Mardi 1er juillet 2025

- Présidence de M. Jean-Marie Mizzon, président -

La réunion est ouverte à 14 h 30.

Audition de M. François Rebsamen, ministre de l'aménagement du territoire et de la décentralisation

M. Jean-Marie Mizzon, président. - Nous poursuivons aujourd'hui nos travaux consacrés à la réalisation d'un bilan du fonctionnement de l'intercommunalité depuis l'entrée en vigueur des lois du 27 janvier 2014 de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles (Maptam) et du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République (NOTRe), en auditionnant le ministre de l'aménagement du territoire et de la décentralisation, M. François Rebsamen.

Monsieur le ministre, nous vous remercions de vous être rendu disponible pour cette audition. Depuis votre prise de fonctions, vous vous êtes résolument engagé en faveur de la simplification de l'action publique locale, comme en témoigne le lancement du « Roquelaure » de la simplification en avril dernier.

En ce qui concerne plus particulièrement les intercommunalités et la répartition des compétences avec les communes, vous avez soutenu, avec Françoise Gatel, ministre chargée de la ruralité, une proposition défendue de longue date par le Sénat : la suppression du transfert obligatoire de la compétence eau et assainissement aux intercommunalités, qui permettra sans aucun doute de mieux faire respecter les principes de subsidiarité et de différenciation.

Votre analyse de la situation est donc très attendue et permettra de nourrir la réflexion de notre mission d'information, créée à l'initiative du Rassemblement Démocratique et Social Européen (RDSE). Celle-ci n'a pas pour objectif, je le rappelle, de remettre en cause le principe de l'intercommunalité, ni l'ensemble de l'architecture mise en place il y a maintenant dix ans, mais d'identifier les freins et blocages de toute nature qui entravent le bon fonctionnement de certaines structures intercommunales. Il est important que vous puissiez nous indiquer quelle est votre vision globale du fait intercommunal, mais aussi nous expliquer quels sont les points qui vous semblent poser problème ou susceptibles d'évoluer - afin de répondre au sentiment d'impuissance exprimé par certains maires, comme nous avons pu le constater au cours de nos auditions.

Cette audition fait l'objet d'une diffusion en visioconférence ; elle sera disponible sur le site internet du Sénat.

Mme Maryse Carrère, rapporteure. - Merci de nous consacrer un peu de votre précieux temps sur ces sujets qui nous intéressent. Je salue aussi la présence à vos côtés de Mme Cécile Raquin, directrice générale des collectivités locales, que nous avons précédemment reçue.

Quel regard portez-vous sur l'intercommunalité, son fonctionnement et son évolution depuis la loi NOTRe ? Quel regard portez-vous sur son degré de maturité ?

Pensez-vous que la carte intercommunale soit adaptée ? Les périmètres ont été chamboulés au fil du temps et se sont rapidement élargis avec une base mathématique qui n'est pas forcément adaptée aux réalités locales. Avez-vous des exemples de fusions, de scissions, de retraits de communes d'une intercommunalité ?

Que pensez-vous de la gouvernance intercommunale et des compétences ? Une loi vient de revenir sur le transfert obligatoire de la compétence eau et assainissement.

Nous sommes très attentifs aux services publics locaux. Sont-ils mieux exercés par les intercommunalités, et à quel coût ? Les intercommunalités investissent-elles plus qu'avant ?

Les mécanismes de solidarité financière au sein des intercommunalités sont-ils suffisamment connus et utilisés ?

M. François Rebsamen, ministre de l'aménagement du territoire et de la décentralisation. - Merci de me donner l'occasion de vous dire ce que je pense de la relation entre les maires et les intercommunalités et sur l'intercommunalité elle-même. Je suis un défenseur historique de l'intercommunalité. En 1992, j'ai participé, en tant que commissaire du Gouvernement auprès de Pierre Joxe, alors ministre de l'intérieur, à la première loi relative à l'administration territoriale de la République (ATR), qui essayait de réorganiser la relation entre l'État, sa représentation territoriale et les collectivités locales.

Il apparaissait comme une nécessité de considérer que la chance de la France d'avoir 36 000 communes et 500 000 élus locaux, ne permettait pas de garantir un développement plus harmonieux sur le territoire, puisque les formes de relation entre les communes posaient déjà problème lors de la loi Marcellin, en 1971.

Les responsables nationaux, de droite comme de gauche, se sont toujours demandé comment faire coopérer les communes entre elles. Certaines le faisaient très bien, d'autres non. Cela pouvait entraîner, pour le département qui avait un autre rôle qu'actuellement, la multiplication des contrats avec les communes. On assistait parfois alors, dans les années 1970-1980, à la multiplication de la construction de salles des fêtes ou d'autres infrastructures, côte à côte, sans répondre forcément aux attentes et aux besoins des communes. Notre carte communale ne suffisait en effet plus à assurer les investissements nécessaires pour l'ensemble de la population.

L'intercommunalité s'est développée progressivement - lentement au début. Elle a rencontré une forte opposition. Dans le cadre de mes fonctions auprès de Pierre Joxe, j'étais chargé de faire un tour de France des communes pour expliquer ce qu'était l'intercommunalité. J'ai participé à des réunions assez animées avec des maires qui craignaient une perte de leurs pouvoirs. Les élus fonctionnent un peu avec la carotte et le bâton ; Jean-Pierre Chevènement avait apporté une carotte avec une prime au rassemblement, en réalité une prime à l'intercommunalité, qui a permis un véritable bond en avant de l'intercommunalité fin 1999-début 2000.

Les regroupements ont été réalisés surtout sur la base du volontariat durant de nombreuses années, pour arriver en 2014-2015 à l'adoption des lois NOTRe et Maptam qui organisaient sur l'ensemble du territoire cette nécessité d'avoir des regroupements de communes.

Les autres rassemblements de communes qu'on essaie de faire vivre en ce moment avec les communes nouvelles - à l'époque on parlait de communes fusionnées - ont beaucoup de mal à émerger. En effet, et c'est mon avis personnel, pour fusionner deux communes, même quand les équipes s'entendent bien, il faut avoir la foi chevillée au corps, car parfois elles dé-fusionnent cinq ou six ans plus tard, au gré des changements d'équipes.

À partir de ces lois, les regroupements ont été réalisés non plus volontairement, mais de manière autoritaire, par la loi, sur l'ensemble du territoire français. Cela s'est sûrement mieux passé à certains endroits qu'à d'autres, car la France est diverse. Les normes imposées, initialement, ne prenaient pas assez en compte des réalités concrètes : de nombreux maires s'entendaient pour fusionner dans des bassins de vie, mais parfois il restait des communes isolées, non sollicitées, et qui ont été intégrées contre la volonté des élus dans les ensembles intercommunaux existants.

Il y a eu de longs débats au sein des commissions départementales de coopération intercommunale (CDCI) pour savoir s'il fallait 5 000, 10 000 ou 15 000 habitants pour former une intercommunalité. Il y a des arguments pour et des arguments contre.

Le positif, c'est de voir aujourd'hui l'ensemble du territoire couvert par des intercommunalités.

Le négatif, c'est qu'il reste, à terme, des ajustements de bon sens à effectuer pour améliorer les relations. Les élus ont parfois créé des communautés de communes défensives contre d'autres communautés de communes ou communautés d'agglomération. Cela a amplifié, à tort, une opposition un peu factice entre le monde urbain et le monde rural.

Certains départements n'ont pas de grandes ni même de moyennes métropoles. Les relations sont très différentes entre les départements et les intercommunalités, selon que le département contient une métropole qui rassemble la moitié de la population, et un autre où l'agglomération principale en rassemble un cinquième ou un sixième.

La diversité géographique et politique de notre pays mériterait, sans remettre en cause l'intercommunalité, d'avoir une réflexion un peu subtile sur les modifications à apporter aux cartes actuelles.

Il y a aussi d'autres sujets à prendre en considération: faut-il un établissement à fiscalité propre ou non ? Il existe environ 1 300 établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre...

M. Jean-Marie Mizzon, président. - Plus précisément, 1 254 !

M. François Rebsamen, ministre. - Auxquels s'ajoutent ceux qui n'ont pas de fiscalité propre.

Il y a aussi la question du partage des compétences. Chaque intercommunalité veut se doter de compétences, avec parfois des chevauchements dans l'organisation territoriale.

Tout a été bousculé par la réforme des régions, lesquelles constituent, dans certains endroits, des ensembles homogènes, et, dans d'autres, des ensembles peu homogènes, voire gigantesques.

Cela a beaucoup apporté en matière de rationalisation des investissements et de travail en commun, et ce, même dans les métropoles.

Dans la métropole de Dijon, nous avons des relations entre urbains et ruraux d'excellente qualité. La plus petite commune de la métropole rassemble 160 habitants, contre 165 000 habitants pour la commune de Dijon même. Le maire de la plus petite commune ne souhaite pas quitter la métropole, et même, il fait la promotion de cette dernière, de la conférence des maires, de ses pratiques...

Cela tient souvent beaucoup aux pratiques locales, sauf aux endroits où les maires se sont vu forcer la main par certains préfets, ou alors lorsque les élus étaient un peu moins combatifs pour résister.

Je porte un regard très positif sur l'intercommunalité, qui est l'avenir de notre pays. La spécificité française, c'est ses 500 000 élus et ses 36 000 communes.

Mme Maryse Carrère, rapporteure. - Vous avez expliqué ce qui a justifié, en 2015, l'imposition d'une maille mathématique avec un plancher de 5 000 habitants dans les communes de montagne et de 15 000 pour les autres. Bien sûr, l'ensemble du territoire a été couvert, mais on aurait pu le faire sans imposer ces mailles.

