SÉANCE

du mercredi 23 novembre 2011

26e séance de la session ordinaire 2011-2012

présidence de M. Jean-Patrick Courtois,vice-président

Secrétaires : M. Jacques Gillot, Mme Catherine Procaccia.

La séance est ouverte à 9 h 30.

Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu analytique, est adopté sous les réserves d'usage.

Loi de finances pour 2012 (Suite)

M. le président.  - L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, de finances pour 2012. Nous allons examiner l'article 30, relatif à l'évaluation du prélèvement opéré sur les recettes de l'État au titre de la participation de la France au budget de l'Union européenne.

Discussion des articles (Première partie - Suite)

Article 30 (Participation au budget de l'Union européenne)

M. Marc Massion, rapporteur spécial de la commission des finances.  - C'est dans un contexte particulier que nous discutons de ce prélèvement de 18,878 milliards au profit de l'Union européenne. La crise des dettes souveraines a changé la donne : nous ne pouvons nous soustraire à l'objectif de maîtrise des dépenses, qui doit être partagé au niveau européen. Pas sûr qu'il le soit...

La négociation budgétaire pour 2012 est largement engagée. L'avant-projet de budget présenté par la Commission européenne prévoyait une augmentation de 4,2 % des crédits d'engagement, qui s'établissaient à 147,8 milliards ; les crédits de paiement progressaient de 4,9 %, à 132,7 milliards d'euros. Le budget adopté à une courte majorité par le Conseil le 25 juillet se veut plus rigoureux : les crédits d'engagement progressent de 3 % et les crédits de paiement, de 2,02 % en 2012.

La « Lettre des Cinq » demandait une hausse du budget limitée à l'inflation. Si l'Allemagne et la France se sont ralliées au compromis de la présidence polonaise, c'est par pragmatisme : le Royaume-Uni, la Finlande, le Danemark, mais aussi la Suède et l'Autriche l'estiment insuffisamment équilibré. Le Parlement européen avait fait un choix encore plus ambitieux que la Commission ; le texte issu finalement de la phase de conciliation a repris la proposition d'augmenter de 2 % les crédits de paiement, avec une hausse cependant de 3,5 % des crédits d'engagement.

Monsieur le ministre, quelles sont les chances de voir ce compromis adopté les 30 novembre et 1er décembre par le Conseil et le Parlement européen ? Quel sera l'impact du sixième projet de budget rectificatif pour 2011, qui complique encore la donne ? D'autant que la programmation 2014-2020, qui soulève les tensions les plus vives, devra faire lui aussi l'objet d'un compromis, faute duquel on risque une grave crise politique.

La Commission européenne a détaillé le 29 juin le prochain cadre pluriannuel, donnant la priorité à la recherche et l'innovation, à la gestion des flux migratoires, à la PESC, tandis que la PAC reste stable, avec 30 % d'aides conditionnées environnementales ; la politique de cohésion verra ses crédits augmenter de 11 %.

Mais ces propositions ambitieuses sont volontairement sous-évaluées, car présentées en crédits d'engagement et en euros constants... Deuxième artifice, la Commission européenne dissimule les tensions que sa programmation fera peser sur les États membres en maintenant hors budget général le Fonds européen de développement ou le mécanisme de stabilisation financière, et en multipliant les débudgétisations incompréhensibles, par exemple du programme Iter. En euros courants, le total de la dépense serait de 1 156 milliards en crédits de paiement, soit 184 milliards de plus que l'estimation de la Commission.

Cette programmation est insoutenable pour les finances publiques. Qu'en pense le Gouvernement ?

Au nom de la commission des finances, je vous propose de vous abstenir sur cet article 30, pour témoigner de notre désapprobation à l'encontre de ces pratiques. (Applaudissements à gauche)

M. Jean Arthuis, rapporteur spécial de la commission des finances.  - Je partage l'opinion de M. Massion sur les propositions inacceptables de la Commission européenne. S'abstenir permet de marquer notre humeur en tant que parlementaires, je le dis en conscience. 3,5 % : c'est le rythme d'augmentation du prélèvement entre 2011 et 2012, qui contraste avec notre volonté de tenir la dépense publique ; cette hausse de 646 millions d'euros porte notre contribution à 18 878 milliards.

Des ouvertures nouvelles en crédits de paiement sont à attendre : il y aura des écarts entre prévision et exécution. Ce n'est d'ailleurs pas inhabituel. En 2007, le prélèvement inscrit en loi de finances initiale avait été surestimé de 1,5 milliard ; sous-évalué en 2008 de 300 millions et en 2009 de un milliard ; surestimé en 2010 de 556 millions. En 2011, le Gouvernement nous avait annoncé une légère sous-évaluation, mais il y aurait au contraire une sur-exécution de l'ordre de 100 millions. Où en sommes-nous aujourd'hui de l'exécution 2011 ? L'estimation soumise au vote du Parlement doit être plus précise et plus fiable.

La France devrait demeurer en 2012 le deuxième contributeur au budget communautaire, derrière l'Allemagne, à 16,4 %. Elle a, en revanche, remplacé depuis 2006 l'Espagne comme premier bénéficiaire -conséquence du poids de la PAC, qui représente 75 % des dépenses européennes en France. Réjouissons-nous que celles-ci soient maintenues dans la prochaine programmation.

La question des soldes nets est délicate. Le projet communautaire devrait dépasser ces considérations de boutiquiers, cette coupe d'Europe des égoïsmes nationaux ! Notre situation ne cesse de se dégrader : notre solde net a été multiplié par treize en dix ans et dépasse les 5 milliards depuis 2008. C'est le prix à payer pour notre attachement à de la PAC, mais aussi des compromis que nous avons dû passer pour obtenir la TVA à 5,5 % dans la restauration ; quel est le coût caché des concessions européennes ? Celui des contreparties des rabais et corrections dont la France est un des pays, avec l'Italie et le Danemark, à ne pas bénéficier ?

Cette logique de marchand de tapis est peu honorable et contraire aux valeurs communautaires. Ces évaluations de soldes nets ignorent les apports inestimables de la contribution européenne, aurait dit Denis Badré. Mais peut-on en ces temps difficiles en faire l'économie ? Je rejoins M. Massion : l'Europe ne peut s'exonérer des efforts d'assainissement des finances publiques et doit, elle aussi, dépenser mieux. J'insiste sur le principe de subsidiarité. Les dépenses de l'Union sont arrêtées par les autorités communautaires, tandis que l'on demande aux parlements nationaux d'entériner 85 % des ressources ; j'y vois une atteinte au principe du consentement à l'impôt. Les parlements nationaux doivent prendre toute leur place dans la coordination des finances publiques des États membres, la réflexion sur le budget communautaire et la gouvernance économique de la zone euro. Autant de sujets que j'aborderai lors de la mission que m'a confiée le Premier ministre.

Quelques mots de la crise des dettes souveraines. Je veux dire mon incompréhension, mieux, ma révolte face à une Commission et à un Conseil qui ont laissé filer les déficits publics. Le passage à l'euro a fait disparaître la sanction de la dévaluation -honte des gouvernements. Les règles du pacte de stabilité et de croissance ont été transgressées, allégrement piétinées depuis 2004. Et comme si cela ne suffisait pas, certains ont triché et maquillé leurs comptes publics, dissimilé l'ampleur de leur déficit et de leur dette.

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - Absolument !

M. Jean Arthuis, rapporteur spécial.  - On a fait du pacte de stabilité et de croissance, notre règlement de copropriété, un pacte de tricheurs et de menteurs ! On en mesure les résultats aujourd'hui. Désormais, il nous faut d'autres règles, autrement plus strictes.

Ce constat justifie notre moment d'humeur et l'abstention symbolique du Sénat sur cet article (applaudissements sur les bancs UCR), sachant que la France ne pourra, de toute façon, échapper à sa contribution. (Applaudissements au centre et à droite)

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - Sortons du concours d'hypocrisie auquel ce sujet est trop souvent prétexte. L'enchaînement de ces derniers mois est redoutable, nul ne peut connaître le dénouement de la crise des dettes souveraines ; ce que nous savons en revanche, c'est que les taux auxquels un grand nombre d'États européens se financent sur les marchés sont insupportables, et peuvent le devenir davantage encore. Comment faire revenir la confiance, donner à la zone euro la visibilité indispensable à la stabilisation des marchés ? Deux réponses : d'une part, le rêve des euro-émissions ; d'autre part, la monétisation au moins potentielle des dettes publiques.

Les euro-émissions ne sauraient être une solution ; pour qu'une agence européenne de la dette puisse financer à des taux suffisamment bas, il faut que les investisseurs aient confiance en elle. Or, si chaque État garantit seulement une partie de la dette, la solidité d'ensemble tiendra à son maillon le plus faible. Il faudrait que chaque État se porte garant de l'intégralité de la dette. Comme un contrat de colocation où chacun s'engagerait à payer l'intégralité du loyer. Mieux vaut avoir confiance en ses colocataires... C'est dire qu'il faudrait un contrôle politique des États sur leurs partenaires laxistes ou considérés comme tels -ce qui supposerait une révision des traités à l'unanimité, et sans doute des constitutions des États, à commencer par la RFA. Il n'est pas de bonne pédagogie de rester dans l'illusion en la matière. Certains propos du commissaire au marché intérieur me laissent ainsi dubitatif, pour ne pas dire plus...

Restent les solutions autour de la BCE. L'idée de transformer le Fonds européen de stabilité financière (FESF) en banque s'est progressivement imposée dans le débat européen. Plusieurs formules sont possibles ; Mme Bricq en a dressé la liste dans son rapport écrit. Elles supposent toutes un changement d'attitude des Européens et un travail de conviction auprès de notre principal partenaire. En ce domaine, notre pays a été fort actif pour faire bouger les lignes, appeler au réalisme et à l'esprit européen ; j'en rends hommage au Gouvernement et au président de la République.

