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Table des matières



Juridiction unifiée du brevet(Procédure simplifiée)

Article 11 de la Constitution (Conclusions des CMP)

Discussion générale commune

M. Jean-Pierre Sueur, rapporteur pour le Sénat des commissions mixtes paritaires

M. Alain Vidalies, ministre délégué auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement

Mme Hélène Lipietz

M. Hugues Portelli

Mme Cécile Cukierman

M. Jacques Mézard

Mme Virginie Klès

Discussion du texte élaboré par la CMP sur le projet de loi organique

ARTICLE PREMIER

Vote sur le texte élaboré par la CMP sur le projet de loi ordinaire

Loi de finances pour 2014

Discussion générale

M. Pierre Moscovici, ministre de l'économie et des finances

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué auprès du ministre de l'économie et des finances, chargé du budget

M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances

M. Philippe Marini, président de la commission des finances

M. Jean-Vincent Placé

Sécurité : les chiffres de la délinquance (Questions cribles)

Mme Virginie Klès

M. Manuel Valls, ministre de l'intérieur

Mme Éliane Assassi

M. Jean-Vincent Placé

M. Jean-Claude Requier

M. Jean-Patrick Courtois

M. Joël Guerriau

M. Jean-Pierre Sueur

M. Abdourahamane Soilihi

M. Philippe Kaltenbach

Loi de finances pour 2014 (Suite)

Discussion générale (Suite)

M. Jean Arthuis

M. Éric Bocquet

M. Jacques Mézard

M. Albéric de Montgolfier

Mme Michèle André

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx

M. Aymeri de Montesquiou

M. Claude Haut

M. Thierry Foucaud

M. Yvon Collin

M. Philippe Bas

M. Vincent Delahaye

M. Georges Patient

M. Roger Karoutchi

M. Jean Germain

M. Dominique de Legge

M. Gérard Miquel

M. Francis Delattre

Question prioritaire de constitutionnalité

Loi de finances pour 2014 (Suite)

Discussion générale (Suite)

M. Richard Yung

M. Edmond Hervé

M. Serge Dassault

M. Michel Berson

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué

Renvoi en commission

M. Dominique de Legge

Ordre du jour du vendredi 22 novembre 2013

Analyse des scrutins publics




SÉANCE

du jeudi 21 novembre 2013

32e séance de la session ordinaire 2013-2014

présidence de Mme Bariza Khiari,vice-présidente

Secrétaire : M. Alain Dufaut.

La séance est ouverte à 9 h 30.

Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu analytique, est adopté sous les réserves d'usage.

Juridiction unifiée du brevet(Procédure simplifiée)

Mme la présidente.  - L'ordre du jour appelle l'examen du projet de loi autorisant la ratification de l'accord relatif à une juridiction unifiée du brevet (procédure accélérée), pour lequel la Conférence des présidents a retenu la procédure simplifiée.

L'article unique du projet de loi est adopté.

Article 11 de la Constitution (Conclusions des CMP)

Mme la présidente.  - L'ordre du jour appelle l'examen des conclusions des commissions mixtes paritaires sur le projet de loi organique et sur le projet de loi portant application de l'article 11 de la Constitution.

Discussion générale commune

M. Jean-Pierre Sueur, rapporteur pour le Sénat des commissions mixtes paritaires .  - Nous voici réunis pour examiner les conclusions des CMP sur le projet de loi organique et le projet de loi ordinaire portant application de l'article 11 de la Constitution.

J'ai déjà expliqué à plusieurs reprises que le référendum d'initiative partagée est un faux-semblant. Pourquoi ? Parce que certains ont cru qu'il s'agissait d'un référendum populaire, soit qu'un référendum serait organisé sitôt qu'un certain nombre de citoyens le souhaiteraient. Je ne dis pas que ce référendum d'initiative populaire ne soit pas exempt de certaines difficultés. J'ai, pour ma part, quelques réserves à son égard. Voyez les référendums locaux : ils sont partiels, voire partiaux. Je tiens que les assemblées, qu'elles soient locales ou parlementaires, sont mieux à même d'apporter des réponses appropriées. Il est, du reste, peu de questions auxquelles on peut répondre par oui ou par non.

Mais il s'agit ici d'un référendum d'initiative partagée. Tant de conditions doivent être remplies que c'est un véritable parcours du combattant. D'abord, une proposition de loi adoptée, ou plutôt signée par un cinquième des parlementaires. À ce propos, je note que l'Assemblée nationale a repris la position de votre serviteur dès avant la CMP : il ne peut y avoir qu'une proposition de loi. Elle sera de type particulier, car signée à la fois par les députés et les sénateurs. L'initiative revient donc au Parlement et non aux citoyens pétitionnaires. Passé cette étape, le Conseil constitutionnel examine la proposition de loi, vérifie sa conformité à la Constitution et que l'article 11 s'applique. Si tel groupe a jugé utile d'utiliser son espace réservé pour faire ressurgir cet article 11, c'est sans doute qu'était en débat une certaine loi qui s'applique désormais dans toutes les communes de la République... Après quoi, 4,5 millions de citoyens représentant 10 % du corps électoral devront apporter leur signature. Et dans un délai de six mois, le Parlement ne devra pas examiner ce sujet. Qu'entend-on par « examen » ? Que le texte soit inscrit à l'ordre du jour et que la discussion s'engage en séance publique avec la prise de parole du premier orateur. Il suffira qu'un groupe parlementaire - il y en a, je le rappelle, six dans chaque assemblée - utilise un espace réservé pour stopper le processus et accumuler 4,5 millions de signatures. Si et seulement si toutes ces conditions sont remplies, le président de la République convoquera un référendum. Il faut beaucoup d'imagination pour avoir bâti un édifice aussi complexe, qui laisse assez peu de chances d'être mis en oeuvre ! Pour ma part, je n'ai pas voté cet article 11.

Reste que la Constitution nous enjoint de voter une loi organique. Notre commission a eu un seul souci, parce que c'était l'attitude républicaine, d'être le plus fidèle possible à la lettre et à l'esprit de la Constitution.

Je rends hommage à M. Geoffroy, rapporteur pour l'Assemblée nationale, et au président Urvoas, mon homologue de l'Assemblée nationale, qui ont eu la volonté d'aboutir. De même qu'à M. Portelli, qui a travaillé au compromis.

Nous nous sommes ralliés à la position de l'Assemblée nationale sur la proposition de loi d'origine : elle ne sera pas soumise au contrôle du Conseil d'État, puisque le Conseil constitutionnel l'examinera de droit.

J'en viens aux points sur lesquels il y a eu discussion. Sensibles à la situation des territoires, nous avons considéré que le recueil des signatures ne pourrait avoir lieu par la seule voie électronique. D'où la solution trouvée : tout citoyen pourra déposer sa formule papier auprès de la mairie de la commune la plus peuplée du canton, qui l'enregistrera et la transmettra par voie électronique. Voilà un point qui ne relève pas de la Constitution, et a fait l'objet d'un « accord simple et pratique », comme le disait M. Chevènement.

Nous avons longuement évoqué la question des délais. L'Assemblée nationale avait écrit que le président de la République disposait de quatre mois pour organiser le référendum lorsque toutes les conditions étaient remplies. Dès lors que ce n'était pas prévu par la Constitution, le législateur organique n'avait pas à outrepasser la volonté du constituant. Notre point de vue a prévalu.

De même, les députés avaient prévu que la procédure serait interrompue par un vote de chaque assemblée ; la Constitution ne prévoit qu'un examen, lequel peut se traduire par diverses conclusions : le vote, le rejet, l'adoption d'une motion de procédure...

Dernier point, le contrôle des 4,5 millions de signatures par le Conseil constitutionnel. Les députés avaient instauré une commission. On voit bien la difficulté : comment un Conseil de neuf membres pourrait-il venir à bout de cette tâche, même augmenté des anciens présidents de la République - un système auquel il faudrait, à mon sens, mettre fin ? Que dit la Constitution ? « Le Conseil constitutionnel contrôle ». Il disposera pour ce faire des services de l'État, et du ministère de l'intérieur en particulier et pourra nommer des rapporteurs adjoints ou délégués.

Respect absolu de la lettre et de l'esprit de la Constitution, voilà ce qui a présidé à l'accord intervenu en CMP que je vous demande d'adopter. (Applaudissements)

M. Alain Vidalies, ministre délégué auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement .  - Mettre en oeuvre l'application de l'article 11 de la Constitution, tel est l'objectif des textes sur lesquels la CMP est parvenue à un accord. Je le dis car j'ai eu le sentiment que M. Sueur prononçait l'éloge funèbre de cet article... (Sourires)

Mardi dernier, l'Assemblée nationale, dans un esprit de parfaite concorde républicaine, a adopté les conclusions de la CMP. M. Portelli a raison : il est anormal de voir tant de temps s'écouler entre la révision de la Constitution de 2008 et la mise en oeuvre effective des articles 11 et 68.

Nous arrivons au terme d'un long processus, puisque ces textes ont été déposés en décembre 2010 au Parlement, puis discutés en première lecture en décembre 2011. L'histoire retiendra que la volonté de respecter la Constitution était le fait du Parlement. Vingt ans après que le Comité consultatif sur la révision de la Constitution de 1992 eut proposé un référendum d'initiative minoritaire, « destiné à combiner le voeu d'une minorité parlementaire et celui d'une minorité de pétitionnaires, dont le cumul pourrait conduire à l'arbitrage de la Nation elle-même », nous allons, après un long débat sur l'opportunité de créer ou non un véritable référendum d'initiative populaire, créer le référendum d'initiative partagée.

Les CMP ont adopté un texte qui préserve les apports des deux chambres du Parlement et respecte scrupuleusement la Constitution. En adoptant définitivement ces deux textes, le Parlement accèdera au voeu de deux présidents de la République : M. Nicolas Sarkozy et M. François Hollande qui, à l'occasion du cinquantième anniversaire de notre Constitution, a dit vouloir que cette disposition acquière force de loi. (Applaudissements)

Mme Hélène Lipietz .  - Que dire de plus que lors des deux lectures précédentes ? Rien, sinon qu'il n'est pas interdit de se répéter. Le terme d'initiative minoritaire eût été plus adapté pour qualifier ce référendum. Il faudra rassembler 4,5 millions de signatures, soit plus de 10 % du corps électoral, qui est formé de 44,3 millions d'inscrits. Quand on voit la difficulté à rassembler un million de signatures de sept pays pour un référendum européen, nous ne sommes pas près de voir poindre le bout du nez de ce référendum d'initiative partagée.

Les écologistes voteront ces lois belles, mais bien vaines ! (Applaudissements)

M. Hugues Portelli .  - Le groupe UMP votera ces textes parce qu'il faut appliquer complètement la Constitution. Je ne tiens pas rigueur à ce Gouvernement du retard pris car la Constitution a été révisée en 2008. Il reste d'ailleurs une loi organique à voter pour l'article 68 - pour lequel les deux textes adoptés par l'Assemblée nationale et le Sénat ne diffèrent guère. La seule divergence de fond porte sur l'instance de pilotage : le Bureau des assemblées pour le projet de loi voté par les députés, la Conférence des présidents, pour le texte adopté par les sénateurs... L'on doit pouvoir trouver un compromis !

Revenons à l'article 11 dont il s'agit ici : je suis de ceux qui estiment ce texte peu praticable. Récolter 4,5 millions de signatures, cela servira surtout à mener des batailles d'opinion, d'autant qu'il suffira, comme l'a relevé le président Sueur, d'inscrire la proposition de loi à l'ordre du jour pour la bloquer.

Très attaché à la séparation des pouvoirs, aussi bien entre le législatif et l'exécutif qu'entre le législatif et le judiciaire, je ne trouve pas convenable qu'il y ait eu tant de pressions, que des amendements nous viennent entièrement rédigés d'ailleurs - de bien plus haut que le Gouvernement... La loi se fait au Parlement. À bon entendeur, salut !

Cela dit à titre personnel, j'accomplis la mission qui m'a été confiée : affirmer le soutien du groupe UMP à ces textes. (Applaudissements)

Mme Cécile Cukierman .  - Le citoyen reste secondaire, il viendra en soutien à une initiative parlementaire. Ce référendum est loin de constituer un nouveau pas vers la démocratie participative. Nous sommes fort loin d'un référendum populaire.

C'est un véritable parcours du combattant. Il n'est pas si facile de rassembler un cinquième des parlementaires. Si c'était le cas, nous aurions adopté depuis longtemps le vote des résidents extracommunautaires. Qui plus est, il faudra obtenir 4,5 millions de signatures. Ces deux conditions cumulatives sont rédhibitoires, tous les observateurs l'ont dit.

Pour leur part, les sénateurs du groupe CRC continueront de réclamer une profonde réforme de nos institutions qui fasse la part belle à l'initiative populaire et à la démocratie. Je ne comprends pas que la gauche adopte un tel texte. Nous ne le voterons pas.

M. Jacques Mézard .  - Cinq ans pour aboutir à cette oeuvre d'art byzantine (Sourires). On pourrait, d'ailleurs, retirer le mot art...

M. Jean-Pierre Sueur, rapporteur.  - Très bien !

M. Jacques Mézard.  - Nous prenons acte de l'accord intervenu en CMP, et nous voterons bien sûr ces textes, car nous sommes des républicains. Cela n'enlève rien à nos réserves à l'égard de cette Constitution qui nous agrée décidément de moins en moins. Ce référendum renforce le bipartisme dominant, dont les tares sont mises en évidence chaque jour davantage, avec la condition de réunir un cinquième des voix des parlementaires. Il confirme les travers consubstantiels de la Ve République, que nous avons toujours dénoncés, aggravés par le quinquennat, et l'inversion du calendrier électoral, dont nos concitoyens prennent de plus en plus conscience à mesure que le temps passe. Les radicaux, auxquels je suis fier d'appartenir, se sont toujours méfiés d'une procédure référendaire prompte à se transformer en plébiscite. Nul ne peut craindre, certes, qu'un moderne Badinguet se transforme de nos jours en dictateur. En revanche, les risques sont grands de voir, avec ce référendum, le débat monopolisé par les lobbies et la puissance de l'argent, lequel n'a jamais fait bon ménage avec la démocratie et il est bon qu'il en soit ainsi.

Notre confiance va au suffrage universel et à son expression, la démocratie représentative, dont nous tirons notre légitimité, en vertu de l'article 3 de la Constitution.

Pour autant, nos deux assemblées sont parvenues, par le dialogue, à un accord - ce qui est devenu rare et, donc, précieux. Manière de signaler que personne ne croit que ce référendum d'initiative partagée verra le début d'un commencement de réalité. Le groupe RDSE ne voulant pas laisser en jachère des pans entiers de la Constitution, il votera ces textes à l'unanimité. Oserais-je demander au Gouvernement s'il compte présenter avec la même célérité un projet de loi organique d'application des articles 67 et 68 ? (Applaudissements sur les bancs du groupe RDSE ; M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois, applaudit aussi)

Mme Virginie Klès .  - À propos de cet article 11, notre illustre prédécesseur, M. Robert Badinter rappelait la boutade de Clemenceau : « Savez-vous ce qu'est un chameau ? C'est un cheval dessiné par une commission parlementaire »... (Sourires)

Je ne reviens pas sur la procédure prévue par la CMP. On peut s'interroger sur le mode de contrôle par le Conseil constitutionnel : est-il conforme à la maxime delegatus delegare non potest ? L'amendement du Gouvernement y pourvoira.

Les Règlements des deux assemblées devront préciser que le renvoi en commission ne saurait être prononcé sur une proposition de loi référendaire, pour éviter qu'une des deux assemblées ne bloque la procédure.

Au demeurant les chances de voir aboutir cette procédure sont minces... Tout dépendra du bon vouloir du Gouvernement et du Parlement. Cependant, pour mettre en oeuvre la Constitution, ce dont s'était gardé la majorité précédente, malgré ces réserves, le groupe socialiste apportera son soutien à ces textes.

La discussion générale est close.

Mme la présidente.  - Je rappelle que le Sénat, examinant après l'Assemblée nationale les conclusions des CMP, se prononcera par un seul vote sur chacun des textes, sous réserve d'amendements présentés ou acceptés par le Gouvernement.

Discussion du texte élaboré par la CMP sur le projet de loi organique

ARTICLE PREMIER

Mme la présidente.  - Amendement n°1, présenté par le Gouvernement.

Alinéa 14

Après le mot :

formation

rédiger ainsi la fin de cet alinéa :

composée de trois membres désignés pour une durée de cinq ans par le Conseil constitutionnel sur proposition de son président parmi les magistrats de l'ordre judiciaire ou les membres des juridictions administratives, y compris honoraires.

