Mercredi 28 mai 2025

- Présidence de Mme Muriel Jourda, présidente -

La réunion est ouverte à 9 h 30.

Proposition de loi portant diverses dispositions en matière de gestion des milieux aquatiques et de prévention des inondations (GEMAPI) - Examen du rapport et du texte de la commission

Mme Muriel Jourda, présidente. - Nous commençons nos travaux par l'examen du rapport d'Hervé Reynaud sur la proposition de loi portant diverses dispositions en matière de gestion des milieux aquatiques et prévention des inondations (GEMAPI), en présence de Laurent Somon, rapporteur pour avis de la commission des finances.

M. Hervé Reynaud, rapporteur. - Je vais vous présenter le fruit de mes travaux menés conjointement avec notre collègue Laurent Somon, rapporteur pour avis de la commission des finances, à qui les articles 3 et 4 ont été délégués au fond par la commission des lois, sur la proposition de loi portant diverses dispositions en matière de gestion des milieux aquatiques et de prévention des inondations (GEMAPI), dont les auteurs sont nos collègues Anne Chain-Larché et Pierre Cuypers.

Depuis, le 1er janvier 2018, les intercommunalités à fiscalité propre sont attributaires de la compétence GEMAPI. Pour mémoire, la loi de 2014 de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles dite « MAPTAM » a attribué aux communes une compétence ciblée et obligatoire relative à la GEMAPI, avec un transfert obligatoire aux EPCI à fiscalité propre auxquels elles appartiennent, afin de lutter contre l'émiettement de la compétence et de sa gouvernance. Par la suite, la loi de 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République dite « NOTRe » a fixé au 1er janvier 2018 la date d'effet de ce transfert ; depuis, il s'agit d'une compétence obligatoire et exclusive des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre.

La compétence GEMAPI se répartit en deux socles. D'une part, certaines missions relèvent de la gestion des milieux aquatiques : l'aménagement d'un bassin ou d'une fraction de bassin hydrographique ; l'entretien et l'aménagement d'un cours d'eau, canal, lac ou plan d'eau, y compris leur accès ; la protection et la restauration des sites, des écosystèmes aquatiques et des zones humides, ainsi que des formations boisées riveraines. D'autre part, les missions relèvent de la prévention des inondations.

Toutefois, compte tenu des difficultés de mise en oeuvre concrètes du transfert de cette compétence, le législateur a introduit un certain nombre d'assouplissements au travers du vote de la loi du 30 décembre 2017 relative à l'exercice des compétences des collectivités territoriales dans le domaine de la gestion des milieux aquatiques et de la prévention des inondations, dite « Fesneau-Ferrand », dont le président Mathieu Darnaud était le rapporteur.

Plus précisément, le législateur a souhaité que l'attribution au bloc communal de la compétence GEMAPI laisse aux autres catégories de collectivités territoriales certaines compétences en la matière.

En effet, départements, les régions, leurs groupements et les autres personnes de droit public qui assuraient une ou plusieurs missions relevant de la GEMAPI à la date d'entrée en vigueur de la loi peuvent continuer à les exercer, sans limite de durée, sous réserve de l'accord de l'EPCI par le biais d'une convention conclue pour une durée de cinq ans renouvelables.

Poursuivant la même logique, cette même loi a autorisé les départements et régions qui le souhaitent à demeurer membres des structures syndicales exclusivement compétentes en matière de GEMAPI, auxquelles ils adhéraient à la date du 1er janvier 2018.

Comme de nombreuses compétences, la GEMAPI n'a, dans la plupart des cas, pas vocation à être effectivement exercée à l'échelon communal ou intercommunal, les périmètres administratifs n'étant évidemment pas ceux des bassins versants. C'est pourquoi de nombreux syndicats de communes et syndicats mixtes ont été constitués de longue date pour exercer ces missions à l'échelon pertinent - syndicats de rivière, établissements publics de bassin -, comme vous le savez.

Enfin, le financement de la compétence GEMAPI est assuré par une taxe facultative, plafonnée et affectée, qui peut être instituée par les communes et EPCI à fiscalité propre compétents en matière de GEMAPI. Son produit est exclusivement affecté au financement des charges de fonctionnement et d'investissement liées à l'exercice de cette compétence et ne peut être supérieur au montant prévisionnel de ces charges. Il est également plafonné à 40 euros par habitant.

La proposition de loi qui nous est soumise vise à répondre aux fortes demandes exprimées par les élus locaux qui, face à la multiplication des risques et aux diversités territoriales, souhaitent bénéficier de nouvelles souplesses dans l'exercice de cette compétence.

Partant du constat de « réalités territoriales souvent complexes, de la diversité des acteurs concernés et de la nécessité d'une coordination accrue », selon les termes de l'exposé des motifs, les auteurs de la proposition de loi proposent une évolution du cadre législatif de la GEMAPI, dont deux articles seulement entrent dans le champ de compétence de la commission des lois.

Ces derniers souhaitent, à titre principal, instituer une nouvelle faculté de délégation de tout ou partie de la compétence GEMAPI des EPCI à fiscalité propre aux départements, afin de « permettre une meilleure coordination et à tirer parti des expertises techniques et logistiques des acteurs départementaux ».

À titre plus subsidiaire, à l'article 2, ils ambitionnent de « clarifier la répartition des responsabilités, notamment en matière de gestion des eaux pluviales et de ruissellement » en permettant d'introduire dans le zonage communal ou intercommunal d'assainissement des mesures relatives au ruissellement.

Au travers des auditions denses que nous avons menées - je remercie les collègues qui étaient présents - et comme le soulignent les différents travaux conduits par le Sénat en la matière, nous avons pu relever que, près d'une décennie après sa création, la compétence GEMAPI ne satisfait pas complètement les élus locaux et mérite des correctifs pour s'adapter aux réalités locales, si diverses en la matière.

En particulier, nous avons pu mesurer le caractère parfois poreux des frontières entre la compétence GEMAPI et la compétence gestion des eaux pluviales urbaines (Gepu), car le ruissellement peut, suivant son ampleur, relever de la gestion des eaux pluviales urbaines ou de la prévention des inondations, et ce différemment selon les caractéristiques d'un territoire.

Dès lors, je vous proposerai d'approuver, dans son principe, la proposition de loi qui nous est soumise, car elle permettra d'apporter aux élus locaux de nouveaux outils, facultatifs et adaptés aux réalités de leurs territoires, pour exercer le plus efficacement possible la compétence GEMAPI.

Tout en approuvant l'économie générale de la proposition de loi, je vous proposerai, trois amendements visant à clarifier et à compléter les dispositions qui nous sont soumises.

Ainsi, je vous propose à l'article 1er d'aligner la procédure de délégation de la compétence GEMAPI des EPCI aux départements sur la procédure de délégation de droit commun, en prévoyant l'accord de l'ensemble des communes membres de l'EPCI pour ce faire. Cela garantira le caractère volontaire et facultatif d'une telle délégation, conformément à la volonté des auteurs de la proposition de loi.

Par ailleurs, à l'article 2, il me paraît souhaitable d'expliciter le lien entre les mesures de lutte contre le ruissellement et l'érosion des sols, qui pourraient, à titre facultatif et en fonction des réalités territoriales de chaque intercommunalité, être intégrées dans les zonages relatifs à l'assainissement, afin de garantir que ces mesures n'y soient intégrées que lorsqu'elles présentent un lien réel avec la prévention des inondations.

Enfin, je vous proposerai de compléter cette proposition de loi par un article additionnel visant à ajouter la lutte contre le ruissellement à la liste des domaines dans lesquels le département peut mettre à disposition des communes ou des EPCI, qui ne bénéficient pas des moyens suffisants pour l'exercice de leurs compétences, une assistance technique. Comme je l'ai dit précédemment, la frontière entre la lutte contre le ruissellement et la prévention des inondations étant parfois particulièrement ténue, une telle explicitation apparaît indispensable pour clarifier les domaines d'intervention de chacun.

Je vous propose de poser une nouvelle pierre à l'édifice des libertés locales et des souplesses apportées aux élus locaux en matière de GEMAPI, même si je n'ignore pas que ces travaux ont vocation à être poursuivis et complétés par ceux qui sont menés par nos collègues de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation, Jean-Yves Roux et Rémy Pointereau - leur rapport d'information devrait être publié d'ici l'automne.

Je ne manquerai pas, en séance publique, de m'adresser plus particulièrement au Gouvernement, qui doit également prendre ses responsabilités en matière de solidarité et de risque inondation.

Enfin, je remercie particulièrement mon collègue Laurent Somon pour la qualité du travail que nous avons accompli et pour ses propositions, auxquelles je souscris pleinement.

M. Laurent Somon, rapporteur pour avis de la commission des finances. - La création de la compétence GEMAPI en 2014 par la loi « Maptam » ne s'est pas accompagnée d'un transfert de moyens de l'État. Elle a toutefois donné lieu à l'instauration d'un nouvel impôt local facultatif, la taxe GEMAPI, codifiée à l'article 1350 bis du code général des impôts. Il s'agit d'un impôt de répartition, affecté au financement de cette compétence.

Cette taxe constitue, pour les collectivités, une ressource en progression. En 2018, 428 EPCI la percevaient, contre 665 en 2021, soit un taux de couverture de 53 %. Selon les premières données disponibles, les trois quarts des EPCI auraient levé cette taxe en 2024. Son montant a également augmenté, passant de 6 euros par habitant en 2018 à 7,5 euros en 2021. Le produit global de la taxe GEMAPI aurait ainsi triplé entre 2018 et 2023.

Pour autant, les auditions que nous avons conduites ont mis en lumière un constat partagé par de nombreux élus : la taxe GEMAPI demeure insuffisante. Ce constat est revenu de manière récurrente. Si l'administration évalue le produit potentiel de la taxe à 2,9 milliards d'euros, ce plafond est encore loin d'être atteint. De fortes disparités territoriales subsistent. Les territoires les plus exposés aux risques d'inondation mobilisent cette taxe à un niveau proche du plafond légal de 40 euros par habitant, tandis que d'autres, moins exposés, disposent de marges non exploitées. L'insuffisance de la taxe GEMAPI résulte donc d'une répartition inégale de l'effort fiscal sur le territoire.

L'examen de la présente proposition de loi s'inscrit dans un contexte de forte tension sur la capacité des collectivités territoriales à faire face aux risques d'inondation, en raison de l'insuffisance des moyens dont elles disposent. Le texte a été renvoyé à la commission des lois pour l'examen des articles 1er et 2. Celle-ci a toutefois délégué à la commission des finances l'examen au fond des articles 3 et 4, qui relèvent du volet fiscal.

L'article 3 prévoit la remise d'un rapport par le Gouvernement au Parlement. Ce rapport doit porter sur la mise en oeuvre de la taxe GEMAPI, sur les modalités permettant une répartition plus équitable de son produit sur l'ensemble du territoire, ainsi que sur l'opportunité d'instaurer un fonds de péréquation.

Je le rappelle, le Sénat se montre traditionnellement réservé à l'égard des demandes de rapport adressées au Gouvernement : seuls 20 % d'entre eux sont effectivement remis. J'aurais donc été enclin à formuler directement une proposition de création d'un fonds de péréquation de la taxe GEMAPI, de façon à provoquer un débat de fond et à contraindre le Gouvernement à se positionner, comme l'a d'ailleurs suggéré le rapporteur.

Cependant, à la suite des échanges que nous avons eus avec les auteurs de la proposition de loi, nous avons souhaité respecter leur choix de s'en tenir à une demande de rapport. Cette option permet d'engager une réflexion partenariale avec le Gouvernement, tout en rappelant que la solidarité nationale relève d'abord de sa responsabilité ; nous touchons ici à des missions qui relèvent presque de la sécurité civile.

En conséquence, la commission des finances a proposé d'adopter l'article 3 sans modification.

