- Mardi 10 juin 2025
- Mercredi 11 juin 2025
- Fonctionnement de l'aide sociale à l'enfance - Audition de Mme Claire Hédon, Défenseure des droits
- Rapport annuel du Défenseur des droits pour 2024 - Audition de Mme Claire Hédon, Défenseure des droits
- Proposition de loi portant diverses dispositions en matière de gestion des milieux aquatiques et de prévention des inondations (GEMAPI) - Examen des amendements au texte de la commission
- Proposition de loi relative à la composition des conseils locaux et intercommunaux de sécurité et de prévention de la délinquance - Examen des amendements au texte de la commission
- Proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, visant à modifier la définition pénale du viol et des agressions sexuelles - Examen du rapport et du texte de la commission
- Projet de loi relatif à l'organisation des jeux Olympiques et Paralympiques de 2030 - Examen du rapport et du texte de la commission
Mardi 10 juin 2025
- Présidence de Mme Muriel Jourda, présidente -
La réunion est ouverte à 16 heures.
Proposition de loi visant à renforcer et sécuriser le pouvoir préfectoral de dérogation afin d'adapter les normes aux territoires - Examen des amendements au texte de la commission
Mme Muriel Jourda, présidente. - Nous examinons les amendements au texte de la commission sur la proposition de loi visant à renforcer et sécuriser le pouvoir préfectoral de dérogation afin d'adapter les normes aux territoires. Nous commençons par l'examen des amendements de la rapporteure.
EXAMEN DES AMENDEMENTS DE LA RAPPORTEURE
Mme Nadine Bellurot, rapporteure. - Mon amendement LOIS.1 vise à reprendre une recommandation, formulée le 6 juillet 2023, par le groupe de travail transpartisan du Sénat sur la décentralisation, dans le rapport intitulé « Libre administration, simplification, libertés locales : 15 propositions pour rendre aux élus locaux leur "pouvoir d'agir" ». Il s'agit d'octroyer au préfet le rôle de délégué territorial de l'ensemble des établissements publics et groupements d'intérêt public de l'État comportant un échelon territorial, afin de conforter son pouvoir de dérogation.
L'amendement LOIS.1 est adopté.
Après l'article 6
L'amendement de coordination LOIS.2 est adopté.
EXAMEN DES AMENDEMENTS AU TEXTE DE LA COMMISSION
Les sorts des amendements du rapporteur examinés par la commission sont retracés dans le tableau suivant :
La commission a également donné les avis suivants sur les autres amendements dont elle est saisie, qui sont retracés dans le tableau ci-après :
La réunion est close à 16 h 10.
Mercredi 11 juin 2025
- Présidence de Mme Muriel Jourda, présidente de la commission des lois, et de M. Philippe Mouiller, président de la commission des affaires sociales -
La réunion est ouverte à 9 h 00.
Fonctionnement de l'aide sociale à l'enfance - Audition de Mme Claire Hédon, Défenseure des droits
Mme Muriel Jourda, présidente. - Madame la Défenseure des droits, nous vous accueillons aujourd'hui dans le cadre d'une audition organisée conjointement par la commission des affaires sociales et la commission des lois, et qui s'inscrit, pour partie, dans les travaux d'information et de contrôle que nous avons souhaité engager sur la protection de l'enfance.
Le système de protection de l'enfance, qui fait intervenir de nombreux intervenants à plusieurs étapes de la vie des enfants, est préoccupant. À certains égards, il peut même être considéré comme étant à bout de souffle. C'est pour documenter précisément ce constat communément admis, et afin de trouver des pistes d'évolution pour permettre une meilleure prise en charge des enfants en danger, que nous avons désigné des rapporteurs au sein de chacune de nos commissions. Ils travailleront de concert, en associant l'ensemble de nos commissaires.
Pour ouvrir nos travaux, il nous a semblé plus qu'opportun de vous entendre sur ce sujet, alors que vous avez rendu publiques, à la fin janvier dernier, une décision-cadre ainsi que sept décisions territoriales, qui font suite aux saisines individuelles qui vous sont parvenues.
J'ajoute, avant de laisser la parole à mon collègue Philippe Mouiller, président de la commission des affaires sociales, que, dans un second temps de cette audition, vous aurez l'occasion de nous exposer plus largement les points saillants de votre activité, qui est multiple, comme vous le faites chaque année devant la commission des lois à la suite de la publication de votre rapport annuel d'activité.
M. Philippe Mouiller, président. - Nombre de rapports ont été consacrés à l'aide sociale à l'enfance (ASE). Nos rapporteurs focaliseront donc leurs travaux sur quelques aspects qui n'ont pas encore été explorés ; je pense notamment à la question de l'accueil des enfants et des jeunes en situation de handicap.
Mme Claire Hédon, Défenseure des droits. - Je vous remercie de cette invitation. Je suis accompagnée de mes deux adjoints, George Pau-Langevin, qui est chargée de la lutte contre les discriminations et de la promotion de l'égalité, et Éric Delemar, Défenseur des enfants, ainsi que de Mireille Le Corre, secrétaire générale de notre institution, et d'Antoine Touron, mon conseiller parlementaire.
Le Défenseur des droits, autorité administrative indépendante inscrite dans la Constitution, a pour mission d'intervenir dans cinq domaines : la défense des droits et des libertés des usagers dans leurs relations avec les services publics ; la défense et la promotion des droits de l'enfant ; la lutte contre les discriminations et la promotion de l'égalité ; le respect de la déontologie des forces de sécurité ; l'orientation et la protection des lanceurs d'alerte.
La loi organique du 29 mars 2011 relative au Défenseur des droits nous a confié deux missions. Il s'agit, premièrement, de protéger les droits en traitant des réclamations relatives aux cinq domaines de compétences que je viens de citer, et, deuxièmement, de promouvoir les droits et les libertés. Dès l'origine, le législateur a considéré que notre rôle ne se limitait pas à la résolution de cas individuels, mais incluait aussi la formulation de propositions pour une meilleure effectivité des droits. C'est précisément à ce titre que je rends régulièrement des avis au Parlement sur des projets et propositions de loi. J'ai par ailleurs été auditionnée à onze reprises par les parlementaires. En 2024, j'ai rendu sept avis, notamment ceux relatifs au régime juridique des actions de groupe, à l'accompagnement humain des élèves en situation de handicap sur le temps méridien, et sur la proposition de loi visant à restaurer l'autorité de la justice à l'égard des mineurs.
Pour conduire nos travaux, nous nous appuyons sur 256 agents - majoritairement des professionnels du droit -, des pôles régionaux avec 620 délégués territoriaux bénévoles qui accueillent les réclamants et mettent en place des médiations pour résoudre des conflits, la plupart du temps avec les services publics. S'y ajoutent 82 jeunes ambassadeurs des droits (Jade), en service civique, qui interviennent dans les écoles, collèges et lycées pour sensibiliser aux droits de l'enfant et à la lutte contre les discriminations. Je tiens à saluer la qualité du travail de toutes ces équipes.
Notre décision-cadre du 28 janvier 2025 concerne la protection de l'enfance.
En 2024, nous avons traité 3 073 réclamations, dont 30 % concernaient l'éducation, la scolarité et la petite enfance, 15 % la santé et le handicap, et 18 % la protection de l'enfance proprement dite. Et notre rapport annuel 2024 relatif aux droits de l'enfant, intitulé Le droit des enfants à un environnement sain : protéger l'enfance, préserver l'avenir, soulignait l'urgence de renforcer les cadres juridiques et les politiques publiques de protection de l'environnement. Les enfants, qui sont par essence particulièrement vulnérables, sont en effet exposés aux risques de pollution et au réchauffement climatique, qui compromettent leur accès à des ressources vitales comme l'eau et la nourriture.
Cet état de vulnérabilité me conduit à revenir sur les difficultés qu'ils rencontrent au sein des services de la protection de l'enfance. Face à l'urgence de la situation et à la vigueur des débats qui se sont tenus sur ce sujet, tant au Parlement que dans la sphère médiatique, le travail de notre institution apparaît plus que jamais utile.
S'agissant de la protection de l'enfance, l'État est garant de l'application de la Convention internationale des droits de l'enfant (Cide) et les départements sont les chefs de file en la matière. Aussi, dans notre cette décision-cadre, nous avons rappelé à l'État que son rôle était absolument indispensable. Le Défenseur des droits a pour compétence de veiller au respect par l'État de l'intérêt supérieur de l'enfant, c'est-à-dire, de façon très concrète, au respect des droits fondamentaux de celui-ci : éducation, santé, protection contre toute forme de violence - des droits indissociables et interdépendants pour le bon développement de l'enfant.
Nous avons été saisis des lourdes difficultés que rencontre le dispositif de protection de l'enfance dans les départements, au détriment des enfants concernés, par des travailleurs sociaux mais aussi par des magistrats.
Depuis la création de l'institution, nous traitons des réclamations ponctuelles dans ce domaine, mais de façon inédite, nous sommes alertés par des magistrats sur des décisions de justice non appliquées - par exemple, des décisions de placement ou d'accompagnement en milieu ouvert non exécutées - ; des évaluations de situations de danger non réalisées ; des délais excessifs de prise en charge de mesures éducatives à domicile ; des accueils d'enfants dans des lieux non autorisés tels que des gîtes, appartements loués ou chambres d'hôtels, avec des éducateurs intérimaires ; des ruptures dans les lieux d'accueil entraînant une rupture de la scolarisation et des liens familiaux, avec un impact évident sur l'état psychique des enfants ; le non-respect du droit de visite d'un parent, pourtant ordonné par le juge - cela oblige l'enfant à attendre cinq mois pour que le droit de visite médiatisé de ses parents, décidé par un juge, soit effectif, faute de place dans la structure désignée - ; des maltraitances non prises en compte dans un établissement ou une famille d'accueil, qui renvoient à la question du manque de contrôle de ces lieux d'accueil.
Les conséquences peuvent être absolument dramatiques. J'ai en tête le cas d'un enfant de trois ans décédé par accident à son domicile alors qu'il faisait l'objet d'un placement qui, faute de place, n'avait pas été exécuté.
Environ 400 000 enfants sont accompagnés par l'ASE, dont plus de la moitié sont « confiés », c'est-à-dire principalement placés dans une famille d'accueil ou un foyer, même s'il existe quelques placements chez un tiers digne de confiance. Ce nombre est en forte augmentation puisqu'il était de 355 000 en 2018. Un chiffre frappant, issu du Syndicat de la magistrature, indique que 77 % des juges des enfants ont déjà renoncé en 2024 à prendre des décisions de placement d'enfant en danger dans leur famille en raison du manque de places d'accueil disponibles. Autrement dit, même les magistrats intègrent cette pénurie.
Dans ce contexte, plusieurs rapports ont déjà été produits. Le Défenseur des droits a d'abord pour rôle d'être un bon observateur de la société et de formuler des propositions. Notre approche, qui se fait par les droits, met en lumière l'écart entre les droits annoncés et leur effectivité. Nous avons ainsi constaté que le projet pour l'enfant (PPE), qui est inscrit dans la loi depuis plusieurs années, n'était pas effectif ou tellement succinct qu'il en est vidé de sa substance.
Pour élaborer notre décision-cadre et nos sept décisions territoriales, qui seront rendues publiques courant 2025, nous avons travaillé dans le respect du contradictoire. Nous nous sommes déplacés dans quatre territoires à la rencontre des professionnels. L'enquête se poursuit dans quatre départements.
Ces décisions ne remettent en cause ni l'investissement de l'ensemble des professionnels ni la volonté des départements et des agences régionales de santé (ARS) d'améliorer la situation. Nous avons voulu mettre en avant la responsabilité de l'État tout en soulignant que seule une action coordonnée de tous les acteurs permettra de s'en sortir, compte tenu de la complexité des situations des enfants et de la tension dans les secteurs concernés.
Pourquoi cette aggravation de la situation, et pourquoi davantage de signalements ?
Il ne fait aucun doute qu'il y a un meilleur dépistage, mais aussi que les situations se sont aggravées depuis la crise sanitaire. La pauvreté, la situation des femmes isolées, l'usage excessif des écrans, les difficultés des services publics eux-mêmes - notamment l'école et le système de santé avec des délais croissants de prise en charge -, les difficultés d'accès au logement qui fragilisent les familles et leurs conditions de vie, ainsi que le manque de moyens, d'assistants familiaux et de places en foyers, ont des conséquences majeures. Notre enquête a montré que des nourrissons, faute de places d'accueil, sont hospitalisés pendant plusieurs semaines, voire plusieurs mois, en service de pédiatrie, où des techniciens de l'intervention sociale et familiale ou des assistantes familiales ont pour mission de les bercer.
Je tiens à souligner la nécessité de la prévention, laquelle permettra d'éviter un certain nombre de placements. En la matière, la politique du logement joue un rôle fondamental, avec des conséquences évidentes sur l'éducation.
Je souhaite également insister sur le soutien à la parentalité. L'article 18 de la Cide dispose : « Pour garantir et promouvoir les droits énoncés dans la présente Convention, les États parties accordent l'aide appropriée aux parents et aux représentants légaux de l'enfant dans l'exercice de la responsabilité qui leur incombe d'élever l'enfant ». Concrètement, cela signifie garantir le droit de l'enfant à voir ses parents aidés en cas de besoin.
Dans nos décisions, nous donnons un certain nombre d'exemples où le soutien à la parentalité s'applique de façon très positive, mais il existe aussi de nombreux endroits où il fait défaut. Dans la Meuse, il y a quinze jours, j'ai visité une maison des adolescents (MDA) où le soutien à la parentalité est considéré comme un moyen d'éviter les placements.
Nous avons également observé une baisse en 2025 des budgets alloués à la prévention spécialisée, c'est-à-dire aux éducateurs de rue, ainsi que des difficultés flagrantes d'intervention précoce en cas de difficultés.
Pour ce qui concerne la santé et le handicap, nous avons été frappés par les difficultés d'accès aux soins en santé mentale, avec des délais de prise en charge de plus en plus importants, notamment dans les centres médico-psycho-pédagogiques (CMPP). Les jeunes qui relèvent de la protection de l'enfance représentent 2 % des mineurs en France, mais jusqu'à la moitié des adolescents hospitalisés à temps complet, en particulier pour des troubles du comportement et des syndromes dépressifs.
En termes de prévention, j'insiste sur l'importance des moyens alloués à la protection maternelle et infantile (PMI) et sur la nécessité de garantir un parcours de soins adapté. Des expérimentations intéressantes existent dans ce domaine.
Concernant le handicap, on ne sait pas combien d'enfants en situation de handicap sont pris en charge par l'ASE, ce qui ne permet pas de les prendre correctement en charge. Quelques départements sont en mesure de donner un chiffre, mais la grande majorité n'en est pas capable.
Même si l'objectif d'une plus grande inclusion des enfants en situation de handicap doit être salué, force est de constater que de nombreux enfants souffrent encore d'un manque de prise en charge, faute de dispositifs inclusifs en nombre suffisant ou réellement adaptés à leurs besoins. Une formation croisée entre la protection de l'enfance et le secteur médico-social s'avère nécessaire.
S'agissant de l'école, les changements de lieux d'accueil pour les enfants placés entraînent une rupture de scolarité. Lorsqu'un enfant a besoin d'un accompagnant d'élèves en situation de handicap (AESH) ou d'une classe Ulis (unité localisée pour l'inclusion scolaire) et qu'il change d'établissement scolaire, l'accompagnement ne suit pas toujours. Cette situation renvoie à l'importance de la médecine scolaire et des assistantes sociales.
Un autre point que nous avons souhaité mettre en avant dans notre décision-cadre concerne la parole de l'enfant et le rôle du juge des enfants, qui doit informer l'enfant discernant de son droit à un avocat et peut lui-même, s'il l'estime nécessaire, désigner un administrateur ad hoc ou un avocat pour l'enfant. L'État s'est engagé à déployer les unités d'accueil pédiatrique des enfants en danger (Uaped), avec l'objectif d'une structure par juridiction d'ici à 2025, mais il est très difficile de disposer d'une liste nationale actualisée.
Au-delà de la parole des enfants, nous estimons que celle des parents et les groupes de parole avec les familles accompagnées constituent un atout.
Je tiens également à insister sur la nécessité de permettre aux enfants d'avoir des projets ambitieux et de reconnaître le droit aux études supérieures pour les enfants accompagnés par la protection de l'enfance. Nous avons récemment rendu un rapport sur la question de l'orientation scolaire : les jeunes confiés à l'ASE sont davantage orientés vers des cycles d'enseignement courts et professionnels que la population générale.
L'obligation légale d'un entretien un an avant la majorité du mineur confié n'est pas systématiquement respectée, alors que c'est précisément le moment où il est possible d'élaborer avec le jeune un projet d'accès à l'autonomie.
Le contrat jeune majeur revêt une importance particulière. Nous avons constaté plusieurs situations où des jeunes en alternance, disposant donc d'un petit pécule, se voyaient privés du contrat jeune majeur par le département au motif qu'ils disposaient de ressources. Or non seulement ces ressources sont insuffisantes, mais ce contrat ne se résume pas à un accompagnement financier.
