Financement de la sécurité sociale pour 2013 (Suite)

Mme la présidente.  - L'ordre du jour appelle la suite du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, de financement de la sécurité sociale pour 2013. Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus à l'article 14, précédemment réservé.

Discussion des articles (Suite)

Article 14 (supprimé) (précédemment réservé)

Mme la présidente.  - Amendement n°1, présenté par M. Daudigny, au nom de la commission des affaires sociales.

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

I.  -  Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :

1° Le II de l'article L. 136-2 est complété par un 8° ainsi rédigé :

« 8° Les distributions ou les gains nets afférents à des parts de fonds communs de placement à risques, des actions de sociétés de capital-risque ou des droits représentatifs d'un placement financier dans une entité, constituée dans un État membre de l'Union européenne ou dans un autre État partie à l'accord sur l'Espace économique européen ayant conclu avec la France une convention d'assistance administrative en vue de lutter contre la fraude et l'évasion fiscales et dont l'objet principal est d'investir dans des sociétés dont les titres ne sont pas admis aux négociations sur un marché d'instruments financiers français ou étranger, ou d'une société qui réalise des prestations de services liées à la gestion de cette entité, donnant lieu à des droits différents sur l'actif net ou les produits du fonds, de la société ou de l'entité, et attribués en fonction de la qualité de la personne ; »

2° L'article L. 136-5 est ainsi modifié :

a) Le début de la première phrase du premier alinéa du I est ainsi rédigé :

« Sous réserve des dispositions particulières mentionnées au présent article, la contribution portant sur les revenus mentionnés aux articles L. 136-1, L. 136-2, L. 136-3 et L. 136-4 est recouvrée (le reste sans changement) » ;

b) Au II bis, les mots : « , est établie, recouvrée et contrôlée » sont remplacés par les mots : « et la contribution portant sur les revenus mentionnés au 8° du II de l'article L. 136-2 sont établies, recouvrées et contrôlées » ;

3° Au premier alinéa de l'article L. 137-15, après les mots : « à la charge de l'employeur », sont insérés les mots : « ou de toute autre personne débitrice des sommes en cause » ;

4° Après le douzième alinéa de l'article L. 242-1, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Sont également exclues de l'assiette des cotisations mentionnées au premier alinéa les distributions et les gains nets mentionnés au 8° du II de l'article L. 136-2. » ;

5° La section 10 du chapitre 7 du titre III du livre Ier est abrogée.

II.  -  Les dispositions du I s'appliquent aux sommes versées à compter du 1er janvier 2013.

M. Yves Daudigny, rapporteur général de la commission des affaires sociales.  - Nous voulons rétablir l'article relatif à l'assujettissement au forfait social des plus-values des gestionnaires de fonds de capital risque. Le régime social de ces revenus est indépendant de leur traitement en matière d'impôt sur le revenu.

Les Français ne comprendraient pas que certains revenus échappent au financement de la protection sociale. Les carried interests constituent une prise de risque des gestionnaires salariés des fonds communs de placement sur leur épargne. Cet intéressement à la performance est indissociable de leur contrat de travail puisque les gestionnaires salariés ont, potentiellement, un accès aux plus-values beaucoup plus favorable que celui des investisseurs externes..

Pour les revenus réalisés dans un cadre professionnel mais non soumis à cotisations sociales, le régime est celui du forfait social. On voit mal comment l'intéressement et la participation, ou la protection sociale complémentaire, seraient soumis au forfait social et pas les carried interests.

Le rétablissement de l'article apportera 80 millions d'euros de recettes supplémentaires.

Mme la présidente.  - Amendement identique n°64, présenté par M. Watrin et les membres du groupe CRC.

M. Dominique Watrin.  - Le rapporteur général a repris notre proposition ; nous nous en félicitons. Nous voulons soumettre au forfait social les carried interests, à hauteur de 20 %. Il s'agit, en effet, d'une rémunération déguisée du travail, qui doit être taxée comme telle. Il n'y a pas lieu d'exonérer ces privilégiés de leur contribution !

Le Sénat doit aider le Gouvernement à porter cette mesure jusqu'à son terme : c'est une mesure de justice sociale et 80 millions supplémentaires pour la sécurité sociale. Montrons, sur ce sujet, la détermination de la majorité de gauche.

Mme Nathalie Goulet.  - Laquelle ?

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué auprès du ministre de l'économie et des finances, chargé du budget.  - Sujet délicat... Le Gouvernement avait d'abord demandé aux intéressés de contribuer davantage. Après avoir écouté, consulté, notamment les conseillers économiques de nos ambassades, il s'est résolu à retirer cet article devant les risques de délocalisation de ces activités hors de nos frontières, ce qui entraînerait une perte de recettes. Par cohérence, je ne peux qu'appeler au rejet de ces amendements, même si je comprends les intentions de leurs auteurs.

A la demande du groupe CRC, les amendements identiques nos1 et 64 sont mis aux voix par scrutin public.

Mme la présidente.  - Voici les résultats du scrutin :

Nombre de votants 346
Nombre de suffrages exprimés 346
Majorité absolue des suffrages exprimés 174
Pour l'adoption 175
Contre 171

Le Sénat a adopté et l'article 14 est rétabli.

Articles additionnels

Mme la présidente.  - Amendement n°67, présenté par M. Watrin et les membres du groupe CRC.

Après l'article 14

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le chapitre 6 du titre 3 du livre 1er du code de la sécurité sociale est complété par une section 6 ainsi rédigée :

« Section 6

« De la contribution sociale sur les revenus financiers

« Art. L. 136-9.  -  L'ensemble des revenus financiers des personnes physiques et des personnes morales provenant des titres émis en France sont assujettis à une contribution sociale dont le taux est égal à la somme du taux défini à l'article L. 136-8 applicable à la contribution sociale mentionnée à l'article L. 136-1, additionné aux taux des cotisations, à la charge de l'employeur et du salarié, prévues à l'article L. 241-1 et aux deuxième et quatrième alinéas de l'article L. 241-3, et du taux de la cotisation, à la charge de l'employeur et du salarié sous le plafond du régime complémentaire conventionnel rendu obligatoire par la loi.

« Sont exonérés de cette contribution sociale les livrets d'épargne populaire, les livrets A, livrets bleus, livrets et comptes d'épargne logement. Les plans épargne populaire courants, avant promulgation de la présente loi, en sont également exonérés pendant cinq ans. Les revenus des biens immobiliers autres que ceux utilisés pour l'usage personnel du propriétaire et de sa famille directe sont assujettis à la même cotisation que les revenus financiers.

« La contribution est assise, contrôlée et recouvrée selon les mêmes règles et sous les mêmes sûretés, privilèges et sanctions que le prélèvement mentionné à l'article 125 A du code général des impôts. Le produit de cette contribution est versé à l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale sans déduction d'une retenue pour frais d'assiette et de perception. Les modalités d'application du présent article sont fixées par décret.

« Les ressources des assurances sociales (maladie, maternité, invalidité, décès et vieillesse) sont abondées par le produit de cette contribution. Un décret fixe les taux de répartition de ces ressources entre les différentes assurances sociales de la  sécurité sociale. »

Mme Isabelle Pasquet.  - Cet amendement corrige une injustice flagrante. Les revenus financiers liés aux placements des entreprises, qui ne cessent de croître, doivent être taxés. L'économie virtuelle, qui se nourrit de la spéculation, est en partie responsable de la crise et empêche le développement de l'économie réelle. Il faut investir dans l'outil de travail et dans les salaires, pas dans la financiarisation.

Notre amendement est un premier pas en direction de la solidarité. Nous voulons inciter les dirigeants à réinvestir dans l'entreprise elle-même. Nous sommes à un carrefour, il faut choisir : spéculer ou investir. Nous avons fait le choix de la juste répartition des richesses ; j'espère que nos collègues de gauche nous suivront.

M. Yves Daudigny, rapporteur général de la commission des affaires sociales.  - Nous attendons le rapport du Haut conseil pour le financement de la protection sociale. La commission souhaite connaître l'avis du Gouvernement.

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué.  - Avis défavorable. Une mission a été confiée au Haut conseil, dont les conclusions sont attendues pour la fin de l'année. Il ne serait pas loyal de contraindre, par la loi, sa réflexion. Attendons.

L'amendement n°67 n'est pas adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°66, présenté par M. Watrin et les membres du groupe CRC.