Reste que les solutions du sommet du 26 octobre sont insuffisantes : un dispositif d'assurance d'un côté, d'obligations adossées à des actifs de l'autre. Titrisation ou rehaussement de crédit -paradoxalement des formules de même nature que les produits à l'origine de la crise financière de l'autre côté de l'Atlantique- n'apporteront pas la visibilité nécessaire aux marchés. En outre, ces formules ne mobiliseraient « que » 1 000 milliards d'euros... La moitié des besoins de financement et de refinancement de l'Espagne et de l'Italie pour les années 2012, 2013 et 2014.

Monsieur le ministre, le Sénat espère que l'on saura desserrer le carcan des doctrines et que les chefs d'État et de gouvernement sauront tracer des perspectives pour refonder la zone euro, la doter réellement du règlement de copropriété évoqué par Jean Arthuis. Les mois qui viennent seront cruciaux. Vous pourrez compter sur un très grand nombre de sénateurs pour vous appuyer. (Applaudissements à droite et au centre)

M. Jean Bizet.  - Très bien !

M. Pierre Bernard-Reymond.  - Les recettes du budget de l'Union européenne sont constituées de ressources propres pour 14 % et de recettes provenant des États pour 86 %. Au regard des règles qui prévalaient dans les années 1970, où devaient prédominer les ressources propres, cette renationalisation rend le dispositif plus complexe et généralise les réflexes nationaux, chacun demandant un rabais de sa participation. Le système a atteint ses limites, mais tout le monde semble se satisfaire de la situation...

La Commission, consciente de la nécessité d'une remise à plat, a proposé la création de deux nouvelles ressources propres : une partie du produit de la TVA et la fameuse taxe sur les transactions financières (TTF), dont les deux tiers du produit pourraient être reversés au budget de l'Union européenne. Le Royaume-Uni et la Suède y sont malheureusement catégoriquement hostiles.

M. Jean Bizet.  - Dommage.

M. Pierre Bernard-Reymond.  - Cette formule pourrait, cependant, se limiter dans un premier temps à l'Eurogroupe. Ces deux nouvelles ressources feraient passer la part des ressources propres dans le budget communautaire à 60 %... Des marges de manoeuvre seraient ainsi données aux États.

La commission propose en outre de forfaitiser les rabais et d'interdire toute réévaluation ; cela va dans le bon sens. Qu'en pense le Gouvernement ? Est-il d'accord pour augmenter les ressources propres de l'Union sans pour autant augmenter le budget de celle-ci ? Faut-il créer d'autres ressources, sur le CO2, l'alcool, les armes ? J'espère que le Gouvernement français jouera une fois encore un rôle moteur dans cette nécessaire évolution. (Applaudissements à droite)

M. Jean Bizet.  - Très bien !

M. Michel Billout.  - Je partage les inquiétudes formulées par les rapporteurs spéciaux. L'exercice qui nous réunit ce matin est contraint et peu démocratique. Sans surprise, la France est encore contributeur net au budget de l'Union européenne.

Peut-on encore parler aujourd'hui de construction européenne, quand les forces centrifuges aiguisent les antagonismes, accroissent les inégalités de développement et de niveau de vie ? L'Union européenne est confrontée à une épreuve sans précédent, d'autant plus sérieuse que les causes en sont endogènes. La division du travail à l'échelle internationale, entre un nord encore doté d'un appareil industriel performant et un sud voué aux services, et singulièrement au tourisme, se dessine aussi en Europe. Le tigre celtique a perdu ses griffes, la Grèce est en crise, l'Italie, la Belgique ou l'Espagne sont au plus mal. La pression des marchés financiers se fait de plus en plus forte sur les États. Malgré la victoire de la droite en Espagne, la bourse de Madrid a encore baissé et le différentiel de taux entre ce pays et l'Allemagne s'accroît.

Les politiques d'austérité sont imposées par les États pour complaire aux marchés, au risque de générer frustration, repli sur soi, et recherche de boucs émissaires d'autant plus facilement désignés qu'ils sont déjà en position de faiblesse ! Le jour où le budget européen sera synonyme de croissance et de réponse aux besoins des peuples, où la BCE, au lieu de se cantonner au rôle de gardienne zélée de l'inflation, financera de grands projets à l'échelle communautaire, ce jour-là, notre groupe votera ce prélèvement. Ce n'est pas le cas aujourd'hui. (Applaudissements sur les bancs CRC)

M. Yvon Collin.  - Ce prélèvement n'est pas neutre : il représente 7,6 % des recettes fiscales françaises. Le montant de notre contribution a été multiplié par cinq en vingt ans, conséquence de l'évolution géographique et structurelle de l'Union européenne, dont la France est le deuxième contributeur. Cette contribution fonde la solidarité entre États -on ne peut raisonner en termes de retour net.

L'Europe a su se retrouver face à la crise. Si les négociations furent difficiles, elles ont abouti à un dispositif de solidarité efficace à deux étages, un mécanisme de stabilisation financière et le FESF. Le projet européen n'a rien perdu de son importance. François Mitterrand, le 6 décembre 1983, à Athènes, déclarait : « Je crois à la nécessité historique de l'Europe ». La construction européenne est perfectible ; les politiques budgétaires européennes doivent converger, se faire plus coopératives.

Ce budget n'évolue guère, mais il est rigoureux et stabilisé, contrairement à son avant-projet, qui était en décalage avec les efforts demandés aux États. On aboutit à une relative maîtrise des dépenses. L'abstention est une question de principe : l'ensemble du groupe RDSE suivra les rapporteurs spéciaux. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

Mme Nicole Bricq, rapporteure générale de la commission des finances.  - Très bien !

M. Jean Bizet.  - L'Europe est à la veille de grands changements. Les chefs d'État et de gouvernement ont su réagir à la crise ; c'est maintenant au tour de l'Union européenne et des parlements nationaux. L'Union européenne a été quasiment absente du règlement des crises des trois dernières années. Le budget communautaire était absent du plan de relance de 2009, du règlement de la crise grecque. Sa programmation pluriannuelle s'oppose en effet aux adaptations conjoncturelles : ce n'est pas un instrument de stabilisation et de relance.

Faut-il augmenter le budget européen de 1 % à 1,3 % grâce à de nouvelles ressources propres ? Ce fut le cas en 1992. Aujourd'hui, une telle augmentation est irréaliste : l'Allemagne et la France devraient contribuer pour 5 milliards supplémentaires chacune...

Le contribuable français sait ce qu'il paye à l'État, à sa commune, voire à son département. Mais qui sait ce qu'il paye au budget communautaire ? Il ne peut y avoir augmentation des dépenses sans savoir qui finance. Chaque citoyen européen paye 290 euros chaque année au budget communautaire ; est-on prêt à lui demander 400, voire 500 euros ? La responsabilité fiscale est à l'ordre du jour. Le budget communautaire est opaque : 85 % de son financement viennent des budgets nationaux. Cela ne peut durer. D'où la double proposition, de TVA et de taxe sur les transactions financières, intéressante mais qui doit être adoptée par les Vingt-sept. L'Europe ne peut continuer à engager des dépenses en les laissant financer par les États. Une solution de repli serait de recourir à l'emprunt, mais c'est impossible. Il est peu vraisemblable, dans les circonstances actuelles, que l'Allemagne soit disposée à s'engager dans cette voie. Une autre, en revanche, serait prometteuse : celle des grands travaux d'intérêt européen, financés par un grand emprunt, ce qui montrerait si les citoyens croient à l'Europe.

Il faut avancer. Les parlements nationaux, qui ont été exclus dans la gestion de la crise, doivent trouver leur place dans la communauté de demain. Le Sénat a été novateur, jusqu'à l'an dernier encore où nous avons adopté une déclaration commune franco-allemande sur la PAC, sous l'impulsion de Gérard Larcher. Je ne doute pas que la nouvelle majorité poursuivra dans cette voie. Il nous faut raisonner en Européens.

Nous voterons cet article 30. (Applaudissements)

M. Aymeri de Montesquiou.  - Disons, avec Hamlet, que cette époque est désaxée. La commission des finances, pour la première fois, décide de s'abstenir sur la participation de la France, deuxième contributeur au budget européen.

Alors que la Commission européenne impose des règles drastiques pour le retour des États membres à l'équilibre, elle use, dans son budget, de multiples artifices : la débudgétisation devient la règle. Des écarts importants demeurent entre prévision et exécution. Nommer un ministre européen des finances et de l'économie ne serait-il pas la solution ? Car l'absence de gouvernance pèse plus que jamais en ces temps de turbulence. Les soldes nets sont au coeur du calcul des États, négation absolue de l'esprit européen. Les comptes d'apothicaire sont contraires aux intérêts de l'Union. Las, les égoïsmes nationaux rendent illusoire la perspective d'une Europe politique. L'époque des tandem Giscard-Schmidt et Mitterrand-Kohl ayant une vision de l'Europe comme puissance politique est révolue.

La France prône une augmentation du budget limité à l'inflation. C'est une nécessité. Le recentrage des politiques communautaires autour du changement climatique, la mise en oeuvre du principe de subsidiarité, le renforcement des ressources propres sont trois principes qui s'appliquent à la négociation de la programmation à venir. Il faut changer de perspective en matière de diplomatie -pourquoi les consulats pour chaque État membre dans l'espace Schengen ?-, de défense également

Quelle est votre position sur les project bonds pour investissement dans les grands projets ? Quid des rabais et ristournes ? Que pensez-vous de la création d'un établissement de financement adossé à la BCE ?

La situation appelle une révolution dans les esprits, pour aller vers un fédéralisme européen. L'Europe ne pourrait-elle être autorisée à lever l'impôt, ce dernier se substituant au prélèvement sur recettes ? Je suis convaincu qu'un impôt direct serait une expression forte de la citoyenneté européenne et une prérogative justifiée du Parlement européen, qui doit devenir « l'âme de l'Europe », comme l'a dit le président hongrois. L'ex-Europe de l'Est aspire à une gouvernance nouvelle : c'est peut-être d'elle que viendra l'enthousiasme qui nous manque aujourd'hui. (Applaudissements à droite)

M. Jean Bizet.  - Très bien !

M. Simon Sutour.  - Il serait souhaitable que le président de la commission des affaires européennes intervienne ès qualité, dans ce débat, au banc des commissions.

