, sans régler, premièrement, le problème de la fin du processus de décolonisation, c'est-à-dire sans sortir la Nouvelle-Calédonie de la liste des territoires à décoloniser de l'ONU.

Il convient, deuxièmement, de répondre à la question suivante : quelle doit être la forme de l'exercice du droit à l'autodétermination ? Certes, il y a eu trois référendums ; le troisième a laissé un goût d'inachevé, mais j'ai réussi, ces dernières semaines, à remettre tout le monde autour de la table. Si l'on veut éviter la confrontation et les blocages, il ne faut pas perdre ce bien précieux !Chacun en est conscient, on ne peut pas faire de référendum sans les Kanaks ou sans les indépendantistes et on ne peut pas réformer le corps électoral contre les Kanaks ou contre les indépendantistes. Mais on ne peut pas non plus envisager l'avenir sans tous les Calédoniens : le chemin est étroit.

Je résume : il reste bien sûr une possibilité de discuter. Pour ce qui est de faire évoluer les choses dans les prochaines semaines, la porte n'est pas totalement fermée : nous allons essayer. Cela permettrait de régler beaucoup de problèmes. Pourrait-on passer un accord plus large ? Je le souhaite, mais cela promet d'être difficile. Il le faudrait, néanmoins, car les échéances électorales vont arriver vite : provinciales, municipales, présidentielles, législatives. Cela prendra plusieurs années d'élaborer un statut définitif ou quasi définitif - nous n'avons jamais proposé, du reste, de le faire en six mois. Mieux vaudrait, donc, que le travail soit engagé dès maintenant. Je compte sur la sagesse du Sénat et de son président pour nous y aider.

Mme Muriel Jourda, présidente. - Je vous remercie, monsieur le ministre d'État, d'avoir répondu à nos questions.

Cette audition a fait l'objet d'une captation vidéo disponible en ligne sur le site du Sénat.

La réunion est close à 19 heures 55.

Mercredi 14 mai 2025

- Présidence de Mme Muriel Jourda, présidente -

La réunion est ouverte à 9 heures.

Proposition de nomination de M. Christian Charpy, candidat proposé par le Président de la République aux fonctions de président de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques - Communication

Mme Muriel Jourda, présidente, rapporteur. - Nous entendons aujourd'hui, dans le cadre de la procédure prévue par l'article 13 de la Constitution, Christian Charpy, candidat présenté par le Président de la République pour exercer les fonctions de président de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (CNCCFP). Il remplacerait Jean-Philippe Vachia, qui avait été nommé à ce poste le 1er juillet 2020, et dont le mandat a pris fin le 30 avril dernier. M. Charpy serait nommé pour un mandat de cinq ans jusqu'au 30 avril 2030.

Comme vous le savez, la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques a été créée par la loi du 15 janvier 1990 relative à la limitation des dépenses électorales et à la clarification du financement des activités politiques. Elle contrôle le respect, par les candidats aux élections et par les partis politiques, des dispositions relatives à la transparence financière de la vie politique. Elle a été dotée du statut d'autorité administrative indépendante (AAI) par la loi du 20 janvier 2017 portant statut général des autorités administratives indépendantes et des autorités publiques indépendantes. Depuis cette date, son président est nommé parmi les membres de la Commission, par décret du Président de la République et conformément à la procédure de l'article 13 de la Constitution.

La CNCCFP exerce deux grandes catégories de missions : le contrôle des comptes de campagne des candidats à l'occasion des élections, d'une part ; le contrôle, chaque année, du respect, par les partis et groupements politiques, de leurs obligations comptables, d'autre part.

Sa première mission a pour fondement l'article L. 52-15 du code électoral, aux termes duquel la CNCCFP  approuve et, après procédure contradictoire, rejette ou réforme les comptes de campagne , arrête le montant du remboursement forfaitaire prévu par la loi et saisit le juge de l'élection dans trois cas : lorsqu'elle a constaté que le compte de campagne n'a pas été déposé dans le délai prescrit, si le compte a été rejeté ou si, le cas échéant après réformation, il fait apparaître un dépassement du plafond des dépenses électorales.

Le juge de l'élection peut, en cas de volonté de fraude ou de manquement d'une particulière gravité aux règles de financement des campagnes électorales, déclarer le candidat en cause inéligible pour une certaine durée.

En outre, la Commission peut saisir le procureur de la République en cas d'irrégularités constitutives de délits punis par la loi.

Pour ce qui concerne sa seconde mission, à savoir le contrôle des comptes des partis politiques, c'est en application de l'article 11-7 de la loi du 11 mars 1988 relative à la transparence financière de la vie politique que les partis politiques doivent déposer chaque année leurs comptes, certifiés par un ou deux commissaires aux comptes, auprès de la Commission qui les rend publics. Le nombre de partis politiques concernés est stable : 609 partis en 2023, 599 partis au 31 juillet 2024.

La Commission doit procéder à un certain nombre de vérifications : respect du cadre comptable qui s'impose aux partis politiques ; conformité des ressources ; licéité des emprunts obtenus. En cas de constat de non-respect de leurs obligations par les partis, la Commission peut priver ceux-ci, pour une durée maximale de trois ans, du bénéfice de l'aide publique et, pour les donateurs, de l'avantage fiscal prévu au titre de l'impôt sur le revenu.

La CNCCFP s'est vu de surcroît confier une nouvelle mission par la loi du 21 mars 2024 renforçant la sécurité et la protection des maires et des élus locaux : celle du contrôle des dépenses de protection des candidats en situation de menace avérée.

Par ailleurs, sur le plan des procédures, la récente mise en place de la plateforme dématérialisée Fin'pol a permis pour la première fois le dépôt, l'instruction et l'anonymisation des comptes dématérialisés. L'élection présidentielle de 2022 a été la première élection concernée par cette dématérialisation, qui permet de gagner du temps.

Pour assurer ses missions, la CNCCFP dispose d'un collège de neuf membres : trois membres sont nommés sur proposition du vice-président du Conseil d'État, trois autres sur celle du premier président de la Cour de cassation, et les trois derniers sur proposition du Premier président de la Cour des comptes. Une nouvelle commission a pris ses fonctions au 1er mai dernier ; elle compte trois membres qui siégeaient déjà lors du mandat précédent, le mandat de membre de la CNCCFP étant renouvelable une fois.

La Commission s'appuie également sur des services comptant, en 2024, 55 équivalents temps plein (ETP), constitués par un socle de 47 agents permanents renforcés par 8 emplois non permanents, destinés à accomplir des missions de contrôle, de logistique et d'anonymisation des comptes. En 2025, le plafond d'emplois a été abaissé à 54 ETP, en raison de l'absence de scrutin national prévu - seules des élections partielles auront lieu -, à moins, bien sûr, que ne se tiennent de nouvelles élections législatives anticipées...

En outre, la CNCCFP a recours à des collaborateurs extérieurs - les rapporteurs -, nommés par le président de la Commission pour un an.

Dans l'ensemble, il semble que la grande majorité des candidats et partis politiques maîtrisent et respectent les règles édictées.

Si le système actuel de financement des campagnes des candidats aux élections et de financement des partis politiques apparaît globalement solide et bien accepté, il n'en est pas moins confronté à des défis accrus. Citons, entre autres, le risque de financement illégal par des personnes morales et d'ingérences de toutes sortes dans les campagnes électorales via les réseaux sociaux, ou encore le recours aux emprunts auprès de personnes physiques sans que la Commission ait connaissance de l'origine des fonds prêtés.

Aujourd'hui plus que jamais, le financement des partis politiques et des candidats revêt donc un enjeu démocratique majeur : de l'application des règles en matière de transparence financière dépend la confiance des citoyens envers leurs représentants.

Vous l'aurez compris, la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques constitue une institution essentielle pour notre démocratie ; il convient donc que le profil et les compétences de son président soient en adéquation avec ces responsabilités.

J'en viens à présent au parcours professionnel de Christian Charpy.

Président de la quatrième chambre de la Cour des comptes depuis un peu plus de deux ans, Christian Charpy a une riche carrière dans le monde de l'administration en général et dans les juridictions financières en particulier.

Il a rejoint la Cour des comptes dès sa sortie de l'École nationale d'administration. Il a ensuite exercé un temps au Quai d'Orsay, avant d'intégrer le cabinet de Simone Veil, ministre des affaires sociales, de la santé et de la ville, puis celui de Philippe Douste-Blazy, ministre délégué à la santé, entre 1993 et 1995. Puis il a exercé les fonctions de président du conseil d'administration de l'Agence française du sang, devenue l'Établissement français du sang, avant de retourner en cabinet ministériel, cette fois en tant que conseiller social du Premier ministre Jean-Pierre Raffarin, entre 2003 et 2005.

Il poursuit sa carrière dans les domaines de la santé et des affaires sociales en exerçant les fonctions de directeur général de l'Agence nationale pour l'emploi (ANPE), puis de Pôle emploi, issu, comme vous le savez, de la fusion entre l'ANPE et l'Unédic.

En 2011, il réintègre la Cour des comptes comme président de section à la sixième chambre, compétente sur la santé, la sécurité sociale et le secteur médico-social. Il est ensuite président de section à la première chambre, compétente en matière d'économie et de finances de l'État, mais aussi d'industrie, de commerce et de services, avant de devenir le président de cette chambre, entre 2019 et 2023. Par ailleurs, il est membre, depuis 2020, du Haut Conseil des finances publiques (HCFP).

Enfin, depuis 2023, Christian Charpy préside la quatrième chambre de la Cour des comptes, compétente notamment en matière de défense, de sécurité intérieure, de justice, d'affaires étrangères, d'administration déconcentrée et de finances publiques locales.

Depuis le 1er mai, il est membre de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques, à la suite de sa nomination sur proposition du Premier président de la Cour des comptes.

Ainsi la carrière professionnelle de Christian Charpy atteste-t-elle d'une solide connaissance et d'une solide pratique des règles relatives à la comptabilité et aux finances publiques au sens large, ainsi que d'une riche expérience dans le contrôle des comptes publics.

Ses responsabilités passées et en cours sont également gages d'indépendance et d'impartialité.

De surcroît, ses fonctions de président de chambre de la Cour des comptes peuvent démontrer son aptitude à la conduite de travaux d'une institution confrontée à une activité de nature à la fois cyclique, à l'image du contrôle régulier de l'exécution des lois de finances, et ponctuelle, dans le cadre du programme de travail déterminé par la Cour. Eu égard à son organisation et à la charge de travail induite, on peut considérer que la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques a une activité comparable à celle de la Cour des comptes.

De même, dans les fonctions auxquelles il postule aujourd'hui, M. Charpy aura à traiter, comme à la Cour, des dossiers individuels, en se fondant sur des considérations de fait et de droit, afin de s'assurer du respect de la réglementation applicable, dans le cadre d'une procédure contradictoire.

Sous réserve de son intervention devant notre commission ainsi que des réponses qu'il apportera aux questions qui lui seront posées, M.  Charpy me semble donc disposer d'un profil professionnel des plus adéquats pour exercer les fonctions de président de la CNCCFP.

Je vous propose à présent de procéder à son audition.

Audition de M. Christian Charpy, candidat proposé par le Président de la République aux fonctions de président de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques

Mme Muriel Jourda, présidente, rapporteur. - Nous accueillons à présent Christian Charpy pour son audition, qui fait suite à la proposition du Président de la République de le nommer président de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (CNCCFP), en application de l'article L. 51-14 du code électoral et de la loi organique du 23 juillet 2010 relative à l'application du cinquième alinéa de l'article 13 de la Constitution dans sa version issue de la loi organique du 20 janvier 2017 relative aux autorités administratives indépendantes et autorités publiques indépendantes.

En application du cinquième alinéa de l'article 13 la Constitution, nous procédons donc aujourd'hui à son audition, qui sera suivie d'un vote dans les conditions prévues par la loi organique et la loi ordinaire du 23 juillet 2010. Je vous rappelle que le Président de la République ne pourrait procéder à la nomination de M. Charpy si l'addition des votes négatifs exprimés au sein de notre commission et de la commission des lois de l'Assemblée nationale représentait, au total, au moins trois cinquièmes des suffrages exprimés.

Le vote aura lieu à la suite de notre audition, qui est publique et ouverte à la presse. Nous procéderons au dépouillement à l'issue de celui-ci, au même moment que nos collègues députés.

Conformément à l'article 3 de la loi organique du 23 juillet 2010, les délégations de vote ne sont pas autorisées.

Monsieur Charpy, j'ai, dans une communication liminaire hors votre présence, présenté aux membres de la commission des lois des éléments de votre parcours professionnel.

Je vous laisse désormais la parole pour un propos liminaire, après quoi les membres de notre commission auront certainement des questions à vous poser.

M. Christian Charpy, candidat proposé par le Président de la République pour exercer les fonctions de président de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques. - C'est un très grand honneur pour moi de me présenter devant vous aujourd'hui pour cette audition prévue par l'article 13 de la Constitution.

J'ai été très honoré de la proposition qui m'a été faite par le Président de la République de devenir membre de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques, et d'en prendre la présidence. Je connais le rôle éminent que joue la Commission dans le fonctionnement de la vie démocratique du pays, aux côtés d'autres institutions importantes avec lesquelles elle est en forte interaction. Sa mission est spécifique : veiller à la régularité des financements de la vie politique, en ce qui concerne tant les campagnes électorales que les partis politiques. Elle est essentielle, me semble-t-il, pour assurer la confiance des citoyens envers les élus, les partis et les institutions. C'est ce qui motive principalement ma candidature à la présidence de cette autorité.

Quoique j'aie encore beaucoup de choses à apprendre, je pense que mon parcours professionnel m'a préparé à cette fonction. J'ai exercé en effet l'essentiel de ma carrière au sein de l'État, à son service, dans des fonctions de contrôle à la Cour des comptes, au début de ma carrière et continuellement depuis 2012. J'ai occupé des fonctions de conseil auprès de Simone Veil entre 1993 et 1995 et de Jean-Pierre Raffarin à Matignon entre 2003 et 2005. Puis j'ai assuré des fonctions de direction et de management en tant que directeur général de Radio France Internationale (RFI), président de l'Établissement français du sang et directeur général de l'Agence nationale pour l'emploi (ANPE), puis de Pôle emploi, entre 2005 et 2011.

Mes domaines d'activité ont été diversifiés ; ils me préparent en partie à la fonction à laquelle je postule. Je me suis beaucoup intéressé aux questions sociales et aux finances publiques et, depuis 2023, je me concentre essentiellement sur les questions régaliennes en tant que président de la quatrième chambre de la Cour des comptes, qui couvre l'ensemble des ministères régaliens, mais aussi - c'est un point important - les finances publiques locales. J'ai eu à cette occasion la possibilité de nourrir un dialogue régulier avec les élus et leurs associations, dans le cadre de l'élaboration des rapports que nous faisons chaque année sur la situation financière des collectivités locales. J'ai aussi travaillé sur la certification des comptes de l'État, de la sécurité sociale et des assemblées parlementaires.