Après l'article 14

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.  -  Le chapitre 5 du titre 4 du livre 2 du code de la sécurité sociale est complété par une section 6 ainsi rédigée :

« Section 6

« Contribution des revenus financiers des sociétés financières et non financières

« Art. L. 245-17.  - Les revenus financiers des prestataires de service visés au livre V du code monétaire et financier entendus comme la somme des dividendes bruts et des intérêts nets reçus, sont assujettis à une contribution sociale dont le taux est fixé à 26,8 %.

« Les revenus financiers des sociétés tenues à l'immatriculation au registre du commerce et des sociétés conformément à l'article L. 123-1 du code de commerce, à l'exclusion des prestataires visés au premier alinéa, entendus comme la somme des dividendes bruts et assimilés et des intérêts bruts perçus, sont assujettis à une contribution sociale dont le taux est fixé à 26,8 %.

« Les contributions prévues au présent article ne sont pas déductibles de l'assiette de l'impôt sur les sociétés.

« Un décret fixe les taux de répartition de ces ressources entre les différentes branches de la sécurité sociale. »

II.  -  L'article L. 213-1 du même code est ainsi modifié :

1° Après le 5° bis, il est inséré un 5° ter ainsi rédigé :

« 5° ter Le recouvrement de la contribution mentionnée à l'article L. 245-17 ; » ;

2° Au 6°, après la référence : « 3° », les mots : « et 5° » sont remplacées par les mots : « , 5° et 5° ter ».

III.  -  Un décret en Conseil d'État fixe les modalités d'application du présent article.

M. Dominique Watrin.  - Nos propositions pour le financement de la protection visent à mettre fin à la financiarisation de l'économie. Les dérives libérales font peser des risques sur la protection sociale, d'où notre proposition de soumettre à cotisation les revenus financiers des entreprises. Prenons l'argent là où il est ! Les sommes en jeu sont colossales : 318 milliards d'euros de revenus financiers, 219 milliards au titre des produits financiers des sociétés non financières, 99,5 milliards pour les sociétés financières. Nous proposons de dégager 41 milliards d'euros pour la maladie, 26 milliards pour la retraite et 17 milliards pour la famille.

Cet amendement radical ouvre une piste pertinente pour relancer la croissance. Il est urgent de développer les ressources humaines. M. Delevoye rappelait, à l'assemblée départementale du Pas-de-Calais, qu'à l'époque où la richesse était agricole, on inventa la taxe foncière ; lorsque vint la révolution industrielle, on créa la taxe professionnelle. La richesse est aujourd'hui financière, taxons-là pour que toute la société en profite.

M. Yves Daudigny, rapporteur général de la commission des affaires sociales.  - Cet amendement est très lourd de conséquences : il représenterait 41,645 milliards pour la branche maladie, 26,38 milliards pour la retraite, 17,16 milliards pour la famille. Vu le niveau de la pression fiscale proposée, la commission demande son retrait.

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué.  - Défavorable.

L'amendement n°66 n'est pas adopté.

Article 15

M. Jean Desessard .  - Les écologistes sont favorables à la suppression du forfait. Il n'y a pas deux catégories de salariés, les employés à domicile ne sont pas des sous-employés. Ils pourraient refuser les déclarations au forfait, dit-on. Ces personnes le savent-elles seulement et peuvent-elles refuser, en réalité ? Non.

Lutter contre le travail au noir ? Regardez où il a lieu massivement ! Le statut d'auto-entrepreneur n'est-il pas dévoyé pour abriter une sous-traitance au rabais ?

Mme Christiane Demontès.  - Voilà la réalité.

M. Jean Desessard.  - Nous souhaitons que tous les emplois soient traités de la même façon.

Mme Muguette Dini .  - Je suis contre une nouvelle atteinte au dispositif des services à la personne, qui a fait ses preuves. Il répond à de vrais besoins de la société, en facilitant la garde des enfants et l'accompagnement des personnes âgées et handicapées. Il permet à beaucoup de femmes de rester sur le marché du travail et de concilier vie privée et vie professionnelle. Toutes les familles concernées ne sont pas hyper-riches, loin de là ! Le dispositif bénéficie aussi à des personnes éloignées de l'emploi, qui peuvent en outre bénéficier d'une formation. Et ces emplois ne sont pas délocalisables.

Or ce dispositif a déjà été mis à mal et l'activité ralentit. En 2011, la baisse de 3 % du volume horaire déclaré n'a pas été compensée par la hausse de la masse salariale. En 2012, le nombre d'employeurs a baissé de 0,3 % ; le nombre d'heures déclarées, de 3,8 % ; la masse salariale, de 1,2 %. Vous allez développer le travail non déclaré et détruire des emplois.

Mme la présidente.  - Amendement n°134 rectifié, présenté par M. Milon et les membres du groupe UMP, apparentés et rattachés.

Supprimer cet article.

M. Alain Milon.  - Cet article entraînera un surcoût de la masse salariale qui se traduira par des licenciements ou une baisse des heures déclarées, au détriment des salariés. Pourtant, le secteur des services à la personne a créé 400 000 emplois, non délocalisables. Nous demanderons un scrutin public.

M. le présidente.  - Amendement identique n°299, présenté par M. Barbier.

M. Gilbert Barbier.  - Je regrette l'absence d'étude d'impact sur cette mesure, qui va conduire à développer le travail au noir. Elle s'ajoute à d'autres, comme le plafonnement du forfait social qui frappera indirectement les plus modestes.

M. Yves Daudigny, rapporteur général de la commission des affaires sociales.  - La suppression de l'assiette forfaitaire corrige une double injustice : d'une part, le salarié est lésé car il perd les droits à prestation ; d'autre part, l'employeur qui déclare au salaire réel est désavantagé. Dans le contexte actuel, où le Gouvernement agit pour le redressement dans la justice et l'équité, cette situation ne se justifie plus. Défavorable aux amendements de suppression.

M. Henri de Raincourt.  - Désolant !

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué.  - Défavorable. Le Gouvernement a décidé de revenir sur le forfait qui entraînait une perte de droits pour les salariés. L'Assemblée nationale a décidé un abattement de 8 % du Smic pour faciliter la transition. La mesure me paraît acceptable.

M. Dominique Watrin.  - L'article 15 surenchérirait le coût du travail et entraînerait le travail au noir, disent les auteurs des amendements. C'est reconnaître que la fraude sociale est avant tout une fraude aux cotisations...

M. Henri de Raincourt.  - Incroyable !

M. Dominique Watrin.  - Il y a beaucoup de souffrance dans tout le secteur de l'aide à domicile et à la personne, y compris dans les associations. Le secteur est essentiellement féminin, le temps partiel souvent subi, les conditions de travail se sont dégradées, avec la suppression des cadres collectifs de travail. La réalité de ce secteur, ce sont les bas salaires, la précarité, le manque de reconnaissance. Les salariés peinent à faire reconnaître leurs droits.

L'UMP veut que leur précarité se poursuive, que ces personnes vivent la galère. Nous nous y refusons et voterons contre cet amendement.

M. Jean-Noël Cardoux.  - Je souscris aux propos de Mme Dini, M. Milon et M. Barbier. Il est faux de dire que le forfait pénalise les salariés. Pour une salariée payée au Smic, le calcul sur le montant réel représente une retenue supplémentaire de 45 euros par rapport au forfait. Le problème, c'est la retraite : si la salariée plaçait ces 45 euros sur quarante ans, à 3 %, elle disposerait tout de même d'un capital appréciable de 37 000 à 40 000 euros au moment du départ à la retraite. Il est vrai que c'est une vue de l'esprit mais cela montre que cette retenue de 45 euros n'est pas anodine.

Mme Muguette Dini.  - M. Watrin a parlé de la dégradation des conditions de travail. Elle est réelle dans les établissements mais nous parlons ici des particuliers employeurs qui passent un contrat de travail.

M. Dominique Watrin.  - Il est vrai que j'ai un peu généralisé.

Mme Muguette Dini.  - Le temps partiel ? Pour des personnes non qualifiées, c'est déjà bien, et il n'est pas difficile de trouver des heures pour le compléter tant la demande est forte. Incitons les particuliers à employer ces personnes. Avec votre mesure, le nombre d'heures diminuera. C'est une erreur.

M. Jean-Pierre Plancade.  - Cette suppression est une fausse bonne idée. Les associations d'employeurs vont subir cette hausse, qui converge avec d'autres augmentations de taxes. Au-delà du Smic, l'augmentation dépasse les 50 %. La classe moyenne en souffrira : on réduira les heures de travail, ou on emploiera au noir.

M. Henri de Raincourt.  - Les deux !

M. Jean-Pierre Plancade.  - Peut-être bien. Les quatre millions d'employeurs ne sont pas des fraudeurs ! Nous soutiendrons la suppression de cet article.