Le rôle des parlements nationaux est limité puisque le prélèvement présente un caractère automatique. Je sortirai donc un peu du cadre strict du débat. Nous sommes appelés à voter le budget : le Gouvernement devrait débattre avec nous de la Lettre des Cinq de décembre 2010.

Le budget européen est légitime, mais il est toujours possible de faire mieux et de tendre vers l'équilibre. L'Union n'est pas, loin s'en faut, la cause des déséquilibres nationaux. Elle mène des politiques de cohésion essentielles, dont la dimension est un gage d'efficacité de la dépense, qu'elle réduit au niveau national. Cependant, on peut comprendre le souhait des États de ne pas augmenter sans cesse leur contribution. Mais attendre un retour sur investissement reste une position étroitement comptable.

L'Europe est faite pour organiser la solidarité, pas pour organiser la concurrence. Si l'on ne veut pas augmenter le budget, à quoi touchera-t-on ? A la PAC, à la recherche ?... Sanctionner ceux qui ne respectent pas le pacte de stabilité ? Mais quel pays le respecte ? Renforcer la surveillance de la Commission sur le budget des États membres ? Mais l'Union européenne ne doit pas se limiter à un simple rôle de surveillance et de contrôle. Nous ne voulons pas d'un fédéralisme budgétaire à ce compte. Le fédéralisme, c'est une intégration plus poussée, pour favoriser les projets communs. Pas une Europe intergouvernementale, où seuls quelques-uns décideraient.

Le budget européen vient compléter celui des États membres. C'est un outil de relance et de croissance. D'où mon inquiétude sur la question de la conditionnalité des aides, qui aggrave les difficultés des pays qui en connaissent déjà. Cela n'a pas de sens. Imaginons les conséquences pour notre pays dans le contexte actuel : ce serait scier la branche sur laquelle on est assis.

Le budget de l'Union européenne doit être un levier de relance. Sortons du double discours qui consiste à prôner plus d'Europe sans moyens supplémentaires. Ce qu'il faut, c'est avancer sur la question des ressources propres. L'Union européenne n'est pas la somme de 27 États : il doit en aller de même pour son budget. Je regrette que les positions françaises manquent d'ambition et me félicite que nos idées fassent aujourd'hui leur chemin. Ainsi, de la taxe sur les transactions financières, qui doit, outre assurer la régulation, financer l'économie réelle. Mais les conditions qui y sont mises aujourd'hui ne la rendraient pas opérante. Elle devrait devenir une ressource propre pour financer la relance -mot auquel je tiens. Si les sommes, au contraire, sont réparties entre les budgets nationaux, il ne resterait que 22 milliards pour l'Europe.

Ne sacrifions pas l'Europe que nous voulons sur l'autel du dépenser moins. Sans un vrai budget européen, nous ne pourrons nous en sortir seuls. Le groupe socialiste s'abstiendra sur cet article.

M. André Gattolin.  - L'heure est à l'austérité dans les projets budgétaires. L'augmentation du budget prévisionnel de l'Union européenne compensera à peine les effets de l'inflation.

Mais cet article 30 n'a guère de sens : il regroupe la ressource TVA et la contribution nationale, deux recettes sans aucun rapport logique. Il est difficile de ne pas s'abstenir dans ces conditions. Ce budget, c'est à la fois trop peu et trop. On sait déjà qu'il ne suffira pas à son fonctionnement, qu'il est déconnecté des objectifs. L'an passé les États ont repoussé son augmentation, et le 7 novembre dernier, il a fallu l'abonder de 550 milliards pour sauver le Fonds social européen, dont on sait combien il est essentiel. L'histoire se répète. D'ici à fin 2012, plusieurs centaines de millions manqueront au budget.

Reste que nul ne peut se satisfaire d'une telle dépendance du budget de l'Union européenne à ce que lui apportent les États membres. Il est ubuesque de constater, d'un côté, que la Commission exige plus de rigueur des États tandis que, de l'autre, pour assurer la cohésion, elle demande une augmentation du budget de l'Union européenne.

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - C'est une contradiction totale.

M. André Gattolin.  - On parlait du coût de la « non-Europe », naguère, et l'on devrait parler aujourd'hui du coût de la non-fédéralisation.

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - Qui dit fédéralisme dit referendum.

M. André Gattolin.  - Aujourd'hui, la crise des dettes souveraines doit nous conduire à dénoncer l'absence de gouvernance économique en Europe. Qui s'accompagne d'un déficit démocratique profond. Il faut remettre l'Europe au coeur de la politique économique et la démocratie au coeur de l'Europe. Écologiste et fédéraliste de longue date, j'ai longtemps prôné, sous les sarcasmes, des solutions qui font aujourd'hui leur chemin. Cela fait des décennies, dans la suite d'Arturo Spinelli, que nous demandons une vraie politique fédérale et démocratique. Après 2008, nous préconisions la création d'euro-obligations pour faire face à la dette et relancer l'économie....

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - Emprunter pour rembourser la dette, c'est intéressant.

M. André Gattolin.  - ... ainsi que l'instauration d'une taxe sur les transactions financières. Si la France s'y achemine, elle se heurte à des partenaires plus conservateurs...

Il faut avancer vers une Europe plus démocratique avec des moyens réinventés : c'est un impératif.

Mme Nathalie Goulet.  - Très bien !

M. Jean Leonetti, ministre auprès du ministre d'État, ministre des affaires étrangères et européennes, chargé des affaires européennes.  - La contribution française est évaluée à 18,878 milliards, en augmentation par rapport aux 18,2 milliards de 2011.

Vous avez eu raison de souligner les conditions particulières dans lesquelles se déroule ce débat et d'ouvrir sur des perspectives plus longues.

La révolte, camusienne, est préférable à l'indignation parce qu'elle conduit à l'action. J'ai noté celle de M. Arthuis. Une Europe moteur, puissance au service de la démocratie, exige des dépenses d'avenir -je pense à Galileo, à l'économie verte... Malgré les difficultés que nous rencontrons, nous devrons nous donner, sur des bases raisonnables dans un contexte de crise mondiale, les moyens de ces politiques.

Je me réjouis du compromis trouvé dans la nuit de vendredi entre le conseil et la Commission. Nous sommes parvenus à ramener ce budget à une ambition raisonnable. L'Europe ne pouvait s'exonérer des contraintes qu'elle impose aux États. Le Gouvernement est pleinement conscient qu'il doit défendre la bonne gestion, en Europe comme en France. Ce ne serait pas populariser l'Europe que de demander à nos concitoyens des efforts en faisant preuve de laxisme sur le budget de l'Union européenne. L'effort de maîtrise des dépenses est renforcé par rapport à 2011. Mais le budget 2012 reste un réel budget d'action. Les crédits en faveur de la cohésion -sur lesquels j'entends trop de contre-vérités quant à la position de la France- sont préservés.

Plus d'Europe, ce n'est pas une Europe plus chère mais des objectifs mieux définis. Discipline budgétaire, solidarité, politique de croissance : tels doivent être ses trois mots d'ordre.

Le Sénat s'est emparé de la question des ressources propres. Je partage votre constat : la logique du juste retour, hérité du « I want my money back » de Mme Thatcher, est dépassée et handicapante.

La position française est claire : nous sommes pour une politique plus lisible et plus juste, donc opposés à la pérennisation des rabais. Pour ce qui est de la taxe sur les transactions financières, nous ne pouvons imposer seuls notre position, ni à l'Europe, ni au monde. Ce n'est pas notre conception de la démocratie et de l'autonomie des États.

En tout état de cause, toute ressource propre doit venir en déduction des contributions nationales. Si les États membres se doivent à la discipline budgétaire, l'Europe doit porter la croissance.

Les project bonds ? Nous y sommes ouverts, sous réserve qu'ils soient encadrés. La rentabilité socio-économique des investissements doit être prouvée.

Nous condamnons avec M. Massion, la politique de débudgétisation. La sincérité doit être à l'ordre du jour de la programmation pluriannuelle. Dans le cadre de l'agenda 2020, nous voulons une politique de compétitivité forte pour l'Europe. Elle doit s'investir dans la réindustrialisation, la recherche en matière d'énergies renouvelables. Il faut donner des perspectives de croissance et d'emploi à l'Europe, sans s'en tenir à des considérations purement comptables.

Je partage l'analyse de M. Bizet : l'Europe est à la croisée des chemins, le couple franco-allemand jouera un rôle moteur et le rôle du président de la République sera, à cet égard, déterminant.

Solidarité, croissance : voilà ce qui doit nous conduire. Ce qui passe, comme l'a rappelé M. Arthuis, par une réflexion sur la zone euro.

Mais la révolte, je l'ai dit, doit mener à l'action. Il faut voter ce prélèvement pour que l'Europe reste une instance d'espoir et de démocratie. (Applaudissements à droite)

A la demande du groupe UMP, l'article 30 est mis aux voix par scrutin public.

M. le président.  - Voici les résultats du scrutin :

Nombre de votants 345
Nombre de suffrages exprimés 156
Majorité absolue des suffrages exprimés 77
Pour l'adoption 135
Contre 21

Le Sénat a adopté.

La séance est suspendue à 11 h 30.

*

* *

présidence de M. Didier Guillaume,vice-président

La séance reprend à 15 heures.

M. le président.  - L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2012, adopté par l'Assemblée nationale. Dans la suite de la discussion de la première partie, nous en sommes parvenus à l'article 31.