Nous avons également constaté un épuisement des travailleurs sociaux et une perte de sens, avec dans certains services un nombre très préoccupant d'agents en arrêt maladie, avec dans certaines équipes, près de la moitié des agents habituels et des personnels de services entiers en arrêt maladie. S'il n'appartient pas à notre institution de se prononcer sur un ratio cible de mesures par travailleur social, le calibrage de la charge de travail des professionnels demeure un enjeu essentiel, que l'absence de référence nationale ne facilite pas. Le nombre de mesures de placement par travailleur social dépasse souvent 30, et peut atteindre 48.
Nos recommandations insistent sur la nécessité d'un meilleur contrôle des lieux d'accueil pour veiller au respect des besoins fondamentaux et spécifiques des enfants confiés. Il est également important de mieux traiter les informations préoccupantes et, bien entendu, de lutter contre la pauvreté. Cette dernière recommandation, qui figure parmi celles formulées par le Comité des droits de l'enfant de l'ONU, a un impact direct sur la protection de l'enfance.
Un mot, enfin, sur les budgets consacrés à la protection de l'enfance et, surtout, sur les aides de l'État en la matière.
La protection de l'enfance est principalement financée par le budget des départements, à hauteur de 17 % à 23 % selon les départements. L'aide financière de l'État, notamment via une dotation et une contractualisation facultative renouvelée annuellement, représente à peine 2 % du budget départemental dédié à la protection de l'enfance. Ce soutien financier de l'État apparaît insuffisant.
Nos recommandations visent non pas une réforme législative, mais une véritable application de la loi. Parmi celles-ci, 24 sont adressées à l'État, y compris aux ARS et aux préfectures, et 30 aux départements. Nous avons également adressé des recommandations au Premier ministre, au ministre de l'intérieur, au garde des sceaux, à la ministre de l'éducation nationale, au ministre du travail ainsi qu'au ministre de la santé.
Pour conclure, je considère que le manque de moyens alloués à la protection de l'enfance est révélateur de ce que nous voulons pour notre société. Posons-nous la question : quelle société souhaitons-nous pour nos enfants ?
Mme Agnès Canayer, rapporteur de la commission des lois. - Votre rapport aborde un sujet qui nous tient à coeur, mais il s'agit d'un rapport de plus. Depuis 2020, pas moins de sept rapports ont été publiés sur ce thème. Les constats sont donc particulièrement bien connus et documentés, souvent à travers le prisme d'une accumulation de cas dramatiques révélés par la presse. Aujourd'hui, notre enjeu est non pas de trouver des solutions ponctuelles, mais bien d'engager une réflexion globale pour refonder complètement le système de protection de l'enfance, qui montre ses limites. Il faut changer de paradigme.
Il est important de réaffirmer la responsabilité et le rôle de l'État. Cependant, nous divergeons sur un point : ce rôle n'est pas uniquement financier. Les départements, chefs de file en la matière, sont déjà financés par l'État. Plus de 10 milliards d'euros sont alloués à la protection de l'enfance dans les budgets départementaux. Dans le contexte budgétaire actuel, demander des moyens supplémentaires n'aboutira pas à des solutions effectives. Il faut repenser le système plutôt que d'additionner un ensemble de mesurettes.
Je souhaiterais vous poser une question plus générale, qui me semble d'une importance capitale, concernant le principe cardinal de la protection de l'enfance qu'est l'intérêt supérieur de l'enfant. Il ne s'agit pas seulement d'une exigence ou d'une formule incantatoire, mais d'un principe juridique, qui entraîne des conséquences concrètes, spécialement en matière d'autorité parentale. Pourriez-vous nous indiquer votre appréciation de ce principe et de ses conséquences, notamment sur l'autorité parentale ? Le maintien de l'autorité parentale en vertu de l'intérêt supérieur de l'enfant se fait en effet parfois au détriment de l'enfant lui-même.
Par ailleurs, quel est votre avis sur l'arrêt de la Cour de cassation du 2 octobre 2024 relatif au placement éducatif à domicile (PEAD), qui était parfois utilisé comme un substitut au placement ?
Mme Pascale Gruny, rapporteur de la commission des affaires sociales. - Je vous remercie pour la qualité de votre décision-cadre et pour le bilan réalisé sur la protection de l'enfance dans notre pays. Le constat est accablant et vos travaux obligent l'ensemble des acteurs à se saisir de manière urgente de la question. C'est notamment ce qui a conduit nos deux commissions à se pencher sur ce sujet afin d'apporter des réponses opérationnelles.
Dans cette décision, vous regrettez la faible application des dispositifs prévus par la loi ainsi que la faible connaissance du cadre légal, y compris par les acteurs de la protection de l'enfance eux-mêmes. Pour rappel, le Conseil économique, social et environnemental (Cese), dans son récent rapport sur la protection de l'enfance, dénonçait également « l'énorme décalage qui se révèle entre le cadre protecteur et complet des lois existantes et leur application sur le terrain », ce que je traduis par : une trop grande complexité entraîne des dépenses énormes.
Dans ce contexte, est-il encore pertinent de légiférer davantage ? Ne faut-il pas se concentrer sur la mise en oeuvre effective des dispositifs et les moyens de leur appropriation par les acteurs sur le terrain ? Modifier, oui, mais à budget constant !
Mme Patricia Schillinger, rapporteur de la commission des lois. - Madame la Défenseure des droits, je vous remercie pour votre analyse très fine et le constat alarmant que vous dressez. Les travaux relatifs à la protection de l'enfance sont abondants ; les préconisations en la matière ne manquent donc pas. Compte tenu de l'expérience que vous avez acquise en la matière, quelles seraient d'après vous les recommandations prioritaires, qui seraient rapidement applicables et dont l'effet serait significatif, notamment sur les rapports entre la justice et les services de l'ASE ?
Pourriez-vous par ailleurs nous fournir davantage de précisions sur les bonnes pratiques que vous avez recueillies dans certains départements et qui pourraient être mises en place au niveau national, afin que les enfants soient mieux accompagnés et pris en charge ?
Mme Anne-Marie Nédélec, rapporteure de la commission des affaires sociales. - Ma question concerne la mise en place des dispositifs de coordination du parcours de soin des enfants confiés à l'ASE, notamment au regard des pathologies de santé mentale. La feuille de route issue des Assises de la pédiatrie et de la santé de l'enfant prévoyait la mise en place de ces dispositifs pour cette année. En 2020, selon la direction générale de la cohésion sociale (DGCS), seuls 10 % des enfants à leur entrée à l'ASE bénéficiaient d'un suivi médical effectif.
Selon les professionnels cités dans votre rapport, les enfants confiés à l'ASE ou bénéficiant de l'aide éducative à domicile représentent jusqu'à la moitié des adolescents hospitalisés à temps complet, en particulier pour des troubles du comportement et des syndromes dépressifs. Quel constat dressez-vous de la mise en place de ces parcours de soin et de la prise en charge des enfants sur les aspects de santé mentale ?
Pouvez-vous préciser le contenu de votre recommandation n° 5 relative à la prise en charge des enfants en situation de handicap et à l'invisibilisation de ces derniers en raison de l'absence de données fiables les concernant. Quelles évolutions appelez-vous de vos voeux ?
Mme Claire Hédon, Défenseure des droits. - Je partage entièrement votre avis, madame la rapporteure Canayer : la question de l'aide de l'État ne se résume pas à une problématique financière. Certes, les moyens financiers de l'État ont un rôle à jouer pour alléger la charge pesant sur les départements, mais il s'agit aussi de coordonner les différentes équipes et de les former. Il est indéniable que nous manquons de travailleurs sociaux et que leur travail a été vidé de son sens ; lorsqu'on leur demande de suivre un nombre excessif d'enfants, ils ne sont plus en mesure d'accomplir un travail de qualité.
J'insiste sur la prévention, car elle constitue un investissement qui, à terme, permet de réaliser des économies. L'exemple que j'ai cité concernant la maison des adolescents de Verdun illustre parfaitement ce point : au lieu d'évaluer uniquement le coût de cette structure, il faudrait mesurer les économies qu'elle génère en évitant des placements. Je m'inscris dans une perspective de protection des droits de l'enfant, mais je suis convaincue qu'il a également un impact positif sur le plan financier.
J'ai cru déceler dans votre question une certaine lassitude face à la multiplication des rapports. Permettez-moi de préciser qu'il s'agit ici non pas d'un énième rapport, mais d'une décision-cadre fondée sur la question des droits de l'enfant. Cette approche spécifique n'avait pas été adoptée jusqu'à présent.
Vous avez raison de souligner l'importance de l'intérêt supérieur de l'enfant, que je vais m'efforcer de définir : il englobe le droit à l'éducation, le droit à la santé et le droit d'être protégé contre toute forme de violence - des droits indissociables et indivisibles. C'est pourquoi il m'est difficile de hiérarchiser les mesures prioritaires : il est impératif d'agir sur l'ensemble des domaines. Cependant, je réitère mon insistance sur la prévention, un aspect trop souvent négligé en France, notamment dans le domaine de la santé.
Vous m'avez également interrogée, madame la sénatrice, sur l'arrêt de la Cour de cassation du 2 octobre 2024. Selon la Cour, l'accompagnement en milieu ouvert entre dans le cadre de la prévention. Toutefois, ces dispositifs nécessitent un accompagnement des familles confrontées à des situations difficiles. À condition qu'un accompagnement adéquat soit assuré auprès de la famille et du jeune, cette solution peut être parfaitement appropriée dans certaines circonstances.
Concernant l'éventuelle nécessité de modifier la loi, je le redis : l'essentiel est d'appliquer la loi. Or tel n'est pas le cas pour ce qui concerne le projet pour l'enfant, le PPE, et l'entretien un an avant la majorité. Une loi supplémentaire n'est donc pas nécessaire.
Une autre question récurrente concerne l'opportunité d'une recentralisation. Je ne crois pas du tout que ce soit la solution, ce qui n'exonère pas pour autant l'État de son rôle.
Quant aux recommandations prioritaires, je maintiens qu'il faut prendre en compte l'ensemble des recommandations formulées. Les droits de l'enfant doivent être appréhendés comme interdépendants et indivisibles. Si l'on ne travaille pas simultanément sur les questions de santé et de délais d'attente dans les centres médico-psychologiques (CMP) et les CMPP, et sur la question de l'éducation, on n'obtiendra pas de résultats.
S'agissant de la relation entre les services sociaux et la justice, la question des moyens de la protection judiciaire de la jeunesse (PJJ) se pose avec acuité. Certes, tout ne se résume pas à des moyens financiers, mais des ressources humaines sont indispensables. Je vous renvoie aux travaux que nous avions menés sur les Ehpad et les droits fondamentaux des personnes âgées qui y sont accueillies. Nous en revenons toujours, au final, à la question du taux d'encadrement et des moyens humains.
Enfin, concernant la recommandation n° 5 sur les enfants en situation de handicap, je le répète, nous sommes frappés par l'absence de chiffres sur la proportion d'enfants en situation de handicap. Ce point me semble crucial. Des besoins existent en matière d'accueil dans des structures adaptées, de scolarisation et d'accompagnement dans la scolarité. Il est également nécessaire de soutenir les enseignants afin que les enfants en situation de handicap qui sont dans leur classe ne soient pas livrés à eux-mêmes ; ils doivent bénéficier de formations suffisantes, notamment des formations communes avec les AESH. Des progrès restent à accomplir sur tous ces aspects, et je suis d'accord avec vous, ils ne se résument pas à des avancées impliquant des moyens financiers.
Mme Anne-Sophie Romagny. - Quelles mesures recommandez-vous pour garantir une meilleure prise en compte de la parole des enfants dans les décisions qui les concernent ? Notre collègue Xavier Iacovelli a déposé une proposition de loi visant à permettre l'accompagnement par un avocat des enfants placés à l'ASE. Pensez-vous que cela puisse être une solution ?
Quels sont, selon vous, les chantiers prioritaires à lancer pour améliorer rapidement la situation ? Dans mon département de la Marne, où se sont tenus les États généraux de la protection de l'enfance en décembre dernier, 20 mesures choc ont été proposées, telles que la mise en place de formations croisées entre les professionnels des différentes institutions pour favoriser le décloisonnement de la prise en charge, ou encore le développement d'un logiciel de suivi partagé entre les acteurs institutionnels. Quel est votre avis sur ces mesures ?
Mme Marie Mercier. - Le nombre d'enfants confiés aux départements augmente, malgré la baisse du taux de natalité dans notre pays, ce qui révèle un dysfonctionnement manifeste. Avant de prendre en charge les enfants, il est primordial de s'occuper des parents. Vous l'expliquez très justement : l'aide à la parentalité doit intervenir dès les prémices de la maternité.
Vous avez évoqué le droit au logement et d'autres aspects essentiels, mais quelles actions concrètes faut-il mettre en place pour éviter ces interventions curatives et urgentes qui surviennent lorsqu'il est déjà trop tard pour s'occuper de l'enfant ? Que pouvez-vous nous dire de plus sur la prévention ?
Mme Florence Lassarade. - Plusieurs métiers peuvent contribuer à la prévention auprès des parents et au suivi des enfants tout au long de leur jeunesse, notamment celui de pédiatre.
Le directeur d'une caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) m'a expliqué que, compte tenu de la raréfaction des pédiatres et de la prise en charge de la pédiatrie par les généralistes, on pouvait se passer de ces spécialistes. Pourtant, notre pays affiche un taux de mortalité infantile absolument démesuré pour une nation comme la nôtre, à 4 %o.
Ne serait-il pas simplement de bon sens, et ce à moindre coût, d'investir dans les vocations en mettant l'accent sur la profession de pédiatre, ainsi que sur celle de puériculteur ?
Mme Olivia Richard. - J'aimerais vous interroger sur un phénomène dont on entend de plus en plus parler : la prostitution des mineurs de l'ASE. En réalité, lorsque l'on évoque la prostitution, il s'agit d'exploitation sexuelle, voire de traite des êtres humains. Disposez-vous d'éléments à ce sujet ?
Mme Claire Hédon. - Madame la sénatrice, s'agissant de la prostitution des mineurs, vous avez raison de parler de traite des êtres humains. La France affiche, à juste titre, une volonté de lutter contre ce fléau.
Cependant, lorsque l'on place des jeunes filles et des jeunes garçons dans des gîtes ou des hôtels, sans éducateur ni suivi, on fait le lit de la traite des êtres humains. Pour les jeunes filles, il s'agit de prostitution ; pour les jeunes garçons, on les pousse à commettre des délits afin de récupérer de l'argent. C'est pourquoi nous nous battons contre ces accueils dépourvus d'encadrement. Néanmoins, vous avez raison, la question de la prostitution se pose également dans certains foyers d'accueil de l'ASE, ce qui en dit long sur la question des moyens humains pour accompagner ces jeunes.
S'agissant de la parole des enfants, permettez-moi de souligner que lorsque nous formulons des recommandations, nous nous les appliquons à nous-mêmes. Ainsi, pour notre rapport annuel sur les droits de l'enfant, nous consultons chaque année plus de 3 000 enfants, une démarche à laquelle Éric Delemar, le Défenseur des enfants, est très attaché et qu'il coordonne. Je pense que nous n'avons pas suffisamment le réflexe de donner la parole aux enfants et de les écouter.
Une chose nous frappe, notamment pour ce qui concerne des situations de harcèlement scolaire ou de violences éducatives : on entend souvent dire, lorsque nous menons nos enquêtes, que l'enfant n'a pas parlé. C'est faux ; l'enfant a parlé, mais il n'a pas été écouté. Nous constatons également que dans ces situations, si l'enfant a été écouté, les professionnels et les familles, eux, ne l'ont pas été. Écouter l'enfant ne signifie pas pour autant que c'est lui qui décide de tout, mais l'entendre est absolument essentiel.
Concernant les chantiers prioritaires, nous sommes convaincus de la pertinence des formations croisées, qui font l'objet d'une de nos préconisations. Je l'ai dit au sujet de l'accueil des enfants en situation de handicap à l'école : il faut des formations croisées entre les enseignants et les AESH ; c'est exactement la même chose pour la protection de l'enfance.
Quant à l'aide à la parentalité, j'estime qu'elle doit intervenir même avant la naissance, pendant le temps de la grossesse. Quelques expérimentations sont menées en ce sens et fonctionnent bien, mais il faut que cette aide soit dispensée de façon bienveillante et soit bien perçue par les familles. En effet, si les familles vivent dans la crainte du placement, elles ne voudront pas de cet accompagnement. En revanche, si cet accompagnement constitue une véritable aide, il peut donner des résultats. Je le redis, il faut que ce soit le plus tôt possible. J'ai cependant vu des situations où une femme en difficulté, dans les semaines qui suivent la naissance, demande de l'aide à l'assistante sociale et se voit proposer un placement...
Enfin, sur la question de la pédiatrie et du taux de mortalité, je voudrais que l'on fasse le lien avec les questions de pauvreté et de très grande pauvreté, entre autres dans les territoires d'outre-mer, et leur incidence sur la mortalité infantile. Oui, nous avons besoin de pédiatres, et il faut sans aucun doute en former davantage.