Les services et la vie de nos concitoyens ont-ils été fortement modifiés grâce à l'intercommunalité ? Dispose-t-on de résultats significatifs ?

Selon vous, la diversité de notre territoire mériterait qu'on apporte des améliorations : sur quels critères s ? Pensez-vous à des évolutions importantes, comme des fusions ou des scissions d'intercommunalités, ou à des évolutions à la marge - je pense notamment aux communes qui se sont retrouvées dans certaines intercommunalités, alors qu'elles auraient préféré rejoindre des intercommunalités voisines ? Quelles difficultés pourraient entraîner ces changements, notamment en matière fiscale ? Car losqu'on veut changer d'intercommunalité ou séparer une intercommunalité en deux, les conséquences fiscales et celles en matière de ressources humaines sont importantes.

M. François Rebsamen, ministre. - Pour améliorer, il faudrait d'abord interroger l'ensemble des intercommunalités, de façon approfondie, pour leur demander ce qui serait améliorable.

Souvent, les bassins de vie ne sont pas assez pris en compte et viennent percuter le fonctionnement de deux ou trois intercommunalités...

Cela tient aussi aux élus eux-mêmes. Le fonctionnement des intercommunalités est parfois différent. Il y a une compétition entre élus - c'est normal, c'est la démocratie. Cela dépend aussi des personnalités. Dans certains endroits, cela se passe très bien, dans d'autres moins. Défusionner est difficile, mais il y a eu très peu de mouvements dans l'autre sens.

La réforme de 2015 a dix ans. C'est à la fois beaucoup et pas si énorme à l'échelle de l'histoire communale française ; il a fallu vingt-quatre ans depuis le lancement de l'idée des intercommunalités. Les départements se sont défendus pendant trente ans pour exister. Les régions ont attendu que le Premier ministre Laurent Fabius décide, en 1985, de l'élection au suffrage universel des conseillers régionaux, après les premières avancées du président Valéry Giscard d'Estaing. Les régions ont d'ailleurs été déstabilisées par cette grande réforme.

Désormais, comment améliorer l'existant avec les élus ? Chaque territoire est différent. Il faudrait introduire un peu plus de différenciation dans chaque région, même si la taille des régions est très diverse. Nous pourrions essayer d'améliorer encore la pertinence des relations financières entre les collectivités territoriales à l'intérieur d'une intercommunalité.

Ensuite, nous devons analyser quelles sont les compétences les mieux partagées en fonction de la taille des communes, quelles sont celles qui ne le sont pas et celles et qui pourraient l'être. Nous voyons aujourd'hui apparaître de nouveaux besoins qu'on n'imaginait pas il y a dix ans, notamment en matière de périscolaire. Les regroupements pédagogiques ont permis à de nombreux territoires, à de petites communautés de communes, de conserver une école ou un centre scolaire, qu'elles n'auraient pu garder si elles n'avaient pas été dans une intercommunalité, et de sauver leur territoire. Ensuite, se pose la question de savoir si cette intercommunalité doit prendre la compétence petite enfance . ? La mutualisation permet aux élus d'instaurer des habitudes de travail collectif. C'est une bonne chose, mais il faudrait des rencontres pérennes, sous une forme à inventer, entre les intercommunalités d'un même département, sans que les CDCI soient un lieu d'affrontement ou soient convoquées par le préfet, à la demande ou non du président de département. Il existe de nombreuses possibilités pour avancer.

On peut mutualiser de nombreux sujets. La mutualisation permet d'assurer chaque commune de notre pays. Désormais, on ira beaucoup plus loin avec CollectivAssur. À la fin de l'année, chaque commune disposera d'une assurance à un prix raisonnable. Individuellement, les maires n'ont pas tous conscience de la valeur de leurs biens. Ils y gagnent avec la mutualisation, car, dans une commune de 200 habitants, la secrétaire de mairie n'a pas toujours la compétence nécessaire. Il faudra donc aider ces communes en ingénierie.

Selon le Centre de recherches politiques de Sciences Po (Cevipof), 68 % des élus souhaitent maintenir la taille actuelle de leur intercommunalité, tandis que 10 % souhaitent explicitement une réduction. Le Sénat pourrait dresser une carte des zones de friction où le bassin de vie n'est pas bien pris en compte, où une commune a été forcée d'entrer dans l'intercommunalité, où une autre n'a pas voulu y rentrer...

Mme Maryse Carrère, rapporteure. - Vous disiez que le fonctionnement de l'intercommunalité dépend beaucoup des élus. N'est-ce pas parfois une question de positionnement des élus et du sens qu'on veut donner à l'intercommunalité ? Est-ce un outil de coopération pur et dur, ou un espace pouvant devenir une supra commune qui vient grignoter les compétences des communes ? Il faudrait requalifier le sens donné à l'intercommunalité.

Vous avez évoqué les pistes d'amélioration et notamment la différenciation, ainsi que la répartition des compétences. Le futur renouvellement municipal n'est-il pas l'occasion de repartir sur de bonnes bases ? Les exécutifs intercommunaux actuellement en place ont débuté leur mandat pendant la pandémie de covid-19, avec des réunions en visioconférence, ce qui ne facilite pas le relationnel... La prochaine échéance électorale pourrait être l'occasion de poser quelques jalons avec des outils comme les projets de territoire ou la conférence des territoires, qui pourrait avoir des attributions un peu différentes de celles qu'elle possède actuellement.

Les services communs sont-ils l'occasion de redorer l'image de la communauté de communes au service des communes, en introduisant plus de souplesse et en valorisant l'intérêt à adhérer à un service commun ?

Faut-il des compétences à la carte en fonction des territoires, sans toutefois déstabiliser ce qui fonctionne bien, par exemple la compétence du développement économique ?

M. François Rebsamen, ministre. - Obliger des élus qui ne sont pas partants pas ne fonctionnera pas. Nous devons plus tôt promouvoir ce qui fonctionne auprès de davantage d'intercommunalités.

Là où existe la solidarité financière, dans les EPCI à fiscalité propre - pas forcément uniquement les grands EPCI, certaines ont pu le décider eux-mêmes - il serait nécessaire, en début de mandat - et même si les élus sont libres de choisir - de nouer une sorte de pacte de gouvernance entre l'ensemble des élus.

Le premier travail serait que les élus élaborent ensemble - c'est un conseil, et non une obligation - un vade-mecum de bonnes pratiques. Commencez par élaborer un projet, écrivez un pacte de gouvernance, regardez les difficultés financières de certaines communes, mutualisez au maximum certains services publics... Par exemple, veut-on un seul restaurant scolaire par EPCI, à quelle taille, comment ? Ces questions sont à la main des élus.

Définir un intérêt communautaire, un pacte de gouvernance, acter que tous les quinze jours ou tous les mois les maires se réunissent pour décider des orientations font partie des bonnes pratiques. De nombreux EPCI fonctionnent ainsi.

La compétence eau posait problème. Il était symbolique de la rendre aux communes. Toutefois, vous ne pourrez pas sortir de la logique de bassin versant : chaque EPCI ne peut traiter soi-même sa portion de territoire. On ne peut avoir différentes politiques sur le même cours d'eau. Il est normal d'avoir des regroupements - pas forcément les agences de l'eau - pour échanger avec des techniciens et des spécialistes.

Il en va de même pour les déchets. On ne peut traiter les déchets à l'échelle d'un EPCI, aussi grand soit-il. Il faut mutualiser et avancer. Certains EPCI enfouissent, mais la capacité est limitée. Comment faire alors ? Rouvrir un nouveau centre d'enfouissement technique ? D'autres incinèrent, mais que faire quand l'usine tombe en panne ? Ils se tournent alors vers d'autres EPCI pour qu'ils traitent momentanément leurs déchets... Il faut dépasser l'échelle de l'EPCI pour agir à l'échelle du territoire, voire de la région.

Les compétences à la carte existent aussi... La loi relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l'action publique locale (3DS) a permis assurément des avancées. Peut-on aller plus loin ? En tant que législateurs, vous aurez à répondre à cette question.

Je crains qu'avant la prochaine élection présidentielle, on ne fasse pas grand-chose. Les échéances électorales sont majeures pour notre République : municipales et sénatoriales, d'abord. Nous sommes déjà entrés dans la campagne pour l'élection présidentielle, peut-être même un peu trop... Je ne crois pas à un grand soir avant un débat national sur un éventuel changement de compétences.

M. David Margueritte. - Je m'inscris dans la continuité des propos de la rapporteure.

Monsieur le ministre, vous avez évoqué, dans un rappel très intéressant, l'histoire de l'intercommunalité, citant notamment la loi ATR du 6 février 1992 et les lois Voynet et Chevènement. À l'époque, nous n'avons jamais tranché le débat suivant : la France veut-elle se doter d'intercommunalités purement coopératives ou avancer vers une vision plus fédérative des intercommunalités ? L'absence de réponse, et notamment en partie dans la loi NOTRe, n'explique-t-elle pas en partie les crispations de nombreux maires à l'égard de l'outil intercommunal ? Il y a parfois un malentendu sur ce qu'on attend de lui. La loi NOTRe a pu apparaître comme brutale en fixant des périmètres non consentis sur de nombreux territoires. Ne pas trancher ce débat conduit à négocier des adaptations cosmétiques.

Nous allons entrer dans un processus d'élections municipales et communautaires : une fois de plus, le programme communautaire ne sera pas vraiment débattu malgré le système de fléchage des conseillers communautaires dans les communes, faute de pouvoir réfléchir à un projet communautaire, surtout lorsqu'il y a de nombreuses communes. Il y a également le pacte de gouvernance, le projet communautaire avec le plan pluriannuel d'investissement, mais la transparence vis-à-vis de l'électeur est assez faible. Celui-ci sera appelé en mars prochain à trancher sur les questions municipales, mais aussi et surtout sur les questions communautaires, puisque la plupart des propositions des candidats dépendent de l'EPCI.