Article 31 (État A)

M. le président.  - Amendement n°I-212 rectifié, présenté par le Gouvernement.

À l'état A, modifier les évaluations de recettes comme suit :

I. - BUDGET GÉNÉRAL

1. Recettes fiscales

11. Impôt sur le revenu

Ligne 1101            Impôt sur le revenu

minorer de 315 000 000 €

13. Impôt sur les sociétés

Ligne 1301            Impôt sur les sociétés

minorer de 2 170 000 000 €

14. Autres impôts directs et taxes assimilées

Ligne 1401            Retenues à la source sur certains bénéfices non commerciaux et de l'impôt sur le revenu

majorer de 30 000 000 €

Ligne 1402        Retenues à la source et prélèvements sur les revenus de capitaux mobiliers et le prélèvement sur les bons anonymes

majorer de 160 000 000 €

15. Taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques

Ligne 1501            Taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques

minorer de 100 000 000 €

16. Taxe sur la valeur ajoutée

Ligne 1601            Taxe sur la valeur ajoutée

minorer de 1 091 489 000 €

17. Enregistrement, timbre, autres contributions et taxes indirectes

Ligne 1701            Mutations à titre onéreux de créances, rentes, prix d'offices

majorer de 50 000 000 €

2. Recettes non fiscales

24. Remboursements et intérêts des prêts, avances et autres immobilisations financières

Ligne 2411            Avances remboursables sous conditions consenties à l'aviation civile

minorer de 75 000 000 €

26. Divers

Ligne 2604            Divers produits de la rémunération de la garantie de l'État

majorer de 55 000 000 €

3. Prélèvements sur les recettes de l'État

31. Prélèvements sur les recettes de l'État au profit des collectivités territoriales

Ligne 3122        Dotation de compensation de la réforme de la taxe professionnelle

majorer de 424 312 000 €

Mme Valérie Pécresse, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'État, porte-parole du Gouvernement.  - Ce premier amendement tire les conséquences de la révision des hypothèses de croissance. Elle implique une diminution de 3 877 millions d'euros des recettes fiscales de l'État et de 20 millions d'euros des recettes non fiscales. Le rendement de l'impôt sur les sociétés est révisé à la baisse de 2,7 milliards d'euros.

Cet amendement prend également en compte l'effet en 2012 de la révision de la dotation de compensation de la réforme de la taxe professionnelle que vous avez voté à l'article 15 : à ce titre, les prélèvements sur recettes sont majorés de 424 millions d'euros.

M. le président.  - Amendement n°I-215, présenté par le Gouvernement.

À l'état A, modifier les évaluations de recettes comme suit :

I. - BUDGET GÉNÉRAL

1. Recettes fiscales

11. Impôt sur le revenu

Ligne 1101            Impôt sur le revenu

majorer de 1 584 000 000 €

13. Impôt sur les sociétés

Ligne 1301            Impôt sur les sociétés

majorer de 1 100 000 000 €

14. Autres impôts directs et taxes assimilées

Ligne 1402           Retenues à la source et prélèvements sur les revenus de capitaux mobiliers et le prélèvement sur les bons anonymes

majorer de 600 000 000 €

Ligne 1406            Impôt de solidarité sur la fortune

majorer de 44 000 000 €

Ligne 1499            Recettes diverses

minorer de 96 000 000 €

16. Taxe sur la valeur ajoutée

Ligne 1601            Taxe sur la valeur ajoutée

majorer de 1 800 000 000 €

17. Enregistrement, timbre, autres contributions et taxes indirectes

Ligne 1705            Mutations à titre gratuit entre vifs (donations)

majorer de 18 000 000 €

Ligne 1706            Mutations à titre gratuit par décès

majorer de 24 000 000 €

2. Recettes non fiscales

22. Produits du domaine de l'État

Ligne 2211            Produit de la cession d'éléments du patrimoine immobilier de l'État

majorer de 13 000 000 €

3. Prélèvements sur les recettes de l'État

31. Prélèvements sur les recettes de l'État au profit des collectivités territoriales

Ligne 3107        Prélèvement sur les recettes de l'État au titre de la compensation d'exonérations relatives à la fiscalité locale

minorer de 56 500 000 €

III. - COMPTES D'AFFECTATION SPÉCIALE

Gestion du patrimoine immobilier de l'État

Ligne 01           Produits des cessions immobilières

majorer de 100 000 000 €

Mme Valérie Pécresse, ministre.  - Il s'agit cette fois d'intégrer dans le projet de loi de finances les mesures fiscales du plan du 7 novembre, telles qu'elles ont été déposées par le Gouvernement dans la quatrième loi de finances rectificative. Ces mesures améliorent de 5,2 milliards les recettes nettes de l'État pour 2012. Au total, nous aurons cette année accompli un effort de 115 milliards d'euros d'ici 2016, dont 213 grâce à des économies sur les dépenses, avec, à l'horizon, le retour à l'équilibre.

Le Gouvernement prend ainsi ses responsabilités et vous présente ainsi conjointement les conséquences de la baisse de la croissance et les mesures que nous avons immédiatement prises pour tenir nos objectifs. Notre stratégie est simple : réformer pour maîtriser les dépenses et ne recourir à des prélèvements complémentaires que de façon ciblée. Ainsi pouvons-nous préserver la croissance et répartir équitablement les efforts.

La création d'un taux réduit intermédiaire de 7 % accroît d'1,8 milliard les recettes de la TVA ; la non-indexation de son barème améliore d'1,7 milliard le rendement de l'impôt sur le revenu les recettes d'euros ; l'impôt sur les sociétés est majoré de 5 %, ce qui devrait procurer un milliard d'euros. Enfin, la majoration de cinq points du taux de prélèvement forfaitaire libératoire ainsi que de celui de la retenue à la source sur les dividendes conduit à une hausse de 600 millions d'euros. Les recettes du compte d'affectation spécial immobilier sont majorées de 100 millions d'euros.

Ces nouvelles recettes améliorent de 52 millions d'euros le solde de l'État.

M. le président.  - Amendement n°I-217, présenté par le Gouvernement.

I. - À l'état A, modifier les évaluations de recettes comme suit :

I.  -  BUDGET GÉNÉRAL

1. Recettes fiscales

11. Impôt sur le revenu

Ligne 1101           Impôt sur le revenu

majorer de 3 146 000 000 €

13. Impôt sur les sociétés

Ligne 1301           Impôt sur les sociétés

majorer de 20 299 500 000 €

Ligne 1302 (nouvelle)        Contribution sociale sur les bénéfices des sociétés

majorer de 914 000 000 €

14. Autres impôts directs et taxes assimilées

Ligne 1402           Retenues à la source et prélèvements sur les revenus de capitaux mobiliers et le prélèvement sur les bons anonymes

minorer de 990 000 000 €

Ligne 1406           Impôt de solidarité sur la fortune

majorer de 1 984 000 000 €

15. Taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques

Ligne 1501           Taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques

majorer de 221 285 000 €

16. Taxe sur la valeur ajoutée

Ligne 1601           Taxe sur la valeur ajoutée

majorer de 2 062 000 000 €

17. Enregistrement, timbre, autres contributions et taxes indirectes

Ligne 1701           Mutations à titre onéreux de créances, rentes, prix d'offices

majorer de 900 000 000 €

Ligne 1705           Mutations à titre gratuit entre vifs (donations)

majorer de 850 000 000 €

Ligne 1706           Mutations à titre gratuit par décès

majorer de 700 000 000 €

Ligne 1711           Autres conventions et actes civils

minorer de 148 000 000 €

Ligne 1713           Taxe de publicité foncière

minorer de 174 000 000 €

Ligne 1721           Timbre unique

minorer de 6 600 000 €

Ligne 1761           Taxe et droits de consommation sur les tabacs

majorer de 148 000 000 €

Ligne 1799           Autres taxes

minorer de 105 000 000 €

2. Recettes non fiscales

25. Amendes, sanctions, pénalités et frais de poursuites

Ligne 2501           Produits des amendes de la police de la circulation et du stationnement routiers

minorer de 12 647 000 €

3. Prélèvements sur les recettes de l'État

31. Prélèvements sur les recettes de l'État au profit des collectivités territoriales

Ligne 3101           Prélèvement sur les recettes de l'État au titre de la dotation globale de fonctionnement

majorer de 77 000 000 €

Ligne 3107           Prélèvement sur les recettes de l'État au titre de la compensation d'exonérations relatives à la fiscalité locale

majorer de 9 094 000 €

Ligne 3117           Fonds de solidarité des collectivités territoriales touchées par des catastrophes naturelles

majorer de 20 000 000 €

Ligne 3124           Dotation de garantie des reversements des fonds départementaux de taxe professionnelle

majorer de 37 959 000 €

Ligne 3127           Dotation de protection de l'environnement et d'entretien des voiries municipales

majorer de 23 300 000 €

Ligne 3129 (nouvelle)        Fonds exceptionnel de soutien aux départements en difficulté

majorer de 100 000 000 €

Ligne 3130 (nouvelle)        Dotation exceptionnelle de solidarité territoriale

majorer de 350 000 000 €

II.  -  Article 31

1° Rédiger ainsi le I :

I.  -  Pour 2012, les ressources affectées au budget, évaluées dans l'état A annexé à la présente loi, les plafonds des charges et l'équilibre général qui en résulte sont fixés aux montants suivants :

(En millions d'euros) 

 

 

RESSOURCES

CHARGES

SOLDES

 

Budget général

 

 Recettes fiscales brutes / dépenses brut

384 980

376 318

    A déduire : Remboursements et dégrèvements

85 574

85 574

 Recettes fiscales nettes / dépenses nettes

299 406

290 744

 Recettes non fiscales

15 832

 Recettes totales nettes / dépenses nettes

315 238

290 744

    A déduire : Prélèvements sur recettes au profit des

      collectivités territoriales et de l'Union européenne

75 115

 Montants nets pour le budget général

240 123

290 744

- 50 621

 

 Évaluation des fonds de concours et crédits correspondants  ....................