M. Alain Milon. - Il y a quelque temps, la commission des affaires sociales du Conseil de l'Europe a commandé un rapport relatif aux droits de l'enfant sur l'ensemble du territoire européen, qui a été rédigé par une députée espagnole. Ce rapport est particulièrement sévère à l'égard de l'Espagne, l'Italie, la France, l'Allemagne, la Belgique, l'Angleterre, etc., soit les pays dits développés, par opposition aux pays de l'Europe de l'Est qui seraient plus protecteurs de l'enfant. Avez-vous été auditionnée par cette rapporteure ? Par ailleurs, quelles relations avez-vous avec la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) ?
Mme Élisabeth Doineau. - Le constat que vous dressez ne peut que nous affliger, pour ne pas dire nous scandaliser, quant à la façon dont nous traitons les enfants, en particulier ceux confiés à l'ASE. Certes, il s'agit d'une question de moyens, tant humains que financiers. L'État n'a pas suffisamment aidé les départements lorsqu'ils ont pris cette compétence, et le fonds national de financement de la protection de l'enfance (FNFPE) n'a jamais été abondé ni même augmenté. L'État aurait pu, à tout le moins, compenser par des actions de décloisonnement.
Je déplore la persistance d'un travail en silos, notamment avec la justice. Certes, chacun a le nez dans le guidon et les réunions de coordination s'avèrent difficiles à organiser, mais c'est précisément là qu'il faut mettre de l'huile dans les rouages, entre la justice et le département, entre l'éducation nationale et le département, et entre les services des maisons départementales des personnes handicapées (MDPH) ou des maisons des adolescents (MDA) et le département. On constate un manque de transversalité. Ce secteur est aujourd'hui totalement déserté, il faut donc attirer les jeunes vers ces métiers ; c'est une question de volonté.
Il est insupportable qu'un enfant ne soit pas traité de la même façon en Mayenne, en Seine-et-Marne ou dans un territoire d'outre-mer. Vous dites que la décentralisation n'est pas le problème, mais il faut tout de même travailler sur le traitement homogène de ces enfants !
Si toutes les lois relatives aux enfants qui ont été adoptées avaient été appliquées, la situation serait différente. C'est lamentable !
Comment pouvez-vous aider l'ensemble des acteurs susceptibles de s'inscrire dans ce travail collectif à se mobiliser ?
M. Xavier Iacovelli. - Le constat est déprimant et les problèmes s'accumulent. Le point positif, c'est que l'on parle de la protection de l'enfance, laquelle sauve encore des enfants en dépit de graves dysfonctionnements internes.
Certains chiffres m'ont frappé, notamment celui-ci : 77 % des juges des enfants renoncent à prendre une décision de placement, faute de places. On consacre plus de 10 milliards d'euros aux 400 000 enfants qui relèvent de l'ASE et l'on n'est pas capables de les accueillir correctement !
Tout le monde dit qu'il faut changer les choses, mais les textes qui sont adoptés ne sont pas appliqués. C'est le cas de la loi de Philippe Bas du 5 mars 2007 réformant la protection de l'enfance, qui n'est pas encore entièrement appliquée, de la loi de Laurence Rossignol du 14 mars 2016 relative à la protection de l'enfant, et de la loi d'Adrien Taquet du 7 février 2022 relative à la protection des enfants. Quand on pense que l'on a placé des enfants dans des chambres d'hôtel, sans encadrement ! Et l'on s'étonne qu'il y ait de la prostitution... Aujourd'hui encore, un certain nombre de départements n'appliquent pas ces textes faute de places dans les structures et dans les familles d'accueil. En tant que législateur, j'ai l'impression d'être inutile !
Depuis la décentralisation, l'État, se défausse sur les départements. Les chiffres sont catastrophiques : 2 % du budget de l'ASE provient de l'État, contre 17 % à 23 % pour les départements. La politique des petits pas est révolue, il faut se mettre autour de la table et réfléchir à la façon de protéger ces 400 000 enfants, car le système actuel ne fonctionne pas. Il faut se demander quel est le meilleur chef de file, le meilleur mode de financement, le meilleur mode d'hébergement.
On parle d'attractivité des métiers, mais on n'associe même pas les assistants familiaux aux prises de décision, alors qu'ils ont les enfants à charge 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7. Et au moindre signalement malveillant, on leur retire les enfants et leur indemnité. Comment, dans ces conditions, attirer les jeunes professionnels vers le secteur social ? Le taux d'encadrement est quasiment inexistant, et cela ne semble poser problème à personne ! Quant aux dossiers des référents ASE, ils ne sont pas suivis.
Il faut une révolution dans la protection de l'enfance ; à défaut, nous en serons au même point, ou dans une situation qui sera pire l'année prochaine.
Mme Laurence Rossignol. - Je vous remercie d'avoir souligné que nous n'avions pas besoin de nouvelle réforme législative. Pourquoi les lois de 2007, de 2016 et de 2022 ne sont-elles pas appliquées ?
À l'exception des lois fiscales, les lois ne s'appliquent pas mécaniquement. Certaines lois nécessitent une mobilisation, surtout lorsqu'elles concernent le fonctionnement et les pratiques des collectivités territoriales. La loi de 2016 n'a pas bénéficié d'un suivi adéquat. Force est de constater qu'en 2017, l'absence de ministère chargé de l'enfance a entraîné un défaut de prise en charge de ce sujet majeur. Il aurait fallu faire le tour des départements, réunir tous les acteurs - Parquet des mineurs, juge des enfants, éducation nationale, département, associations - autour de la table, car nombre de difficultés dans le fonctionnement de la protection de l'enfance découlent de la multiplicité des intervenants. Parfois, cinq à sept intervenants sociaux travaillent sur le dossier d'une famille en difficulté sans communiquer entre eux. Il aura fallu attendre l'arrivée d'Adrien Taquet pour que ce dossier soit repris.
Les parlementaires doivent aussi être cohérents lorsqu'ils adoptent certaines dispositions qui ont des conséquences en termes de précarisation des familles. Par exemple, on ne peut pas, à la fois, voter un report du versement des allocations familiales pour les familles étrangères en situation régulière, et verser ensuite des larmes de crocodile sur la pauvreté des familles ! Nous savons en effet qu'il existe un lien entre pauvreté et fragilité des enfants. C'est pourquoi je plaide pour une approche pluridisciplinaire de l'activité parlementaire. C'est aussi cela, faire de la prévention en tant que législateurs.
Les éducateurs doivent être réellement spécialisés, ce qu'ils ne sont pas actuellement. La victimologie comme l'identification des violences sexuelles subies dans l'enfance doivent enseignées, et il faut créer des métiers spécifiques dédiés à la protection de l'enfance. Mais personne ne s'attelle à la refonte des modules de formation parce que c'est trop compliqué.
Je suis toujours stupéfaite de constater que, dans un département, un fonctionnaire, directeur ou directrice du service enfance-famille, pouvait être affecté à la voirie la semaine précédente et passer aux finances la semaine suivante. Là encore, aucune compétence spécifique n'est exigée pour ces métiers, ce qui n'est pas normal.
La disparité des prises en charge selon les départements a un caractère antirépublicain. L'égalité de traitement doit être garantie.
Je conclurai par une réflexion d'ordre politique : jamais un président de département n'a été élu, réélu ou battu sur son bilan en matière de protection de l'enfance. Dans ce secteur, il n'y a pas de lobbies ! Mieux vaut s'occuper des personnes âgées, qui, elles, votent...
La présence de l'État demeure nécessaire pour assurer la régulation et l'égalité ; or nous sommes très en deçà s'agissant de cette présence étatique. Personne ne m'a dit jusqu'à présent que la situation était meilleure avec la Ddass ; la question n'est donc pas de centraliser ou de recentraliser. Reste à savoir quel est le bon représentant de l'État.
Mme Agnès Canayer a évoqué le placement à domicile. Disposons-nous d'une évaluation de la qualité de l'accompagnement effectué dans ce cadre ? Ne s'agit-il pas d'une solution low cost, une alternative à l'absence de solutions de placement satisfaisantes pour les enfants ?
J'évoquerai un dernier point. Les enfants relevant de la protection de l'enfance ont souvent des parents qui ont connu la même situation, ce qui retarde les signalements par les parents eux-mêmes, lesquels n'appellent pas à l'aide. Il convient donc de faire évoluer la pratique sociale pour construire les politiques sociales avec les usagers. Nous ne pourrons pas aider les familles sans entendre ce qu'elles ont à nous dire sur la façon dont elles ont vécu la Ddass ou l'ASE et sur leur peur des services sociaux.
Mme Nadine Bellurot. - Est-il exact que les allocations familiales sont versées aux parents, et non aux familles qui accueillent les enfants et s'en occupent au quotidien ?
Mme Brigitte Micouleau. - Comment éviter les ruptures brutales de prise en charge lors du passage à la majorité des jeunes suivis par l'ASE ?
M. Khalifé Khalifé. - Lorsque j'étais coordinateur de la cohésion sociale dans une métropole de 300 000 habitants et conseiller départemental, je n'avais pas saisi tous les détails du fonctionnement de la protection de l'enfance. L'aspect multifactoriel de ce sujet explique-t-il le manque de données chiffrées ? Tous les partenaires que vous avez cités travaillent-ils en silos ?
La prévention spécialisée, qui nécessite d'importants moyens financiers, a-t-elle fait l'objet d'une évaluation ?
Tous les départements se plaignent de l'augmentation croissante du nombre de mineurs placés, accompagnés ou non, qui sont en situation de handicap. Comment expliquez-vous cette augmentation ?
Vous êtes Défenseure des droits. Avez-vous envisagé d'être également Défenseure des devoirs ?
Mme Claire Hédon. - Je ne doute pas que, dans la vie, nous ayons des devoirs. Mais c'est parce que nous avons des droits que cela peut effectivement impliquer un certain nombre de devoirs. C'est en mettant les termes les dans le bon ordre que l'on pourra avancer !
M. Milon m'a demandé si nous avions été auditionnés par la commission des affaires sociales du Conseil de l'Europe. Nous faisons en réalité partie du Réseau européen des médiateurs pour enfants (Enoc), qui a été entendu sur le sujet de la protection de l'enfance, ce qui n'a pas été notre cas.
S'agissant de nos relations avec la CJUE et la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH), nous avons la possibilité de formuler des observations devant ces juridictions, comme devant les tribunaux administratifs et judiciaires.
L'institution traite majoritairement 140 000 réclamations. Dans 80 % des dossiers, nous privilégions la médiation, qui aboutit dans les trois quarts des cas. Lorsque la médiation n'est pas possible, nous procédons à une enquête. Notre grande force réside dans nos pouvoirs d'enquête : on ne peut nous opposer le secret des affaires, nous pouvons faire des visites sur place et les personnes convoquées sont tenues d'accepter. Nous rendons des décisions assorties de recommandations, mais nous n'avons pas de pouvoir de contrainte. Nous ne relevons pas de la justice ; devant les tribunaux, nous représentons la défense des droits.
Pour ce qui concerne le travail en silos, nous constatons en effet un manque de liens entre les MDPH et les conseils départementaux, qui sont pourtant censés travailler ensemble. Nous sommes très étonnés que les conseils départementaux ne soient pas en mesure d'indiquer le nombre d'enfants en situation de handicap pris en charge par la protection de l'enfance puisqu'ils sont à la tête de ces maisons. Ce problème pourrait être facilement résolu.
Le constat que nous faisons vous déprime, avez-vous dit. Or tout ne va pas mal. Un point positif : on parle désormais de la protection de l'enfance. Nous avons besoin des parlementaires pour voter des lois et pour contrôler leur application.
Seuls 20 % des PPE seraient réalisés, ce qui constitue à mon avis l'un des problèmes majeurs.
Concernant le soutien à la parentalité, on ne peut pas considérer la protection de l'enfance séparément des questions de petite enfance, d'école, de handicap et d'accès aux soins. Soyons très clairs : il faut lutter contre la pauvreté.
Il est vrai qu'une grande partie des enfants actuellement placés ont des parents qui ont eux-mêmes été placés. J'y suis très sensible, notamment du fait de mon passé au sein du mouvement ATD Quart Monde. Il y a une peur du contrôle social ressentie par les familles, une peur du placement, que nous pourrons vaincre grâce au soutien à la parentalité ; c'est le seul moyen d'éviter les placements.
Je le disais, ces droits sont indivisibles et interdépendants. Ainsi, la question du logement est liée à celles de la carence éducative, des violences et de la maltraitance. Or on n'a jamais aussi peu construit de logements sociaux et très sociaux.
Pourquoi les lois ne sont-elles pas appliquées ? Vous soulevez là un sujet intéressant : la place de l'enfant dans notre société. Un président de département n'a jamais été élu parce qu'il a accompli un bon travail en matière de protection de l'enfance. Cette absence d'attention que l'on porte aux enfants en situation de fragilité, on la retrouve vis-à-vis des personnes âgées en Ehpad. Or c'est la vulnérabilité qui crée le risque d'atteinte aux droits. Quels moyens humains et financiers est-on prêt à consacrer à la protection de ces personnes, c'est la question.
Concernant le rôle de l'État, il faut redonner aux préfets, qui sont essentiels, un rôle de coordination.
Sur le placement à domicile, je n'ai pas connaissance d'évaluations. A priori, je n'y suis pas opposée s'il s'agit d'un accompagnement, et non pas d'un pis-aller faute de places. Est-ce une solution low cost ? C'est un risque, en effet.
J'en viens à la question relative aux prestations familiales. Les familles d'accueil perçoivent, par le biais des départements, les prestations inhérentes au fait qu'elles ont des enfants à charge. Les prestations familiales permettent de soutenir la parentalité, et notamment d'assurer le droit de visite et d'hébergement. Si l'on veut que l'enfant puisse retourner dans sa famille grâce à l'accompagnement dont il bénéficie, au lieu de rester placé, alors la question des allocations familiales est centrale. Poser des questions simplistes ne permettra pas de résoudre les problèmes !
Mme Nadine Bellurot. - Je suis désolée d'avoir posé une question simpliste ! Je ne suis pas certaine que ce soit la façon la plus appropriée de vous adresser à des élus de la République...
Mme Claire Hédon. - Je voulais parler de solutions simplistes, et j'assume mes propos. La question des allocations familiales est un serpent de mer : elle revient régulièrement, comme si punir des familles était la solution.
Mme Nadine Bellurot. - Je vous ai simplement posé une question, pour m'éclairer sur un point précis...
Mme Claire Hédon. - La question des jeunes majeurs est essentielle : un certain nombre d'entre eux se retrouvent sans aucune solution à l'âge de 18 ans.
L'entretien un an avant la majorité est indispensable pour connaître les aspirations du jeune et déterminer s'il a besoin d'un accompagnement. Cet accompagnement des jeunes majeurs devrait être systématique. Alors que l'âge moyen de départ du foyer familial s'établit, en général, à 24 ans, en matière de protection de l'enfance, on considère pourtant qu'à 21 ans le jeune doit être indépendant.
S'agissant du nombre élevé d'enfants en situation de handicap pris en charge par la protection de l'enfance, j'éprouve des difficultés à en expliquer les raisons. L'une des situations que nous avons observées dans le cadre des réclamations est celle de parents d'enfants en situation de handicap qui, totalement démunis et faute de trouver une place dans un institut médico-social, finissent par s'apercevoir que la seule solution est le placement de leur enfant. Cela montre à quel point il est impératif d'agir sur l'ensemble des leviers.
Pour conclure, je veux redire que la prévention est absolument essentielle.
Mme Muriel Jourda, présidente. - Je souhaite revenir sur les propos de Nadine Bellurot. Lorsqu'un enfant est placé, les allocations familiales sont-elles versées à la famille d'accueil ? Plus largement, les allocations doivent-elles bénéficier à la personne qui a la charge quotidienne de l'enfant ou à celle qui ne l'a plus ? La question, qui est dans une large mesure financière, n'est pas si simple.
Pour évoquer des considérations simplistes, j'ai du mal à entendre que les carences éducatives sont liées à la pauvreté. Ce n'est pas nécessairement le cas.
Mme Claire Hédon. - Je suis entièrement d'accord avec vous, les carences éducatives peuvent exister dans des milieux aisés. Mais je défie quiconque de ne pas se trouver en situation de carence éducative lorsqu'il élève quatre enfants dans une chambre de bonne.
Mme Laurence Rossignol. - Les juges des enfants décident si les allocations familiales sont versées au département ou si elles sont maintenues au bénéfice de la famille. Elles peuvent être maintenues au bénéfice de la famille parce que seul un enfant est placé, tandis que d'autres enfants restent au foyer. En outre, les placements ne sont pas toujours définitifs, et l'on ne peut pas non plus mettre les familles en grande difficulté financière, car cela aurait pour effet d'altérer les chances de retour de l'enfant dans sa famille.
Lorsque le juge décide de verser les allocations familiales au département, c'est ce dernier qui les encaisse, après quoi il attribue aux familles d'accueil à la fois une rémunération et une prestation d'entretien pour l'enfant. Les allocations familiales sont donc intégrées, lorsqu'elles sont versées au département - et même lorsqu'elles ne le sont pas - dans le montant de la prestation à l'enfant et la rémunération des familles d'accueil. Cette question ne donne pas lieu à une solution nouvelle.