M. Alain Vidalies, ministre.  - La commission mixte paritaire a souhaité créer des formations présidées par un membre du Conseil constitutionnel et composées de deux autres membres désignés par le Conseil constitutionnel. La participation d'un membre du Conseil constitutionnel pourrait être contraire au principe constitutionnel d'impartialité parce qu'il serait juge et partie. Ne prenons pas le risque d'une censure, alors que nous avons déjà pris beaucoup de retard.

M. Jean-Pierre Sueur, rapporteur.  - M. le ministre nous a adressé cet amendement assez tôt pour que la commission des lois puisse l'examiner. Elle s'y est déclarée favorable : évitons qu'un membre du Conseil soit juge de sa propre décision. Pour être fidèle à la Constitution, il suffit de prévoir que les trois membres sont nommés par le Conseil qui reste seul responsable du contrôle de la procédure.

Mme la présidente.  - Le vote sur l'amendement est réservé, conformément à l'article 42-12 du Règlement. Je mets aux voix le projet de loi organique ainsi modifié.

Le scrutin public est de droit.

Mme la présidente. - Voici les résultats du scrutin n° 67 :

Nombre de votants 346
Nombre de suffrages exprimés 346
Pour l'adoption 326
Contre 20

Le Sénat a adopté définitivement le projet de loi organique.

Vote sur le texte élaboré par la CMP sur le projet de loi ordinaire

Les conclusions de la CMP sont définitivement adoptées.

La séance est suspendue à 10 h 45.

présidence de M. Jean-Pierre Bel

La séance reprend à 11 h 5.

Loi de finances pour 2014

M. le président. - L'ordre du jour appelle l'examen du projet de loi de finances pour 2014, adopté par l'Assemblée nationale.

Discussion générale

M. Pierre Moscovici, ministre de l'économie et des finances .  - Poursuivre les réformes de soutien à la croissance, rétablir nos comptes, préparer l'avenir, voilà les objectifs définis par le président de la République et que le Gouvernement poursuit naturellement.

Le dernier budget, le premier présenté par la gauche, était naturellement tourné vers la défense de notre souveraineté financière, dans une zone euro qui luttait pour sa survie. La France venait à peine d'entamer le dialogue avec la Commission européenne. Nous venions de prendre les premières mesures - le pacte de compétitivité n'avait pas encore vu le jour - pour combattre un déficit qui atteignait un niveau inacceptable en 2011 : 5,3 %. Il en aurait été de même en 2012 si nous n'avions rien fait. Nous avions alors bâti un budget pour éviter ce scénario du pire, pour que la France garde la maîtrise de son destin, pour écarter le risque de prédation par les marchés financiers.

Un an après, le chemin parcouru est considérable. La zone euro est stabilisée et notre économie se redresse : après l'embellie constatée au printemps, le taux de croissance atteindra 1 % en rythme annuel, selon toutes les études.

Cela n'exclut pas des à-coups ; un moteur qui redémarre pétarade parfois. Mais cette embellie n'est pas une vue de l'esprit. Organisations internationales et conjoncturistes la confirment, ainsi que le Haut Conseil des finances publiques, qui a qualifié nos prévisions d'abord de plausibles puis de réalistes. La Commission européenne les a aussi validées.

Bref, la France est sur la voie du redressement et le dire, ce n'est pas être un adepte de la méthode Coué. Avant le match d'avant-hier, certains disaient : « Moscovici-Benzema match nul ». Vu les résultats du match, la comparaison n'est pas déshonorante !

Ce message de confiance, les Français ont besoin de l'entendre de la part des partis républicains, sauf à nourrir des inquiétudes qui profitent à d'autres.

La reprise est là mais elle est fragile et nous devons la conforter. À propos de la dégradation récente de la note de la France par Standard & Poor's, j'ai dit les limites de l'exercice parce qu'elle se fonde sur une analyse approximative et qu'elle ne correspond pas aux conclusions du gouverneur de la Banque de France. Les investisseurs continuent à nous faire confiance. Il faut garder le cap du redressement.

Le déficit public devrait s'établir en 2013 à 4,1 % du PIB, au-delà des prévisions initiales, mais la dépense est maîtrisée. L'effort structurel s'élève à 1,7 point de PIB : c'est bien pourquoi la Commission européenne a validé sans réserve notre stratégie budgétaire, contrairement à bien d'autres pays. En 2014, le déficit sera ramené à 3,6 %, et nous serons en deçà de 3 % en 2015.

Sur un effort de réduction de 18 milliards d'euros, 2 milliards proviendront de la lutte contre la fraude, mais surtout de 15 milliards d'économies en dépenses.

Nous ne sommes nullement hostiles à l'impôt, mais nous pensons que, dans un deuxième temps, l'effort doit reposer sur des économies.

Ce budget est un budget de soutien à l'activité économique. Comme disait Pierre Mendès France en 1953, la priorité est d'« accroître la masse des biens à répartir ».

M. Jean Arthuis.  - Très bien.

M. Pierre Moscovici, ministre.  - C'est le préalable à la redistribution. C'est un choix au service de tous les Français. C'est grâce à la croissance que les entreprises créeront des emplois.

M. Gaëtan Gorce.  - Ce budget ne soutient en rien la croissance !

M. Pierre Moscovici, ministre.  - Un sénateur socialiste aura à coeur de soutenir le Gouvernement.

M. Gaëtan Gorce.  - Je suis libre de ma parole et de ma pensée, monsieur le ministre !

M. Pierre Moscovici, ministre.  - On ne peut nier la perte de compétitivité soulignée par le rapport Gallois. Pour y remédier, nous soutenons l'investissement public et privé.

M. Aymeri de Montesquiou.  - Il baisse !

M. Pierre Moscovici, ministre.  - 2014 verra monter en charge le CICE, qui réduit le coût du travail, dans un objectif de convergence avec l'Allemagne. Élu du Doubs je connais les difficultés des constructeurs automobiles. Le CICE bénéficie pour 20 % à l'industrie, soit deux fois plus que sa part dans le PIB. Dès 2013, il a créé ou sauvé 30 000 emplois.

Il y a dix ans, l'Allemagne était l'homme malade de l'Europe ; c'en est aujourd'hui l'économie la plus puissante. Je ne préconise pas les mêmes remèdes.

M. Jean Arthuis.  - Pourquoi ?

M. Pierre Moscovici, ministre.  - Je ne suis pas pour les « mini-jobs » et la précarité. Je veux préserver notre modèle social. Mais des réformes sont indispensables. Nous les menons.

M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances.  - Très bien !

M. Pierre Moscovici, ministre.  - Le projet de loi de finances soutient la création d'entreprises et l'entrepreneuriat ; il crée un plan d'épargne en actions (PEA) spécialement destiné à renforcer les fonds propres des PME et des ETI, dans le cadre d'une vaste réforme visant à orienter l'épargne des ménages vers l'investissement. Nous réformons également le statut des jeunes entreprises innovantes. Dans le projet de loi de finances rectificative nous réformons aux mêmes fins l'assurance vie.

Car tel est le moteur de la croissance de demain. Cela n'exclut pas un soutien conjoncturel à la création d'emplois. Nous n'avons pas l'emploi aidé honteux. Ce projet de loi de finances finance la création de 150 000 contrats d'avenir, la montée en charge des contrats de génération, et la création d'un contingent de 2 000 postes chez Pôle emploi. Car l'emploi est la condition essentielle du pouvoir d'achat des Français.

D'autres mesures amélioreront le pouvoir d'achat des ménages, notamment des plus modestes. Les dépenses contraintes pèsent de plus en plus : d'où l'encadrement des loyers en zones tendues, le plafonnement des frais bancaires et les tarifs sociaux de l'énergie. Nous maîtrisons aussi les prélèvements obligatoires...

M. Pierre Moscovici, ministre.  - L'ancienne majorité avait décidé de porter la TVA à 21,5 %  ! Rappelez-le ! Nous corrigeons vos turpitudes.

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - C'est excessif !

Mme Michèle André   - C'est factuel.

M. Pierre Moscovici, ministre.  - Mais ces dernières années, les riches se sont enrichis, les pauvres appauvris. Or « l'étoile polaire de l'égalité », comme le disait le philosophe italien Norberto Bobbio est le trait distinctif entre la droite et la gauche. D'où la suppression de niches fiscales et le rétablissement de la progressivité de l'impôt.

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx.  - Cacophonie fiscale !

M. Pierre Moscovici, ministre.  - Ce projet de loi de finances prépare l'avenir. Le cap de l'équilibre budgétaire est maintenu.

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx.  - Quelle langue de bois !

M. Pierre Moscovici, ministre.  - Nous modernisons l'action publique, dans une démarche radicalement différente de celle de nos prédécesseurs...

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - Dans les mots !

M. Pierre Moscovici, ministre.  - ... avec une évaluation pour réaliser une véritable modernisation et de véritables économies. Nous consolidons aussi notre modèle social.

Enfin, ce projet de loi de finances consacre le lancement du nouveau programme d'investissements d'avenir de 12 milliards d'euros, dont la moitié d'investissements directs choisis pour conforter la croissance.

M. Gaëtan Gorce.  - Avec 12 milliards ?

M. Pierre Moscovici, ministre.  - Ce projet de loi de finances est un levier pour le retour de la croissance.

M. Gaëtan Gorce.  - Il aura l'effet inverse !

M. Pierre Moscovici, ministre.  - N'opposons pas les intérêts des ménages et des entreprises, le soutien au pouvoir d'achat des ménages et à l'investissement des entreprises. Une bonne politique économique encourage l'offre...

M. Jean Arthuis.  - Très bien.

M. Pierre Moscovici, ministre.  - ... et soutient la demande.

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx.  - C'est mal parti.

M. Pierre Moscovici, ministre.  - Nous tenons notre cap. Je refuse l'image noire, sombre, pessimiste que certains donnent systématiquement de notre pays.

Demain, je participerai à une réunion de l'Eurogroupe où la Commission européenne validera notre stratégie. Notre tâche, celle du Gouvernement, n'est pas de dénigrer...

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx.  - Nous sommes malheureux !

M. Pierre Moscovici, ministre.  - (Applaudissements sur les bancs socialistes) ... mais de fortifier nos atouts. Tel est le sens de ce projet de loi de finances. Je compte sur le soutien de la majorité pour tenir ce cap. (Applaudissements sur les bancs socialistes et du RDSE)

M. le président.  - La parole est à M. Cazeneuve.

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx.  - Au moins, un ministre du budget, on sait à quoi ça sert !

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - Le ministre de l'économie est celui de la parole !

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué auprès du ministre de l'économie et des finances, chargé du budget .  - Je forme le voeu que ce débat soit apaisé, de qualité et approfondi. Merci à M. Marini, président de la commission des finances, et à M. Marc, rapporteur général, de la qualité de leur travail. Il est important, pour M. Moscovici et moi-même, de venir devant le Sénat lui rendre compte régulièrement de la façon dont le Gouvernement conçoit et exécute les lois de finances. Ce travail préparatoire est important pour nos débats dans l'hémicycle.

Je veux aussi rendre un hommage appuyé aux fonctionnaires de Bercy. (Exclamations ironiques à droite) Je ne partage pas la critique souvent faite d'une technocratie éloignée des réalités. Ils contribuent avec loyauté, compétence et un sens profond de l'État à l'élaboration de la décision politique. Mais l'administration n'est pas comptable de celle-ci, qui appartient aux ministres.

M. Jean Arthuis.  - C'est vrai !

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué.  - Cela est consubstantiel à la République : les fonctionnaires servent l'État en tout temps et appliquent loyalement les orientations politiques qui leur sont données.

Je veux d'abord citer quelques chiffres, qui importent naturellement au ministre du budget que je suis ; le reste est le tohu-bohu, le vacarme qui occupe parfois tout l'espace public déserté par la bonne foi. Le déficit d'abord. Il était de 5,3 % lorsque nous sommes arrivés, de 4,8 % en 2012, alors que 4,5 % était prévu, il est vrai ; mais nous avons dû faire face à l'affaire Dexia et à l'obligation d'honorer des crédits de paiement en direction de l'Union européenne qui n'avaient pas été engagés depuis 2010... Notre objectif est de 4,1 % en 2013 et de 3,6 % en 2014.

Ces chiffres montrent incontestablement, contrairement à ce que j'entends, que la réduction des déficits est là grâce à un effort structurel que la Commission européenne a salué. Cet effort est de 1,3 % en 2012, de 1,7 % en 2013 et de 1 % en 2014. La Commission européenne nous fait confiance car elle reconnaît que la trajectoire est tenue. Cette crédibilité doit être préservée. Des efforts d'assainissement sont nécessaires pour retrouver la croissance ; et tout doit être fait par ailleurs pour dynamiser celle-ci sur la durée.

Ce redressement passe aussi par le redressement de nos comptes sociaux. Nous avons trouvé un déficit de 20,8 milliards à notre arrivée ; si nous n'avions rien fait, il serait passé à plus de 25 milliards en 2012 ; nous l'avons ramené à 17,5 milliards, puis à 16,2 milliards en 2013. L'objectif est de le réduire à 12,8 milliards en 2014 et à 4 milliards en 2017. En cinq ans, nous aurons divisé les déficits sociaux d'un facteur cinq.

Les chiffres parlent d'eux-mêmes. Les efforts parfois lourds demandés aux Français aboutissent là où les déficits s'étaient envolés durant la période précédente, sans que la crise soit la seule explication à cette situation - le déficit structurel s'était lui aussi creusé.

J'en viens aux dépenses. Nous devons préserver notre protection sociale et les services publics qui sont le patrimoine de ceux qui n'en ont pas. Par attachement viscéral au modèle français, auquel le Premier ministre se réfère souvent, nous devons tout faire pour que la mauvaise dépense ne chasse pas toujours la bonne. Nulle volonté d'austérité dans ce choix : une volonté de soutenabilité de notre modèle. Nous réalisons avec discernement 9 milliards d'économies de dépenses sur l'État et 6 milliards sur la sphère sociale.

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - Vous avez changé la norme !

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué.  - Non ! Nous respectons les critères de la Commission européenne et de la Cour des comptes ; ils s'imposent à ce Gouvernement comme aux autres.

Les 9 milliards d'économies de dépenses de l'État se répartissent ainsi. D'abord, 2,7 milliards sur les administrations de l'État, grâce notamment au gel du point de la fonction publique. Reconnaissons cet effort quand les fonctionnaires sont trop souvent stigmatisés. Disparaîtront 1 273 postes de fonctionnaires, non par un coup de rabot désorganisé, mais par la modernisation de l'action publique. Deux exemples : grâce à la nouvelle norme comptable et à la plateforme judiciaire d'entraide à la Chancellerie, et grâce à la télédéclaration au ministère des finances, nous réalisons respectivement 45 millions et 120 millions d'économies. Cet effort de rationalisation s'impose également aux opérateurs de l'État, pour 3 milliards : là ou leur budget augmentait de 15 % auparavant, il sera réduit de 4 %. Un même effort de maîtrise est fait pour les taxes affectées, par exemple aux organismes consulaires ou aux agences de l'eau.

Nous rationalisons également l'intervention de l'État. Voyez la redéfinition des relations avec le Stade de France, la remise à plat du financement de l'AFITF...

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - ... c'est la part de l'écotaxe !

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué.  - Un milliard a été mis pour cela en réserve...

Sur les 6 milliards d'économies de la protection sociale, il y a 3 milliards d'économies en 2014 sur les dépenses d'assurance maladie, sans déremboursement ni franchises nouvelles, et 2 milliards au titre de la réforme des retraites. À quoi s'ajoutent la modernisation et la dématérialisation dans le cadre des conventions d'objectifs et de gestion des caisses - 500 millions d'économies. Tout cela sans remettre en cause notre modèle.

Les réductions de dépenses sont là, et à ceux qui les nient, je réponds par des chiffres précis.

Pour 2014, nous proposons 15 milliards d'économies, non avec la brutalité d'un rabot, mais en modernisant l'action publique. Et l'effort portera exclusivement sur la dépense dans les budgets suivants ; une nécessité vu le niveau des prélèvements obligatoires. On ne peut plus aller au-delà, les gouvernements successifs ont porté les prélèvements à un niveau qui ne permet pas de solliciter à nouveau les Français.