Mes fonctions de président de chambre à la Cour m'ont de surcroît appris - c'est important pour qui souhaite présider une commission telle que la CNCCFP - à présider des formations collégiales composées de femmes et d'hommes d'origine et d'expérience professionnelle diverses et aux convictions multiples, en vue de parvenir - c'est là le point absolument essentiel - à des décisions consensuelles.

Je serais donc heureux de mettre mes compétences professionnelles au service de cette commission.

Je crois pouvoir dire que je n'ai pas d'engagement personnel qui mettrait en cause les principes de neutralité, d'indépendance et de discrétion, ceux-là mêmes qui doivent présider à l'action de toutes les commissions indépendantes telles que la CNCCFP.

Cette commission est maintenant bien inscrite dans notre histoire institutionnelle. Elle est régie par des textes qui ont fixé sa composition, son rôle, ses prérogatives. Elle s'assure que les règles fixées par le législateur en matière de financement des partis politiques et de financement des élections sont respectées. Elle le fait depuis des années sous le contrôle du juge de l'élection et sous le contrôle du juge administratif.

Beaucoup de choses peuvent être faites, me semble-t-il, à propos des deux grandes compétences qui sont celles de la Commission, à commencer par le contrôle des comptes de campagne. L'année 2024 a été marquée, au premier trimestre, par la fin de l'examen des comptes de campagne des candidats aux élections sénatoriales de septembre 2023, puis par deux élections nationales importantes - l'une était prévue, le scrutin européen ; l'autre l'était moins, le scrutin législatif anticipé. Le travail a été rude pour la Commission, mais je sais qu'elle y a fait face sans difficulté et que l'essentiel des sujets sont maintenant derrière nous.

Pour ce qui est de l'année 2025, au-delà des classiques élections partielles et, peut-être, d'un référendum, sur lequel la Commission aurait à exercer ses compétences, peu de scrutins sont prévus. C'est surtout l'année 2026 qui constitue l'échéance importante, avec les élections municipales, rendez-vous majeur pour la Nation comme pour la Commission, et, bien sûr, le renouvellement partiel du Sénat en septembre 2026. Puis, en 2027, aura lieu l'élection présidentielle. La Commission sera au rendez-vous de toutes ces échéances importantes.

Je sais que la remise des comptes par les candidats et leurs mandataires est un exercice difficile, car les règles fixées par le législateur sont nombreuses, parfois complexes, et leur respect exigeant. C'est pourquoi il me semble essentiel - tel sera l'un des axes de ma présidence si je suis effectivement nommé - que nous puissions mieux agir pour faire connaître de manière plus précise les règles de financement des campagnes électorales et des partis politiques, afin d'éviter les difficultés qui peuvent se faire jour. Il serait important, par exemple, que nous soyons présents au congrès de l'Association des maires de France et des présidents d'intercommunalité (AMF), si elle l'accepte, pour rappeler et expliquer les différentes règles applicables, car il s'agit d'un moment important en vue des élections municipales.

Je souhaite également déployer des actions de communication et d'information en direction des candidats et des mandataires. Il faut aussi que la Commission accompagne de manière aussi efficace et proactive que possible les mandataires et les candidats au moment où ils déposent leurs comptes.

Un dernier élément au chapitre des comptes de campagne : le dossier de la dématérialisation. Mon prédécesseur vient d'engager un processus de dématérialisation de la remise des comptes de campagne via l'application Fin'pol. Ce dispositif a bien fonctionné pour l'élection présidentielle et n'a pas mal fonctionné pour les élections européennes, mais, de fait, l'application n'est pas en mesure de tenir la charge d'élections très lourdes. C'est pourquoi mon prédécesseur a pris la décision, que je partage, de ne pas l'utiliser pour les élections municipales de 2026 : nous procéderons de manière classique. Il m'appartiendra de sécuriser le dispositif pour l'élection présidentielle de 2027 et, surtout, de mettre en place un système qui, à partir de 2028, permette de prendre en charge de manière dématérialisée toutes les élections.

En matière de comptes de campagne comme de financement des partis politiques, l'un des points importants auxquels nous serons extrêmement attentifs est la lutte contre les ingérences extérieures. La Commission a un certain nombre de prérogatives qui lui permettent notamment de veiller à l'origine des fonds, même si ces prérogatives devraient être un peu renforcées, me semble-t-il, mais aussi de vérifier que l'ensemble des dispositions législatives en vigueur sont effectivement respectées.

Une difficulté particulière est à considérer à cet égard : l'usage des réseaux sociaux. C'est une nouveauté dans les campagnes électorales : de quelle manière le coût des réseaux sociaux doit-il être intégré dans les comptes de campagne ?

J'en viens enfin à une disposition inscrite dans notre droit par la loi du 21 mars 2024 renforçant la sécurité et la protection des maires et des élus locaux, qui a trait au financement des dépenses de sécurité des candidats menacés. Son application reposera en partie sur le travail de la Commission. Il y a là un point de préoccupation, car la loi est en vigueur, mais le décret d'application n'est toujours pas publié - il est vraiment essentiel qu'il le soit rapidement.

Au sujet des partis politiques, je serai plus bref : en cette matière, les fonctions et les rôles de la Commission sont plus circonscrits. Il ne s'agit pas de contrôler la gestion des partis, bien évidemment. Il s'agit simplement de s'assurer que les comptes ont été déposés dans les règles, qu'ils sont conformes aux protocoles comptables prévus et qu'ils ont été certifiés par un ou deux commissaires aux comptes.

Cette mission est néanmoins essentielle, car l'avis de la Commission détermine si les partis bénéficient ou non des avantages fiscaux et reçoivent ou non l'aide publique. La Commission, sous le mandat de Jean-Philippe Vachia, s'était engagée à mieux contrôler les comptes et notamment à examiner de manière plus attentive les annexes aux comptes, qui permettent de bien comprendre le fonctionnement de ces derniers - je compte m'attacher particulièrement à cet effort.

Il me semble également que la publication annuelle des comptes et la synthèse qui est produite par la Commission sont des éléments importants pour comprendre comment fonctionnent financièrement les partis politiques, lesquels permettent l'expression de l'opinion des citoyens et la construction de majorités.

Voilà les éléments d'information que je souhaitais apporter sur ma candidature, les raisons qui la motivent et, dans la limite de mes connaissances, les priorités que j'entends fixer à la Commission si ma candidature est validée par le Parlement et confirmée par le Président de la République.

Mme Muriel Jourda, présidente, rapporteur. - Les réseaux sociaux occupent une place croissante dans nos vies en général comme dans les campagnes électorales. Compte tenu de cette tendance, comment, selon vous, peut-on faire respecter l'interdiction de la publicité électorale pendant les six mois qui précèdent le scrutin ?

M. Guy Benarroche. - Ma première question porte sur l'essor préoccupant des emprunts qui ont été contractés par les partis politiques auprès des particuliers. Cet essor a été démontré par le rapport d'activité 2023 de la CNCCFP : en 2022, le montant total de ces emprunts était de 37,4 millions d'euros, dont 97 % étaient concentrés entre quatre partis, plus de la moitié du montant prêté concernant un seul parti. La Commission avait d'ailleurs alerté, à l'époque, sur l'absence de règles encadrant l'origine des fonds ou la nationalité des prêteurs, contrairement à ce qui se passe pour les prêts bancaires.

Si vous êtes nommé président, quelles mesures concrètes entendez-vous proposer pour garantir la traçabilité et la légalité de ces emprunts ? Attendez-vous du législateur une évolution rapide du cadre juridique ?

Ma deuxième question - elle est double - concerne le contrôle des comptes de campagne et des comptes des partis politiques. Comment la CNCCFP peut-elle accélérer l'analyse et le contrôle des comptes des partis afin de renforcer son efficacité pendant les campagnes électorales ou en amont de celles-ci ? Est-il envisageable de permettre une publication en temps réel des dépenses engagées par un parti politique pour soutenir un candidat, notamment pendant la campagne présidentielle ? Entendez-vous tirer parti de la dématérialisation et du développement de l'intelligence artificielle pour améliorer la transparence et l'intégrité des flux financiers entre partis et candidats ?

M. Christian Charpy. - Les réseaux sociaux sont en effet un sujet de préoccupation : beaucoup de candidats, avant d'être candidats, ont un compte sur « X » ou sur un autre réseau social. Il arrive que le candidat paie pour le rendre plus visible, et la Commission a procédé, au cours des mois passés, à des réformations, considérant que le paiement de cette visibilité relevait d'une propagande électorale payante et ne pouvait donc être pris en compte dans les frais de campagne. Les sommes en jeu sont faibles : quelques dizaines d'euros à chaque fois. Mais il y a là une question de principe importante. En toute objectivité, j'ai quelques interrogations sur ce dispositif : voilà une question que je soulèverai auprès des membres de la Commission.

Certains candidats peuvent par ailleurs décider de solliciter de manière payante des influenceurs pour financer des campagnes, soit positives soit négatives. L'une des propositions importantes émises par le collège sortant consiste à proscrire l'usage par les candidats d'influenceurs rémunérés. Il faut néanmoins avoir à l'esprit une difficulté : il arrive que les campagnes ne soient pas sollicitées, qu'elles soient positives ou négatives. Or une dépense électorale doit être sollicitée par le candidat pour être prise en compte dans les frais de campagne.

Monsieur Benarroche, la question des emprunts est en effet majeure. J'ai bien noté moi aussi que les prêts étaient concentrés sur quelques partis. Ce sujet concerne aussi, du reste, les candidats eux-mêmes. Je précise que les prêteurs n'ont pas le droit de prêter au-delà d'un montant maximum. Je ne suis pas certain que le contrôle soit facile à mener, notamment parce que les comptes des candidats ne sont pas totalement dématérialisés.

L'une des missions centrales de la Commission est de vérifier que les emprunts ne sont pas des dons, d'autant que les emprunts sont pris en compte en tant qu'apport personnel et peuvent être remboursés - faire passer un don pour un emprunt est une escroquerie. Il faut clairement vérifier - c'est ce que fait la Commission, mais ce n'est pas facile - que les emprunts sont effectivement remboursés. Je sais qu'elle a affaire à un certain nombre de signalements au parquet concernant des emprunts non remboursés.

La Commission souhaite par ailleurs - c'est une bonne proposition, qui par nature relève du pouvoir législatif - interdire à des personnes étrangères ne résidant pas en France de cotiser à des partis ou de prêter à des candidats ou à des partis.

S'agissant du contrôle des partis politiques, la rapidité est effectivement cruciale. Les partis doivent remettre leurs comptes à la Commission avant le 30 juin de chaque année ; la CNCCFP souhaiterait avancer cette date : j'en parlerai avec les responsables des partis - cela permettrait d'aller plus vite. La dématérialisation permettra également d'analyser plus rapidement les comptes.

Vous avez souligné un point important : de quelle manière peut-on contrôler les dépenses faites par les partis au bénéfice d'un candidat ? La difficulté est que les comptes des partis sont faits au titre de l'année n-1 et déposés au 30 juin de l'année n, alors que les comptes de campagne des candidats doivent être déposés dans les deux mois qui suivent l'élection. Se pose donc un vrai problème. Le collège sortant souhaitait obtenir pour la Commission, à titre expérimental, un accès aux comptes des partis pendant la campagne présidentielle afin de vérifier la bonne prise en compte des dépenses faites par les partis pour le compte des candidats. Là encore, une telle proposition n'est pas anodine et devra faire l'objet d'un examen attentif ; mais elle répond à une difficulté importante.

Mme Agnès Canayer. - Vous venez de répondre en partie à la question que je souhaitais vous poser sur les influences étrangères pesant sur les acteurs politiques. Nous avons adopté, en juillet dernier, la proposition de loi visant à prévenir les ingérences étrangères en France. On sait que les campagnes électorales sont un moment privilégié pour les tentatives d'ingérences.

Vous venez de le dire, vous êtes d'accord pour interdire aux personnes physiques étrangères ne résidant pas en France de prêter aux candidats ; estimez-vous qu'il faudrait permettre à la CNCCFP de demander aux prêteurs d'établir l'origine des fonds prêtés à un candidat ou à un parti politique, ou encore d'inclure la Commission dans la liste des personnes à qui Tracfin peut transmettre des informations, comme l'a préconisé dans son rapport la commission d'enquête du Sénat sur les politiques publiques face aux opérations d'influences étrangères ?

Mme Marie Mercier. - Les candidats à des élections sont très attentifs à leurs comptes de campagne, à tel point que leur dépôt est pour eux, de leur propre aveu, comme un « troisième tour ». Or la loi de finances de 2025 prévoit, par rapport à l'exercice 2024, une diminution du plafond d'emplois de la CNCCFP. Les moyens dont vous disposerez seront-ils suffisants pour assurer l'efficacité du contrôle de ces comptes ?

M. André Reichardt. - Je veux à mon tour insister sur les influences étrangères. Vous nous dites que vous serez particulièrement attentif à cette question : qu'entendez-vous par là ? Avez-vous d'ores et déjà pensé à un plan global qui s'appuierait sur les constats faits à l'occasion de certaines élections récentes, et pas seulement en France ?

M. Christian Charpy. - Je vais commencer par répondre globalement à propos des ingérences étrangères. Oui, je pense qu'il faut aller plus loin en ce domaine, être plus exigeants que nous ne le sommes aujourd'hui, car c'est un risque majeur qui pèse sur la démocratie, comme l'ont montré nombre d'élections ou de référendums à l'étranger.

Il me paraît essentiel et normal que, comme le propose son collège, la Commission puisse connaître l'origine des fonds qui ont permis à des prêteurs de prêter, sur le modèle des dispositions existantes en matière de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme : la CNCCFP devrait disposer de pouvoirs analogues afin de savoir d'où vient l'argent, ce qui passe, par exemple, par l'accès au fichier national des comptes bancaires et assimilés (Ficoba), prérogative dont jusqu'à présent elle ne dispose pas, contrairement à la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP).

Pour ce qui est de Tracfin, la proposition de loi contre les fraudes aux aides publiques, qui est en voie d'adoption, doit permettre à la Commission d'être destinataire des signalements de ce service. À l'heure actuelle, la CNCCFP fait des signalements à Tracfin, mais l'inverse n'est pas vrai ; or il est important que la première puisse bénéficier des retours du second, qui peuvent s'avérer utiles pour l'analyse des comptes des candidats.

Sur le dossier des ingérences, nous ne sommes pas seuls. L'un des sujets sur lesquels la Commission doit progresser est celui de ses rapports avec les autres autorités indépendantes ; je pense notamment à l'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (Arcom), qui joue un rôle important en matière de contrôle des réseaux sociaux et de contrôle de la presse. Les réunions entre l'Arcom et la CNCCFP sont assez rares : l'une de mes priorités sera de travailler avec cette autorité.

