Fonctionnaires communaux de Polynésie(Deuxième lecture)
Mme la présidente. - L'ordre du jour appelle la deuxième lecture de la proposition de loi, modifiée par l'Assemblée nationale, visant à actualiser l'ordonnance du 4 janvier 2005 portant statut général des fonctionnaires des communes et des groupements de communes de la Polynésie française ainsi que de leurs établissements publics administratifs.
Mme Marie-Luce Penchard, ministre auprès du ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration, chargée de l'outre-mer. - Le texte issu de l'Assemblée nationale est de qualité, sur la forme comme sur le fond. Il apporte une solution juridique aux agents recrutés en CDD depuis 2005 et dote la Polynésie d'un véritable statut de la fonction publique communale : il répond à un objectif social et juridique. Le Gouvernement vous propose de l'adopter conforme.
Le code général des collectivités territoriales (CGCT) a été, dans un premier temps, étendu aux communes de Polynésie ; dans un deuxième temps, l'ordonnance du 4 janvier 2005 est intervenue. Le processus d'élaboration des textes réglementaires a toutefois pris plus de temps que prévu... Le décret en conseil d'État, en particulier, fera l'objet d'une réunion interministérielle le 7 juin prochain ; sa publication est donc imminente.
Ce texte harmonise le statut des fonctionnaires communaux de Polynésie avec le droit commun. Les maires et présidents de groupement auront les moyens d'une gestion efficace de leur personnel ; la qualité des services publics de proximité en sera améliorée. La gestion collective des agents par le futur centre de gestion et de formation -qui recevra une aide exceptionnelle de 143 000 euros- sera rationalisée ; les droits des agents seront renforcés. Les agents qui occupent un emploi permanent seront réputés titulaires d'un contrat à durée indéterminée de droit public s'ils remplissent un certain nombre de conditions, dont de durée de service. Les agents recrutés sous CDD depuis la publication de l'ordonnance de 2005 pourront bénéficier d'un CDI s'ils sont en poste à la date de la publication de la loi.
Les trois décrets d'application de l'ordonnance de 2005 sont en cours de finalisation ; l'examen du premier par le Conseil d'État a été long et minutieux mais la validation interministérielle interviendra rapidement après quelques amodiations rédactionnelles ; les deux décrets simples font l'objet d'ultimes ajustements. Ces textes devraient être publiés avant la fin du trimestre.
Cette proposition de loi ne peut que recueillir un avis favorable du Gouvernement. (Applaudissements à droite et au centre)
M. Jean-Pierre Vial, rapporteur de la commission des lois. - L'ordonnance de 2005 reste inappliquée, faute de textes d'application. Quoiqu'elle ait modifié les deux tiers des articles de la proposition de loi, l'Assemblée nationale a largement souscrit à la logique du Sénat, en n'apportant que des modifications rédactionnelles.
La Haute assemblée a rapproché le statut des fonctionnaires de Polynésie française du droit commun ; elle a permis des recrutements directs sur des emplois fonctionnels, adapté les conditions de recours aux contractuels, limité les disparités dans le déroulement des carrières, ajusté les dispositions transitoires.
Enfin, à l'initiative de M. Tuheiava, le Sénat a élargi les cas de prolongation d'activité au-delà de la limite d'âge.
L'Assemblée nationale a adhéré à notre logique. Elle a adopté plusieurs amendements afin d'aligner le régime des agents non titulaires sur les conditions sociales et familiales ouvrant droit à une prolongation d'activité au-delà de la limite d'âge ; étendu au président d'un groupement de communes la faculté de recruter des collaborateurs de cabinet ; décidé que le critère d'ancienneté des agents en poste en vue de leur intégration dans les futurs cadres d'emplois serait appréciée à la date de la promulgation de la proposition de loi.
L'Assemblée nationale a adopté quatre articles additionnels, simplifiant la rédaction et créant une commission d'équivalence des diplômes. Elle a en outre élargi l'assiette des cotisations sociales assises sur la rémunération des fonctionnaires.
Le congé lié aux charges parentales n'existe pas localement ; nous proposons d'harmoniser les dispositions en la matière entre fonctionnaires de la collectivité et agents communaux.
Répondant au voeu des communes polynésiennes, ce texte vise à les doter d'une fonction publique de qualité. Il doit être rapidement appliqué. Il y va du principe de libre administration des collectivités. Le Gouvernement doit donc accélérer la parution des textes réglementaires nécessaires.
La commission des lois propose au Sénat d'adopter conforme cette proposition de loi. (Applaudissements)
Mme Anne-Marie Escoffier. - Il faut saluer l'initiative de M. Tuheiava, à l'origine de cette proposition de loi qui s'inscrit dans la volonté de forger un système stable en Polynésie. L'ordonnance de 2005, ratifiée en 2007, mettait un terme à un droit hétérogène qui s'applique aux 4 800 agents communaux. Ce texte est le fruit d'une concertation approfondie. Il s'agit de régler les problèmes d'accès à l'emploi et de déroulement de carrière de ces agents, en se rapprochant du droit commun tout en respectant les spécificités locales. Le Sénat a donné le ton ; l'Assemblée nationale l'a suivi.