Mme Catherine Procaccia.  - Je suis contre la suppression de cette « niche nounou ». Ce surcoût pénalisera les femmes qui ont un salaire faible ; cela les incitera à rester chez elles, ce qui les éloignera encore plus du travail. Il faut revoir la liste de ces emplois à domicile, qui est fixée par arrêté. Les secrétaires particulières à domicile, par exemple, n'ont rien à y faire. Recentrons le dispositif sur l'aide aux personnes, pas sur les coachs sportifs à domicile !

Mme Nathalie Goulet.  - Pas d'accord ! (Sourires)

M. Jean-Pierre Godefroy.  - Nous sommes contre la suppression de l'article. L'Assemblée nationale a voté des dispositions tout à fait satisfaisantes, avec un abattement forfaitaire ; le Gouvernement a fait un geste de 270 millions d'euros. Le forfait doit disparaître progressivement, pas brutalement, car les conséquences ne sont pas négligeables.

Ma crainte, si l'on ne lisse pas la mesure, est que l'on renégocie les conditions de salaires et que le salaire horaire net soit révisé. D'où ma proposition de maintenir le forfait en le majorant. Un état des lieux est prévu dans un an : ne cassons pas la vaisselle dès aujourd'hui ! (Applaudissements sur certains bancs socialistes)

M. Yves Daudigny, rapporteur général de la commission des affaires sociales.  - Ce débat devient un peu irréel... Le Gouvernement veut maintenir les droits sociaux des salariés. N'en déplaise à M. Cardoux, je préfère un système de retraite collectif, solidaire, par répartition, à une retraite par capitalisation. Les crédits d'impôts sont maintenus, les exonérations aussi : les avantages fiscaux demeurent pour encourager l'emploi à domicile.

Une fédération de particuliers employeurs est favorable au dispositif proposé par le Gouvernement. Qui est contre ? Des entreprises comme Acadomia. Je préfère encourager l'éducation nationale. (Protestations à droite)

M. Henri de Raincourt.  - C'est nul !

Mme Catherine Procaccia.  - Et les professeurs particuliers non déclarés. Scandaleux !

M. Yves Daudigny, rapporteur général de la commission des affaires sociales.  - Je veux une éducation nationale qui prenne en charge tous les élèves. Il n'y a pas lieu d'aider les plus favorisés à se payer des cours particuliers à domicile. Qu'ils le fassent s'ils en ont les moyens (applaudissements sur plusieurs bancs à gauche ; nouvelles protestations au centre et à droite) mais en respectant le droit du travail et des salariés, à commencer par les enseignants. Je l'ai été, je connais la situation !

Mme Procaccia a évoqué les abus, du type secrétaire particulier à domicile. Il faut soutenir cette mesure de justice sociale. (Applaudissements sur certains bancs socialistes)

A la demande du groupe UMP, les amendements nos134 rectifié et 299 sont mis aux voix par scrutin public.

Mme la présidente.  - Voici les résultats du scrutin :

Nombre de votants 346
Nombre de suffrages exprimés 346
Majorité absolue des suffrages exprimés 174
Pour l'adoption 189
Contre 157

Le Sénat a adopté.

(Applaudissements sur les bancs UMP)

L'article 15 est supprimé.

Les amendements nos260 rectifié ter, 261 rectifié ter, 187 rectifié, 226, 65, 199 rectifié bis, 227 et 328 rectifié deviennent sans objet ainsi que l'amendement n°339.

Articles additionnels

Mme la présidente.  - Amendement n°139, présenté par M. Milon, Mmes Bouchart et Bruguière, M. Cardoux, Mmes Cayeux et Debré, M. Dériot, Mme Deroche, MM. Fontaine et Gilles, Mmes Giudicelli, Hummel et Kammermann, MM. Laménie, Longuet, Lorrain et Pinton, Mme Procaccia et MM. de Raincourt et Savary.

Après l'article 15

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.  -  Les professionnels mentionnés au 7° de l'article L. 161-22 du code de la sécurité sociale exerçant leur activité dans les zones définies dans les conditions fixées par l'article L. 1434-7 du code de la santé publique, où l'offre de soins est déficitaire, sont exonérés d'une partie des cotisations mentionnées au 1° de l'article L. 642-1 du code de la sécurité sociale.

II.  -  La perte de recettes pour les organismes de la sécurité sociale résultant du I est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

M. Alain Milon.  - Cet amendement exonère partiellement de cotisations retraite les médecins exerçant en zone sous-dense. Le cumul emploi-retraite commence à porter ses fruits, le gisement reste considérable mais beaucoup de médecins sont freinés par le paiement de cotisations n'ouvrant pas droit à prestations. Il y a aujourd'hui 10 578 médecins retraités, âgés de 65 à 70 ans, sans activité, qui pourraient participer à l'offre de soins.

Mme la présidente.  - Amendement n°315 rectifié, présenté par M. Barbier.

Après l'article 15

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. - L'article L. 642-3 du code de la sécurité sociale est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Sont exonérées du paiement des cotisations les praticiens médicaux conventionnés reprenant ou poursuivant une activité relevant de l'article L. 643-6 et exerçant dans les zones caractérisées par une offre médicale insuffisante ou des difficultés dans l'accès aux soins, définies par décret en Conseil d'État. »

II. - La seconde phrase du premier alinéa de l'article L. 645-2 du même code est ainsi rédigée :

« Toutefois, celle-ci n'est pas due pour les assurés reprenant ou poursuivant une activité relevant de l'article L. 643-6. »

III. - La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale des I et II ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

M. Gilbert Barbier.  - Le cumul emploi-retraite permettrait de répondre au défit de la pénurie médicale, mais beaucoup de médecins sont rebutés par le paiement de cotisations n'ouvrant pas droit à prestations.

Cette proposition ne résoudra pas tous les problèmes mais sera utile dans certains secteurs.

Mme la présidente.  - Sous-amendement n°390 à l'amendement n° 315 rectifié de M. Barbier, présenté par M. Daudigny, au nom de la commission des affaires sociales.

Amendement n° 315 rect, alinéas 5 et 6

Rédiger ainsi ces alinéas :

II. - Le premier alinéa de l'article L. 645-2 du même code est complété par une phrase ainsi rédigée :

« La cotisation, forfaitaire ou proportionnelle, n'est pas due pour les assurés relevant du second alinéa de l'article L. 642-3. »

M. Yves Daudigny, rapporteur général de la commission des affaires sociales.  - L'article L 643-6 du code de la sécurité sociale permet aux professions libérales de poursuivre leur exercice professionnel, sous certaines conditions, après leur retraite.

Cette piste est intéressante. La mesure est limitée aux zones sous-dotées. Les médecins concernés n'acquerront pas de droit supplémentaire à pension.

Notre sous-amendement a pour objet de restreindre l'exonération totale de cotisations complémentaires vieillesse aux médecins qui exercent après la liquidation de leur pension de retraite, dans une zone sous-dotée.

L'amendement n°139 est moins précis. J'en demande le retrait au profit de l'amendement n°315 rectifié, sous-amendé.

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué.  - Défavorable.

M. Gilbert Barbier.  - Je me rallie au sous-amendement du rapporteur général : il s'agit en effet de cibler les zones sous-dotées.

M. Jean-Pierre Plancade.  - Très bien !

Mme Nathalie Goulet.  - Je soutiens l'amendement sous-amendé. Nous cherchons depuis des années à attirer des médecins en zone rurale. Ces dispositions sont de nature à maintenir l'offre de soins dans les zones mal dotées.

M. René-Paul Savary.  - Cette disposition permet aux médecins de passer la main. L'expérience des anciens est indispensable aux jeunes qui s'installent ; ils peuvent aider leurs successeurs, notamment à informatiser leurs dossiers. Limiter cette avancée aux zones sous-dotées me paraît toutefois trop restrictif : songez au manque de spécialistes dans les zones rurales en général, je pense aux ophtalmologistes par exemple.

M. Alain Milon.  - Je vais retirer mon amendement. L'amendement de M. Barbier est mieux rédigé.

M. Gérard Longuet.  - Quelle élégance !

M. Alain Milon.  - Bien que le sous-amendement du rapporteur général en diminue l' efficacité, nous le voterons.

L'amendement n°139 est retiré.

Le sous-amendement n°390 est adopté.

L'amendement n°315 rectifié, ainsi sous-amendé, est adopté et devient un article additionnel.