L'article 4 vise à permettre que les recettes de la taxe GEMAPI puissent désormais financer des actions menées dans le cadre de la compétence relative à la maîtrise des eaux pluviales en zone non urbaine. Or cette compétence ne relève pas du périmètre de la GEMAPI. L'article prévoit également que les personnes à qui la compétence GEMAPI a été transférée puissent reverser tout ou partie du produit de la taxe aux communes, afin qu'elles prennent en charge cette compétence spécifique.

Cette disposition nous paraît particulièrement superflue s'agissant des départements. En effet, l'article 1er de la proposition de loi ouvre la possibilité d'une délégation, et non d'un transfert de compétence au profit des départements. Or, dans le cadre d'une délégation, il est déjà possible de reverser les financements aux communes concernées.

Par ailleurs, il ne nous semble pas que la taxe GEMAPI puisse absorber le coût d'une compétence supplémentaire. Comme je l'ai indiqué précédemment, son produit est aujourd'hui insuffisant pour couvrir l'ensemble des dépenses nécessaires à la prévention des inondations. Plusieurs personnes auditionnées nous ont fait part de leur inquiétude quant à l'intégration de nouvelles missions dans le champ de la GEMAPI, qu'il s'agisse de la gestion des eaux pluviales en zone non urbaine ou de la protection du littoral.

La commission des finances a donc proposé la suppression de cet article.

Mme Audrey Linkenheld. - Je remercie nos rapporteurs pour le travail qu'ils viennent de nous présenter.

Si j'osais une formule, je dirais que la question, en définitive, est de savoir si l'on peut faire ruisseler... le ruissellement. Il est d'ailleurs assez original que le ruissellement, qui constitue en quelque sorte le sujet numéro un en matière de finances, ne relève pas ici de la commission des finances, mais bien de la commission des lois.

Plus sérieusement, je tiens à dire que le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain partage pleinement l'intention qui sous-tend cette proposition de loi : il s'agit de tenter de faciliter la tâche des collectivités territoriales, qui sont malheureusement confrontées à la question des inondations et, plus généralement, à la problématique sensible de la gestion de l'eau.

Cela étant, comme pour d'autres textes, la question qui se pose est la suivante : en cherchant à assouplir ou à simplifier le cadre juridique, ne risque-t-on pas, paradoxalement, d'en accentuer encore la complexité ? Tel est le point de vue de notre groupe, qui rejoint, je crois, celui des rapporteurs, même si ceux-ci ont cherché à répondre à ces inquiétudes par voie d'amendement. Nous sommes donc un peu circonspects.

Il faut bien reconnaître que la question de la compétence GEMAPI est ici traitée par le biais d'une délégation, qui n'est ni un transfert de compétence ni une délégation classique. Les amendements déposés visent à apporter des précisions à ce sujet. Mais une interrogation subsiste : si l'on supprime l'article modifiant la taxe GEMAPI, quel est alors l'intérêt d'élargir une compétence dont les ressources sont d'ores et déjà insuffisantes ? Le produit moyen de cette taxe est aujourd'hui de 8 euros par habitant, alors que le plafond légal est fixé à 40 euros. L'écart est donc significatif.

Pour notre part, nous ne sommes évidemment pas opposés à l'objet du texte. En revanche, s'agissant des rédactions proposées - tant initiales que résultant des amendements -, nous souhaitons nous accorder encore un temps de réflexion. Il convient de vérifier si, au terme de ce travail, le dispositif tourne mieux qu'auparavant. Nous restons, bien entendu, favorables à l'objectif des auteurs.

M. Michel Masset. - Si l'intention des auteurs de ce texte est louable - et il est évident que des clarifications sont nécessaires en matière de compétences -, je me permets néanmoins de vous exposer la situation concrète du Lot-et-Garonne.

Dans ce département, nous subissons entre trois et cinq inondations par an. Le territoire compte onze intercommunalités, qui ont toutes institué la taxe GEMAPI. Malgré cela, les moyens financiers demeurent largement insuffisants. Il faut savoir que, durant les deux premières années d'exercice de la compétence, la taxe a été prélevée à hauteur d'environ 25 euros par habitant, ce qui a permis de constituer une enveloppe globale de 500 000 euros. Or ces deux premières années ont été intégralement consacrées à la réalisation d'études - des études que, je le précise, l'État n'avait jamais conduites - concernant l'endiguement.

Un seul exemple : une première brèche identifiée sur une digue de 700 mètres nécessite une intervention chiffrée à 400 000 euros, soit une somme presque équivalente à la totalité des ressources collectées à l'échelle départementale, alors même que nous n'avons à traiter que 40 kilomètres de berges.

Dès lors, envisager un transfert de la compétence ou de ses ressources par délégation au département revient, pour reprendre une expression imagée, à organiser un mariage entre pauvres. En effet, je ne vois pas en quoi les départements disposeraient de davantage de marges de manoeuvre que les communautés de communes, si les prélèvements restent les mêmes.

Les intercommunalités se sont structurées, elles ont recruté du personnel. Un transfert de personnels pourrait éventuellement être envisagé, mais, à mes yeux, la véritable échelle pertinente n'est pas celle du département. Il s'agit d'une problématique qui doit être appréhendée en amont et en aval du cours d'eau, dans sa globalité, et donc à l'échelle de plusieurs départements, voire à celle de la région.

Par ailleurs, je peux vous assurer que lorsqu'on subit régulièrement des inondations, comme c'est le cas dans le Lot-et-Garonne, on souhaiterait davantage la mise en place d'un impôt ou d'une taxe collective. Car lorsque vous êtes situés en aval, vous ne faites que collecter les eaux provenant des autres territoires. Et pourtant, c'est vous qui êtes inondés.

Alors, pourquoi ne pas chercher à simplifier le dispositif ? Mais il restera toujours, en tout état de cause, la question centrale du financement.

Mme Cécile Cukierman. - La compétence GEMAPI fait couler beaucoup d'eau depuis sa création. Tout le problème est bien là, puisqu'elle devait précisément réduire les risques liés à une maîtrise insuffisante de l'eau.

Nous voterons l'article 1er, qui redonne aux départements la possibilité d'exercer cette compétence. Nous voterons également l'amendement tendant à conforter le rôle du département dans ce cadre.

Si nous souhaitons réellement rendre aux départements toute leur place, y compris dans un rôle dépassant la seule solidarité sociale pour inclure une solidarité territoriale, il est alors cohérent de permettre aux départements d'apporter une assistance technique - et c'est l'objet du texte, même si j'ai entendu les réserves -, précieuse à de nombreuses intercommunalités pour lesquelles ce sujet reste complexe à traiter.

Cela étant, cette proposition de loi et la suppression de l'article 4 ne permettent pas de régler le grand défi que constitue le financement. Ce défi est pourtant bien identifié depuis la création de la taxe GEMAPI et la mise en place de cette compétence. Dans un monde où les catastrophes naturelles se multiplient, où les précipitations deviennent de plus en plus soudaines et massives, les conséquences sont de plus en plus lourdes pour les territoires - nous le constatons malheureusement chaque année dans nos départements.

Je veux le redire ici - et nous aurons l'occasion de le répéter en séance publique -, nous n'émettons aucune réserve de principe sur cette proposition de loi. Toutefois, il faut bien admettre que les difficultés vont perdurer, en raison de l'incapacité structurelle de la taxe GEMAPI à répondre, seule, aux besoins d'investissement nécessaires. Les exemples qui viennent d'être donnés l'illustrent parfaitement : cette taxe, dans son état actuel, ne permet pas de financer les infrastructures indispensables pour préserver nos territoires des catastrophes pluviales à venir. Il en va de même, bien entendu, pour les territoires littoraux, qui doivent faire face aux effets du recul du trait de côte.

M. André Reichardt. - Je félicite nos collègues à l'origine de cette proposition de loi pour leur engagement sur la compétence GEMAPI. Cela dit, à force de déposer ce type de propositions, on finit par ne plus savoir où l'on va - permettez-moi cette franchise. Est-ce ainsi que l'on doit traiter les affaires de ce pays ? Car, à chaque nouvelle tentative de transfert de compétence, surgit immédiatement la question de savoir si la collectivité destinataire disposera des moyens nécessaires pour l'exercer. Nous contribuons, en réalité, à déstructurer un cadre institutionnel qui, certes, n'était pas parfait - je l'avais d'ailleurs critiqué à l'époque -mais qui, au moins, avait le mérite d'exister et d'offrir un minimum de lisibilité. Aujourd'hui, nous en sommes arrivés à un point où plus rien n'est clair.

J'en appelle donc, solennellement, à un retour de la cohérence dans ce domaine. Est-il, oui ou non, temps de poser, dans ce pays, la question fondamentale de la répartition des compétences entre les différents niveaux de collectivités territoriales ? Et de le faire non pas par une succession de propositions de loi, mais par un véritable projet de loi, qui traiterait en profondeur, de manière globale, les grandes thématiques relevant de l'action publique locale : qui fait quoi, avec quels moyens ?

Rappelons-nous les combats menés - pendant des années - sur le sujet de l'eau. Combien de temps a-t-il fallu pour remettre en question le transfert obligatoire de l'eau et de l'assainissement aux intercommunalités ? Aujourd'hui, ces mêmes intercommunalités en appellent à l'aide, demandent au département de prendre le relais. Mais chacun sait que les départements, de leur côté, n'en peuvent plus : les compétences qui leur sont confiées ne cessent de croître, tandis que leurs moyens stagnent, voire diminuent.

Alors, je le dis sans détour : allons-nous, enfin, avoir le courage de reconnaître que la décentralisation, dans son état actuel, ne fonctionne pas ? Elle ne fonctionne plus. Et je ne veux même pas rouvrir ici le débat - pourtant bien réel - sur les grandes régions, sur les grands cantons, sur les tensions engendrées par les binômes... Tout cela pèse dans la balance.

Ces grandes régions, dans bien des cas, ne fonctionnent pas. Nous faut-il encore attendre pour en tirer les conséquences et proposer un projet de loi structurant, qui permette, en tenant compte des capacités de chacun, de redéfinir clairement ce que l'on peut - et doit - faire à chaque niveau de territoire ?

J'ai commencé par rendre hommage aux auteurs de cette proposition de loi, mais, pour ma part, je ne peux plus de continuer à légiférer dans ces conditions.

M. Louis Vogel. - Très bien !

M. Michel Masset. - Permettez-moi de vous livrer un dernier exemple illustrant les enjeux concrets liés à la compétence GEMAPI. Cet exemple date de la semaine dernière.

Une ligne à grande vitesse (LGV) a été gravement endommagée à la suite du débordement d'un simple ruisseau. Ce débordement a emporté une portion de la ligne LGV sur une centaine de mètres. Aujourd'hui, la responsabilité incombe à l'intercommunalité, et la SNCF se retourne donc contre cette collectivité.

Voilà ce que cela signifie concrètement : 500 passagers ont dû être évacués du train à vingt-trois heures ; ils ont été mis à l'abri en urgence. Tous les transports sont paralysés depuis quinze jours ; et l'on cherche à faire porter la responsabilité sur une intercommunalité de 18 000 habitants...

M. Hervé Reynaud, rapporteur. - Je vais commencer par répondre à André Reichardt.

Nous pouvons souscrire au questionnement, voire à la sourde colère qui anime un certain nombre d'entre nous, face à l'absence de réformes structurelles ou de fond qui permettraient de régler durablement les problèmes de notre pays depuis quelques mois.

Nous avons tenté, avec ce texte, d'être cohérents avec la vision portée par le Sénat. Cette proposition de loi s'inscrit dans une suite d'assouplissements déjà introduits depuis les lois dites « Maptam » et « NOTRe ». Il s'agit d'un assouplissement de plus, certes, mais dans une logique constante : laisser à nos collectivités territoriales, à nos élus locaux, la liberté de choisir - et avec l'accord de l'ensemble des acteurs du territoire.