Le recrutement d'agents non titulaires est assoupli, comme le recrutement direct sur des emplois fonctionnels. La mobilité est facilitée entre les trois fonctions publiques. Le déroulement des carrières est amélioré, avec l'expérimentation de l'entretien annuel d'évaluation par le supérieur hiérarchique direct et un régime indemnitaire calqué sur celui des fonctionnaires de la collectivité.
S'agissant des mesures transitoires, retenir la date de promulgation de la loi plutôt que celle des décrets permet d'éviter de nouveaux retards. La création d'une commission d'équivalence est bienvenue. Le rôle du Haut commissaire de la République est enfin réaffirmé. Ce texte dote les communes de Polynésie des moyens humains pour assumer leurs nouvelles compétences.
Le groupe du RDSE dans son ensemble le votera. (Applaudissements au centre)
Mme Josiane Mathon-Poinat. - Nous déplorons qu'il ait fallu quinze ans entre l'affirmation de principes et le texte rendant possible leur application. Comme le rapporteur, nous souhaitons une publication rapide des décrets. Cette proposition de loi permettra la création d'une fonction publique communale dans le respect des principes républicains, sans nier les spécificités de la Polynésie française. C'est une grande avancée, qui va dans le sens de la libre administration des collectivités locales.
Parmi nos réserves, le service minimum ou l'entretien d'évaluation obligatoire...
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. - C'est pourtant bien ! (Sourires)
Mme Josiane Mathon-Poinat. - Ce texte n'est, à nos yeux, qu'une étape. Quid des ressources financières des communes ? Où est la justice fiscale ? Faute d'impôt sur les plus fortunés, les collectivités sont contraintes d'imposer la consommation, ce qui pèse sur les plus faibles... Il ne faut pas s'arrêter en si bon chemin.
Une fois n'est pas coutume, nous voterons ce texte. (Applaudissements)
M. Richard Tuheiava. - J'ai déposé cette proposition de loi le 4 octobre 2010, avec mon collègue de l'Assemblée nationale. Je salue la qualité des travaux dans les deux assemblées. Merci au rapporteur Vial. Nous avons consacré le temps nécessaire à ce sujet important. Les deux lectures ont amélioré le texte, dans un esprit de consensus exemplaire.
C'est une réforme importante pour les communes de Polynésie française et leurs agents. Un bémol toutefois : le 1er janvier 2011 n'aura pas marqué l'entrée en vigueur de l'ordonnance de 2005, dont les décrets d'application ne sont toujours pas publiés. L'instabilité politique n'est pas seule fautive...
L'Assemblée nationale a apporté des améliorations de forme, ainsi que deux nouveautés : le maintien du congé lié aux charges parentales et la création de la commission d'équivalence des diplômes, qui répond à la réalité de la mobilité internationale de nos étudiants. J'apprécie ces deux innovations et soutiens l'ensemble de la proposition de loi qui fera, je l'espère, l'unanimité. (Applaudissements sur tous les bancs)
M. Christian Cointat. - L'ordonnance de 2005 définit les garanties fondamentales dont bénéficient les agents commerciaux de Polynésie, mettant fin à une grande diversité de statuts, y compris au sein d'une même commune. Les communes pourront disposer d'agents mieux qualifiés, qui bénéficieront eux-mêmes de droits accrus.
Si les délais dans la publication des décrets d'application ont eu des causes diverses, il faut désormais agir, d'autant que les règles relatives à la fonction publique d'État et à la fonction publique territoriale ont évolué ; l'actualisation de l'ordonnance était une nécessité.
Le Sénat a rapproché l'accès aux cadres d'emplois du droit commun de la fonction publique, limité les disparités dans le déroulement des carrières, fixé les conditions de mise en place d'un service minimum en cas de grève. Merci au rapporteur Vial pour son travail, ainsi que les membres de la commission des lois et son président, qui connaît parfaitement la Polynésie.
Les apports de l'Assemblée nationale sont bienvenus ; nous adopterons donc ce texte conforme. (M. le président de la commission s'en réjouit)
Nous légiférons aujourd'hui pour les agents communaux de Polynésie française. Le groupe UMP soutient cette initiative importante pour nos compatriotes de Polynésie française et ses communes. (Applaudissements à droite et au centre)
La discussion générale est close.
L'article premier est adopté, ainsi que les articles suivants.
L'ensemble de la proposition de loi est adoptée.
(Plusieurs sénateurs socialistes viennent congratuler M. Tuheiava)