S'agissant de l'allocation de rentrée scolaire, depuis la loi de 2016, elle n'est plus versée à la famille, mais à la Caisse des dépôts et consignations (CDC) afin de constituer un pécule qui sera remis à l'enfant lorsqu'il quittera l'ASE à sa majorité. Or les départements n'informent pas les enfants qu'ils ont droit à ce pécule. Ainsi, environ 40 % des sommes restent à la CDC et ne sont pas versées aux enfants.
Ce pécule, accumulé depuis la loi de 2016, représente près de 3 000 euros par jeune, ce qui permettrait par exemple de payer une caution pour un logement. Il convient donc d'organiser le circuit de restitution aux enfants, une restitution qui n'intervient pas en raison de problèmes de transmission d'informations.
M. Marc-Philippe Daubresse. - Lors de mes responsabilités gouvernementales, j'ai été chargé, outre du logement, de la lutte contre la pauvreté et de la jeunesse. Les nombreuses études que nous avons menées ont mis en évidence un lien avéré entre les problèmes d'accès au logement et l'enfance en danger. En revanche, il n'existe pas de lien avéré entre la pauvreté et l'enfance en danger.
Il est vrai que nous éprouvons tous ici un sentiment d'impuissance. Le problème réside non pas dans la loi, mais dans son application, et notamment dans la gouvernance des dispositifs. Le pouvoir central du préfet n'est pas avéré : on réunit plusieurs services autour de la table, qui se contredisent... Il faut un chef qui tranche les problèmes. Même s'il est intéressant de libérer la parole, actuellement on ne décide pas et les dossiers s'alourdissent.
Il est vrai, également, que l'on n'a jamais délivré aussi peu d'agréments pour des logements sociaux que l'an dernier. Il est grand temps de résoudre le problème du logement - pourtant primordial, il est passé au second plan - ; ne pas le faire entraînerait des conséquences sociales en cascade.
Mme Claire Hédon. - On observe les mêmes problèmes concernant l'allocation de rentrée scolaire et la récupération du pécule. En réalité, même lorsqu'ils sont au courant, les jeunes peinent à le récupérer, et la CDC a du mal à retrouver ceux qui sont susceptibles d'en bénéficier.
L'enfance en danger existe non pas uniquement, mais majoritairement, dans les familles en situation de pauvreté. Pour ma part, j'établis un lien entre la carence éducative et la pauvreté, laquelle implique notamment des difficultés d'accès au logement.
Le préfet a un rôle central pour coordonner les différentes équipes. Or la coordination revêt une importance absolument essentielle ; il ne s'agit pas là de moyens financiers.
M. Philippe Mouiller, président. - Madame la Défenseure des droits, nous vous remercions des réponses que vous nous avez apportées dans le cadre de cette audition commune.
Cette audition a fait l'objet d'une captation vidéo disponible en ligne sur le site du Sénat.
La réunion, suspendue à 10 h 20, est reprise à 10 h 25.
Rapport annuel du Défenseur des droits pour 2024 - Audition de Mme Claire Hédon, Défenseure des droits
Mme Muriel Jourda, présidente. - Dans la suite de notre discussion, Madame Hédon, je vous invite désormais à poursuivre la présentation du rapport annuel pour 2024.
Mme Claire Hédon, Défenseure des droits. - Premier point : je tiens à insister sur la lutte contre les discriminations, lesquelles sont en augmentation selon toutes les enquêtes, alors que nous observons une baisse des réclamations à cet égard, malgré la création de la plateforme Antidiscriminations.fr et du numéro de téléphone dédié 39 28.
Selon l'enquête Trajectoires et Origines (TeO), 18 % des personnes interrogées âgées de 18 à 49 ans déclaraient avoir été discriminées, contre 14 % en 2008. Par ailleurs, selon le baromètre sur la perception des discriminations dans l'emploi du Défenseur des droits et de l'Organisation internationale du travail (OIT), un jeune actif sur trois âgé de 18 à 34 ans rapporte avoir été victime de discrimination, contre un sur cinq en population générale. Enfin, selon l'enquête dite de victimation du service statistique ministériel de la sécurité intérieure (SSMSI), le nombre de victimes de discrimination a augmenté de 52 % entre 2021 et 2022. Cette hausse est préoccupante.
Ces discriminations concernent notamment les retours au travail après un congé maternité et le maintien dans l'emploi de personnes en situation de handicap. Je tiens à vous alerter sur celles liées à l'origine réelle ou supposée des personnes, qui augmentent d'année en année : 25 % des réclamations que nous recevons en font état, si l'on cumule les critères d'origine, de nationalité, d'apparence physique et de convictions religieuses, lesquels ne sont pas exclusifs les uns des autres. Aux mois de juin et juillet 2024, nous avons noté un pic d'appels sur notre plateforme d'accompagnement du Défenseur des droits sur les discriminations, joignable au 39 28, rapportant des propos haineux à teneur raciste, antisémite, homophobe, entre autres.
Nous connaissons une phase d'essoufflement des politiques publiques sur le sujet depuis quelques années. Or la lutte contre les discriminations ne saurait peser sur les seules victimes, auxquelles incomberait l'obligation de porter plainte. Il y a aussi eu des avancées, notamment le nouveau régime applicable à l'action de groupe, depuis la loi du 30 avril 2025 portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne (Ddadue) en matière économique, financière, environnementale, énergétique, de transport, de santé et de circulation des personnes : des amendes peuvent être prononcées par le juge à l'encontre des personnes mises en cause.
Le contentieux n'est pas la seule voie possible pour résoudre les problèmes de discrimination. Nous agissons aussi beaucoup au travers de médiations. En 2024, l'institution a traité plus de 1 200 dossiers de cette façon, qui ont abouti à des règlements amiables dans plus de trois quarts des cas.
Le Défenseur des droits obtient des résultats, mais il nous faut communiquer plus largement pour sensibiliser au problème des discriminations et lutter contre le phénomène de non-recours. Je signale quees parlementaires ont la possibilité de nous saisir et vous invite également, mesdames, messieurs les sénateurs, à encourager vos administrés à prendre contact avec nous.
Nous sommes frappés par le fait que les personnes qui appellent le 39 28 ont surtout besoin d'être entendues. Elles souhaitent qu'on leur confirme qu'elles sont bien victimes de discrimination, et ne portent pas forcément de réclamation.
Second point sur lequel je souhaite vous alerter : les problèmes liés à la dématérialisation des services publics, qui ne s'améliore pas, au contraire. Disant cela, je ne mets pas en cause l'action des agents, mais bien plutôt leur effacement, leur surcharge de travail. S'agissant de l'Administration numérique des étrangers en France, l'Anef, j'ai fait part du problème au Parlement voilà deux semaines, dans le cadre de la mission d'information sénatoriale « Faciliter l'accès aux services publics, restaurer le lien de confiance entre les administrations et les administrés », et devant les députés membres du groupe d'études « Conditions d'accueil des migrants et mineurs non accompagnés ».
Les rapports entre les usagers et les services publics font l'objet de 90 % des réclamations que nous recevons, 37 % desdits courriers concernant les titres de séjour et leur renouvellement.
Je veux donc insister devant vous sur les multiples dysfonctionnements de l'Anef, qui vont de l'empêchement de déposer un dossier à l'impossibilité de le compléter ou de le modifier. Chaque année, des milliers de personnes sont, de ce fait, précarisées et mises en situation irrégulière, faute de diligence de l'administration dans le cadre de leur demande de renouvellement de titres de séjour. Je signale que ces cas concernent des gens intégrés dans la société et parfaitement en règle, qui parfois perdent ainsi leur emploi. Les préfectures ont conscience de ce problème. En vue de le résoudre, nous avons recommandé le renouvellement automatique des attestations de prolongation d'instruction (API), qui maintiennent les demandeurs en situation régulière le temps de l'instruction de leur dossier.
Le ministre de l'intérieur nous a répondu qu'il reconnaissait les dysfonctionnements de l'Anef et qu'il partageait notre analyse quant aux difficultés rencontrées. Il estime toutefois qu'elles ont été largement prises en compte et corrigées, ce qui n'est pas le cas.
Concernant la déontologie des forces de sécurité, nous avons été saisis en 2024 de 2 034 cas et avons été frappés de recevoir de la part de l'administration des rapports incomplets, erronés, minimisant les incidents. Nous avons relevé des défaillances dans le contrôle hiérarchique face à des manquements déontologiques de la part d'agents, des inactions de supérieurs dans des cas d'abus, des enquêtes non diligentées, l'absence de contrôles effectifs lors d'évènements à forte exposition médiatique, comme la finale d'une grande compétition sportive.
Le 23 décembre 2024, nous avons rendu une décision visant à recommander une meilleure détection de la soumission chimique. Les forces de l'ordre ont en effet parfois du mal à distinguer l'alcoolisation d'un tel état, car les symptômes sont très proches. Il s'agit de faciliter l'accès à des kits de détection dans les commissariats, les brigades de gendarmerie et les unités médico-judiciaires.
En 2024, 3 898 élèves gardiens de la paix ont bénéficié des formations aux règles déontologiques dispensées par les équipes du Défenseur des droits.
Concernant la protection des lanceurs d'alerte, pilier essentiel de la démocratie et de la transparence, nous observons une hausse significative des saisines, dont le nombre est passé de 134 en 2023 à 519 en 2024. Un pôle spécialisé a été créé au sein de nos services. Grâce au Défenseur des droits, plusieurs licenciements ont ainsi été annulés, des droits reconnus et des atteintes réparées. L'institution a pris une place centrale dans la réorientation des alertes.
En 2024 a été publié notre premier rapport bisannuel sur les lanceurs d'alerte. Notre mission à cet égard est d'améliorer la communication autour du dispositif légal relatif aux lanceurs d'alerte ainsi que le soutien financier psychologique et financier dont ils bénéficient, et de réévaluer le périmètre des Autorités externes pour le recueil des signalements émis par les lanceurs d'alerte (AERS), notamment afin d'y inclure les agences régionales de santé (ARS). Faire reconnaître, protéger et accompagner, c'est la triple exigence qui s'impose à nous dans ce domaine, car les lanceurs d'alerte sont des vigies de l'intérêt général.
Les valeurs de la République recouvrent des réalités concrètes. La mission confiée par la Constitution au Défenseur des droits est de contribuer à rendre la société plus apaisée et plus juste, de garantir l'État de droit, de promouvoir et faire respecter les droits fondamentaux. L'institution constitue un pôle de stabilité et de permanence. Avec votre concours, nous voulons continuer à lutter contre les atteintes aux droits qui rongent la cohésion sociale, pour que le droit n'oublie personne et que personne n'oublie le droit.
M. Hussein Bourgi. - Concernant les difficultés de renouvellement des titres de séjour dans les préfectures, j'ai l'impression qu'il s'agit pour les autorités, de façon délibérée, mais non assumée, de gérer la politique migratoire de la France, entrainant une rupture de l'égalité des chances. Selon que les personnes concernées auront pu, ou non, contacter un président de chambre consulaire ou un élu qui les soutiendra auprès du préfet ou du sous-préfet, elles auront plus ou moins de chances d'obtenir satisfaction. Cela me choque.
Dans nos services consulaires installés à l'étranger, l'externalisation de l'instruction des demandes de visas occasionne des trafics, ce qui nuit à l'image de la France. Pourriez-vous vous pencher sur ce problème, car il y a, là aussi, rupture d'égalité ?
Par ailleurs, madame la Défenseure des droits, je vous ai écrit le 7 avril dernier pour vous signaler deux situations précises, l'une relative à une discrimination liée au handicap dans les Hauts-de-France, l'autre concernant un problème rencontré par des élus locaux exerçant la profession d'avocat avec l'institution de retraite complémentaire des agents non titulaires de l'État et des collectivités publiques (Ircantec). Deux mois, plus tard, je n'ai pas reçu de réponse. Je tenais à vous le dire afin de montrer que les délais d'envoi d'un accusé de réception par vos services peuvent être anormalement longs.
Mme Corinne Narassiguin. - La plateforme Anef pose de nombreux problèmes, et je vous remercie pour votre travail sur ce sujet. Parallèlement, il faudrait également augmenter les effectifs dans les préfectures...
Le nombre de cas de discriminations a connu un pic l'été dernier. Était-ce en corrélation avec la campagne des élections législatives ? Avez-vous identifié d'autres facteurs, liés par exemple au débat public et politique ? Vous signalez par ailleurs une diminution des plaintes, ce qui indiquerait qu'il y a une perte de confiance dans les services existants pour traiter les discriminations.
J'ai défendu il y a quelques semaines une proposition de loi tendant à rétablir le lien de confiance entre la police et la population, qui visait à réformer les contrôles d'identité, et qui a été rejetée. Constatez-vous une évolution chez les policiers concernant la nécessité de mieux former sur les règles déontologiques et de disposer de meilleurs moyens de contrôle, en vue d'améliorer le fonctionnement et l'image de la police, qui doit être un service républicain irréprochable ?
M. Christophe Chaillou. - Je partage les propos d' Hussein Bourgi sur l'obtention des titres de séjour. En tant qu'élus nous intervenons régulièrement dans des situations de plus en plus inextricables, notamment dans mon département pour des familles de médecins, professionnels sur lesquels nous comptons beaucoup. Selon moi, cette situation est délibérée, ce qui est inacceptable.
Concernant les centres de rétention administrative (CRA), avez-vous observé au cours des derniers mois des évolutions, positives ou négatives ?
Mme Muriel Jourda, présidente. - L'Anef est défaillante depuis plusieurs années, et la commission des lois l'avait déjà documenté en 2022. J'entends votre souhait d'illustrer par ce biais la déficience des systèmes numériques. Je crains fort qu'il ne s'agisse pas d'un cas isolé...
Mme Claire Hédon. - Nous alertons sur les dysfonctionnements de l'Anef depuis quatre ans, mais notre mobilisation n'a pas encore abouti.
Les démarches administratives entièrement dématérialisées mettent en difficulté une partie de la population. Selon le Centre de recherche pour l'étude et l'observation des conditions de vie (Crédoc), 44 % de nos concitoyens se plaignent de la dématérialisation. Le problème est de ne pouvoir ni déposer un dossier papier ni rencontrer une personne ayant accès à son dossier. On fragilise ainsi nombre d'entreprises, en particulier des petits entrepreneurs. Et les dossiers relatifs aux droits des étrangers s'accumulent dans toutes les administrations !
Concernant les titres de séjour et les visas, il existe bien un commerce illégal : une prise de rendez-vous peut être vendue 500 euros !
Monsieur Bourgi, il n'est pas normal que vous n'ayez pas reçu de réponse. Je vais me renseigner pour savoir ce qui explique cette situation. Nos services sont en tension. Nous allons bientôt atteindre le chiffre de 160 000 réclamations ! En réglant le problème de l'Anef, nous pourrions désengorger l'institution. L'exemple de la plateforme des impôts, qui fonctionne bien, pourrait être suivi.
À propos de l'Ircantec, nous sommes frappés par le nombre de passages à la retraite problématiques et de non-versement de pensions, tous domaines professionnels confondus. C'est inquiétant.
L'augmentation du nombre d'appels dénonçant des discriminations, voilà un an, était liée sans aucun doute à la campagne des élections législatives. Cela montre l'impact d'une libération de la parole raciste, sexiste, homophobe et antisémite.
S'agissant des non-recours en cas de discrimination, nous avons mené une enquête : par exemple, 38 % des avocats disent avoir été victimes de discrimination lors des cinq dernières années - 50 % pour les seules avocates. Or moins de 5 % d'entre eux en ont saisi un tribunal ou une institution telle que la nôtre alors qu'il s'agit de professionnels du droit.
Mme Muriel Jourda, présidente. - Il arrive parfois que les avocats ne saisissent pas les tribunaux, car ils savent comment ils fonctionnent...
Mme Claire Hédon. - C'est la raison pour laquelle nous avons voulu augmenter le nombre de médiations. Par ailleurs, la peur des représailles est réelle, et justifiée.
Sur la question des contrôles d'identité, nous n'avançons pas mais nous continuons à former les forces de l'ordre, lesquelles se plaignent de l'absence d'efficacité de ces contrôles.
Nous enquêtons au sein des CRA : les violences qui s'y déroulent nous inquiètent. Les réclamations à ce titre nous parviennent via les associations, dont je salue le travail.
M. François Bonhomme. - La présentation de ce rapport a donné lieu à un flot ininterrompu de récriminations, que vous interprétez comme bon vous semble. Le Défenseur des droits est certes une autorité administrative indépendante, mais indépendance ne signifie pas impartialité.
Le fait de mettre en avant l'hyper-subjectivité et le ressenti personnel donne le sentiment que notre pays est sujet à toutes les dérives, que les droits y sont bafoués, que les discriminations sont généralisées, bref, que tout va mal. Je ne partage pas cette analyse. Si l'on vous écoutait, la reconnaissance des droits individuels n'aurait aucune limite ! Nous aussi, parlementaires, sommes les réceptacles de plaintes, notamment relatives aux dysfonctionnements de l'administration. Tout comme vous, nous sommes des vigies de l'intérêt général, pour reprendre vos mots, mais la différence, c'est que nous sommes élus !