Tout cela ne constitue pas encore un plan global, mais j'en fais une priorité. Je citerai une dernière structure avec laquelle il faut travailler : le service de vigilance et de protection contre les ingérences numériques étrangères (Viginum), qui est rattaché au secrétariat général de la défense et de la sécurité nationale (SGDSN) et qui avait été mis en place après les élections de 2017, en 2021, sans être beaucoup sollicité pendant la campagne présidentielle de 2022. Je présume qu'il pourrait être utile de travailler avec cette structure en 2027.

Concernant notre plafond d'emplois, Madame Mercier, il est en effet en légère baisse en 2025 ; mais les emplois de la Commission sont très directement liés aux échéances électorales. Or, en 2025, il n'y a pas beaucoup d'élections. La CNCCFP dispose de manière pérenne d'une « base » de 47 emplois permanents. Et, pendant les périodes électorales, elle recrute à la fois des chargés de mission supplémentaires et des rapporteurs pour instruire les comptes de campagne. Autrement dit, en année électorale, le nombre de nos emplois augmente : des emplois seront créés au titre de 2026 pour permettre la prise en charge des élections municipales. Pour ce qui est de 2024, où a eu lieu en effet une élection non prévue, l'existence de vacances d'emploi a permis à la CNCCFP de recruter sans dépasser le plafond d'emplois.

Mme Jacqueline Eustache-Brinio. - Les règles relatives au rôle du mandataire peuvent apparaître complexes pour les candidats. Avez-vous réfléchi à des mesures de simplification ou de clarification en la matière ? Comment mieux accompagner et mieux former les mandataires des candidats et les trésoriers des partis politiques ?

M. David Margueritte. - Vous avez répondu à la question que je voulais poser sur le décalage de date de dépôt entre les comptes des partis politiques et ceux des candidats. La question se pose d'ailleurs de plus en plus souvent avec les micropartis.

Par ailleurs, les délais applicables au dépôt des comptes sont extrêmement variables, ce qui pose des difficultés très concrètes. Sauf erreur, après le dépôt des comptes, les intérêts des emprunts souscrits par les candidats pour financer leur campagne continuent de courir, parfois pendant six mois, huit mois, voire un an. Or, une fois le compte déposé, ces intérêts ne sont plus pris en charge au titre du remboursement des frais de campagne. Les sommes en jeu peuvent pourtant n'être pas négligeables.

Comment peut-on envisager de réduire ces délais, en tout cas de donner davantage de visibilité au candidat au moment où il souscrit à un emprunt, chose, d'ailleurs, de plus en plus difficile à obtenir auprès des établissements bancaires ? Le candidat doit savoir d'emblée combien lui coûteront les intérêts non éligibles au remboursement.

M. Stéphane Le Rudulier. - Tout candidat qui a recueilli au moins 1 % des suffrages exprimés a aujourd'hui l'obligation de déposer un compte de campagne, ce qui a pour conséquence une certaine profusion des comptes à examiner par la Commission. Ne serait-il pas opportun de relever ce seuil à 5 % des suffrages exprimés, par exemple ?

M. Christian Charpy. - Les règles applicables aux mandataires sont complexes, j'en suis conscient. Cela dit, le rôle du mandataire est essentiel dans une campagne électorale : il ouvre le compte puis encaisse et décaisse l'ensemble des recettes et des dépenses.

Un guide du mandataire est préparé par la Commission en amont des campagnes électorales ; celui qui concerne les prochaines élections municipales sera publié avant le 1er septembre prochain. Nous devons faire en sorte qu'il soit le plus clair et le plus simple possible.

De quelle manière pourrait-on simplifier les règles qu'applique la Commission ? Je ne suis pas en mesure aujourd'hui de vous le dire, mais je pense qu'il faut le faire. Parmi les sources de complexité, il y a notamment la question de l'accès aux comptes.

Au contraire de l'administration fiscale, par exemple, la CNCCFP ne pratique pas le rescrit ; elle juge au cas d'espèce. En même temps, il faut que le cas d'espèce soit suffisamment « cadré » pour qu'il n'y ait pas de difficultés pour les candidats.

Quant à l'accompagnement, le site internet de la Commission y pourvoit en partie, et les chargés de mission sont là aussi pour répondre aux questions. Il faudra, pendant les élections municipales, renforcer ce service d'accompagnement au bénéfice des candidats et de leurs mandataires.

J'en viens aux délais de remise des comptes de campagne : le délai normal est de deux mois après l'élection. La Commission doit instruire ces comptes dans les quatre mois, sauf si l'élection est contestée, auquel cas le délai est ramené à deux mois. C'est court : songez que les élections municipales donnent lieu au dépôt de près de 5 000 comptes, ce qui est tout à fait considérable.

Vous m'avez d'ailleurs interrogé sur l'opportunité de relever le seuil de 1 % des suffrages exprimés, mais je ne suis pas en mesure de vous répondre. Ce que je peux vous dire, c'est que la Commission a engagé une démarche d'audit, que je vais encourager. Au lieu de contrôler de manière exhaustive chacun des 100 ou 150 points de contrôle que nous identifions dans les comptes, nous pourrions travailler sur la base d'une analyse des risques et ainsi nous concentrer sur les comptes les plus importants.

Je ne dis pas pour autant qu'il ne faut pas contrôler les comptes de ceux qui ont recueilli moins de 5 % des suffrages, au motif qu'au-dessus de ce seuil seulement on a le droit au remboursement ; mais probablement faut-il ajuster la procédure de contrôle et les diligences mises en oeuvre au risque encouru par les finances publiques ou par le candidat.

Pour ce qui est des emprunts, je suis conscient qu'une fois le compte déposé, il n'y a plus aucune dépense ni aucune recette, ce qui n'est pas sans poser des difficultés. C'est pourquoi la Commission insiste pour que les emprunts soient de courte durée, étant entendu qu'il y aura de toute façon un reste à charge. À ce stade, je ne saurais répondre à votre question, Monsieur Margueritte, mais je l'examinerai dès mon entrée en fonctions.

M. Francis Szpiner. - Un certain nombre de candidats ont des difficultés pour ouvrir un compte. Dans l'attente, et la campagne ayant commencé, il arrive donc qu'ils utilisent leur compte personnel ; ils se trouvent par conséquent pénalisés.

Dès lors que la banque de la démocratie, qui devait être créée par le Premier ministre, ne l'a pas été, ne pourrait-on pas ménager une période de tolérance d'une quinzaine de jours pour permettre aux candidats de faire campagne alors même qu'ils n'ont pas encore pu ouvrir leur compte ?

M. Christophe Chaillou. - Vous l'avez dit, nous disposons d'un cadre juridique et législatif assez clair sur l'ensemble des matières électorales. Malheureusement, l'accumulation d'affaires récentes concernant des rendez-vous électoraux majeurs, et notamment l'élection clé, à savoir l'élection présidentielle, fait que les citoyens ne partagent pas cette perception positive.

Pour en avoir eu la démonstration dans d'autres pays, nous savons que la prochaine élection présidentielle pourrait être affectée par des éléments nouveaux, y compris technologiques.

Existe-t-il, dans la perspective de 2027, des réflexions sur d'éventuelles réformes spécifiques qui permettraient de nous assurer que l'élection présidentielle en France se déroulera dans les meilleures conditions, dans le respect des normes nationales et internationales ?

M. Guy Benarroche. - Je me permets de poser une question à laquelle vous n'aurez peut-être pas la réponse, mais qui me permet d'attirer votre attention sur la réforme du mode d'élection des membres du conseil de Paris et des conseils municipaux de Lyon et Marseille, prévue par la proposition de loi dite « PLM », qui est en cours d'examen par le Parlement.

En conséquence de cette proposition de loi, il risquerait d'y avoir le même jour deux scrutins, donnant lieu à deux campagnes différentes - mais cela est déjà arrivé.

La difficulté est que les deux scrutins porteraient pour l'un sur une liste municipale, visant à élire le maire de Marseille, le maire de Lyon et le maire de Paris, et pour l'autre sur des listes d'arrondissement, visant à élire les maires et les conseillers d'arrondissement de ces mêmes villes, et ce avec deux scrutins séparés et des bulletins et des comptes de campagne séparés.

Or, il est très vraisemblable qu'un grand nombre de candidats figurent à la fois sur une liste municipale et sur une liste d'arrondissement. Il est vraisemblable aussi qu'un certain nombre de candidats à la mairie centrale soutiennent des candidats aux mairies d'arrondissement et qu'un certain nombre de candidats aux mairies d'arrondissement soutiennent un candidat à la mairie centrale.

Ma question est donc la suivante : quelles seront les règles permettant de différencier, d'un côté, les dépenses effectuées au titre de la campagne pour la mairie centrale et, de l'autre, celles qui sont effectuées au titre des campagnes pour les mairies d'arrondissement ? Comment allez-vous faire, si vous êtes nommé président de la CNCCFP ?

M. Christian Charpy. - Monsieur Szpiner, la question de l'ouverture des comptes est un vrai sujet. J'ai cru comprendre que, lors des dernières élections, les choses avaient été un peu moins compliquées, parce que la Banque de France, qui garantit le droit au compte, a pu intervenir rapidement auprès des banques pour permettre l'ouverture de comptes. Par rapport aux scrutins précédents, les difficultés à cet égard ont donc été plutôt moindres.

Il peut de surcroît s'avérer compliqué, pour certains candidats, d'ouvrir ou de garder un compte dans une banque qui les considère comme politiquement exposés et qui, en conséquence, est assez réticente à les conserver comme clients. Ces situations sont assez désagréables pour tout le monde.

Le projet d'une banque de la démocratie a été évoqué ; il faut laisser le Parlement ou le Gouvernement avancer sur ce sujet. En attendant, il me paraît possible d'agir sur deux points. D'une part, il faut que la Banque de France continue d'être extrêmement réactive pour répondre aux demandes d'intervention qui lui sont adressées en cas de difficultés d'ouverture de comptes. D'autre part, le dernier médiateur du crédit aux candidats et aux partis politiques, Jean-Raphaël Alventosa, n'a pas été remplacé une fois son mandat échu en août dernier ; il est indispensable qu'il le soit afin que ces questions soient prises en charge.

Pourrait-on ménager un délai de carence après le début de la campagne ? Là encore, une telle décision relève plutôt du Parlement que de moi-même. La Commission rejette des comptes quand il apparaît que des dépenses d'un montant très significatif sont faites sur le compte du candidat ; mais le rejet ne se fait pas au premier euro. Elle examine les comptes avec rigueur, mais aussi avec un peu de souplesse pour ce qui est des premiers jours de campagne. Cette souplesse, néanmoins, ne peut durer : le compte ouvert par le mandataire doit prendre le relais.

Quid d'un dispositif de contrôle plus précis pour l'élection présidentielle ? La difficulté, avec les comptes de campagne, c'est que l'on ne voit que ce qui s'y trouve ; or ce qui pose problème est ce qui ne s'y trouve pas.

C'est parfois évident, comme en 2012 : la Commission a rejeté le compte d'un candidat important à l'élection présidentielle, sur la base des montants identifiés comme absents du compte - et d'autres dépenses manquaient probablement à l'appel. Autrement dit, la difficulté, c'est ce que l'on ne voit pas ! C'est pourquoi la Commission propose que lui soit confié, à titre expérimental, le pouvoir de contrôler en parallèle et au même moment les comptes des candidats à l'élection présidentielle et ceux des partis qui les soutiennent. Je ne sais si cette proposition sera reçue favorablement, mais, pour ma part, j'y vois une manière d'éviter, s'agissant d'une échéance majeure pour notre pays, que ne prévalent des ingérences extérieures ou le non-respect des règles électorales.

Je remercie vivement M. Benarroche de sa question pertinente. Malheureusement, je n'ai pas complètement la réponse. Attendons que la loi soit votée et, en cas de recours, validée par le Conseil constitutionnel. Mais il est clair que le guide du mandataire relatif aux élections municipales à Paris, Lyon et Marseille promet d'être extrêmement compliqué... J'ajoute qu'à Lyon il pourrait y avoir trois élections ! J'étudierai ce point dès ma nomination et, surtout, dès la loi publiée.

Mme Muriel Jourda, présidente, rapporteur. - Il nous faut maintenant vous laisser vous rendre à l'Assemblée nationale, où vous devez être auditionné également. Il me reste à vous remercier, au nom de notre commission, de votre intervention.

Ce point de l'ordre du jour a fait l'objet d'une captation vidéo, disponible en ligne sur le site du Sénat.

Vote sur la proposition de nomination, par le Président de la République, de M. Christian Charpy aux fonctions de président de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques

Mme Muriel Jourda, présidente, rapporteur. - Mes chers collègues, nous avons achevé l'audition de M. Christian Charpy, que le Président de la République envisage de nommer président de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques.

Nous allons maintenant procéder au vote sur cette proposition de nomination.

Ce vote se déroulera à bulletin secret, comme le prévoit l'article 19 bis de notre Règlement. En application de l'article 3 de la loi organique du 23 juillet 2010 relative à l'application du cinquième alinéa de l'article 13 de la Constitution, les délégations de vote ne sont pas autorisées.

Je vous rappelle que le Président de la République ne pourra procéder à cette nomination si l'addition des votes négatifs des commissions de l'Assemblée nationale et du Sénat représente au moins trois cinquièmes des suffrages exprimés.

Les dépouillements du scrutin auront lieu simultanément au sein des commissions des lois des deux assemblées.

Il est procédé au vote.

Cette audition a fait l'objet d'une captation vidéo disponible en ligne sur le site du Sénat.

La réunion, suspendue à 9 heures 55, est reprise à 10 heures.

Proposition de nomination de M. Alain Espinasse, candidat proposé par le Président de la République aux fonctions de directeur général de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides - Désignation d'un rapporteur

La commission désigne Mme Muriel Jourda rapporteur sur la proposition de nomination, par le Président de la République, de M. Alain Espinasse aux fonctions de directeur général de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, en application de la loi organique n° 2010-837 et de la loi n° 2010-838 du 23 juillet 2010 relatives à l'application du cinquième alinéa de l'article 13 de la Constitution.

Proposition de loi portant diverses dispositions en matière de gestion des milieux aquatiques et de prévention des inondations (GEMAPI) - Désignation d'un rapporteur

La commission désigne M. Hervé Reynaud rapporteur sur la proposition de loi n° 416 (2024-2025) portant diverses dispositions en matière de gestion des milieux aquatiques et de prévention des inondations (Gemapi), présentée par Mme Anne Chain-Larché, M. Pierre Cuypers et plusieurs de leurs collègues.

Proposition de loi visant à renforcer et sécuriser le pouvoir préfectoral de dérogation afin d'adapter les normes aux territoires - Désignation d'un rapporteur

La commission désigne Mme Nadine Bellurot rapporteure sur la proposition de loi n° 493 (2024-2025) visant à renforcer et sécuriser le pouvoir préfectoral de dérogation afin d'adapter les normes aux territoires, présentée par M. Rémy Pointereau et plusieurs de ses collègues.