Ce débat est central pour notre mission, comme nous l'avons vu au cours des auditions : des personnalités éminentes ayant une vision très coopérative de l'intercommunalité ont proposé de limiter au strict minimum - deux à trois - les compétences obligatoires. Les intercommunalités risquent alors de devenir un échelon de plus. Faute de pouvoir organiser des coopérations plus puissantes, des syndicats sont mis en place, ce qui revient à créer des strates supplémentaires.

De nombreux maires et représentants d'associations estiment que l'intercommunalité est utile, mais la ressentent parfois comme un mal nécessaire, avec une pointe de résignation. C'est lié au débat que je citais.

On peut trouver des solutions techniques pour réguler les rapports entre les communes et l'intercommunalité. Je crois beaucoup aux services communs, mais il y a aussi les pôles de proximité, la conférence des maires... Vous avez proposé de la rendre un peu plus impérative pour qu'elle puisse retravailler la copie du conseil communautaire.

Les communes nouvelles peuvent aussi être un outil de régulation entre l'intercommunalité et les communes - même si j'en doute. Comment la commune nouvelle sera-t-elle représentée dans l'intercommunalité ? J'ai connaissance d'une commune nouvelle qui n'a plus que six représentants au conseil communautaire contre dix-neuf avant fusion.

Vous avez proposé des modifications de périmètre. N'est-il pas dangereux de rouvrir des débats qui avaient été houleux en 2015 et en 2016 après la loi NOTRe ? Ne faut-il pas trancher le débat fondateur après les échéances de 2027 ? Une fois celui-ci tranché, ne pourrait-on pas décliner des outils qui ne seraient pas simplement des modifications cosmétiques, lesquelles ne feraient qu'entretenir le malentendu et les crispations ? Nous pourrions aboutir à une réforme qui assume ce que l'intercommunalité peut apporter à notre pays et aux communes : des fédérations de communes qui respectent l'identité des communes, la proximité, et qui organisent de façon volontaire et engagée la mutualisation et les compétences stratégiques à l'échelle d'un territoire.

M. François Rebsamen, ministre. - Je crains des modifications qui feraient exploser l'intercommunalité dans notre pays. Mieux vaut avancer encore en renforçant les compétences et la gouvernance. Actuellement, 9 à 10 % des maires résistent. C'est peu, dans 90 % des cas, cela fonctionne bien.

Il existe de nombreuses coopérations dont on ne parle pas : il existe encore 4 300 syndicats intercommunaux à vocation unique (Sivu) et 1 200 syndicats intercommunaux à vocation multiple (Sivom). La baisse très lente de ces chiffres prouve que ces syndicats compensent des formes plus fines de coopération qui préexistaient avant les communautés de communes et autres formes d'intercommunalité. Il y avait 2 800 syndicats mixtes il y a cinq ans ; il en reste 2 600 aujourd'hui.

Certains dispositifs se surajoutent parfois et complexifient la situation, comme les pôles d'équilibre territorial et rural (PETR). À titre personnel, je m'interroge sur la nécessité de faire coexister un échelon supplémentaire. Les 122 PETR sont souvent un élément de complexification de la relation politique avec les EPCI, et un enjeu de combat politique entre des élus parfois d'une même couleur politique. Nous pourrions avancer sur ces points en renforçant encore, si les élus le souhaitent, la coopération intercommunale.

Vous proposez une fédération de communes ; c'est l'intercommunalité ! Améliorons déjà son fonctionnement. Je suis preneur d'une vraie réflexion sur l'ensemble du territoire. Il y a cent départements en France. Regardons point par point là où l'on peut améliorer les choses, et proposons-le aux élus. À eux de le faire ou non.

La loi a obligé à se regrouper il y a dix ans, mais même ceux qui voulaient revenir dessus ont changé d'avis. Ils ne veulent plus de grands meccanos, auxquels ils ont déjà beaucoup donné... Ils se débrouillent souvent très bien entre eux. Il n'est pas besoin de leur imposer de nouvelles choses. Mais en regardant bien, on pourrait sûrement leur fournir des éléments pour évoluer plus facilement.

M. Clément Pernot. - Le ministre a l'expertise du domaine qu'il gère, ce qui est assez rare ! Votre parcours a fait de vous un expert des collectivités territoriales. Nous sommes très heureux de vous entendre sur ce sujet.

Je partage avec vous certains éléments : l'intercommunalité est un bien nécessaire. J'étais à la tête d'une communauté de communes de 16 500 habitants. Sans intercommunalité, nous n'aurions jamais pu bâtir des équipements structurants partagés. Je suis heureux de cette évolution qui fédère les forces communales pour une collaboration intercommunale.

Parfois, certaines communautés de communes n'ont pas la taille qu'elles devraient avoir : elles génèrent sur leur territoire des déficiences qui pénalisent les autres. Par exemple, le Haut-Jura est un peu en perdition. La ville de Bourg souffre énormément, alors que quatre communautés de communes constituent le Haut-Jura. L'organisation pourrait être plus efficace si ces quatre communautés de communes étaient réunies, mais elles n'ont pas été victimes de la loi NOTRe : elles bénéficiaient d'une exception en raison de leur statut de communes de montagne. Nous avons un territoire morcelé, alors que si ces intercommunalités s'unissaient, on pourrait envisager un redressement significatif.

Il faut laisser la liberté aux élus. La liberté peut s'organiser ensemble, dans la discussion. On pourrait réorienter le rôle des CDCI : les élus qui ont du mal à se mettre d'accord pour constituer un nouvel ensemble pourraient bénéficier de l'expérience des autres, pour établir une nouvelle dynamique et régler des soucis.

Nous avons vu une expérience remarquable dans le Sud-Ouest : deux communautés de communes avaient été fusionnées, mais les élus ne s'entendaient pas. La bonne idée fut d'en ajouter une troisième pour que l'ambiance s'assagisse...

Il faudrait organiser cela au sein de la CDCI, pour un meilleur partage entre élus et pouvoir aider ceux qui rencontrent des difficultés. Nous devons rester sur un principe de grande liberté avec une analyse très locale. Il faudrait faire ce travail pour les cent départements.

M. François Rebsamen, ministre. - Nous devons avoir en face une organisation territoriale de la République déconcentrée telle que le préfet de département soit l'interlocuteur unique des élus, plutôt que celui qui ne sait pas quelles seront les fermetures de classe, ce qui va se passer dans la culture ou la santé... Des préfets de département peuvent apprendre la fermeture d'un hôpital ou d'une clinique sans avoir été prévenus. Si l'on veut améliorer la gestion locale, les collectivités doivent avoir un interlocuteur compétent en tout, et non pas une multitude d'interlocuteurs distribuant des crédits de l'État, parfois même sans le dire.

M. Clément Pernot. - Ce sont des propos d'expérience.

M. Didier Rambaud. - Lors de la création de cette mission d'information, j'ai toujours dit que vous aviez devant vous un fervent défenseur de l'intercommunalité : j'ai présidé durant dix ans une intercommunalité de 25 000 habitants répartis entre quatorze communes. J'ai vu les bienfaits de l'intercommunalité : il n'y avait pas de médiathèque, de zone d'activité, de service de la petite enfance, etc. Malgré les apports, depuis quelques communes expriment un malaise : les équipements structurants ne peuvent se trouver sur chaque commune et certaines ont l'impression de voir le train passer.

Il faut réfléchir au mode d'élection des conseillers communautaires - même si je sais qu'il est risqué de dire cela au Sénat.

À l'heure des demandes de simplification, il faut réfléchir à l'interconnexion entre le département et les intercommunalités. J'ai été conseiller général et départemental, et j'ai vu la différence entre les deux fonctions. Auparavant, on était élu conseiller général sur la base d'un canton qui correspondait à une histoire et à un bassin de vie. Avec la création des conseillers départementaux, les cantons ont été élargis et sont devenus des circonscriptions électorales et non des bassins de vie. Le département ne devrait-il pas devenir une fédération des intercommunalités ?

En Isère, nous avons un paysage intercommunal bien construit. Les intercommunalités correspondent à des réalités. N'est-ce pas une solution pour simplifier ? Entre l'intercommunalité et le département, la liaison est évidente en matière de solidarité territoriale et sociale.

M. François Rebsamen, ministre. - J'ai des relations de qualité avec toutes les strates de collectivité, et j'essaie de les conserver... Votre piste est intéressante. Pourquoi pas un jour ? Cela rejoint le débat sur le conseiller territorial ; je vous renvoie donc à l'après élection présidentielle.

Nous n'aurons pas le temps de décider de changements importants comme la fédération d'intercommunalités ou le conseiller territorial avant les élections. C'est un choix de la nation. On pourrait en décider par référendum.

M. Jean-Claude Anglars. - Nous sommes tous de fervents partisans de l'intercommunalité lorsqu'elle est choisie et non subie. Voilà le principal problème.

Je m'inquiète, en vue des prochaines élections municipales dans certains territoires, de tout ce qui a été dit, fait ou mal fait sur la gouvernance et la représentation des territoires. Les laissés-pour-compte risquent de se révolter. Je viens de l'Aveyron. Il y a une lame de fond ; les intercommunalités, hormis celles qui sont restées à taille humaine, sur le périmètre choisi de 2017, rencontrent toujours des problèmes.