Article 15 bis (Précédemment réservé)

Mme Isabelle Pasquet .  - Cet article, issu de l'amendement adopté par l'Assemblée nationale, concerne les cotisations AT-MP des associations intermédiaires. D'après l'exposé des motifs de M. Grandguillaume, ces cotisations seraient susceptibles de varier selon leur sinistralité. Nous ne sommes pas opposés à ce rapprochement du droit commun mais le rapport de notre commission parle d'« exonération partielle de cotisations », pour un montant estimé à 2 millions. La nature assurancielle de la branche interdit en théorie toute exonération. Rien ne justifie d'exonérer les employeurs de leurs cotisations, d'autant que ces associations s'adressent à des publics fragiles. Faute d'éclaircissements, notre groupe ne votera pas cet article.

M. Jean-Pierre Godefroy .  - Ces problèmes d'exonération sont très difficiles à traiter. Dans un système assurantiel, il faut que les cotisations rentrent. Elles ne peuvent être remplacées par une ressource fiscale. On évoque une compensation, d'origine fiscale, de 2 millions euros. Quelle serait-elle, madame la ministre ?

Les emplois d'avenir sont exonérés de charges sociales, à l'exception des AT-MP. Cet article me pose problème, comme à Mme Pasquet.

L'article 15 bis est adopté.

L'article 15 ter, précédemment réservé, est adopté.

Les articles 16 à 19 ont déjà été examinés.

Article 20 (précédemment réservé)

Mme Muguette Dini .  - Cet article soumet les indemnités de rupture conventionnelle à un forfait social de 20 % au motif que les employeurs abuseraient de ce dispositif.

M. Henri de Raincourt.  - Incroyable !

Mme Muguette Dini.  - Le Centre d'étude de l'emploi, organisme dépendant des ministères du travail et de la recherche, a conduit, à la demande de la CFDT, une étude scientifique, sur des salariés tirés au sort dans cinq départements. Les secteurs d'activité, la taille des entreprises, les salaires sont très hétérogènes. Un quart des salariés affirment avoir été satisfaits des conditions de travail, un autre quart déclarent avoir subi des conditions difficiles et une minorité se sont déclarés insatisfaits.

Après la rupture, les trois quarts des salariés interrogés étaient toujours inscrits à Pôle emploi. Beaucoup cherchaient à devenir travailleurs indépendants, notamment par la voie de l'auto-entrepreneuriat. Une majorité de ruptures peuvent être due à l'initiative de l'employé en raison d'un conflit. Les autres ruptures, à l'initiative des entreprises, sont dues à des difficultés économiques. Pour la grande majorité des salariés, l'avantage de ce type de rupture est de permettre l'indemnisation du chômage, ainsi que d'éviter tout effet réputationnel.

Nous sommes bien loin du tableau sombre dressé par le gouvernement de l'actuelle majorité, qui fait peser toutes les responsabilités sur les employeurs accusés de procéder à des licenciements déguisés. (Mme Catherine Procaccia applaudit)

Mme la présidente.  - Amendement n°136, présenté par M. Milon et les membres du groupe UMP, apparentés et rattachés.

Supprimer cet article.

M. René-Paul Savary.  - Cet article soumet au forfait social de 20 % dû par l'employeur la part des indemnités de rupture conventionnelle exonérée de cotisations inférieure à 72 744 euros.

Le Gouvernement prétend que certains employeurs ont recours aux ruptures conventionnelles pour échapper aux règles encadrant le licenciement. Mais ce type de dérive n'a jamais été démontré. (Mme Annie David, présidente de la commission des affaires sociales, s'exclame)

Un tel changement dans l'imposition des indemnités rendra ce dispositif moins attractif, alors que son caractère souple et novateur a fait son succès.

Cette mesure risque de toucher le salarié si l'employeur répercute le montant de la contribution sur l'indemnité. La possibilité de rompre à l'amiable un contrat de travail est pourtant un moyen d'éviter nombre de conflits potentiels.

Mme la présidente.  - Amendement identique n°218 rectifié, présenté par M. Amoudry et les membres du groupe UDI-UC.

Supprimer cet article.

Mme Muguette Dini.  - Dans son rapport d'octobre 2012, le Centre d'études de l'emploi propose d'utiles recommandations, qui vous éviteront cette pénalisation.

D'abord formaliser l'invitation à un entretien préalable et rendre obligatoire un diagnostic des droits des salariés ; ensuite mentionner les indications qui doivent figurer dans la convention ; enfin réintroduire un délai de préavis, dont l'employeur pourrait dispenser le salarié. Taxer toutes les indemnités conventionnelles n'est pas constructif : c'est pénalisant et choquant.

M. Yves Daudigny, rapporteur général de la commission des affaires sociales.  - Cet article ne remet pas en cause la rupture conventionnelle, il porte sur les cotisations sociales payées sur l'indemnité de rupture. Il supprime une niche sociale inefficace et inefficiente. Avis défavorable aux amendements de suppression.

Mme Dominique Bertinotti, ministre déléguée auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée de la famille.  - Vous avez raison : la rupture conventionnelle n'est pas une rupture du contrat de travail comme les autres. Elle a contribué à l'éviction des seniors du marché du travail : 23 % des ruptures conventionnelles concernent les plus de 58 ans. Le consentement mutuel est assez théorique, plus de 60 % des ruptures étant demandées par l'employeur.

Il convient de compenser par la loi l'avantage que ces ruptures représentent pour certaines entreprises par rapport aux licenciements et à la mise à la retraite. Cet amendement ne concerne que les prélèvements dus par les employeurs ; rien ne change pour les salariés.

Mme Catherine Procaccia.  - Vous ne remettez pas en cause la rupture conventionnelle mais vous en alourdissez la taxation. La gauche est constante dans ses positions. Il y a un problème d' instabilité juridique : on a déjà modifié l'imposition de la rupture conventionnelle l'an dernier.

Mme Dini a expliqué l'avantage que représente ce mode de rupture pour les salariés qui l'inscrivent sur leur curriculum vitae, au lieu d'un licenciement. Les seniors sont plus concernés car leurs indemnités de licenciement sont beaucoup plus élevées que celle des jeunes...

Mme Annie David, présidente de la commission des affaires sociales.  - Vous le reconnaissez !

Mme Catherine Procaccia.  - Vous portez un coup au dialogue social, que M. Sapin prétend pourtant revaloriser.

Mme Christiane Demontès.  - C'est vous qui aviez oublié de solliciter les partenaires sociaux !

Mme Nathalie Goulet.  - Mme Dini a rappelé que ce dispositif est très encadré : l'inspection du travail est présente à tous les stades de la rupture conventionnelle, à laquelle on fait un mauvais procès. Je voterai l'amendement.

Les amendements identiques nos136 et 218 rectifié ne sont pas adoptés.

Mme la présidente.  - Amendement n°69, présenté par M. Watrin et les membres du groupe CRC.

Après l'alinéa 5

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« La contribution mentionnée à l'alinéa précédent est majorée de 5 % dès lors que les indemnités liées à une rupture conventionnelle sont versées à des salariés âgés de cinquante-cinq ans et plus. Le produit de cette majoration est versé à parts égales à l'organisme gestionnaire du régime d'assurance chômage et au fonds de solidarité vieillesse mentionné à l'article L. 135-1 du code de la sécurité sociale.

Mme Laurence Cohen.  - Avec la rupture conventionnelle, on a créé un Ovni juridique pour éviter aux employeurs d'assumer leurs responsabilités.

Le groupe CRC n'avait pas voté cette mesure car nous redoutions qu'elle serve à dissimuler des plans sociaux et des licenciements économiques -ce qui s'est depuis avéré.

L'étude du Centre d'études de l'emploi souligne bien qu'un quart des personnes interrogées ont le sentiment d'avoir été poussées vers la sortie. Il s'agit bien souvent d'une forme de licenciement déguisé. Les études de la Dares le confirment : quitte-t-on volontiers un CDI en période de crise et de chômage ?

La situation actuelle affaiblit les comptes de l'Unedic, et demain du FSV, d'où notre amendement.

M. Yves Daudigny, rapporteur général de la commission des affaires sociales.  - Cet amendement nous a posé un cas de conscience. Il nous a semblé préférable de ne pas majorer le taux du forfait social. La relation au travail des plus de 55 ans peut constituer un excellent sujet pour un rapport parlementaire. Retrait ou rejet.

Mme Dominique Bertinotti, ministre déléguée.  - En effet, la question de la place des seniors dans l'entreprise est importante. Votre amendement accroîtrait considérablement le coût des ruptures conventionnelles. L'employeur paierait plus sans que ce prélèvement ne crée de droits pour les salariés. Le Gouvernement tient à la neutralité de la mesure ; il ne veut pas en faire une pénalité. Retrait ou rejet.