Proposition de loi organique tendant à modifier le II de l'article 43 de la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 portant statut d'autonomie de la Polynésie française - Examen des amendements au texte de la commission

Mme Muriel Jourda, présidente. - Mes chers collègues, nous passons à l'examen des amendements au texte de la commission sur la proposition de loi organique tendant à modifier le II de l'article 43 de la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 portant statut d'autonomie de la Polynésie française.

EXAMEN DES AMENDEMENTS AU TEXTE DE LA COMMISSION

Article unique

M. Mathieu Darnaud, rapporteur. - L'amendement n°  1 de Cécile Cukierman vise à imposer aux initiatives communales une condition de cohérence supplémentaire avec les politiques publiques décidées au niveau de la collectivité.

Nous en comprenons l'intérêt, mais son esprit nous semble largement satisfait par le texte de la commission, qui prévoit l'information du Pays, lequel aura six mois pour faire valoir ses arguments de cohérence auprès de la commune et éventuellement signer une convention avec elle - tel était le sens de l'amendement que j'avais moi-même déposé et que notre commission a adopté.

En revanche, aller jusqu'à imposer aux communes le respect des politiques publiques adoptées par le Pays n'apparaît pas juridiquement praticable. Avis défavorable.

La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 1.

M. Mathieu Darnaud, rapporteur. - L'amendement n°  3 de du même auteur vise à préciser que la convention prévoyant les modalités d'intervention respectives de la commune et du Pays ainsi que les moyens mis à la disposition de la commune ne sera que facultative.

Or le texte de la commission le prévoit déjà : l'emploi de la locution « le cas échéant » signifie que les modalités d'intervention et les moyens ne sont précisés que lorsqu'une convention est signée. Implicitement, mais nécessairement, une commune peut agir y compris lorsqu'aucune convention n'est signée. Avis défavorable.

La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 3.

La commission a donné les avis suivants sur les amendements dont elle est saisie, qui sont retracés dans le tableau ci-après :

Auteur

Objet

Avis de la commission

Article unique

Mme CUKIERMAN

1

Respect par les interventions communales des politiques publiques adoptées par le Pays.

Défavorable

Mme CUKIERMAN

3

Précision selon laquelle les conventions sont seulement facultatives

Défavorable

Proposition de loi visant à améliorer le dispositif de protection temporaire en France - Examen des amendements au texte de la commission

Mme Muriel Jourda, présidente. - Nous examinons maintenant les amendements au texte de la commission sur la proposition de loi visant à améliorer le dispositif de protection temporaire en France.

EXAMEN DES AMENDEMENTS AU TEXTE DE LA COMMISSION

Article 1er

Mme Isabelle Florennes, rapporteure. - L'amendement n°  3 du Gouvernement permet de compléter l'article 1er, qui ne couvre pas en l'état la profession de pharmacien. Je vous propose donc de formuler un avis favorable à cet amendement.

La commission émet un avis favorable à l'amendement n° 3.

Article 4

Mme Isabelle Florennes, rapporteure. - Je vous suggère d'émettre un avis défavorable à l'amendement n°  2, car il est contraire à la position de la commission, dans la mesure où le revenu de solidarité active (RSA) n'apparaît pas adapté aux bénéficiaires de la protection temporaire du fait de leur grande mobilité au sein de l'Union européenne. Nous ne pouvons par ailleurs pas préjuger des prochaines crises. Il serait donc opportun de s'en tenir au dispositif actuel.

La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 2.

Article 5

Mme Isabelle Florennes, rapporteure. - Je vous propose de rendre un avis favorable à l'amendement n°  4 du Gouvernement, qui supprime le gage financier de la proposition de loi.

La commission émet un avis favorable à l'amendement n° 4.

M. Guy Benarroche. - Lors de l'élaboration du texte par la commission, nous avions évoqué la possibilité de porter à un an, au lieu de six mois, l'autorisation provisoire de séjour (APS), afin d'éviter la lourdeur des démarches administratives. Toutefois, l'amendement que j'ai déposé en ce sens a été déclaré irrecevable en application de l'article 40 de la Constitution. Je m'étonne de cette décision, car cette irrecevabilité n'a pas été invoquée lundi dernier à propos de la proposition de loi tendant à confier à l'Office français de l'immigration et de l'intégration (Ofii) certaines tâches d'accueil et d'information des personnes retenues, dont l'application des dispositions entraînera des dépenses supplémentaires.

Mme Isabelle Florennes, rapporteure. - Le délai de six mois, qui nous apparaît effectivement court, oblige en effet les bénéficiaires de l'APS à faire régulièrement des démarches administratives. Seulement, sa prolongation entraîne une hausse des dépenses dans la mesure où des prestations y sont attachées. Par ailleurs, au-delà de six mois, l'administration française est dans l'obligation de délivrer un titre de séjour biométrique, qui est plus coûteux et dont la procédure d'attribution est plus longue que celle de l'APS.

Mme Muriel Jourda, présidente. - J'ajoute qu'il est de la responsabilité du président de la commission des finances d'invoquer l'article 40 de la Constitution. S'agissant de la proposition de loi relative à l'Ofii adoptée lundi dernier, je rappelle que le Gouvernement a repris le dispositif proposé par voie d'amendement, ce qui a levé toute discussion sur la potentielle aggravation des charges financières de l'État.

La commission a donné les avis suivants sur les amendements dont elle est saisie, qui sont retracés dans le tableau ci-après :

Auteur

Objet

Avis de la commission

Article 1er

Le Gouvernement

3

Extension aux bénéficiaires de la protection temporaire d'un dispositif dérogatoire d'accès à la profession de pharmacien

Favorable

Article additionnel après l'article 3 (Supprimé)

M. BENARROCHE

1

Extension à un an de la durée de validité du document provisoire de séjour attribué aux bénéficiaires de la protection temporaire

Irrecevable art. 40 C

Article 4

M. BENARROCHE

2

Extension de l'éligibilité au RSA aux bénéficiaires de la protection temporaire

Défavorable

Article 5

Le Gouvernement

4

Suppression du gage financier.

Favorable

Proposition de loi tendant à rétablir le lien de confiance entre la police et la population - Examen des amendements

Mme Muriel Jourda, présidente. - Nous en venons à l'examen des amendements de séance sur la proposition de loi tendant à rétablir le lien de confiance entre la police et la population.

EXAMEN DES AMENDEMENTS DE SÉANCE

Article 2

La commission émet un avis favorable aux amendements identiques de suppression nos  4 et 6.

Article 3

La commission émet un avis favorable aux amendements identiques de suppression nos  1, 3 et 7.

Article 4

M. François Bonhomme, rapporteur. - Je vous propose de demander le retrait des amendements nos  2 et 5, au profit du rejet de l'article 4.

La commission demande le retrait des amendements nos 2 et 5 et, à défaut, y sera défavorable.

La commission a donné les avis suivants sur les amendements dont elle est saisie, qui sont retracés dans le tableau ci-après :

Auteur

Objet

Avis de la commission

Article 2

M. HAYE

4

Suppression de l'article 2

Favorable

Mme BELRHITI

6

Suppression de l'article 2

Favorable

Article 3

Mme AESCHLIMANN

1

Suppression de l'article 3

Favorable

M. HAYE

3

Suppression de l'article 3

Favorable

Mme BELRHITI

7

Suppression de l'article 3

Favorable

Article 4

Mme AESCHLIMANN

2

Ajustement du dispositif d'activation systématique des caméras piétons en cas de contrôles d'identité

Demande de retrait

M. HAYE

5

Ajustement du dispositif d'activation systématique des caméras piétons en cas de contrôles d'identité

Demande de retrait

Proposition de loi portant création d'un groupe de vacataires opérationnels et encourageant le volontariat pour faire face aux défis de sécurité civile - Examen des amendements au texte de la commission

Mme Muriel Jourda, présidente. - Nous passons à l'examen des amendements au texte de la commission sur la proposition de loi portant création d'un groupe de vacataires opérationnels et encourageant le volontariat pour faire face aux défis de sécurité civile.

EXAMEN DES AMENDEMENTS AU TEXTE DE LA COMMISSION

Article unique

M. Jean-Michel Arnaud, rapporteur. - Avis défavorable à l'amendement n°  2 rectifié qui semble résulter d'une incompréhension du dispositif adopté par la commission la semaine dernière. En effet, celui-ci n'a pas vocation à remplacer l'article R. 723-91 du code de sécurité intérieure, qui régit en détail l'engagement saisonnier des sapeurs-pompiers volontaires, mais à conférer une base législative à cet engagement, puisque l'article que je viens de citer relève du domaine réglementaire. Par conséquent, l'avis est défavorable sur cet amendement qui reprend les mêmes termes que l'article R. 723-91 du code de la sécurité intérieure, sans que cette redondance apparaisse utile.

La commission émet un avis défavorable à l'amendement n°  2 rectifié.

M. Jean-Michel Arnaud, rapporteur. - L'amendement n°  3 est déjà satisfait par l'état du droit et il relève en outre manifestement du domaine réglementaire.

La commission demande au Président du Sénat de se prononcer sur l'irrecevabilité de l'amendement n° 3 en application de l'article 41 de la Constitution.

La commission a donné l'avis suivant sur l'autre amendement dont elle est saisie, qui est retracé dans le tableau ci-après :

Article unique

Auteur

Objet

Avis de la commission

Mme Maryse CARRÈRE

2 rect.

Précisions sur la durée de l'engagement saisonnier et sur le bénéfice du régime de protection sociale pour ces saisonniers

Défavorable

Projet de loi de programmation pour la refondation de Mayotte et projet de loi organique relatif au Département-Région de Mayotte - Examen du rapport et des textes de la commission

Mme Muriel Jourda, présidente. - Nous passons à l'examen du rapport de nos collègues Agnès Canayer et Olivier Bitz sur le projet de loi de programmation pour la refondation de Mayotte et le projet de loi organique relatif au Département-Région de Mayotte.

Mme Agnès Canayer, rapporteur. - Déposé il y a trois semaines, le projet de loi de programmation pour la refondation de Mayotte constitue l'« acte III » de la réponse du Gouvernement au passage du cyclone Chido, après les mesures immédiates et la loi du 24 février 2025 d'urgence pour Mayotte.

Ce projet de loi, qui est le produit de travaux et de réflexions antérieurs au cyclone Chido, a un objectif ambitieux : répondre durablement aux défis du territoire par l'adoption de mesures structurantes. Cela explique son intitulé quelque peu grandiloquent et le choix du terme « refondation », au sujet duquel le Conseil d'État a relevé, non sans malice, qu'il « ne caractérise pas la plupart des dispositions du projet de loi qui visent à poursuivre le processus d'accompagnement déjà engagé » en faveur de Mayotte.

Le texte comporte 34 articles répartis en six titres et un rapport annexé, qui présente une programmation en faveur de Mayotte sur la période 2025-2031. Outre ce volet programmatique, les dispositions normatives du projet de loi portent sur des sujets très divers, qui vont de la lutte contre l'immigration clandestine à la convergence sociale, en passant par des mesures d'attractivité pour les fonctionnaires ou en faveur de la jeunesse. Le titre V du texte a trait à la modernisation du fonctionnement institutionnel de la collectivité départementale, renommée Département-Région de Mayotte, et à la révision du mode de scrutin pour l'élection de son assemblée délibérante. Le projet de loi organique relatif au Département-Région de Mayotte, qui comprend cinq articles, procède à des coordinations visant à tirer les conséquences de la création de cette collectivité sui generis.

Compte tenu de la diversité des sujets abordés, huit articles du projet de loi ont été renvoyés pour examen au fond à la commission des finances (l'article 22), à la commission des affaires économiques (les articles 10, 23 et 24) et à la commission des affaires sociales (les articles 15 à 18).

M. Olivier Bitz, rapporteur. - L'article 1er du projet de loi approuve le rapport annexé qui présente les orientations de la programmation pour la « refondation » de Mayotte sur la période 2025-2031. Ce rapport annexé comporte cinq parties, qui ont trait à l'ensemble des thématiques abordées par le projet de loi.

Le rapport annexé, qui est dépourvu de portée normative, constitue néanmoins un engagement de l'État à l'égard de Mayotte ; il comprend un grand nombre de mesures qui ne trouvent pas nécessairement de traduction directe dans le projet de loi : renforcement des moyens de détection et d'interception en mer, renforcement des infrastructures aéroportuaires et portuaires - dont la création de la « piste longue » -, plan en faveur de l'alimentation en eau, etc.

Ce rapport appelle de notre part les remarques suivantes.

En premier lieu, il ne distingue pas les mesures qui sont véritablement nouvelles de celles qui sont la traduction d'engagements déjà pris dans le cadre des précédents plans. Il n'existe pas de calendrier de mise en oeuvre de ces actions qui, à l'exception des investissements prioritaires, ne reçoivent aucune traduction budgétaire.

Le Gouvernement s'en justifie en faisant valoir qu'est élaborée, en parallèle de l'examen du projet de loi, une stratégie quinquennale (2026-2031) pour Mayotte, qui participe de la même approche globale. Remise au Gouvernement dans les prochaines semaines, cette stratégie est conçue par une mission interministérielle dédiée, placée auprès du ministre des outre-mer et dirigée par le général Facon, qui est également préfigurateur de l'établissement public de reconstruction et de refondation. Dans ces conditions, et alors que la stratégie interministérielle fait encore l'objet de réflexions, l'intérêt de soumettre au Parlement une telle loi de programmation n'apparaît pas évident.

En deuxième lieu, nous ne pouvons que regretter l'absence de véritable programmation budgétaire. Seuls les investissements prioritaires dans les infrastructures et les politiques publiques essentielles font l'objet d'un chiffrage budgétaire et celui-ci est présenté sous la forme d'un montant total de 3,2 milliards d'euros sur la période 2025-2031, sans déclinaison annuelle. Compte tenu du contexte budgétaire, une telle omission interpelle et suscite le doute quant à la réalité et à l'effectivité des engagements de l'État. C'est pourquoi nous vous proposons un amendement prévoyant qu'une programmation annuelle sera présentée au Parlement avant la fin de l'année 2025.

En troisième lieu, le rapport annexé ne prévoit pas de modalités d'évaluation et de suivi de la mise en oeuvre de la programmation qu'il définit. Or, la Cour des comptes, faisant état des résultats mitigés des précédents plans en faveur de Mayotte, avait pointé le défaut de pilotage et de suivi de ces derniers. Pour ces raisons, nous vous proposons un amendement tendant à inscrire le principe d'une évaluation régulière, associant tous les acteurs dont les élus locaux, qui comporterait la remise au Parlement d'un rapport d'évaluation à mi-parcours. Nous vous proposons également d'adopter le sous-amendement de notre collègue Corinne Narassiguin visant à créer un comité de suivi de la loi.