C'est pourquoi il n'est pas question ici d'un élargissement imposé de la compétence, mais bien d'une simple faculté de délégation au département, à condition que celui-ci soit volontaire et en capacité de le faire, notamment en matière d'ingénierie et d'assistance technique. Et surtout, nous souhaitons rétablir une procédure similaire à celle qui existe en droit commun : l'unanimité des communes concernées est requise, afin de ne tordre le bras à personne, pour procéder à la délégation de compétence.

Reste évidemment en suspens, comme une épée de Damoclès, la question du financement. Le produit de la taxe GEMAPI s'élève aujourd'hui à 536 millions d'euros. Son plafond, fixé à 40 euros par habitant, permettrait - en théorie - d'atteindre un produit de 3 milliards d'euros. Mais nous voyons bien qu'il s'agit d'un jeu de dupes.

Depuis plusieurs années, on dit aux élus locaux qu'il suffit d'appliquer la taxe pour trouver les ressources nécessaires. Cette situation, nous l'avons entendu au cours de nos auditions, est perçue comme profondément injuste, voire révoltante par de nombreux élus. Cela n'est pas convenable.

Comme je l'ai indiqué en préambule, il nous faudra profiter de la séance publique pour rappeler au Gouvernement ses responsabilités en matière de sécurité publique et de solidarité nationale.

M. Laurent Somon, rapporteur pour avis de la commission des finances. - Je me contenterai de quelques mots, car je partage entièrement les propos tenus par le rapporteur. Il est vrai que nous avons le sentiment de pastiller les sujets. Mais, en l'absence d'un projet de loi global - le Gouvernement est pourtant régulièrement alerté sur l'insuffisance des ressources allouées aux collectivités territoriales pour faire face à la recrudescence des inondations -, nous n'avons d'autre choix que de procéder ainsi.

Je pourrais, moi aussi, évoquer l'exemple de la Somme, confrontée à des inondations persistantes dès 2001. Il ne s'agissait pas alors d'un simple épisode ponctuel, mais d'une inondation stagnante ayant duré trois mois. Une telle situation provoque non seulement des dégâts importants, mais aussi une profonde irritation chez les habitants.

Cette proposition de loi est certes imparfaite, mais elle a le mérite de remettre au premier plan une nécessité impérieuse pour les collectivités locales, face à la récurrence d'événements climatiques particulièrement coûteux. Elle permet également de soulever, en creux, la problématique des assurances, qui devra être traitée dans le cadre de la proposition de loi visant à garantir une solution d'assurance à l'ensemble des collectivités territoriales, d'initiative sénatoriale.

Pourquoi ne sommes-nous pas allés plus loin sur la question de la péréquation ? Parce que nous avons souhaité respecter la liberté des collectivités territoriales dans la détermination de leurs ressources. Il n'était pas envisageable d'imposer une solidarité horizontale dans le contexte budgétaire et financier extrêmement contraint que nous connaissons.

J'ai moi-même connu, à l'échelle départementale, les limites de la péréquation horizontale au sein de Départements de France, et ce dans une période pourtant favorable, marquée par l'augmentation des droits de mutation à titre onéreux (DMTO). Aujourd'hui, les finances locales sont en tension ; imposer une telle solidarité serait très difficilement acceptable.

Les auditions l'ont d'ailleurs bien mis en évidence, nous avons perçu un clivage manifeste entre, d'un côté, les territoires densément peuplés, capables de lever un produit fiscal important, mais peu exposés aux risques, et de l'autre, les territoires peu peuplés, mais fortement soumis à des contraintes météorologiques, nécessitant des investissements considérables pour se prémunir contre les inondations, comme l'a illustré l'exemple évoqué par Michel Masset.

Je le rappelle, la prévention des inondations commence par l'amont, bien avant que ne survienne le ruissellement.

Pour autant, les communes littorales, qui ne subissent pas les mêmes contraintes, refusent souvent d'intégrer la gestion du ruissellement des eaux pluviales dans la GEMAPI. De la même manière, les territoires ruraux situés en amont des rivières rechignent à prendre en charge la protection du littoral, en raison des coûts très élevés que cela impliquerait.

Il appartient donc au Gouvernement d'ouvrir une concertation sérieuse avec les collectivités locales, afin de leur apporter les moyens nécessaires pour agir efficacement.

Nous avons pleinement conscience que le présent texte a une portée limitée. Mais nous avons volontairement choisi de ne pas contraindre les collectivités, tout en leur offrant la possibilité de recourir à la délégation, afin de mobiliser de l'ingénierie ou de transférer ponctuellement certaines compétences, dans le but de réaliser les travaux indispensables.

Enfin, j'évoquerai un dernier point, soulevé par la commission des finances, et que Christine Lavarde a rappelé à juste titre : le rôle de l'agence de l'eau. C'est en effet un acteur essentiel dans la gestion des bassins hydrographiques et de l'eau, qu'il s'agisse du grand cycle ou du petit cycle. Il est donc nécessaire, également, de reconsidérer le rôle et les missions de ces agences.

Mme Muriel Jourda, présidente. - Concernant le périmètre de cette proposition de loi, en application du vade-mecum sur l'application des irrecevabilités au titre de l'article 45 de la Constitution, adopté par la Conférence des présidents, je vous propose de considérer que ce périmètre inclut les dispositions relatives à l'exercice et au financement de la compétence en matière de gestion des milieux aquatiques et de prévention des inondations ; les dispositions relatives à la taxe dite GEMAPI mentionnée à l'article 1350 bis du code général des impôts.

Il en est ainsi décidé.

EXAMEN DES ARTICLES

Mme Muriel Jourda, présidente. - Je propose que notre commission prenne acte des résultats des travaux de la commission des finances sur les articles qui lui ont été délégués, et adopte l'article 3 sans modification et l'amendement COM-1 de suppression de l'article 4.

Article 1er

M. Hervé Reynaud, rapporteur. - L'amendement COM-2 vise à préciser que la délégation de la compétence GEMAPI au département nécessite l'accord de l'ensemble des conseils municipaux des communes membres de l'EPCI à fiscalité propre. Il s'agit ainsi d'aligner ce dispositif sur le droit commun applicable aux délégations volontaires et facultatives de compétences entre les collectivités territoriales et leurs groupements.

L'amendement COM-2 est adopté.

L'article 1er est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Article 2

M. Hervé Reynaud, rapporteur. - L'amendement COM-3 vise à clarifier l'articulation entre la compétence GEMAPI et la gestion des eaux pluviales urbaines. Il me semble nécessaire d'expliciter cette articulation en introduisant dans le texte une distinction plus précise entre les notions de ruissellement et de prévention des inondations.

L'amendement COM-3 est adopté.

L'article 2 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Après l'article 2

M. Hervé Reynaud, rapporteur. - L'amendement COM-4 tend, lui aussi, à renforcer le rôle des départements dans l'exercice de la compétence GEMAPI en leur donnant la possibilité de prendre des mesures en matière de ruissellement, dès lors qu'elles présentent un lien avec la prévention des inondations.

L'amendement COM-4 est adopté et devient article additionnel.

Article 3

L'article 3 est adopté sans modification.

Article 4

L'amendement COM-1 est adopté.

L'article 4 est supprimé.

La proposition de loi est adoptée dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Le sort des amendements examinés par la commission est retracé dans le tableau suivant :

Auteur

Objet

Sort de l'amendement

Article 1er

M. REYNAUD, rapporteur

2

Alignement de la procédure de délégation sur la procédure de délégation de droit commun

Adopté

Article 2

M. REYNAUD, rapporteur

3

Clarification rédactionnelle

Adopté

Article(s) additionnel(s) après Article 2

M. REYNAUD, rapporteur

4

Explicitation du champ de l'assistance technique susceptible d'être fournie par les départements aux EPCI-FP et communes en matière de prévention des inondations

Adopté

Article 4

M. SOMON, rapporteur pour avis

1

Suppression de l'article

Adopté

Proposition de nomination de M. Bernard Stirn, candidat proposé par le Président de la République aux fonctions de président de la commission prévue au dernier alinéa de l'article 25 de la Constitution - Désignation d'un rapporteur

La commission désigne Mme Muriel Jourda rapporteur sur la proposition de nomination, par le Président de la République, de M. Bernard Stirn aux fonctions de président de la commission prévue au dernier alinéa de l'article 25 la Constitution.

Proposition de loi visant à renforcer et sécuriser le pouvoir préfectoral de dérogation afin d'adapter les normes aux territoires - Examen du rapport et du texte de la commission

Mme Muriel Jourda, présidente. - Nous passons à l'examen du rapport de notre collègue Nadine Bellurot sur la proposition de loi visant à renforcer et sécuriser le pouvoir préfectoral de dérogation afin d'adapter les normes aux territoires.

Mme Nadine Bellurot, rapporteure. - Cette proposition de loi tend à renforcer et sécuriser le pouvoir de dérogation des préfets, afin de permettre une meilleure adaptation des normes aux réalités des territoires. Chacun de nous en a conscience, les élus sont aujourd'hui confrontés à un carcan normatif étouffant, qui entrave la réalisation de nombreux projets locaux et génère bien souvent un sentiment d'impuissance et d'incompréhension.

C'est la raison pour laquelle notre assemblée est plus que jamais engagée pour endiguer cette tendance à l'augmentation ininterrompue du nombre de normes, qui deviennent d'ailleurs de plus en plus complexes. De nombreuses initiatives en témoignent, à l'instar de la Charte sur la simplification signée entre le Sénat et le Gouvernement en 2023 ou encore de l'organisation, le mois dernier, sous la présidence de Gérard Larcher, de la troisième édition des assises de la simplification.

La proposition de loi que nous examinons s'inscrit dans la droite ligne de ces initiatives de simplification, puisqu'elle entend renforcer le pouvoir de dérogation reconnu aux préfets.

Ce texte est issu des travaux de la délégation sénatoriale aux collectivités territoriales et à la décentralisation, qui a rendu ses conclusions au mois de février 2025. Déposée par Rémy Pointereau et Guylène Pantel et cosignée par près de 130 de nos collègues, la proposition de loi traduit les principales recommandations de ces travaux.

Avant de vous en présenter plus en détail le contenu, permettez-moi de dire quelques mots du pouvoir préfectoral de dérogation actuel et du bilan qui peut en être tiré.

Le constat d'une complexité normative préjudiciable tant aux projets des collectivités qu'à l'action de l'État dans les territoires a donné lieu, en 2017, au lancement d'une expérimentation visant à reconnaître à certains préfets de région ou de département un pouvoir général de dérogation aux normes réglementaires étatiques.

À la suite d'un premier bilan concluant, le dispositif a été pérennisé et étendu à l'ensemble du territoire national par un décret publié en 2020. Il demeure strictement encadré : les dérogations ne peuvent intervenir que dans une liste de matières limitativement énumérées ; le préfet ne peut déroger qu'aux normes arrêtées par l'administration de l'État, ce qui exclut celles qui sont fixées par les agences et opérateurs ; le préfet ne peut déroger qu'à des normes de forme ou de procédure puisque la dérogation doit avoir pour effet d'alléger des démarches administratives, de réduire des délais de procédure ou de favoriser l'accès aux aides publiques.

Depuis l'entrée en vigueur du décret de 2020, quelque 900 arrêtés préfectoraux de dérogation ont été portés à la connaissance de l'administration centrale. Toutefois, le nombre effectif d'arrêtés est probablement supérieur, puisque la circulaire du Premier ministre en date du 28 octobre 2024 a supprimé les obligations d'information préalable des préfets de région et de saisine préalable de l'administration centrale. Avant 2024, le préfet devait demander l'autorisation à la direction des missions de l'administration territoriale et de l'encadrement supérieur (DMATES) ; ce n'est plus le cas dans le droit en vigueur.

Au regard du potentiel que présente cet outil et des attentes qu'il a suscitées, ce nombre de dérogations, assez faible, peut paraître décevant.

