Agents sportifs (Deuxième lecture)
Mme la présidente. - L'ordre du jour appelle la discussion en deuxième lecture de la proposition de loi modifiée par l'Assemblée nationale visant à encadrer la profession d'agent sportif.
Discussion générale
Mme Rama Yade, secrétaire d'État chargée des sports. - Je remercie M. Humbert, auteur de la proposition de loi, et l'ensemble des sénateurs ayant contribué à ce texte particulièrement adapté à la situation financière du sport, qui finit par transformer les joueurs en marchandises.
Le sens de mon action est à la fois de rétablir les exigences éthiques et de faire face au défi financier. Tel est aussi l'ambition de cette proposition de loi nourrie par les réflexions du secteur sportif et par les travaux parlementaires.
Les dispositions en vigueur ne permettent pas d'éviter certaines dérives. Désormais, une personne morale ne pourra plus exercer la profession d'agent sportif, ce qui permettra de mieux identifier les agents.
Les incompatibilités sont renforcées, ce qui empêchera rétro-commissions et sur-commissions, et les incapacités élargies.
J'en viens à l'exercice de la profession. Les débats sont vifs sur les rémunérations. Bien que mandatés par les sportifs, les agents sont habituellement payés par les clubs, ce qui est aujourd'hui interdit. Nous instaurons plus de rigueur : les contrats seront transmis aux fédérations. L'agent sera rémunéré par l'une des parties au contrat. En pratique, les clubs pourront rétribuer les agents à la disposition des sportifs. La rémunération de l'agent, transfert inclus, sera limitée à 10 % du montant des contrats. Le dispositif applicable aux mineurs est renforcé. L'exploitation de l'image est mieux définie.
Pour améliorer le contrôle de la profession, les sanctions pénales sont renforcées : deux ans d'emprisonnement et une amende de 30 000 euros -pouvant aller jusqu'au double des sommes indûment perçues- en cas d'exercice illégal de la profession d'agent sportif. Parallèlement, le contrôle par les fédérations est renforcé.
Les modifications introduites par l'Assemblée nationale répondent aux objectifs de moralisation et de transparence : publication de la liste des agents et des sanctions prises par les fédérations, aggravation des sanctions pénales.
Au niveau européen, j'ai tenu à aborder la question de la régulation du sport professionnel lors du premier conseil des ministres des sports européens le 10 mai dernier ; je veillerai à ce que l'objectif de moralisation soit davantage pris en compte par la Commission et nos partenaires.
Je m'engage à ce que les textes réglementaires soient rapidement publiés. Je sais pouvoir compter sur les fédérations pour qu'elles adaptent ensuite leurs règlements dans les meilleurs délais. (Applaudissements à droite)
M. Pierre Martin, rapporteur de la commission de la culture. - L'Assemblée nationale a peu modifié cette proposition de loi : le Sénat est à l'avant-garde de la moralisation du sport. Nous nous en félicitons. Je souhaite que le texte soit adopté conforme pour ne pas retarder sa mise en oeuvre.
L'accès à la profession est durci. Les personnes morales ne pourront plus obtenir de licence ; le régime des incompatibilités et incapacités est renforcé pour éviter collusions et conflits d'intérêt ; les agents extracommunautaires devront conclure une convention de présentation avec un agent licencié en France pour pouvoir exercer.
L'exercice de la profession sera plus transparent. Les clubs pourront désormais payer les agents sportifs, ce qui était absurdement prohibé jusqu'ici -et non respecté. L'ensemble des contrats sera transmis aux fédérations. Je me félicite que l'Assemblée nationale ait imposé que les contrats passés entre agents et sportifs mineurs soient également transmis. Les sanctions pénales et financières sont enfin renforcées.
L'adoption de cette proposition de loi est indispensable. En novembre 2009, la Commission européenne a estimé qu'elle ne pouvait intervenir que par la voie de recommandations. La France doit avancer.
Un seul point posait problème : l'Assemblée nationale a autorisé les avocats à devenir agents sportifs, ce que nous avions interdit.