M. André Reichardt.  - Le vôtre surtout !

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué.  - Non, monsieur le sénateur ! Puisque vous m'interpellez, je vous donne des chiffres : 20 milliards d'euros de hausse d'impôts en 2011, 21 milliards en 2012, dont 13 imputables au gouvernement précédent, 3 milliards seulement l'an prochain, un milliard seulement si l'on exclut le produit de la lutte contre la fraude. Les prochains budgets, ce sera 0 % de hausse d'impôts et 100 % d'économies en dépenses.

Mme Chantal Jouanno.  - Vous l'avez déjà dit !

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué.  - la réforme fiscale est déjà engagée : barémisation des revenus du capital, réforme de l'ISF et de l'impôt sur les successions, réindexation du barème, hausse du revenu fiscal de référence, décote... Il n'y a pas de grand soir fiscal mais une méthode qui doit nous conduire, année après année, à une fiscalité moderne.

La réforme fiscale doit atteindre des objectifs clairs : la simplification, la stabilité et la stimulation de la croissance. Parce que le consentement à l'impôt suppose la justice fiscale - un impôt plus redistributif - et la préservation des services publics. Il faut sans cesse le rappeler : les impôts financent les infirmières dans les hôpitaux et les policiers dans les rues... Le consentement à l'impôt, c'est une manière de dire son attachement aux services publics ; il doit être constamment renforcé face à ceux qui voudraient conduire les Français sur des chemins qui ne sont pas ceux de la République.

M. André Reichardt.  - Il y a du travail !

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué.  - Faisons-le ensemble plutôt que de chercher le conflit et la polémique...

Ce budget est tourné vers le pouvoir d'achat, je le dis à tous les parlementaires qui légitimement s'interrogent...

M. Philippe Dallier.  - Surtout à gauche !

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué.  - La réindexation de l'impôt sur le revenu sur l'inflation, l'augmentation du revenu fiscal de référence, la mise en place d'une décote renforcée corrigeront les inégalités passées. Je peux aussi citer la hausse de 2 % du RSA (murmures ironiques à droite), la création de tarifs sociaux pour l'énergie ou encore l'encadrement des loyers dans les zones tendues et les 55 000 bourses étudiantes supplémentaires. À quoi s'ajoute un effort massif pour l'emploi - contrats aidés, de génération et d'avenir - pour redonner perspectives et espoir.

Nous oeuvrons aussi pour les entreprises : réforme de la taxation des plus-values mobilières, du statut des jeunes entreprises innovantes, réforme de l'amortissement pour le financement des PME et de la robotisation, grande réforme de l'assurance vie pour drainer l'épargne vers le logement et les PME innovantes. Ce budget dit la confiance du Gouvernement dans notre appareil productif, nos PME, l'innovation.

Je conclurai par la lutte contre la fraude fiscale, dont on attend 2 milliards cette année. Elle est un élément déterminant du consentement à l'impôt.

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx.  - Et les recettes qui ne rentrent pas, parlez-en !

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué.  - Le nombre de dossiers déposés depuis la circulaire de juin nous donne des raisons d'être optimistes - 7 000 dossiers ont été traités en trois mois, beaucoup plus qu'au cours des quatre années précédentes.

Y a-t-il un effondrement des recettes fiscales ?

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx.  - La loi de finances rectificative le montre...

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - Évidemment, il n'y a pas de problème !

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué.  - Certes, il y a un décalage de 11 milliards entre la prévision et la réalité. Cela provient du fait que la croissance sera de 0,1 % et non comme prévu de 0,8 %. On connaît l'élasticité des recettes aux évolutions du PIB, un phénomène observé continûment par le passé. Nous en avons toujours tenu informé le Parlement. Il faut de la transparence dans le débat budgétaire, non pas instrumentaliser les résultats pour nourrir les peurs et manipuler les esprits. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances .  - Le débat sur la question fiscale est légitime et nécessaire. Le consentement à l'impôt est un élément essentiel de notre pacte républicain. Prenons garde à ne pas remettre en cause le principe de solidarité et la légitimité de l'intervention de l'État pour en garantir l'application. Les prélèvements obligatoires financent les services publics et notre système de protection sociale.

Nous devons comprendre les réactions de nos concitoyens ; faut-il rappeler cependant que la situation actuelle n'est pas entièrement imputable à ce Gouvernement ? La précédente majorité a créé 33 milliards de prélèvements obligatoires supplémentaires en un an et demi !

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx.  - Vous les avez dans les caisses et vous n'en profitez même pas !

M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances.  - Sans compter que la précédente majorité nous a laissé quelques bombes à retardement...

Nous recevons dans nos permanences des gens qui ne comprennent pas la situation dans laquelle ils sont, des gens qui payent un impôt qu'ils ne payaient pas hier, des veuves qui n'ont pas anticipé, des élus qui se plaignent du moindre rendement de la CVAE. Il ne faut pas avoir la mémoire courte ! C'est le gouvernement Fillon qui a gelé le barème de l'impôt sur le revenu...

M. André Reichardt.  - Sauf l'an dernier !

M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances.  - ... supprimé la demi-part fiscale attribuée aux veuves, réformé la taxe professionnelle, créé l'écotaxe et passé un partenariat avec Ecomouv sur lequel la lumière doit être faite... (Exclamations à droite et au centre) Beaucoup de griefs, donc, sans oublier que le coût du travail a augmenté en France plus vite qu'en Allemagne ces dix dernières années. D'aucuns nous donnent des leçons de courage politique après avoir voté la TVA sociale quand nous, avec le CICE, abaissons vraiment le coût du travail. Et puis, comment comprendre que les mêmes contestent maintenant les hausses de TVA ?

Certes, le débat est sain ; mais il n'est pas responsable d'affaiblir par tactique politique le consentement à l'impôt, tant il est indispensable pour réussir le redressement de notre pays. Pour ma part, j'assume totalement le fait que le rééquilibrage des finances publiques passe par la hausse de la fiscalité sur le patrimoine, les hauts revenus, le capital, qui concerne les ménages les plus aisés.

L'opposition nous reproche de ne pas réduire suffisamment les dépenses.

N'est-ce pas elle qui, tout en augmentant massivement les prélèvements obligatoires, a multiplié les cadeaux fiscaux inutiles dont certains pèsent encore ? La RGPP n'était qu'un leurre à en croire les chiffres : les dépenses publiques ont augmenté annuellement de 1,6 % sous le quinquennat de M. Sarkozy...

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - Que feriez-vous sans lui ?

M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances.  - Quelles réformes ont été menées par la précédente majorité ? La réforme des retraites ? Nous avons dû la corriger pour introduire de la justice et garantir notre modèle !

M. André Reichardt.  - En baissant les pensions ?

M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances.  - Plutôt que des pétitions de principe, je demande à la droite des propositions autres que de réduire de façon dogmatique le nombre de fonctionnaires et un peu de cohérence.

M. Philippe Dallier.  - À commencer par vous !

M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances.  - L'acte I du redressement a porté sur les recettes, l'acte II fera totalement porter l'effort sur les dépenses.

La Commission européenne a confirmé notre trajectoire de redressement des comptes publics, pour atteindre l'équilibre en 2017 ; elle a donné un satisfecit à ce budget pour 2014. Elle a aussi émis des observations et des recommandations en vertu, pour reprendre l'expression de M. Arthuis, du règlement de copropriété de l'euro que nous avons voulu et qui doit s'appliquer pareillement à tous.

Je le dis avec force : l'effort sur les dépenses publiques, difficile, devra se réaliser dans la durée. Il ne s'agit pas de laisser passer l'orage mais de bâtir un nouveau modèle, plus économe et plus juste, qui écartera contentieux et recours aux partenariats public-privé.

Ce budget est marqué par deux ambitions, la compétitivité des entreprises et la justice sociale. Outre le CICE, il faut citer la réforme du régime des plus-values de cession, l'amortissement exceptionnel pour les robots dans les PME, la simplification de l'assiette du CIR, l'extension du régime d'exonérations sociales aux jeunes entreprises innovantes, le nouveau PEA « PME » et la réforme de l'assurance vie.

Le mouvement doit s'inscrire au niveau européen : nous ne pouvons pas tolérer la compétition fiscale et sociale. Je me réjouis que Mme Merkel ait annoncé ce matin l'instauration généralisée d'un salaire minimal en Allemagne.

Mme Michèle André.  - Enfin !

M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances.  - Taux de change européen, lutte contre la fraude fiscale avec la levée du secret bancaire et l'échange d'informations sont des questions à ne pas éluder.

Deuxième objectif majeur de ce budget, la justice sociale. Il est essentiel de protéger les ménages les plus fragiles qui souffrent davantage que d'autres de la crise. Augmentation de l'allocation de rentrée scolaire, du RSA socle, des bourses étudiantes ou de l'AAH, création d'un RSA jeune, tout cela, nous l'assumons pleinement. Cet effort de justice doit s'étendre aux collectivités territoriales. Si elles ne peuvent s'exonérer de l'effort commun de redressement, elles n'ont pas de prise sur les normes édictées par l'État.

M. Dominique de Legge.  - Les rythmes scolaires !

M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances.  - Dès l'an prochain, nous travaillerons à une refonte de la dotation globale de fonctionnement (DGF), avec à l'esprit la nécessaire péréquation.

N'abandonnons pas l'ambition de réformer nos impôts parce que les temps sont difficiles : fusion de l'impôt sur le revenu et de la CSG, révision des valeurs locatives pour la fiscalité locale et refonte de l'impôt sur les sociétés.

J'invite le Sénat à voter ce projet de loi de finances, à la première partie duquel la commission des finances a donné un avis favorable. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Philippe Marini, président de la commission des finances .  - Je veux remercier d'abord les membres de la commission des finances et l'ensemble des rapporteurs spéciaux dont l'implication marque notre souci de la dépense publique. Je remercie aussi le rapporteur général, bien que nos convictions soient franchement opposées, pour sa courtoisie dans l'exercice dont je connais les charmes et les contraintes.

Ce débat arrive dans une confusion institutionnelle et politique que je n'ai jamais connue. Cela tient d'abord à un facteur structurel : la discussion budgétaire relève de deux textes, loi de financement et loi de finances. Ensuite - c'est une nouveauté - on a vu l'Assemblée nationale adopter des mesures fantômes, celles liées à la réforme de l'assurance vie et à l'écotaxe. Deuxième facteur structurel, l'examen des plans nationaux par la Commission européenne, procédure bien étrange qui voit l'avis de Bruxelles intervenir après l'adoption de la première partie de la loi de finances par l'Assemblée nationale ! Il faudra un jour ou l'autre revoir ce schéma institutionnel.

Le Gouvernement ajoute à la confusion politique régnante en l'alimentant de son propre chef. Le Premier ministre a annoncé la remise à plat du système fiscal, après avoir épuisé, au bout de dix-huit mois, tous les charmes de la hausse des impôts existants. Pourquoi pas ?

M. Jean Germain.  - Eh oui !

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - Sauf que des textes budgétaires contradictoires sont désormais en parallèle, se modifiant réciproquement... On n'y comprend plus rien. Le Gouvernement en joue, en créant le CICE, en remettant à plus tard la question de son financement par les hausses de TVA. Le Gouvernement précédent, lui, avait fait un choix clair - un peu tard, à mon sens, il est vrai. Ce Gouvernement fait à peu près la même chose que son prédécesseur, mais en catimini.

Je n'insisterai pas sur ses reculs successifs, qui font s'effriter l'autorité de l'État, à l'heure même où nous avons besoin d'un État fort, d'un État stratège...

M. Aymeri de Montesquiou.  - C'est vrai !

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - Le discours lénifiant de M. Moscovici ne doit pas occulter que la crise de la zone euro est toujours latente, car les déséquilibres et dysfonctionnements subsistent.

Ainsi de l'union bancaire : l'Allemagne s'oppose à un fonds de résolution bancaire - à bon droit, me semble-t-il, puisqu'il revient à faire payer les contribuables pour les défaillances d'établissements d'autres États - mais aussi à la recapitalisation des banques par le Mécanisme européen de stabilité (MES). Que reste-t-il donc de l'union bancaire ? Rien, sinon le mécanisme de régulation.

La dette publique est un enjeu de souveraineté. Notre addiction doit être réduite. Il est vrai que l'ennemi d'hier, la finance, est devenu le meilleur ami d'aujourd'hui : le Gouvernement bénéficie de taux d'intérêts très bas que lui concèdent les marchés, évitant, pour l'heure, l'éviction des dépenses publiques les plus utiles par les charges de remboursement des emprunts. La dette, elle, progresse : l'an dernier, on prévoyait une dette de 83 % du PIB en 2017 ; aujourd'hui, on l'anticipe à même échéance, à 91 %. L'an dernier, on envisageait le pic de la dette en 2013 à 91,3 % ; cette année, on le repousse à 2014 en le fixant à 95,1 % du PIB. Cette menace conduit à la prudence, à l'épargne, car les Français craignent, quoi qu'on en dise, de nouvelles hausses d'impôts. Voilà qui explique l'attentisme, voire la sinistrose actuelle.

Il faudra encore longtemps faire des efforts pour réduire la dette à 60 % du PIB. Plus nous tardons, plus l'effort sera rude. Serons-nous capables, dans ces conditions, de réduire le déficit en deçà de 3 % ? Il faudra pour cela des réductions pérennes de dépenses.

Le Gouvernement se veut rassurant. Il qualifie d'économie un ralentissement de la hausse des dépenses. Force est de constater qu'il a renoncé à un objectif d'équilibre des comptes publics en 2017 et persiste à tenir un double langage, ici et à Bruxelles...

La création du Haut Conseil des finances publiques (HCFP), pour objectiver le débat sur les hypothèses macroéconomiques, marque un progrès, mais des interrogations subsistent. Comment jouera le mécanisme de correction automatique, en cas de déviation de la trajectoire ? Je vous ai souvent posé la question, monsieur le ministre, vous ne m'avez jamais répondu.

Le chantier de la rationalisation des niches est mené avec une grande mollesse. 20 % du stock devait être évalué en 2013. Il n'en a rien été, à ma connaissance.

Vous prenez des libertés avec la norme de dépenses, que vous définissez vous-mêmes. Cela a toujours été plus ou moins le cas, mais cette année, vos accommodements vont beaucoup plus loin. Plus d'1,5 milliard de transferts de fiscalité aux collectivités territoriales auraient dû se traduire par autant d'économies en dépenses de l'État. Or votre affirmation d'une réduction d'1,5 milliard des dépenses publiques est un pur sophisme !

Le deuxième programme d'investissements d'avenir, annoncé en juillet hors de toute procédure budgétaire, aurait pu n'être qu'un hommage à vos prédécesseurs, qui ont inventé la formule, mais il vient se substituer à des crédits classiques. 12 milliards d'investissements, ce sont 12 milliards de déficit, et autant de dettes supplémentaires, au gré de vos meilleurs amis, les marchés financiers !

M. Jean-Vincent Placé.  - Votre temps de parole est épuisé !

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - Nous attendons de vraies réformes de structure, dont M. Marc a reconnu qu'elles devaient venir. Le Gouvernement entend ramener la hausse des dépenses à 0,4 % en 2014, puis 0,2 % les années suivantes. Rappelons cependant qu'on attendait 0,4 % en 2012 et que l'on a eu 1 %. Certes, c'était une année à gestion partagée. Poursuivons donc la démonstration : en 2013, la prévision était de 0,9 % et l'on a eu 1,7 %.

M. Jean-Vincent Placé.  - Il faut conclure, monsieur le président !

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - Le rapporteur général n'a pas épuisé son propre temps de parole et les ministres ont dépassé le leur !

M. le président.  - Soyez raisonnable !

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - Rassurez-vous ! Le Gouvernement préfère communiquer sur les annonces coûteuses, comme le recrutement d'enseignants, la garantie universelle des loyers (GUL)...

M. Philippe Dallier.  - Parlons-en !

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - ... la revalorisation du seuil de la CMU, le rétablissement de la retraite à 60 ans, etc. Vous évoluez, monsieur le ministre, tel un funambule, suspendu au-dessus des écueils, qui sont légion...

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx.  - Belle image !

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - Certes, l'affreuse RGPP n'est plus, la vertueuse modernisation de l'action publique (MAP) est là, mais les réformes de fond sont toujours repoussées...

Nombreux sont les récifs et les obstacles, il est vrai. Mais de grâce, ne satanisez pas vos prédécesseurs, qui y ont aussi été confrontés.

Le ressentiment ne cesse de croître chez les élus, sommés de financer les politiques décidées par le Gouvernement, comme pour les rythmes scolaires, tout en assumant à sa place la hausse des impôts, alors que les dotations sont réduites à un niveau jamais atteint. Et il a le talent d'appeler cela « pacte de confiance et de solidarité »... Cette politique du verbe mine la confiance...