Vous vous répandez dans les médias, vous forgeant ainsi une forme d'expertise. Votre façon de sélectionner les sujets force l'admiration... Insensiblement, vos rapports participent du délitement des notions d'universalisme et d'intérêt général.
Sur la proposition de loi tendant à rétablir le lien de confiance entre la police et la population, déposée par nos collègues socialistes et visant à instaurer des récépissés de contrôle d'identité, vous avez indiqué que les forces de police elles-mêmes critiquaient ces contrôles... Nous n'avons pas entendu les mêmes propos ! Au contraire, les policiers redoutaient de devoir appliquer cette procédure du récépissé. Vous avez interprété leurs réponses et simplifié les choses.
Je note la virulence dont vous faites preuve dès que nous essayons d'introduire une nuance ou une différence d'appréciation. Vous devez admettre que les parlementaires peuvent avoir une autre opinion que la vôtre !
Mme Claire Hédon. - La nature de notre institution est d'identifier les atteintes qui sont portées aux droits.
Je n'arrive pas à vous convaincre de la gravité de la situation des discriminations. Pourtant, de nombreuses femmes se font licencier au retour de leur congé maternité, par exemple, et je suis frappée par le nombre de discriminations liées au handicap lors de l'embauche mais aussi à l'occasion du maintien dans l'emploi. Je continuerai donc à travailler sur ces questions.
Concernant les contrôles d'identité discriminatoires, je vous enverrai l'enquête que nous avons menée. Dans ce cadre, le récépissé permettrait d'assurer une traçabilité. En Grande-Bretagne, le contrôle est enregistré sur une tablette.
Le Défenseur des droits a un rôle pacificateur quand il rétablit les personnes dans leurs droits. Et dans les trois quarts des cas, les médiations aboutissent. La loi organique de 2011 lui a confié la mission de protéger les droits, et de promouvoir les droits et libertés. Nous y avons tous intérêt, car il y va de la cohésion sociale.
Mme Audrey Linkenheld. - Si l'on ne s'intéresse qu'à ce qui va bien, il n'y plus besoin de parlementaires ! Le fait que Madame Hédon nous parle d'abord de ce qui ne fonctionne pas ne me choque donc pas. Nous avons la chance de vivre dans un État de droit ; dans ce cadre, dire ce qui va mal contribue à l'intérêt général.
Je rejoins Hussein Bourgi, Corinne Narassiguin et Christophe Chaillou : lorsque nous visitons des CRA, par exemple, nous constatons la réalité des difficultés évoquées. Nous devons faire en sorte, tous ensemble, que la situation s'améliore dans l'intérêt de nos concitoyens et de l'État de droit.
M. Francis Szpiner. - J'ai longtemps été hostile aux statistiques ethniques. Aujourd'hui, je doute davantage et me demande si cet outil ne nous permettrait pas d'écarter certains fantasmes délétères qui dégradent le débat public. Quelle est votre position à cet égard ?
Mme Claire Hédon. - Nous n'avons pas besoin de telles statistiques. Nous menons d'ores et déjà beaucoup d'enquêtes dans ce domaine...
M. Francis Szpiner. - Disant cela, je ne pensais pas seulement aux personnes victimes de discrimination, mais à la délinquance, à la situation dans les prisons, aux affaires judiciaires et plus généralement aux statistiques policières.
Mme Claire Hédon. - Certes, mais nous parvenons à recueillir nombre d'informations sans avoir besoin de statistiques ethniques.
La question de la défense des droits est essentielle, et n'est ni de droite ni de gauche. C'est un fondement de notre démocratie, de la liberté, de l'égalité et de la fraternité. Regardez ce qui se passe outre-Atlantique en ce moment : dans les programmes d'université, les sujets relatifs aux discriminations entre les hommes et les femmes ou à l'inclusion des personnes handicapées sont interdits...
Mme Muriel Jourda, présidente. - Nous vous remercions, madame la Défenseure des droits.
Cette audition a fait l'objet d'une captation vidéo qui est disponible en ligne sur le site du Sénat.
Proposition de loi portant diverses dispositions en matière de gestion des milieux aquatiques et de prévention des inondations (GEMAPI) - Examen des amendements au texte de la commission
Mme Muriel Jourda, présidente. - Nous examinons les amendements au texte de la commission sur la proposition de loi portant diverses dispositions en matière de gestion des milieux aquatiques et de prévention des inondations (GEMAPI).
EXAMEN DES AMENDEMENTS AU TEXTE DE LA COMMISSION
M. Hervé Reynaud, rapporteur. - L'amendement n° 1 vise à déroger au calendrier annuel d'entretien des cours d'eau en cas d'inondations ou de difficultés météorologiques. Tout en comprenant la démarche de notre collègue Anne Romagny, le dispositif proposé me semble difficile à mettre en oeuvre. C'est pourquoi je vous propose de solliciter l'avis du Gouvernement sur cet amendement.
La commission demande l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 1.
La commission a donné les avis suivants sur les amendements dont elle est saisie, qui sont retracés dans le tableau ci-après :
Auteur |
N° |
Objet |
Avis de la commission |
Article additionnel après Article 1er |
|||
Mme ROMAGNY |
1 rect. |
Dérogation au calendrier annuel d'entretien des cours d'eau en cas d'inondations |
Avis du Gouvernement |
Proposition de loi relative à la composition des conseils locaux et intercommunaux de sécurité et de prévention de la délinquance - Examen des amendements au texte de la commission
Mme Muriel Jourda, présidente. - Nous passons à l'examen des amendements au texte de la commission sur la proposition de loi relative à la composition des conseils locaux et intercommunaux de sécurité et de prévention de la délinquance.
EXAMEN DES AMENDEMENTS AU TEXTE DE LA COMMISSION
M. Louis Vogel, rapporteur. - L'amendement n° 2 vise à étendre les possibilités, pour un conseil local de sécurité et de prévention de la délinquance (CLSPD), d'associer les maires de communes tierces à ses travaux. La loi de 2024 avait exclu les présidents de conseil départemental de la composition de ces conseils et avait restreint le champ des communes visées, en le limitant aux communes limitrophes de moins de 5 000 habitants. Donnons de la souplesse et revenons au droitantérieur, sans critère géographique ou de taille. Je suis favorable à cet amendement.
La commission émet un avis favorable à l'amendement n° 2.
M. Louis Vogel, rapporteur. - L'amendement n° 1, qui vise à dispenser les présidents de conseil départemental de participer aux réunions plénières annuelles des CLSPD et des CISPD, est contraire à la position de la commission. En effet, cette proposition de loi vise à faire des présidents de conseil départemental, ou de leur représentant, des membres de droit de ces conseils au même titre que les autres, avec les mêmes obligations. Avis défavorable.
Mme Audrey Linkenheld. - Permettez-moi de préciser qu'il s'agit non pas de dispenser les présidents de conseil départemental de participer à ces réunions, mais de dispenser les maires de se caler sur les agendas des présidents de conseil départemental, ce qui est différent.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 1.
La commission a donné les avis suivants sur les amendements dont elle est saisie, qui sont retracés dans le tableau ci-après :
Proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, visant à modifier la définition pénale du viol et des agressions sexuelles - Examen du rapport et du texte de la commission
Mme Muriel Jourda, présidente. - Nous en venons à l'examen du rapport d'Elsa Schalck et de Dominique Vérien sur la proposition de loi visant à modifier la définition pénale du viol et des agressions sexuelles.
Mme Elsa Schalck, rapporteure. - Nous examinons aujourd'hui une proposition de loi déposée par les députées Marie-Charlotte Garin et Véronique Riotton, qui vise à intégrer le consentement à la définition pénale du viol et des autres agressions sexuelles. Elle fait suite au travail qu'elles ont mené au nom de la délégation de l'Assemblée nationale aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes, qui a conduit au dépôt d'un rapport en janvier 2025 concluant à la nécessité d'aménager le code pénal pour améliorer la répression des violences sexuelles.
Disons-le d'emblée, ce texte ne vise pas à « tout changer » pour que rien ne change, selon la volonté de certains, ou pour que tout change effectivement, selon le souhait d'autres. Il ne vise pas même à « tout changer » à la définition pénale du viol. Il s'agit tout simplement de cesser d'ignorer l'éléphant dans la pièce, si je puis dire - ni plus, ni moins.
Les débats sur l'inscription dans la loi du consentement souffrent en effet souvent de discours excessifs, voire erronés. Certains voudraient laisser à penser que les droits de la défense seront demain bafoués, ou tout du moins négligés face à la parole de plaignantes. D'autres, à l'inverse, alertent quant à l'émergence d'une société qui contractualiserait les rapports sexuels, en forçant chacun à recueillir le consentement formel de son partenaire à chaque étape de l'acte charnel.
Si ces craintes traduisent des préoccupations légitimes, elles n'apparaissent pas fondées en l'espèce.
Dès avant le dépôt de cette proposition de loi, nous nous sommes attachées, avec Dominique Vérien, à examiner sereinement les enjeux juridiques que soulèverait l'inscription du consentement dans la loi, notamment lors du colloque organisé à ce sujet en novembre dernier par la délégation du Sénat aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes.
Nous craignions en effet qu'une telle évolution n'entraîne des effets pervers pour les plaignantes, pour les accusés et, disons-le, pour la société dans son ensemble. Tous les travaux que nous avons conduits depuis lors nous ont rassurées. Plus encore, ils nous ont convaincues qu'une telle modification serait bienvenue, tant pour améliorer la lutte contre les violences sexuelles que pour conformer notre législation à nos engagements internationaux en général, et à la convention d'Istanbul en particulier.
Cette conviction repose sur plusieurs éléments.
Contrairement à ce que certains peuvent penser, le consentement n'est en rien une nouveauté pour le juge pénal. Cette notion apparaît même dans l'arrêt Dubas rendu par la Cour de cassation en 1857, qui fonde, encore aujourd'hui, notre définition du viol.
Permettez-moi de citer longuement l'attendu de principe de cet arrêt, car il est éloquent : « Le crime de viol consiste dans le fait d'abuser une personne contre sa volonté, soit que le défaut de consentement résulte de la violence physique ou morale exercée à son égard, soit qu'il résulte de tout autre moyen de contrainte ou de surprise pour atteindre, en dehors de la volonté de la victime, le but que se propose l'auteur de l'action ».
Il y a déjà dans cette formule tout l'esprit de la proposition de loi que nous examinons ce matin et l'essentiel de la lettre du droit en vigueur.
La seule chose qui manque à cet attendu de principe, c'est la notion de menace, puisque cette dernière n'est apparue qu'avec le nouveau code pénal en 1994.
On pourrait considérer qu'il y a une autre différence, puisque la notion de consentement apparaît dans cette définition prétorienne, mais n'a pas été reprise par le législateur en 1980. Ce serait cependant une erreur, car si cette notion est absente du code pénal, elle est bien présente dans les enquêtes et dans la jurisprudence. Sinon, tout est déjà là, dans cet attendu bientôt deux fois centenaire : la notion de consentement, la violence, la contrainte, la surprise et surtout l'articulation entre ces notions.
La proposition de loi vise donc en son article 1er à modifier la définition pénale de l'agression sexuelle - entendue dans un sens large, incluant le viol - pour y intégrer la notion de consentement, sans pour autant écarter les critères classiques de caractérisation de cette infraction que sont la violence, la menace, la surprise et la contrainte.
Ce n'est pas une révolution copernicienne, mais une clarification. Dans un avis rendu sur un précédent texte, le Conseil d'État avait d'ailleurs affirmé que la violence, la contrainte, la surprise et la menace n'étaient « qu'une manière de caractériser l'absence de consentement de la victime ».
La définition actuellement retenue repose explicitement sur cette logique. Elle n'est que confortée par l'article 1er de la proposition de loi, qui prévoit d'inscrire dans le code pénal que sont illicites tous les « actes sexuels non consentis » et qu'« il n'y a pas de consentement si l'acte à caractère sexuel est commis avec violence, contrainte, menace ou surprise, quelle que soit leur nature ».
Cette formulation permet à la fois de conserver la jurisprudence issue de l'application du droit en vigueur et de fonder le caractère strictement interprétatif de cette proposition de loi.
Il ne s'agit nullement de durcir la pénalisation des agressions sexuelles par des formules incertaines qui procéderaient à un glissement intolérable de la charge de la preuve et violeraient manifestement le principe de légalité des délits et des peines. Le Conseil d'État l'a rappelé avec force : non seulement la présomption d'innocence n'est pas remise en cause par la prise en compte explicite du consentement, mais surtout cette évolution n'enlève rien aux grands principes de notre droit pénal, qui imposent au ministère public, et à lui seul, de prouver à la fois l'élément matériel de l'infraction et son élément moral, c'est-à-dire l'intention délictuelle ou criminelle de l'auteur.
Il ne s'agit pas, non plus, de retenir une rédaction préjudiciable aux victimes, qui se trouveraient mises en demeure de prouver leur absence de consentement. Tout à l'inverse, cette rédaction signifie que, au cours des investigations, des poursuites et du procès pénal, l'enjeu sera désormais de savoir si la personne mise en cause s'est assurée, ou non, du consentement de l'autre. Cela supposera non pas un accord explicite et formalisé de tous les protagonistes, mais, comme à l'accoutumée, l'analyse d'un faisceau d'indices tenant compte de toutes les circonstances de l'espèce.
Bref, il est question non pas de bouleverser le droit, mais d'intégrer à la définition pénale de l'agression sexuelle - et donc du viol - des acquis jurisprudentiels riches d'une charge symbolique.
Nous pensons que cet objectif, que poursuivent les auteures du texte, pourra largement être atteint par cette proposition de loi. L'effort de rédaction fourni par l'Assemblée nationale en témoigne.
Mme Dominique Vérien, rapporteure. - L'Assemblée nationale s'est en effet employée à amender la proposition de loi au regard d'un avis rendu par le Conseil d'État à son sujet, pour s'assurer qu'elle se cantonne à une forme de codification de la jurisprudence actuelle.
Nous estimons, à l'issue de nos travaux, que l'avis du Conseil d'État a été intégralement suivi. En témoignent, en particulier, les précisions apportées quant à la nature du consentement exprimé par les protagonistes, qui devra être libre, éclairé, spécifique, préalable et révocable : ces qualificatifs, qui font écho au concept de dol en droit civil, ne font que reprendre la jurisprudence constante de la chambre criminelle de la Cour de cassation, qui exige depuis plusieurs décennies un consentement « libre et éclairé » et qui juge comme relevant du viol tout acte sexuel extorqué par des « manoeuvres dolosives ». En attestent aussi, voire surtout, les modifications apportées au texte par l'Assemblée nationale pour assurer le plein respect du principe constitutionnel de légalité des délits et des peines. C'est pour ce motif que les députés ont exclu que le viol soit constitué « notamment » en cas de recours à la violence, à la contrainte, à la surprise ou à la menace : cet adverbe aurait en effet, pour reprendre les termes utilisés par le Conseil d'État, été « de nature à dépasser une portée interprétative et à [introduire] une indétermination quant à la définition d'autres circonstances de fait potentielles ».
L'analyse de ce texte, éclairée tant par la lecture de cet avis que par les nombreuses auditions que nous avons réalisées en un temps contraint, nous a donc convaincues du bien-fondé de l'inscription du consentement dans la définition du viol et des autres agressions sexuelles.
Cette nouvelle rédaction présente en effet trois avantages majeurs.
En premier lieu, elle apparaît à la fois pédagogique et symbolique. La mention expresse du consentement dans la définition de l'agression sexuelle participera, nous l'espérons, à l'émergence d'une approche partagée des rapports intimes et rappellera, en des termes lisibles pour les justiciables, que tout acte sexuel doit être consenti. Ce rappel ne sera pas un luxe : le nombre de victimes de violences sexuelles est en effet estimé, au minimum, à 230 000 par an, ce chiffre restant désespérément stable au fil des années.
En deuxième lieu, ce texte constitue un apport opérationnel, dans la mesure où il permettra d'orienter les enquêtes et les débats sur le comportement de l'auteur - et non plus sur celui de la victime, comme c'est hélas ! bien trop souvent le cas aujourd'hui. Nous espérons, comme nombre des personnes que nous avons auditionnées, que cette orientation nouvelle permettra une meilleure répression des violences sexuelles, qui font aujourd'hui l'objet d'un taux de classement sans suite particulièrement élevé et qui ne donnent lieu qu'à environ 8 000 condamnations par an, ce qui montre que la justice ne parvient à se saisir que d'une infime minorité des viols et des agressions sexuelles perpétrés dans notre pays.
En troisième et dernier lieu, cette proposition de loi est robuste du point de vue juridique, car elle repose sur une démarche interprétative. Il est ainsi fait expressément mention des quatre critères classiques, qui demeureront les seuls éléments desquels pourra être mécaniquement déduite l'absence de consentement.
Pour toutes ces raisons, nous avons largement adhéré au dispositif transmis par l'Assemblée nationale. Nous ne vous proposerons de le modifier que sur deux points techniques, sur lesquels je reviendrai à la fin de cette intervention.