Mais l'obligation pour tous les agents, avocats compris, de détenir une licence nous satisfait. (Applaudissements à droite)
M. Jean-Jacques Lozach. - Dans quelques jours, la coupe du monde de football va commencer. Cette compétition est un considérable événement sportif, mais aussi financier. Dans des disciplines comme le football ou le tennis, on est passé au sport spectacle et au sport business. La professionnalisation s'est accélérée tandis que les footballeurs sont devenus des marchandises que les clubs s'échangent. Les sportifs, qui servent de modèles à nos jeunes, doivent être irréprochables. Or des affaires retentissantes ont terni l'image du sport, transferts douteux à l'OM et au PSG ou révélations de corruption. Les salaires sont indécents, notamment dans le football -jusqu'à 310 000 euros par mois en France.
Le décalage est de plus en plus marqué entre le monde professionnel et le monde amateur. Je regrette que le Gouvernement n'aborde le sport que par ses aspects financiers, comme il l'a déjà fait avec le projet de loi relatif à l'ouverture des jeux en ligne.
Cette proposition de loi était certes indispensable ; la loi de 2000 avait montré ses limites. Il fallait clarifier l'exercice de la profession d'agent sportif, ce qui avait d'ailleurs été demandé par les députés socialistes dès 2006. En 2007, une mission d'information avait tracé des pistes intéressantes. Malgré l'urgence, le rythme de travail s'est ralenti puisque cette proposition de loi a été examinée en première lecture il y a deux ans. Je salue quelques avancées mais nous voterons cependant contre ce texte, faute de pouvoir l'amender.
Cette proposition de loi aurait pu mieux encadrer la profession et il aurait fallu réglementer les transferts, ce qui n'est pas prévu. M. Thiriez l'a reconnu lors de son audition. De nombreux transferts s'accompagnent de transactions occultes que nous ne pouvons tolérer.
Nous avons fait diverses propositions, qui n'ont hélas pas été retenues. De plus, ce texte considère l'agent comme un simple maillon d'une transaction financière alors qu'il joue un trôle de conseil auprès des sportifs -ce que Michel Platini a bien souligné.
Enfin, la responsabilité des clubs n'est pas assez soulignée. Ils sont souvent à l'origine d'une sorte de traite moderne, faisant miroiter aux jeunes, d'Amérique du sud notamment, un avenir radieux rien moins qu'assuré.
Nous n'acceptons pas non plus la légalisation du double mandatement, soit la rémunération des agents par les clubs ; la loi doit corriger les dérives, non les légaliser ! On retrouve là la démarche qui a prévalu pour l'ouverture des jeux en ligne. Où est la déontologie ? Les clubs auront encore plus de prise sur les joueurs puisqu'ils rémunéreront les agents.
Nous regrettons aussi que les pouvoirs des ligues professionnelles, émanations des clubs, soient renforcés ; les conflits d'intérêt seront inévitables. Il eût été plus pertinent de renforcer ceux des fédérations. Donner un tel pouvoir aux ligues, c'est porter un nouveau coup à l'unicité du mouvement sportif, c'est les éloigner encore un peu plus du sport amateur.
Les agents extracommunautaires pourront exercer sous certaines conditions en France ; la convention de présentation n'empêchera pas des dérives.
Avec cette proposition de loi, les vertus du sport sont mises de côté. La France aurait pu se poser en modèle : nous sommes encore bien loin du compte. Nous ne pourrons voter ce texte, à moins que nos amendements soient adoptés. (Applaudissements à gauche)
M. Jean-Pierre Plancade. - L'arrivée massive d'argent dans le sport et quelques scandales ont conduit M. Humbert à déposer cette proposition de loi, certes insuffisante mais nécessaire. Nous nous attaquons au métier d'agent sportif qui a souvent défrayé la chronique. Certains exercent leur activité de façon irrégulière et les fédérations se montrent parfois complaisantes.
Cette proposition de loi fait preuve d'un grand pragmatisme ; elle légalise en particulier le double mandatement, pratique aujourd'hui interdite. Est-ce vraiment le rôle d'une loi ? L'avantage sera cependant une plus grande transparence des contrats.