3 310

3 310

 Montants nets pour le budget général, y compris fonds de concours

243 433

294 053

 

 

Budgets annexes

 

 Contrôle et exploitation aériens

2 045

2 041

4

 Publications officielles et information administrative 

200

187

13

 Totaux pour les budgets annexes

2 245

2 228

17

 

 Évaluation des fonds de concours et crédits correspondants :

 Contrôle et exploitation aériens 

23

23

 Publications officielles et information administrative 

 Totaux pour les budgets annexes, y compris fonds de concours 

2 268

2 251

 

 

Comptes spéciaux

 

 Comptes d'affectation spéciale

63 137

63 615

-  478

 Comptes de concours financiers 

102 840

106 945

- 4 105

 Comptes de commerce (solde)

4

 Comptes d'opérations monétaires (solde) 

68

 Solde pour les comptes spéciaux 

- 4 511

 

 

 Solde général

- 55 115

 

2° Rédiger ainsi le 1° du II :

1° Les ressources et les charges de trésorerie qui concourent à la réalisation de l'équilibre financier sont évaluées comme suit :

(En milliards d'euros)

 

 

Besoin de financement

 

 

 

Amortissement de la dette à long terme

56,1

Amortissement de la dette à moyen terme 

42,8

Amortissement de dettes reprises par l'État 

1,3

Déficit budgétaire

55,1

 

 

     Total 

155,3

 

 

 

 

Ressources de financement

 

 

 

Émissions à moyen et long termes (obligations assimilables du Trésor

 

 et bons du Trésor à taux fixe et intérêt annuel), nettes des rachats

 

 effectués par l'État et par la Caisse de la dette publique

179,0

Annulation de titres de l'État par la Caisse de la dette publique  .

4,0

Variation nette des bons du Trésor à taux fixe et intérêts précomptés 

-27,8

Variation des dépôts des correspondants  .

-4,4

Variation du compte de Trésor

1,0

Autres ressources de trésorerie

3,5

 

 

     Total

155,3

 

 

Mme Valérie Pécresse, ministre.  - Ce troisième amendement tire les conséquences des amendements que vous avez votés. Vous aviez avancé un débat projet contre projet.

Mme Nicole Bricq, rapporteure générale.  - Non !

Mme Valérie Pécresse, ministre.  - Un débat avis contre avis.

Mme Nicole Bricq, rapporteure générale.  - Pas plus.

Mme Valérie Pécresse, ministre.  - Quoi qu'il en soit, vous créez 30 taxes en projet de loi de finances, s'ajoutant aux dix-sept du projet de loi de financement de la sécurité sociale, et treize niches fiscales, pour un total de 2,5 milliards. Vous allez provoquer un choc fiscal de 32 milliards et porter le taux de prélèvements obligatoires à 46,3 % du PIB en un an.

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx.  - Ce n'est pas tenable !

Mme Valérie Pécresse, ministre.  - Les Français seraient victimes de ce choc fiscal. Notre économie serait à genoux. Votre projet, c'est la récession programmée. Les entreprises seraient les premières pénalisées or elles représentent la croissance et l'emploi.

La relance par la consommation ? Vous la tuez. Vous supprimez les exonérations pour les heures supplémentaires.

M. Jean-Pierre Caffet.  - L'UMP même veut les supprimer !

Mme Valérie Pécresse, ministre.  - Je suis membre de l'UMP et ministre du budget ; je n'ai jamais rien dit de tel.

M. Jean-Pierre Caffet.  - Avec l'UMP, cela change tous les jours...

Mme Valérie Pécresse, ministre.  - Vous dites que pour lutter contre la crise, il faut travailler moins. C'est absurde ! On ne créera pas plus d'emplois. La prétendue politique alternative imaginée par le Sénat n'existe pas.

Vous créez une nouvelle tranche d'impôt sur le revenu qui pénalisera les revenus d'activité. Vous remettez en cause la réforme de l'ISF qui permettait d'en faire enfin un impôt équitable, une réforme financée et juste.

Les Français les plus aisés sont mis à contribution pour 2,3 milliards supplémentaires.

Ce choc fiscal en recettes va de pair avec une multiplication de nouvelles dépenses. Soyons sérieux : 650 millions de plus pour les collectivités ! Cela ne sera pas suffisant pour soutenir la croissance. Quel message adressé aux Français ! Il y aurait donc des acteurs publics qui, par nature, pourraient être exemptés de l'effort commun ? Le temps de la facilité est révolu pour tout le monde.

Il n'y a pas de politique alternative à celle du Gouvernement.

M. Jean-Vincent Placé.  - Vous le verrez dans six mois, madame la ministre !

Mme Valérie Pécresse, ministre.  - Si votre projet était appliqué, nous tomberions dans une crise aussi grave que celle de nos voisins. Cet amendement tient donc compte de vos votes. (Applaudissements à droite)

Mme Nicole Bricq, rapporteure générale.  - Je ne me situerai pas sur le même registre que Mme la ministre. Je sais la différence entre des propos de tribune et ce que l'on doit dire devant la représentation nationale. (Applaudissements à gauche)

L'amendement n°I-212 rectifié prend acte de la réduction de la croissance. La sincérité s'améliore, même si nous sommes convaincus qu'il faudra y revenir. L'avis est favorable.

L'amendement n°I-215 anticipe les mesures d'un collectif qui ne nous a même pas été soumis. C'est inédit et pas recevable -d'autant que le collectif contient des mesures que nous n'approuvons pas.

Vous ne pouvez pas nous reprocher de ne pas veiller à la résorption des déficits : nous améliorons significativement les recettes. Votre amendement n°I-217 récapitule les votes du Sénat en première partie. Vos services ont donc chiffré nos amendements, parmi lesquels ceux de nos amis CRC, radicaux et Verts.

M. Jean-Paul Emorine.  - Amis verts ?

Mme Nicole Bricq, rapporteure générale.  - Je connais mes amis ! Je me réjouis d'obtenir enfin un chiffrage que nous ne cessions de demander en vain. Bercy confirme que nous améliorons le solde. Cette clarté des chiffres fait apparaître des recettes supérieures de plusieurs milliards à notre évaluation.

M. Philippe Dallier.  - Un miracle !

Mme Nicole Bricq, rapporteure générale.  - Nous avons voté ce que nous voulions mais notre amendement sur les LBO semble avoir un impact beaucoup plus large que nous ne l'estimions.

L'impôt sur les sociétés est mité par des niches et par des modalités de calcul. On en arrive à ce que le produit total des exonérations soit supérieur au produit de cet impôt. C'est assez extraordinaire.

L'amendement prévoyait un taux de 66 % ; j'ai demandé une rectification pour le ramener à 50 % ; pouvez-vous me confirmer que c'est bien sur ce taux que se sont fondés vos services ?

L'intention des auteurs de l'amendement n'était pas de parvenir à un tel résultat. Ce chiffrage met en lumière l'effet très puissant des modalités de calcul. Il faudra vraiment ouvrir le chantier de l'assiette de l'impôt sur les sociétés.

Nous verrons en seconde partie des choses encore plus surprenantes que ce chiffrage. Il est dans la logique d'un Sénat d'opposition de s'opposer au Gouvernement. Cela ne signifie pas que nous allions définir un contre-projet, à supposer que nous en ayons eu les moyens techniques. Nous voulions tout au plus montrer un chemin différent.

Si nous écartons cette surprise, sur les effets de laquelle on pourra revenir sans que cela me choque, nous avons amélioré le solde de 10 milliards d'euros et le rendement de l'impôt sur les sociétés de 3 milliards. Les votes du Sénat auront permis de montrer que la majorité du Sénat ne voulait pas accroître les déficits. Cela clôt la polémique. Avis favorable sur l'amendement n°I-217.

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - Nous nous sommes efforcés d'examiner les amendements du Gouvernement à la lumière du collectif que nous verrons bientôt : nous sommes à la charnière. Certaines présentations techniques sont complexes : je suis dans l'opposition à une majorité qui est dans l'opposition au Gouvernement. Il faut s'habituer aux doubles négations... (Sourires)

Sur l'évaluation de l'amendement portant sur la déductibilité des intérêts d'emprunt, le débat est intéressant : il est toujours difficile de chiffrer l'impact d'un amendement. Seule une cellule de la direction de la législation fiscale est en mesure de le faire, ce qui est regrettable.

Mme Nicole Bricq, rapporteure générale.  - Depuis le temps que je le dis.

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - Je le disais déjà avant 2002. Les parlementaires devraient disposer d'un outil de simulation.

L'impôt sur les sociétés ne prête pas trop aux slogans politiques. Il y a tant de particularités que toute simplification est illusoire. Alors que l'impôt sur les sociétés rapporte 40 milliards, il n'est pas possible de l'augmenter en une fois de 17 milliards. La convergence franco-allemande sera peut-être l'occasion d'y voir plus clair.

La commission des finances appelle à voter l'amendement n°I-217 sans qu'il y ait lieu de porter un jugement de valeur.

Mme Valérie Pécresse, ministre.  - En ce qui concerne l'amendement portant sur le collectif, nous avons estimé qu'il fallait réintégrer le produit des nouvelles recettes dans l'article d'équilibre. Cela dit, je comprends vos réserves sur la gestion du chiffrage des mesures votées par le Sénat. Assumez vos choix ! Il fallait rédiger votre amendement autrement, si vous ne vouliez viser que les LBO.

Vous vouliez refiscaliser les intérêts d'emprunt. Il se trouve, telle est la triste réalité, que beaucoup de nos entreprises sont endettées ; c'est pourquoi nous sommes parvenus au chiffrage que nous avons fourni. Les Allemands ont un dispositif plus contraignant que le nôtre mais ils veulent en sortir. Nos simulations portent bien sur le taux que vous aviez retenu. L'impôt sur les sociétés augmenterait donc, tout compris, de plus de 50 % en deux jours.

Mme Nicole Bricq, rapporteure générale.  - Je ne mets pas en doute les simulations qui portent sur l'amendement n°I-121. En revanche, vous avez aussi fait référence à l'amendement n°I-10 qui concerne les intérêts d'emprunt. Celui-là, nous l'avions estimé à 1,1 milliard.

Mme Valérie Pécresse, ministre.  - Vous avez voté les deux !

Mme Nicole Bricq, rapporteure générale.  - Je ne regrette pas ces amendements. Nous avons constaté que notre dispositif fiscal offrait de puissants moyens d'action.

Mme Valérie Pécresse, ministre.  - Ce n'est pas nouveau.