Pour autant, lorsqu'il a été utilisé, le pouvoir de dérogation s'est développé dans un cadre consensuel et en concertation avec les élus locaux : en témoigne l'absence presque totale de contentieux ; au reste, près de 90 % des dérogations ont bénéficié aux collectivités territoriales, même si elles peuvent également bénéficier aux entreprises ou aux particuliers.

Les auditions que j'ai conduites - nous en aurons d'autres avec les associations d'élus d'ici à la séance publique -, en particulier avec des préfets actuellement en fonction, m'ont permis d'identifier plusieurs obstacles à la pleine mobilisation de ce nouvel outil, en dépit d'une accélération récente du nombre d'arrêtés. Ainsi, la liste des matières concernées par le droit de dérogation demeure limitée : elle exclut, par exemple, les questions de transport et de santé ; les initiatives de dérogation se heurtent bien souvent à la présence de normes législatives et européennes ; l'attachement au principe d'égalité, qui irrigue la culture de l'administration, entre en contradiction avec l'idée d'une application différente de la norme selon les cas. À l'appui de ce constat, l'un des préfets que nous avons auditionnés a qualifié le pouvoir de dérogation de « choc culturel ». Enfin, les préfets ont pu éprouver certaines réticences liées à la crainte d'encourir une responsabilité pénale en raison du recours au pouvoir de dérogation.

La proposition de loi que nous examinons comporte six articles, qui visent précisément à lever ces différents freins.

L'article 1er consacre le pouvoir de dérogation du préfet en matière réglementaire. Il s'inspire largement de la rédaction du décret de 2020, avec toutefois quelques différences. Premièrement, le pouvoir de dérogation du préfet serait élargi à toutes les matières. Deuxièmement, le préfet pourrait déroger non seulement aux normes arrêtées par l'administration de l'État, mais également à celles qui relèvent de la compétence des agences. Troisièmement, ce pouvoir serait étendu à des normes de fond, puisque le préfet pourrait prévoir des dérogations ayant pour effet de faciliter la conduite des projets locaux.

Les articles 2, 3 et 4 prévoient des cas circonstanciés et répondant à des objectifs précisément définis, dans lesquels le préfet peut déroger à des normes législatives au bénéfice des collectivités territoriales.

Ces articles concernent respectivement les règles relatives au financement minimal de leurs projets par les maîtres d'ouvrage - c'est l'objet de l'article 2 -, les règles relatives à la construction et au maintien d'ouvrages hydrauliques - à l'article 3 - et les règles de mise en conformité des installations sportives - à l'article 4.

Je rappelle, au passage, que cette méthode du cas par cas est la seule qui soit conforme aux exigences constitutionnelles lorsqu'il s'agit de dérogations intervenant dans le domaine législatif.

L'article 5 prévoit la création d'une conférence de dialogue qui remplacerait la commission départementale de conciliation des documents d'urbanisme. Cette nouvelle instance a vocation à associer les élus locaux à l'exercice du pouvoir de dérogation à l'échelle du département, en leur permettant d'émettre des avis sur les projets d'arrêtés préfectoraux de dérogation. Elle serait également habilitée à formuler des recommandations en matière de simplification et à obtenir la notification des déférés préfectoraux engagés à l'encontre de certains documents d'urbanisme.

Enfin, l'article 6 tend à modifier plusieurs dispositions du code pénal afin de sécuriser le recours par les préfets à leur pouvoir de dérogation.

Dans son principe, le texte est largement consensuel : il s'agit en effet de consacrer et de renforcer un outil prometteur au service de la simplification des normes et de la facilitation des projets locaux.

Cela étant, je vous proposerai plusieurs améliorations, à partir de l'ensemble des auditions que j'ai menées, en présence de certains de nos collègues. Elles visent essentiellement à étendre la portée du pouvoir de dérogation et à renforcer les mesures susceptibles d'en favoriser l'utilisation.

Tout d'abord, je vous proposerai une réécriture de l'article 1er relatif au pouvoir de dérogation en matière réglementaire, afin de permettre au préfet de déroger aux normes arrêtées par l'ensemble des agences, des offices et des opérateurs de l'État du département ou de la région ; de décider de dérogations au bénéfice de toute personne, qu'il s'agisse d'une collectivité, d'un particulier, d'une entreprise ou encore d'une association ou d'une fondation ; enfin, de déroger à des normes de fond, en permettant d'y apporter des adaptations mineures lorsqu'elles ont pour objet de faciliter la réalisation des projets locaux.

Parallèlement, je vous propose d'enrichir la liste des dérogations législatives - en matière de sport et d'ouvrages hydrauliques - en introduisant un nouvel article qui permettrait au préfet, sur demande d'une collectivité, de verser la compensation au titre du fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA) en année n - et non en année n+2 -, lorsqu'elle réalise un investissement très important au regard de sa capacité financière. Il s'agit d'une mesure de soutien à l'investissement des petites communes, qui sont parfois confrontées à des difficultés de trésorerie pour les opérations les plus coûteuses.

S'agissant du dialogue territorial en matière de dérogation et de simplification prévu à l'article 5, plutôt que de créer une nouvelle instance, je vous propose d'élargir les compétences des comités locaux de cohésion territoriale (CLCT), qui constituent d'ores et déjà un espace d'échanges dédié à la facilitation des projets locaux. Chaque année, devant ce comité, le préfet de département devra présenter un bilan exhaustif de l'exercice de son pouvoir de dérogation. Il appartiendra alors au comité, dont les parlementaires seraient obligatoirement membres, de formuler des recommandations en matière de dérogation et de simplification.

J'en profite pour souligner que ce dialogue devra être l'occasion de mieux mobiliser la procédure dite de délégalisation : lorsque des dispositions législatives empiètent sur le domaine réglementaire, élus et services de l'État ont tout intérêt à les identifier pour qu'elles soient « déclassées » et puissent ensuite faire l'objet de dérogations au profit des collectivités territoriales.

Pour finir, je vous proposerai de clarifier et de simplifier le dispositif pénal inscrit à l'article 6, avec un amendement qui reprend le régime de la loi Fauchon de 2000 en l'adaptant à la situation du préfet ayant recours au pouvoir de dérogation.

En intégrant ces améliorations, nous avons l'occasion de bâtir un dispositif robuste, pour agir concrètement en faveur de la simplification et de l'adaptation des normes et conforter le rôle de fer de lance de notre assemblée en la matière.

Je vous propose donc, sous réserve de l'adoption de ces amendements, d'adopter cette proposition de loi.

Mme Cécile Cukierman. - Je remercie la rapporteure de son travail qui n'était pas simple, au vu de la rédaction initiale de cette proposition de loi.

Nous avons tous conscience de la difficulté qu'éprouvent, parfois, les préfets à exercer pleinement leur rôle au service de l'aménagement de nos départements, tout en tenant compte des réalités de la différenciation territoriale qui peuvent exister entre les territoires d'un même département.

Cependant, en matière de normes, je crois que, si la loi est mal faite, il vaut mieux la réécrire. J'entends, par ailleurs, ce qui a été dit au sujet des fédérations sportives, qui sont de grandes productrices de normes imposées aux collectivités territoriales. Or je doute que, pour certaines d'entre elles, la simple dérogation préfectorale suffise à leur convenir. Elles conserveront en effet la capacité de décider si tel ou tel match peut se tenir dans tel équipement ; cela ne réglera, in fine, que très partiellement les difficultés rencontrées par les élus concernés.

Enfin, il me semble essentiel de nous prémunir de l'idée que le préfet, parce qu'il peut parfois jouer le rôle d'exutoire pour les élus locaux, serait à même de tout faire. Les préfets ne font ni tout, ni n'importe quoi. Ils constituent un outil de régulation indispensable, garant d'une forme de continuité de l'État républicain dans les territoires. Renforcer leurs prérogatives ne revient pas, à mon sens, à les fragiliser.

Avec cette proposition de loi, on tend toutefois à imposer au préfet le recours au pouvoir de dérogation, sans mesurer pleinement les implications d'un tel usage ; car déroger, c'est prendre un risque. Et dans les faits, certains préfets préféreront probablement saisir le juge administratif avant de prendre une décision, afin d'éviter toute mise en jeu de leur responsabilité, ce qui ne fera qu'alimenter une inflation normative supplémentaire.

Dans tous les cas, si cette proposition de loi devait aboutir, il me semble indispensable de procéder à une véritable évaluation de ses effets dans ses différents domaines d'application.

Je me félicite d'abord de la réécriture de l'article 5. Sa version initiale relevait d'une véritable usine à gaz : mal définie, de composition incertaine, et qui n'avait pour seul effet que d'emboliser l'action publique au lieu de la fluidifier. Ce travers est toujours regrettable dans une proposition de loi sénatoriale.

Ensuite, je m'étonne de l'amendement  COM-6 relatif à la possibilité de déroger aux règles du FCTVA. Non sur le principe : dans le cadre de l'examen du projet de loi de finances (PLF), je dépose chaque année un amendement visant à instaurer le principe de contemporanéité du FCTVA.

Je rappelle qu'au cours de l'examen du dernier PLF, un amendement en ce sens avait été adopté, mais qu'une seconde délibération, sur l'initiative de la majorité sénatoriale qui invoquait son coût potentiel, estimé à 6,5 milliards d'euros pour 2025, l'avait ensuite annulé.

Je m'interroge donc sur la portée de cet amendement au regard de l'article 40 de la Constitution. Au-delà même du débat juridique, je m'interroge aussi sur le respect de règles éthiques entre nous.

Cela étant, je me réjouis - et je pense que les maires aussi s'en réjouiront - de voir enfin le Sénat défendre l'idée de contemporanéité du FCTVA, après le coup de force du mois de décembre 2024. Mais, comme pour les préfets, un peu de constance permettrait, parfois, de mieux réguler l'action publique et de progresser sereinement.

En l'état, je salue le travail effectué, notamment pour relever le niveau d'un texte qui, à son origine, n'était pas, à mon sens, à la hauteur. Mais nous nous abstiendrons lors du vote final.

M. Pierre-Alain Roiron. - Cette proposition de loi ambitionne de mieux reconnaître et de promouvoir l'usage du pouvoir de dérogation des préfets, un pouvoir dont le potentiel demeure, à ce jour, largement sous-exploité au bénéfice des collectivités territoriales. Les données du rapport de la délégation sénatoriales aux collectivités territoriales relatif au pouvoir préfectoral de dérogation aux normes en attestent clairement.

Plusieurs dispositions vont dans le sens d'une clarification bienvenue, en faveur d'un accompagnement plus souple des projets portés par les collectivités locales. Je pense notamment à la création de la conférence locale de dialogue entre l'État et les collectivités, ainsi qu'à l'article 6, dont la nouvelle rédaction, proposée par la rapporteure, vise à encadrer la responsabilité pénale des préfets, dans l'esprit de la loi dite Fauchon.

S'agissant de l'article 2, nous proposons de compléter le dispositif par l'introduction d'une dérogation automatique au bénéfice des communes de moins de 2 000 habitants disposant d'un faible potentiel financier. Ce mécanisme, déjà adopté par le Sénat en février 2024, faciliterait la réalisation de projets essentiels dans nos territoires, qu'il s'agisse d'alimentation en eau potable, de voirie ou encore de rénovation patrimoniale, en levant les freins liés à la lourdeur ou à l'incertitude juridique des dispositifs dérogatoires actuellement en vigueur.

En revanche, nous demandons la suppression de l'article 3. Derrière une intention affichée de répondre à certaines situations locales bien identifiées, comme celle des moulins à eau, se dessine une possibilité trop large de dérogation aux normes environnementales. Si l'on peut comprendre l'objectif de lever certaines contraintes locales, la rédaction actuelle ouvre la voie à une remise en cause trop étendue des normes applicables aux ouvrages hydrauliques. Dans un contexte de vulnérabilité croissante de nos écosystèmes aquatiques, et alors que notre pays accuse un retard préoccupant en matière de qualité des eaux, une telle disposition ne semble ni justifiée ni compatible avec les engagements environnementaux de la France à l'échelon communautaire.