L'amendement n°69 n'est pas adopté.

M. Alain Milon.  - La possibilité de rompre à l'amiable un contrat de travail évite des licenciements et désencombre les prud'hommes. Cet amendement rendra ce dispositif moins attractif. Il n'existait auparavant que deux façons de mettre fin à un contrat de travail : le licenciement à l'initiative de l'employeur et la démission à l'initiative du salarié.

C'est souvent à la demande de ce dernier que l'employeur propose une rupture conventionnelle. Ce dispositif, qui a été approuvé par les syndicats de salariés comme par les organisations d'employeurs, a fait ses preuves. A Marseille, par exemple, il faut attendre trois ans pour qu'une affaire soit jugée aux prud'hommes.

Dans sa frénésie de taxer, le Gouvernement risque de taxer une mesure utile, au seul motif qu'elle a été instaurée par le gouvernement de Nicolas Sarkozy. (Applaudissements au centre et à droite)

M. Philippe Bas.  - Compte tenu des effets pervers de cette mesure, le risque est grand qu'on la vide de son contenu. Plus on taxera les indemnités de rupture conventionnelle, plus on en limitera le montant et on incitera les employeurs à recourir de préférence au licenciement. Une telle indemnité n'est pas une rémunération mais une compensation à une situation qui n'est pas forcément désirée par le salarié. Avec votre mesure, celui-ci sera pénalisé. Chacun de vos prélèvements sur les entreprises pêche toujours par cette même idée : vous prétendez vous attaquer à l'employeur mais c'est le salarié et la consommation qui en pâtiront !

Mme Annie David, présidente de la commission des affaires sociales.  - Le salarié est surtout pénalisé par la perte de son emploi.

A la demande du groupe socialiste, l'article 20 est mis aux voix par scrutin public. (Exclamations sur les bancs UMP)

Mme la présidente.  - Voici les résultats du scrutin :

Nombre de votants 345
Nombre de suffrages exprimés 345
Majorité absolue des suffrages exprimés 173
Pour l'adoption 174
Contre 171

Le Sénat a adopté.

M. Henri de Raincourt.  - C'était juste !

Articles additionnels

Mme la présidente.  - Amendement n°71, présenté par M. Watrin et les membres du groupe CRC.

Après l'article 20

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au II bis de l'article L. 137-11 du code de la sécurité sociale, le chiffre : « huit » est remplacé par le chiffre : « cinq ».

M. Dominique Watrin.  - Notre amendement propose que la contribution additionnelle de 30 % à la charge des employeurs soit exigible dès lors que les retraites chapeaux excèdent cinq fois le plafond annuel définit à l'article L. 241-3 du même code, et non pas huit fois comme actuellement.

La réalité des retraites hyper-privilégiées est insupportable aujourd'hui, alors que l'on taxe même les petites retraites. Leur légitimité est discutable... Je rappelle que nous avions voté, l'an dernier, une proposition identique et j'espère que ceux qui l'avaient fait n'ont pas changé de conviction.

M. Yves Daudigny, rapporteur général de la commission des affaires sociales.  - Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Dominique Bertinotti, ministre déléguée.  - Les retraites chapeaux sont un troisième, voire un quatrième étage de retraites. Au-delà de 182 000 euros annuels, il n'est pas inopportun de leur faire supporter un prélèvement annuel de 20 %.

Mais cette législation a déjà été modifiée à cinq reprises depuis 2003, et encore l'été dernier dans la loi de finances rectificative. Sagesse. (« Ah ! » à gauche)

L'amendement n°71 est adopté et devient un article additionnel.

Mme la présidente.  - Amendement n°70, présenté par M. Watrin et les membres du groupe CRC.

Après l'article 20

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le chapitre 7 du titre 3 du livre 1 du code de la sécurité sociale est complété par une section 12 ainsi rédigée :

« Section 12

« Contribution patronale sur la part variable de rémunération des opérateurs de marchés financiers

« Art. L. 137-27.  -  Il est institué, au profit des régimes obligatoires d'assurance maladie et d'assurance vieillesse une contribution de 40 %, à la charge de l'employeur, sur la part de rémunération variable dont le montant excède le plafond annuel défini par l'article L. 241-3, versée sous quelque forme que ce soit aux salariés des prestataires de services visés au livre V du code monétaire et financier. »

Mme Laurence Cohen.  - Un amendement du même ordre avait été adopté l'an dernier. En 2010, les traders de la Société générale, du Crédit Agricole et de Natixis se sont partagé deux milliards d'euros ! Même si, pour 2011, les bonus sont un peu moins importants qu'auparavant, ils restent scandaleusement élevés. Ce prélèvement les rendra moins insupportables. Nous nous interrogeons sur l'application du droit européen encadrant ces bonus dans la réglementation nationale.

Cet amendement est en outre de nature à apporter de nouvelles recettes à la sécurité sociale en taxant ceux qui profitent du système financier : quoi de plus juste ?

M. Yves Daudigny, rapporteur général de la commission des affaires sociales.  - Cet amendement avait déjà été présenté l'an dernier. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Dominique Bertinotti, ministre déléguée.  - S'il faut réfléchir à un encadrement des bonus, prenons garde à ne pas pénaliser la place de Paris. L'exemple britannique montre que la mesure est possible et souhaitable. Reste à définir l'assiette. On ne peut régler la question au détour d'un amendement. Nous avons déjà beaucoup fait pour faire participer ces rémunérations au financement de la sécurité sociale. Retrait, sinon avis défavorable.

Mme Laurence Cohen.  - Cette argumentation s'entend. Dès lors qu'une réflexion est en cours, nous retirons l'amendement.

L'amendement n°70 est retiré.

Mme la présidente.  - Nous en venons à des articles additionnels appelés en priorité.

Articles additionnels après l'article 23 bis

Mme la présidente.  - Amendement n°7, présenté par M. Daudigny, au nom de la commission des affaires sociales.

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.- La section VI du chapitre 1er du titre III de la première partie du livre 1er du code général des impôts est complétée par un article 520 E ainsi rédigé :

« Art. 520 E. - I. - Il est institué une contribution additionnelle à la taxe spéciale prévue à l'article 1 609 vicies du même code sur les huiles de palme, de palmiste et de coprah destinées à l'alimentation humaine, en l'état ou après incorporation dans tous produits.

« II.- Le taux de la taxe additionnelle est fixé à 300 € la tonne. Ce tarif est relevé au 1er janvier de chaque année, à compter du 1er janvier 2014, dans une proportion égale au taux de croissance de l'indice des prix à la consommation hors tabac de l'avant-dernière année. Les montants obtenus sont arrondis, s'il y a lieu, à la dizaine d'euros supérieure.

« III.- 1. La contribution est due à raison des huiles mentionnées au I ou des produits alimentaires les incorporant par leurs fabricants établis en France, leurs importateurs et les personnes qui en réalisent en France des acquisitions intracommunautaires, sur toutes les quantités livrées ou incorporées à titre onéreux ou gratuit.

« 2. Sont également redevables de la contribution les personnes qui, dans le cadre de leur activité commerciale, incorporent, pour les produits destinés à l'alimentation de leurs clients, les huiles mentionnées au I.

« IV.- Pour les produits alimentaires, la taxation est effectuée selon la quantité entrant dans leur composition.

 « V.  -  Les expéditions vers un autre État membre de l'Union européenne ou un autre État partie à l'accord sur l'Espace économique européen ainsi que les exportations vers un pays tiers sont exonérées de la contribution lorsqu'elles sont réalisées directement par les personnes mentionnées au 1 du III.

« Les personnes qui acquièrent auprès d'un redevable de la contribution, qui reçoivent en provenance d'un autre État membre de l'Union européenne ou d'un autre État partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou qui importent en provenance de pays tiers des huiles mentionnés au I ou des produits alimentaires incorporant ces huiles qu'elles destinent à une livraison vers un autre État membre de l'Union européenne ou un autre État partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou à une exportation vers un pays tiers acquièrent, reçoivent ou importent ces huiles ou les produits alimentaires incorporant ces huiles en franchise de la contribution.

« Pour bénéficier du deuxième alinéa du présent V, les intéressés doivent adresser au fournisseur, lorsqu'il est situé en France, et, dans tous les cas, au service des douanes dont ils dépendent une attestation certifiant que les huiles ou les produits alimentaires incorporant ces huiles sont destinées à faire l'objet d'une livraison ou d'une exportation mentionnées au même alinéa. Cette attestation comporte l'engagement d'acquitter la contribution au cas où l'huile ou le produit alimentaire ne recevrait pas la destination qui a motivé la franchise. Une copie de l'attestation est conservée à l'appui de la comptabilité des intéressés.