En quatrième et dernier lieu, il nous semble que l'État doit prendre les mesures propres à assurer la continuité et la cohérence de son action dans le territoire : c'est pourquoi nous vous proposons un amendement, après l'article 1er, qui place sous l'autorité du préfet de Mayotte, pour la durée du plan de refondation, l'ensemble des services de l'État et de ses établissements publics qui y interviennent.

J'en viens désormais aux dispositions relatives à la lutte contre l'immigration clandestine et contre les reconnaissances frauduleuses de paternité.

L'article 2 renforce les conditions de délivrance des titres de séjour « parent d'enfant français » et « liens personnels et familiaux », qui représentent 80 % des titres délivrés en 2024 et sont très majoritairement délivrés à des étrangers en situation irrégulière : respectivement à hauteur de 84 % et de 93 %.

Il subordonne la délivrance des cartes de séjour temporaire délivrées pour ces motifs à la production d'un visa de long séjour, et donc à une entrée régulière sur le territoire. Il crée également une condition de résidence habituelle de sept ans pour la carte de séjour « liens personnels et familiaux » et porte à cinq ans, contre trois, la condition de résidence régulière pour la délivrance de la carte de résident « parent d'enfant français ».

Ces dispositions, qui devraient permettre une diminution importante du nombre de titres délivrés pour motif familial, paraissent opportunes, et nous vous proposons deux amendements visant à renforcer ce dispositif.

L'article 6 étend à Mayotte le dispositif de l'aide au retour, dans des circonstances exceptionnelles, en vue d'inciter au retour des ressortissants des États d'Afrique des Grands Lacs et d'Afrique de l'Est.

L'article 7 permet, par dérogation à l'interdiction de la rétention d'un mineur prévue par la loi du 26 janvier 2024, qui n'entrera en vigueur à Mayotte que le 1er janvier 2027, la rétention d'un étranger accompagné d'un mineur à Mayotte au-delà de cette date. Il prévoit que cette rétention ne peut avoir lieu que dans des unités familiales spécialement affectées à cet effet et pour une durée maximale de 48 heures.

L'article 8 permet le retrait du titre de séjour d'un étranger lorsque le comportement de son enfant constitue une menace pour l'ordre public. Il s'agit d'une réponse au constat de la part importante - et en forte augmentation - de la délinquance due aux mineurs étrangers, qui ne peuvent faire l'objet d'une mesure d'éloignement. S'il s'agit d'une idée intéressante et adaptée au contexte mahorais, le dispositif proposé paraît très contraint. Nous vous proposons notamment d'en supprimer le caractère temporaire, qui ne paraît pas justifié.

L'article 9 subordonne à la vérification préalable de la régularité du séjour du client les opérations de transmission de fonds à partir d'un versement d'espèces (de type Western Union), afin de limiter les flux financiers liés à l'immigration clandestine et de lutter contre le blanchiment et le financement d'activités illégales. Cela conduit à priver les étrangers en situation irrégulière de la possibilité de recourir à de tels services. Pour transférer des fonds, ils devront alors passer par une banque ou transporter des espèces - et s'exposer aux contrôles afférents -, ou bien - et c'est le plus probable - recourir à des « hommes de paille » pour effectuer ces opérations.  Nous vous proposons par conséquent un amendement permettant de réprimer, dans ce dernier cas de figure, le contournement de ce dispositif.

Mme Agnès Canayer, rapporteur. - Afin de lutter contre le phénomène croissant des reconnaissances frauduleuses de paternité et de maternité à Mayotte, qui permet de contourner les règles de séjour sur le territoire français, l'article 3 prévoit de centraliser l'établissement des actes de reconnaissance à Mamoudzou, ce qui devrait permettre de mieux détecter les auteurs de reconnaissances multiples. Il précise également que l'officier de l'état civil fera lecture aux auteurs d'une reconnaissance des obligations découlant de l'exercice de l'autorité parentale ainsi que des peines encourues en cas de fraude. Nous vous proposons d'assurer l'effectivité de ce dispositif, en précisant que les auteurs de reconnaissance devront être informés de ces éléments. Nous souhaitons préciser à cet égard qu'il devra s'agir d'une information effective, qui pourra prendre la forme d'une mention orale ou de la délivrance d'un document en français et, le cas échéant, dans une autre langue, pour tenir compte de la proportion importante d'étrangers établis à Mayotte.

Toujours dans cette optique, l'article 4 prévoit d'allonger, en cas de suspicion de fraude, la durée du sursis à enregistrement de la reconnaissance prononcé par le procureur de la République, de façon à laisser davantage de temps d'enquête pour confirmer ou infirmer le caractère frauduleux d'une déclaration.

Enfin, l'article 5 tend à aggraver la peine d'amende encourue en cas de reconnaissance frauduleuse de paternité ou de maternité.

En raison d'une situation sécuritaire dégradée et de l'inquiétant niveau de violences par usage des armes blanches à Mayotte - le taux de vols avec armes y est 24 fois supérieur à la moyenne nationale -, le projet de loi prévoit deux régimes propres à Mayotte accentuant les pouvoirs de police du préfet en cas de risques de troubles graves à l'ordre public.

Premièrement, l'article 11 permet, sur autorisation du juge des libertés et de la détention (JLD), de procéder à des visites domiciliaires afin de saisir les armes qui seraient détenues par une personne susceptible de participer à ces troubles.

Deuxièmement, l'article 12 donne au préfet la possibilité d'ordonner la remise à l'autorité pour un temps limité, de tous types d'armes, y compris celles qui ne sont soumises ni à autorisation ni à déclaration lorsqu'elles sont susceptibles de constituer un danger pour la sécurité publique.

Le projet de loi comporte également des dispositions adaptant le droit commun de certaines opérations de police au contexte spécifique des « bangas », qui rendent concrètement impossibles les opérations visant des lieux enclavés au sein de structures qui, bien qu'érigées sans droit ni titre, sont protégées en tant que « domiciles ». Le texte prévoit que les agents chargés de la lutte contre le travail illégal pourront, sur autorisation du juge des libertés et de la détention, traverser ces éléments d'habitat informel lorsque cela sera nécessaire pour rejoindre un lieu dont le contrôle aura été requis par le procureur de la République. Les nouvelles visites domiciliaires bénéficient d'un dispositif comparable.

Le projet de loi comporte un article spécifique au recensement, qui constitue un préalable à la définition de politiques publiques adaptées aux besoins de la population. Or à Mayotte, du fait de l'ancienneté du dernier recensement, qui date de 2017, et du dynamisme démographique de l'archipel, l'évaluation du nombre d'habitants suscite des débats parfois vigoureux. Des opérations de recensement étaient menées depuis 2021 et devaient aboutir à un chiffre consolidé en 2025, mais le passage du cyclone Chido a rendu caduc l'ensemble de ces opérations. Afin de répondre à cette urgence, l'article 14 prévoit de mener un recensement exhaustif exceptionnel, dont les chiffres seront publiés en 2026.

Les dispositions relatives à la jeunesse tiennent en deux articles. L'article 26 vise à encourager la mobilité des lycéens mahorais en leur ouvrant le bénéfice du passeport pour la mobilité des études, une aide qui consiste en la prise en charge des frais de transport vers le lieu de la formation. L'article 27 crée un fonds de soutien aux communes de Mayotte pour le développement des activités périscolaires à l'école primaire.

Pour remédier au manque d'attractivité de la fonction publique à Mayotte, les articles 28 et 29 prévoient respectivement l'introduction d'une priorité de mutation et d'un avantage spécifique d'ancienneté au bénéfice de certains fonctionnaires établis à Mayotte.

Enfin, le projet de loi prévoit une évolution du statut de la collectivité de Mayotte, réclamée de longue par les élus mahorais.

Cette évolution consiste, d'une part, en une modernisation du schéma et du fonctionnement institutionnels de Mayotte visant à affirmer son statut de collectivité unique d'outre-mer, à l'instar des collectivités de Guyane et de Martinique. En effet, alors que la collectivité exerce à la fois les compétences d'un département et d'une région d'outre-mer, son statut demeure largement marqué par le modèle départemental.

La réforme projetée vise notamment à instaurer une véritable assemblée de Mayotte, qui élirait en son sein un président et serait assistée par un conseil économique, social, environnemental, de la culture et de l'éducation.

Dans cette perspective, l'article 30 comportait une demande d'habilitation destinée à autoriser le Gouvernement à procéder à cette réforme par voie d'ordonnance.

Nous avons estimé qu'il n'était pas souhaitable de procéder à une telle réforme par voie d'ordonnance, compte tenu de l'importance qu'elle revêt pour l'avenir du territoire. Aussi, à notre demande, le Gouvernement a-t-il déposé hier un amendement visant à inscrire directement la réforme envisagée dans le projet de loi. Nous saluons cette initiative et vous proposons d'adopter cet amendement, qui va dans le bon sens et qui est attendu par la population mahoraise.

Compte tenu de l'ampleur de la réforme envisagée et du délai très court dont nous disposions pour examiner cet amendement de plus de 22 pages, nous vous proposerons sans doute de nouveaux ajustements en vue de la séance publique.

Par ailleurs, l'article 31 tend à réformer le régime électoral applicable aux futurs « conseillers à l'assemblée de Mayotte ».

Il prévoit de porter à 52 le nombre de membres de l'assemblée de Mayotte, qui seraient élus au scrutin de liste proportionnel à la plus forte moyenne, avec attribution à la liste arrivée en tête d'une prime majoritaire de 25 % des sièges, sur la base d'une circonscription unique divisée en cinq sections correspondant au périmètre des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) du territoire.

Cette évolution nous paraît de nature à améliorer la représentation de la population mahoraise et le fonctionnement de la collectivité, en la rapprochant des régimes applicables dans les autres collectivités uniques régies par l'article 73 de la Constitution.

Toutefois, afin de garantir une représentation plus équilibrée des différents territoires de Mayotte dans leur diversité, nous vous proposons un amendement visant à diviser en 13 sections - plutôt que 5 - la circonscription électorale, en reprenant le périmètre des actuels cantons.

Ce modèle permet, nous semble-t-il, de conjuguer au mieux les objectifs de représentation du territoire et de stabilité de l'assemblée, indispensables pour conduire de véritables projets communs, essentiels pour l'avenir de l'archipel.

S'agissant du projet de loi organique, il se contente d'opérer les coordinations rendues nécessaires par la réforme institutionnelle que nous venons d'évoquer. Nous vous proposons donc de l'adopter, sous réserve de quelques ajustements rédactionnels.

M. Olivier Bitz, rapporteur. - Mes chers collègues, la crise que connaît Mayotte n'est pas nouvelle : avant même le passage du cyclone Chido, les difficultés y étaient considérables, qu'il s'agisse de la situation démographique, de la pression migratoire, de l'insécurité, du manque d'infrastructures ou de l'économie - le cyclone les a encore aggravées.

Il y a désormais urgence à ce que des résultats concrets soient obtenus. En dépit des plans qui se sont succédé, l'incapacité de l'État à permettre une amélioration durable de la situation de l'archipel nourrit un sentiment d'abandon, voire de défiance, des Mahorais, qui était prégnant avant même le cyclone Chido.

Dans cette perspective, ce projet de loi a le mérite de porter une approche globale et ambitieuse, même si certaines de ses dispositions peuvent paraître anecdotiques. Mais aucun projet de loi ne suffira à répondre aux défis auxquels fait face Mayotte : il faut pour ce faire une politique vigoureuse, cohérente, menée dans la durée et qui associe la population et les élus. Nous le devons à nos compatriotes mahorais !

M. Marc-Philippe Daubresse. - J'ai l'impression que ce projet de loi n'est qu'un inventaire à la Prévert. Vous avez eu raison de souligner qu'il conviendra de mesurer l'efficience des nombreux dispositifs présentés, s'agissant notamment de la gouvernance.

À cet égard, permettez-moi de citer un exemple concret. La semaine dernière, j'ai auditionné les dirigeants d'Action Logement dans le cadre d'une mission que j'effectue pour le Gouvernement. Souvenez-vous, le Premier ministre avait annoncé vouloir reconstruire Mayotte en trois ans, puis en deux ans. Le préfet François-Xavier Bieuville et l'équipe missionnée par le ministre d'État sont en train de mobiliser toutes les forces pour construire des logements sociaux, notamment à destination des populations régulières mahoraises. Or, eu égard à la complexité et à la multiplicité des règles d'urbanisme, les administrations ne donnent pas les autorisations demandées.

Selon les organismes de logements sociaux, d'ici à deux ans, quasiment aucune construction ne pourra voir le jour. Mais, pendant ce temps, des préfabriqués et des groupes de climatisation chinois sont en train de s'installer sur la colline. Autrement dit, si l'on ne change pas la gouvernance, quasiment rien ne sera fait pour les populations en situation régulière, tandis que les habitats pour les populations en situation irrégulière réapparaîtront, puisqu'ils ne sont pas soumis à réglementation.

Au-delà des problématiques d'urbanisme, il est essentiel de prévoir une gouvernance centralisée accrue, afin que le préfet dirige l'ensemble des services de l'État, y compris sur certaines agences.

Mme Corinne Narassiguin. - Je remercie nos deux rapporteurs pour le travail conséquent qu'ils ont réalisé, et je partage évidemment les grands objectifs du texte. Notre préoccupation principale reste toutefois l'efficacité. Ces dernières années, la politique menée à Mayotte, marquée par les difficultés liées à l'immigration irrégulière, s'est trop souvent traduite par une volonté de réduire l'attractivité du territoire sous tous ses aspects. On n'a pas suffisamment investi dans les infrastructures, les services publics, le développement économique, et ce sont les Mahorais qui en ont pâti. Il est temps que cela change.

Mme Salama Ramia. - Les rapporteurs ont bien cerné les principaux enjeux de la refondation de Mayotte.

Je souhaite toutefois revenir sur l'article 19, et tenter d'expliquer l'opposition des Mahorais. Ils ne refusent pas, par principe, l'expropriation, et sont prêts à céder leurs terrains lorsqu'il est question d'utilité publique. Mais la question du foncier pose vraiment problème : dans ma commune, comme dans beaucoup d'autres, 70 % des terrains sont occupés sans titre. Des familles y vivent depuis plusieurs générations, dans des maisons construites au fil du temps. Qui sera considéré comme propriétaire ? Qui sera indemnisé ? La population craint que l'on accélère la procédure sans leur offrir de garanties.

Consultée par le Gouvernement, j'ai proposé des modifications de cet article, mais la population y reste opposée, de même que les élus - une délibération du conseil départemental de Mayotte demande expressément sa suppression.

En outre, pourquoi tant d'acharnement sur le titre de séjour territorialisé ? Mayotte est aujourd'hui en grande difficulté. Depuis le cyclone Chido, les infrastructures sont à terre, l'hôpital fonctionne à peine. Pourquoi vouloir interdire à une population d'environ 100 000 personnes, disposant d'un titre de séjour en règle, de circuler librement en France ?