Ce texte renforce les sanctions pénales et protège les droits des mineurs. Une personnalité morale ne pourra plus disposer d'une licence : c'est une amélioration qui permettra d'assainir le métier.
Notre pays ne pouvait pas s'auto-pénaliser par une législation plus restrictive que celle de ses voisins. Ce texte marque une étape et va dans le bon sens. Nous le voterons. (Applaudissements au centre et à droite)
M. Jean-François Voguet. - En 2008, nous nous étonnions de la rapidité de l'inscription de ce texte à l'ordre du jour. Nous n'avions disposé que de quinze jours pour l'examiner ! On nous avait dit qu'il y avait urgence. Deux ans après, nous voilà en deuxième lecture. Quelle célérité !
Le Gouvernement aurait pu mettre à profit ce délai pour élargir le champ du texte. Tel n'est pas le cas, même si nous saluons quelques avancées. On ne prend pas la mesure des problèmes rencontrés, notamment par les mineurs étrangers.
Nous regrettons que diverses propositions pertinentes n'aient pas été retenues, comme le renforcement des compétences de la Direction nationale du contrôle de gestion ou la centralisation bancaire des flux liés aux transferts. Certes, les sanctions financières sont renforcées, mais elles restent limitées au regard des sommes en jeu, dont l'origine est de surcroît incertaine dans de trop nombreux cas.
En outre, ce texte légalise des pratiques illégales. Cette loi de circonstance autorise l'interdit, introduit les agents sportifs dans le recrutement des entraîneurs et donne plus de pouvoir aux ligues.
Ce texte est une reddition en rase campagne devant les clubs et les lobbies du sport business. Au moment où un plan de rigueur se profile, on leur fait des cadeaux indécents. Les ligues sont souvent dirigées par des responsables de clubs, qui deviendront juges et parties. Si nos amendements ne sont pas adoptés, nous voterons contre le texte.
M. Yves Pozzo di Borgo. - A la veille de la Coupe du monde de football, le groupe de l'UC votera cette proposition de loi qui concerne 6 000 agents. Le monde sportif se professionnalise de plus en plus, certains joueurs perçoivent des salaires ahurissants, jusqu'à 100 000 euros par semaine, dit-on. La concurrence mondiale entre clubs et nations provoque un accroissement du montant des transferts.
Quel exemple pour notre jeunesse ! Comment avons-nous pu laisser dériver les salaires, au détriment de l'éthique sportive ? Le rugby est encore épargné. Nous devons nous interroger sur les rôles des fédérations, françaises, européennes et mondiales, qui sont des États dans l'État. Il faut les appeler à la raison ! Essayons de mettre de l'ordre dans ce secteur ! Élu à Paris, j'ai toujours voté contre la subvention au PSG.
Le monde des agents sportifs est plus que trouble car ils sont difficilement contrôlables. Aujourd'hui, nous devons mieux l'encadrer. La proposition de loi y contribue, notamment en interdisant aux personnes morales d'obtenir une licence. Le double mandatement est un moindre mal, qui rendra plus difficile le blanchiment d'argent sale. La convention de présentation n'est pas complètement satisfaisante : nous avons là un contrôle a minima. Les sanctions sont aggravées. Mais il reste beaucoup à faire. Les commissions occultes ne disparaîtront pas, malgré les sanctions pénales, car les amendes ne sont pas dissuasives. Il faut publier les sanctions pour que le public soit informé.
Je salue le travail de la commission qui tente de vaincre l'opacité d'un système et de redonner au sport ses lettres de noblesse. (Applaudissements au centre et à droite)
M. Pierre Bordier. - Quels sont les enjeux ? La loi de 2000 avait tenté de réglementer la profession. Mais différents scandales ont démontré que des améliorations étaient nécessaires. Des milliards d'euros sont brassés aujourd'hui dans le sport ; il nous appartient d'imposer des garde-fous en encadrant et en moralisant la profession d'agent sportif.
En juin 2008, nous voulions que seules les personnes physiques puissent disposer d'une licence d'agent sportif, que les régimes d'incompatibilités et d'incapacités soient renforcés, que les agents sportifs soient rémunérés par les clubs, que les contrats soient soumis aux fédérations, que le renouvellement triennal de la licence soit remplacé par un contrôle annuel. Nous souhaitions aussi que les agents soient astreints à une obligation d'assurance.