Mme Nicole Bricq, rapporteure générale.  - Sauf que les parlementaires n'ont pas les moyens de l'évaluer précisément, comme M. Marini vient de le dire. On voit sur cette affaire combien l'assiette de l'impôt sur les sociétés est problématique. Il n'y a pas d'un côté des esprits responsables et de l'autre des irresponsables ; si nous n'avons pas fait exactement ce que nous voulions c'est que nous ne disposons pas des instruments de mesures de Bercy, qui a toutes les cartes en main. Nous manquons, comme l'a rappelé M. Marini, d'un outil adéquat.

M. François Marc.  - Je veux en revenir à l'impôt sur les sociétés des PME et des grandes entreprises. Nous avions présenté un amendement qui reprenait une proposition de loi que nous avions discutée au printemps : certaines entreprises subiront des taux insupportables et d'autres non : l'impôt sur les sociétés est de 8 % pour les entreprises du CAC 40, de 22 % pour les autres.

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - C'est tendancieux !

M. François Marc.  - C'est le Conseil des prélèvements obligatoires qui le dit. Certaines entreprises se disent très mal traitées.

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - Tout le monde se plaint ! A tout propos !

M. François Marc.  - Je constate que mes propos gênent le président Marini. Les PME sont durement frappées. Avec notre amendement n°I-119, nous avons instauré un taux plancher. La moyenne du CAC 40, c'est 8 % ! Le taux plancher permettrait de limiter l'importance des niches fiscales.

Le chiffrage de cet amendement, c'est 1,3 milliard, soit plus de justice fiscale. Ce n'est donc pas illégitime.

Mme Valérie Pécresse, ministre.  - Certes, les entreprises du CAC 40 ne payent que 8 % d'impôt sur les sociétés mais elles sont implantées à l'étranger. Les entreprises ne sont imposées que sur leurs bénéfices réalisés en France.

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - Où elles ont leurs centres de décision.

Mme Valérie Pécresse, ministre.  - Je suis heureuse que les entreprises fassent les bénéfices qu'elles font à l'étranger mais on ne peut pas leur demander, en droit, de payer de l'impôt sur les sociétés sur ces bénéfices. En outre, les grands groupes sont plus endettés que les PME. L'État souhaite aider toutes les entreprises à se développer.

Enfin, l'impôt sur les sociétés n'est pas le seul impôt qui pèse sur les sociétés. N'oubliez pas la fiscalité locale. La taxe professionnelle frappait lourdement les entreprises, et surtout les PME. C'est pourquoi nous l'avons supprimée, ainsi que l'impôt forfaitaire, qui pesait sur les très petites entreprises.

N'est-ce pas François Mitterrand qui qualifiait la taxe professionnelle « d'impôt imbécile » ? Ceux qui l'ont supprimée vous parlent. (Applaudissements à droite)

M. Éric Bocquet.  - Les perspectives de croissance sont ramenées à 1 %. Les recettes vont donc diminuer mais le Gouvernement refuse de tenir compte des recettes supplémentaires que le Sénat a votées. Veut-il masquer la réalité des initiatives de notre majorité ? Les politiques menées depuis 2007 ont montré leurs limites. La réduction de la fiscalité qui pèse sur les plus riches doit cesser. Nous ne voterons pas cet amendement.

M. François Fortassin.  - Une immense majorité de notre groupe votera dans le sens de notre rapporteur général.

Lorsque Mme Pécresse dit qu'il n'y a pas d'alternative à sa politique, encore faudrait-il que celle-ci soit couronnée de succès. Or nous voyons une dette abyssale et un chômage qui ne cesse d'augmenter. En outre, cette politique est soumise à variations. Il y eut naguère la relance, et le déficit budgétaire que l'on a fait passer de 3 à 8 %.

Malgré la tonicité de ses propos, madame la ministre est peu convaincante. (Applaudissements à gauche)

M. Martial Bourquin.  - J'ai été surpris par les propos de Mme la ministre. La prévision de croissance n'est pas un acte de sincérité mais un aveu. La crise actuelle est due à l'absence de croissance. Or le Gouvernement ne songe qu'à couper dans les dépenses sans rien faire pour favoriser la croissance. Le prix Nobel de l'économie, Joseph Stiglitz, parlait de triomphe de la cupidité. On ne parle pas assez du coût des 4,7 millions de personnes inscrites à Pôle emploi. Combien coûtent 8 millions de pauvres ?

Aux états généraux de l'industrie, Carlos Ghosn nous assurait que la suppression de la taxe professionnelle déterminerait Renault à relocaliser ses implantations. On a vu ce qu'il en a été. Quant à faire le compte de tous les cadeaux faits à ces grands groupes, je m'étonne de la poursuite des délocalisations. Nous avons besoin d'une véritable politique industrielle mais il faut que ce soit donnant donnant : du crédit impôt-recherche, des avantages fiscaux ? A condition que vous investissiez sur le sol national, sans boursicotage.

Le président de la République « protège » ? Non, il ne protège pas les chômeurs, les petits salariés, les petits patrons qui travaillent dur et ne délocalisent pas mais sont abandonnés par les banques ! Il y a les slogans et la réalité. Votre bilan est calamiteux, madame la ministre, et votre discours pour meeting de l'UMP n'est pas celui d'un gouvernement décidé à sortir notre pays de la crise. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Jean-Jacques Mirassou.  - Votre ligne politique est claire : les retraites chapeau contre les mutuelles, l'État contre les collectivités territoriales, le CAC 40 contre les PME. Vous n'arriverez pas à me faire pleurnicher sur le sort des grands groupes. Le PDG de Total ne paraît pas victime d'une violence insupportable !

Avec votre suppression de la taxe professionnelle, les collectivités territoriales ont réduit la voilure et leur investissement est passé de 75 % à 63 %. Qui en pâtit ? Les PME du BTP ! (Applaudissements sur les bancs socialistes)

Mme Valérie Pécresse, ministre.  - Je ne peux vous laisser dire que nous aurions choisi le CAC 40 contre les PME. Vous venez de voter un amendement qui va peser sur 120 000 entreprises. Ce n'est pas le CAC 40 ! (Applaudissements à droite)

M. Jean-Pierre Raffarin.  - J'ai écouté avec sympathie les propos de M. Fortassin. Je n'approuve pas sa conclusion : madame la ministre, vous êtes convaincante !

Monsieur Bourquin, vous évoquez les réunions de l'UMP comme si vous les connaissiez. Venez-y ! (Sourires) Vous seriez le bienvenu : notre famille politique est ouverte et sait où est le raisonnable.

Savez-vous que l'Europe et le monde sont au bord de difficultés majeures ?

Mme Nicole Bricq, rapporteure générale.  - Nous sommes dedans !

M. Jean-Pierre Raffarin.  - Depuis 1975, le budget a été en déficit. Pourquoi pose-t-il problème aujourd'hui ? Parce que la croissance mondiale est fragilisée. Elle semblait jusqu'à présent une garantie de la dette. Mais le réacteur américain vient de s'éteindre et le réacteur européen est fragilisé. Le quadriréacteur n'a plus que deux moteurs : les Brics et la Chine, dont la croissance est désormais menacée.

C'est pour cela que la crise de la dette est dangereuse. Il faut défendre la capacité des entreprises françaises à aller chercher de la croissance à l'extérieur ; c'est bien pourquoi il est absurde d'opposer les grandes aux petites.

Le pouvoir démocratique dans un pays endetté ne dépend pas seulement des électeurs, mais aussi des prêteurs : si nous voulons, demain, financer notre modèle social, il nous faut leur confiance. Il faut leur envoyer un message : le meilleur, pour moi, est celui de la règle d'or. Oui, j'ai trouvé convaincante l'argumentation de Mme la ministre. (Applaudissements à droite)

L'amendement n°I-212 rectifié est adopté.

L'amendement n°I-215 n'est pas adopté.

M. Éric Bocquet.  - « Il n'y a pas d'alternative » : c'est le refrain à la mode. A quoi donc sert l'engagement politique, à quoi servent les partis ? A quoi sert la République ? Nous approuvons les amendements adoptés en première partie, il est vrai bien contraires à la potion de rigueur que le Gouvernement veut faire avaler aux Français ; ils montrent que d'autres choix sont possibles. D'autant qu'ils améliorent le solde en dégageant 30 milliards d'euros de recettes supplémentaires... Nombre d'entre elles proviennent d'une contribution plus juste demandée au patrimoine ou aux plus hauts revenus. Nous n'entendons pas, comme vous, continuer à rançonner encore et encore les plus modestes. De l'argent, il y en a ! Et nous voilà, bien que nous ne les approuvions pas, sur la voie des fameux critères de convergence...

L'amendement n°I-217 est adopté.

L'article 31, modifié, est adopté.

Mme Nicole Bricq, rapporteure générale.  - Conformément à l'article 47 bis de notre Règlement, je souhaite une seconde délibération sur l'article 6 du projet de loi de finances.

La seconde délibération, demandée par la commission des finances, est de droit.

Seconde délibération

Article 6

M. le président.  Amendement n°A-1, présenté par Mme Bricq, au nom de la commission.

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

Le code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :

1° L'article L. 1613-1 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« En 2012, ce montant est égal à 41 466 752 000 €. » ;

2° L'article L. 3334-1 est ainsi modifié :

a) Les quatrième et cinquième alinéas sont supprimés ;

b) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« En 2012, le montant de la dotation globale de fonctionnement des départements mise en répartition est augmenté de 64 millions d'euros par rapport à 2011. » ;

3° La dernière phrase du premier alinéa de l'article L. 4332-4 est complétée par les mots : « et, en 2012, le même montant est augmenté de 13 millions d'euros par rapport à 2011 ».

Mme Nicole Bricq, rapporteure générale.  - Nous revenons à la rédaction initiale du projet de loi de finances, telle que présentée en conseil des ministres le 28 septembre. Hier, le Sénat n'a pas supprimé la DGF puisqu'il a voté une dotation, à l'article 15, supérieure de 77 millions à celle votée l'Assemblée nationale -dotation qui figure bien dans l'amendement récapitulatif n°I-217 du Gouvernement. Mais ce vote ne suffit pas à déterminer la répartition de la DGF entre régions et départements ; c'est pourquoi l'article 6 doit être, par cohérence, rétabli.