Début 2024, le ministre de l'intérieur de l'époque, Gérald Darmanin, avait annoncé un plan en trois phases à la population et aux élus : d'abord, durcir l'accès à la nationalité - cela a été fait - ; ensuite, sécuriser l'archipel - le fameux « rideau de fer », pour lequel des moyens ont été promis - ; enfin, mettre fin au titre de séjour territorialisé.

Aujourd'hui, cette dernière étape semble remise en cause, au nom d'un risque d'appel d'air. On évoque la solidarité européenne pour l'accueil des migrants, mais, à Mayotte, cette solidarité semble s'arrêter aux frontières de l'archipel.

Mme Agnès Canayer, rapporteur. - Monsieur Daubresse, les grands esprits se rencontrent : nous avons précisément déposé des amendements qui visent à donner au préfet autorité sur tous les services déconcentrés de l'État à Mayotte, y compris les agences. L'objectif est de garantir une coordination efficace, une parole unique et le respect du calendrier de reconstruction fixé entre 2025 et 2031.

Nous serons également particulièrement vigilants sur le suivi et l'évaluation de la mise en oeuvre du programme de refondation. Des engagements ont été pris à hauteur de 3,2 milliards d'euros. Nous avons demandé que la pluriannualité de ces crédits soit précisée afin de disposer d'une vision claire de l'échelonnement des dépenses. Nous avons également prévu, dans le rapport annexé, de renforcer les modalités de contrôle du suivi pour répondre au reproche récurrent exprimé par les Mahorais d'un écart entre les annonces politiques et leur concrétisation.

M. Olivier Bitz, rapporteur. - Je tiens tout d'abord à remercier notre collègue Salama Ramia pour l'exigence avec laquelle elle défend les intérêts de son territoire dans cette assemblée.

Le rejet par les Mahorais de la procédure de prise de possession anticipée prévue à l'article 19 me semble reposer sur une forme d'incompréhension. Cette procédure, qui existe dans le droit en vigueur, peut déjà être mobilisée pour certains projets d'intérêt public nécessitant une réalisation rapide.

La situation de Mayotte est telle que l'État doit pouvoir réaliser dans les meilleurs délais les équipements indispensables pour l'archipel. Par ailleurs, les droits des propriétaires seront préservés. La première étape de l'expropriation, qui consiste à identifier le propriétaire du terrain et à engager la déclaration d'utilité publique (DUP), se déroulera comme prévu dans le droit commun.

La seule accélération concernera la seconde étape, à savoir la fixation du montant de l'indemnité. Dans le droit commun, l'expropriation ne se réalise concrètement qu'une fois le montant de l'indemnité fixé par le juge. En revanche, dans la procédure de prise de possession anticipée, on permet aux pouvoirs publics de prendre possession du bien immobilier avant le versement de l'indemnité. En attendant l'intervention définitive du juge de l'expropriation, une indemnité provisoire, au moins équivalente à la valeur du bien estimée par les évaluateurs du Domaine, sera versée au propriétaire lors de la prise de possession. Elle lui permettra de faire face à ses besoins immédiats, notamment pour se reloger ou acheter un terrain.

La procédure est donc entourée de garanties, et elle permettra de gagner un temps considérable par rapport à la procédure de droit commun.

J'entends les inquiétudes que vous relayez fort justement, mais il me semble que l'État a réellement besoin de cette mesure. On ne peut pas exiger de lui qu'il agisse vite et, dans le même temps, le priver des moyens nécessaires à cette célérité, dans une forme d'injonction paradoxale.

S'agissant maintenant du titre de séjour territorialisé - le « visa Balladur » -, nous avons conscience qu'il est devenu un symbole à Mayotte. Les gouvernements successifs ont affirmé qu'il ne pourrait être supprimé tant que la situation migratoire à Mayotte ne serait pas réglée. Or elle ne l'est manifestement pas, et le projet de loi contient de nouvelles mesures pour tarir les flux migratoires.

Agnès Canayer et moi-même ne pouvons toutefois nous satisfaire de cette situation. L'un de nos amendements prévoit qu'un bilan exhaustif de l'ensemble des mesures dérogatoires en matière migratoire à Mayotte sera réalisé dans un délai de trois ans. Il conviendra alors d'évaluer, objectivement, si ces dispositifs - y compris le visa territorialisé - demeurent nécessaires.

Je veux enfin remercier Corinne Narassiguin pour sa contribution, notamment sur la création d'un comité de suivi. Cette proposition, à laquelle nous avons donné suite dans le rapport annexé, nous paraît essentielle pour garantir la mise en oeuvre effective et transparente des engagements pris.

PROJET DE LOI DE PROGRAMMATION POUR LA REFONDATION DE MAYOTTE

EXAMEN DES ARTICLES

Mme Muriel Jourda, présidente. - Mes chers collègues, il me revient à présent de vous indiquer le périmètre indicatif du projet de loi.

En application du vade-mecum sur l'application des irrecevabilités au titre de l'article 45 de la Constitution, adopté par la Conférence des présidents, je vous propose de considérer que ce périmètre inclut les dispositions portant adaptation à Mayotte des règles relatives : à l'entrée et au séjour des étrangers ; à la lutte contre les reconnaissances frauduleuses de paternité et de maternité à la prévention de l'immigration clandestine ainsi qu'à l'éloignement ; aux obligations de vigilance pour les transmissions de fonds à partir d'un versement d'espèces effectuées par des étrangers en situation irrégulière ; à la lutte contre l'habitat informel ; au contrôle des armes ; au régime de visite des locaux ou installations privés installés sans droit ni titre dans le cadre d'opérations de police ; au recensement ; à la poursuite de la convergence sociale ; à la mise en place du régime de retraite complémentaire de l'Ircantec ; aux critères d'ouverture des pharmacies d'officine ; à la représentation des professionnels de santé libéraux mahorais au sein des unions régionales de santé de l'océan indien ; aux conditions d'acquisition foncière, notamment par le biais de l'expropriation pour cause d'utilité publique ou de la prescription acquisitive ; aux règles de la commande publique applicables à la construction de bâtiments ou d'infrastructures ; à la zone franche globale adaptant le régime de la zone franche d'activité nouvelle génération et au soutien de la compétitivité des entreprises ; à la mise en oeuvre de la politique de la ville ; aux compétences de la chambre de l'agriculture, de la pêche et de l'aquaculture de Mayotte ; à la mobilité des élèves et étudiants ; au soutien de l'État au développement des activités périscolaires ; à la mutation et à l'avancement des fonctionnaires de l'État ; aux compétences, à l'organisation et au fonctionnement institutionnel de la collectivité de Mayotte ; au régime électoral applicable à l'élection et au statut des membres de l'assemblée délibérante de la collectivité de Mayotte.

Ce périmètre inclut également les dispositions relatives : à l'action de l'État en faveur de Mayotte dans le cadre de la programmation prévue dans le rapport annexé ; à la répression pénale des fausses déclarations en matière de mariage ou de reconnaissance d'enfants.

Il en est ainsi décidé.

Mme Muriel Jourda, présidente. - Avant d'examiner les amendements sur les articles du projet de loi qui relèvent de notre compétence, je vous propose de prendre acte des résultats des travaux de la commission des affaires économiques sur les articles qui lui ont été délégués, et d'adopter les articles 10, 23 et 24, tels que modifiés par les amendements COM-68, COM-69, COM-70 et COM-71.

Je vous propose également de prendre acte des avis de la commission des affaires sociales et d'adopter les articles 15, 16, 17 et 18, tels que modifiés par les amendements COM-46, COM-47, COM-48 et COM-49, et de déclarer irrecevable l'amendement COM-23.

Je vous propose enfin de prendre acte des avis de la commission des finances et d'adopter l'article 22, tel que modifié par l'amendement COM-11.

Il en est ainsi décidé.

Article 1er (rapport annexé)

M. Olivier Bitz, rapporteur. - L'amendement COM-18 prévoit la remise d'un rapport par le Gouvernement sur le droit du sol. Il est satisfait par notre amendement COM-54, qui prévoit une évaluation des dispositions dérogatoires à Mayotte en matière d'immigration et de nationalité. Avis défavorable.

L'amendement COM-18 n'est pas adopté.

Mme Agnès Canayer, rapporteur. - L'amendement COM-41 prévoit de rendre compte chaque année de l'état d'avancement de la convergence sociale. Il est en partie satisfait par notre amendement COM-67 que nous vous proposerons d'adopter. Avis défavorable.

L'amendement COM-41 n'est pas adopté.

M. Olivier Bitz, rapporteur. - Les amendements COM-26 et COM-27 visent à modifier le rapport annexé afin d'assurer un alignement plus rapide du régime des prestations familiales à Mayotte sur celui de la métropole. Ils sont contraires à la position de la commission des affaires sociales, à laquelle l'article 15 du projet de loi a été délégué au fond. La spécificité de la démographie mahoraise n'appelle pas en outre la mise en oeuvre d'une politique d'alignement des prestations familiales qui encouragerait la natalité. Avis défavorable.

Les amendements COM-26 et COM-27 ne sont pas adoptés.

Mme Agnès Canayer, rapporteur. - L'amendement COM-66 que nous vous soumettons prévoit qu'une programmation annuelle des investissements sera présentée au Parlement avant le 31 décembre 2025.

L'amendement COM-66 est adopté.

M. Olivier Bitz, rapporteur. - L'amendement COM-67 vise à compléter le rapport annexé pour y insérer une partie relative au suivi et à l'évaluation de la loi de programmation.

Dans son rapport intitulé Quel développement pour Mayotte ?, publié en 2022, la Cour des comptes avait relevé que les résultats mitigés des précédents plans en faveur de Mayotte étaient dus en partie à un défaut de pilotage et de suivi.

L'amendement inscrit donc le principe d'une évaluation régulière, associant l'ensemble des acteurs. Il prévoit aussi qu'un rapport intermédiaire soit remis au Parlement à mi-parcours de la période 2025-2031.

Nous sommes aussi favorables au sous-amendement COM-75, qui tend à créer un comité de suivi de la mise en oeuvre de la loi, où siégeraient notamment des parlementaires.

Le sous-amendement COM-75 est adopté. L'amendement COM-67, ainsi sous-amendé, est adopté.

L'article 1er est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Après l'article 1er

Mme Agnès Canayer, rapporteur. - L'amendement COM-51 vise à placer sous l'autorité du préfet de Mayotte tous les services de l'État et de ses établissements publics qui interviennent sur l'archipel.

L'amendement COM-51 est adopté et devient article additionnel.

M. Olivier Bitz, rapporteur. - L'amendement COM-10 rectifié bis est satisfait par le sous-amendement COM-75, que nous venons d'adopter. Avis défavorable.

L'amendement COM-10 rectifié bis n'est pas adopté.

Mme Agnès Canayer, rapporteur. - L'amendement COM-44 rectifié est en partie satisfait par l'amendement COM-67. Avis défavorable.

L'amendement COM-44 rectifié n'est pas adopté.

Article 2

M. Olivier Bitz, rapporteur. - Les amendements identiques COM-6 rectifié et COM-12 visent à supprimer l'article 2 du projet de loi, qui renforce les conditions de délivrance des titres de séjour « parents d'enfants français » et « liens personnels et familiaux ». L'avis est évidemment défavorable.

Les amendements identiques COM-6 et COM-12 ne sont pas adoptés.

Mme Agnès Canayer, rapporteur. - L'amendement COM-52 vise à renforcer le dispositif dit de la « double contribution » créé par la loi du 10 septembre 2018.

L'amendement COM-52 est adopté.

M. Olivier Bitz, rapporteur. - Notre amendement COM-53 vise à préciser que la durée de résidence sur le territoire national pour la délivrance à Mayotte d'une carte de résident s'entend d'une résidence ininterrompue.

L'amendement COM-53 est adopté.

L'article 2 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Après l'article 2

Mme Agnès Canayer, rapporteur. - L'amendement COM-54 vise à demander au Gouvernement, dans un délai de trois ans à compter de la publication de la présente loi, un rapport évaluant les dispositions dérogatoires en matière d'immigration et de nationalité applicables à Mayotte.

L'amendement COM-54 est adopté et devient article additionnel.

M. Olivier Bitz, rapporteur. - Les amendements identiques COM-5 rectifié bis, COM-19 rectifié et COM-29 visent à supprimer le titre de séjour territorialisé. Avis défavorable.

Les amendements identiques COM-5 rectifié bis, COM-19 rectifié et COM-29 ne sont pas adoptés.

Article 3

Mme Agnès Canayer, rapporteur. - L'amendement COM-55 tend à préciser la rédaction du dispositif et vise également à garantir l'efficacité de la lutte contre les reconnaissances frauduleuses de paternité et de maternité.

L'amendement COM-55 est adopté.

L'article 3 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Articles 4, 5 et 6

Les articles 4, 5 et 6 sont successivement adoptés sans modification.

Article 7

M. Olivier Bitz, rapporteur. - Les amendements identiques COM-7 rectifié et COM-13 visent à supprimer l'article 7, qui crée un régime spécifique de rétention des familles avec des mineurs à Mayotte. Compte tenu du caractère massif de l'immigration familiale et de l'ampleur des reconnaissances frauduleuses de paternité, ce serait là un frein majeur de l'éloignement des étrangers en situation irrégulière. Avis défavorable.

Les amendements identiques COM-7 rectifié et COM-13 ne sont pas adoptés.

Mme Agnès Canayer, rapporteur. - L'amendement COM-56 que nous vous soumettons vise à clarifier la rédaction de l'article L. 741-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Afin de répondre à une difficulté qui nous a été signalée par les services de la préfecture, il autorise la prorogation du placement en rétention pour vingt-quatre heures supplémentaires dans un cas très particulier, « en cas d'impossibilité matérielle de procéder à l'éloignement pour une raison étrangère à l'administration », soit lorsque des intempéries contraignent à reporter l'exécution de l'éloignement qui, en direction des Comores, se fait par la voie maritime.

L'amendement COM-56 est adopté.

M. Olivier Bitz, rapporteur. - L'amendement COM-57 vise à reporter l'entrée en vigueur de l'article 7 au 1er janvier 2027, soit à la date à laquelle l'interdiction de la rétention des mineurs doit entrer en vigueur à Mayotte. Son adoption ferait tomber l'amendement COM-14.

L'amendement COM-57 est adopté. En conséquence, l'amendement COM-14 devient sans objet.

L'article 7 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Article 8

Mme Agnès Canayer, rapporteur. - Les amendements identiques COM-8 rectifié et COM-15 tendent à supprimer l'article 8, qui vise à permettre le retrait du titre de séjour d'un parent étranger lorsque son enfant constitue une menace pour l'ordre public. Ce dispositif nous semble nécessaire à Mayotte en raison de l'explosion de la délinquance des mineurs. Avis défavorable.