Par ailleurs, nous saluons l'amendement visant à intégrer les parlementaires aux comités locaux de cohésion territoriale. J'exprime le souhait que ces comités se réunissent régulièrement, car leur bon fonctionnement permettra de mieux faire remonter les besoins exprimés par les élus locaux sur le terrain, et de renforcer ainsi le lien entre le législateur et les collectivités territoriales.

M. Guy Benarroche. - Nous ne parvenons pas à légiférer de manière cohérente. Les propositions de loi s'accumulent et nous n'arrivons pas à bâtir une vision cohérente du territoire, que ce soit pour la décentralisation ou pour la recentralisation.

Ce texte de loi vise à poursuivre les efforts engagés depuis trois ou quatre ans vers une recentralisation totale : certes, celle-ci se fait autour des pouvoirs déconcentrés de l'État, en l'occurrence le préfet, mais ce n'en est pas moins une recentralisation.

Si le besoin de simplification est réel au vu des difficultés que rencontrent les maires pour comprendre ou appliquer certaines normes, et si le pouvoir de dérogation est effectivement utile, notamment pour l'obtention de subventions, ce texte n'apporte pas une bonne réponse. Constatant que les normes sont trop nombreuses, mais qu'il est trop compliqué d'y toucher, il prévoit plutôt de donner aux représentants de l'État que sont les préfets le pouvoir de déroger aux règles et aux lois existantes. Ce raisonnement me paraît un peu spécieux, et très centralisateur. Il laisse entre les mains d'une seule administration et d'un seul homme le pouvoir de décider de procéder à certaines dérogations, y compris sur des décisions prises, en toute légitimité, par des opérateurs de l'État qui ne sont pas sous son contrôle. Or cela risquerait d'affecter notamment l'application des normes environnementales ou sociales.

En l'état, nous ne pouvons pas voter ce texte.

M. André Reichardt. - Cette proposition de loi émanant de la délégation sénatoriale aux collectivités territoriales mérite naturellement que l'on s'y attarde, mais elle me semble apporter une mauvaise réponse à un vrai problème.

Une fois n'est pas coutume, je rejoins les propos de Guy Benarroche et de Cécile Cukierman : si l'on veut accroître le pouvoir des préfets en matière de dérogation aux normes, commençons par nous demander pourquoi ces normes existent et si elles sont bonnes. Faut-il même toutes ces normes ? Ne faudrait-il pas limiter l'importance du pouvoir normatif, comme le font d'autres pays ? En tant que législateur, je fixe un cadre, une orientation, mais je ne vais pas jusqu'à tout réglementer. Je laisse à ceux qui seront amenés à mettre en oeuvre ces orientations, notamment les collectivités locales concernées, la possibilité de fixer les normes qui s'appliqueront dans leurs territoires.

Donner de plus en plus d'importance aux préfets revient à renforcer la centralisation. Est-ce ce que nous voulons ?

Un pouvoir normatif territorial est certes nécessaire, mais cela s'appelle la différenciation. Il faut que nous ayons le courage de remettre l'ouvrage sur le métier, et de réfléchir de nouveau à une vraie décentralisation. Permettez à l'Alsacien que je suis de vous parler de notre droit local alsacien-mosellan. Nous avons un droit local que personne en Alsace-Moselle ne veut réduire ni supprimer. Un sondage réalisé récemment à la demande de l'Institut du droit local alsacien-mosellan montre ainsi que 80 % à 90 % des Alsaciens et Mosellans sont attachés au maintien et même au développement de ce droit local. Or que faisons-nous ? Nous disons que ce droit ne saurait évoluer sans un vote du Parlement français. C'est donc vous, mes chers collègues, qui direz ce qui est bon pour l'Alsace-Moselle...

Or, dans sa décision Somodia de 2011, le Conseil constitutionnel a souligné que, si son existence est garantie par un principe fondamental reconnu par les lois de la République, ce droit local ne peut évoluer que dans le sens du droit général. Il est donc mort-vivant ! Nous voulons pourtant le faire évoluer puisqu'il est bon. Mais cette décision est la chronique d'une mort annoncée. C'est inacceptable !

Et voilà que l'on examine un texte tendant à renforcer le pouvoir de dérogation du préfet. Mais à leur nomination en Alsace, les préfets commencent par demander ce qu'est le droit local alsacien-mosellan. Nous passons des années à le leur expliquer, et, quand enfin ils le comprennent, ils s'en vont. Je ne peux donc pas être d'accord avec cette approche.

J'appelle de mes voeux une proposition de loi sénatoriale sur ce sujet. J'ai déposé trois propositions de loi depuis que je suis sénateur, toutes tombées aux oubliettes. Certes, le sujet est compliqué, mais il faudrait pourtant un texte courageux allant dans le sens de mon argumentaire : il appartient aux collectivités territoriales d'adapter la norme fixée au niveau national à leurs réalités locales.

M. Guy Benarroche. - Très bien !

Mme Agnès Canayer. - Cette proposition de loi est nécessaire, mais il s'agit surtout d'une proposition de loi d'appel. Elle n'aura d'efficacité que si, comme nous l'avons dit avec Éric Kerrouche dans un récent rapport d'information intitulé À la recherche de l'État dans les territoires, nous renforçons les prérogatives et les moyens des préfets et des sous-préfectures. Il ne saurait y avoir de décentralisation sans déconcentration. Nous devons prendre en considération les spécificités locales. Or les préfets qui veulent déroger aux normes sont rappelés à l'ordre par les administrations, notamment par les directions régionales de l'environnement, de l'aménagement et du logement (Dreal), qui veulent une application stricte, descendante, des textes.

Je voterai ce texte, mais il faut engager une véritable réflexion sur la déconcentration et les moyens des préfectures et des sous-préfectures.

M. Guy Benarroche. - Nous faisons donc les choses à l'envers...

M. Olivier Bitz. - Nous pouvons tous attendre le grand soir de la déconcentration ou de la décentralisation, mais ce n'est pas l'ambition de ce texte. Je remercie la rapporteure pour son travail. Mais si l'on peut améliorer la portée juridique du texte, le vrai sujet est ailleurs, et il est culturel.

Les préfets, représentants du pouvoir central, sont dotés d'une culture professionnelle marquée par le principe d'égalité, voire par le jacobinisme. En outre, lorsqu'un préfet déroge aux normes, il prend toujours un risque, juridique ou professionnel, et doit se justifier. En revanche, on ne lui reproche jamais d'appliquer la règle en l'état. Il faudrait renverser cet état de fait.

À cet égard, il serait intéressant que le ministère de l'intérieur revoie les modalités d'évaluation des préfets. Les administrations exercent effectivement toujours des pressions pour que la règle soit appliquée le plus strictement possible. Or on leur demande de se prononcer sur l'action des préfets dans les territoires au moment de leur évaluation. Il faudrait revoir ce point et faire en sorte que le préfet prenne davantage de risques professionnels en n'examinant pas une demande de dérogation qu'en appliquant la règle. Toutefois, cela ne relève pas du domaine législatif. Je n'attends donc rien du présent texte à cet égard. Il n'en serait pas moins opportun de réfléchir aux moyens de faire évoluer cette culture professionnelle.

M. Hussein Bourgi. - Je me réjouis de l'examen de cette proposition de loi. Si les préfets disposent d'un pouvoir de dérogation, celui-ci est en réalité rarement mis en oeuvre, car ils s'autocensurent. Toutes les initiatives susceptibles de désinhiber le corps préfectoral sont bienvenues.

Ce texte est aussi l'occasion de reprendre tout ou partie d'une proposition de loi déposée par Dany Wattebled et Marie-Claude Lermytte, dont j'avais été le rapporteur, qui avait été adoptée à l'unanimité au Sénat, mais tellement amendée à l'Assemblée nationale que son impact budgétaire avait été multiplié par cent. Il serait bon de revenir à son esprit initial et de l'introduire dans le présent texte, en espérant que nos collègues députés feront davantage preuve de raison et de modération cette fois-ci.

M. Paul Toussaint Parigi. - Je rejoins notre collègue alsacien, André Reichardt. Ce texte se présente à première vue comme un instrument de souplesse administrative destiné à mieux servir les territoires. Cependant, l'histoire ancienne et récente de la Corse nous enseigne que les relations entre l'administration déconcentrée et la collectivité de Corse demeurent profondément marquées par des divergences structurelles. Il me semble périlleux d'imaginer qu'un accroissement du pouvoir de dérogation préfectoral puisse, sans garde-fou, résoudre les difficultés locales.

En 2018, le Président de la République avait annoncé un plan de transformation et d'investissement pour la Corse (PTIC)de 500 millions. Le préfet a pris la main, sans aucune concertation avec la collectivité de Corse, et distribué cette somme au bloc communal selon son bon vouloir. À la fin, l'argent venant à manquer, il a donné des sommes moindres en affirmant qu'elles seraient complétées par la collectivité de Corse. Il faut éviter ces dérives. À la possibilité de dérogation doivent répondre des garanties et des modalités de contrôle strictes, pour éviter que les priorités du territoire ne subissent des arbitrages préfectoraux unilatéraux suscitant frustrations et incompréhensions auprès des élus et surtout de la société civile.

Mme Lana Tetuanui. - En lisant l'intitulé de la proposition de loi, je me suis dit que nous allions voir revenir le gouverneur en Polynésie française...

M. Guy Benarroche. - Exactement !

Mme Lana Tetuanui. - L'équivalent du préfet dans nos collectivités est le Haut-commissaire. Or ce Haut-commissaire arrive parfois, à sa nomination, avec une vision très parisienne, sans comprendre que ces territoires sont dotés d'un statut particulier.

Pendant la période de la crise sanitaire, alors que la santé relevait des compétences de la Polynésie française, et la sécurité des individus de celles de l'État, c'est le Haut-commissaire qui a pris toutes les décisions. Or il a bien fallu payer tous les centres d'hébergement pour les malades, et ce sont les communes qui ont dû supporter tous les coûts engendrés par ses décisions.

Madame la rapporteure, comment comptez-vous décliner le pouvoir du Haut-commissaire dans nos territoires du Pacifique ?

M. Marc-Philippe Daubresse. - Je travaille actuellement, en ma qualité de rapporteur de la commission, sur la proposition de loi sur la simplification du droit de l'urbanisme, que nous examinerons la semaine prochaine. Or, dans le cadre de mes travaux, je constate qu'un grand nombre d'articles du code de l'urbanisme relève en réalité du domaine réglementaire. Les propositions qui nous arrivent de l'Assemblée nationale sont essentiellement constituées de dérogations aux dérogations ! On en arrive à une machine très complexe. Il y a eu incontestablement un élan de décentralisation, porté par les lois de 1982 et 1983, puis Jean-Pierre Raffarin a fait des tentatives en 2003 et les années suivantes, mais nous ne sommes pas allés au bout du chemin.

Des ferments de révolution couvent aujourd'hui dans nos territoires, qui ne sont pas perçus avec la même intensité à Paris. Il faut agir contre l'impuissance publique. Or les machines à empêcher de faire sont nombreuses. Jusqu'à présent, nous n'avons fait qu'ajouter de la complexité à la complexité.

Il faudrait à la fois un droit de différenciation, clairement accordé à certaines collectivités locales, et un préfet fort. Jean-Louis Borloo m'avait confié en 2010 une mission sur le couple décentralisation/déconcentration, à l'époque où il était pressenti pour devenir Premier ministre. Nous pourrions envisager, par exemple, de confier un pouvoir réglementaire aux régions.

Même quand nous confions des pouvoirs de direction étendus aux préfets, comme lors de l'état d'urgence sanitaire ou à aujourd'hui pour la refondation de Mayotte, ils ne peuvent intervenir sur plusieurs leviers de l'action publique, qui ne relèvent pas de leurs prérogatives. Faute d'avoir la latitude suffisante pour leur redonner un pouvoir central, nous ne cessons de complexifier le système.