Mme Valérie Pécresse, ministre.  - Je suis perplexe. Nous désapprouvons le refus par le Sénat de l'effort de 200 millions demandé aux collectivités territoriales, alors que l'État contribue pour 1,5 milliard à l'effort commun. Le fardeau des économies doit être partagé.

Il est vrai que vous avez voté une mesure d'économie radicale : 41 milliards de DGF en moins !

M. Jean-Jacques Mirassou.  - C'est votre interprétation !

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - Distinguons cohérence technique et cohérence politique.

Techniquement, Mme la rapporteure générale a raison : il faut mettre l'article 6 en cohérence avec l'article 15 de totalisation. Mais qu'en est-il de la cohérence politique ? Notre échange de ce matin, en commission, a été très clair. D'un côté, on a voulu transformer substantiellement la première partie de la loi de finances en augmentant massivement les prélèvements -on l'a vu avec l'impôt sur les sociétés ; tout en se refusant à participer à l'effort d'économie auquel nous appelle Mme la ministre. Telle est la ligne qu'a suivie la majorité sénatoriale.

De notre côté, nous avons considéré, partageant l'analyse du Gouvernement d'un effort équilibré en recettes et en dépenses, que celles-ci -État, sécurité sociale et collectivités territoriales- ne pouvaient être sanctuarisées. Raison pour laquelle nous approuvons les 200 millions demandées à ces dernières.

Conclusion : ce que la cohérence technique appellerait à approuver, la cohérence politique nous interdit de le faire, étant entendu que la commission des finances, dans sa majorité, a accepté cet amendement.

Nous verrons à apprécier, à la fin de nos délibérations, ce que sera devenue la loi de finances. Pour l'heure, je voterai contre la première partie.

Mme Nicole Bricq, rapporteure générale.  - Ne reprenons pas le débat, au demeurant utile, d'hier. Chacun a pu faire valoir ses arguments. C'est excellent pour le débat démocratique : on sait que notre vision du territoire n'est pas la même. Mais je ne vous laisserai pas dire que nous refusons l'effort demandé aux collectivités territoriales : si nous avions été les irresponsables que vous dîtes, nous aurions refusé le gel des dotations et fait sauter l'enveloppe.

Ce que nous refusons, c'est l'absence de cohérence dans l'entreprise de réduction des déficits. Le paquet Tepa coûte plus de 9,3 milliards à la France : vous ne voulez pas y toucher.

La convergence ? Voulez-vous parler de celle qui se profile quand, avec l'Allemagne, nous serons à une croissance proche de zéro ? Alors se jouera l'avenir de l'Union européenne...

Je regrette que, manquant de surcroît du courage d'assumer vos choix, vous ayez demandé aux parlementaires de les porter, qui plus est en leur prescrivant le chemin...

Mme Valérie Pécresse, ministre.  - Je suis allée dire en personne devant le Comité des finances locales que le Gouvernement avait besoin de 200 millions ; nous les avons trouvés en liaison avec le rapporteur général de l'Assemblée nationale. C'est cela le dialogue apaisé. Et un dialogue avec l'administration fiscale vous aurait évité de voter un alourdissement de l'impôt sur les sociétés de 17 milliards d'euros... Vous ne pouvez m'accuser de manquer de courage.

Vous n'avez pas remis en cause le gel des dotations ? Mais vous ajoutez 650 millions de dépenses en faveur des collectivités territoriales, soit une hausse de 1,2 % de leurs dotations, alors que le budget de l'État baissera de 0,6 %. (Applaudissements sur les bancs UMP)

M. François Marc.  - Le vote de cet amendement est une exigence pour les représentants des territoires que nous sommes. A l'issue du vote d'hier, la minorité -qui se trouvait majoritaire à ce moment dans l'hémicycle- a décidé de supprimer 41 milliards ! Ce n'est pas à nous qu'il faut le reprocher, madame la ministre ! Est-il illégitime de restituer aux collectivités territoriales ce qui leur est dû ? Le gel des dotations leur coûte un milliard par an. Et je ne parle ni des compétences déléguées aux départements, ni des régions qui ont perdu leur autonomie financière. (Applaudissements à gauche)

M. Martial Bourquin.  - La croissance, monsieur Raffarin, il faut la chercher à l'extérieur mais aussi la susciter chez nous. Moins d'investissements des collectivités, c'est moins de croissance, moins d'emplois. Les collectivités territoriales ont déjà été mises à rude épreuve par la suppression de la taxe professionnelle. Le BTP, qui dit bénéficier peu de celle-ci, s'inquiète de l'étalement des projets dans le temps.

L'amendement est de bon sens. Supprimer des moyens aux collectivités territoriales, c'est se tirer une balle dans le pied.

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx.  - Cette deuxième délibération prouve combien fut erratique ce débat. (Mme Nicole Bricq, rapporteure générale, le conteste) La question, madame la rapporteure générale, est loin d'être purement technique. Les masques sont tombés ! A quoi sert l'article 6, sinon à refuser l'effort partagé. Ce n'est pas sérieux. Le groupe UMP votera contre cet amendement. (Applaudissements sur les bancs UMP)

M. Philippe Dallier.  - Vouloir faire croire ici, monsieur Marc, en plein Congrès des maires -dont un certain nombre sont dans nos tribunes- que la minorité sénatoriale a voulu supprimer 41 milliards aux collectivités territoriales, c'est un peu gros ! Nul ne peut se prévaloir de ses propres turpitudes. Chacun sait ce qu'il s'est passé hier ; ne nous demandez pas de rectifier vos erreurs. Nous avons bien compris votre petite musique, mais il n'y a pas d'un côté les défenseurs des collectivités locales et de l'autre les canards qui veulent leur imposer un effort insupportable. Le Gouvernement nous demande 200 millions d'effort sur une somme de 200 milliards : nous devons le faire. La solution, pour les collectivités territoriales, passe, chacun le sait bien, par la péréquation.

A la demande du groupe socialiste, l'amendement n°A-1 est mis aux voix par scrutin public.

M. le président.  - Voici les résultats du scrutin :

Nombre de votants 345
Nombre de suffrages exprimés 343
Majorité absolue des suffrages exprimés 172
Pour l'adoption 175
Contre 168

Le Sénat a adopté.

(Applaudissements à gauche)

L'article 6 est rétabli.

Vote sur l'ensemble de la première partie

Mme Nicole Bricq, rapporteure générale de la commission des finances.  - Au terme de cette première partie, voilà l'heure du bilan. Cette discussion fut, comme l'a dit le président Marini, inédite. Des débats erratiques, madame Des Esgaulx ? Je récuse ce qualificatif. Les amendements ont été plutôt moins nombreux qu'à l'habitude. Nous avons eu, en deux occasions, des débats vifs et nourris, qui ont permis aux Français de voir qu'il y a bien une différence entre droite et gauche. (« Tant mieux ! » à droite)

Ce fut sur l'article 2 et, hier, sur les collectivités locales. Il n'y a eu ni demandes de priorité abusive, ni interruptions de séance intempestives. Je remercie mes collègues de la majorité sénatoriale de n'avoir pas multiplié les amendements. Notre ligne était d'adopter des amendements de principe pour améliorer le rendement de l'impôt et sa progressivité, lutter contre le mitage des assiettes, soutenir l'innovation, conforter les collectivités territoriales dans leur rôle d'amortisseur de la crise et de facteur de cohésion sociale.

L'examen des dépenses ne commence que demain. Les parlementaires ne sont guère libres de modifier les missions. Nous étions accusés d'être dépensiers. Nous avons montré, dès cette première partie, que c'était tout le contraire. L'engagement pris par le Premier ministre de ramener le déficit à 3 % en 2013, et non plus 2014, est désormais celui de la France.

Je remercie les parlementaires, les ministres, qui ont accepté un débat sans concession sur le fond. Nous sommes là pour débattre ; dès lors que nous restons dans un cadre républicain, je peux accepter qu'il y ait quelques emportements.

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - Les femmes sont plus dures que les hommes lorsqu'elles débattent entre elles ! (Sourires)

Mme Nicole Bricq, rapporteure générale - Elles sont peut-être plus franches...

Merci à tous les sénateurs et particulièrement à ceux de la majorité, qui ont su prendre des initiatives, y compris sur l'amendement controversé sur l'impôt sur les sociétés, qui a eu la grande vertu de montrer que les assemblées manquaient des outils propres à leur faire mesurer la portée de leurs décisions.

La convergence avec l'Allemagne ? Si elle n'est que fiscale... Notre voisin a eu du mal à placer sa dernière émission de dette... La vérité n'est pas forcément outre-Rhin. Elle est avant tout en nous-mêmes. (Applaudissements à gauche)

Mme Valérie Pécresse, ministre.  - Nous n'avons pas la même approche des choses mais je salue le travail formidable de votre rapporteure générale, à laquelle je reconnais honnêteté, franchise et ténacité. J'apprécie. Nos échanges furent parfois vifs ? Je les préfère aux échanges contournés avec des interlocuteurs patelins...

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - « On ne sort de l'ambiguïté qu'à son détriment » : chacun connaît cette sentence....

Merci à vous, à M. Lellouche, à Mme la rapporteure générale, qui a tenu une charge difficile avec efficacité selon ses orientations, avec l'appui de services qui ont montré leur loyauté.

Cette première partie de la loi de finances reste un peu dans le virtuel mais c'est l'occasion de mettre au jour les cohérences et les incohérences, tester les arguments, avancer nos propositions dans un jeu démocratique et respectueux de chacun.

Nous sommes, M. Raffarin l'a rappelé, dans une période de grande incertitude. Pour la première fois, une émission allemande n'a pas été souscrite à son taux habituel, si bien que le spread s'est un peu resserré. Preuve que l'on nous observe à la loupe. Nous avons tout intérêt à montrer que sur certains objectifs, nous sommes soudés et rassemblés pour défendre l'intérêt national.