Je suis un fervent partisan du conseiller territorial. Un élu doit représenter son territoire ; c'est un constat de bon sens Actuellement, les compétences transférées obligatoirement aux communautés de communes, notamment la compétence économie, fait que cette dernière relève aussi de la région et non plus du seul département. Je le dis d'autant plus que je suis conseiller départemental.

Nous devons revenir vers plus de proximité. Le préfet de département doit reprendre un certain nombre de pouvoirs, pour gérer au plus près du terrain.

Certains voudraient faire élire les députés, déjà souvent considérés comme hors sol, à la proportionnelle : ce serait la fin des élus de terrain, et le début de l'élection de personnes certes respectables, mais désignées par des partis politiques.

Cette mission vient à point nommé non pas pour inverser la tendance, mais pour corriger ce qui n'a pas été bien fait au départ. Tout a été dit sur la gouvernance, la représentation, les compétences... Comment les choses pourraient-elles évoluer d'ici aux municipales ?

M. François Rebsamen, ministre. - Il ne reste pas beaucoup de temps d'ici aux municipales, et je ne serai alors peut-être plus ministre... Il est difficile d'avoir une vision à huit mois quand on n'a pas de vision à trois mois... Cela ne m'empêche pas de faire mon travail : le statut de l'élu sera amélioré. Le budget sera une période compliquée, même si je compte beaucoup sur le Sénat pour soutenir les collectivités locales.

Je n'ai pas la même vision que vous : le conseiller territorial signifie tout à la fois la fin de l'intercommunalité et la fin des départements. On ne peut être à la fois conseiller départemental et conseiller régional.

Comment faire respecter la parité, sujet qui m'est cher ? C'est moi qui avais suggéré la réforme des cantons, seul moyen que j'avais trouvé pour faire la parité. Certains départements qui comptaient peu d'élues se sont alors retrouvés à parité. Nous avons agrandi la taille des cantons. Je ne méconnais pas les problèmes, mais nous avons permis aux femmes d'accéder aux mandats de conseiller départemental et même de sénateur.

Je ne crois pas au conseiller territorial. Je suis davantage partisan d'une fédération des intercommunalités que du conseiller territorial. Demain, combien y aurait-il de conseillers territoriaux dans une circonscription ? Deux, voire trois : ils n'auront alors qu'un seul but, être députés. Cela sera la pagaille un peu partout. Certes, ils auraient une connaissance du terrain. Je me suis suffisamment battu contre la limitation du cumul des mandats pour l'affirmer ici.

Faut-il de la proportionnelle ? C'est un beau débat. Le meilleur scrutin électoral est le scrutin à l'allemande, mis en place par les constitutionnalistes français après-guerre pour éviter le retour de l'extrême droite nazie au pouvoir, et instaurer le système le plus démocratique possible. Helmut Kohl n'a jamais été élu dans sa circonscription. Les Français pourraient adopter ce scrutin : on est candidat comme député dans une circonscription ; si on n'est pas élu dans la circonscription, il y a une liste de rattrapage au niveau national permettant d'être à la fois candidat de terrain et candidat sur une liste à la proportionnelle. Les résultats dans les circonscriptions sont transposés sur la liste proportionnelle. Certes, le dispositif est compliqué, mais intéressant. Je me permets de dire cela quand je débats avec des politologues ou autres personnalités.

Il est facile de prétendre que le scrutin majoritaire est celui de la Ve République, mais ce n'est pas vrai. Relisez ce que le général de Gaulle disait à l'époque. Il a fait les deux : en 1946, il a instauré le scrutin proportionnel puis, en 1958, compte tenu de la situation du pays, et pour mettre fin au régime des partis de la IVe République, il a instauré le seul scrutin qui valait « pour le moment », à savoir le scrutin majoritaire. Mais rien ne dit qu'il ne faudra pas modifier ce mode de scrutin. C'est le scrutin qui s'imposait pour la Ve République au vu de l'état du pays, dont acte.

François Mitterrand déclarait que le scrutin s'use quand on s'en sert. Quand des élus étaient à la fois élus locaux et députés, ils servaient surtout d'assistantes sociales : les présidents de communauté de communes ou de département recevaient les courriers des députés leur demandant un travail ou un logement pour quelqu'un... Cela transformait souvent le député, qui certes avait prise sur le terrain, en courroie de transmission par rapport à l'autorité municipale ou départementale.

Si vous laissez le scrutin proportionnel perdurer pendant quinze ans, vous n'aurez plus que des apparatchiks. Mieux vaut changer parfois de mode de scrutin et garder la même République...

M. Didier Rambaud. - Je comprends votre devoir de réserve, mais quel est votre avis sur le mode d'élection des conseillers communautaires ?

M. François Rebsamen, ministre. - J'ai longuement débattu avec Pierre Mauroy sur ce sujet. Le mode d'élection fonctionne bien ainsi. Il faut améliorer la relation entre les élus. Mais je crois en la fédération des intercommunalités, d'une certaine manière.

M. Jean-Marie Mizzon, président. - Vous avez souligné que des ajustements à la carte pourraient être nécessaires, ce qui correspond aux propos d'André Laignel, au nom de l'association des maires de France lors de son audition.

S'il faut ajuster, quel serait le rôle de la CDCI ? À mesure de la montée en charge de l'intercommunalité, le poids de la CDCI s'est révélé être insuffisant pour contrer le pouvoir extrêmement puissant du préfet. Faudrait-il conserver cette majorité des deux tiers à partir de laquelle la CDCI peut s'opposer au préfet, ou donner davantage la main aux élus avec une majorité classique ?

M. François Rebsamen, ministre. - Les élus doivent se gérer eux-mêmes le plus possible, ce qui n'empêche pas d'avoir en face un préfet avec des pouvoirs et des compétences. Il faut trouver un mode de gouvernance pour que la CDCI se réunisse à la demande des élus et qu'il y ait un lieu d'échange, pas nécessairement conclusif. Je fais confiance à l'intelligence des élus. Ce n'est parfois pas simple, mais dans 90 % du temps, c'est un bonheur.

M. Jean-Marie Mizzon, président. - En Moselle, les intercommunalités ont des différences de richesse assez marquées entre elles. Les intercommunalités riches sont très convoitées. Les communes en continuité territoriale avec elles sont parfois tentées de quitter leur périmètre pour rejoindre un périmètre intercommunal « plus à l'aise ».

Ne seriez-vous pas favorable à ce que nous renforcions la réduction des écarts de richesse, avec une péréquation plus forte des dotations ?

Nous avons observé, à l'occasion de nombreuses auditions, qu'un certain nombre de maires ne sont pas très à l'aise au sein d'intercommunalités souvent grandes avec une technostructure importante, qui les noie. Ils se sentent délaissés. Ces situations sont difficiles à vivre, quand bien même l'intercommunalité réalise un travail utile : ils ont l'impression que l'administration est à la manoeuvre.

Que pensez-vous du cumul des mandats horizontaux ? Actuellement, on peut être maire et président d'intercommunalité ; cela vous semble-t-il normal, à l'heure où l'on essaie de limiter le cumul des mandats ? Je pense notamment à de grandes villes et à de grandes métropoles.

M. François Rebsamen, ministre. - Nous échangeons beaucoup avec les associations d'élus sur la péréquation. Hier, j'ai rencontré les départements qui ne veulent plus entendre parler de péréquation. D'autres en veulent davantage.

Il y a deux types de péréquation. Une péréquation verticale est organisée par l'État qui prélève et redistribue à sa manière. Ce dispositif, adopté il y a quinze ans, a fonctionné, mais au bout d'un certain temps, les élus perdent le sens de cette péréquation. On ne leur dit pas à quoi elle sert vraiment : l'État leur prélève des moyens et répartit ce milliard d'euros.

Ensuite, il y a la péréquation horizontale que l'État opère, mais qu'il met à la main de l'Assemblée des départements de France (ADF) qui la répartit à sa manière. Les élus ne veulent plus en entendre parler, car cela les met en difficulté au sein des associations d'élus. Parfois, ce n'est pas en aidant les plus pauvres que vous obtiendrez un poste important dans une association d'élus...

Il faut clairement identifier la péréquation nationale, l'expliquer et dire à qui elle sert et à quelles fins. Dans ce cadre, elle peut avoir un rôle important.

On n'ose plus dire qu'on fait de la péréquation avec la dotation globale de fonctionnement (DGF), car tout le monde s'interroge sur sa finalité ; pourquoi l'autre en a-t-il plus, ou moins ? C'est une vieille forme de redistribution qui n'est plus totalement au goût du jour. Encore faut-il avoir le temps de la réviser. Le Sénat a réalisé de nombreuses études sur ce thème.

La péréquation horizontale est à la main des élus, ce qui est une bonne chose. Cela permet à tous de savoir ce qui est redistribué.

Il faut expliquer la péréquation verticale, car in fine les élus ne savent plus pourquoi elle existe. Chaque année, il faudrait un compte rendu précis pour dire à qui elle profite - normalement à ceux qui en ont le moins. Sinon les élus considèrent systématiquement que leur propre territoire n'est pas le mieux servi...

Il y a des moyens de répondre aux interrogations des maires de petites communes membres d'une grande agglomération. Je prends un exemple que je connais bien : dans mon territoire, nous avons créé une assemblée des maires n'ayant qu'un représentant du conseil de la métropole. J'ai souhaité pour eux des dotations spécifiques, qu'ils se répartissent au moyen d'une péréquation horizontale, à partir d'une somme globale votée par l'ensemble de l'intercommunalité. C'est un modèle de bonne gestion qui fonctionne très bien. Les maires sont intégrés, élèvent leur niveau de connaissance des finances, et mutualisent leurs achats publics. Certes, parfois un élu est un peu plus « fort en gueule » qu'un autre qui interviendrait moins, on peut toujours améliorer la situation...