M. Jean Germain.  - Concluez !

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - Par votre absence de cohérence, l'impréparation de vos décisions, vos concessions multiples, vous portez un coup dur au consentement à l'impôt, indispensable en République. Je regrette que le Gouvernement affiche un objectif idéologique, puis cherche les moyens de le contourner...

M. le président.  - Veuillez conclure !

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - On prévoyait 4 milliards, tirés de la fiscalité écologique, pour financer le CICE. Je scrute, j'examine, mais je ne trouve rien...

Pour ma part, je pense qu'il faut rejeter franchement, globalement et frontalement ce projet de loi de finances, dès l'article d'équilibre.

M. Jean-Vincent Placé .  - Je serai plus court...

M. Dominique de Legge.  - Et moins intéressant !

M. Jean-Vincent Placé.  - Ce budget est dans la continuité du précédent. Pourtant, la France est au bord de la rupture. Des « abeilles » aux « poussins », les professions se mobilisent les unes après les autres ; selon les préfets, la société est en prise à la crispation, l'exaspération et à la colère ; le racisme s'exprime franchement. Les fondements de notre pacte républicain sont atteints.

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx.  - Que faites-vous dans la majorité ?

M. Jean-Vincent Placé.  - Certes, la précédente majorité a laissé le pays exsangue, tout en encourageant l'extrême droite qu'elle a légitimée.

M. Philippe Dallier.  - Ben voyons !

M. Jean-Vincent Placé.  - Mais en entérinant sans négociation le traité budgétaire européen, le Gouvernement s'est rallié à l'implacable logique de l'austérité. Le premier budget du quinquennat l'a montré ; l'austérité de gauche reste l'austérité. La rigueur enclenche un cercle vicieux. Les recettes fiscales se sont atrophiées de 11 milliards d'euros, ce qui explique le dérapage du déficit. 2,6 % au lieu de 1,6 %. (Mme Marie-Hélène Des Esgaulx approuve) Or le TSCG prévoit le déclenchement automatique d'un mécanisme de correction que le HCFP demandera au printemps prochain. Devons-nous payer une amende ? Corriger la trajectoire ? Ou nous contenterons-nous d'une déclaration de bonnes intentions ? Cette règle d'or nous enferme dans un choix entre la catastrophe et la mascarade. À tout prendre, celle-ci est préférable, mais la politique en sort-elle grandie ?

C'est dans ce contexte qu'a été annoncé le CICE, partiellement financé par la TVA.

M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances.  - Et la fiscalité écologique !

M. Jean-Vincent Placé.  - Le Gouvernement s'engage sur la voie sociale-libérale, en donnant un chèque en blanc aux entreprises, à toutes les entreprises, des TPE aux multinationales, qu'elles soient prospères ou en difficulté, écologiques ou polluantes, soumises ou non à la concurrence internationale. Quel est le problème de compétitivité de la grande distribution, par exemple ?

Ces mesures onéreuses contractent d'autant les marges de manoeuvre pour la transition écologique. Le double péché originel du TSCG et du CICE se solde par 6 milliards d'euros d'économies sur les amortisseurs sociaux, 1,5 milliard au détriment des collectivités territoriales. L'État et ses opérateurs ne sont pas en reste, avec 7 milliards de coupes claires dans les dépenses, y compris dans la police et la gendarmerie. Cela aura des répercussions dans les commissariats. Je le sais pour être rapporteur spécial de cette mission. Heureusement que le dégel a permis l'achat de 2 000 véhicules en novembre (M. Jean-Pierre Caffet s'exclame) La mission « Écologie » est parmi les plus atteintes.

Côté recettes, la hausse de la TVA doit entrer en vigueur. On cherche une assiette large, et les ménages modestes ont le malheur d'être beaucoup plus nombreux que les riches... Cette hausse pénalisera de nombreux secteurs. Dans ce marasme, les travaux de rénovation thermique des logements ont heureusement été exclus de la hausse de TVA.

La création d'une Contribution climat énergie (CCE) nous satisfait aussi même si je déplore qu'elle aille au financement du CICE, au détriment de sa dimension incitative. Il faudrait augmenter le prix de la tonne de carbone, pour se rapprocher des montants prévus dans l'accord de mandature signé avec le PS, soit 36 euros dès 2012 et 56 euros en 2020.

M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances.  - Il n'est jamais trop tard !

M. Jean-Vincent Placé.  - Sans doute n'est-il pas trop tard. Nous avons pris connaissance avec intérêt de l'annonce d'une grande réforme fiscale par le Premier ministre. C'est notamment l'occasion de rattraper notre retard en matière de fiscalité écologique. L'écotaxe, défendue par les syndicats et décriée par le Medef, est l'alliée du progrès social : en faisant payant le prix de la pollution, elle fera apparaître les secteurs condamnés, qu'il faut aider à se transformer.

Je vous avais dit que si le programme de stabilité avait été soumis à notre vote, nous ne l'aurions pas adopté, que nous ne pourrions accepter un budget de l'écologie en baisse. En attendant la grande réforme fiscale annoncée par le Premier ministre, à laquelle nous souhaitons être pleinement associés, et sans avancée sur nos amendements, nous ne pourrons voter le volet recettes de ce projet de loi de finances.

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - J'applaudis la conclusion.

La séance est suspendue à 13 heures.

présidence de M. Jean-Pierre Bel

La séance reprend à 15 heures.

Sécurité : les chiffres de la délinquance (Questions cribles)

M. le président.  - L'ordre du jour appelle les questions cribles thématiques sur la sécurité : les chiffres de la délinquance.

Mme Virginie Klès .  - Les chiffres de la délinquance, « les vrais », « les nouveaux », peu importe les qualificatifs ; ce qui choque la statisticienne que je fus, c'est le mélange entre le singulier et le pluriel. Rien n'est plus multiforme que la délinquance. « Les chiffres de la délinquance », cela n'existe pas sur le plan statistique. Il est temps de sortir du chiffre unique pour aller vers une mesure des variétés de délinquance sur le territoire. Un pas a été fait, avec la création d'un service interne au ministère de l'intérieur, mais il faut avancer sur le recueil des données dans les commissariats. Que peut-on attendre du nouveau service de la statistique que vous avez créé au sein de l'intérieur ? Quelle articulation avec l'Observatoire national de la délinquance et des réponses pénales ?

M. Manuel Valls, ministre de l'intérieur .  - La mission du ministre de l'intérieur est de combattre, bien sûr, la délinquance à partir de données fiables. D'abord, pour informer les citoyens ; ensuite, pour orienter de la manière la plus fine nos politiques de sécurité. On ne peut pas se contenter du chiffre unique. L'« État 4001 » créé il y a quarante ans ne constatait que les faits sanctionnés pénalement ; il ne reflétait donc pas la délinquance dans sa diversité ni l'action des forces de l'ordre. En concertation avec l'Observatoire national de la délinquance et des réponses pénales, nous avons mis en place un tableau avec quatorze agrégats, plus qualitatifs, qui prenne mieux en compte les infractions les plus préoccupantes pour nos concitoyens. Le nouvel outil, déjà mis en place dans la gendarmerie, sera étendu à la police. Il rendra compte des dépôts de plainte et mesurera l'apport de la police technique et scientifique. Nous éviterons ainsi les manipulations.

Mme Virginie Klès.  - Le Gouvernement a, enfin, pris la mesure de cet enjeu (murmures ironiques à droite), essentiel pour combattre la délinquance.

Mme Éliane Assassi .  - Contrairement au célèbre adage, « les chiffres parlent d'eux-mêmes », le rapport de l'Inspection générale de l'administration (IGA) de juin 2013 met en lumière les manipulations des statistiques de la délinquance sous Nicolas Sarkozy. Le report de l'enregistrement des faits quand les objectifs étaient atteints faussait la réalité.

Dès votre prise de fonction, monsieur le ministre, vous avez affirmé votre volonté d'assumer les chiffres et de les refondre afin d'en faire l'instrument d'une politique crédible.

Les nouveaux indicateurs devront distinguer parmi les violences personnelles non mortelles, le vol à la tire de celui avec port d'armes. Vos objectifs sont connus, pouvez-vous nous donner des précisions afin que le Parlement puisse juger de la pertinence de votre action ?

M. Manuel Valls, ministre.  - L'Observatoire national de la délinquance et des réponses pénales s'est imposé depuis dix ans. Son indépendance et sa légitimité doivent être confortées. Sa présidence a été confiée à un inspecteur général de l'Insee. Un nouveau service de statistiques sera créé au sein du ministère de l'intérieur début 2014 dirigé également par un inspecteur général de l'Insee.

Oui, on mesure la profondeur du changement ! Ainsi, nous garantissons la transparence du débat public et donnerons aux forces de l'ordre les moyens de combattre efficacement le fléau de la délinquance. La transparence doit s'imposer tout au long de la chaîne.

Mme Éliane Assassi.  - Merci, il faudrait revenir sur le triptyque prévention, dissuasion et répression. Nous le ferons dans le projet de loi de finances.

M. Jean-Vincent Placé .  - La délinquance environnementale (murmures ironiques à droite) est un sujet éminemment important, même s'il attire les rires de l'opposition, le rapporteur spécial de la « Sécurité » que je suis le sait.

L'Office central de lutte contre les atteintes à l'environnement et à la santé publique a connu une véritable évolution ces dernières années. Grâce à une soixantaine d'agents des forces de l'ordre dévoués, la police de l'environnement se concentre sur les déchets, les infractions alimentaires, relatives au dopage, ou les déviances médicales. Les infections liées aux déchets ont explosé de 2011 à 2012 : + 175 % !

Face à la croissance des enjeux environnementaux et au manque de visibilité de l'action des forces de l'ordre en ce domaine, il est urgent de créer des indicateurs et de donner à nos forces les moyens d'agir. (Applaudissements sur les bancs écologistes)

M. Manuel Valls, ministre.  - L'Office central bénéficie du soutien de 350 enquêteurs sur le territoire hexagonal et en outre-mer. Si la délinquance environnementale est difficile à qualifier, on estime qu'elle a augmenté de 20 % entre 2007 et 2012. D'autres acteurs interviennent. Ainsi, l'Office national de la chasse et de la faune sauvage a relevé 17 000 infractions en 2012. Les nouveaux agrégats répondront aux demandes légitimes d'information de nos concitoyens.

M. Jean-Vincent Placé.  - Merci de cette réponse précise. Effectivement, l'Office national de la chasse et l'Office national des forêts concourent à la police de l'environnement. Le sujet est important. Je sais d'ailleurs que Mme Jouanno partage ce souci.

M. Jean-Claude Requier .  - Le groupe RDSE est très attaché, comme vous, à la sécurité. Le dernier rapport de l'Observatoire national de la délinquance a mis en évidence une forte hausse de la délinquance en zones rurales entre 2009 et 2012. C'est que plus de 4 000 postes de gendarmes ont été détruits par la RGPP. On constate une hausse de 58 % des vols dans les exploitations agricoles. Les ruraux s'inquiètent de cette nouvelle délinquance, très organisée et très mobile, à laquelle ils ne sont guère habitués. Quelle réponse apporter ?

M. Manuel Valls, ministre.  - Monsieur Requier, je viendrai demain dans votre département, (Exclamations amusées à droite) comme dans le Cantal. Les cambriolages ont augmenté de 18 % de 2007 à 2012, dont 47 % dans les résidences principales ; ce phénomène n'est pas propre à la France. Les gendarmes sont mobilisés. En septembre dernier, on a démantelé dans les Landes un vaste réseau de voleurs de systèmes hydrauliques d'irrigation. La tâche est de mieux informer, en liaison avec les chambres d'agriculture. Aucun territoire n'est oublié.

M. Jean-Claude Requier.  - En mémoire de Clemenceau, le « père de la Victoire » et le « premier flic de France », je salue, monsieur le ministre, votre détermination.

M. Jean-Patrick Courtois .  - Je salue la célérité des forces de police à arrêter Abdelhakim Dekhar, le tireur fou, arrestation rendue possible grâce au fichier national automatisé des empreintes génétiques, créé par notre majorité. Je dénonce les insinuations de M. Assouline concernant notre formation politique.

Les chiffres de la délinquance n'ont cessé de croître depuis votre arrivée au pouvoir : les atteintes aux biens de 4,1 %, les cambriolages de 10 %, les vols à la tire de 14 %. À cela s'ajoute la morosité des fonctionnaires de police, qui ont manifesté leur ras-le-bol mercredi dernier. Policiers et gendarmes se sentent orphelins. La rallonge de 100 millions annoncée ne les calmera pas sans un cap clair donné à votre action. Il faut une politique structurelle qui passe par un redéploiement des forces. Quand définirez-vous enfin une politique durable de sécurité, profitable à notre pays et rassurante pour nos forces de police ?

M. Manuel Valls, ministre.  - Merci de votre hommage aux forces de police. Cela dit, arrêtons les polémiques : 13 700 postes ont été détruits entre 2007et 2012, là où nous créons 400 à 500 postes par an.

Le fichier national automatisé des empreintes génétiques a été créé par Élisabeth Guigou en 1999 et renforcée par Nicolas Sarkozy. Prenons de la hauteur : il faut des moyens, ce que nous faisons, et un redéploiement des forces avec la définition de zones de sécurité prioritaires. La continuité républicaine prévaut en ce domaine dont on doit chasser toute polémique.

M. Joël Guerriau .  - Je veux parler de la délinquance juvénile. Selon l'observatoire, 18 % des délits, dont un tiers de la totalité des vols, sont commis par des jeunes. En tout, on dénombre 140 000 mises en cause par an. Il n'est pas rare que les policiers arrêtent dix fois le même jeune.

La Chancellerie a pris récemment une décision qui interdit le recours à la géolocalisation.

M. Jean-Pierre Sueur.  - Ce n'est pas la Chancellerie, mais la Cour de cassation qui, faut-il le rappeler, est indépendante !

M. Joël Guerriau.  - Les centres éducatifs ne résolvent malheureusement pas le problème de la récidive. Je vous propose deux pistes : une évaluation des centres éducatifs et l'utilisation par la police de la géolocalisation qui lui est interdite. Les promesses de la campagne présidentielle seront-elles tenues ? Comment lutterez-vous contre cette délinquance ? (Applaudissements au centre)

M. Manuel Valls, ministre.  - Entre 2002 et 2012, la part des mineurs dans les violences aux personnes a en effet augmenté. Les valeurs de notre société ne sont plus des remparts suffisants. Cette délinquance, en outre, se professionnalise. Il est donc urgent de réinvestir tous les territoires de la République, comme nous le faisons à Marseille et dans toutes les zones de sécurité prioritaires. La justice doit être sans concession.

Les centres éducatifs fermés, que vous proposez d'évaluer, sont une partie de la réponse, qui doit être éducative et pénale.

M. Joël Guerriau.  - Il faut évaluer ces centres. Les policiers n'en peuvent plus d'interpeller plusieurs fois les mêmes auteurs. Leurs moyens sont trop faibles. Ils ne peuvent plus utiliser la géolocalisation à cause d'une décision de justice : il faut les aider.

M. Jean-Pierre Sueur .  - Soyons justes ! Je vous renvoie à la difficile réforme des rythmes scolaires : notre société a un problème avec l'éducation. En outre, on a supprimé trop de postes, que vous rétablissez, monsieur le ministre.

L'Observatoire national de la délinquance et des réponses pénales jouit de l'indépendance, qu'il faut conforter. Il existe des statistiques pour la police, d'autres pour la gendarmerie. Celles du ministère de la justice reposent sur d'autres bases encore. Il faudrait une cohérence entre les trois.

M. Manuel Valls, ministre.  - Monsieur Sueur, vous avez raison. Je répète que la décision relative à la géolocalisation a été prise par la Cour de cassation ; il nous revient de nous organiser en conséquence.

L'évaluation de l'impact de nos politiques requiert des statistiques fiables et fines. Nous sommes encore au Moyen Âge de la statistique criminologique.

Les outils anonymisés dont nous nous dotons vont dans le bon sens. Nous confortons l'Observatoire national de la délinquance et des réponses pénales. Nous aurons bientôt des outils de diagnostic fiables en lien avec le ministère de la justice ; ils seront portés à la connaissance de nos concitoyens.

M. Jean-Pierre Sueur.  - Je salue la volonté du ministre. Les défaillances d'« État 4001 » sont abondamment décrites. Cette approche objective devrait nous débarrasser des polémiques récurrentes. Cessons de faire de la sécurité un enjeu politicien, et unissons nos efforts dans la lutte contre la délinquance.