Merci à la présidence, à nos collègues de la majorité comme de l'opposition, masculins et féminins (sourires), qui ont participé à nos débats. Nous allons passer aux dépenses : ce sera l'heure de vérité. (Applaudissements sur les bancs UMP)

M. Vincent Delahaye.  - Avons-nous bien pris conscience du contexte que connaît la France ? Je salue l'effort de réduction des déficits, mais est-il suffisant ? Je crains que non ; c'est le premier défaut de cette première partie. M. Raffarin l'a dit : il arrive un moment où la dette devient insoutenable.

Deuxième défaut, l'effort est mal réparti. La règle « un euro de recette supplémentaire, un euro de dépense en moins » est loin d'être respectée. Et ce n'est pas avec la pléthore de taxes et d'impôts adoptés par la majorité sénatoriale que l'on résoudra le problème : cela se retournera contre notre économie, la croissance et l'emploi.

La majorité sénatoriale s'apprête à voter contre la majorité des crédits des missions. Elle aura, en somme, voté des recettes supplémentaires et aucune dépense : bel exercice ! L'image du Sénat n'en sortira pas grandie.

Le groupe UCR plaide pour des mesures d'avenir, comme la TVA sociale ; je regrette que l'on ne s'y engage pas dès 2012. Le Gouvernement a également préféré une contribution exceptionnelle sur les hauts revenus à une tranche supplémentaire de l'impôt sur le revenu, comme le préconisait M. Arthuis ; il faudra y revenir.

En l'état, les membres du groupe UCR ne pourront pas adopter cette première partie, qui s'apparente à du bricolage fiscal. (Applaudissements au centre et à droite)

M. Éric Bocquet.  - Tout semble devoir nous condamner à l'austérité à vie. Vous accusez la gauche de voter des mesures irresponsables. Sont-elles donc plus absurdes que la taxe sur les boissons sucrées ? Appelez donc les choses par leur nom : lorsque vous gelez le barème de l'impôt sur le revenu, vous augmenter l'impôt ! Quant à l'impôt sur les sociétés, au motif d'assurer la neutralité des choix de gestion des entreprises, vous privez le budget de l'État de l'équivalent de la moitié du rendement de l'impôt sur le revenu ! Vous allez plus loin encore puisque vous n'hésitez pas à entamer l'oeuvre de solidarité qu'assurent les collectivités territoriales.

Nous nous félicitons des mesures votées : plus de progressivité pour l'impôt sur le revenu, taxation des transactions financières, retour sur l'imposition des indemnités journalières maladie et accidents du travail.

Nous sommes toujours la cinquième puissance du monde et la deuxième d'Europe. Il fallait montrer que nous pouvions trouver des ressources en nous-mêmes, que l'on pouvait faire autrement. Nous voterons pour cette première partie profondément remaniée. (Applaudissements à gauche)

M. Jean-Michel Baylet.  - La période est préoccupante : un mauvais vent souffle sur l'Europe. Nos concitoyens attendent beaucoup de nous. Voilà plus de 30 ans qu'aucun gouvernement n'a présenté un budget en équilibre ; et l'explosion de la dette paralyse l'État. Les déficits sont abyssaux et tous nos voisins sont dans la même situation. Je regrette l'absence d'une politique économique commune dans la zone euro. Face à la mondialisation, nous ne trouverons pas de solution efficace en dehors d'une Europe fédérale.

Les causes du mal, nous les connaissons. Mais nous divergeons sur les solutions. Le Gouvernement s'est aperçu du désastre mais bien tard ; le chemin fut long et semé d'embûches. Il aura fallu attendre la crise actuelle.

Les sacro-saintes agences de notation nous menacent, d'où votre sursaut de rigueur. Enfin ! La grande majorité du RDSE ne pourra toutefois apporter son soutien à cette première partie voulue par le Gouvernement : manque d'ambition et de souffle, incohérence des prélèvements.

La progressivité de l'impôt est en passe de disparaître. Les radicaux appellent de leurs voeux un grand impôt progressif traitant équitablement le capital et le travail. Alors que le Gouvernement, poursuivant sur sa lancée, a allégé l'ISF de 2 milliards et propose une petite majoration temporaire de l'impôt sur le revenu, la majorité sénatoriale a fait le choix de la responsabilité, de l'équité et de la justice en votant divers dispositions fiscales. Je me félicite du travail accompli par la nouvelle majorité sénatoriale. Une autre politique fiscale et économique est possible. La grande majorité du groupe RDSE votera cette première partie. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. François Marc.  - A cet instant, je veux remercier Mme la ministre et Mme la rapporteure générale, le président de la commission et tous les services du Sénat, qui ont eu un surcroît de travail en cet automne d'élections sénatoriales. Merci aussi à ceux qui ont participé à ces débats.

Nos options sont différentes, même si ce n'est pas projet contre projet, madame la ministre. Nos diagnostics diffèrent, sauf sur un point : la situation catastrophique des finances publiques. C'est pourquoi nous avons voulu réduire les niches.

Nous estimons que si la situation est difficile, la solidarité est nécessaire. (Applaudissements sur les bancs socialistes) C'est sur ce point qu'il y a des divergences entre nous. (Exclamations à droite) Nous voulons améliorer la solidarité entre les ménages, entre les entreprises -PME et grandes entreprises du CAC 40. Le moral des petits patrons est en berne. Enfin, pour les collectivités, nous proposons 350 millions de plus pour la péréquation et la suppression des 200 millions voulus par le Gouvernement.

Nous voulons une plus grande égalité de traitement, plus de justice en matière fiscale, plus de solidarité. Nous voulons mobiliser le pays pour l'aider à se redresser.

Depuis 2002 et surtout 2007, la confiance fait défaut, du fait de la politique fiscale qui a été menée. Pendant le quinquennat de Nicolas Sarkozy, la dette a explosé de 500 milliards.

M. Roland du Luart.  - Et la crise ?

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx.  - Et la crise de l'Espagne ?

M. François Marc.  - D'où la rupture de confiance. Nous nous employons à la restaurer avec cette première partie telle que nous l'avons rectifiée. (Applaudissements à gauche)

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx.  - Je salue le débat riche, dense, parfois un peu rude, comme il convient dans une démocratie où les convictions s'affrontent.

Cette discussion budgétaire a une tonalité différente : la configuration inédite du Sénat de gauche croisant le fer avec un gouvernement et une minorité de droite a donné lieu à des situations nouvelles et intéressantes. La fonction de rapporteure générale a conduit Mme Bricq à modérer la position de ses collègues CRC et Verts.

C'est toute la différence entre les positions de responsabilité, comme celle du Gouvernement et celles de conquête du pouvoir incitant à la démagogie. (Exclamations à gauche) Ce débat a révélé les désaccords qui règnent au sein de la majorité sénatoriale. Par exemple, la question préalable du groupe CRC, qui fut retirée en séance. Quel manque de concertation...

Quelle cacophonie entre les sénateurs CRC, Verts et socialistes : on l'a vu avec la taxe sur les vols intérieurs et le budget du CNC, et même entre sénateurs socialistes : je vous rappelle les échanges entre le président du groupe socialiste, M. Assouline et Mme Bricq à propos du CNC.

Au-delà de cette enceinte, les tergiversations de Mme Joly illustrent mes propos. (Applaudissements à droite) Les errements de ce Sénat « de gauche » donnent aux Français un avant-goût de ce qui les attend si vous arrivez au pouvoir en 2012 ! (Exclamations à gauche)

D'une main, vous alourdissez l'impôt sur les entreprises ; de l'autre, vous supprimez les 200 millions d'économies demandées aux collectivités territoriales. En plein Congrès des maires ! Ça, vous savez faire (Exclamations à gauche) au lieu d'appeler à un effort national partagé. Pour réduire les déficits, il faut commencer par réduire les dépenses.

Le groupe UMP salue le courage du Gouvernement qui résiste aux sirènes de la démagogie. Mme Pécresse s'est parfaitement impliquée dans le débat. (Applaudissements à droite) Le groupe UMP ne votera pas cette première partie ainsi modifiée. Comme l'a dit M. Delahaye, la majorité sénatoriale s'apprête dès demain à voter contre les crédits des missions. Nous ne sommes donc pas au bout de nos peines. Ce qui se passe au Sénat, c'est un avant-goût de ce qui pourrait demain se passer dans le pays et qui, j'espère, ne se passera pas ! (Applaudissements à droite)

M. Philippe Adnot.  - Les positions des uns et des autres sont désormais connues. Je n'ai déposé aucun amendement qui aurait augmenté les déficits budgétaires. Un seul amendement a été repris par la commission des finances et voté à l'unanimité, sur la recherche. Vous ne pouvez, madame la ministre, après avoir pris une décision en tant que ministre de l'enseignement supérieur, vous dédire aujourd'hui.

Les collectivités locales ne peuvent se dispenser de faire des efforts. En revanche, le Gouvernement doit les aider en réduisant le coût des contraintes réglementaires. La majorité de mon groupe votera contre cette première partie. Et j'espère que la France se rassemblera dans l'effort. (Applaudissements à droite)

Le scrutin public est de droit.

M. le président.  - Voici les résultats du scrutin :

Nombre de votants 345
Nombre de suffrages exprimés 343
Majorité absolue des suffrages exprimés 172
Pour l'adoption 175
Contre 168

Le Sénat a adopté.

(Applaudissements à gauche)

La séance est suspendue à 17 h 25.

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*          *

présidence de Mme Bariza Khiari,vice-présidente

La séance reprend à 21 heures.

Engagement de procédure accélérée

Mme la présidente.  - En application de l'article 45, alinéa 2, de la Constitution, le Gouvernement a engagé la procédure accélérée pour l'examen du projet de loi organique relatif à la limite d'âge des magistrats de l'ordre judiciaire, et du projet de loi de programmation relatif à l'exécution des peines, déposés ce jour sur le bureau de l'Assemblée nationale.