Les amendements identiques COM-8 rectifié et COM-15 ne sont pas adoptés.

L'amendement rédactionnel COM-58 est adopté.

Mme Agnès Canayer, rapporteur. - L'amendement COM-16 tend à interdire le retrait d'une carte de résident ou d'une carte de résident permanent sur le fondement de l'article 8. Celui-ci prévoit déjà une forme de protection en faveur des titulaires de ces titres de séjour. D'une part, le retrait ne peut intervenir que lorsque le comportement du mineur constitue une menace grave pour l'ordre public. D'autre part, ils ne pourront pas faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français (OQTF), puisqu'un autre document de séjour provisoire, moins protecteur, leur sera délivré de droit. Il ne nous semble donc pas justifié de conférer une immunité aux titulaires d'une carte de résident ou de résident permanent. Avis défavorable.

L'amendement COM-16 n'est pas adopté.

L'amendement rédactionnel COM-59 est adopté.

Mme Agnès Canayer, rapporteur. - L'amendement COM-60 vise à supprimer le caractère temporaire de la faculté de retirer le titre de séjour d'un étranger à raison du comportement de son enfant mineur.

L'amendement COM-60 est adopté.

L'article 8 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Article 9

M. Olivier Bitz, rapporteur. - L'amendement COM-1 rectifié bis vise à supprimer l'article 9. Nous devons tenir compte de la part importante de l'économie informelle, de l'immigration clandestine et des flux financiers massifs en direction des Comores. Avis défavorable.

L'amendement COM-1 rectifié bis n'est pas adopté.

L'amendement rédactionnel COM-62 est adopté.

M. Olivier Bitz, rapporteur. - L'amendement COM-61 vise à créer un délit punissant le fait, pour un Français ou un ressortissant étranger en situation régulière, de faire procéder à une telle opération pour le compte d'un étranger en situation irrégulière, et ainsi de faire échec à la mise en oeuvre, par les prestataires de services de paiement, de leur obligation de vigilance.

L'amendement COM-61 est adopté.

L'article 9 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Article 10 (délégué)

Les amendements COM-68, COM-70 et COM-69 sont adoptés. Les amendements COM-50 et COM-20 ne sont pas adoptés.

L'article 10 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Article 11

L'amendement rédactionnel COM-63 est adopté.

L'article 11 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Articles 12, 13 et 14

Les articles 12, 13 et 14 sont successivement adoptés sans modification.

Article 15 (délégué)

Les amendements COM-46 et COM-47 sont adoptés. Les amendements COM-25, COM-22 et COM-24 ne sont pas adoptés.

Mme Muriel Jourda, présidente. - En application de l'article 44 bis, alinéa 3 bis, du Règlement du Sénat : « Les amendements présentés par les sénateurs ne sont pas recevables s'ils tendent à autoriser le Gouvernement à prendre par ordonnances des mesures qui sont normalement du domaine de la loi, à rétablir ou à étendre une telle autorisation. » L'examen de cette recevabilité incombe, en vertu de l'alinéa 8 de cet article, à la commission saisie au fond.

Sur la proposition de la commission des affaires sociales, à laquelle l'examen de l'article 15 du projet de loi a été délégué au fond, je vous propose de déclarer irrecevable l'amendement COM-23, qui tend à étendre le champ de l'habilitation à légiférer par ordonnance prévue par ce même article.

L'amendement COM-23 est déclaré irrecevable en application de l'article 38 de la Constitution.

L'article 15 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Après l'article 15 (délégué)

L'amendement COM-37 n'est pas adopté.

Article 16 (délégué)

L'article 16 est adopté sans modification.

Article 17 (délégué)

L'amendement COM-48 est adopté.

L'article 17 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Après l'article 17 (délégué)

L'amendement COM-28 n'est pas adopté.

Article 18 (délégué)

L'amendement COM-49 est adopté.

L'article 18 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Article 19

M. Olivier Bitz, rapporteur. - Les amendements identiques COM-21 et COM-40 visent à supprimer la possibilité, pour les personnes publiques, de recourir à la procédure de prise de possession anticipée pour reconstruire Mayotte. Nous y sommes défavorables, pour les raisons que j'ai précédemment indiquées.

Les amendements identiques COM-21 et COM-40 ne sont pas adoptés.

Mme Agnès Canayer, rapporteur. - L'amendement COM-30 vise à exclure les terrains bâtis constituant une résidence principale du champ de la prise de possession anticipée. Cette disposition pourrait totalement bloquer la réalisation des infrastructures. Avis défavorable.

L'amendement COM-30 n'est pas adopté.

L'article 19 est adopté sans modification.

Articles 20 et 21

Les articles 20 et 21 sont successivement adoptés sans modification.

Article 22 (délégué)

L'amendement COM-11 est adopté. L'amendement COM-32 n'est pas adopté.

L'article 22 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Après l'article 22 (délégué)

Les amendements identiques COM-3 rectifié et COM-35 rectifié ne sont pas adoptés, non plus que les amendements identiques COM-4 rectifié et COM-38 rectifié.

Article 23 (délégué)

L'amendement COM-71 est adopté.

L'article 23 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Article 24 (délégué)

L'article 24 est adopté sans modification.

Articles 25, 26, 27, 28 et 29

Les articles 25, 26, 27, 28 et 29 sont successivement adoptés sans modification.

Article 30

M. Olivier Bitz, rapporteur. - L'amendement COM-72 a pour objet d'intégrer directement dans la loi les dispositions d'ordre institutionnel relatives à Mayotte, et d'abandonner par conséquent l'habilitation du Gouvernement à prendre de telles dispositions par voie d'ordonnance. Nous nous réjouissons de cette initiative, dont nous discuterons plus amplement en séance.

L'amendement COM-72 est adopté. En conséquence, l'amendement COM-17 rectifié devient sans objet.

L'article 30 est ainsi rédigé.

Article 31

Mme Agnès Canayer, rapporteur. - L'amendement COM-9 rectifié prévoit de mettre en place, à Mayotte, un scrutin de liste au sein d'une circonscription électorale unique, sans sectionnement. Nous lui préférons notre amendement COM-64, qui tend à remplacer les cinq sections proposées par le texte du Gouvernement par treize sections, correspondant aux actuels cantons dans lesquels sont élus les conseillers départementaux de Mayotte.

L'amendement COM-64 est adopté. En conséquence, l'amendement COM-9 rectifié n'a plus d'objet.

L'article 31 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Après l'article 31

M. Olivier Bitz, rapporteur. - L'amendement COM-45 prévoit une consultation obligatoire des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) de Mayotte sur les projets de loi, d'ordonnance ou de décret comportant des dispositions relatives à leurs compétences. Cette procédure serait excessivement lourde et elle dévaloriserait le rôle de la collectivité unique. Avis défavorable.

L'amendement COM-45 n'est pas adopté.

Article 32

L'amendement rédactionnel COM-65 est adopté.

L'article 32 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Article 33

M. Olivier Bitz, rapporteur. - L'amendement COM-73 prévoit des coordinations relatives aux modalités d'entrée en vigueur de la réforme électorale et institutionnelle de la collectivité de Mayotte. Avis favorable.

L'amendement COM-73 est adopté.

L'article 33 est ainsi rédigé.

Article 34

Mme Agnès Canayer, rapporteur. - L'amendement COM-74 prévoit des coordinations relatives aux modalités d'entrée en vigueur de la réforme électorale et institutionnelle de la collectivité de Mayotte. Avis favorable.

L'amendement COM-74 est adopté.

L'article 34 est ainsi rédigé.

Mme Catherine Di Folco. - Dans l'amendement COM-65, pourquoi est-il question de conseillers généraux, et non de conseillers départementaux ?

M. Olivier Bitz, rapporteur. - Je vous remercie de votre vigilance. Cet amendement vise à modifier des dispositions du code électoral qui emploient encore le terme de conseillers généraux. Il s'agit donc d'une question de cohérence rédactionnelle.

Le projet de loi est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

PROJET DE LOI ORGANIQUE RELATIF AU DÉPARTEMENT-RÉGION DE MAYOTTE

EXAMEN DES ARTICLES

Mme Muriel Jourda, présidente. - Nous en venons désormais à l'examen des articles du projet de loi organique relatif au Département-Région de Mayotte.

Il me revient au préalable de vous indiquer le périmètre indicatif de ce projet de loi. En application du vade-mecum sur l'application des irrecevabilités au titre de l'article 45 de la Constitution, adopté par la Conférence des présidents, je vous propose de considérer que ce périmètre inclut les dispositions relatives aux adaptations des dispositions de nature organique rendues nécessaires par les réformes, prévues par le projet de loi de programmation pour la refondation de Mayotte, du fonctionnement institutionnel de la collectivité de Mayotte et du régime électoral applicable à l'élection de son assemblée délibérante.

Il en est ainsi décidé.

Articles 1er et 2

Les articles 1er et 2 sont successivement adoptés sans modification.

Article 3

L'amendement rédactionnel COM-1 est adopté.

L'article 3 est ainsi rédigé.

Articles 4 et 5

Les articles 4 et 5 sont successivement adoptés sans modification.

Le projet de loi organique est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Le sort des amendements examinés par la commission est retracé dans le tableau suivant :

PROJET DE LOI DE PROGRAMMATION POUR LA REFONDATION DE MAYOTTE

Auteur

Objet

Sort de l'amendement

TITRE IER : OBJECTIFS DE L'ACTION DE L'ÉTAT POUR MAYOTTE

RAPPORT ANNEXÉ

Mme Mélanie VOGEL

18

Remise d'un rapport au Parlement sur le droit du sol et l'accès à la nationalité à Mayotte

Rejeté

Mme RAMIA

41

État annuel d'avancement de la convergence sociale 

Rejeté

Mme PONCET MONGE

26

Suppression du report de la convergence pour certaines prestations sociales

Rejeté

Mme PONCET MONGE

27

Alignement à Mayotte du régime des prestations familiales 

Rejeté

Mme CANAYER, rapporteur

66

Remise d'une programmation annuelle des investissements avant le 31 décembre 2025

Adopté

Mme CANAYER, rapporteur

67

Évaluation de la mise en oeuvre de la programmation

Adopté

Mme NARASSIGUIN

75

Création d'un comité de suivi

Adopté

Article(s) additionnel(s) après Article 1er

Mme CANAYER, rapporteur

51

Autorité du préfet de Mayotte sur l'ensemble des services de l'État 

Adopté

Mme NARASSIGUIN

10 rect. bis

Création d'un comité de suivi de la loi

Rejeté

Mme RAMIA

44 rect.

Rapport sur l'état d'avancement de la loi

Rejeté

TITRE II : LUTTER CONTRE L'IMMIGRATION CLANDESTINE ET L'HABITAT ILLÉGAL

Chapitre Ier : Durcir les conditions d'accès au séjour en les adaptant à la situation particulière de Mayotte

Article 2

Mme NARASSIGUIN

6 rect.

Suppression de l'article

Rejeté

Mme Mélanie VOGEL

12

Suppression de l'article

Rejeté

Mme CANAYER, rapporteur

52

Exigence de justification de la contribution effective à l'entretien et à l'éducation de l'enfant exigée du parent ayant effectué la reconnaissance de paternité ou de maternité pour la délivrance de la carte de séjour temporaire "parent d'enfant français"

Adopté

Mme CANAYER, rapporteur

53

Précision que la durée de résidence de cinq ans sur le territoire national pour la délivrance de la carte de résident s'entend d'une résidence ininterrompue

Adopté

Article(s) additionnel(s) après Article 2

Mme CANAYER, rapporteur

54

Demande de rapport évaluant les dispositions dérogatoires en matière d'immigration et de nationalité à Mayotte

Adopté

Mme NARASSIGUIN

5 rect. bis

Suppression du titre de séjour territorialisé

Rejeté

Mme Mélanie VOGEL

19 rect.

Suppression du titre de séjour territorialisé

Rejeté

Mme RAMIA

29

Suppression du titre de séjour territorialisé

Rejeté

Chapitre II : Améliorer les dispositifs de lutte contre les reconnaissances frauduleuses de paternité et de maternité

Article 3

Mme CANAYER, rapporteur

55

Amendement de précision rédactionnelle

Adopté

Chapitre III : Mieux lutter contre l'immigration irrégulière et faciliter l'éloignement

Article 7

Mme NARASSIGUIN

7 rect.

Suppression de l'article 

Rejeté

Mme Mélanie VOGEL

13

Suppression de l'article 

Rejeté

Mme CANAYER, rapporteur

56

Nouvelle rédaction de l'article L. 741-5 du CESEDA et possibilité de prolonger de vingt-quatre heures le placement en rétention

Adopté

Mme CANAYER, rapporteur

57

Report de l'entrée en vigueur au 1er janvier 2027

Adopté

Mme Mélanie VOGEL

14

Application limitée jusqu'au 1er janvier 2027

Tombé

Article 8

Mme NARASSIGUIN

8 rect.

Suppression de l'article 

Rejeté

Mme Mélanie VOGEL

15

Suppression de l'article

Rejeté

Mme CANAYER, rapporteur

58

Amendement rédactionnel et correction d'une erreur de référence

Adopté

Mme Mélanie VOGEL

16

Suppression de la faculté de retirer une carte de résident ou une carte de résident permanent

Rejeté

Mme CANAYER, rapporteur

59

Amendement rédactionnel

Adopté

Mme CANAYER, rapporteur

60

Suppression du caractère temporaire du dispositif

Adopté

Article 9

Mme NARASSIGUIN

1 rect. bis

Suppression de l'article 

Rejeté

Mme CANAYER, rapporteur

62

Amendement rédactionnel

Adopté

Mme CANAYER, rapporteur

61

Création d'un délit réprimant le contournement du dispositif

Adopté

Chapitre IV : Renforcer la lutte contre l'habitat informel

Article 10

Mme GUHL

50

Suppression de l'article

Rejeté

Mme ARTIGALAS

20

Suppression des alinéas concernant l'évacuation des bidonvilles en raison de risques graves pour la salubrité, la sécurité ou la tranquillité publiques.

Rejeté

Mme JACQUES, rapporteur pour avis

68

Précision rédactionnelle.

Adopté

Mme JACQUES, rapporteur pour avis

70

Prise en compte des circonstances locales dans l'assouplissement de l'obligation de proposer un relogement ou un hébergement lors de l'évacuation d'un bidonville.

Adopté

Mme JACQUES, rapporteur pour avis

69

Encadrement du caractère suspensif du recours contre un arrêté d'évacuation ou de démolition afin d'accélérer la mise en oeuvre des opérations de résorption des bidonvilles.