Si l'article 1er contient plusieurs dispositions de coordination qui n'appellent pas de commentaire, il procède aussi à une modification plus délicate qu'elle n'en a l'air.
Cet article vise en effet à préciser explicitement à l'article 222-23 du code pénal, qui traite du viol, que les actes bucco-anaux constituent aussi un tel crime. Un désaccord s'est élevé entre les auteures du texte et le Conseil d'État sur la nature de cet ajout, les députées considérant qu'il s'agissait - ici encore - d'une précision interprétative, tandis que le Conseil estime qu'une telle modification constitue une loi pénale plus sévère, soumise au principe de la non-rétroactivité in mitius.
Pour notre part, nous estimons que la prise en compte des actes bucco-anaux dans la définition du viol correspond bien à l'intention du législateur, exprimée clairement et sans ambiguïté au cours des travaux parlementaires sur la loi du 21 avril 2021. Or, force est de constater que cette intention n'a pas été littéralement traduite dans le code, conduisant les praticiens à poursuivre de tels actes sur le fondement des dispositions relatives à l'agression sexuelle. De facto, leur intégration au champ matériel du viol constituera une aggravation de la répression, ce qui ne permettra de criminaliser les actes bucco-anaux que pour l'avenir.
Enfin, la proposition de loi comporte deux demandes de rapport partiellement redondantes en ses articles 2 et 3, que nous vous proposerons de supprimer, suivant la position constante de la commission en la matière.
Mes chers collègues, vous l'aurez constaté, la proposition de loi n'entraîne pas une évolution majeure de notre droit. Elle intègre au code pénal une définition de l'agression sexuelle déjà admise par nos juges pour accompagner l'évolution bienvenue de notre société en matière de lutte contre les violences sexuelles.
Nous vous proposerons donc d'adopter ce texte, après y avoir apporté quelques légères modifications qui en garantissent la sécurité juridique et la pleine effectivité.
D'une part, l'article 1er de la proposition de loi dispose en son cinquième alinéa que le consentement « est apprécié au regard des circonstances environnantes ». Nous vous proposerons de substituer le mot de « contexte » à l'expression des « circonstances environnantes », empruntée à la convention d'Istanbul, mais inconnue du droit pénal français et susceptible de donner lieu à des interprétations extensives, contrairement au « contexte », qui est, lui, bien connu du juge pénal français.
D'autre part, l'intégration des actes bucco-anaux à la définition générale du viol exige de procéder à des coordinations au sein des articles spécifiques aux mineurs, faute de quoi ces derniers se trouveraient dans une situation moins favorable sur le plan juridique que les victimes majeures. Nous vous proposerons dès lors un amendement de mise en cohérence pour prévenir toute divergence malheureuse au sein du code pénal.
Mme Muriel Jourda, présidente. - Merci pour votre rapport, car ce texte est technique et complexe à aborder. Or vous avez travaillé dans un temps particulièrement réduit.
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. - Ce texte ayant été adopté le 1er avril dernier par l'Assemblée nationale, pourquoi ne l'examinons-nous que maintenant et devons-nous travailler dans des délais contraints ? Nous n'avons pas pu assister à toutes les auditions organisées la semaine dernière, dans la mesure où était débattue en séance publique la proposition de loi visant à réformer le mode d'élection des membres du conseil de Paris et des conseils municipaux de Lyon et Marseille.
Je remercie les rapporteures de leur travail sur ce sujet complexe. Cette proposition de loi illustre parfaitement la qualité du travail parlementaire en ce qu'elle émane des conclusions d'une mission transpartisane à l'Assemblée nationale, qui a duré un an, puis a fait l'objet d'une saisine du Conseil d'État.
La question de l'introduction du consentement dans la définition pénale du viol fait partie du débat public depuis un certain temps, ce qui n'est pas de nature à simplifier notre approche. Il ne s'agit pas de s'en tenir à l'évidence d'inscrire la notion de consentement dans la définition pénale du viol. En effet, les associations féministes sont partagées sur ce sujet : certaines y sont totalement favorables tandis que d'autres soulignent que cela contribuerait à mettre le projecteur sur la victime, ce qui ne serait pas admissible. À ces dernières, je répondrai que le projecteur est toujours mis sur la victime et que la question du consentement, lors du procès, fait toujours l'objet de débats. Même dans l'affaire Pelicot, certains avocats ont plaidé le consentement. Le consentement de la victime est l'éléphant au milieu de la pièce, pour reprendre l'image d'Elsa Schalck.
Certes, la jurisprudence ne doit pas être réduite à néant. Mais tel n'est pas le cas avec la rédaction retenue par l'Assemblée nationale, qui pose le principe du consentement et précise qu'il n'y a pas de consentement en cas de contrainte, de violence, de menace ou de surprise. Le texte proposé nous semble donc bien conçu d'un point de vue juridique.
On peut cependant s'interroger sur la portée réelle du texte. Je ne suis pas convaincue de sa vertu pédagogique, mais les dispositions proposées peuvent être importantes pour les services de police ou pour les autorités de poursuite. J'avais d'ailleurs suggéré à un ancien garde des sceaux de faire une circulaire sur les agressions sexuelles.
La question de l'application dans le temps est aussi un sujet. La notion de loi interprétative est très intéressante : si les dispositions de la loi sont considérées comme interprétatives par la Cour de cassation, elles seront d'application immédiate, permettant qu'elles soient mises en oeuvre pour des faits antérieurs à l'entrée en vigueur du texte. Peut-être déposerons-nous des amendements pour dépasser le critère de loi interprétative.
Enfin, je connais l'habitude de notre commission de refuser, par principe, les rapports. Pour autant, la démarche d'évaluation est intéressante ; nous pourrions prévoir que le Parlement procède à cette évaluation, car nous ne savons pas précisément quelle sera la portée de ce texte.
Vous l'aurez compris, nous sommes globalement favorables à cette proposition de loi et déposerons vraisemblablement des amendements en vue de la séance publique.
Mme Mélanie Vogel. - Je remercie les deux rapporteures, qui ont oeuvré dans un temps contraint.
Permettez-moi de pointer les éléments avancés à l'encontre de la proposition d'intégrer le consentement dans la définition pénale du viol. La position de certaines féministes était tout à fait légitime, soulignant quatre risques : la contractualisation des rapports sexuels ; le renversement de la charge de la preuve - le ministère public gardera la charge de démontrer la culpabilité de la personne mise en cause - ; une focalisation excessive sur la victime - les pays européens ayant modifié leur code pénal pour le mettre en conformité avec la convention d'Istanbul ne mentionnent pas un tel état de fait - ; une non-prise en compte de la jurisprudence sur les quatre critères que sont la contrainte, la menace, la surprise ou la violence. Or l'Assemblée nationale et nos rapporteures ont intelligemment pris en considération ces différentes critiques et la rédaction qui nous est proposée est de nature à répondre à ces craintes.
Je serai plus nuancée que notre collègue Marie-Pierre de La Gontrie sur la portée de ce texte. J'estime qu'il présente un intérêt judiciaire dans la mesure où les services de police auront une base légale pour s'assurer du consentement de la victime. Lors de l'affaire Pelicot, on a certes beaucoup parlé du consentement, mais dans certains procès, on considère que l'absence de réaction de la victime prouve son consentement.
Pour ma part, je crois à la portée performative et éducative de la loi. Lorsque la Suède a modifié la définition pénale du viol, les juges et les policiers avaient intégré cette notion avant même que la loi ne soit promulguée. Les dispositions introduites dans la loi par le Parlement participent à modifier petit à petit les mentalités. Passer progressivement à une culture du consentement, une notion clé qui fait la distinction entre ce qui relève de la sexualité et ce qui relève de la violence, permettra non seulement de mieux criminaliser les viols, mais également de diminuer leur nombre. Le groupe GEST votera ce texte et ne déposera pas d'amendements en vue de la séance publique.
Mme Marie Mercier. - Concernant l'inscription du consentement dans la définition du viol, j'ai été marquée par l'audition des avocats de Gisèle Pelicot. Nous avons alors compris ce qu'est la soumission chimique, que les médecins n'ont pas appris à diagnostiquer. Entendre l'auteur d'un viol dire que dès lors qu'il y avait consentement du mari il y avait consentement de la victime fut particulièrement choquant. On parle de consentement, mais je m'interroge sur le discernement même de cette personne.
Mme Elsa Schalck, rapporteure. - Les auditions ont corroboré nos positions, notamment sur le renversement de la charge de la preuve. Le parquet reste l'autorité poursuivante. Nous sommes encore dans la culture de la « bonne victime », celle qui, violentée, se débat. Une des vertus du texte est d'encourager une autre vision. Nous nous intéresserons davantage à l'auteur pour voir ce qu'il a fait pour recueillir le consentement de la victime.
La mission d'information de l'Assemblée nationale a duré plus de quatorze mois. L'avis du Conseil d'État nous a beaucoup rassurées : le cadre juridique est bien posé pour faire entrer la notion de consentement dans la définition pénale du viol et définir correctement le consentement - libre et éclairé, révocable, préalable et spécifique.
Nous devons rester sur une loi interprétative, qui repose donc sur la conservation des acquis jurisprudentiels. Je pense aux quatre adminicules mentionnés : menace, contrainte, violence et surprise. Une grande partie des procès est déjà centrée sur la notion de consentement. Nous ne faisons qu'inscrire dans la loi une politique jurisprudentielle vieille de près de deux siècles.
Mme Dominique Vérien, rapporteure. - Cette inscription permet une égalité de tous devant la loi. Les juges appliquent la loi, mais n'adoptent pas tous systématiquement la même jurisprudence.
À mes yeux, la phrase la plus importante du texte est la suivante : « [Le consentement] ne peut être déduit du seul silence ou de la seule absence de réaction de la victime ». Il ne sera plus possible de dire qu'il n'y pas viol au seul motif que la victime n'avait pas dit non.
Mme Muriel Jourda, présidente. - Concernant le périmètre de cette proposition de loi, en application du vade-mecum sur l'application des irrecevabilités au titre de l'article 45 de la Constitution, adopté par la Conférence des présidents, je vous propose de considérer que le périmètre inclut les dispositions relatives à la définition pénale du viol et des autres agressions sexuelles.
Il en est ainsi décidé.
EXAMEN DES ARTICLES
Mme Elsa Schalck, rapporteure. - L'amendement COM-5 vise à remplacer les mots « circonstances environnantes » par le mot « contexte », terme connu de notre jurisprudence pénale.
L'amendement COM-5 est adopté.
Mme Dominique Vérien, rapporteure. - L'amendement COM-6 permet la prise en compte des actes bucco-anaux dans la définition du viol pour les mineurs.
L'amendement COM-6 est adopté.
L'article 1er est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Mme Elsa Schalck, rapporteure. - L'amendement COM-1 vise à ajouter une circonstance aggravante en cas de vulnérabilité chimique de la victime. La soumission chimique est déjà réprimée par notre droit depuis plusieurs années.
Par ailleurs, des difficultés de fond se posent. Les auditions n'ont pas permis d'évoquer cette question, extrêmement importante. L'Assemblée nationale non plus n'a pas étudié la question. Il faudra y revenir plus tard, pour renforcer notre arsenal juridique. Un travail important nous attend. Avis défavorable.
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. - Je ne sais pas si nous avons raison de reporter cette réflexion, extraordinairement compliquée.
Nous avons déjà progressé en matière de répression, en introduisant une circonstance aggravante pour l'auteur. La question est de savoir si cette dernière doit également s'appliquer à la victime. La question est aussi complexe qu'importante et il nous faut l'examiner de près. Nous avons encore une semaine devant nous : ne ratons pas une occasion de traiter cet enjeu.
Mme Sophie Briante Guillemont. - Les deux amendements de Mme Guillotin sont issus du rapport réalisé avec Sandrine Josso. C'est le résultat d'un travail important. Tous, nous savons l'importance du sujet, et l'actualité politique nous invite à l'examiner. Pourquoi repousser la question ?
Mme Elsa Schalck, rapporteure. - La question est très importante, mais aussi très complexe. Or, l'amendement priverait les magistrats d'une part de leur liberté d'appréciation. La loi pénale est d'interprétation stricte. L'appréciation au cas par cas par le juge du fond reste le meilleur moyen de procéder, notamment au regard des termes « ivresse » et « emprise de stupéfiants » qui sont utilisés par l'amendement sans être précisément définis. Cela nécessite une expertise approfondie.
Cet amendement soulève par ailleurs des difficultés rédactionnelles et ni nos travaux ni ceux de l'Assemblée nationale n'ont porté sur cette question.
M. Francis Szpiner. - Si l'on dit qu'il y a des vices du consentement, il faudra les détailler. L'inconvénient est que nous allons en oublier, permettant à certains de s'en sortir.
La soumission chimique est l'administration par l'auteur de l'agression de substances qui font perdre la liberté de donner un consentement libre, comme le dit le Conseil d'État. En voulant être plus spécifiques, nous allons réduire cette définition, ce qui sera dangereux.
Il est vrai que tous les juges n'appliquaient pas la jurisprudence, et que la notion de « contrainte » posait problème. La notion de consentement « libre et éclairé » suffit à établir qu'une victime de soumission chimique n'a pas pu consentir. Il en va de même pour la personne vulnérable.
Je préfère des dispositions autorisant une interprétation large plutôt que de proposer des définitions qui seront en fait plus restrictives pour la liberté du juge et iront à l'encontre de l'objectif poursuivi.
L'amendement COM-1 n'est pas adopté.
Mme Dominique Vérien, rapporteure. - L'amendement COM-3 déposé par Olivia Richard vise à supprimer la circonstance aggravante de minorité en cas de recours à la prostitution ; l'objectif poursuivi est de garantir la poursuite pour viol de tous les clients de personnes prostituées de moins de quinze ans puisque, depuis la loi du 21 avril 2021, tout acte sexuel entre un majeur et un mineur de quinze ans est un viol. Ce principe est codifié à l'article 222-23-1 du code pénal.
Cet amendement soulève une question particulièrement technique, en dépit du fait que nous comprenons sa philosophie sur le fond.
Le dernier alinéa de l'article 225-12-2 du code pénal semble en effet contrevenir à l'une des principales mesures de la loi du 21 avril 2021, qui criminalise toute relation sexuelle entre un majeur et un mineur de moins de quinze ans. Or, l'alinéa dont la suppression est proposée prévoit que le fait de solliciter, d'accepter ou d'obtenir des relations sexuelles tarifées de la part d'un mineur de quinze ans constitue une circonstance aggravante du délit de recours à la prostitution.
Il y aurait donc une contradiction dans notre droit : la prostitution de mineurs serait délictuelle, et les rapports sexuels avec des mineurs, criminels.
Cette interprétation ne nous semble pas fondée.
L'alinéa en cause commence par une formule significative : « Hors les cas dans lesquels ces faits constituent un viol ou une agression sexuelle, [...] ».
La circonstance aggravante qu'il est proposé de supprimer s'applique donc exclusivement dans des cas qui ne sont pas couverts par l'article 222-23-1 du code pénal, référence à la loi Billon qui veut que toute relation sexuelle avec un mineur de moins de quinze ans soit un viol.
Vous proposez donc de supprimer une aggravation pleinement applicable aux faits qui concernent un auteur mineur ou un accusé majeur qui aurait sollicité ou accepté une relation tarifée avec un mineur de quinze ans sans qu'elle ait eu lieu. En d'autres termes, l'adoption de cet amendement fragiliserait la protection des mineurs victimes de violences sexuelles.
Les juges n'ont pas encore totalement intégré le fait que, dans le cadre de la prostitution, quand le client est un majeur et la prostituée une mineure de quinze ans, cela constitue un viol. Une circulaire de politique pénale serait plus efficace pour atteindre l'objectif poursuivi que de changer la loi.
Nous émettons donc un avis défavorable à cet amendement.
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. - Là aussi, nous éludons cette question au motif que la question est technique.
Soyons clairs dans notre raisonnement. Si nous considérons qu'un viol sur un mineur est criminel, il faut que le dire clairement dans le texte.
Mme Dominique Vérien, rapporteure. - Cela est ainsi rédigé dans le code pénal ! Nous avons sollicité la direction des affaires criminelles et des grâces (DACG) sur cette question, qui partage notre analyse.
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. - Nous devrions examiner, notamment avec les associations, la réalité de la pratique du droit. Ne fermons pas la porte en vue de la séance.
Mme Dominique Vérien, rapporteure. - Cet amendement vient de la mission interministérielle pour la protection des femmes victimes de violences et la lutte contre la traite des êtres humains (Miprof), qui pensait que la loi était mal écrite et donc mal appliquée. La DACG indique, elle, que la loi est correctement écrite, mais mal appliquée.
En supprimant cet alinéa, nous nous priverons de la possibilité de poursuivre un client mineur qui aurait une relation sexuelle avec une mineure, ainsi que de poursuivre les majeurs qui auraient sollicité un acte sexuel d'un mineur prostitué sans qu'il n'ait lieu.
L'analyse de la Miprof n'est pas juste, d'où mon appel à une circulaire de politique pénale visant à expliciter les modalités d'application de la loi Billon en matière de prostitution de mineurs.