M. Jean-Marie Mizzon, président. - C'est un fonds de concours ?

M. François Rebsamen, ministre. - Oui, c'est une forme de fonds de concours, mais absolument pas obligatoire. Il finance l'investissement et le fonctionnement.

Mme Maryse Carrère, rapporteure. - Les outils à disposition des élus sont parfois méconnus ou parfois ne fonctionnent pas très bien comme la conférence des maires. Dans certaines intercommunalités, elle constitue parfois un passage obligé pour que le président de l'intercommunalité présente certains dossiers. Dans d'autres intercommunalités, elle représente un véritable espace de discussion et de dialogue.

Vous avez parlé du pacte de gouvernance et du projet de territoire. Faut-il rigidifier à nouveau ces outils pour les faire connaître et éventuellement les imposer ? Comment les rendre plus efficients afin que les maires s'en saisissent mieux et plus dans les intercommunalités ?

M. François Rebsamen, ministre. - Je suis contre tout ce qui est obligatoire pour les élus. Si on rigidifie un outil, il deviendra une obligation qui pèsera sur les élus et on aboutira à des documents sans grande portée. Alors qu'un outil résultant d'un débat entre élus permet de s'enrichir et d'avancer. C'est le principe démocratique : avoir une discussion pour prendre les meilleures décisions.

Le vice-président chargé des finances de Dijon Métropole est le maire d'une commune de 1 200 habitants. Quelques maires trouvaient ce choix un peu saugrenu, s'interrogeant sur sa capacité à gérer les 480 millions d'euros de budget de la métropole. Passé le scepticisme initial, tout le monde est très content. Chaque maire constate ainsi que, quelle que soit la taille de sa commune, il n'est pas moins intelligent qu'un maire d'une commune de 50 000 habitants. Il faut donner ces exemples pour prouver que malgré les marges de progrès possibles, de nombreux dispositifs fonctionnent bien dans notre pays. Nous avons besoin de le dire !

M. Jean-Marie Mizzon, rapporteur. - Quand les choses ne sont pas systématiquement obligatoires, c'est que nous sommes dans une démarche de simplification. La simplification doit être une préoccupation de chaque instant, et dans tous les domaines.

Cette audition a fait l'objet d'une captation vidéo qui est disponible en ligne sur le site du Sénat.

La réunion est suspendue à 15 h 45.

La réunion est reprise à 16 heures.

Audition de maires

M. Jean-Marie Mizzon, président. - Nous poursuivons nos travaux consacrés à la réalisation d'un bilan du fonctionnement de l'intercommunalité depuis l'entrée en vigueur des lois dites « Maptam » (loi du 27 janvier 2014 de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles) et « NOTRe » (loi du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République), avec une table ronde consacrée à l'audition de maires issus d'intercommunalités différentes les unes des autres.

J'ai l'honneur d'accueillir en votre nom à tous, MM. Yann Scotte, maire d'Hardricourt ; Vincent Boulnois, maire du Châtelard ; Mme Christiane Tincelin, maire de Barfleur ; M. Werner Kervarec, maire de Guesnes ; Mme Isabelle Surreaux, maire de Blanzay ; M. Xavier Odo, maire de Grigny-sur-Rhône, M. Laurent Fourcade, maire de Barbazan-Dessus, et M. Paul-Roland Vincent, maire de Bourgneuf.

Mesdames, messieurs, merci de vous être rendus disponibles pour nous faire partager le fruit de votre expérience d'élus de terrain. Depuis le début de nos travaux, de nombreuses voix se sont élevées pour regretter le caractère hégémonique de certaines intercommunalités nées de la mise en oeuvre de la loi NOTRe, même si un grand nombre de personnes entendues reconnaissent également l'apport des intercommunalités du point de vue de la conduite de projets structurants.

La gouvernance des intercommunalités, leur mode de fonctionnement et la voix des petites communes sont trois sujets essentiels sur lesquels votre analyse est très attendue et permettra de nourrir la réflexion de notre mission d'information. Je le rappelle, celle-ci a pour objectif non pas de remettre en cause le principe de l'intercommunalité ni l'ensemble de l'architecture mise en place il y a maintenant dix ans, mais d'identifier les freins et blocages de toute nature qui entravent le bon fonctionnement de certaines structures intercommunales. Il est important que vous puissiez nous indiquer quelle est votre vision globale du fait intercommunal, mais aussi nous expliquer quels sont les points qui vous semblent poser problème ou susceptibles d'évoluer.

Cette audition fait l'objet d'une diffusion en visioconférence ; elle sera disponible sur le site internet du Sénat.

Mme Maryse Carrère, rapporteure. - Je vous remercie de votre disponibilité. Quelle appréciation portez-vous sur les intercommunalités, leur fonctionnement, et quelles sont les principales difficultés rencontrées par celles-ci ?

M. Yann Scotte, maire d'Hardricourt - Merci de nous convier à ces échanges. Je suis le maire d'Hardricourt, commune de 2 600 habitants située aux portes du parc naturel régional du Vexin français, dans les Yvelines. C'est une commune périurbaine, située dans une vallée de Seine en phase post-industrielle. Nous avions un souci d'organisation et l'intercommunalité apparaissait à l'époque comme une solution ; nous aurons, j'imagine, l'occasion de développer au cours de l'audition les atouts et les limites de ce qui devait à l'origine n'être qu'un outil, mais qui a fini par supplanter l'échelon communal pour s'insérer entre les communes et le département.

M. Vincent Boulnois, maire du Châtelard. - Je suis le maire du Châtelard, en Savoie, commune membre de l'intercommunalité du Grand Chambéry. La ville-centre se situe à trois quarts d'heure de notre massif : nous en sommes donc géographiquement détachés. Notre problème n'est pas d'être noyé dans une grosse intercommunalité ; au contraire, dans notre massif, nous avons 5 400 habitants, répartis entre quatorze communes de 100 à 700 habitants. Notre problème est que l'ancienne intercommunalité, centrée autour du Châtelard, exerçait de nombreuses compétences dont les communes seules n'avaient pas la capacité mais que la nouvelle intercommunalité n'a pas reprises en intégralité. Nous avons donc dû créer, pour compenser, un syndicat intercommunal à vocation unique (Sivu), qui s'est transformé en syndicat intercommunal à vocation multiple (Sivom).

Si la commune du Châtelard n'est plus chef-lieu de canton, elle joue toujours un rôle central : nous avons toujours un collège, une gendarmerie, un centre de secours, une antenne du département pour la voirie et l'action sociale. Structurellement, nous sommes le centre du massif, mais nous n'avons pas de dotation pour cela ; la dotation est récupérée par l'agglomération.

Géographiquement, nous avions demandé à nous associer pour gérer ensemble certaines compétences. Cela ne remet pas en cause l'intercommunalité, qui nous donne des moyens sur les transports, la gestion des déchets et de l'eau, mais, en raison de notre éloignement géographique, nous nous retrouvons isolés. La mairie du Châtelard joue toujours le rôle de chef-lieu de canton, mais sans les moyens afférents.

En outre, nous ne sommes pas dans une zone périurbaine, mais nous sommes situés dans une zone très peuplée, de 450 000 habitants, dont nous sommes le terrain de jeu : cette population importante vient dans le massif pour les loisirs de pleine nature et, si le massif compte 5 400 habitants résidentiels, il y a certains jours 15 000 personnes présentes.

M. Werner Kervarec, maire de Guesnes. - La commune de Guesnes est une toute petite commune de 230 habitants, dans le nord de la Vienne, à la limite du département et à proximité de deux autres régions : nous sommes très proches de Chinon, située dans la région Centre Val de Loire, et de Saumur, dans la région Pays de la Loire. La communauté de communes du Pays Loudunais est proche de tous ces lieux.

Je suis maire seulement depuis 2020. Je travaillais précédemment dans l'industrie ; j'ai dirigé des usines un peu partout en France, en Allemagne et en Suisse. J'ai découvert l'organisation intercommunale avec intérêt ; pour une petite commune comme la mienne, l'intercommunalité est importante : le maire d'une commune de 230 habitants ne peut pas faire grand-chose sans l'appui de l'intercommunalité.

Nous sommes surtout aidés par le département. La région est une grande inconnue, qui n'existe quasiment pas pour nous, y compris en matière de développement économique, un sujet qui m'est cher et dont je n'entends quasiment pas parler.

Mme Isabelle Surreaux, maire de Blanzay. - La commune de Blanzay, 830 habitants, est située dans le sud de la Vienne, à proximité de la Charente et des Deux-Sèvres. Notre communauté de communes du Civraisien en Poitou regroupe 35 communes et 28 000 habitants. La dernière fusion de communes a été forcée et l'on en ressent encore les conséquences : il est parfois compliqué de travailler ensemble...

M. Xavier Odo, maire de Grigny-sur-Rhône. - La commune de Grigny-sur-Rhône, 10 000 habitants, fait partie de la métropole de Lyon, qui compte 58 communes, 1,4 million d'habitants et qui dispose de près de 4 milliards d'euros de budget, mais dont les conseillers métropolitains n'émanent pas des conseillers municipaux des communes membres de la métropole. Compte tenu du mode de scrutin, Grigny-sur-Rhône est représentée par un membre de l'opposition municipale, qui a fait 30 % des voix aux dernières élections...