Les députés ont supprimé l'incompatibilité entre agent sportif et avocat et l'obligation d'assurance. Nous nous rallions finalement à leur position, comme à l'aggravation des sanctions pénales.
Ce texte dote les agents sportifs d'un statut qui permettra d'éviter les dérives actuelles. Il est inacceptable, enfin, que des mineurs, souvent africains, puissent recrutés par les clubs sans aucune garantie. Ce trafic ne peut perdurer.
Je salue, madame la ministre, votre volonté de voir notre pays montrer l'exemple. Le groupe UMP votera ce texte. (Applaudissements à droite)
La discussion générale est close.
Discussion des articles
Mme la présidente. - Je rappelle au Sénat que la discussion est limitée aux articles non adoptés conformes par les deux assemblées.
Article premier
Mme la présidente. - Amendement n°5, présenté par M. Lozach et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
Après l'alinéa 8
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
Tout agent sportif étant intervenu dans la conclusion d'un contrat relatif à l'exercice rémunéré d'une activité sportive ou ayant pour objet l'exercice rémunéré d'une activité sportive par un salarié d'une association ou d'une société employant des sportifs ne peut intervenir également pour la conclusion d'un contrat relatif à l'exercice rémunéré d'une activité d'entraînement ou qui prévoit la conclusion d'un contrat de travail ayant pour objet l'exercice rémunéré d'une activité d'entraînement par un autre salarié de cette même association ou société.
M. Jean-Jacques Lozach. - La rédaction réductrice du texte n'évite pas les conflits d'intérêts inhérents, par exemple, au cumul de fonctions entre agent d'entraîneurs et celle d'agent de joueurs. Nous voulons prohiber cette éventualité.
M. Pierre Martin, rapporteur. - La profession d'agent d'entraîneurs est enfin reconnue par la proposition de loi. L'amendement risque d'inciter les agents d'entraîneurs à dissimuler cette activité. D'où l'avis défavorable de la commission.
Mme Rama Yade, secrétaire d'État. - La proposition de loi apporte un progrès ; la séparation étanche entre les agents de joueurs et les agents d'entraîneurs est irréaliste.
Avis défavorable, malgré la réalité de conflits d'intérêts. Il ne faut pas que la loi soit trop rigide.
M. Serge Lagauche. - La loi française est loin d'être rigide en matière de sport.
M. Jean-Jacques Lozach. - Nous voulons seulement éviter qu'une même personne soit agent d'entraîneurs et de joueurs exerçant dans le même club.
L'amendement n°5 n'est pas adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°4, présenté par M. Lozach et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
Après l'alinéa 10
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Tout sportif professionnel doit déclarer à sa fédération délégataire le recours aux services d'un ou de plusieurs agents sportifs et leurs coordonnées.
M. Jacques Berthou. - Nous voulons assurer la transparence des relations contractuelles entre agents et joueurs.
M. Pierre Martin, rapporteur. - L'amendement est satisfait dans son principe, mais il ne faut pas contraindre un joueur à conserver le même agent dans la durée.
L'amendement n°4, repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°6, présenté par M. Lozach et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
Alinéa 11
Après les mots :
constituer une
insérer le mot :
seule
M. Jean-Jacques Lozach. - A juste titre, ce texte interdit à une personne morale d'exercer la profession d'agent sportif, mais un même agent pourrait créer plusieurs sociétés pour exercer son activité. Nous proposons d'interdire pareil contournement. Le football est déjà touché ; le rugby est menacé.
M. Pierre Martin, rapporteur. - Cet amendement est attentatoire à la liberté du commerce et ignore les réalités du terrain : rien ne s'oppose à ce qu'un même agent exerce sa profession dans plusieurs disciplines. De surcroît, la multiplicité des sociétés n'exonère pas l'agent de ses obligations déontologiques.
L'amendement n°6, repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°1, présenté par M. Voguet et les membres du groupe CRC-SPG.