Mme Olivia Richard. - La Miprof nous a alertés sur l'exploitation sexuelle des mineurs, notamment au sein de l'aide sociale à l'enfance (ASE) : entre 8 000 à 10 000 enfants seraient concernés en France. Il y a très peu de poursuites pour viol sur le fondement de la loi Billon de 2021 ; c'est un problème. Il est urgent d'avoir une réaction pénale adaptée. C'est un amendement d'appel. Pour l'instant, la loi Billon n'est pas appliquée. Nous en reparlerons la semaine prochaine. En attendant, je vous remercie pour ce travail très éclairant.
M. Francis Szpiner. - J'ai été l'avocat de l'association La voix de l'enfant. Nous nous sommes battus pour dire que le mineur de moins de quinze ans ne peut consentir : il n'y a plus de débat ! Le majeur qui a une relation sexuelle avec un mineur de moins de quinze ans commet un viol ! Le texte général permet la répression. À force de trop légiférer, on finira par créer trois textes pour une même situation.
L'amendement COM-3 n'est pas adopté.
Mme Elsa Schalck, rapporteure. - L'amendement COM-2 prévoit la levée du secret médical lorsqu'un professionnel de santé s'aperçoit que son patient ou sa patiente fait l'objet d'une soumission chimique.
Là encore, en dépit de la légitimité de ses objectifs, l'amendement soulève des difficultés réelles.
La première difficulté est relevée par les autrices du rapport elles-mêmes : elles constatent en effet que cette innovation poserait la question de la responsabilité du médecin ou du professionnel de santé concerné dans le cas où celui-ci ne ferait pas de signalement.
La deuxième difficulté tient à l'articulation avec les dispositions existantes de l'article 226-14 du code pénal, qui prévoient notamment la levée du secret médical en cas « de placement, de maintien ou d'abus frauduleux d'une personne dans un état de sujétion psychologique ou physique », une telle sujétion pouvant en toute logique découler de l'administration de substances chimiques. En d'autres termes, il n'est pas acquis que l'amendement ne soit pas déjà satisfait. Évitons de créer un doublon, et donc des difficultés d'articulation, au sein du code pénal.
La troisième difficulté concerne la rédaction proposée. En effet, le renvoi à l'article 222-30-1 du code pénal peut avoir pour effet de ne couvrir que les cas dans lesquels la substance en question est administrée en vue de commettre des violences sexuelles, ce que le médecin ne peut, par définition, pas savoir. Plus largement, la formulation est perfectible. En l'état, on pourrait penser que c'est le médecin qui a administré une substance à l'insu de son patient. La commission demande, comme pour l'amendement COM-1, un travail approfondi et spécifique pour éviter tout effet de bord contre-productif. Avis défavorable.
L'amendement COM-2 n'est pas adopté.
Mme Elsa Schalck, rapporteure. - L'amendement COM-7 vise à supprimer l'article.
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. - Que pensez-vous de ma suggestion de prévoir une évaluation par le Parlement ?
Mme Dominique Vérien, rapporteure. - Il est difficile d'obtenir de bonnes statistiques auprès du ministère de la justice. Madame la présidente a réclamé elle-même des chiffres lors de l'audition du garde des sceaux. Nous n'avons pas de chiffres, cela est invraisemblable, j'en conviens.
Mme Muriel Jourda, présidente. - Je suis toujours favorable à une évaluation réalisée par le Parlement. Mais il n'est pas nécessaire de le prévoir dans la loi.
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. - Un engagement de votre part serait formidable, Madame la présidente... Mme Muriel Jourda, présidente. - Je ne suis pas sûre qu'une telle continuité existe, mais je suis, pour ma part, favorable à votre demande, sous réserve que nous obtenions des statistiques.
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. - Dans ce cas-là, n'évaluons pas...
M. Francis Szpiner. - J'ai déjà eu à demander des chiffres à la DACG : j'ai été scandalisé par le fait qu'ils soient incapables de nous les transmettre ! Il est scandaleux qu'il n'existe pas d'outil statistique.
Oui, évaluer fait partie des prérogatives du Parlement, mais si nous l'inscrivons dans la loi, comme le demande Mme de La Gontrie, nous aurons un support pour faire pression sur la Chancellerie.
On nous parle d'informatique et d'intelligence artificielle, et nous sommes incapables d'avoir des statistiques utiles. Nous menons trop peu d'évaluations ! Pour supprimer des normes et remédier à l'inflation législative, il faut évaluer.
Mme Muriel Jourda, présidente. - Vous avez raison, certes, mais inscrire dans la loi une telle évaluation n'aidera pas le ministère à s'équiper correctement.
L'amendement COM-7 est adopté.
L'article 2 est supprimé.
Article 3 (nouveau)
L'amendement de suppression COM-8 est adopté.
L'article 3 est supprimé.
La proposition de loi est adoptée dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Le sort des amendements examinés par la commission est retracé dans le tableau suivant :
Projet de loi relatif à l'organisation des jeux Olympiques et Paralympiques de 2030 - Examen du rapport et du texte de la commission
Mme Muriel Jourda, présidente. - Nous en venons à l'examen du rapport de notre collègue Jean-Michel Arnaud sur le projet de loi relatif à l'organisation des jeux Olympiques et Paralympiques (JOP) de 2030.
M. Jean-Michel Arnaud, rapporteur. - Le projet de loi relatif à l'organisation des jeux Olympiques et Paralympiques de 2030, qui comprend 37 articles, procède aux adaptations législatives nécessaires à la bonne organisation des épreuves olympiques d'hiver sur notre territoire. Je devrais d'ailleurs plutôt dire sur nos territoires, puisque, pour la première fois, les épreuves se tiendront non pas dans une ville unique, mais dans deux régions hôtes - les régions Auvergne-Rhône-Alpes (Aura) et Provence-Alpes-Côte d'azur (Paca) - et plus particulièrement dans quatre départements des Alpes françaises : la Savoie, la Haute-Savoie, les Alpes-Maritimes et les Hautes-Alpes.
Ce texte rappellera sans nul doute des souvenirs à certains, notamment à la présidente Muriel Jourda, qui avait rapporté en 2018 un texte très largement similaire, mais destiné, cette fois, à l'organisation des jeux Olympiques et Paralympiques de 2024. Nous sommes donc en terrain connu, car nombre des dispositions que je vais vous présenter ont en réalité déjà été votées par nos soins et, de ce fait, n'appellent que peu d'observations.
La grande réussite de Paris 2024 - avec un excédent budgétaire de 76 millions d'euros - a définitivement apporté la confirmation, s'il en fallait une, de la pertinence de ces adaptations de notre cadre légal.
Les Jeux de 2030, très attendus, représentent une vraie opportunité pour tous les territoires de montagne, soit 28 % du territoire métropolitain, de redéfinir un plan pour la montagne.
J'en viens maintenant à la présentation du projet de loi. Ses six titres visent notamment à mettre en oeuvre le contrat hôte, à définir un régime dérogatoire au droit commun pour respecter les calendriers de construction et de rénovation des ouvrages olympiques et paralympiques ainsi qu'à garantir l'éthique et l'exemplarité des Jeux. Il comprend par ailleurs plusieurs dispositifs inédits, en particulier s'agissant de la sécurisation des grands évènements.
Dans le détail, trois catégories de dispositions peuvent être distinguées.
Sont tout d'abord prévues des adaptations spécifiques aux JOP, temporaires, et qui ont majoritairement déjà été votées dans le cadre des JOP de Paris 2024. Il s'agit du plus gros contingent d'articles, puisqu'il rassemble ceux du titre Ier sur le contrat hôte, du titre II relatif à l'éthique et à l'intégrité, du très important titre III, qui vise les aménagements aux règles d'urbanisme, de logement et d'environnement, ainsi que du titre IV relatif à la santé et au travail.
La deuxième catégorie rassemble des dispositions pérennisant ou prolongeant certains dispositifs relatifs à la sécurité institués lors des JOP 2024. On en dénombre cinq, les plus importants étant la pérennisation des enquêtes administratives de sécurité pour les personnels intérimaires des sociétés de transport, à l'article 33, ainsi que la reconduction jusqu'à la fin 2027 de l'expérimentation de la vidéoprotection algorithmique pour la sécurisation des grands évènements, à l'article 35.
La troisième catégorie comprend enfin des dispositions nouvelles relatives à la sécurisation des grands évènements, au-delà des seuls JOP 2030. Il en va ainsi de la possibilité prévue à l'article 31 pour des agents de sécurité privée de procéder à l'inspection visuelle des véhicules, y compris de leurs coffres, de personnes souhaitant se rendre sur les lieux d'un grand évènement, ainsi que de la création de nouveaux régimes d'interdiction de décollage en marge de ces évènements, à l'article 32.
Compte tenu de la diversité des dispositions de ce texte, l'examen au fond d'environ la moitié de ses dispositions a été délégué à quatre autres commissions. Je tiens donc à saluer tout particulièrement les rapporteurs pour avis de chacune d'entre elles, avec qui nous avons travaillé de concert et de manière tout à fait fluide. Il s'agit de Martine Berthet pour la commission des affaires économiques, de Damien Michallet pour celle de l'aménagement du territoire et du développement durable, de Pascale Gruny et de Patricia Demas pour celle des affaires sociales ainsi que de Claude Kern pour la commission de la culture.
J'en viens maintenant au détail des articles qui relèvent de la compétence de la commission des lois. Je passerai rapidement sur les dispositions déjà adoptées en 2018. Notre commission les avait alors non seulement approuvées, mais largement améliorées. L'équilibre trouvé s'est montré satisfaisant lors des JOP de 2024, et tout laisse à penser qu'il en sera de même pour ceux de 2030.
Deux articles relèvent de notre compétence au titre Ier. Le premier ouvre la possibilité pour le contrat hôte et ses conventions d'exécution de comprendre des clauses compromissoires, selon le même dispositif que celui qui a été adopté en 2024.
L'article 5 est en revanche plus problématique. Il autorise les deux régions hôtes à contribuer à la garantie accordée au Comité international olympique (CIO) pour couvrir un éventuel déficit du Comité d'organisation des jeux Olympiques et Paralympiques (Cojop), à hauteur d'un quart du solde déficitaire et dans la limite d'un pourcentage des recettes de fonctionnement régionales. Au-delà du fait qu'il n'y avait aucun équivalent en 2024, formaliser un tel mécanisme dans la loi me semble prématuré. Les prévisions de déficit sont aujourd'hui inabouties, si bien que la charge qui pourrait in fine peser sur les finances régionales reste largement incertaine à ce stade.
Par ailleurs, la carte définitive des sites n'est toujours pas connue.
Les présidents des deux régions hôtes ont été tout à fait explicites sur ce point : ne mettons pas la charrue avant les boeufs. Certes, l'article 5 ne crée qu'une faculté pour les régions, et non une obligation. Néanmoins, il consacre de fait une solidarité financière dont les contours réels sont incertains.
J'émettrai donc un avis favorable à l'amendement de suppression de Stéphane Sautarel. Un débat serein exige davantage d'informations sur le montage financier proposé. Si nous les obtenons, nous pourrions alors éventuellement voir ce qu'il en est dans la suite de la navette.
Le titre II ne comprend que deux articles relevant de notre compétence. Ils sont la copie exacte de dispositions adoptées en 2018. L'article 8 autorise la Cour des comptes à contrôler les personnes concourant à l'organisation des JOP tandis que l'article 9 consacre la compétence de l'Agence française anticorruption (AFA) pour contrôler le Cojop, la Société de livraison des ouvrages olympiques (Solideo) et les personnes chargées des opérations de reconfiguration des sites olympiques.
Le titre III comprend sept articles, qu'il nous revient d'examiner. Reprenant un procédé utilisé pour les JOP 2024, l'article 12 prévoit tout d'abord une procédure de participation par voie électronique (PPVE) aux concertations environnementales organisées pour les besoins des JOP. Cela me semble toujours aussi pertinent, même si je rappelle que cela n'exclut en rien la tenue ponctuelle de réunions publiques, si nécessaire. Le président de la Commission nationale du débat public (CNDP) me l'a confirmé.
L'article 15 autorise le recours à la procédure d'extrême urgence pour permettre la prise de possession anticipée d'immeubles ou de terrains nécessaires à la construction d'ouvrages olympiques. Sur ce point, il me semble important d'ouvrir cette possibilité aux aménagements « connexes », ceux qui sont indispensables au déroulement des Jeux, en particulier pour les dessertes. Je vous proposerai un amendement, que nous pourrons le cas échéant retravailler d'ici à la séance publique.
L'article 16 est de même nature, il facilite la mise en oeuvre du dispositif d'occupation temporaire des terrains situés en bordure des pistes de compétition afin de pouvoir aménager ces dernières - je pense aux pistes de ski de fond.
L'article 22 reconduit, quant à lui, le dispositif de réservation de voies routières au profit de véhicules nécessaires au bon déroulement des JOP. Si ce dispositif a donné satisfaction dans le cadre de Jeux de Paris, je vous proposerai néanmoins trois amendements visant à préciser son champ. Il s'agit notamment d'intégrer les véhicules sanitaires à la liste des véhicules autorisés à emprunter ces voies réservées ainsi que de préciser les modalités de consultation des autorités détentrices du pouvoir de police pour la détermination des voies de délestage.
Les articles 25 et 26 ont également été expérimentés en 2018 et n'appellent pas d'observation de ma part. Ils renouvellent des dérogations aux règles d'occupation du domaine public et de la commande publique qui ont prouvé toute leur utilité.
L'article 27 permet enfin d'augmenter la durée maximale des accords-cadres, qui seront signés pour l'organisation des JOP, permettant de les conclure pour six ans au lieu de quatre en droit commun, lorsque cela se justifie en raison de leur objet ou des besoins d'amortissement d'investissements sur une durée supérieure à quatre ans. Cet alignement sur l'échéance olympique permettra de sécuriser juridiquement les montages contractuels de la Solideo et d'éviter d'éventuels changements de prestataires potentiellement déstabilisants pendant la phase d'organisation.
J'en viens au titre V, qui relève intégralement de notre compétence et qui, contrairement aux autres, prévoit des dispositifs pérennes, qui ne sont pas limités aux JOP 2030 mais concernent les grands événements en général.
L'article 31 autorise les agents de sécurité privée à procéder, avec le consentement de leur propriétaire, à l'inspection visuelle de véhicules, y compris de leurs coffres. J'y suis tout à fait favorable, d'autant que cette mesure fait écho à une recommandation que Jacqueline Eustache-Brinio a faite il y a deux semaines concernant les polices municipales. Je précise que, dans l'hypothèse où son véhicule ferait l'objet d'une inspection, le spectateur pourra se rendre individuellement, sans son véhicule, aux épreuves pour lesquelles il aura acheté un billet.
L'article 32 crée une nouvelle mesure administrative d'interdiction de décollage en marge de grands évènements, qui sera complémentaire aux interdictions de survol. Des incidents survenus pendant la visite du Pape à Marseille ou lors de la Coupe du monde de rugby ont démontré la pertinence d'une telle disposition.
L'article 33 pérennise un dispositif adopté pour les JOP de 2024 et permettant la réalisation d'une enquête administrative à l'égard de certains personnels intérimaires employés par les entreprises de transport, sur demande de ces entreprises. Je vous propose de l'adopter, au bénéfice d'un amendement précisant que le préfet peut également prendre l'initiative d'une telle enquête.
L'article 34 crée un nouveau régime d'interdiction de paraître dans les lieux où se déroule un grand évènement. Il est finalement moins gouvernemental que sénatorial puisque nous avions déjà adopté ce dispositif sur l'initiative de Marc-Philippe Daubresse lors de l'examen en 2024 de la proposition de loi instituant des mesures judiciaires de sûreté applicables aux condamnés terroristes et renforçant la lutte antiterroriste. Je vous propose donc de l'adopter, au bénéfice d'un amendement visant à étendre le délai d'entrée en vigueur de la mesure à 72 heures après sa notification, contre 48 heures dans le texte du Gouvernement. Cet allongement permettra de sécuriser juridiquement le dispositif en garantissant l'effectivité du droit au recours devant le juge des référés, en particulier dans l'hypothèse où le grand évènement concerné serait de courte durée.
Enfin, l'article 35 reconduit jusqu'au 31 décembre 2027 l'expérimentation de la vidéoprotection algorithmique, qui a pris fin le 31 mars 2025. Le Gouvernement propose de reconduire le dispositif à l'identique. Ce choix interroge dans la mesure où, comme l'ont montré nos collègues Françoise Dumont et Marie-Pierre de La Gontrie, la première expérimentation, bien que prometteuse, n'a pas pleinement donné satisfaction.
Dans ces conditions, l'amendement que je vous propose vise à retranscrire une partie des recommandations qu'elles ont formulées et que la commission a adoptées. Il tend, d'une part, à prévoir la possibilité pour les agents de surveillance de la voie publique (ASVP) communaux d'accéder aux signalements émis par le système d'intelligence artificielle (IA), ce qui sera de nature à favoriser l'implication des collectivités territoriales dans l'expérimentation. D'autre part, il vise à consacrer dans la loi l'indépendance du comité d'évaluation, ce qui revêt une importance particulière dans cette matière sensible.