Cette intercommunalité n'en est plus une. Elle se caractérise par une très grande verticalité et nous sommes désormais plus des maires d'arrondissement que des maires de plein exercice. Sur de nombreux dossiers, nous n'avons plus notre mot à dire : nous appliquons - ou subissons - des choix faits ailleurs. Cette intercommunalité n'est plus une communauté urbaine, elle a repris les compétences du département et a des compétences en gestion directe et non plus selon le principe de subsidiarité. Comment travailler en harmonie dans ces conditions ?

M. Laurent Fourcade, maire de Barbazan-Dessus. - La commune de Barbazan-Dessus, 167 habitants, est située dans les Hautes-Pyrénées, entre Tarbes et Lourdes. Du temps où notre intercommunalité comptait 27 communes et 6 000 habitants, elle fonctionnait bien. Mais, en 2017, on nous a obligés à fusionner avec une autre communauté de communes de même taille, pour créer une communauté de communes de 53 communes et 12 000 habitants. Cela a conduit à l'explosion des budgets et de la fiscalité.

M. Paul-Roland Vincent, maire de Bourgneuf. - La commune de Bourgneuf, 1 500 habitants, fait partie, depuis 2014, de la communauté d'agglomération de La Rochelle, qui compte 180 000 habitants - à côté, 1 500 habitants, ce n'est pas grand-chose...

J'ai le sentiment qu'il n'est pas toujours évident de se faire entendre. Bourgneuf n'a qu'un conseiller communautaire sur les 82 et pèse donc peu dans les décisions.

Mme Christiane Tincelin, maire de Barfleur. - Je suis maire de Barfleur depuis avril 2024. Ma commune, 550 habitants, se situe à la pointe nord-est du Cotentin. C'est une commune dotée du label « Plus beau village de France », avec beaucoup de charme et un patrimoine historique remarquable : il est valorisant de s'en occuper.

Notre intercommunalité de 15 villages a rejoint la communauté d'agglomération en 2017 ou 2018, qui regroupe désormais 129 communes, mais avec des sous-ensembles, dont celui du Val-de-Saire.

Je suis très satisfaite de ce mode de fonctionnement. Grâce à des équipes dynamiques, l'agglomération fonctionne bien et rend de nombreux services aux communes. Il est vrai que notre environnement économique est facilitant.

Les relations sont également fortes avec le département, car nous avons un port départemental.

Mme Maryse Carrère, rapporteure. - Monsieur Boulnois, la carte intercommunale est-elle adaptée au périmètre de votre intercommunalité ? Seriez-vous favorable à des ajustements limités, au cas par cas, à la demande des élus locaux ?

M. Vincent Boulnois. - Oui, cela me semble nécessaire sur certains points, car ma commune est éloignée de la ville-centre. Nos quatorze petites communes du massif des Bauges représentent la moitié du territoire de l'agglomération de Chambéry. Cette spécificité mériterait d'être mieux prise en compte pour que notre territoire continue à vivre et conserve des compétences. Bien sûr, l'intercommunalité est positive en matière de finances ou de compétences, mais il ne faut pas oublier que ces quatorze petites communes doivent trouver des outils pour investir.

Mme Maryse Carrère, rapporteure. - Madame Tincelin, vous évoquez des « sous-ensembles » ; comment cela fonctionne-t-il ?

Mme Christiane Tincelin. - Les anciennes communautés de communes sont devenues des pôles de la communauté d'agglomération du Cotentin, qui couvre tout le nord du Cotentin, soit 129 communes. Les distances sont grandes et les problématiques très différentes entre la commune de La Hague à l'ouest et les petits villages de la côte est.

On a donc conservé - et c'est une très bonne idée - des pôles, qui correspondent aux anciennes communautés de communes. Les quinze communes du pôle du Val-de-Saire travaillent dans la proximité et préparent, ensemble, les réunions du conseil communautaire. C'est une bonne unité intermédiaire entre le petit village et la grande agglomération.

Mme Maryse Carrère, rapporteure. - Des services différenciés ou des transferts de compétences à la carte ont-ils été mis en place ?

Mme Christiane Tincelin. - Il y a les compétences obligatoires de l'agglomération et les compétences transférées par les pôles, par exemple le cinéma. En matière de petite enfance, tous les pôles ne fonctionnent pas de la même manière.

Mme Maryse Carrère, rapporteur. - Monsieur Vincent, vous nous avez dit être noyé dans une grande intercommunalité : comment vous faire mieux entendre ?

M. Paul-Roland Vincent. - C'est difficile, quand on ne pèse que 1 500 habitants, parmi 180 000... La conférence des maires, qui n'a pas de pouvoir de décision, devrait avoir un rôle plus affirmé dans le fonctionnement de l'agglomération. Les 28 maires devraient pouvoir impulser des politiques. Il y a bien sûr le bureau communautaire, mais la ville-centre y est surreprésentée.

Mme Maryse Carrère, rapporteure. - La conférence des maires se réunit-elle ?

M. Paul-Roland Vincent. - Oui, environ tous les mois, tout comme le bureau et le conseil communautaire.

Mme Maryse Carrère, rapporteure. - La conférence des maires est-elle un espace de dialogue ou de décision ?

M. Paul-Roland Vincent. - C'est un espace de dialogue. Nous y sommes écoutés, mais pas toujours entendus...

Mme Maryse Carrère, rapporteure. - Monsieur Kervarec, vous nous avez dit que la communauté de communes était essentielle pour votre commune. Pouvez-vous nous donner des exemples ?

M. Werner Kervarec. - Quand nous sommes arrivés, il n'y avait pas de projet de territoire. Nous l'avons élaboré, en intégrant les besoins des communes. Des actions ont ensuite été mises en place, comme le regroupement des bibliothèques. Les petites communes s'appuient sur la communauté de communes pour leur développement et les sujets de vie quotidienne.

Mme Maryse Carrère, rapporteure. - Les compétences « eau » et « assainissement » ont-elles été transférées à la communauté de communes ?

M. Werner Kervarec. - Oui. L'éclairage public aussi, via une société départementale, très active. Tout fonctionne pour le mieux. Les communes s'appuient aussi sur la communauté de communes en matière de tourisme.

Mme Maryse Carrère, rapporteure. - Votre intercommunalité fonctionne donc bien ?

M. Werner Kervarec. - Oui, avec l'aide du département.

Mme Maryse Carrère, rapporteure. - Monsieur Fourcade, vous essayez de changer d'intercommunalité. Pouvez-vous nous présenter votre démarche et la procédure applicable en matière de changement d'intercommunalité ?

M. Laurent Fourcade. - Nous sommes passés d'une petite intercommunalité de 6 000 habitants à une autre de 11 000 habitants, dans laquelle nous n'avons pas trop le pouvoir. Cette nouvelle intercommunalité a voulu se développer comme le ferait une grande, avec d'importants frais de structure : avec la création de postes de directeur général des services (DGS), chargés de développement, chargés de mission, etc, la masse salariale a explosé et les impôts avec.

Ma commune de 176 habitants génère pour la communauté de communes 25 000 euros de recettes fiscales liées au foncier. Je vois comment sont utilisés 10 000 euros parmi les recettes générées, mais où passent les 15 000 autres ? La communauté de communes a pourtant peu de compétences : ramassage des ordures et service d'incendie et de secours. Si les compétences se développent, les taux d'imposition vont exploser.

Nous préférerions nous tourner vers une communauté de communes beaucoup plus grande, l'agglomération Tarbes-Lourdes-Pyrénées, pour avoir accès à plus de services, avec une fiscalité maîtrisée. Nous venons de délibérer pour demander un tel changement. Mais, alors que notre intercommunalité nous coûte déjà 15 000 euros chaque année depuis sept ans, nous devrions encore débourser 25 000 euros de pénalités pour avoir le droit de partir ! C'est l'équivalent d'un an sans investissement. Il faut en outre que deux tiers des conseils municipaux composant l'intercommunalité acceptent de nous laisser partir, alors que nous leur apportons aujourd'hui 25 000 euros chaque année...

Mme Maryse Carrère, rapporteure. - Quelle est la suite de la procédure ?

M. Laurent Fourcade. - Les autres conseils municipaux ont trois mois pour délibérer, ce qui nous amène à fin septembre. Mais si la délibération n'est pas prise, la décision du conseil est réputée négative. D'un autre côté, la communauté d'agglomération doit aussi nous accepter.

Nous avons fait l'étude d'impact prévue par la réglementation.

Mme Maryse Carrère, rapporteure. - Monsieur Odo, pourquoi vous considérez-vous comme un maire d'arrondissement ? Quelles sont les compétences qui vous restent ?

M. Xavier Odo. - Il nous reste les compétences classiques : écoles maternelles, petite enfance, état civil... Mais nous n'avons plus aucune compétence en matière d'urbanisme : le plan local d'urbanisme et de l'habitat (PLU-H) et le schéma de cohérence territoriale (Scot) sont établis par la métropole de Lyon. Le dialogue est inexistant : nos interlocuteurs, ce sont les techniciens. On a demandé un établissement public foncier (EPF), on nous a dit non. Lancer la restructuration d'un quartier prioritaire de la politique de la ville (QPV) nous a pris onze ans. Comme les voiries ne sont pas entretenues, ce sont les communes qui vont couper l'herbe, parce que personne ne le fait et que les habitants s'en plaignent. J'ai des friches industrielles que je voudrais redynamiser, mais je ne peux pas le faire parce que la métropole n'a rien décidé...

J'ai deux contentieux administratifs avec la métropole. Je refuse par exemple de payer le déficit de la zone d'aménagement concerté (ZAC) intercommunale, 1,6 million d'euros, qui date de 2005, car le développement économique est de la compétence de la métropole.