« VI.  -  La contribution mentionnée au I est acquittée auprès de l'administration des douanes. Elle est recouvrée et contrôlée selon les règles, sanctions, garanties et privilèges applicables au droit spécifique mentionné à l'article 520 A. Le droit de reprise de l'administration s'exerce dans les mêmes délais. »

II.  -  Après le 3° de l'article L. 731-2 du code rural et de la pêche maritime, il est inséré un 4° ter ainsi rédigé :

« 4° ter Le produit de la contribution mentionnée à l'article 520 E du code général des impôts ; ».

M. Yves Daudigny, rapporteur général de la commission des affaires sociales.  - Il y a ici ceux qui ont connu les maladies cardiovasculaires, l'infarctus, le cholestérol, et les autres qui encourent le risque. J'appartiens à la première catégorie. D'où mon intérêt pour l'alimentation, et d'où cet amendement.

Pourquoi l'huile de palme ? C'est l'huile la plus riche en acides gras saturés, après l'huile de coprah. Son caractère nocif pour la santé est établi. L'Anses rappelle que les acides gras saturés sont consommés en excès par la population française, qu'ils contribuent au développement de l'obésité et favorisent la survenue de maladies cardiovasculaires.

Pour des motifs de santé publique, et uniquement pour ces motifs, il est souhaitable de créer une taxe additionnelle à la taxe spéciale. Son niveau serait fixé à 300 euros la tonne -je rappelle que l'huile de palme est deux fois moins taxée que l'huile d'olive. Ce montant est inférieur aux variations de cours de l'huile de palme sur quelques mois : il n'y a pas péril en la demeure pour les industriels.

Cet amendement est un signal fort qui s'adresse avant tout aux industriels, pour les inciter à réduire, voire à supprimer l'utilisation d'huile de palme dans leurs produits. Pénaliser le consommateur ? Pour un pot d'un kilogramme d'une pâte à tartiner célèbre, l'augmentation serait de 30 centimes -à supposer que le producteur répercute l'intégralité de la taxe. Il ne s'agit pas de tenter de bloquer la consommation en pénalisant le consommateur. (On en doute à droite)

Y a-t-il des produits de substitution ? Oui : l'huile de tournesol, le beurre de cacao, l'huile de coco.

Mme Catherine Procaccia.  - Pleine d'acides gras !

M. Yves Daudigny, rapporteur général de la commission des affaires sociales.  - Une charte de progrès nutritionnel, mise en place par le ministère de la santé, a été signée en 2008 par un distributeur célèbre, qui a supprimé l'huile de palme dans 434 de ses produits sur les 500 qui en contenaient ! (Mouvements divers à droite)

Mme Catherine Procaccia.  - Donc la taxe ne sert à rien !

M. Yves Daudigny, rapporteur général de la commission des affaires sociales.  - Une marque française vient de mettre sur le marché la première pâte à tartiner sans huile de palme mais à l'huile de colza. (L'orateur brandit un pot de pâte à tartiner ; exclamations ironiques à droite)

Mme Catherine Procaccia.  - On veut goûter ! (Mouvements divers)

M. Yves Daudigny, rapporteur général de la commission des affaires sociales.  - Preuve qu'il existe des substituts. Idem pour les chips ou le pain de mie, élaborés à base d'huile de tournesol. (L'orateur brandit ces produits ; nouveaux mouvements) L'absence d'huile de palme est même un argument de vente.

Cet amendement a suscité un emballement médiatique. Le Figaro (exclamations à droite) pose une question tous les jours : faut-il taxer le Nutella ? Réponse : oui à 64 %, non à 36 %, ont répondu 12 325 internautes. (On s'impatiente à droite) Un autre organe de presse a demandé : faut-il surtaxer l'huile de palme ? Réponse : oui à 69,6 %, non à 30,4 %, selon 2 253 internautes. Il est rare qu'une proposition de taxe reçoive une telle approbation. Preuve que nous sommes en phase avec les préoccupations de nos concitoyens.

Il n'est pas rare de présenter des mesures de santé publique dans un PLFSS. Saisissons cette occasion de montrer que nous agissons. (Applaudissements à gauche)

M. Ronan Kerdraon.  - Quel plaidoyer !

Mme la présidente.  - Amendement n°340, présenté par Mme Archimbaud et les membres du groupe écologiste.

Après l'article 23 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le chapitre III du titre III de la première partie du livre premier du code général des impôts est complété par une section ... ainsi rédigée :

« Section...

« Taxe additionnelle à la taxe spéciale sur les huiles

« Art. L... - I. - Il est institué une contribution additionnelle à la taxe spéciale prévue à l'article 1609 vicies du même code sur les huiles de palme, de palmiste et de coprah effectivement destinées, en l'état ou après incorporation dans tous produits, à l'alimentation humaine.

« II. - Le taux de la taxe additionnelle est fixé par tonne à 300 € en 2013, 500 € en 2014, 700 € en 2015 et 900 € à partir de 2016. Ce tarif est relevé au 1er janvier de chaque année à compter du 1er janvier 2017. A cet effet, les taux de la taxe additionnelle sont révisés chaque année au mois de décembre, par arrêté du ministre chargé du budget publié au Journal officiel, en fonction de l'évolution prévisionnelle en moyenne annuelle pour l'année suivante des prix à la consommation de tous les ménages hors prix du tabac. Les évolutions prévisionnelles prises en compte sont celles qui figurent au rapport économique, social et financier annexé au dernier projet de loi de finances.

« III. - 1. La contribution est due à raison des huiles mentionnées au I ou des produits alimentaires les incorporant par leurs fabricants établis en France, leurs importateurs et les personnes qui en réalisent en France des acquisitions intracommunautaires, sur toutes les quantités livrées ou incorporées à titre onéreux ou gratuit.

« 2. Sont également redevables de la contribution les personnes qui, dans le cadre de leur activité commerciale, incorporent, pour les produits destinés à l'alimentation de leurs clients, les huiles mentionnées au I.

« IV. - Pour les produits alimentaires, la taxation est effectuée selon la quantité d'huiles visées au I entrant dans leur composition.

« V. - Les huiles visées au I ou les produits alimentaires les incorporant exportés de France continentale et de Corse, qui font l'objet d'une livraison exonérée en vertu du I de l'article 262 ter ou d'une livraison dans un lieu situé dans un autre État membre de la Communauté européenne en application de l'article 258 = A, ne sont pas soumis à la contribution.

« VI. - La contribution est établie et recouvrée selon les modalités, ainsi que sous les sûretés, garanties et sanctions applicables aux taxes sur le chiffre d'affaires.

« Sont toutefois fixées par décret les mesures particulières et prescriptions d'ordre comptable notamment, nécessaires pour que la contribution ne frappe que les huiles effectivement destinées à l'alimentation humaine, pour qu'elle ne soit perçue qu'une seule fois, et pour qu'elle ne soit pas supportée en cas d'exportation, de livraison exonérée en vertu du I de l'article 262 ter ou de livraison dans un lieu situé dans un autre État membre de la Communauté européenne en application de l'article 258 A.

« VII. - Le produit de cette taxe est affecté au fonds mentionné à l'article L. 135-1 du code de la sécurité sociale. »

Mme Aline Archimbaud.  - L'huile de palme est l'huile végétale la plus consommée au monde. Présente dans des milliers de produits alimentaires de consommation courante, elle est privilégiée par les industriels pour son faible coût de production.

Or, son usage pose des problèmes sanitaires et environnementaux. La consommation massive d'acides gras saturés accroît le risque de maladie cardiovasculaire ; et la culture industrielle du palmier à huile accapare de plus en plus de territoires, détruisant les forêts et mettant à mal tant les équilibres biologiques que les moyens de subsistance des populations locales en Afrique et en Indonésie. L'huile de palme est l'une des huiles les moins taxées -et de beaucoup.

Cet amendement crée une taxe additionnelle sur l'huile de palme, prévue pour augmenter chaque année jusqu'en 2016. Son premier objectif est d'inciter les industriels à y substituer d'autres matières grasses en supprimant son avantage concurrentiel, qui ne repose que sur le fait que le coût des dégâts sanitaires et environnementaux qu'elle occasionne est externalisé et supporté par la collectivité. Les importations sont évidemment également taxées.