Adopté

TITRE III : PROTÉGER LES MAHORAIS

Chapitre Ier : Renforcer le contrôle des armes

Article 11

Mme CANAYER, rapporteur

63

Amendement rédactionnel

Adopté

TITRE IV : FAÇONNER L'AVENIR DE MAYOTTE

Chapitre Ier : Garantir aux Mahorais l'accès aux biens et aux ressources essentiels

Article 15

Mme BONFANTI-DOSSAT, rapporteur pour avis

46

Exclusion de l'aide médicale d'État de l'habilitation à légiférer par ordonnance pour accélérer la convergence sociale à Mayotte

Adopté

Mme PONCET MONGE

23

Élargissement de l'habilitation à légiférer par ordonnance pour étendre la convergence sociale à toutes les prestations de sécurité sociale

Irrecevable art. 44 bis, al. 3 bis RS

Mme BONFANTI-DOSSAT, rapporteur pour avis

47

Exclusion des dispositifs fiscales contribuant à l'amélioration de la compétitivité et de l'emploi de l'habilitation à légiférer par ordonnance pour accélérer la convergence sociale. 

Adopté

Mme PONCET MONGE

25

Précision du fait que l'habilitation à légiférer par ordonnance pour accélérer la convergence sociale portera sur les conditions de durée de séjour pour l'obtention des prestations sociales

Rejeté

Mme LE HOUEROU

22

Précision du fait que les ordonnances prévoyant la convergence sociale seront publiées au plus tard au 1er janvier 2028. 

Rejeté

Mme PONCET MONGE

24

Élargissement de l'habilitation à légiférer par ordonnances à la convergence intégrale du Smic applicable à Mayotte par rapport au Smic de droit commun. 

Rejeté

Article(s) additionnel(s) après Article 15

Mme RAMIA

37

Demande de rapport sur les conséquences du rattrapage social et des mesures portant sur le Smic sur la compétitivité des entreprises mahoraises

Rejeté

Article 17

Mme BONFANTI-DOSSAT, rapporteur pour avis

48

Prise en compte du critère intercommunal lorsque le dernier recensement précède de plus de cinq ans la demande et soumission de la délivrance d'une licence à l'avis conforme de l'ordre national des pharmaciens

Adopté

Article(s) additionnel(s) après Article 17

Mme PONCET MONGE

28

Demande de rapport relatif à l'instauration d'une première année d'études médicales à Mayotte

Rejeté

Article 18

Mme BONFANTI-DOSSAT, rapporteur pour avis

49

Consultation des syndicats obligatoire pour le changement des modalités de représentation des professionnels exerçant à Mayotte

Adopté

Chapitre II : Favoriser l'aménagement durable de Mayotte

Article 19

Mme NARASSIGUIN

21

Amendement de suppression

Rejeté

Mme RAMIA

40

Amendement de suppression

Rejeté

Mme RAMIA

30

Restriction de la possibilité de recourir à la procédure de prise de possession anticipée

Rejeté

Chapitre III : Créer les conditions du développement de Mayotte

Article 22

M. FOUASSIN, rapporteur pour avis

11

Amendement rédactionnel 

Adopté

Mme RAMIA

32

Prise en compte du fonctionnement comptable des sociétés dans l'exonération d'impôt sur les sociétés

Rejeté

Article(s) additionnel(s) après Article 22

Mme MALET

3 rect.

Extension du bénéfice du crédit d'impôt compétitivité emploi jusqu'à 3,5 SMIC

Rejeté

Mme RAMIA

35 rect.

Extension du bénéfice du crédit d'impôt compétitivité emploi jusqu'à 3,5 SMIC

Rejeté

Mme MALET

4 rect.

Extension du bénéfice du CICE y compris sur les salaires dépassant le seuil d'exonération pour la part inférieure à ce seuil

Rejeté

Mme RAMIA

38 rect.

Extension du bénéfice du CICE y compris sur les salaires dépassant le seuil d'exonération pour la part inférieure à ce seuil

Rejeté

Article 23

Mme JACQUES, rapporteur pour avis

71

Précision quant à la date d'échéance du classement des communes de Mayotte en QPV.

Adopté

TITRE V : MODERNISER LE FONCTIONNEMENT INSTITUTIONNEL DE LA COLLECTIVITÉ

Chapitre Ier : Dispositions concernant le code général des collectivités territoriales

Article 30

Le Gouvernement

72

Réforme du fonctionnement institutionnel de la collectivité de Mayotte

Adopté

Mme Mélanie VOGEL

17 rect.

Suppression de l'habilitation du Gouvernement à réformer le fonctionnement institutionnel de la collectivité de Mayotte par ordonnance

Tombé

Chapitre II : Dispositions modifiant le code électoral

Article 31

Mme CANAYER, rapporteur

64

Élection des conseillers à l'assemblée de Mayotte au scrutin de liste sur la base d'une circonscription unique divisée en 13 sections électorales

Adopté

M. OMAR OILI

9 rect.

Élection des conseillers à l'assemblée de Mayotte au scrutin de liste au sein d'une circonscription unique sans sections électorales

Tombé

Article(s) additionnel(s) après Article 31

Mme RAMIA

45

Consultation des EPCI de Mayotte sur les projets de loi, d'ordonnance ou de décret relatifs à leurs compétences

Rejeté

Article 32

Mme CANAYER, rapporteur

65

Amendement rédactionnel

Adopté

Article 33

Le Gouvernement

73

Coordinations relatives aux modalités d'entrée en vigueur de la réforme électorale et institutionnelle de la collectivité de Mayotte

Adopté

TITRE VI : DISPOSITIONS TRANSITOIRES ET FINALES

Article 34

Le Gouvernement

74

Coordinations relatives aux modalités d'entrée en vigueur de la réforme électorale et institutionnelle de la collectivité de Mayotte

Adopté

PROJET DE LOI ORGANIQUE RELATIF AU DÉPARTEMENT-RÉGION DE MAYOTTE

Auteur

Objet

Sort de l'amendement

Article 3

Mme CANAYER, rapporteur

1

Amendement rédactionnel

Adopté

Bilan annuel de l'application des lois - Communication

Mme Muriel Jourda, présidente. - Comme chaque année à cette période, notre commission se penche sur les points saillants de l'application des lois que nous avons été amenés à examiner au fond au cours de l'année parlementaire 2023-2024.

Cet exercice traditionnel vise à opérer une vérification approfondie de l'adéquation entre les mesures législatives que nous votons et les mesures d'application que le Gouvernement est tenu de prendre. C'est aussi l'occasion de prendre un peu de recul sur les conditions souvent difficiles dans lesquelles le Parlement, et particulièrement notre commission, examine les textes de loi. Cet exercice devrait s'achever, au cours du mois de juin prochain, par une audition sur l'application des lois de Patrick Mignola, ministre chargé des relations avec le Parlement.

Au cours de l'année parlementaire 2023-2024, la commission des lois a été amenée à examiner au fond dix-neuf des quarante-neuf lois promulguées, soit 39 % du total, hors traités et conventions internationales. À cela s'ajoutent trois lois dont l'examen au fond de certains articles avait été délégué à notre commission.

Outre ces dix-neuf lois promulguées, l'activité législative de notre commission est demeurée soutenue en 2023-2024, avec l'examen de vingt-trois autres projets et propositions de loi, dont quatre ont été promulgués après le 30 septembre 2024 et ne sont donc pas pris en compte dans le présent état des lieux. Au total, au cours de cette session parlementaire, nous aurons donc examiné quarante-cinq textes, soit plus de six par mois si l'on fait abstraction des périodes de suspension et de la période durant laquelle l'activité législative s'est arrêtée à la suite de la dissolution du 9 juin 2024.

Par ailleurs, nous pouvons nous réjouir du fait que douze des dix-neuf textes promulgués soient d'origine parlementaire, dont quatre émanent du Sénat. Pour les citer in extenso, il s'agit de la proposition de loi visant à réduire les inégalités territoriales pour les ouvertures de casinos présentée par = Catherine Deroche, Stéphane Piednoir, Claude Nougein et plusieurs collègues ; de la proposition de loi visant à revaloriser le métier de secrétaire de mairie présentée par François Patriat et plusieurs de ses collègues ; de la proposition de loi renforçant la sécurité et la protection des maires et des élus locaux présentée par François-Noël Buffet, Françoise Gatel, Mathieu Darnaud, Maryse Carrère, Bruno Retailleau, Hervé Marseille, Jean-Claude Requier et plusieurs collègues ; et de la proposition de loi visant à poursuivre la dématérialisation de l'état civil du ministère de l'Europe et des affaires étrangères présentée par Samantha Cazebonne et plusieurs de ses collègues.

Cette année, parmi les lois examinées au fond par la commission des lois, 84 % des lois promulguées ont été adoptées après engagement de la procédure accélérée, soit seize des dix-neuf textes examinés. Cette procédure a notamment visé la totalité des projets de loi, à l'exception du projet de loi constitutionnelle relative à la liberté de recourir à l'interruption volontaire de grossesse, mais également la majorité des propositions de loi. En moyenne, les seize textes examinés dans le cadre de cette procédure ont été adoptés en 194 jours, contre 127 jours au cours de la session précédente, marquée par le nombre de textes destinés à faire face à des échéances rapprochées, telles que les élections sénatoriales ou les jeux Olympiques et Paralympiques de 2024.

Aussi, ce recours à la procédure accélérée censé demeurer une exception selon la Constitution persiste à nous contraindre à des délais d'examen excessivement resserrés, qui ne sont pas réellement justifiés par l'urgence des circonstances, compromettant ainsi notre capacité à mener le travail d'analyse approfondi garanti par le jeu de la navette parlementaire.

Après vous avoir présenté les particularités de ces dix-neuf lois, j'en viens à présent à leur degré d'application au regard des mesures réglementaires qu'elles prévoient.

Le bilan de cette mise en application apparaît cette année relativement favorable : si près de la moitié des lois promulguées ne sont pas encore pleinement applicables, le pourcentage de mesures d'application restant à prendre à une nouvelle fois a diminué, passant de 34 % en 2021-2022, à 28 % en 2022-2023 et 19 % cette session. Autrement dit, sur les 109 mesures réglementaires prévues par les lois promulguées, 21 n'ont pas encore été prises à la date du 31 mars 2025.

Il faut néanmoins nuancer ce bilan favorable, puisqu'aucune des lois dont l'application n'était pas directe au moment de leur promulgation n'est ensuite devenue pleinement applicable au cours de la période considérée.

En outre, pour la quatrième année consécutive, nous constatons une nette diminution du recours aux ordonnances. La commission des lois n'a examiné que deux habilitations à légiférer par voie d'ordonnances, dans les articles du projet de loi d'orientation et de programmation du ministère de la justice 2023-2027. Cela témoigne de l'effort entrepris par notre commission pour substituer aux habilitations demandées par le Gouvernement des modifications directes des dispositions législatives. C'est d'ailleurs ce que nous venons d'observer au sujet du projet de loi de programmation pour la refondation de Mayotte, la ténacité des rapporteurs ayant permis d'obtenir du Gouvernement qu'il dépose un amendement avant même la séance.

Pour finir, nous ne pouvons que déplorer le fait que, cette année encore, très peu de rapports au Parlement ont été remis sur les quatorze demandés par les lois promulguées. En effet, seuls deux d'entre eux ont été remis, soit un taux de remise de 14 %. Le Gouvernement semble n'avoir que peu d'empressement à fournir les rapports prévus par la loi. Il me semble par conséquent indispensable que notre commission des lois continue à privilégier ses propres travaux d'information et de contrôle pour approfondir certains sujets.

Je tiens à souligner, à cet égard, que notre commission a entrepris de nombreux travaux de contrôle sur la session 2023-2024, lesquels ont abouti à la publication de cinq rapports d'information. À ce titre, l'examen global et statistique de l'application des lois que je vous livre aujourd'hui est voué à être approfondi, pour les textes les plus importants, par des missions d'information dédiées. Cette démarche est illustrée par le rapport d'information sur le bilan de la mise en oeuvre de la loi du 19 mai 2023 relative aux jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 présenté en février dernier par Françoise Dumont et Marie-Pierre de La Gontrie.

Mes chers collègues, voilà donc un bref panorama de la mise en oeuvre des lois que nous avons traité durant la session précédente, mais également un aperçu des travaux qu'il nous reste à entreprendre.

Mme Marie Mercier, rapporteur de la loi renforçant la lutte contre les violences sexuelles et sexistes. - Dans le cadre de notre droit de suivi, il est important que le rapporteur d'une loi puisse disposer d'une évaluation des dispositions votées. L'article 16 de la loi du 3 août 2018 renforçant la lutte contre les violences sexuelles et sexistes visait à lutter contre la captation d'images impudiques. Ces phénomènes sont très fréquents, par exemple dans les lycées, et nous nous souvenons qu'il s'agit là du point de départ de l'affaire Dominique Pelicot. La Chancellerie ne semble pas en mesure de présenter une évaluation de ce texte ; or il est important de savoir si cette disposition est effectivement appliquée ?

Mme Muriel Jourda, présidente. - Nous écrirons à la Chancellerie pour l'obtenir, ma chère collègue.

Mme Agnès Canayer, rapporteur de la loi visant à prévenir les ingérences étrangères en France. - La loi du 25 juillet 2024 visant à prévenir les ingérences étrangères en France n'a reçu aucune mesure d'application. Elle prévoit notamment l'organisation d'un débat au Parlement sur l'état de la menace avant le 1er juillet 2025. Je ne suis pas sûre que ce débat se tiendra, alors qu'il s'agit d'un enjeu important, d'autant plus en raison de la période électorale qui va bientôt s'ouvrir. Ne serait-il pas important d'appeler l'attention du Gouvernement sur ce sujet ?

Mme Muriel Jourda, présidente. - Nous le ferons.

M. Olivier Bitz. - Hier soir, le Président de la République expliquait qu'il restait des décrets d'application à prendre sur la loi pour contrôler l'immigration, améliorer l'intégration.

Mme Corinne Narassiguin. - C'est peu de le dire !

M. Olivier Bitz. - Serait-il possible de disposer d'une étude sur l'application de cette loi et sur les décrets d'application qui restent à prendre ?

Mme Muriel Jourda, présidente. - Cela figurera dans le rapport d'application des lois de cette année.

La réunion, suspendue à 11 heures 20, est reprise à 12 heures 20.

Dépouillement sur la proposition de nomination, par le Président de la République, de M. Christian Charpy aux fonctions de président de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques

La commission procède au dépouillement du scrutin sur la proposition de nomination, par le Président de la République, de M. Christian Charpy aux fonctions de président de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques.

Mme Muriel Jourda, présidente. - Voici le résultat du scrutin, qui sera agrégé à celui de la commission des lois de l'Assemblée nationale :

Nombre de votants : 38

Bulletin blanc : 0

Bulletin nul : 0

Suffrages exprimés : 38

Pour : 37

Contre : 1

Agrégé à celui de la commission des lois de l'Assemblée Nationale, le résultat est le suivant :

Nombre de votants : 75

Bulletin blanc : 4

Bulletin nul : 0

Suffrages exprimés : 71

Seuil des 3/5èmes des suffrages exprimés : 43

Pour : 67

Contre : 4

La réunion est close à 12 heures 30.