Les réunions de la conférence métropolitaine des maires durent à peine une heure : c'est de l'information, non du dialogue. Sur 58 maires, plus de 45 maires ont dénoncé cette situation inacceptable. Mais les habitants de Grigny-sur-Rhône se moquent de savoir qui est compétent ; leur seul interlocuteur, c'est le maire. La métropole nous envoie des techniciens, c'est tout.

Je pense donc que nous sommes devenus des maires d'arrondissement : nous célébrons les mariages, nous accueillons les élèves dans les écoles, mais il nous est impossible de faire des choix stratégiques sur la voirie, l'urbanisme ou le développement économique.

Mme Maryse Carrère, rapporteure. - Madame Surreaux, vous sentez-vous écoutée ? Si non, que faudrait-il faire ?

Mme Isabelle Surreaux. - Mon intercommunalité est issue de la fusion forcée de trois communautés de communes qui ne souhaitaient pas fusionner. Chacun continue de défendre son pré carré. Il n'y a pas d'esprit communautaire, pas de dialogue. J'y suis mal à l'aise. Sur les 59 conseillers communautaires, pour 35 communes, 2 représentent ma commune.

La compétence « ordures ménagères » a été confiée à la communauté de communes, qui l'a déléguée à un syndicat, sauf dans un ancien canton, qui a conservé la compétence. Cela crée des différends, car tout le monde ne paye pas la même redevance.

Mme Maryse Carrère, rapporteure. - Étiez-vous déjà élue dans la précédente intercommunalité, avant la fusion ?

Mme Isabelle Surreaux. - Oui, je suis élue depuis 2014. La première fusion a concerné deux petites communautés de communes et s'est très bien passée, car on était sur le même bassin de vie, alors que la nouvelle intercommunalité couvre trois bassins de vie.

M. Jean-Claude Anglars. - Les élections municipales approchent. Comptez-vous vous représenter ? La question de l'intercommunalité influe-t-elle sur votre choix ? Comment les habitants perçoivent-ils l'intercommunalité ?

M. Paul-Roland Vincent. - Je ne me représenterai pas en 2026 - douze ans, c'est déjà pas mal... Le maire est en première ligne et les habitants n'ont pas une vision très précise du qui fait quoi.

Nous avons le sentiment de gérer le quotidien et que les grandes décisions nous échappent, ce qui est assez désagréable. L'agglomération s'occupe du plan local d'urbanisme intercommunal (PLUi), du Scot, du ZAN. La demande de logements est forte sur le littoral atlantique, mais comme on ne peut pas construire, le prix du foncier augmente, les primo-accédants s'éloignent, la pollution automobile s'accroît, nos écoles se vident...

Les nombreux comités de pilotage (Copil) sont plutôt des comités d'information que de réel pilotage. Il faudrait passer la moitié de son temps à l'agglomération ; mais quand on est le seul représentant de sa commune, c'est impossible. Résultat : les décisions se prennent sans vous.

L'agglomération dispose de cadres administratifs de catégorie A, auxquels les trois employés de Bourgneuf ont du mal à tenir tête. Ils nous envoient très vite dans les cordes, car nous ne sommes pas des « sachants ».

M. Xavier Odo. - Si l'on n'est pas représentés à la métropole de Lyon, on ne pèse rien. J'aimerais bien me représenter, mais si c'est juste pour m'occuper des inondations comme en octobre ou des problèmes d'ordures ménagères le dimanche... Nous n'avons aucun interlocuteur et on doit tout faire, sans en avoir les moyens.

Prenons l'exemple des inondations d'octobre : impossible d'avoir un membre de l'exécutif de la métropole à même de nous dire si nous pouvions demander aux agents de la métropole de quitter les lieux en train d'être inondés ! Comment gérer nos territoires avec une telle fracture entre terrain et intercommunalité ?

M. Werner Kervadec. - Pour ma part, je me représenterai l'an prochain. Le premier lien des habitants des petites communes avec l'intercommunalité, c'est le ramassage des poubelles. Pour beaucoup, leur correspondant sur tous les sujets de vie quotidienne reste le maire.

L'intercommunalité s'est réveillée en début de mandat, quand des maires - dont j'étais - ont cassé le plan climat-air-énergie territorial (PCAET) de la précédente équipe sur le sujet des éoliennes : ce sujet nous a soudés pour bâtir un projet de territoire, avec la participation des habitants, des commerçants, des industriels, etc. Mais il n'en reste pas moins que les habitants seront surpris quand le PLUi sera élaboré au niveau de l'intercommunalité : ça va faire très mal...

M. Yann Scotte. - Hardricourt est une petite commune de 2 500 habitants, située en région parisienne, dans les Yvelines. Mon sentiment, partagé par les administrés, c'est que l'intercommunalité est un levier politique d'accélération de la métropolisation du Grand Paris.

Il est de plus en plus difficile de faire comprendre l'intérêt pour une petite commune rurale d'intégrer la plus grande communauté urbaine de France - 73 communes très différentes les unes des autres. Il est d'autant plus difficile de les y faire adhérer que cette intercommunalité n'a pas d'âme, car elle n'a pas de centralité, pas de commune-phare. On a dessiné un grand patatoïde entre Paris et la Normandie, en fusionnant six intercommunalités pour créer une communauté urbaine, avec Poissy, Mantes-la-Jolie, Les Mureaux, etc. Mais personne ne s'y reconnaît, parce que dans l'ouest parisien, notre seule centralité, c'est Paris. On a beau nous expliquer qu'ensemble on est plus forts, on a surtout le sentiment d'avoir été instrumentalisés pour prolonger le RER, sujet qui nous échappe totalement...

J'ajoute que cela coûte très cher. Le Grand Paris Seine & Oise (GPS&O) représente plus de 800 millions d'euros de budget et un impôt nouveau, alors que les maires des petites communes avaient veillé à limiter les augmentations d'impôts.

Je ne me représenterai pas, car le mandat a beaucoup perdu de son sens. Pour moi, c'était le plus beau mandat, le plus proche aussi, mais aujourd'hui j'en doute, car beaucoup de choses nous échappent.

La conférence des maires est une chambre d'enregistrement. On y prend connaissance de décisions déjà prises. Comment croire qu'une assemblée de 141 conseillers communautaires pourrait valablement débattre ? Ce sont des jeux politiques. Les groupes politiques se partagent les postes.

J'ai toutes les peines du monde à me trouver un successeur et à faire comprendre le sens de notre engagement.

Quelle serait la taille critique pour que les coopérations intercommunales aient du sens ?

M. Jean-Marie Mizzon, président. - Depuis quand êtes-vous maire ?

M. Yann Scotte. - Depuis 2014. J'ai été conseiller départemental et conseiller municipal auparavant. Je peux témoigner d'une vraie dégradation de l'implication publique.

M. David Margueritte. - Nos échanges témoignent bien de la diversité des perceptions, qui vont de l'enthousiasme à la résignation.

Ne pourrait-on pas faciliter la sortie de l'intercommunalité, qui est aujourd'hui un véritable parcours du combattant ? Il y va de la liberté d'engagement des élus. Cette souplesse - avec un passage en commission départementale de coopération intercommunale (CDCI) par exemple - serait également bénéfique là où cela se passe bien, à condition que cela ne devienne pas un moyen de menace ou de chantage.

Dans mon intercommunalité, nous avons réalisé un sondage. Le maire est bien identifié sur ses compétences de proximité - parfois aussi sur les compétences qui relèvent de l'intercommunalité -, mais l'intercommunalité est de mieux en mieux identifiée sur les compétences déchets ménagers, eau, tourisme. Ressentez-vous une amélioration de la connaissance du « qui fait quoi » ?

Comment appréhendez-vous la prochaine campagne municipale ? N'est-il pas difficile de faire campagne sur des projets qui relèvent de l'intercommunalité, qui ne bâtira son projet qu'après l'élection ? C'est une question démocratique.

Les pôles de proximité prévus dans la loi NOTRe du 7 août 2015 ne sont pas suffisamment utilisés. Dans la Manche, onze intercommunalités ont fusionné et les pôles, dotés de services communs à la carte, préparent les conseils communautaires et gèrent des compétences restituées comme la petite enfance, la voirie et les écoles : cela leur donne du grain à moudre pour exercer des compétences en proximité. C'est une réponse à la question de l'articulation complexe entre centralité communautaire et proximité communale.

M. Laurent Fourcade. - Je compte me représenter. Mon petit village de 176 habitants dans les Hautes-Pyrénées est comme une grande famille où l'on connaît tout le monde, où l'on fait beaucoup de social, d'associatif, de bénévolat. J'ai même trop de candidats à inscrire sur les listes.

Nous voulons garder, malgré nos petits revenus, les moyens d'investir et de faire de petits travaux, tout en maîtrisant la fiscalité pour nos administrés.

M. Xavier Odo. - Se pose aussi la question de la sortie des syndicats intercommunaux. Le syndicat intercommunal pour l'informatique dont je fais partie me coûte presque 200 000 euros par an, pour des prestations obsolètes ; or il m'est impossible de m'en retirer, car plus de la moitié des voix s'y opposent.

Si on ne prépare pas notre territoire aux enjeux de demain, à quoi bon être maire ?

Un pôle d'échanges multimodal, pour rapprocher les arrêts de bus, les parkings et la gare, au bénéfice des personnes âgées ou en situation de handicap, irait dans le sens de l'histoire. Mais la métropole peut choisir de financer ou non. Cela fait six ans que la rue à côté de la gare est en chantier, car la métropole n'a pas les moyens de la terminer.