Alinéas 21 à 23
Remplacer ces alinéas par huit alinéas ainsi rédigés :
« Art. L. 222-7-2. - Nul ne peut obtenir ou détenir une licence d'agent sportif s'il a fait l'objet d'une condamnation pénale figurant au bulletin n°2 du casier judiciaire pour crime ou pour l'un des délits prévus :
« 1° Aux chapitres Ier à VI du titre II du livre II du code pénal ;
« 2° Au titre Ier du livre III du même code ;
« 3° Aux chapitres Ier, III et IV du titre II du livre III du même code ;
« 4° Aux chapitres III et IV du titre III du livre IV du même code ;
« 5° Au titre IV du livre IV du même code ;
« 6° Aux articles L. 222-5-1 et L. 232-25 à L. 232-29 du présent code ;
« 7°A l'article 1750 du code général des impôts.
M. Jean-François Voguet. - En rétablissant la rédaction initiale, nous voulons conserver les incapacités introduites à juste titre.
Mme la présidente. - Amendement identique n°7, présenté par M. Lozach et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
M. Pierre Martin, rapporteur. - L'Assemblée nationale a modifié la rédaction que nous avions votée il y a deux ans. Il est difficile de se dédire aujourd'hui mais le texte de l'Assemblée nationale est plus adapté et s'inspire du régime applicable aux avocats.
Mme Rama Yade, secrétaire d'État. - L'amendement gouvernemental est juridiquement satisfaisant car il reprend des incapacités professionnelles applicables depuis longtemps à de nombreuses professions. En outre, il est souple. Bien évidemment, les avocats seront soumis aux mêmes règles.
M. Jean-Jacques Lozach. - En fait de moralisation, le texte est perfectible. Il est justifié d'être draconien en matière d'incompatibilités.
Pour quelques licences dans le football, on a récemment dénombré 400 candidats, aux motivations diverses.
M. Jean-François Voguet. - Le monde sportif devrait être exemplaire pour la jeunesse.
Les amendements identiques nos1 et 7 ne sont pas adoptés.
Mme la présidente. - Amendement n°8, présenté par M. Lozach et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
Alinéa 31
Après le mot :
actionnaires
insérer les mots :
ou préposés
M. Jean-Jacques Lozach. - Les préposés des agents sportifs ayant constitué une société ne doivent pas cumuler leurs fonctions avec celles d'entraîneur ou de sportif. L'article L. 222-8 du code ne ratifiait que partiellement cet amendement.
M. Pierre Martin, rapporteur. - Si ! Cet article impose aux préposés des incompatibilités identiques à celles imposés aux agents.
L'amendement n°8, repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°9, présenté par M. Lozach et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
Alinéa 36
Supprimer cet alinéa.
M. Jean-Jacques Lozach. - L'article L. 222-6 mentionnant l'exercice « temporaire et occasionnel » de l'activité d'agent sportif est d'interprétation difficile. Il est en outre laxiste envers les agents ressortissants de pays européens. Vous invoquerez certainement le droit communautaire, mais l'argument me semble tiré par les cheveux...
M. Pierre Martin, rapporteur. - L'article premier fixe à son alinéa 36 les conditions applicables aux agents originaires d'un État membre de l'Union européenne, conformément à la directive Services. Les incapacités et obligations sont les mêmes pour tous les agents.
Mme Rama Yade, secrétaire d'État. - La référence au droit européen est sérieuse. Elle n'est pas tirée par les cheveux ! L'exercice « temporaire et occasionnel » d'une activité figure dans la directive Services.
L'amendement n°9 n'est pas adopté.
L'amendement n°18 devient sans objet.
Mme la présidente. - Amendement n°10, présenté par M. Lozach et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
I. - Alinéa 38
Rédiger comme suit cet alinéa :
« Art. L. 222-9-1. - Un agent sportif ressortissant d'un État qui n'est pas membre de l'Union européenne ou partie à l'accord sur l'Espace économique européen doit être titulaire d'une licence d'agent sportif au sens de l'article L. 222-6.
II. - Alinéa 39
Supprimer cet alinéa.