M. Abdourahamane Soilihi .  - La population de Mayotte croît très vite : 50 % de la population a moins de 25 ans. Pas moins de 40 % de la population est en situation irrégulière et 3 000 mineurs isolés, dont 500 en grande fragilité, vivent sur notre territoire. La délinquance est alarmante. Les atteintes volontaires à l'intégrité physique et les atteintes aux biens sont en hausse rapide : les premières sont passées de 1 363 à 1 398 entre 2012 et 2013 ; les secondes de 4 229 à 4 837. Nous ne sommes pas épargnés par la délinquance économique, bien qu'elle se soit réduite de 364 à 251 faits entre 2012 et 2013. En revanche, la délinquance juvénile progresse : elle a crû de 5 956 à 6 486 faits sur la même période. Quelles mesures proposez-vous pour lutter contre ce fléau ? (Applaudissements à droite)

M. Manuel Valls, ministre.  - Le constat est juste, mais ne date pas d'il y a dix-huit mois. Mayotte connaît également des problèmes de violences scolaires : les bus scolaires sont attaqués. Les dispositifs de sécurité ont évolué en conséquence.

La lutte contre l'immigration irrégulière n'a pas cessé. Je me rendrai à Mayotte prochainement. Ce dont l'île a besoin, c'est de la réussite de son projet de départementalisation. Nous travaillerons sur tous les aspects économiques, sociaux, sécuritaires, pour redresser la situation.

M. Philippe Kaltenbach .  - Pendant des années, les chiffres de la délinquance ont fait l'objet de toutes les instrumentalisations.

M. Antoine Lefèvre.  - Avec vous, c'en est fini, évidemment !

M. Philippe Kaltenbach.  - Les objectifs ont été atteints, mais à quel prix ? D'aucuns ont dénoncé des pressions. Le rapport de l'IGA de juin 2013 a clairement montré la manipulation des chiffres de la délinquance. Les Français ne veulent pas des chiffres, ils veulent des faits, de la transparence. Pouvez-vous nous dire que la manipulation est révolue ? (Rires à droite)

M. Manuel Valls, ministre.  - Oui, il faut un outil statistique indépendant pour mieux combattre la délinquance. Il faut regarder les choses dans le temps. Ainsi, les homicides ont diminué de 47 % depuis 25 ans, avec une baisse de 30 % des règlements de comptes. En revanche, la violence physique non crapuleuse a augmenté de 331 %.

En vérité, les formes de délinquance on beaucoup changé. Les violences gratuites ont explosé ainsi que les menaces et les violences sexuelles faites aux femmes. Plutôt que de nous écharper sur des détails, donnons-nous les moyens de lutter contre les vrais enjeux de sécurité.

M. Philippe Kaltenbach.  - Vous avez été particulièrement convaincant. (On s'esclaffe à droite) Le Gouvernement tient un discours de vérité.

M. Joël Guerriau.  - Qu'il tienne plutôt ses promesses !

La séance est suspendue à 15 h 50.

présidence de M. Jean-Pierre Raffarin,vice-président

La séance reprend à 16 h 5.

Loi de finances pour 2014 (Suite)

M. le président.  - Nous reprenons l'examen du projet de loi de finances pour 2014, adopté par l'Assemblée nationale.

Discussion générale (Suite)

M. Jean Arthuis .  - L'examen de ce budget intervient dans une situation dont chacun mesure la gravité tant l'exaspération de nos concitoyens est sensible. Hors de l'Hexagone, nos partenaires européens doutent. C'est dire que nous ne pouvons pas attendre 2017 pour rétablir nos comptes publics.

En préambule, monsieur le ministre, cessez d'invoquer l'héritage des gouvernements précédents alors que vous êtes au pouvoir depuis dix-huit mois.

Depuis l'élection de François Hollande, la dette a progressé de 150 milliards - 200 milliards si l'on tient compte des avances et des prêts. Les astuces cosmétiques n'ont rien perdu de leur hardiesse : les 12 milliards d'investissements d'avenir reportent à plus tard les arbitrages budgétaires. Il en va de même pour les 10 milliards du CICE : des créances sur l'État constatées en fin d'année, voilà encore un moyen de reporter les réformes politiquement redoutées. Vous annoncez une réduction des dépenses de 15 milliards alors qu'elles continuent à augmenter en valeur absolue. Oui, gauche, droite, même ambiguïté.

Je déplore que vous ayez renoncé à une présentation globale de la loi de financement de la sécurité sociale et de la loi de finances, (M. Philippe Marini, président de la commission des finances, approuve) est-ce pour mieux dissimuler le matraquage fiscal sur lequel M. Moscovici vous avait mis en garde ? Rompez avec le déni de la réalité pour assumer avec courage les choix qui s'imposent en faisant taire les clivages partisans.

La vie de nos entreprises est menacée : fermetures, délocalisations, recours à des travailleurs de l'est de l'Europe, comment enrayer ce processus ? La création de la BPI serait la clé du redressement. Pour autant, le problème est moins celui du financement que de la rentabilité. Celle-ci a baissé le plus fortement en France parmi les dix-sept pays de la zone euro. Vous avez imaginé un temps un impôt sur l'excédent brut d'exploitation qui aurait comprimé encore plus les marges des entreprises. Vous y avez renoncé, renforçant l'impression d'incertitude qui se dégage de l'action du Gouvernement.

Je reconnais le premier pas que vous avez accompli avec le CICE, que vous tirez du rapport Gallois. Si vous êtes restés au milieu du gué, vous avez levé des tabous de la gauche, dont la hausse de la TVA. Le travail est le plus taxé en France : 42 % du total des prélèvements obligatoires en France sont des charges sociales, contre 35 % en moyenne dans la zone euro et 27 % dans l'OCDE. La consommation ne représente que le quart des prélèvements obligatoires, contre 33 % au sein de l'OCDE. Allez au bout de votre logique et assumez votre choix : supprimez les cotisations d'allocations familiales et alléger les cotisations d'assurance maladie. Allez vers la clarté et la simplicité plutôt que de décaler d'un an les charges avec le CICE. Soyez pédagogues ! Je souligne d'ailleurs un problème d'équité : les professions indépendantes, qui vont subir la hausse de la TVA, doivent obtenir un crédit d'impôt. C'est une mesure de justice.

L'assainissement de nos comptes publics constitue une impérieuse nécessité, à laquelle nous serions venus plus vite sans l'Europe. J'espère, monsieur le ministre, que vous avez mesuré les limites du matraquage fiscal ; la réduction de la dépense publique est la seule issue. Monsieur le ministre, vous qui avez été en charge des affaires européennes, vous avez soutenu l'augmentation du temps de travail des fonctionnaires européens et le recul à 65 ans de l'âge de leur départ à la retraite. Ayez ce courage pour la France et mettez fin aux 35 heures.

L'heure est grave. Parce que le budget voté par les députés ne réduit pas la dépense publique, parce qu'il taxe la production plutôt que la consommation, parce qu'il se laisse aller à la hausse des prélèvements obligatoires, le groupe UDI-UC ne le votera pas.

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué.  - Je demande une brève suspension de séance.

La séance, suspendue à 16 h 15, reprend à 16 h 20.

M. Éric Bocquet .  - À l'entame de ce débat, je suis traversé d'un doute existentiel profond... (Exclamations étonnées à droite)

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - Vous n'êtes pas le seul !

M. Éric Bocquet.  - ... en tant que parlementaire. J'ai entendu tous les acteurs dire qu'il faudrait dépenser moins, économiser plus et la clé de voûte de ce raisonnement est la règle d'or que seuls 32 sénateurs ont refusée dont les membres du groupe CRC. Les agences de notation, la Commission européenne - qui, par la voix du professeur Barroso, a fait savoir ce qu'elle pensait de ce budget - la Cour des comptes, instance estimable mais qui sort un peu de son rôle en donnant au Gouvernement des préconisations, le Haut Conseil des finances publiques, où siègent des représentants des grandes banques privées qui ont agi comme l'on sait et nous en payons encore les conséquences, l'OCDE... J'arrête là la liste des prophètes de l'austérité. Le concert est bien harmonieux, il est temps de faire entendre d'autres voix. L'an dernier, le FMI mettait en garde sur les effets de l'austérité. Le modélisateur économique en chef de la Commission européenne en a calculé le coût : 4,78 points de PIB de 2001 à 2013 en France, 2,61 % en Allemagne, 4,86 % en Italie et 5,36 % en Espagne. Nous porterons dans ce débat des amendements pour une plus grande justice fiscale, pour solliciter davantage les dividendes et les patrimoines et soutenir le pouvoir d'achat des ménages, qui, chacun le sait, représentent 50 % de notre PIB.

La lutte contre la fraude fiscale, voilà un autre chantier auquel doit s'atteler le Gouvernement. 2 milliards de recettes attendues pour 2014, cela est décevant. La question des moyens se pose : il faut renforcer ceux de l'administration fiscale.

Monsieur le ministre, ce matin, vous avez déclaré que la réforme fiscale annoncée par le Premier ministre avait été engagée dès 2012... Sous M. Cahuzac ?

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué.  - Je n'ai pas dit ça !

M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances.  - N'importe quoi !

M. Éric Bocquet.  - M. Moscovici ...

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx.  - Il n'est pas là !

M. Éric Bocquet.  - ... a déclaré qu'il n'y avait pas lieu de changer de budget parce que la France a intégré les règles européennes alors que le Haut Conseil des finances publiques a indiqué dès septembre que le mécanisme de correction sera déclenché - c'est à l'indicatif - mi-2014... Il est urgent de clarifier.

En raison du rôle dévolu au Parlement, du choix contestable de l'austérité et du manque de lisibilité, le groupe CRC refuse ce projet qui ne restaurera pas le consentement à l'impôt, contrairement à ce que vous affirmiez ce matin, parce qu'il faut installer une fiscalité juste et progressive à laquelle personne n'échappe. (Applaudissements sur les bancs CRC et plusieurs bancs UMP)

M. Jacques Mézard .  - Le groupe RDSE votera très majoritairement la première partie du projet de loi de finances pour donner au Sénat l'opportunité de discuter de la deuxième partie. Si cela n'est pas le cas, la faute n'en reviendra pas entièrement au Sénat. Cela est d'autant plus déplorable que, monsieur le ministre, vous avez toujours démontré votre volonté de dialoguer dans notre hémicycle, en expliquant votre politique et en répondant à nos questions. Ce n'est pas le cas des ministres qui, au mépris du Sénat, annoncent qu'ils feront adopter leurs textes sans modification à l'Assemblée nationale, c'est ne pas respecter les institutions. Pour restaurer la confiance, il faut rétablir le dialogue.

L'Insee table au troisième trimestre sur une rechute de la croissance, un recul des exportations et de la consommation des ménages. La reprise n'est toutefois peut-être pas si loin. Nous proposerons des mesures pour renforcer le pouvoir d'achat des Français, y compris en revenant sur la suppression de la défiscalisation des heures supplémentaires. (On s'en réjouit à droite) Les Français souffrent du chômage, ceux qui travaillent ont peur de perdre leur emploi, l'accès au logement est difficile. Le consentement à l'impôt est mis à mal ; malgré les efforts du Gouvernement les Français doutent de la justice fiscale. Or elle est essentielle à notre démocratie. Nous vidons les assiettes de nos impôts, à coup de niches fiscales et sociales, ce qui nuit au consentement à l'impôt. Cette instabilité fait obstacle à l'investissement dans les entreprises. Le président de la République amorce une remise à plat de notre fiscalité, soit. Il aurait pu le faire plus tôt (Mme Marie-Hélène Des Esgaulx confirme) comme d'autres...

En attendant, vous supprimez des niches fiscales à l'article 17 mais vous en créez deux pour l'outre-mer. Où est la logique ? En matière de logement, nous défendrons des mesures dissuadant la rétention foncière plus ambitieuses.

J'en viens aux collectivités territoriales, dont chacun sait que les dotations baissent. Dans le pacte de confiance entre État et collectivités territoriales, sont prévues des recettes pour combler le manque de 6 milliards afin de financer les allocations de solidarité comme le RSA. Nous ne retrouvons que 2 milliards dans ce budget. L'article 26 affecte aux départements les recettes des frais de gestion de la taxe sur les propriétés bâties qui seront placées dans un fonds partagées entre compensation et péréquation selon des critères inspirés du fonds de soutien aux départements en difficulté, qui a suscité la polémique : en se calant sur la Seine-Saint-Denis et la Corrèze on fait naître le soupçon. Comme l'an dernier, les DMTO sont au coeur d'une polémique. Lisibilité, toujours, et équité doivent être au rendez-vous notamment en matière de péréquation. Tout sauf cette danse de Saint-Guy sur les impôts et la TVA. Et que dire de la surévaluation de l'euro ?

Dans le mauvais temps et dans l'intérêt général, nous apporterons notre soutien à ce budget. (Applaudissements sur les bancs RDSE et socialistes)

M. Albéric de Montgolfier .  - Stabilité, prévisibilité et lisibilité, insistait M. Moscovici il y a peu, avant que le Premier ministre annonce une remise à plat de la fiscalité.

À rebours de ce qui a été annoncé, nous sommes dans l'instabilité, l'imprévisibilité et l'illisibilité.

Il y a un an, nous dénoncions le tournis fiscal du Gouvernement. Ce budget n'y a pas échappé. De la pause fiscale, nous sommes passés à un ralentissement fiscal, c'est-à-dire à un ralentissement de la hausse. Bref, instabilité encore et toujours. L'histoire nous a donné raison. Le matraquage fiscal se traduit par un ras-le-bol fiscal - pour reprendre l'expression de M. Moscovici - et une exaspération des citoyens.

M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances.  - Prenez votre part dans le matraquage fiscal !

M. Albéric de Montgolfier.  - Ce qui est sidérant, est que vous ne changez rien ! Vous annoncez des rentrées fiscales amputées de 5,5 milliards, mais il faudra peut-être compter le double. Le matraquage fiscal a conduit à une baisse des investissements. Plutôt que d'entreprendre des réformes structurelles, vous vous reposez sur l'environnement économique international et la finance qui, comme l'a dit M. Marini, est devenue votre meilleure alliée : la charge de la dette représente 2 000 milliards d'euros ! De cet endettement, nous portons tous une part de responsabilité depuis les années 1980, même si la crise y est pour beaucoup. Pour que la France continue d'avoir accès au crédit, il faut ce courage dont vous manquez pour redresser les comptes publics. Vous continuez de financer des emplois aidés, qui n'inverseront pas la courbe du chômage ; vos économies en dépenses se réduisent de budget à budget, à 700 millions d'euros dans le budget de l'État. La vraie baisse, c'est celle de la dotation aux collectivités territoriales : 1,5 milliard d'euros et vous augmentez simultanément leurs charges de 2 milliards, à cause en particulier de la réforme des rythmes scolaires. La pause fiscale, le ralentissement fiscal ? Mensonges ! Vous augmentez les impôts sur les ménages de 12 milliards, sans oublier les entreprises qui devront financer la mini-réforme des retraites, le compte pénibilité, autant de mesures qui annulent le CICE et contredisent le cap affiché de la compétitivité. La dichotomie entre le discours et les actes est patente. Une hausse de 20 % des faillites, en un an, voyez !

Bref, ce budget comporte des mesures insuffisantes, dangereuses, voire récessives.

Visiblement, le changement n'est pas pour maintenant. Le groupe UMP votera fermement contre ce projet de budget ! (Applaudissements sur les bancs UMP)

M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances.  - Regardez plutôt vos propres contradictions.

Mme Michèle André .  - Voici le budget d'une France qui connaît son État, elle est une république et, depuis 1946, une république sociale .Cela impose à un gouvernement de gauche de suivre le cap des services publics et de la protection sociale. L'État dit providence auquel, nous socialistes, sommes attachés, n'est pas en crise comme le répètent certains avec gourmandise : c'est l'économie qui est en crise de mutation depuis 1973, ce n'est pas une raison de jeter aux orties notre modèle de protection sociale et de services publics.

Ce budget est clair. Il a une orientation : retrouver la croissance, un impératif de souveraineté par la réduction de la dette et du déficit que nous ont légués dix ans de gouvernements de droite. C'est, pour parodier Kipling, le « fardeau des gouvernements de gauche » car Jean-Marc Ayrault n'est pas le premier à se colleter à un tel héritage. Et je n'oublie pas la suppression précipitée de la taxe professionnelle qui pèse sur les collectivités territoriales. Le déficit était de 5,2 % fin 2011, il sera de 4,10 % en 2013 et de 3,6 % en 2014.