On a parfois le sentiment qu'il y a des grands-Lyonnais et des sous-grands-Lyonnais. Alors que nous nous acquittons tous de la même taxe d'enlèvement des ordures ménagères, les habitants du centre de Lyon bénéficient de six ramassages de leurs ordures ménagères par semaine, quand il n'y a qu'un ramassage hebdomadaire dans ma commune ; on paye pour ceux qui ont déjà beaucoup de services, notamment les transports en commun. Comment trouver un équilibre entre première couronne, deuxième couronne et ville-centre ?

Mme Christiane Tincelin. - Je préférerais ne pas me représenter, ayant le sentiment d'avoir atteint la limite d'âge, mais je suis très inquiète, car les candidatures n'affluent pas ; j'envie mon collègue des Hautes-Pyrénées...

La vision de certains d'entre vous sur les agglomérations est très sombre et me rend perplexe. Je salue mon ancien président d'agglomération présent dans cette salle. Grâce à l'intercommunalité et au pôle de proximité, nous avons travaillé sur le PLUi, nous sommes conseillés sur le développement économique, sur l'eau et l'assainissement, sur les ordures ménagères... Certaines communes du Cotentin demeurent réfractaires, mais nous ne connaissons pas le même déséquilibre qu'à Lyon ; notre plus grosse commune est Cherbourg.

Les habitants sont un peu perdus dans notre organisation, qui est complexe, mais ce millefeuille fonctionne plutôt bien, avec l'agglomération, le département et la région, même si cette dernière est plus distante.

Je suis très inquiète de la transition de mars 2026. Si j'avais dix ans de moins, je me représenterais volontiers.

Mme Martine Berthet. - Comment le transfert de la compétence tourisme a-t-il été organisé ? Le maintien d'offices de tourisme dans des communes touristiques a-t-il posé problème ? Qu'a-t-il été prévu pour les communes sans office ?

Mme Christiane Tincelin. - Ma commune et mon département sont touristiques. Le département a créé la société publique locale (SPL) de développement touristique du Cotentin, qui a permis de dépasser les querelles de clocher, alors qu'auparavant les offices de tourisme municipaux étaient en guerre les uns contre les autres. Aujourd'hui, nous disposons d'une politique globale, menée de manière très professionnelle, avec des outils performants. Il est bon que la compétence tourisme soit exercée au niveau de l'intercommunalité.

M. Werner Kervarec. - Le Loudunais, au sud de la Loire, proche du Saumurois, est également assez touristique. L'Historial du Poitou a été créé il y a deux ans à Monts-sur-Guesnes. Notre office de tourisme, communautaire, fonctionne très bien avec ses voisins du Saumurois et du Chinonais, ainsi qu'avec le département. Restent quelques guerres de clocher, mais c'est inévitable.

M. Vincent Boulnois. - La Savoie est aussi très touristique. Notre territoire de 5 400 habitants se fait parfois un peu envahir... Chambéry Agglo Tourisme nous a permis d'avoir une vision globale. Il y a toujours quelques querelles de clocher, certaines communes voulant conserver leur autonomie touristique. Sur ce point, les agglomérations apportent du bon sens.

Mme Ghislaine Senée. - Les témoignages sont divers : dans certains territoires, les choses fonctionnent bien ; dans d'autres, moins bien. Cela n'est pas toujours une question de taille. Le GPS&O souffre d'un péché originel sur son périmètre et d'une volonté politique de créer une communauté urbaine qui n'était pas partagée par tous. D'où des tensions.

La place des maires, qu'ils soient conseillers communautaires ou pas, pose question, car on observe un éloignement progressif. Comment fonctionne la conférence des maires ? Peut-on l'améliorer ? Le contexte politique et financier à l'approche des municipales est difficile.

J'ai renoncé à mon mandat de maire en 2020, considérant qu'il n'y avait plus grand-chose à faire compte tenu du nombre de compétences transférées au niveau communautaire. Le maire ne fait plus que transmettre des demandes, tout en prenant des coups. Comment lui redonner un rôle de proximité ? Sur mon territoire, on n'a pas réussi à créer des pôles. Nous avons besoin de redonner aux maires la capacité d'agir en proximité.

M. Yann Scotte. - Madame Senée était maire de la commune voisine de la mienne, dans la même communauté urbaine, mastodonte qui n'a pas jugé bon de mettre en oeuvre des relais de proximité. Si vous n'êtes pas dans le premier cercle, difficile d'obtenir des informations. Nous disposons d'un seul poste de conseiller communautaire, que j'ai proposé à l'un de mes adjoints.

On peut assouplir les règles de sortie d'une intercommunalité, car cela reste très compliqué pour une petite commune, compte tenu des statuts de la communauté urbaine ; nous nous sommes penchés sur la question.

Des pôles de proximité, pourquoi pas ? Mais selon quelle logique : une logique de strate populationnelle, une logique géographique ?

Nous concernant, le terme de « péché originel » est le bon. À l'époque, j'ai eu le tort de croire que nous devions faire le grand saut, pour ne pas laisser traîner cette opération. Nous étions en 2016 ; aujourd'hui, le système n'est pas encore mature, mais il a déjà fonctionné dix ans.

Notre regard est-il sombre ? Les lois NOTRe et Maptam n'étaient pas forcément de mauvaises lois, tout dépend ce que l'on en fait, mais il y a eu un effet d'emballement, avec la création ex nihilo de 1 100 postes de fonctionnaires, grâce au levier fiscal. Personne ne s'y retrouve.

Mme Maryse Carrère, rapporteure. - La conférence des maires fonctionne-t-elle bien dans vos intercommunalités ? Est-elle utile ?

M. Xavier Odo. - Si nous n'avons pas de chiffres à la conférence métropolitaine des maires, cela ne sert pas à grand-chose. La nôtre se réunit six fois par an. Lors de l'examen du budget, on nous présente dix diapositives pour 3,3 milliards d'euros de budget, on se moque du monde ! Si, sur le plan pluriannuel d'investissement (PPI), on ne peut savoir combien chaque commune, ni même chaque territoire, obtiendra, c'est du vent.

Nous avons aussi des conférences territoriales des maires, mais elles n'examinent que des sujets anecdotiques. Dernier sujet en date : on a mobilisé les maires pendant une heure et quart pour parler du logiciel mis en place entre les techniciens des villes et ceux de la métropole. Comment voulez-vous intéresser les maires ? De qui se moque-t-on ?

Soit il y a une vraie ambition de porter des projets communs et de la subsidiarité, soit on fait une réunion entre amis... Dans ces conditions, difficile d'intéresser les maires à la dynamique de l'intercommunalité.

M. Paul-Roland Vincent. - C'est un problème de gouvernance. Le législateur n'y peut pas grand-chose. Certaines intercommunalités fonctionnent bien, d'autres ont une logique trop descendante et imposent aux maires des décisions prises ailleurs. Au regard du cumul des mandats, le maire de la ville-centre a-t-il toujours vocation à présider l'intercommunalité ? Ne faudrait-il pas un scrutin spécifique pour l'EPCI ?

Mme Maryse Carrère, rapporteure. - Avez-vous des exemples de conférences des maires qui apportent une véritable plus-value ?

M. Xavier Odo. - À côté de chez moi, le président de Vienne Condrieu Agglomération, qui est aussi maire de la ville-centre, a choisi de confier à tous les maires une vice-présidence et une mission, pour leur donner une capacité d'agir sur les projets. Ainsi, tous les territoires sont reconnus, de la plus petite commune à la plus grosse.

Mme Christian Tincelin. - Je n'y ai assisté que deux ou trois fois. Cela permet de donner de l'information. Mais quand on a 129 personnes autour de la table, difficile d'animer un débat.

Dans notre communauté d'agglomération, notre proximité avec le président, les vice-présidents et les services fait que tout est très fluide. Cela a été bien pensé. Nous avons la chance d'avoir ces pôles de proximité, qui nous ont évité le débat entre grande ville et petits villages, même si certains se plaignent encore que la piscine et le théâtre soient dans la grande ville...

M. Paul-Roland Vincent. - Le job de maire et de conseiller communautaire, c'est plus qu'un temps plein. Cela renvoie au statut de l'élu local, que l'on attend toujours. Et quid de nos indemnités ? Pour être maire, il faut être rentier ou retraité...

M. Jean-Marie Mizzon, président. - Le Sénat a voté la proposition de loi portant création d'un statut de l'élu local ; c'est au tour de l'Assemblée nationale de se prononcer.

M. Werner Kervarec. - J'ai l'impression que les intercommunalités de petites communes ou de petites villes fonctionnent bien et sont bénéfiques aux maires et aux municipalités. Au contraire, dans les grandes villes, l'intercommunalité ne fonctionne pas, parce qu'elle n'a pas été conçue pour que la ville-centre prenne le pouvoir. Dans les intercommunalités rurales, il y a parfois la tentation de la ville-centre de prendre le pouvoir, mais en général, cela se passe bien, car les gens se connaissent.

Intercommunalité et métropole, ce n'est pas la même chose. Vous ne résoudrez rien si vous ne les distinguez pas.

M. Xavier Odo. - La métropole de Lyon, qui exerce à la fois les compétences d'une communauté urbaine et du département, a un statut particulier. D'où une verticalité complexe à gérer. La non-représentation des territoires pose un problème de fond : c'est l'opposition qui représente Grigny-sur-Rhône et qui bloque nos projets. La métropole de Lyon est un objet non identifié.

M. Jean-Marie Mizzon, président. - C'est effectivement très particulier.

À ce stade de nos auditions, aucune règle ne se dégage sur le bon fonctionnement des intercommunalités, qu'elles soient grandes ou petites, riches ou moins riches. C'est plus subtil que ça.

Je vous remercie.

Ce point de l'ordre du jour a fait l'objet d'une captation vidéo disponible en ligne sur le site du Sénat.

La réunion est close à 17 h 35.