Il faut pourtant voter le texte. Année après année, les machines à empêcher de faire provoquent des réactions extrêmes, nocives pour notre pays. Nous devons donc nous efforcer d'améliorer les choses.

M. Éric Kerrouche. - Ne confondons pas : la différenciation et l'adaptation sont deux sujets différents. Je vous renvoie à un article célèbre de Jean-Pierre Worms écrit en 1966 intitulé « Le préfet et ses notables », paru dans la revue Sociologie du travail. Depuis cette période, nous savons que les préfets ont un rôle central dans l'adaptation locale des normes, jeu essentiel qui garantit une certaine fluidité locale. À la suite des mesures prises en 2017 et 2020, le pouvoir de dérogation du préfet a été accentué. L'étendre à nouveau me semble très positif, car c'est dans les rapports locaux entre les élus et le préfet que se noue une partie de la gouvernance locale. Donner plus de latitude aux préfets me semble donc bénéfique.

La différenciation législative, que j'appelle également de mes voeux, est un autre sujet, qui touche à d'autres domaines que ceux qui sont abordés dans le présent texte.

Il ne faut pas avoir peur du pouvoir d'adaptation des préfets, que je perçois non comme une centralisation, mais comme un moyen de rendre effective la déconcentration. La jurisprudence du Conseil constitutionnel le souligne avec constance : il ne faut pas traiter de la même façon des situations différentes.

La proposition de loi, issue des travaux de la délégation sénatoriale aux collectivités territoriales est un bon texte, qui a été encore amélioré par le travail de fond de la rapporteure.

Mme Nadine Bellurot, rapporteure. - Madame Cukierman, les recettes de FCTVA versées aux collectivités sont effectivement très attendues.

Monsieur Roiron, merci de votre soutien et des améliorations que vous avez proposées. Je connais vos réserves concernant l'article 3, nous y reviendrons certainement en séance.

Monsieur Reichardt, les normes sont effectivement trop nombreuses. Nous y contribuons d'ailleurs nous-mêmes par nos amendements. Cependant, il faut donner sa chance à ce pouvoir de dérogation. Si les préfets l'utilisent davantage, cela pourrait mettre en évidence, au sein des comités locaux de cohésion territoriale, des dérogations récurrentes susceptibles de conduire à modifier certaines dispositions, le cas échéant via la procédure de délégalisation. Nous devrions nous approprier davantage ce dispositif.

Madame Canayer, j'ai lu avec attention le rapport d'information que vous avez rédigé avec Éric Kerrouche. Il faut effectivement des moyens supplémentaires pour les préfets.

Monsieur Bitz, une question culturelle se pose effectivement. Les préfets nous indiquent d'ailleurs que l'utilisation de ce pouvoir de dérogation n'est pas dans leurs habitudes. Ils n'en ont pas moins exprimé le souhait de la renforcer, car leurs relations avec les élus locaux s'en trouveraient facilitées, les projets locaux pouvant davantage être soutenus par ce biais.

Monsieur Bourgi, je suis favorable à l'introduction dans le texte des éléments issus de la proposition de loi que vous avez évoquée.

Monsieur Parigi, les relations sont parfois difficiles en Corse avec les services de l'État, mais ce texte a justement vocation à faciliter les projets locaux.

Madame Tetuanui, nous devons effectivement penser aux territoires ultramarins, notamment à la Polynésie française, où tout ne peut pas s'appliquer comme dans l'hexagone.

Monsieur Daubresse, le code de l'urbanisme est en effet considérable. Le ministère du développement durable est un lieu de créativité permanente... Or certaines dispositions s'avèrent excessivement contraignantes. Le pouvoir de dérogation est l'occasion précisément de répondre à des attentes locales, à des projets.

Nous pouvons regretter que ce ne soit pas le grand soir - je le regrette pour ma part.

Monsieur Kerrouche, l'adaptation est essentielle à la fluidité locale, et le rapport entre les élus locaux et les préfets est source de réalisations dans les territoires. Ce pouvoir de dérogation est un outil très utile qu'il convient de faire avancer.

Mme Muriel Jourda, présidente. - Concernant le périmètre de cette proposition de loi, en application du vade-mecum sur l'application des irrecevabilités au titre de l'article 45 de la Constitution, adopté par la Conférence des présidents, je vous propose de considérer que le périmètre indicatif de la proposition de loi inclut les dispositions relatives à l'inscription dans la loi et à l'encadrement du pouvoir préfectoral de dérogation à des normes de nature réglementaire ; l'octroi au préfet par le législateur, de façon circonstanciée et pour des objectifs précisément définis, de la faculté de déroger à certaines normes de nature législative au profit des collectivités territoriales ; l'instauration, entre les services de l'État et les élus locaux, d'un dialogue relatif à la mise en oeuvre du pouvoir de dérogation et aux enjeux de simplification des normes, et enfin aux conditions dans lesquelles la responsabilité pénale des préfets peut être engagée à raison de l'exercice par ces derniers de leur pouvoir de dérogation.

Il en est ainsi décidé.

EXAMEN DES ARTICLES

Article 1er

Mme Nadine Bellurot, rapporteure. - L'amendement  COM-4 vise à étendre la portée du pouvoir préfectoral de dérogation à des normes de fond, en permettant au préfet d'apporter à ces normes des adaptations mineures visant à faciliter la réalisation des projets locaux.

L'amendement COM-4 est adopté.

L'article 1er est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Article 2

L'amendement de correction  COM-5 est adopté.

Mme Nadine Bellurot, rapporteure. - Avis favorable aux amendements identiques  COM-1 et COM-3, qui reprennent la proposition de loi évoquée précédemment par Hussein Bourgi, visant à limiter le reste à charge des petites communes en difficulté financière.

Les amendements identiques COM-1 et COM-3 sont adoptés.

L'article 2 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Article 3

Mme Nadine Bellurot, rapporteure. - Avis défavorable à l'amendement de suppression COM-2. À ce stade, il me paraît préférable de conserver cet article, sur la rédaction duquel nous attendons toujours la réponse des services de l'État, pour voir en séance s'il serait possible de l'améliorer.

L'amendement COM-2 n'est pas adopté.

L'article 3 est adopté sans modification.

Article 4

L'article 4 est adopté sans modification.

Après l'article 4

Mme Nadine Bellurot, rapporteure. - L'amendement  COM-6 prévoit la possibilité, pour les collectivités territoriales bénéficiaires, d'obtenir une compensation au titre du FCTVA l'année même de la réalisation de l'investissement concerné, afin de soutenir l'investissement local. Cette mesure me paraît économiquement vertueuse.

L'amendement COM-6 est adopté et devient article additionnel.

Article 5

Mme Nadine Bellurot, rapporteure. - Concernant l'amendement  COM-7, il s'agit de ne pas supprimer la commission départementale de conciliation des documents d'urbanisme ni de créer une nouvelle instance. Il apparaît préférable de donner corps aux comités locaux de cohésion territoriale, qui peuvent constituer de véritables lieux d'échanges, et faire remonter toutes les idées de simplification qui s'y expriment.

L'amendement COM-7 est adopté.

L'article 5 est ainsi rédigé.

Article 6

Mme Nadine Bellurot, rapporteure. - L'amendement  COM-8 tend à préciser les conditions dans lesquelles la responsabilité pénale du préfet peut être engagée à raison de l'exercice du pouvoir de dérogation, tout en prenant acte des dispositions existant déjà dans le code pénal.

L'amendement COM-8 est adopté.

L'article 6 est ainsi rédigé.

La proposition de loi est adoptée dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Le sort des amendements examinés par la commission est retracé dans le tableau suivant :

Auteur

Objet

Sort de l'amendement

Article 1er

Mme BELLUROT, rapporteure

4

Extension du champ et de la portée du pouvoir préfectoral de dérogation

Adopté

Article 2

Mme BELLUROT, rapporteure

5

Correction rédactionnelle

Adopté

Mme LERMYTTE

1 rect.

Dérogation au principe de participation financière minimale pour les communes rurales en difficulté financière

Adopté

M. BOURGI

3

Dérogation au principe de participation financière minimale pour les communes rurales en difficulté financière

Adopté

Article 3

M. ROIRON

2

Suppression de l'article

Rejeté

Article(s) additionnel(s) après Article 4

Mme BELLUROT, rapporteure

6

Création d'une faculté dérogatoire de versement en « année N » du FCTVA à une collectivité ayant réalisé un investissement substantiel au regard de sa capacité financière

Adopté

Article 5

Mme BELLUROT, rapporteure

7

Instauration d'un dialogue relatif à la dérogation et la simplification dans le cadre des comités locaux de cohésion territoriale (CLCT)

Adopté

Article 6

Mme BELLUROT, rapporteure

8

Précision des conditions dans lesquelles la responsabilité du préfet peut être engagée à raison de l'exercice du pouvoir de dérogation

Adopté

Les polices municipales - Examen du rapport d'information

Mme Muriel Jourda, présidente. - Nous en venons à l'examen du rapport d'information consacré aux polices municipales.

Mme Jacqueline Eustache-Brinio, rapporteure. - Près de six mois après le lancement de ses travaux, nous examinons aujourd'hui les conclusions de la mission d'information sur les polices municipales.

Comme vous le savez, cette mission d'information s'inscrit dans un contexte particulier. Elle fait écho au processus dit du « Beauvau des polices municipales », qui, après plus d'un an de travaux, va prochainement arriver à son terme. Plus encore, le Gouvernement, par la voix de François-Noël Buffet, a récemment annoncé l'examen, à l'automne prochain, d'un projet de loi visant à renforcer les prérogatives des polices municipales. Il devrait être présenté avant l'été. Les propositions que je m'apprête à vous présenter auront donc vocation à nourrir directement ces futurs débats parlementaires.

Ce futur débat parlementaire est une échéance dont nous devons nous réjouir. Je dirais même qu'il était temps, car le régime juridique des polices municipales n'a pas connu d'évolution substantielle depuis 1999. Il faut même remonter à 1994 pour les gardes champêtres.

Le maintien de ce statu quo juridique depuis plus d'un quart de siècle n'est plus tenable, car la police municipale d'hier n'est pas celle d'aujourd'hui. De la même manière, l'évolution des formes de la délinquance au cours des dernières années justifie de faire évoluer les missions des polices municipales, ainsi que les moyens qui leur sont accordés pour les mener à bien, dans l'Hexagone comme dans les territoires d'outre-mer.

C'est à cette tâche que nous nous sommes attelés avec mes collègues membres de la mission d'information. Je tiens donc à remercier tout particulièrement Hervé Reynaud, Isabelle Florennes, Hussein Bourgi, Dany Wattebled, Ian Brossat, Patricia Schillinger, Guy Benarroche et Sophie Briante Guillemont pour leur implication constante dans nos travaux.

Au cours de ces travaux, nous avons entendu 99 personnes et effectué quatre déplacements, en France et en Allemagne. Nos échanges ont été, il faut le noter, d'une remarquable fluidité. Je me réjouis de constater que, par-delà les clivages politiques, nous parvenions à échanger aussi sereinement sur ce sujet absolument majeur pour les Français. De fait, nous sommes tous face à la même situation sur le terrain, quelle que soit notre couleur politique.

Au terme de nos travaux, nous formulons 25 recommandations concrètes et opérationnelles pour donner aux polices municipales les moyens de s'adapter aux nouvelles réalités de terrain. Celles-ci s'ordonnent autour de deux axes principaux, qui nous paraissent absolument fondamentaux : tout d'abord, la préservation de la pleine autorité du maire sur l'action des polices municipales. Ce point n'est pas négociable. Ce principe incontournable nous conduit par ailleurs à écarter sans ambiguïté aucune la possibilité d'attribuer le statut d'officier de police judiciaire à certains policiers municipaux. Cela les conduirait de facto à basculer sous l'autorité du parquet, ce que personne, ou presque, ne souhaite.