M. Jean-Jacques Lozach. - Pour clarifier l'activité des agents sportifs ressortissant d'États non membres de l'Union européenne ou de l'Espace économique européen, nous voulons qu'ils soient soumis à l'obtention préalable d'une licence : rien ne justifie qu'ils présentent moins de garanties.
Pour la mafia russe, il est moins dangereux de blanchir son argent sale via les agents sportifs que grâce à l'immobilier.
M. Pierre Martin, rapporteur. - Le retour au dispositif en vigueur est irréaliste : il a montré son inefficacité. Mieux vaut imposer une convention avec un agent autorisé en France. Avis défavorable.
L'amendement n°10, repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°11, présenté par M. Lozach et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
Après l'alinéa 45
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Le montant de la rémunération de l'agent sportif est versé à ce dernier de manière fractionnée, en autant de tranches d'un montant égal que d'années prévues au contrat, le premier versement intervenant à la date d'effet du contrat, puis les suivants à chacune des échéances anniversaires du contrat.
M. Serge Lagauche. - Les transferts sont emblématiques de l'argent-roi.
M. Pierre Martin, rapporteur. - Le versement fractionné de la rémunération pénaliserait les agents ayant bien fait leur travail. En outre, que faire si le joueur change d'agent ? Ne rendons pas les agents responsables de tous les maux du sport professionnel.
Mme Rama Yade, secrétaire d'État. - Intéressante à première vue, la suggestion se heurte au fait que le contrat est à exécution immédiate. En outre, le paiement échelonné n'existe nulle part.
L'amendement n°11 n'est pas adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°3, présenté par M. Voguet et les membres du groupe CRC-SPG.
Alinéa 47
Supprimer cet alinéa.
M. Jean-François Voguet. - Cet alinéa autorise le double mandat, ce qui entérine une pratique source de corruption. Nous refusons que le joueur soit réduit à l'état de marchandise.
Mme la présidente. - Amendement identique n°12, présenté par M. Lozach et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
M. Jean-Jacques Lozach. - L'agent doit impérativement être rémunéré par le sportif pour éviter tout conflit d'intérêts et réduire les rétro-commissions. Jusqu'ici, on fermait les yeux ; aujourd'hui on capitule.
J'ajoute que l'UEFA est hostile au double mandatement, de même que le syndicat des joueurs professionnels du football et la Fifa. Les représentants des agents sont partagés. Le législateur doit donc arbitrer.
Mme la présidente. - Amendement n°13, présenté par M. Lozach et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
Alinéa 47, deuxième phrase
Rédiger ainsi cette phrase :
Cette rémunération est alors qualifiée d'avantage en argent accordé au sportif en sus des salaires, indemnités ou émoluments, et soumise aux prélèvements sociaux et fiscaux correspondants.
M. Jean-Jacques Lozach. - Au moment où l'on veut réduire les niches fiscales et sociales, il serait particulièrement inopportun d'en créer une nouvelle.
M. Pierre Martin, rapporteur. - La proposition de loi introduit un peu de transparence dans la rémunération des agents. Dans les domaines artistiques et immobiliers, la rémunération est habituellement à la charge de l'acheteur ou de l'employeur. Avis défavorable à l'amendement n°12.
Il en va de même pour l'amendement n°13 car la prestation concernée est soumise à la TVA, ce qui exclut les charges sociales, comme pour les agents immobiliers.
M. Serge Lagauche. - Les joueurs ne sont pas des appartements !
Mme Rama Yade, secrétaire d'État. - L'agent est rémunéré pour son activité d'intermédiaire. L'exonération sociale a pour contrepartie la déclaration par le club des sommes versées à l'agent, ce qui permet des recoupements.
Le dispositif n'a rien d'une niche fiscale ou sociale. Avis défavorable aux trois amendements. L'absence actuelle de déclaration gêne le contrôle des transactions.
Les amendements identiques nos3 et 12 ne sont pas adoptés, non plus que l'amendement n°13.