Le sérieux budgétaire du Gouvernement, ses initiatives pour la compétitivité des entreprises et la simplification de leur environnement normatif, c'est indéniable, sont pour beaucoup dans les bonnes conditions de financement dont bénéficient actuellement les entreprises.

L'objectif du Gouvernement, c'est aussi, bien sûr, la justice sociale. Le gel du barème de l'impôt sur le revenu avait soumis à l'imposition 3,1 millions de foyers fiscaux supplémentaires en 2011 et 2,9 millions de plus en 2012. Sans commentaire !

Nous rétablissons la progressivité de l'impôt et nous protégeons les plus modestes avec l'indexation de l'impôt sur le revenu, la réforme du revenu fiscal de référence, ou encore la décote renforcée.

La stratégie de ce projet de loi de finances consiste à conjuguer maîtrise des dépenses et stabilisation des prélèvements obligatoires. Les hypothèses de croissance sont prudentes : + 0,1 % en 2013, + 0,9 % en 2014.

Pas moins de 15 milliards d'économies de dépenses sont prévues, soit 80 % des efforts de réduction du déficit, contre 33 % l'an passé.

La stabilisation des prélèvements obligatoires est réelle, puisqu'ils n'augmentent que de 0,15 % du PIB en 2014, dont 0,1 %, soit deux milliards d'euros, provenant de la lutte contre la fraude fiscale, ce qui ramène ce taux à 0,05 %. Ils n'augmenteront pas en 2015.

Nos comptes sont redressés avec une année d'avance par rapport au programme transmis à Bruxelles. Certains brandissent des arguties fiscales indécentes après avoir creusé les déficits à grands coups de cadeaux aux plus aisés ; les mêmes avaient pourtant dû créer 40 taxes entre 2010 et 2012. (Mme Marie-Hélène Des Esgaulx et M. Roger Karoutchi protestent) Le Gouvernement actuel a pris ses responsabilités. Il s'est attaqué à des réformes en profondeur...

M. Vincent Delahaye.  - Lesquelles ?

Mme Michèle André.  - La recherche d'un système fiscal plus égalitaire correspond à la stratégie fixée par le président de la République : nous voterons ce budget. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - Une motion de renvoi en commission du projet de loi de finances a été déposée par le groupe UMP. Je vous propose d'en débattre à l'issue de la discussion générale. La commission des finances se réunirait - sauf surprise, brièvement - pour examiner la motion à la suspension où dès la clôture de la discussion générale.

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx .  - Nous regrettons l'absence du ministre de l'économie à qui j'adresserai l'essentiel de mes critiques. Il est venu faire un petit tour puis s'en est allé, comme il était venu, avec beaucoup de légèreté... (Mme Michèle André proteste)

M. Francis Delattre.  - Eh oui !

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx.  - L'an dernier, l'agence Moody's dégradait la note française d'un cran. L'opposition critiquait alors la politique du Gouvernement. L'agence Standard & Poor's vient de faire de même... parce qu'elle serait mal informée des réformes en cours, disent les mêmes ! (On rit à droite) La politique menée depuis 2012 n'a pas permis de redresser nos comptes publics observe-t-elle en substance. On peut critiquer les méthodes des agences, et je ne m'en suis pas privée, comme vice-présidente de la commission d'enquête du Sénat...

M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances.  - C'est pourtant vous qui les citez.

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx.  - ... mais il serait constructif de considérer leur avis - convergents avec ceux du FMI, de la Commission européenne - comme des avertissements.

Quand allez-vous nous proposer une politique constructive et cohérente ?

Vous avez d'abord un problème de méthode. Nous discutons d'un texte vidé de sa substance : suppression de la taxe EBE, de la taxe carbone, report de la majoration sur les terrains non bâtis... vous courez après les recettes et gérez les finances publiques à la petite semaine, conséquence de votre impréparation ! (M. Jean Germain proteste)

Votre approche macroéconomique est aussi critiquable : compter sur le retour de la croissance n'est pas une stratégie. Aucune perspective de reprise durable n'est observée, mais vous restez imperturbablement confiants, en tablant sur une hausse de la consommation des ménages de 0,8 % en 2014, après 0,3 % en 2013. Or les hausses d'impôts ne risquent pas de soutenir leur pouvoir d'achat puisqu'ils sont taxés à hauteur de 12 milliards supplémentaires.

Les annonces de baisses de dépenses publiques nous laissent sceptiques. L'an dernier, la dépense publique a dérapé ! Votre objectif de 0,4 % pour 2014 est trop ambitieux.

Ces baisses, en outre, ne sont pas documentées et ne procèdent pas d'une stratégie globale de réforme de l'État, qui fait défaut.

Nous déplorons que vous teniez un double discours : sérieux à l'égard de la Commission européenne - qui n'est pas dupe - rassurant à l'égard des Français. Résultat : un non-discours, inadapté à notre situation économique, faute de stratégie et de méthode. Ce faisant, vous hypothéquez l'avenir. Notre pays a besoin d'une véritable politique de compétitivité.

M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances.  - L'irresponsabilité, c'était avant !

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx.  - Nous devons adapter notre modèle, comme l'ont fait avant nous l'Allemagne, la Suède et le Canada. La réduction des dépenses doit être une priorité, de même que le recentrage des interventions de l'État. Il en va de la crédibilité de la France en Europe. Monsieur le ministre, nous vous demandons de réagir, de prendre la mesure de la gravité de la situation. L'annonce de la remise à plat de la fiscalité témoigne du fait que le Gouvernement a épuisé toutes les solutions (Mme Michèle André proteste). Et le projet de loi de finances rectificative annonce une chute de 11,2 milliards d'euros de recettes fiscales, qui affecte tous les impôts et taxes (seules celles liées à l'ISF progressent très légèrement) : voilà la réalité, l'argent ne rentre pas dans les caisses !

M. Roger Karoutchi.  - Eh oui !

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx.  - Je ne voterai pas le projet de budget, qui ne trace nullement le chemin approprié pour redresser le pays et respecter nos engagements européens. (Applaudissements sur les bancs UMP et UDI-UC)

M. Aymeri de Montesquiou .  - Pendant la première année du quinquennat, le Gouvernement a estimé que la baisse de la dépense était plus récessive que la hausse des impôts. Dans la mondialisation, ce n'est plus vrai...

Jean-Pierre Caffet.  - Pourquoi ?

M. Aymeri de Montesquiou.  - Le Premier ministre a annoncé que seuls 10 % des Français seraient touchés par les hausses d'impôts : ils le sont tous et estiment que « trop, c'est trop » ! Le Premier ministre fait du Raymond Devos : ce serait moins bien, si c'était pire. Et le ministre de l'économie abuse de la méthode Coué. Son optimisme serait louable s'il n'était inquiétant.

Messieurs les ministres, allez sur le terrain, vous y sentirez le malaise et l'angoisse : en un an, les défaillances d'entreprises ont augmenté de 16,5 %. Lisez les pages d'annonces légales des journaux locaux ! Les dépenses ne baissent nullement de 15 milliards, comme cela est claironné. La pression fiscale augmente, elle, bien plus fortement qu'annoncé. Au total, ce sont entre 12,5 et 13,5 milliards d'euros d'impôts supplémentaires.

Les collectivités territoriales doivent contribuer, soit. La DGF baisse de 1,5 milliard, mais que l'État donne l'exemple ! Tous les juges de paix des finances publiques sont unanimes, mais vous ignorez leurs mises en garde. Le HCFP estime plausibles vos hypothèses de croissance, mais optimistes vos prévisions d'emplois. La Commission européenne, elle, vous avertit des limites de vos choix, en matière sociale. Le TSCG impose la convergence européenne : où est-elle ? L'OCDE, réservée sur la compétitivité française, préconise une réforme de la fiscalité et du marché du travail. Les déclarations et hésitations du président de la République et du Premier ministre finissent par exaspérer : écotaxe, taxe sur l'EBE... et vous obligent à relever le taux de l'IS jusqu'à 38 %, soit le plus élevé de l'Union européenne. Pour mémoire, le Royaume-Uni est à 23 %, l'Allemagne et l'Espagne à 30 %, l'Italie à 31,4 %.

La France taxe encore davantage les entreprises, au risque de tuer leurs capacités d'investissements et de s'isoler en Europe.

La taxe à 75 % rapporte peu et coûte beaucoup, symboliquement et économiquement. Son transfert sur les entreprises est atterrant, qui va dissuader davantage les investissements directs étrangers.

Prenez exemple sur les États comparables au nôtre, qui ont réussi à se redresser : la Suède, le Canada, les Pays-Bas. La première a choisi de se réformer en profondeur, d'alléger la pression fiscale sur ses entreprises, en portant la TVA à 25 %.

Lisez la presse internationale ! Vous donnez l'image désastreuse d'un pays arrogant à l'extérieur et stérilisant à l'intérieur ; bref, incapable de réformer. Vous avez hérité d'une situation difficile...

M. Richard Yung.  - Cela, c'est vrai !

M. Claude Haut.  - D'accord !

M. Aymeri de Montesquiou.  - Vous l'avez aggravée !

M. Jacky Le Menn.  - Mais non !

M. Aymeri de Montesquiou.  - En dix-huit mois, la dette a augmenté de 195 milliards d'euros. Profitez des assises de la fiscalité en 2014 pour redonner aux Français de l'envie et de l'espoir, mettre un terme à l'instabilité et à l'iniquité fiscale et pour éviter que leur inquiétude se transforme en angoisse et leur angoisse en révolte. (Applaudissements sur les bancs UMP)

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - Très bien !

M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances.  - Tel un bonnet rouge, vous appelez à la révolte !

M. Aymeri de Montesquiou.  - Mais non !

M. Claude Haut .  - Le projet de budget se caractérise par son sérieux...

M. Roger Karoutchi.  - Ah ?

M. Claude Haut.  - ... sa rigueur, sans hypothéquer les chances de reprise.

M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances.  - Très Bien !

M. Claude Haut.  - De nombreuses collectivités territoriales sont disposées à vous aider et à prendre leur part du redressement des finances publiques, tout en soutenant l'investissement local. Leur dotation diminue toutefois dans une proportion sans précédent en 2014, 2015 et 2016. Nous comprenons cet effort, légitime.

M. Francis Delattre.  - Pas nous !

M. Claude Haut.  - Vous avez changé d'avis !

M. Claude Haut.  - Les efforts de 15 milliards d'euros de l'État et de 6 milliards d'euros de la sécurité sociale sont inédits : il était difficile de ne rien demander aux collectivités territoriales. Fin 2011, le précédent gouvernement entendait baisser ces dotations de 2 milliards par an pendant cinq ans...

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - Vous les baissez beaucoup plus !

M. Claude Haut.  - Cette décision avait été prise à la sauvette... (Mme Marie-Hélène Des Esgaulx et M. Francis Delattre protestent)

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - Nous y avons consacré de longs débats...

M. Claude Haut.  - L'effort consenti est équitablement réparti entre les différentes strates de collectivités.

Ces dernières vont devoir apprendre à faire mieux avec moins. Elles n'ont pas attendu la recommandation de la Cour des comptes, qui sont toujours bienvenues, pour rationaliser leurs politiques. Mais leurs dépenses sont en partie incompressibles, et de nouvelles charges leur ont été transférées. Leurs efforts doivent être pleinement reconnus. Elles participent à 70 % à l'investissement public, elles font vivre au quotidien les entreprises sur les territoires.

Monsieur le ministre, nous avons apprécié votre volonté d'écoute, notamment sur le FCTVA qui, symbole du soutien de l'État aux collectivités territoriales, devrait évoluer.

Ce budget, et c'est une satisfaction, conforte les mécanismes de péréquation. La péréquation verticale progressera de 119 millions d'euros.

Nous devons tout faire, effectivement, pour que l'investissement des collectivités territoriales soutienne la croissance. En période d'élection, l'investissement local risque de diminuer : prenons-y garde.

Accentuons en outre les efforts faits pour juguler l'inflation normative.

Monsieur le ministre, vous avez reçu plusieurs fois les départements, nous vous en savons gré. Leur situation est difficile. Parce que l'avenir, c'est donner confiance en la jeunesse ; le ministre de l'éducation nationale a lancé la refondation de l'école de la République, réforme qui redonne toute sa place aux collectivités territoriales : nous nous en réjouissons.

Pour une fois, avec la réforme des rythmes scolaires, l'avenir de nos enfants est au coeur des débats.

M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances.  - Beau sujet !

M. Claude Haut.  - Le Gouvernement a répondu en partie à nos inquiétudes en annonçant la reconduction du fonds d'amorçage pour 2014-2015 qui sera de 370 millions d'euros et en assouplissant les normes d'encadrement. Reste que toutes nos actions ont un coût. À nous d'arbitrer en gardant à l'esprit que l'avenir de nos enfants doit rester une priorité ! Trois mois après la rentrée, il est trop tôt pour tirer un bilan ; poursuivons nos efforts.

Le budget 2014 est sérieux, juste, rigoureux, fondé sur des hypothèses crédibles. Les sénateurs socialistes le soutiendront. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Thierry Foucaud .  - Éric Bocquet a souligné la nécessité de conduire une action publique nouvelle. La situation peu satisfaisante ne suscite que de la résignation. Le Gouvernement capitule devant les marchés financiers, les oukases de la Commission européenne, et de tous ses adversaires politiques.

Les charges sociales ne sont rien d'autre que des composantes du revenu des ménages : ne pas le voir, c'est renoncer à nos principes.

M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances.  - Alors, il y a les purs et les mauvais !

M. Thierry Foucaud.  - Monsieur le ministre du budget, vous aviez annoncé vouloir vous attaquer aux niches fiscales. Notre fiscalité nécessite un sérieux coup de balai. Le projet de loi de finances prévoit 285 milliards d'euros de recettes pour faire face à ses obligations, qui proviennent en majeure partie de la TVA et de la TICPE.

L'IR dépasse les 70 milliards d'euros, grâce à l'élargissement de son assiette et à la réforme du quotient familial pour 13 milliards d'euros. Il y avait d'autres points et dont le résultat aurait été autrement considérable. L'impôt sur les sociétés se porte moins bien : 36 milliards d'euros. C'est faible : une entreprise moyenne est libérée en six jours d'activité du poids de son impôt sur les sociétés.

La fiscalité affectée a progressé quatre fois plus vite que les ressources budgétaires nettes. La CSG est le meilleur exemple, suivi par les droits sur les tabacs et alcools. La CSG est l'impôt qui pèse le plus sur les plus modestes. Son produit augmente sans douleur tous les ans. Bref, l'étatisation de la sécurité sociale est une réalité.

Les niches fiscales représentent 230 milliards, dont 165 au seul bénéfice des entreprises. Étrange pays, où l'impôt sur les sociétés rapporte 36 milliards, et où nous rendons 165 milliards d'euros sous une forme ou sous une autre aux entreprises, sans compter les allègements de cotisations sociales et les réductions d'impôts locaux... Qui critique « l'assistanat » ? C'est oublier les entreprises dont les obligations financières sont allégées à hauteur de 10 % du PIB...

À cela s'ajoute le manque à gagner considérable de 60 à 80 milliards d'euros liés à la fraude fiscale. Ce sont les marges de manoeuvre. De ce tableau que je viens de dresser, se dégage l'ordre des priorités pour rendre notre système plus juste et plus efficace : passons de la résignation du traité budgétaire européen à l'audace et à l'initiative. Prendre dans la poche des collectivités territoriales est parfaitement inutile. Pour les comptables bruxellois, c'est d'ailleurs du pareil au même. Ce milliard et demi qu'on s'apprête à leur retirer aura un impact sur la croissance, l'emploi et surtout l'investissement public. Le sort de France Télévisions n'est guère plus enviable, qui a arrêté un plan social pour contribuer à l'effort de rigueur demandé par le Gouvernement. Je passe sur la fiscalité punitive par manque de temps. Bref, il y a du grain à moudre sur la fiscalité des entreprises : nous ferons des propositions pour pénaliser leurs comportements spéculatifs.

S'il ne change pas profondément dans le sens que nous préconisons, nous rejetterons ce budget sans ambages. (Applaudissements sur les bancs CRC)

M. Yvon Collin .  - Redresser nos finances publiques, favoriser la croissance et l'emploi : tels sont les objectifs de ce budget.

M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances.  - Très bien.