Les autres recommandations du rapport ne sont pas recevables au titre de l'article 40 de la Constitution, mais je ne doute pas que nous aurons l'occasion d'y travailler avec le Gouvernement d'ici à la séance. L'objectif commun, en tout état de cause, est de tirer pleinement parti de la nouvelle expérimentation afin de pouvoir disposer, si celle-ci est concluante, d'un dispositif aussi performant et efficace que possible au moment des JOP 2030.
Mes chers collègues, ce texte sera la première pierre de l'organisation des JOP dans les Alpes françaises. Je me réjouis de cet évènement à venir, et je sais que la France et les Alpes sauront se montrer à la hauteur.
Les Alpes françaises sont plus vastes que le territoire parisien. Nous devrons observer l'application de ces mesures sur le territoire, en restant très vigilants. Les territoires ont des attentes importantes, par exemple en matière de désenclavement.
Mme Patricia Demas, rapporteure pour avis de la commission des affaires sociales. - Madame la présidente, je vous remercie pour votre invitation.
Votre commission a délégué à la commission des affaires sociales l'examen de deux articles relatifs à la santé et d'un article relatif au droit du travail.
L'article 28 prévoit la création, à proximité de chaque village olympique et paralympique, d'un centre de santé appelé polyclinique, pour que les athlètes puissent accéder rapidement et gratuitement à des soins primaires. Y exerceront des salariés des structures supports et des volontaires français et étrangers.
Le schéma d'organisation reprend celui des JOP 2024, qui avait donné satisfaction. Cependant, la polyclinique des JOP 2024 était adossée à l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP). Pour les JOP 2030, cinq polycliniques sont envisagées, mais le flou règne sur les modalités pratiques d'organisation et sur les ressources humaines : il nous faut une évaluation précise des besoins - les Jeux de 2026 de Milan-Cortina permettront de faire des projections plus précises -, pour ne pas mettre en tension les services de santé existants, déjà fragiles. Le Cojop doit contribuer à ces évaluations et accompagner les services de santé.
Notre droit doit être adapté pour permettre l'exercice des médecins et professionnels de santé étrangers concourant à l'organisation des jeux, notamment ceux qui exerceront comme volontaires dans les polycliniques. Les autorisations d'exercice dérogatoire prévues à l'article 29 seront très encadrées, triplement limitées, quant à leur durée, quant au lieu d'exercice et à la patientèle potentielle. Ces conditions d'exercice nous semblent pertinentes pour garantir la sécurité de tous. Le dispositif de 2024, très similaire, n'a donné lieu à aucun dysfonctionnement grave.
La commission des affaires sociales propose d'instaurer un registre répertoriant les professionnels de santé bénéficiant de cette autorisation d'exercice dérogatoire, et d'amender la procédure de vérification des diplômes pour les volontaires, en adjoignant une vérification du droit à exercer dans le pays d'origine et en soumettant la procédure à un avis préalable des ordres professionnels compétents. La procédure, lors des JOP 2024, avait manqué d'effectivité, faute de coordination avec les ordres.
Enfin, à l'article 30, une dérogation exceptionnelle au repos dominical est prévue pour les commerces de détail, sur autorisation du préfet. La commission des affaires sociales propose d'adopter cet article 30 sans modification, car la procédure est efficace et bien encadrée. Les garanties sont claires en matière de volontariat des salariés et de contreparties légales.
M. Pierre-Alain Roiron. - Ce texte semble équilibré. Je reviens néanmoins sur les articles 34 et 35.
L'article 34 suit une logique préventive à l'égard d'individus qui pourraient constituer une menace. Cette logique pose question. Qui détermine la menace d'une particulière gravité ? Sur quelle base factuelle s'appuiera l'évaluation ? Comment le droit au recours personnes concernées sera-t-il garanti ? Ne créons pas une sanction qui pourrait s'apparenter à un délit de faciès.
Sur l'article 35, qui prolonge l'expérimentation de la vidéosurveillance algorithmique, faisons preuve de cohérence. Cette technologie n'est pas neutre et nous devons veiller à préserver les libertés publiques.
M. Jean-Michel Arnaud, rapporteur. - À l'article 34, j'ai d'ores et déjà proposé des adaptations permettant de garantir l'effectivité du droit au recours, en particulier par la modification de la date d'entrée en vigueur de la mesure. L'intéressé disposerait de 72 heures pour mobiliser le juge des référés au lieu de 48 heures dans la version du Gouvernement.
J'ai proposé des adaptations concrètes pour l'article 35, notamment en matière d'accès aux images de vidéosurveillance et par la consécration dans la loi de l'indépendance du comité d'évaluation. Nous avons trouvé un point d'équilibre avec les recommandations du rapport de Françoise Dumont et Marie-Pierre de la Gontrie, et nous aurons le débat en séance avec le Gouvernement.
Mme Muriel Jourda, présidente. - Comme c'est l'usage, il me revient, mes chers collègues, de vous indiquer le périmètre indicatif du projet de loi, en application du vade-mecum sur l'application des irrecevabilités au titre de l'article 45 de la Constitution, adopté par la Conférence des présidents.
Je vous propose de considérer que ce périmètre inclut les dispositions relatives :
- à la protection intellectuelle des propriétés Olympiques et Paralympiques de 2030 ;
- aux règles d'affichage publicitaire en extérieur spécifiques aux jeux Olympiques et Paralympiques de 2030 ;
- aux clauses figurant dans le contrat hôte des jeux Olympiques et Paralympiques de 2030 ainsi que dans ses conventions d'exécution ;
- aux garanties financières pouvant être accordées par les régions hôtes au profit du Comité d'organisation des jeux Olympiques et Paralympiques de 2030 ;
- aux modalités d'encadrement des volontaires impliqués dans l'organisation des jeux Olympiques et Paralympiques de 2030 ;
- à l'association et à l'information des parlementaires sur l'organisation des jeux Olympiques et Paralympiques de 2030 ;
- à la compétence de la Cour des comptes et de l'Agence française anticorruption pour contrôler les personnes concourant à l'organisation des jeux Olympiques et Paralympiques de 2030 ainsi que, pour l'AFA, les personnes chargées des opérations de reconfiguration des sites olympiques ;
- à la lutte contre le dopage ; aux modalités d'organisation de la concertation avec le public en amont des jeux Olympiques et Paralympiques de 2030 ;
- aux modalités d'évolution des documents d'urbanisme et de planification en vue de permettre la préparation, l'organisation et le déroulement des jeux Olympiques et Paralympiques de 2030 ;
- aux dérogations aux règles d'expropriation pour cause d'utilité publique, d'occupation du domaine public, d'urbanisme et de la commande publique accordées à l'autorité administrative et aux pouvoirs adjudicateurs pour les besoins de l'organisation des jeux Olympiques et Paralympiques de 2030 ;
- au régime d'autorisation et à la réglementation applicable aux constructions ou aménagements comportant un état provisoire correspondant aux nécessités de la préparation, de l'organisation et du déroulement des jeux Olympiques et Paralympiques de 2030, et un état définitif ultérieur, ainsi qu'aux constructions et aménagements temporaires liés à la préparation, à l'organisation ou au déroulement des jeux Olympiques et Paralympiques de 2030 ;
- à la prolongation, à titre dérogatoire, du délai d'enlèvement des constructions ayant fait l'objet d'un permis de construire à titre précaire, lorsque le projet contribue à l'organisation ou au déroulement des jeux Olympiques et Paralympiques de 2030 ;
- aux modalités de mobilisation de logements dans les départements hôtes des épreuves des jeux Olympiques et Paralympiques de 2030 en vue de l'accueil de personnes accréditées ou de personnels nécessaires au bon déroulement des événements ;
- aux modalités de soutien à la rénovation de l'habitat et de l'immobilier de loisir dans les départements hôtes des jeux Olympiques et Paralympiques de 2030 ;
- à l'accessibilité universelle des modes de transport nécessaires pour rejoindre les sites liés à l'organisation et au déroulement des jeux Olympiques et Paralympiques de 2030 ;
- à l'affectation de voies de circulation à certains véhicules déterminés dans le cadre des jeux Olympiques et Paralympiques de 2030 ; à l'homologation des structures provisoires et démontables ;
- à l'extension du champ et aux dérogations au régime de la servitude d'utilité publique prévue par le code du tourisme pour les infrastructures de sports d'hiver afin de faciliter les aménagements et l'implantation des équipements nécessaires à la préparation, à l'organisation et au déroulement des jeux Olympiques et Paralympiques de 2030 ;
- aux autorisations et aux conditions d'exercice des professionnels de santé participant à l'organisation des jeux Olympiques et Paralympiques de 2030 ;
- à l'organisation de l'offre de soins dans les régions hôtes pendant la période entourant le déroulement des jeux Olympiques et Paralympiques de 2030 ;
- aux dérogations au repos dominical des salariés liées à la tenue des jeux Olympiques et Paralympiques de 2030 ;
- aux prérogatives des agents de sécurité privée en matière d'inspection visuelle de véhicules et de coffres ; aux mesures de police administrative visant à assurer la sécurité de grands évènements ou rassemblements ;
- à la réalisation d'enquêtes administratives sur les personnels des entreprises de transport public de personnes ou de marchandises dangereuses ;
- à l'expérimentation de la vidéoprotection algorithmique ;
- à l'assainissement des bateaux et des établissements flottants sur le territoire des communes franciliennes riveraines de la Seine ;
- à l'homologation des peines d'emprisonnement édictées par l'assemblée de la Polynésie française en matière de délits liés au dopage.
Il en est ainsi décidé.
Mme Muriel Jourda, présidente. - Je propose que la commission prenne acte des résultats des travaux de la commission de la culture sur les articles qui lui ont été délégués, et adopte l'article 1er et l'article 2, tel que modifié par l'amendement COM-13 rectifié.
Article 1er
L'article 1er est adopté sans modification.
Article 2
L'amendement COM-13 rectifié est adopté.
L'article 2 est ainsi rédigé.
Mme Muriel Jourda, présidente. - Je propose que la commission prenne acte des résultats des travaux de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable sur l'article 3 qui lui a été délégué, et l'adopte tel que modifié par l'amendement COM-16.
L'amendement COM-16 est adopté.
Les amendements COM-9, COM-10 et COM-11 ne sont pas adoptés.
L'article 3 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Article 4
L'article 4 est adopté sans modification.
M. Jean-Michel Arnaud, rapporteur. - Je suis favorable à l'amendement de suppression COM-14 de Stéphane Sautarel.
L'amendement COM-14 est adopté.
L'article 5 est supprimé.
Mme Muriel Jourda, présidente. - Je propose que la commission prenne acte des résultats des travaux de la commission de la culture sur les articles qui lui ont été délégués, et adopte l'article 6 et l'article 7, tel que modifié par l'amendement COM-37.
L'article 6 est adopté sans modification.
Article 7
L'amendement COM-37 est adopté.
L'article 6 est ainsi rédigé.
Articles 8 et 9
Les articles 8 et 9 sont successivement adoptés sans modification.
Mme Muriel Jourda, présidente. - Je propose que la commission prenne acte des résultats des travaux de la commission de la culture sur les articles qui lui ont été délégués, et adopte l'amendement COM-35 portant article additionnel avant l'article 10, ainsi que l'article 10 et l'article 11, tel que modifié par l'amendement COM-36.
L'amendement COM-35 est adopté et devient article additionnel.
Article 10
L'article 10 est adopté sans modification.
Article 11
L'amendement COM-36 est adopté.
L'article 11 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
M. Jean-Michel Arnaud, rapporteur. - J'émets un avis défavorable à l'amendement COM-7. Le fait de pouvoir utiliser une consultation électronique n'enlève en rien la possibilité d'organiser des consultations classiques, si nécessaire.
L'amendement COM-7 n'est pas adopté.
M. Jean-Michel Arnaud, rapporteur. - J'émets également un avis défavorable à l'amendement COM-8, pour les mêmes raisons.
L'amendement COM-8 n'est pas adopté.
L'article 12 est adopté sans modification.
Mme Muriel Jourda, présidente. - Je propose que la commission prenne acte des résultats des travaux de la commission des affaires économiques sur les articles qui lui ont été délégués, et adopte l'article 13, tel que modifié par l'amendement COM-24, ainsi que l'article 14.
L'amendement COM-24 est adopté.
L'article 13 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Article 14
L'amendement COM-12 n'est pas adopté.
L'article 14 est adopté sans modification.
M. Jean-Michel Arnaud, rapporteur. - L'amendement COM-17 vise à accélérer les procédures liées à la réalisation des ouvrages connexes aux JOP.
L'amendement COM-17 est adopté.
L'article 15 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Article 16
L'article 16 est adopté sans modification.
Mme Muriel Jourda, présidente. - Je propose que la commission prenne acte des résultats des travaux de la commission des affaires économiques sur les articles qui lui ont été délégués, et adopte l'article 17, tel que modifié par l'amendement COM-25 ; l'article 18, tel que modifié par l'amendement COM-26 ; les amendements identiques COM-27 et COM-2 rectifié bis portant article additionnel après l'article 18 ; l'article 19, tel que modifié par l'amendement COM-28 ; et l'article 20, tel que modifié par l'amendement COM-29.
L'amendement COM-25 est adopté.
L'article 17 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Article 18
L'amendement COM-26 est adopté.
L'article 18 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Après l'article 18
Les amendements identiques COM-27 et COM-2 rectifié bis sont adoptés et deviennent article additionnel.
Article 19
L'amendement COM-28 est adopté.
L'article 19 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Article 20
L'amendement COM-29 est adopté.
L'article 20 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Mme Muriel Jourda, présidente. - La commission de l'aménagement du territoire et du développement durable a déclaré l'amendement COM-15 irrecevable en application de l'article 45 de la Constitution. Je vous propose de confirmer cette position.
L'amendement COM-15 est déclaré irrecevable en application de l'article 45 de la Constitution.
L'article 21 est adopté sans modification.
M. Jean-Michel Arnaud, rapporteur. - L'amendement COM-18 vise à autoriser les véhicules sanitaires à emprunter les voies réservées.
L'amendement COM-18 est adopté.
M. Jean-Michel Arnaud, rapporteur. - L'amendement COM-1 vise à réserver une voie à la circulation des bus entre les communes d'Annecy, Thônes et les stations d'Aravis, y compris au-delà des Jeux. Si la question mérite d'être abordée en séance, je vous propose de ne pas retenir cet amendement d'appel. Avis défavorable.
L'amendement COM-1 n'est pas adopté.
Les amendements rédactionnels COM-19 et COM-20 sont adoptés.
L'article 22 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Mme Muriel Jourda, présidente. - Je propose que la commission prenne acte des résultats des travaux de la commission de la culture sur l'article 23 qui lui a été délégué, et l'adopte sans modification.
L'article 23 est adopté sans modification.
Mme Muriel Jourda, présidente. - Je propose que la commission prenne acte des résultats des travaux de la commission des affaires économiques sur l'article 24 qui lui a été délégué, et l'adopte tel que modifié par l'amendement COM-30.
L'amendement COM-30 est adopté.
L'article 24 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Article 25, 26 et 27
Les articles 25, 26 et 27 sont successivement adoptés sans modification.
Mme Muriel Jourda, présidente. - Je propose que la commission prenne acte des résultats des travaux de la commission des affaires sociales sur les articles qui lui ont été délégués, et adopte l'article 28, tel que modifié par l'amendement COM-31 ; l'article 29, tel que modifié par les amendements COM-32, COM-33 et COM-34 ; et l'article 30.
L'amendement COM-31 est adopté.
L'article 28 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Article 29
Les amendements COM-32, COM-33 et COM-34 sont adoptés.
L'article 29 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Article 30
Les amendements COM-3 et COM-4 ne sont pas adoptés.
L'article 30 est adopté sans modification.
M. Jean-Michel Arnaud, rapporteur. - L'amendement COM-6 est satisfait. Avis défavorable.
L'amendement COM-6 n'est pas adopté.
M. Jean-Michel Arnaud, rapporteur. - Avis défavorable à l'amendement COM-5.
L'amendement COM-5 n'est pas adopté.
L'article 31 est adopté sans modification.
Article 32
L'article 32 est adopté sans modification.
M. Jean-Michel Arnaud, rapporteur. - L'amendement COM-21 est rédactionnel.
L'amendement COM-21 est adopté.
L'article 33 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
M. Jean-Michel Arnaud, rapporteur. - L'amendement COM-22 vise à augmenter de 24 heures le délai de notification des interdictions de paraître.
L'amendement COM-22 est adopté.
L'article 34 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
M. Jean-Michel Arnaud, rapporteur. - L'amendement COM-23 rectifié vise à ajuster les conditions de mise en oeuvre de l'expérimentation de la vidéoprotection algorithmique.
L'amendement COM-23 rectifié est adopté.
L'article 35 est ainsi rédigé.
Article 36 et 37
Les articles 36 et 37 sont successivement adoptés sans modification.
Le projet de loi est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Le sort des amendements examinés par la commission est retracé dans le tableau suivant :
La réunion est close à 12 h 45.