Le deuxième axe vise à ne pas détourner les polices municipales de leur coeur de mission, qui est concentré sur la tranquillité publique et la sécurité du quotidien. La police municipale est et doit rester une police de proximité, comme le souhaitent les citoyens. La nécessaire évolution de ses prérogatives doit donc être suffisamment bien dosée pour ne pas conduire à éloigner les agents d'un terrain qu'ils sont malheureusement parfois les seuls à occuper. C'est une réalité : certains de nos concitoyens se tournent désormais spontanément vers la police municipale plutôt que vers le 17, pour la simple et bonne raison que c'est bien la police municipale qui, dans la majorité des cas, se rendra effectivement sur place. Étendre résolument les prérogatives des polices municipales, sans remettre en cause leur identité de force de proximité, voilà la ligne de crête que nous nous sommes astreints à respecter dans nos propositions.

Ces principes directeurs étant rappelés, j'en viens désormais au corps de notre rapport.

Nous avons premièrement souhaité établir un bilan du développement des polices municipales et des gardes champêtres en France.

Les polices municipales sont le bras armé des maires pour garantir la sécurité du quotidien dans les communes. Pour mener à bien leur mission, elles s'appuient sur leur connaissance du territoire et sur leurs relations de proximité avec la population et les acteurs de terrain. Les missions accomplies par les polices municipales dépendent ainsi intrinsèquement des choix politiques effectués par le maire et varient donc sensiblement d'un territoire à l'autre. Elles peuvent se limiter à la tranquillité ou la salubrité publiques. Néanmoins, les polices municipales peuvent également conduire, le cas échéant en coopération avec les forces de sécurité intérieure, certaines missions de police administrative ou judiciaire plus « offensives ».

D'un point de vue quantitatif, les polices municipales ont connu un essor important au cours de ces dernières années, ce qui témoigne du besoin croissant de sécurité dans nos territoires, mais aussi, sans doute, d'un sentiment d'éloignement du terrain des forces de sécurité intérieure. En 2023, on comptait 28 161 policiers municipaux, soit une hausse de 41 % en dix ans. Si cet essor concerne l'ensemble du territoire, on constate une concentration des agents dans les départements du sud-est et franciliens. Cette dynamique ne devrait faire que s'accentuer dans les prochaines années. En 2020, le Centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT) estimait ainsi que 11 000 nouveaux policiers municipaux pourraient être recrutés d'ici à la fin de la mandature municipale, en 2026.

En termes financiers, l'effort consenti par le bloc communal au titre des polices municipales est estimé à 2,5 milliards d'euros.

A contrario, le nombre de gardes champêtres est plus modeste, avec seulement 600 agents recensés en 2023. Ces derniers jouent toutefois un rôle précieux dans les territoires ruraux et leur cadre d'emplois doit à l'évidence être préservé. À l'instar de nos recommandations pour les polices municipales, nous proposerons donc d'étendre les prérogatives des gardes champêtres.

Il ressort enfin des auditions que nous avons menées que l'armement de la police municipale, qui n'allait pas de soi historiquement, s'impose désormais comme une évidence. Près de huit communes dotées d'une police municipale sur dix ont ainsi décidé de les armer.

Ce tableau général étant posé, j'en viens désormais à nos recommandations.

La première série de recommandations concerne les missions et les équipements des polices municipales et des gardes champêtres. Face au durcissement du contexte sécuritaire constaté au cours des dernières années, il nous semble en effet impératif de doter l'échelon local de sécurité de moyens à la hauteur des enjeux. Je ne citerai qu'un seul chiffre en guise d'illustration : on dénombre 100 000 victimes annuelles supplémentaires de coups et blessures volontaires entre 2016 et 2024, avec une progression moyenne annuelle de 9 %.

Or, les policiers municipaux et les gardes champêtres sont en première ligne pour faire face à cette délinquance plus importante et malheureusement plus violente. Ils s'exposent dès lors à des risques accrus, ne serait-ce que parce que les délinquants ne font généralement pas ou plus la différence entre les forces de sécurité intérieure et les policiers municipaux : lorsqu'ils entendent défier l'autorité, ils s'en prennent à l'uniforme sans distinction !

Nous plaidons donc pour une mise à niveau des prérogatives administratives et judiciaires des polices municipales et des gardes champêtres. Il est de notre responsabilité de lever au plus vite les contraintes juridiques et matérielles qui les empêchent encore trop souvent d'être pleinement efficaces dans leur action.

À cette fin, nous proposons tout d'abord d'étendre leurs prérogatives administratives. Il nous paraît notamment souhaitable que les policiers municipaux soient autorisés à procéder, dans des conditions strictement définies, à des inspections visuelles de véhicules et de coffres. Il est tout de même paradoxal que le seul moyen pour eux de faire ouvrir un coffre soit de demander au conducteur de lui présenter le triangle et le gilet jaune de sécurité. De la même manière, il serait souhaitable qu'ils puissent procéder à des saisies d'objets dangereux. Il existe un précédent, validé par le Conseil constitutionnel : nous avons récemment autorisé les agents de la surveillance générale de la SNCF (Suge) et du groupe de protection et de sécurité des réseaux de la RATP (GPSR) à faire de même dans les transports.

En matière d'armement, nous considérerions opportun d'autoriser les policiers municipaux à utiliser des grenades lacrymogènes ou dispersantes. Cet usage serait bien sûr encadré : il ne saurait être que défensif, en particulier dans des situations de violences urbaines mettant en péril l'intégrité des agents. Il va par ailleurs de soi que l'ouverture de cette possibilité devrait être subordonnée au suivi d'une formation adaptée. J'ajoute également que nous rejetons sans ambiguïté l'idée d'autoriser les policiers municipaux à utiliser des armes de longue portée, uniquement destinées au maintien de l'ordre.

Nous sommes enfin favorables à ce que les polices municipales puissent recourir aux lectures automatisées de plaques d'immatriculation (Lapi) ou aux drones, sous réserve d'un encadrement adéquat. Il serait par ailleurs bienvenu que les gardes champêtres puissent se doter de caméras-piétons.

J'en viens maintenant aux prérogatives judiciaires des polices municipales. Si j'ose dire, nous marchons ici sur des oeufs. Il n'est en effet pas question de remettre en cause l'autorité du maire sur les policiers municipaux ou de les détourner de leurs missions de voie publique.

Pour autant, des pistes d'aménagement existent pour mieux réprimer certaines infractions du quotidien particulièrement préjudiciables pour nos concitoyens, et parfois délaissées, faute de moyens, par les forces nationales.

À cet égard, la possibilité de prononcer des amendes forfaitaires délictuelles (AFD), largement sollicitée par les acteurs, paraît particulièrement opportune. Cette faculté serait rigoureusement encadrée et cantonnée à un nombre restreint d'infractions caractéristiques de la délinquance du quotidien, telles que l'usage de stupéfiants, la vente à la sauvette et l'occupation illicite de halls d'immeuble, notamment.

De même, il convient d'élargir les possibilités pour les agents de procéder à des relevés d'identité, aujourd'hui extrêmement restreintes, car limitées aux infractions relevant de leur compétence. Nous proposons donc, a minima, d'étendre cette faculté pour permettre aux agents de la police municipale de relever l'identité de tout auteur d'un crime ou d'un délit flagrant.

Enfin, les policiers municipaux doivent pouvoir bénéficier d'un accès plus étendu et gratuit aux fichiers de police liés à leurs missions, y compris en mobilité et le cas échéant selon des modalités adaptées au caractère sensible des informations que ceux-ci contiennent. Je vous épargne la liste exhaustive des fichiers concernés. Cette extension n'a en revanche, par principe, pas vocation à concerner les fichiers de renseignement, tels que le fichier de traitement des signalements pour la prévention de la radicalisation à caractère terroriste (FSPRT) ou encore le fichier des personnes recherchées (FPR). S'agissant de ce dernier, une réflexion pourrait tout de même être engagée pour permettre un accès partiel et strictement encadré à certaines informations, cohérentes avec les compétences des polices municipales De même, eu égard à leurs compétences, ils n'auraient par principe pas non plus vocation à accéder directement et dans son intégralité au traitement d'antécédents judiciaires (TAJ). .

J'ajoute que l'extension des prérogatives judiciaires des polices municipales doit pour nous aller de pair avec un contrôle renforcé. Nous proposons donc l'établissement d'un système national d'identification anonyme et centralisé des policiers municipaux et des gardes champêtres, sur le modèle du référentiel des identités et de l'organisation (RIO) des forces nationales. Il serait par ailleurs de bon aloi de créer une mission permanente commune aux trois services d'inspection du ministère de l'intérieur pour garantir un contrôle effectif sur ces « polices municipales de nouvelle génération ».

J'en viens à la deuxième série de recommandations, qui traite des défis à relever pour la filière « police municipale ».

Au cours des auditions, de nombreux services de police municipale ont fait état de certaines tensions de recrutement - notamment les postes de direction -, en raison de l'essor des polices municipales. De plus, des phénomènes de concurrence entre les collectivités se sont développés pour attirer les meilleurs profils.

Dans ce contexte, la formation des policiers municipaux et des gardes champêtres constitue un vrai sujet. S'il est indéniable que des efforts considérables ont été réalisés par le CNFPT pour réduire les délais d'entrée en formation et améliorer leur contenu, force est de constater que des marges de progrès subsistent. Nous recommandons donc tout d'abord d'ajuster la durée de la formation des anciens policiers ou gendarmes nationaux, sans pour autant les en exonérer, car le métier de policier municipal est un métier différent.

Il nous semble également souhaitable de simplifier la formation et l'entraînement au maniement des armes. Enfin, actualiser plus régulièrement le référentiel de formation est indispensable, eu égard aux évolutions rapides de l'exercice du métier.

Les carrières dans la police municipale sont et doivent ensuite continuer d'être valorisées à la hauteur des services que ses agents rendent à la population. À cet égard, il convient de relever que les policiers municipaux, en moyenne, perçoivent des rémunérations sensiblement plus élevées que les autres agents de la fonction publique territoriale - à hauteur d'environ 500 euros supplémentaires par mois.

Si nous sommes sensibles aux demandes de revalorisation, celles-ci auront un impact budgétaire que nous ne pouvons ignorer. Du reste, des efforts ont déjà récemment été réalisés. Attendons de connaître l'impact de ces mesures avant d'en envisager de nouvelles, notamment pour améliorer la progressivité des carrières.

Nous préconisons en revanche une modernisation des appellations des grades et de la sérigraphie des tenues ou des véhicules.

Pour conclure, nous sommes favorables à une mesure de simplification demandée avec force sur le terrain : le fait de conférer une portée nationale à l'autorisation de port d'arme.

Mes chers collègues, vous l'avez constaté, nous nous sommes astreints à formuler des propositions aussi concrètes que possible, dans la perspective du futur débat parlementaire. J'espère que le consensus qui a présidé à nos travaux, avec l'ensemble des membres de la mission d'information, se retrouvera également dans nos discussions.

Mme Muriel Jourda, présidente. - Vos propositions vont dans le sens d'une police municipale plus adaptée aux défis de sécurité publique des communes, avec une meilleure formation et un contrôle renforcé.

Mme Agnès Canayer. - Félicitations à Jacqueline Eustache-Brinio, qui, sur un sujet complexe, a abordé tous les sujets sans éluder les difficultés.

La police municipale du Havre fait face à un problème de recrutement, avec 86 agents pour 100 postes théoriques ; le turnover est également très important.

Ainsi, il existe une forte demande pour accorder plus de prérogatives aux policiers municipaux et pour favoriser une meilleure coordination avec les autres forces de sécurité.