Évidemment, la substitution de l'huile de palme par d'autres produits réduira l'assiette, et donc le rendement de la taxe. D'ici à ce que la substitution se mette en place, les recettes générées permettront de financer des politiques de prévention.

Mme la présidente.  - Amendement n°257 rectifié bis, présenté par MM. Reichardt, Bockel et Grignon, Mme Keller, MM. Legendre et Lorrain et Mmes Sittler et Troendle.

Après l'article 23 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le premier alinéa du II de l'article 1609 vicies du code général des impôts est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Le taux de la taxe sur l'huile de palme ne peut pas être inférieur à 550 euros la tonne. »

M. André Reichardt.  - Cet amendement visait à gager la proposition des élus alsaciens de contrer la hausse des droits d'accises sur la bière. M. Daudigny ayant défendu l'amendement de la commission, nous le retirons.

L'amendement n°257 rectifié bis est retiré.

Mme la présidente.  - Amendement identique n°363 rectifié bis, présenté par MM. Husson, Bernard-Reymond, Masson et Türk.

M. Jean-François Husson.  - Pour les mêmes motifs, nous retirons notre amendement.

L'amendement n°363 rectifié bis est retiré.

M. Yves Daudigny, rapporteur général de la commission des affaires sociales.  - L'amendement n°340 est très proche de celui de la commission. Je propose à Mme Archimbaud de se rallier au nôtre.

Mme Dominique Bertinotti, ministre déléguée.  - Je salue l'implication de la représentation nationale dans les problématiques nutritionnelles et me félicite que le recours au levier fiscal pour infléchir les comportements ne soit plus tabou. Attention toutefois à ne pas multiplier les taxes sur des assiettes très restreintes ! Il faut une réflexion globale sur les principaux nutriments dont la consommation excessive nuit à la santé et est source de dépenses pour l'assurance maladie. Sagesse sur l'amendement n°7. Sur l'amendement n°340, retrait, sinon rejet.

Mme Aline Archimbaud.  - Je me félicite que le rapporteur général ait repris cette idée de taxer l'huile de palme, comme d'autres collègues -de manière peut-être plus inattendue. (Exclamations à droite)

Je comprends son argument sur la progressivité et j'accepte de me rallier à l'amendement de la commission.

L'amendement n°340 est retiré.

Mme Nathalie Goulet.  - Je soutiendrai l'amendement de la commission. M. Dériot avait ouvert, il y a quelques années, un grand débat sur l'obésité. Notre ancien collègue, Michel Dreyfus-Schmidt, avait longtemps bataillé contre les excès de sel dans les produits industriels, responsables de l'hypertension artérielle. Le débat ne fait que commencer...

M. Alain Milon.  - Quand on veut tuer son chien, on dit qu'il a la rage... Se réfugier derrière un problème de santé publique pour justifier une taxe supplémentaire est fallacieux. Connaissant votre région d'origine...

M. Henri de Raincourt.  - La Thiérache !

M. Alain Milon.  - ...je suis persuadé, monsieur le rapporteur général, que vos problèmes de santé venaient moins de l'huile de palme que du beurre, de la crème et du fromage... (Sourires)

Mme Nathalie Goulet.  - Mais non !

M. Alain Milon.  - Pourquoi ne pas imposer les routes, les voitures, les vélos, les piétons, puisque la route tue ? Pourquoi ne pas taxer le beurre ? Le fromage ? Les vaches ? Le foie gras ? (Exclamations à gauche)

M. Alain Milon.  - Le problème, ce n'est pas l'huile de palme mais la surconsommation et l'addiction. Quand j'étais médecin, je disais : mangez de tout, un peu.

Mme Isabelle Debré.  - Tout excès est nuisible, disait ma grand-mère !

M. Alain Milon.  - Je n'ai jamais connu, dans ma pratique antérieure, d'addict à l'huile de palme...

D'un côté, le ministre de l'éducation nationale veut dépénaliser le cannabis, produit particulièrement dangereux...

M. Jean Desessard.  - Quel rapport avec l'huile de palme ?

M. Alain Milon.  - ...de l'autre, vous voulez taxer l'huile de palme, qui n'entraîne pas d'addiction.

Mme Catherine Procaccia.  - Quatorze minutes pour justifier l'amendement du rapporteur général... Je vous ai connu moins disert ! Vous n'êtes sans doute pas très à l'aise. Le rapport de l'Anses n'est pas si clair que vous le dites. D'autres rapports de nutritionnistes sont bien plus mesurés. Le beurre, c'est 71 % d'acides gras saturés, l'huile de palme, 50 %... C'est notre consommation de produits tout préparés qui pose problème. Substituer d'autres huiles ? L'huile d'olive, certes meilleure pour la santé, a un goût très fort. L'huile de palme est insipide, c'est pourquoi elle est utilisée dans de nombreux produits alimentaires. Le pire, ce sont les huiles hydrogénées -ce qui n'est pas le cas de l'huile de palme. J'ai enfin du mal à imaginer que les industriels n'augmentent pas leurs prix, ils ne font pas de la philanthropie !

Mme Annie David, présidente de la commission des affaires sociales.  - Vous le reconnaissez !

Mme Catherine Procaccia.  - La déforestation, madame Archimbaud ? Dans les pays producteurs, l'huile de palme fait vivre des milliers de gens sous le seuil de la pauvreté. En Malaisie, 25 % des terres sont défrichées ; en France, 60 % ; en Angleterre, 70 %. Grâce à l'action des ONG, on ne plante plus les palmiers à huile que sur des terres dégradées, non sur des terres défrichées. Pour produire autant d'huile de tournesol ou de colza, il faudrait 40 % de surface en plus ! (Applaudissements sur plusieurs bancs au centre et à droite)

M. Philippe Bas.  - Très bien !

Mme Laurence Cohen.  - Le groupe CRC s'est beaucoup interrogé. Le rapporteur général a été très clair : en Malaisie, en Indonésie, à Bornéo, la forêt primaire a parfois été détruite à 90 % pour planter des palmiers à l'huile -avec une aggravation des émissions de gaz à effet de serre et la mise en danger d'espèces, comme les orangs-outans qui perdent leur habitat naturel.

Il faut sensibiliser aux dangers que présentent ces produits, informer le consommateur pour changer les comportements. Ce signal est bienvenu, même si nous aurions préféré que l'on taxe la marge bénéficiaire des industriels en fonction de la quantité d'huile de palme utilisée dans leurs produits. Nous voterons cet amendement, en espérant que le produit de cette taxe sera fléché intégralement vers la branche maladie.

Mme Catherine Deroche.  - Je veux parler de deux entreprises de mon département. La première, leader dans le secteur des biscuits, entreprise familiale indépendante, qui exporte, sera pénalisée à hauteur de 1,5 million d'euros. Elle emploie 900 collaborateurs sur sept sites en France, dont 250 dans mon département. Elle subit déjà la concurrence étrangère, allemande, belge, hollandaise... La seconde, leader dans le secteur de la boulangerie, sera touchée à hauteur de 3 millions d'euros, alors qu'elle subit déjà la hausse des matières premières, farine et sucre. Il faut penser aux emplois. Ces deux entreprises n'achètent que de l'huile de palme certifiée durable et essaient, dans la mesure du possible d'y substituer de l'huile de colza. Mais les produits de substitution ne sont pas toujours adaptés. Faut-il qu'elles utilisent des matières grasses animales, hydrogénées ou des additifs ? Il faut promouvoir une alimentation équilibrée, sans excès, comme l'a dit M. Milon, et une activité physique, plutôt que d'introduire une taxation punitive. Je ne voterai pas cet amendement.

M. Jean Desessard.  - La France perdrait en compétitivité ? Il y a trop de normes, disait naguère l'industrie automobile. Elle a essayé de résister ; on voit où elle en est aujourd'hui... L'exigence environnementale va s'imposer aussi à l'industrie agroalimentaire. Les entreprises qui auront entamé cette démarche qualité seront plus compétitives demain !

Mme Annie David, présidente de la commission des affaires sociales.  - M. le rapporteur général a pris le temps d'exposer son amendement, certes, mais a écouté les autres orateurs sans les interrompre ! (Exclamations à droite) Je rappelle que le rapporteur général de la sécurité sociale peut s'exprimer aussi longtemps qu'il le souhaite. Lorsqu'il s'exprime au nom de la commission, je souhaiterais qu'il soit écouté dans la sérénité.

L'huile de palme est présente dans beaucoup de produits : on en consomme parfois sans le savoir ! Madame Cohen, ces taxes sont déjà toutes fléchées en direction de la branche maladie. Enfin, les amendements « alsaciens », qui ont été retirés, allaient plus loin que le rapporteur ! La commission demande un scrutin public sur cet amendement.