Mme la présidente. - Amendement n°14, présenté par M. Lozach et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
Alinéa 49, première phrase
Supprimer les mots :
et, le cas échéant, les ligues professionnelles qu'elles ont constituées
M. Serge Lagauche. - Il n'est pas opportun d'étendre aux ligues professionnelles le pouvoir de contrôle sur les contrats conclus grâce à l'intermédiaire d'un agent sportif.
Mme la présidente. - Amendement n°2, présenté par M. Voguet et les membres du groupe CRC-SPG.
Alinéa 49
Remplacer les mots :
et, le cas échéant,
par les mots :
, en concertation avec
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. - Nous approuvons l'accroissement des contrôles sur les contrats passés entre les clubs et les agents mais les ligues professionnelles ne doivent pas en être chargées puisqu'elles sont, pour l'essentiel, dirigées par des dirigeants de clubs. Mieux vaut confier cette mission aux fédérations sportives, en leur attribuant les moyens de le faire.
M. Pierre Martin, rapporteur. - Les ligues contrôlent déjà la gestion des clubs, avec une efficacité que nul ne contexte. J'ajoute que seules les fédérations exercent des pouvoirs disciplinaires.
Mme Rama Yade, secrétaire d'État. - En effet. Avis défavorable.
L'amendement n°14 n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°2.
Mme la présidente. - Amendement n°15, présenté par M. Lozach et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
Après l'alinéa 58
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Les sanctions édictées par les fédérations délégataires compétentes prendront la forme de sanctions financières et sportives, telles que le retrait de points dans les classements nationaux pour les clubs ou la suspension pour les sportifs.
M. Jean-Jacques Lozach. - Nous voulons renforcer le pouvoir de sanction des fédérations. Aujourd'hui, l'agent sportif est trop souvent le maillon faible de la chaîne des sanctions, alors qu'elles doivent parfois s'appliquer aussi aux joueurs et aux clubs.
Cette responsabilité est conforme au règlement de la Fifa. En ce domaine, le droit international est plus exigeant que le nôtre. Vérification faite, l'amendement n'est pas satisfait par l'article R. 222-16 du code du sport.
M. Pierre Martin, rapporteur. - L'amendement est incontestablement réglementaire par nature.
Mme Rama Yade, secrétaire d'État. - Même avis.
M. Jean-Jacques Lozach. - Il faut au moins pouvoir sanctionner les dirigeants de clubs. Maryse Ewanjé-Epée a décrit dans son livre Les négriers du foot le sort de ces jeunes footballeurs africains, soumis à une traite des mineurs inadmissible. Des milliers de familles sont confrontées à ces trafics intolérables. Pour que cela cesse, il faut notamment responsabiliser les dirigeants des clubs.
L'amendement n°15 n'est pas adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°16, présenté par M. Lozach et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
Après l'alinéa 58
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Art. L. 222-10-3. - A la fin de chaque saison sportive, les fédérations délégataires compétentes transmettent au ministre chargé des sports un rapport retraçant leur activité de contrôle et de sanction vis à vis des agents, des licenciés et des associations et sociétés affiliées en application de l'article L. 222-10-2. Ce rapport est rendu public.
M. Jean-Jacques Lozach. - Il faut avoir plus de visibilité sur le contrôle effectif de la profession d'agent sportif. Les fédérations ne voient passer que 35 % des contrats et ne les contrôlent pas tous... Comment pourront-elles exercer des attributions accrues ?
M. Pierre Martin, rapporteur. - Chaque fédération doit publier la liste des agents autorisés, ainsi que les sanctions infligées. L'amendement est donc largement satisfait. Nous aimerions étudier ces documents avec vous, madame le ministre.
Mme Rama Yade, secrétaire d'État. - J'ai conscience de la traite des mineurs, une dérive tragique concernant entre 5 000 et 7 000 jeunes en Europe. La meilleure voie me semble être celle de la création d'un fonds sportif pour la protection de l'enfance associant les pouvoirs publics, l'Unicef et les acteurs privés pour créer, notamment en Afrique, des programmes de formation par le sport sur le modèle de ce qui se fait en République sud-africaine.