M. Yvon Collin.  - Je les partage, mais l'annonce d'une remise à plat de la fiscalité m'inquiète. Nous sommes favorables au principe d'une telle réforme, qui doit inclure la fusion de l'IR et de la CSG en un unique impôt progressif, souhaité de longue date par les radicaux. Dois-je rappeler que ce fut l'un des leurs, Joseph Caillaux, qui institua l'impôt sur le revenu progressif en 1907 ? La réforme doit être juste et ambitieuse car elle suscite des attentes fortes des ménages et des entreprises. Je me réjouis que le Haut Conseil des finances publiques ait été saisi de ce dossier très technique.

Nous préconisons également un impôt progressif sur les entreprises, à rebours de la dégressivité effective actuelle. Ces impôts devront reposer sur des assiettes larges, actuellement trouées par les niches fiscales, afin de consolider le consentement à l'impôt, pilier de notre pacte républicain.

Le nouveau système devra être stable et lisible, afin de soutenir la croissance. Je me réjouis que le budget préserve les ménages aux revenus modestes. Nous proposerons d'aller plus loin en revalorisant la décote sur l'IR. On peut s'interroger sur la constitutionnalité de l'article 8.

Un sentiment d'impréparation sur la fiscalité des entreprises a alimenté la contestation ; cette fiscalité doit favoriser l'investissement, notamment des PME. L'an dernier, vous aviez reculé sur la réforme des plus-values mobilières, devant la fronde des pigeons. De même, l'article 10 ne crée plus de taxe sur l'EBE. La hausse de 10,7 % de la contribution exceptionnelle sur l'impôt sur les sociétés qui lui a été substituée est une solution de secours.

Les cotisations sociales employeurs devraient être assises sur la valeur ajoutée nette, et non sur la masse salariale, pour préserver l'emploi. Je me réjouis des mesures relatives à la lutte contre la fraude et l'évasion fiscale. Il faut des mesures radicales pour lutter notamment contre la fraude à la TVA : elles figurent opportunément dans ce texte.

Je regrette d'une part que les moyens consacrés à l'Aide publique au développement (APD) ne soient pas à la hauteur des engagements pris à l'ONU : 0,46 % du PIB, contre 0,7 % prévus ; d'autre part, que les aléas climatiques ne soient pas suffisamment pris en compte dans le budget de l'agriculture.

Ces deux réserves mises à part, nous soutiendrons ce budget. Nous formons le voeu que la réforme fiscale à venir reprenne à son compte les principes fondateurs énoncés aux articles 13 et 14 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen. (Applaudissements sur les bancs du RDSE, ainsi que sur les bancs socialistes)

M. Philippe Bas .  - Monsieur le ministre, j'apprécie votre compétence et la clarté de votre raisonnement et de vos réponses.

M. Roger Karoutchi.  - Solidarité normande !

M. Philippe Bas.  - Ce budget intervient dans une situation qui n'est pas fameuse : le marasme économique. Elle est d'autant plus étonnante à considérer au regard de la croissance économique que connaît le reste du monde. Nous sommes sortis du pic de la crise de l'euro en 2011 grâce au vigoureux traité européen et à la règle d'or. L'étau a été desserré mais les contraintes demeurent et l'urgence commande de retrouver la compétitivité de nos entreprises.

Or nous constatons avec ce budget une aggravation des prélèvements obligatoires, qui passent de 45 à 46,1 %, un record historique pour notre pays. Compte tenu des doutes émis par le Haut Conseil des finances publiques sur les hypothèses qui sous-tendent ce projet de loi de finances, on ne peut que s'inquiéter de l'exécution de ce budget. D'autant plus que nous constatons déjà des moins-values fiscales et que les réformes structurelles ne sont pas là, ce qui n'est guère pour nous rassurer sur la maitrise de la dépense publique. Découvrant le problème de compétitivité, vous avez créé le CICE après avoir supprimé la TVA parce qu'elle venait de vos prédécesseurs. Là encore, les observations du Haut Conseil des finances publiques étaient justes. En somme, rien n'est fait pour stimuler la compétitivité de nos entreprises.

Dans les discours, vous avez abandonné la dichotomie stérile entre taxation des ménages et des entreprises. S'attaquer aux secondes, c'est aussi s'en prendre aux premiers puisque les entreprises sont à l'origine des revenus des ménages. Ceux-ci ne sont pas épargnés : création d'une nouvelle tranche d'imposition, fiscalisation des avantages familiaux, réforme du quotient familial. Avec la création d'une tranche de 45 % pour l'impôt sur le revenu, on arrive, si l'on ajoute la CSG, à 60 % !

Quant aux 15 milliards d'économies de dépenses, encore faudrait-il revoir vos méthodes de calcul. Elles sont réalisées de plus, pour 9 milliards, sur le dos de la sécurité sociale, avec l'affectation de la Casa au FSV, de la défense nationale, en menaçant les Opex...

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué.  - Ce n'est pas vrai !

M. Philippe Bas.  - ... et des collectivités territoriales. La remise en cause des dotations est très grave en ce qu'elle dénonce un pacte et s'accompagne de nouvelles charges telles que la garantie universelle des loyers ou la réforme des rythmes scolaires.

Une remise à plat de la fiscalité ? Nous pourrions y travailler avec vous. Mais sur quel objectif ? On aimerait entendre vos priorités. Pour l'essentiel, les nôtres sont la compétitivité et la croissance, la baisse des prélèvements obligatoires pour les ménages ! (Applaudissements sur les bancs UMP)

M. Vincent Delahaye .  - L'exaspération pointe ! Il y a deux ans, je mettais en garde Mme Pécresse contre un ras-le-bol fiscal. Vous en avez rajouté deux couches entre 2012 et 2013. Les entreprises dénoncent un marché de dupes : vous leur retirez 30 et 40 milliards et leur reversez 20 milliards en crédit d'impôt. Idem pour les ménages : un Français sur dix devait être touché par la hausse d'impôt, ils le sont tous avec la réforme du quotient familial, entre autres. Le Gouvernement annonce une pause fiscale à grand renfort de communication. En réalité, le niveau des prélèvements obligatoires n'a jamais été aussi élevé : 46,12 % du PIB. Plus qu'une pause, il faudrait un reflux. La dette, répétez-vous, s'est accrue de 500 milliards sous le précédent quinquennat ; depuis dix-huit mois, elle s'est aggravée de 195 milliards si bien qu'elle atteindra bientôt 2 000 milliards, soit sept années d'impôts acquittés sans les services publics correspondants.

Dans les collectivités, la ligne rouge est franchie dès lors que l'endettement dépasse une année d'impôt, et l'État en est à sept années ! Heureusement, les marchés sont cléments avec vous.

M. Francis Delattre.  - Pourvu que ça dure !

M. Vincent Delahaye.  - Rendez-vous compte : la charge de la dette équivaut au budget de l'éducation nationale ! La seule solution est la réduction de la dépense, une réduction réelle, pas seulement une moindre augmentation. Même chose sur le déficit structurel : vous vous gargarisez de sa réduction alors que c'est le déficit effectif qu'il faut réduire !

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué.  - C'est le cas.

M. Vincent Delahaye.  - Je ne crois pas que l'on atteindra les 3 % en 2015, ne serait-ce que parce que la réforme des retraites n'a pas été à la hauteur des exigences.

Vous proposez 1,5 milliard de dépenses sur les collectivités territoriales.

M. Gérard Miquel.  - Et vous ?

M. Vincent Delahaye.  - Quand la précédente majorité annonçait une baisse de 200 millions, on entendait...

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - Des cris d'orfraie !

M. Vincent Delahaye.  - Après les pigeons, vous ferez face à la fronde des dindons. Oui, les collectivités territoriales seront les dindons de la farce. On annonce des aides pour accompagner la réforme des rythmes scolaires. Où sont les 50 euros par élève annoncés dans le budget de l'éducation nationale ? Je vois 60 millions, il en faudrait 250.

Vous demandez beaucoup d'efforts aux militaires ; 45 000 postes ont été supprimés ces cinq dernières années. Et pourtant la masse salariale augmente de 500 millions ! C'est à n'y rien comprendre.

Il faudrait faire tout le contraire de ce que vous dites : alléger la pression fiscale et réduire la dépense. Oui à une grande réforme fiscale. Je l'attends depuis longtemps. Mais vous la dites à pression constante alors que celle-ci devrait diminuer. Je m'inquiète d'entendre le Premier ministre dire qu'il prendra ses responsabilités en la matière, « comme il l'a fait sur les retraites ». Je ne peux que m'inquiéter puisque, justement, sur les retraites, il n'a pas pris ses responsabilités.

Le groupe UDI-UC ne votera pas un tel budget. (Applaudissements à droite et au centre)

M. Georges Patient .  - Ce budget réalise 15 milliards d'économies en dépenses tout en accordant 18,3 milliards à l'outre-mer à qui le précédent gouvernement avait imposé une double peine : en sus de la crise, le coup de rabot sur les niches fiscales.

De fait, le soutien à l'outre-mer passait d'abord par la politique fiscale. La réduction des niches n'a pas été compensée par des crédits. Résultat, nous y avons perdu plus de 400 millions d'euros.

Le mérite de ce Gouvernement est de résister à cette pression, d'intervenir avec plus d'équité. Dans ce budget, les crédits pour l'outre-mer sont de 14,3 milliards en autorisations d'engagement et de 14,2 milliards en crédits de paiement, quasiment comme dans le budget de 2013. Pour autant, la part de l'outre-mer dans le budget ne représente pas plus que son poids démographique - soit  4,7 % de la population française - quand il accuse un retard et accumule les difficultés par rapport à l'Hexagone. Les outre-mer ont les critères du Nord mais les conditions du Sud.

Le taux de chômage y est trois fois plus élevé que dans l'Hexagone, à 30 % de la population active. Celui des jeunes de 50 %. Je me réjouis donc de toutes les mesures contenues dans ce budget qui remplissent l'engagement du président de la République, maintien de la défiscalisation sur le logement social, aide à l'investissement. Nous avons besoin de mesures de rattrapage, mais aussi d'une politique tournée vers la croissance et l'emploi. L'assistanat laisse place au développement local et je m'en réjouis. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Roger Karoutchi .  - Tout va pour le mieux ! Les collectivités territoriales sont ponctionnées d'1,5 milliard en 2014, sans doute de 3 en 2015 et peut-être d'encore 1 milliard en 2016.

M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances.  - C'est vous qui avez vidé les caisses !

M. Roger Karoutchi.  - Tout le monde se souvient du niveau sonore qu'avait provoqué l'annonce, par le gouvernement précédent, d'une réduction de 200 millions des dotations des collectivités territoriales. Vingt fois plus, le silence. Les collectivités territoriales n'ont plus les moyens.

Les ménages sont-ils heureux ?

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - Oh oui ! Bien sûr !

M. Roger Karoutchi.  - Prenez tous les sondages : 67 % des Français sont prêts à se mobiliser contre la pression fiscale, 85 % considèrent que cette politique fiscale encourage le travail au noir. Ils sont une écrasante majorité à déclarer vouloir quitter le territoire. Une décollecte d'1,44 milliard pour le Livret A, encore un bon signe : les Français puisent dans leur petit bas de laine !

Plus personne ne croit que nous atteindrons l'équilibre en 2017. Et pourtant, les ménages voient leur pouvoir d'achat baisser ; les entreprises voient leurs ressources grevées.

La Coface s'alarme. Une hausse de 7 % des faillites dans le bâtiment. Selon un quotidien de ce soir, il y a eu 44 000 faillites dans les douze derniers mois, record absolu ! La vérité est qu'un budget doit faire vivre les ménages et les entreprises une fois les impôts acquittés. Nous sommes au bout du bout de la pression fiscale. Le FMI et la Commission européenne l'ont reconnu.

Voilà que le Premier ministre annonce, contredisant son ministre de l'économie, une réforme globale de la fiscalité. M. Bas, avec sa nature généreuse, se dit prêt à y travailler. Reste que nous ne comprenons pas votre série de mesures sur la fiscalité des ménages. Bel inventaire : quotient familial, fiscalisation des avantages familiaux, fin des aides pour les enfants scolarisés. Vous parlez d'héritage, de rupture et vous êtes responsables de 200 milliards supplémentaires de dettes. Au-delà, plus de volonté, plus de crédit, plus de confiance. Les Français ne vous croient plus, les investisseurs se détournent. Les années 2014 et 2015 vont être terribles ! Le budget doit être l'expression d'une volonté économique ; vous abdiquez en créant des taxes. C'est encourager le populisme ; il sera facile de dire : « eux aussi, ils n'ont pas fait le boulot » !

En vérité, les Français, pardon de reprendre l'expression de M. Moscovici, en ont « ras-le-bol » !

M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances.  - Vous avez voté la TVA sociale !

M. Jean Germain .  - J'essaierai d'aborder ce débat avec objectivité et de formuler des propositions car c'est le rôle du Parlement. Merci, monsieur le ministre, pour votre attitude envers notre commission des finances. En ce qui me concerne, je trouve bien une stratégie budgétaire dans ce projet de loi de finances.

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué.  - Merci.

M. Jean Germain.  - Dans cette stratégie, je vois la réforme des retraites, la MAP, le respect de nos engagements européens et l'annonce d'une réforme fiscale avec la suppression d'un certain nombre de niches fiscales. Peut-être faudrait-il plus pénaliser les rentiers et favoriser les innovateurs et les créateurs. On ne peut plus laisser prospérer la dette, vos mesures vont dans ce sens. Au bout du compte, votre courage sera reconnu. Je rappelle que Clemenceau fut très impopulaire avant d'être préféré à Raymond Poincaré.

M. Jean-Pierre Caffet.  - Belle comparaison !

M. Jean Germain.  - Nous avons tort de dire que la dette a le plus augmenté sous la présidence de Nicolas Sarkozy. C'est faux. La hausse a connu un pic de 47 à 52 % sous le gouvernement Balladur avec Nicolas Sarkozy comme ministre du budget...

M. Francis Delattre.  - Il héritait du budget de Pierre Bérégovoy !

M. Jean Germain.  - Nous avons un chômage de masse, bien qu'il baisse, en particulier chez les jeunes. Nous sentons pourtant monter des tendances populistes centrifuges en Europe. Monsieur le ministre, vous avez réussi à mutualiser les dettes. Tout en se méfiant des plans de relance, parce qu'il faut ensuite freiner brutalement et que c'est dangereux par temps de verglas, comme disait François Mitterrand, nous avons besoin d'investissements massifs. Ce plan de relance devra être adossé à une taxe européenne, qu'elle porte sur les transactions financières ou sur le carbone, et pas sur une contribution volontaire des États. C'est ainsi que nous redresserons la situation et redonnerons le goût de l'Europe aux jeunes, cent ans après le déclenchement de la Première Guerre mondiale. Non, on n'a pas tout essayé. La preuve, Mme Merkel vient d'annoncer qu'elle acceptait l'instauration d'un salaire minimal en Allemagne.

Si la France est notre patrie, l'Europe est notre avenir ! (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Dominique de Legge .  - Ce budget serait exemplaire. À voir les chiffres de Bercy, il n'en est rien : le déficit progresse, la pause fiscale n'est pas pour maintenant et la dépense publique n'est pas tenue. Il y a de quoi s'étonner du discours de M. Moscovici ce matin.

Je concentrerai mon intervention sur la réduction des dépenses : 1,4 milliard de moins pour les collectivités territoriales, ce sont elles qui portent tout le poids. Les économies de l'État sont totalement virtuelles, elles ne portent que sur des hausses tendancielles ! Si les collectivités territoriales ne peuvent pas s'exonérer de l'effort demandé à tous, souvenez-vous des cris d'orfraie lors de l'annonce d'une réduction des dotations de 200 millions sous la précédente majorité. Dois-je rappeler les propos de Mme Bricq, alors rapporteure générale, le 22 novembre 2011 ?

M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances.  - C'était avant !

M. Dominique de Legge.  - Non, peut-être ceux de M. Marc alors, ou des ministres il y a quelques semaines. Oui, j'ai de bonnes lectures ! L'inacceptable hier devient acceptable aujourd'hui ; cela mérite assurément quelques explications.

M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances.  - Et le pacte, vous l'oubliez ?

M. Dominique de Legge.  - Au détour d'un décret du ministre de l'éducation nationale, vous transférez de nouvelles charges aux collectivités territoriales sans crédits correspondants : la fameuse réforme des rythmes scolaires.

Où est donc passé l'engagement n° 54 du candidat Hollande ? Remarquez le glissement : le « pacte de confiance et de solidarité » est devenu un « pacte de confiance et de responsabilité ».