Deux éléments essentiels me semblent devoir être mentionnés : premièrement, la police municipale doit rester sous l'autorité des maires - ces derniers sont très inquiets à ce sujet. Deuxièmement, le volet social ; à l'occasion du Beauvau de la sécurité, nous avons commencé à anticiper les évolutions des polices municipales. Les syndicats n'ont pas tardé à réagir : d'éventuelles mesures nouvelles en leur faveur auraient des conséquences importantes pour la collectivité, alors que le contexte financier est déjà tendu.

M. Guy Benarroche. - Je remercie et félicite Jacqueline Eustache-Brinio pour la manière dont elle a conduit cette mission d'information ; c'était très appréciable.

Je souscris majoritairement aux orientations du rapport, même si certaines préconisations se situent sur une ligne de crête : certes, les capacités d'action des polices municipales doivent être renforcées, mais veillons à ne pas attenter à certaines libertés individuelles auxquelles nous sommes très attachés.

Les conclusions de la mission reposent sur quatre piliers.

Premièrement, la police municipale doit rester la police du maire. Évitons l'écueil consistant à faire des policiers municipaux des officiers de police judiciaire (OPJ) : 95 % des acteurs y sont opposés. Nous serons très vigilants sur ce point avant la remise du rapport du « Beauvau des polices municipales ».

Deuxièmement, la police municipale ne doit pas se substituer à la police nationale, et combler ses difficultés, qui s'expliquent par un manque de moyens humains, financiers, mais aussi par un désengagement de la police de proximité depuis la décision d'un certain ministre de l'intérieur... En sus de nos recommandations sur la police municipale, il est toujours utile de rappeler que nous demandons une augmentation des moyens humains et financiers de la police et de la gendarmerie nationales.

Troisièmement, il faut veiller à la complémentarité des acteurs dans le continuum de sécurité - même si je n'apprécie pas particulièrement ce terme. De nombreuses conventions prévoient déjà de coordonner les actions des polices municipale et nationale, mais ce n'est pas le cas partout : il faut faire mieux. De même, nous devons renforcer la complémentarité avec la justice, notamment les procureurs de la République, justement parce que nous refusons la judiciarisation de la police municipale.

Quatrièmement, le rapport souligne la nécessité d'accorder plus de responsabilités et de capacité d'action à la police municipale, mais dans le cadre que nous avons défini, c'est-à-dire sans empiéter sur les compétences de la police nationale. Cela suppose de prévoir davantage de formations et un cadre déontologique renforcé.

Hormis trois ou quatre propositions auxquelles nous ne pouvons souscrire, nous voterons ce rapport.

Lors de nos auditions et lors de notre déplacement en Bavière, nous avons vu à quel point le développement de la prévention était un élément essentiel de l'action des polices municipales. Or ce point n'est pas abordé dans les préconisations, même s'il figure sans doute dans le rapport. La police municipale est efficace lorsqu'elle développe des actions de prévention, en lien avec les acteurs sociaux - c'est le cas à Marseille, notamment.

Mme Marie Mercier. - Je félicite Mme la rapporteure pour la qualité de son travail.

La police municipale est une police du maire, ce qui signifie que les agents de la police municipale sont des agents de la collectivité. Ils sont en lien avec les autres agents et ont un rôle social important, en matière de prévention et de renseignement, comme le soulignait M. Benarroche.

Ma commune de 6 000 habitants est située en zone police ; la gendarmerie est aussi présente et la ville dispose en outre d'une police municipale. C'est bien cette dernière qui prend le pouls de la commune. C'est elle qui prend conscience des moments de bascule. Nous les affectons plus particulièrement à la surveillance des halls d'immeuble. Lorsque l'un d'entre eux est immédiatement sali après avoir été nettoyé, le message est clair : des gens ne vont pas bien.

Dans ma commune, les agents de police municipale ne sont pas armés - ils ne le souhaitaient d'ailleurs pas. Ils ne circulent plus en voiture, mais en VTT : cela leur permet d'être la roue et le nez dans les problèmes du quotidien !

Mme Patricia Schillinger. - Félicitations à Jacqueline Eustache-Brinio pour la qualité de son rapport.

Les auditions étaient très complémentaires. Un point spécifique à l'Alsace : je me réjouis que nous ayons avancé sur le statut des brigades vertes. Nous avons été confortés sur ce point par les propos tenus par François-Noël Buffet la semaine dernière.

Ce rapport est bienvenu. Il nourrira sans nul doute le futur projet de loi dont nous débattrons en octobre.

Mme Catherine Di Folco. - J'associe ma voix à ce concert de louanges : les recommandations du rapport sont simples et directement applicables. J'espère que le ministre François-Noël Buffet s'en saisira pour abonder le texte issu du « Beauvau ».

Je vous suis reconnaissante d'avoir formulé plusieurs recommandations en faveur du corps des gardes champêtres. Même si celui-ci est en voie d'extinction, les agents ont besoin d'être reconnus et de voir leurs missions évoluer.

Je regrette l'intervention un peu hâtive du Président de la République, qui, lors d'une émission télévisée, avait annoncé que les policiers municipaux deviendraient des OPJ. J'espère que ni François-Noël Buffet ni le « Beauvau des polices municipales » ne suivront cette préconisation, qui semble inapplicable.

Mme Lana Tetuanui. - Je félicite la rapporteure au nom de toutes les communes de la Polynésie française. Notre voix a été entendue.

En Polynésie, un territoire aussi vaste que l'Europe, la police municipale occupe une place particulière, puisque la police et la gendarmerie ne sont pas présentes partout. Elle joue le rôle de relais entre les communes les plus éloignées et la capitale, Papeete.

Madame Eustache-Brinio, je vous remercie d'avoir écouté les élus de la Polynésie. Ce n'est pas toujours le cas, nous n'avions pas été entendus lors de l'examen de la loi modifiant les règles applicables aux élections municipales . Ce n'est pas le cas cette fois-ci, je m'en réjouis et nous apportons notre soutien au rapport, mais aussi au futur texte qui en découlera.

Mme Isabelle Florennes. - Je m'associe aux éloges formulés à notre rapporteure, qui a formulé 25 recommandations équilibrées.

Les auditions ont été très intéressantes. À chaque fois, nous avons su faire la part des choses, notamment lorsque nous avons entendu les syndicats ou le CNFPT. Nous avons pris le temps de la réflexion pour aboutir à un rapport équilibré, dont les préconisations seront fort utiles dans le cadre du Beauvau ; le ministre a d'ailleurs salué le travail de fond mené par notre commission.

Les élus et les associations qui les représentent ont exprimé des attentes fortes sur ce sujet, notamment en vue des futures élections municipales. Dans ma commune, nous sommes régulièrement interrogés sur le contrôle des immatriculations des véhicules, ainsi que sur la vidéoprotection.

Ce rapport donne aux maires et aux élus les moyens de mettre en oeuvre leur politique de sécurité, une demande très importante de nos concitoyens, notamment dans la région d'Île-de-France.

Mme Sophie Briante Guillemont. - Je m'associe moi aussi aux remerciements adressés à la rapporteure. Je salue son sens du compromis ; c'est très appréciable.

Notre travail était nécessaire, car, en réalité, nous sommes déjà en retard sur le plan juridique. Sur le terrain, la police municipale est trop souvent contrainte d'aller jusqu'aux limites de ses prérogatives. Il était urgent de rétablir un cadre légal bien défini, à partir duquel nous pourrons continuer à travailler.

M. Henri Leroy. - Voilà trente ans que Mme le rapporteur a endossé l'uniforme des forces de sécurité !

Ces 25 propositions, utiles et indispensables, ne sont toutefois que le début de la réponse apportée à leurs revendications.

J'ai été maire pendant vingt-cinq ans. Que la police municipale reste sous les ordres du maire est une bonne chose, mais elle ne restera alors qu'une police de proximité. Or l'État n'aura pas les moyens de développer une troisième force de sécurité.

Madame le rapporteur, merci pour vos travaux qui correspondent aux attentes des policiers municipaux. Confier la qualité d'officier ou d'agent de police judiciaire aux policiers municipaux pourrait être perçu par les policiers nationaux comme une intrusion. La police judiciaire, force d'État, ne peut exercer que sous l'autorité du procureur de la République.

M. Christophe Chaillou. - Je salue à mon tour le travail de la rapporteure. Notre collègue Hussein Bourgi nous a fait part de votre sens de l'écoute et de la collégialité entourant la formulation des propositions. Nous saluons cette méthode.

Le rapport et ses préconisations semblent répondre à l'attente d'un grand nombre de collègues maires. Il faut adopter nos outils et protéger nos agents.

La formation est un enjeu essentiel pour permettre aux agents de répondre à des situations de plus en plus complexes.

Comme Isabelle Florennes, nous considérons que ces recommandations sont pragmatiques et équilibrées.

La police municipale doit rester sous le contrôle du maire et ne pas être confondue avec la police nationale. Il faut être extrêmement vigilant sur la tendance de l'État à transférer des responsabilités aux collectivités, y compris sur le plan financier.

Je salue votre prudence sur les questions de rémunération ; vous avez tempéré certaines revendications salariales et le contexte financier n'y est de fait pas favorable.

Je le répète, nous saluons ces 25 propositions, fruit d'un travail parlementaire de qualité.

M. Hervé Reynaud. - Merci à Jacqueline Eustache-Brinio : ses propositions opérationnelles sont le fruit d'échanges nourris et de nombreuses auditions.

Je tiens aussi à remercier François-Noël Buffet, qui a entendu la nécessité de faire coïncider les travaux de la mission d'information avec le « Beauvau ».

La police municipale se développe dans de nombreuses communes, mais ce n'est pas le cas partout : ainsi, de nombreuses communes n'en disposent pas. Pour elles, la police municipale, ce sont les gendarmes car ce sont eux qui assurent la sécurité en milieu rural. La coordination des actions entre les gendarmes et nos territoires est essentielle.

Mme Jacqueline Eustache-Brinio, rapporteure. - Je souhaite remercier chacune et chacun d'entre vous. Les mots que vous avez eus à mon égard me touchent beaucoup. Je suis heureuse d'avoir réussi ce travail collectif.

Il était essentiel que nous aboutissions à un consensus, car, au-delà de nos différences politiques, nous avons tous un intérêt commun : être au service de nos concitoyens.

Il est essentiel de maintenir les polices municipales sous l'autorité du maire. Leur confier le statut d'officier de police judiciaire fragiliserait ce lien. Le maire connaît son territoire, c'est lui qui donne ses indications à la police municipale. Il est très important de maintenir les choses en l'état.

Rapidement, nous avons effectivement tempéré les syndicats sur leurs revendications financières, même si nous sommes éminemment conscients de la difficulté du métier. Certaines évolutions seront possibles, d'autres ne le seront pas. En tout cas, le Sénat ne saurait imposer des dépenses folles aux collectivités et à l'État alors que nous devons tous faire des efforts. En outre, des décrets parus en janvier ont déjà apporté des évolutions favorables aux policiers municipaux.

L'unanimité entourant ce rapport renforcera la place du Sénat lors de l'examen du futur projet de loi à la rentrée. Cécile Cukierman, qui a dû s'absenter, m'a chargée de vous informer que son groupe souscrivait à l'ensemble de nos recommandations.

Les recommandations sont adoptées.

Mme Muriel Jourda, présidente. - Pouvez-vous nous indiquer le titre que vous avez retenu pour le rapport ?

Mme Jacqueline Eustache-Brinio, rapporteure. - Le titre du rapport est le suivant : « 25 propositions pour donner aux polices municipales les moyens de lutter contre l'insécurité au quotidien. »

La commission adopte, à l'unanimité, le rapport d'information et en autorise la publication.

La réunion, suspendue à 11 h 55 heures, est reprise à 16 h 35.

Les orientations du ministère en matière de justice pénale, de justice civile et d'organisation pénitentiaire - Audition de M. Gérald Darmanin, ministre d'État, garde des sceaux, ministre de la justice (sera publié ultérieurement)

Le compte rendu sera publié ultérieurement.

La réunion est close à 18 heures.