Ce sujet doit également être examiné par l'Union européenne puisque les transferts de mineurs, forcément transfrontaliers, sont fréquents quoique interdits par la convention internationale des droits de l'enfant : grâce au traité de Lisbonne, on peut désormais travailler sur le dossier du sport à Bruxelles.
Sur l'amendement, l'utilité d'un rapport n'est pas avérée : la fédération et le ministère des sports sont suffisamment informés, grâce à la convention d'objectifs et de moyens, et nous ne manquerons pas de travailler avec vous, monsieur le rapporteur.
M. Jean-Jacques Lozach. - Nous savons très bien qu'un tel rapport ne serait pas lu par les millions de Français qui ont regardé France-Costa-Rica hier soir à la télévision... Mais il faut que nous disposions d'un maximum d'informations afin de faire connaître à l'opinion publique la réalité du monde sportif, notamment ce qui se passe en coulisses.
L'amendement n°16 n'est pas adopté.
L'article premier est adopté.
Article additionnel
Mme la présidente. - Amendement n°17, présenté par M. Lozach et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
Après l'article premier, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le Gouvernement présente un rapport au Parlement dans l'année suivant la promulgation de la présente loi, étudiant la possibilité de créer une caisse de règlement pécuniaire des agents sportifs pour y déposer les fonds relatifs aux commissions versées dans le cadre des opérations liées à des contrats, des transferts et des achats de joueurs.
M. Jean-Jacques Lozach. - Les transferts de sportifs professionnels se caractérisent par une multitude de transactions financières. Les flux financiers accompagnant ces transferts peuvent être sujets à des fraudes.
Pour assainir la situation, nous proposons de créer une caisse de règlement pécuniaire des agents sportifs, qui pourrait fonctionner à l'image de la Carpa.
M. Pierre Martin, rapporteur. - La création d'une telle caisse est pertinente mais elle ne peut être envisagée qu'au niveau international. Ce qui ne dispense pas notre pays d'y réfléchir, et aussi la fédération de football. Qu'en pense le Gouvernement ?
Mme Rama Yade, secrétaire d'État. - Il n'est pas besoin de la loi pour étudier cette possibilité. La création de cette caisse laissant entendre que cette loi n'est pas efficace me paraît inopportune. En outre, il faudrait un accord international. La Fifa a déjà pris des mesures en ce qui la concerne.
L'amendement n°17 n'est pas adopté.
L'article premier bis est adopté.
Vote sur l'ensemble
M. Jean-Pierre Plancade. - Ce texte est insuffisant -nous en sommes tous persuadés- mais il a le grand mérite d'exister. Notre groupe le votera donc car c'est une étape de plus vers la transparence et la moralisation.
M. Jean-François Voguet. - Avec ce texte, nous avions l'occasion de moraliser la profession d'agent sportif et, au-delà, de faire cesser les dérives que connaît le sport professionnel. Hélas !, nos amendements n'ont pas été retenus, alors que nous voulions muscler cette proposition de loi. Nous ne proposions rien de révolutionnaire, juste d'encadrer la profession.
Nous n'acceptons pas que la loi avalise le sport business. Tout au long du mandat de Nicolas Sarkozy, le sport professionnel aura pu faire son beurre. Pendant ce temps, le sport amateur périclite, abandonné par l'État. Heureusement, les collectivités et les bénévoles lui viennent en aide mais l'avenir est bien sombre avec la future loi sur les collectivités qui va réduire un peu plus encore leur financement.
M. Jean-Jacques Lozach. - Le calendrier de la discussion s'est précipité, à l'approche de la coupe du monde de football et de l'ouverture du marché des transferts. Nos amendements auraient mérité un meilleur sort. Nous sommes restés au milieu du gué. C'est assez frustrant. Le double mandatement et la soumission aux intérêts financiers des clubs sont une erreur historique. Nous souhaitions avancer sur la voie de la moralisation, au moment où se développe le sport business. Nous voterons donc contre ce texte, plus à cause de ce qui n'y figure pas que pour ce qui y est inscrit.
La proposition de loi est définitivement adoptée.
La séance est suspendue à midi quarante cinq.
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présidence de Mme Catherine Tasca,vice-présidente
La séance reprend à 14 h 50.