M. René-Paul Savary.  - Ne nous acharnons pas sur l'huile de palme ! Ce sont les graisses qui sont nocives pour l'organisme ; or l'alimentation des jeunes évolue. Il faut une éducation à l'alimentation. C'est la consommation excessive et répétée de graisses qui entraîne le cholestérol.

Mme Annie David, présidente de la commission des affaires sociales.  - Il ne s'agit pas d'interdire ou de stigmatiser l'huile de palme mais d'envoyer un signal aux industriels afin de les encourager à utiliser les produits de substitution pour éviter la surconsommation.

A la demande de la commission, l'amendement n°7 est mis aux voix par scrutin public.

Mme la présidente.  - Voici les résultats du scrutin :

Nombre de votants 345
Nombre de suffrages exprimés 345
Majorité absolue des suffrages exprimés 173
Pour l'adoption 212
Contre 133

Le Sénat a adopté.

(Applaudissements sur les bancs écologistes)

Mme la présidente. - Nous revenons au cours normal de notre discussion.

Article 23

Mme Catherine Génisson .  - Cet article relève les droits d'accises sur les bières. Proposition impressionnante : une augmentation de 160 %. Nous débattons d'un sujet culturel. Notre pays s'enorgueillit de la variété de ses produits alcoolisés. C'est un patrimoine, mais aussi une activité économique prospère. Nous savons que la consommation excessive a de lourdes conséquences médicales.

Pour protéger, nous taxons, sans que cela influe nécessairement sur la consommation... En 2012, le produit de la taxation sur les alcools est de 3,3 milliards d'euros. Le rapport attendu, dont notre commission souhaite qu'il soit d'initiative parlementaire, doit anticiper toute nouvelle proposition de taxation, pour éviter de stigmatiser certaines boissons et mieux sensibiliser nos concitoyens.

Malgré les améliorations apportées à l'Assemblée nationale, la taxation de la bière aura des conséquences économiques et sociales, notamment dans les régions frontalières du nord et de l'est où les brasseries artisanales sont nombreuses. Le Gouvernement doit réduire l'augmentation envisagée. Nous vous proposerons des alternatives, comme une taxation sur les boissons énergisantes ou sur les premix, qui n'ont pas de valeur culturelle.

10

Article 32

Mme Isabelle Pasquet .  - Réduire les déficits sociaux est une préoccupation qui nous est commune car il est paradoxal que le système de santé solidaire repose sur le bon vouloir de la finance. Nous regrettons que vous ne nous suiviez pas sur les pistes que nous avions ouvertes. Mais le redressement repose sur l'objectif ambitieux d'une croissance de 0,8 % l'an prochain et 2 % ensuite : il faudra bien la générer.

Le sous-financement de l'hôpital est patent. Il eût fallu un Ondam permettant de changer la donne. Le groupe CRC n'adoptera pas cet article.

M. le président.  - Amendement n°385 rectifié, présenté par le Gouvernement.

I. - Alinéa 25

Remplacer le nombre :

5,1

par le nombre :

5,2

II. - Alinéa 25

Remplacer le nombre :

-1,3

par le nombre :

-1,5

III. - Alinéa 41, tableau

Rédiger ainsi ce tableau :

Recettes, dépenses et soldes du régime général (en milliards d'euros)

 

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

Maladie

 

 

 

 

 

 

 

 

Recettes

141,8

148,0

155,0

159,7

164,9

170,7

176,7

182,5

Dépenses

153,4

156,6

160,5

164,9

169,5

174,2

179,0

184,0

Solde

-11,6

-8,6

-5,5

-5,2

-4,6

-3,5

-2,4

-1,5

AT/MP

 

 

 

 

 

 

 

 

Recettes

10,5

11,3

11,8

12,1

12,6

13,1

13,7

14,2

Dépenses

11,2

11,6

11,9

11,9

12,3

12,6

12,8

13,1

Solde

-0,7

-0,2

-0,1

0,3

0,3

0,6

0,8

1,1

Famille

 

 

 

 

 

 

 

 

Recettes

50,2

52,2

53,9

55,3

57,0

58,8

60,7

62,6

Dépenses

52,9

54,8

56,4

58,1

59,6

61,1

62,6

64,1

Solde

-2,7

-2,6

-2,5

-2,8

-2,6

-2,3

-1,9

-1,5

Vieillesse

 

 

 

 

 

 

 

 

Recettes

93,4

100,5

105,2

111,2

115,4

119,7

124,2

128,2

Dépenses

102,3

106,5

110,4

115,3

119,7

124,4

129,1

133,3

Solde

-8,9

-6,0

-5,1

-4,1

-4,3

-4,8

-5,0

-5,1

Toutes branches consolidées

 

 

 

 

 

 

 

 

Recettes

287,5

302,8

316,4

328,6

339,9

352,1

364,7

376,9

Dépenses

311,5

320,3

329,7

340,4

351,1

362,1

373,1

383,9

Solde

-23,9

-17,4

-13,2

-11,8

-11,2

-10,0

-8,4

-7,0

IV. - Alinéa 42, tableau

Rédiger ainsi ce tableau :

Recettes, dépenses et soldes de l'ensemble des régimes obligatoires de base (en milliards d'euros)

 

2010

2011

2 012

2 013

2014

2015

2016

2017

Maladie

 

 

 

 

 

 

 

 

Recettes

164,9

171,8

179,4

184,9

190,9

197,4

204,0

210,4

Dépenses

176,3

180,3

184,9

190,1

195,4

200,7

206,1

211,7

Solde

-11,4

-8,5

-5,5

-5,2

-4,4

-3,3

-2,1

-1,2

AT/MP

 

 

 

 

 

 

 

 

Recettes

11,9

12,8

13,3

13,6

14,1

14,6

15,2

15,7

Dépenses

12,6

13,0

13,3

13,3

13,6

14,0

14,3

14,5

Solde

-0,7

-0,1

-0,1

0,4

0,5

0,7

0,9

1,2

Famille

 

 

 

 

 

 

 

 

Recettes

50,8

52,7

54,4

55,7

57,4

59,2

61,1

63,0

Dépenses

53,5

55,3

56,9

58,6

60,1

61,6

63,1

64,6

Solde

-2,7

-2,6

-2,5

-2,8

-2,7

-2,4

-2,0

-1,6

Vieillesse

 

 

 

 

 

 

 

 

Recettes

183,3

194,6

202,9

212,9

220,6

227,8

235,3

243,5

Dépenses

194,1

202,4

210,0

218,6

226,4

234,5

242,8

251,8

Solde

-10,8

-7,9

-7,1

-5,7

-5,8

-6,8

-7,5

-8,2

Toutes branches consolidées

 

 

 

 

 

 

 

 

Recettes

401,7

421,7

439,5

456,5

472,1

487,8

504,1

521,1

Dépenses

427,2

440,8

454,7

469,9

484,6

499,6

514,9

531,0

Solde

-25,5

-19,1

-15,2

-13,3

-12,5

-11,8

-10,8

-9,9

V. - Alinéa 43, tableau

Rédiger ainsi ce tableau :

Recettes, dépenses et soldes du Fonds de solidarité vieillesse (en milliards d'euros)

 

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

Recettes

9,8

14,0

14,6

16,4

16,8

17,3

18,0

18,6

Dépenses

13,8

17,5

18,6

19,3

19,5

19,4

19,3

19,2

Solde

-4,1

-3,4

-4,1

-2,9

-2,7

-2,1

-1,3

-0,6

Mme Marisol Touraine, ministre.  - Il est défendu.

L'amendement n°385 rectifié, accepté par la commission, est adopté.

L'article 32, modifié, est adopté

Prochaine séance demain, jeudi 15 novembre 2012, à 9 h 30.

La séance est levée à 23 h 50.

Jean-Luc Dealberto

Directeur des comptes rendus analytiques

ORDRE DU JOUR

du jeudi 15 novembre 2012

Séance publique

A 9 heures 30

1. Suite du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, de financement de la sécurité sociale pour 2013 (n°103, 2012-2013).

Rapport de MM. Yves Daudigny, Ronan Kerdraon, Mmes Isabelle Pasquet, Christiane Demontès et M. Jean-Pierre Godefroy, fait au nom de la commission des affaires sociales (n°107, 2012-2013).

Avis de M. Jean-Pierre Caffet, fait au nom de la commission des finances (n°104, 2012-2013).

A 15 heures et le soir

2. Questions d'actualité au Gouvernement.

3. Suite de l'ordre du jour du matin.