Parce que ce budget ne traduit ni l'une ni l'autre, le groupe UMP votera contre. (Applaudissements sur les bancs UMP)

M. Gérard Miquel .  - L'exercice est convenu : l'opposition s'oppose, la majorité soutient largement. Pour réformer, il faut de la durée. Vous l'avez eue.

Vous avez été au pouvoir pendant dix ans ! Et vous avez affaibli la France, multiplié la dette, décrédibilisé la politique auprès des Français et jeté en pâture les élus locaux !

M. Gérard Miquel.  - Compte tenu de la situation, notre pays mérite un débat d'un autre niveau.

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - Assurément !

M. Gérard Miquel.  - Je m'en tiendrai aux questions relatives aux collectivités territoriales.

La réforme de la taxe professionnelle a été faite à la hussarde. Résultat : les recettes ont fondu.

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx.  - Tout le monde demandait qu'on la supprime !

M. Gérard Miquel.  - Les collectivités territoriales doivent prendre leur part de l'effort de redressement de la nation. Mais il faut le répartir équitablement.

Les départements sont une collectivité ancienne. Leurs compétences sont larges, mais n'ont pas toujours été accompagnées des financements nécessaires.

Au Congrès des maires, d'aucuns ont dit que les départements étaient l'ennemi des communes. D'autres, MM. Juppé et Fillon veulent les supprimer. J'y vois une source non d'économies, mais de dépenses supplémentaires.

Les départements gèrent l'allocation personnalisée d'autonomie, la prestation du handicap et le RSA. Or nous n'en maîtrisons pas les évolutions.

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx.  - Supprimons la clause générale de compétence !

M. Gérard Miquel.  - Cela n'a rien à voir ! Pour la première fois, le Gouvernement entend apporter des compensations aux charges croissantes que supportent les départements. Un fonds de secours de 170 millions a été créé, s'y ajoutent les 827 millions de l'article 28. Avec le prélèvement de 0,35 sur les DMTO plafonné à 12 % pour les départements pauvres qui n'ont pas beaucoup de DMTO, nous aurons 570 millions à répartir. Un seul critère de répartition est recevable : le reste à charge par habitant.

Le reste à charge dans les Hauts-de-Seine est de 66 euros, de 136 euros en Corrèze et de 70 euros dans le Jura. Il atteint 158 euros dans l'Hérault. Notre seul objectif doit être de réduire ces écarts.

Nous avons fait des efforts de rigueur et nous devons continuer à investir. Monsieur le ministre, veillez à une répartition équitable.

Ce budget, qui intervient dans une période difficile, est un bon budget. Toutefois, nous n'examinerons sans doute pas sa deuxième partie. Je le regrette.

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - C'est le problème de la majorité !

M. Gérard Miquel.  - Le groupe socialiste ne vous ménagera pas son soutien, comme nous l'avons fait l'an passé. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Francis Delattre .  - La reprise est là, c'est indéniable, c'est incontestable. (Sourires à droite)

M. Albéric de Montgolfier.  - - 0,1 % !

M. Francis Delattre.  - M. Moscovici et M. Cazeneuve sont les seuls à l'apercevoir. C'est le Désert des Tartares. Comme le lieutenant Drogo, ils attendent la gloire, retranchés au fort de Bercy, où leur garnison habile invente chaque semaine une nouvelle taxe, hissant la France en championne des prélèvements obligatoires.

L'Allemagne, au contraire, a vu son niveau de prélèvements obligatoires diminuer de 5 points. Monsieur Germain, n'oubliez pas l'histoire : en 1993 le budget Bérégovoy avait doublé le déficit, situation que le gouvernement Balladur a dû redresser.

Les petites entreprises sont en difficulté. La production industrielle a diminué de 1,4 % au troisième trimestre, la production manufacturière de 2 % par rapport à l'année dernière. 170 000 emplois ont été détruits en un an ; 4 000 mercredi dernier, en un seul jour ! Le chômage augmente. La France a perdu deux places dans le classement des pays compétitifs de Davos, à la 23e place. L'investissement des entreprises diminue et l'on persiste à s'interroger sur la déductibilité fiscale des intérêts d'emprunt. Les exportations, elles aussi, chutent. Les Français sont en colère et ne croient plus en votre capacité politique à relever les défis.

La pause fiscale a été annoncée, puis reportée à 2015 par le Premier ministre. Il y a eu une pause politique « hollandaise », un moment de répit entre deux dévissages nous entraînant dans la chute. Les Français sont tellement abasourdis par les taxes nouvelles qu'ils ne peuvent qu'être favorables à une grande réforme, l'engagement n° 14. Bien joué !

François Hollande regarde l'économie comme s'il n'existait que deux facteurs de production : le capital et le travail. Max Weber y ajoutait la confiance. Notre note souveraine a été abaissée par Standard & Poor's. Nous perdons en crédit ; nous perdons la confiance des marchés. Après les revirements, les reculades, les contradictions, quel cap ? Lorsque la confiance s'évanouit, il n'est plus possible de lancer les réformes structurelles dont nous avons besoin. Désormais, l'Espagne, l'Italie et le Portugal nous prennent des parts de marché !

Ce budget rend la politique fiscale illisible alors qu'elle va matraquer surtout les classes moyennes, les familles et les retraités, au risque de saper le consentement à l'impôt, ciment de notre pacte républicain. En attendant, les rentrées fiscales diminuent, confirmant la courbe de Laffer ; trop d'impôt tue l'impôt, et les classes populaires découvrent qu'elles paieront des impôts sur le revenu. La hausse du malus automobile, c'est aberrant pour la ruralité ! La taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques, punira ceux qui se chauffent au gaz.

Vous privez les acteurs économiques de la lisibilité dont ils ont besoin. Nous sommes, d'après Les Échos de ce matin, le pays qui taxe le plus ses entreprises à 64,7 %, loin de la moyenne européenne de 41,1 %. Vous avez annoncé, monsieur le ministre, que les prélèvements sur les entreprises baisseraient en 2014 : nous attendons de voir.

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué.  - Nous le ferons !

M. Francis Delattre.  - Le déficit est passé de 63 à 72 milliards. Nous allons voter une loi de finances avant d'avoir ajusté les rentrées fiscales de la précédente. Nous sommes en matière de finances publiques, sur une scène de théâtre.

La séance est suspendue à 19 h 20.

présidence de Mme Bariza Khiari,vice-présidente

La séance reprend à 19 h 40.

Question prioritaire de constitutionnalité

Mme la présidente.  - M. le président du Conseil constitutionnel a informé le Sénat, le jeudi 21 novembre 2013, qu'en application de l'article 61-1 de la Constitution, la Cour de cassation a adressé au Conseil constitutionnel une décision de renvoi d'une question prioritaire de constitutionnalité portant sur l'article 50 de la loi du 29 décembre 2012 (Versement transport des syndicats mixtes).

Loi de finances pour 2014 (Suite)

Mme la présidente.  - Nous reprenons l'examen du projet de loi de finances pour 2014.

Discussion générale (Suite)

M. Richard Yung .  - Toute une stratégie de redressement des finances publiques est à l'oeuvre dans ce projet. Après le collectif de juillet, le déficit a diminué l'an dernier ; un mouvement qui s'amplifiera en 2014.

L'effort de maîtrise du déficit est de 18 milliards, je le dis car j'ai entendu des contrevérités tout à l'heure. La Commission européenne l'a elle-même reconnu. Cet effort porte à 80 % sur des économies de dépenses, ce qui est inédit. Bref, le sérieux budgétaire est au rendez-vous, le Haut Conseil des finances publiques l'a souligné. Le commissaire Olli Rehn et le président Barroso le reconnaissent. Le projet de budget est « tout à fait digne de considération » a dit Bruxelles. Alors, oui, il y a eu des articles dans le Wall Street Journal et The Economist : ces journaux ont le French hashing pour fonds de commerce. Quant aux agences de notation, dont Mme Des Esgaulx parlait avec des trémolos dans la voix, leur avis ne vaut pas grand-chose : nous avons dû les mettre sous tutelle parce qu'elles sont juges et parties. Gardons plutôt à l'esprit l'avis de Bruxelles et du Haut Conseil. Cette dynamique de redressement ne doit pas en casser une autre, celle de la croissance. Le sérieux ne doit pas dériver en austérité dont M. Blanchard, économiste en chef du FMI, a montré l'effet récessif. La relance sera européenne ou ne sera pas, M. Germain a raison.

Je vois des raisons d'espérer.

L'Allemagne, lentement mais sûrement, change de pied. Et une politique de soutien à la croissance se fait jour en Europe, grâce à l'initiative franco-italienne. Bref, il y a des raisons d'espérer en Europe.

Notre avenir passe par les programmes d'investissements d'avenir. Les crédits du premier programme de 2010, seront bientôt consommés. Ceux du deuxième soutiendront l'innovation, la recherche et accéléreront la transition écologique et énergétique.

À l'Assemblée nationale certains députés, de mauvaise foi ?, souhaitaient intégrer ces 12 milliards dans le déficit 2014. Sauf que ces dépenses ont pour une grande partie vocation à créer des actifs.

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - Mais financés par de la dette !

M. Richard Yung.  - Le Gouvernement répondra. Reste que ces 12 milliards seront versés aux opérateurs de l'État et ne pèseront pas sur la dette : convertis en partie en actifs non consomptibles, ils seront stockés sur un compte au Trésor. Le reste est constitué de prêts et d'avances remboursables. Les modes de financements sont intelligents et variés. Les intérêts de l'État sont préservés. Je salue cette excellente initiative du Gouvernement pour faire de la France un pays volontariste et visionnaire. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Edmond Hervé .  - Monsieur le ministre, je préfère votre sincérité courageuse à certaines exigences passionnément oublieuses. Le Premier ministre a récemment fait l'annonce d'une remise à plat de notre système fiscal. C'est une excellente initiative, au moment où une partie de l'opinion verse dans l'irrationnel et le contradictoire. Notre système doit gagner en justice, en efficacité et en simplicité. Le temps fiscal, en France, est long. En 1990, j'avais voté la création d'une taxe départementale, réforme mort-née. Je plaide aujourd'hui pour la fusion entre l'impôt sur le revenu et la CSG.

Michel Bouvier, expert en droit fiscal, déplorait récemment le désarroi fiscal que rapportent toutes les enquêtes. Les jeunes, en particulier, consentent faiblement à l'impôt et légitiment l'exil fiscal. Ces personnes, simultanément, réclament davantage de services publics et de protection sociale. Les élus quant à eux réclament plus de subventions. On ne peut réduire, toutefois, le débat fiscal au « trop d'impôts !» libéral. Parlons justice fiscale et service des populations.

En 1990, la CSG a été adoptée dans des conditions particulières ; il s'en est fallu de peu qu'une motion de censure l'emporte. Son assiette s'est depuis élargie, et ses taux ont été multipliés. L'impôt sur le revenu, lui, n'est plus à sa place et de nombreuses mesures en ont réduit le poids. La fusion des deux fait son chemin. Nous débattrons sans doute du dilemme entre progressivité et proportionnalité.

J'en viens au pacte de confiance et de responsabilité, lancé en mars et dont un relevé détaillé a été fait en juillet 2013. Au Congrès des maires, le Premier ministre a insisté sur l'effort de péréquation. On n'aboutira pas sans révision des valeurs locatives. Des engagements forts ont été pris pour limiter l'inflation normative et préserver l'investissement des collectivités.

Je suis un fervent partisan des relations contractuelles entre les différents niveaux de collectivités. Laurent Davezies, dans un récent article du Monde, soulignait que les six premières métropoles françaises étaient des locomotives, tirant de nombreux wagons de notre territoire grâce à leur production et leurs transferts.

Voilà les éléments objectifs qui doivent nous réunir car l'important en politique est de rendre visible, ce qui est vrai ! (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Serge Dassault .  - Malgré les multiples critiques de la Cour des comptes, de Bruxelles, de l'OCDE et la dégradation de notre note par Standard & Poor's, vous ne voulez rien entendre. Vous êtes toujours aussi serein et confiant dans une politique qui manifestement ne convient pas : le chômage progresse, la croissance ne redémarre pas. Le CICE et l'emploi aidé n'y changeront rien. Vous continuez de dénoncer l'héritage...

Mme Michèle André.  - Il pèse !

M. Serge Dassault.  - ... en refusant de voir la situation que vous créez. En économie, ce qui compte, ce n'est pas l'idéologie, la croyance, c'est l'efficacité.

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - Très juste.

M. Serge Dassault.  - Tout le monde peut se tromper, prendre une mauvaise voie, il n'est pas trop tard pour changer. Quoique... Les manifestations de rue se multiplient, les jeunes diplômés s'en vont à l'étranger. Il ne restera bientôt plus que des fonctionnaires, des chômeurs et des retraités...(Sourires)

M. Serge Dassault.  - Laissez-moi vous donner des pistes prouvant « qu'une bonne politique n'est ni de gauche ni de droite, c'est celle qui marche », comme l'a dit Tony Blair.

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - « Peu importe que le chat soit noir ou gris, pourvu qu'il attrape des souris », disait Deng Xiaoping !

M. Serge Dassault.  - Encouragez les entrepreneurs, moteurs de l'emploi et de la croissance, pourvu qu'ils puissent vendre leurs produits et ne pas être accablés de charges. Supprimez des impôts, réduisez les prélèvements obligatoires, plutôt que les augmenter sans arrêt, finissez-en avec le financement de l'État providence et les emplois aidés dans le secteur non marchand. Ce n'est pas à l'État de payer l'impôt à la place des contribuables, ce en quoi consistent les exonérations de charges liées aux 35 heures, sur lesquelles il faut revenir, car elles creusent le déficit budgétaire et dégradent les comptes des entreprises. Supprimez l'impôt sur les patrimoines, créé par François Mitterrand, mais que ni Jacques Chirac ni Nicolas Sarkozy n'ont aboli.

On pourrait faire comme la Russie ex-communiste : instaurer une flat tax sur tous les revenus à un taux unique de 13 %.

M. Albéric de Montgolfier.  - Génial ! (M. Philippe Marini, président de la commission des finances, le confirme)

M. Serge Dassault.  - Il faut absolument baisser le coût du travail, j'ai déposé une proposition de loi qui transfère les cotisations maladie et famille des salaires sur les frais généraux des entreprises, ce qui ne coûtera rien à l'État, supprimera le déficit de la sécurité sociale et allègera de 55 % les charges sur les salaires. Il faut accroître en outre la flexibilité du travail, créer des contrats de projets, et relever les seuils sociaux de 10 à 15 pour les artisans et de 50 à 75 pour les PME : les emplois créés seront bien plus nombreux que n'importe quels contrats d'avenir, immédiats et ne coûteront rien.

Il faut oser dire la vérité aux Français. Je vais vous donner la clé de la réussite : dire, comme Deng Xiaoping, « Enrichissez-vous » !

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - Très Bien !

M. Jean-Pierre Caffet.  - Ce n'est pas Deng, c'est Guizot !

M. Serge Dassault.  - La richesse seule crée la richesse, supprimez- la et vous n'aurez que de la pauvreté. (Applaudissements sur les bancs UMP)

M. Michel Berson .  - Globalement, la priorité donnée à la recherche a préservé le secteur des nécessaires régulations budgétaires. Avec des crédits à 14 milliards d'euros, ce budget est sanctuarisé. En revanche, les crédits fléchés vers le financement par projet alimentent les inquiétudes de la communauté scientifique.

La subvention effectivement versée à l'Agence nationale de la recherche (ANR) inscrite en loi de finances initiale pour 2012 était de 760 millions d'euros en 2012, 687 millions en 2013. Mais seuls 593 millions d'euros furent effectivement versés, après déduction de la réserve de précaution ; le repli sera encore plus marqué après le décret d'avance qui amputera les ressources de l'agence de 155 millions supplémentaires.

Le mouvement se poursuit avec une dotation effective de 564 millions dans le budget pour 2014. Pas moins de 30 % de baisse en deux ans, on ne peut que le déplorer : comment l'agence fera-t-elle face à ses engagements pluriannuels sans transfert des crédits sur projets vers les crédits récurrents ?

Notre agence enregistre de beaux taux de succès, même s'ils sont inférieurs à ceux des autres agences européennes et des programmes européens. Cette baisse, qui découragera les équipes, frappera les programmes non thématiques, dits blancs, qui représentent 30 % des recherches en laboratoire. La priorité donnée aux crédits récurrents est un choix que la France fait, seule, en Europe. Il serait souhaitable, pour les années qui viennent, de rétablir l'indicateur 2.1 du programme 172, supprimé du programme annuel de performance 2013, et qui mesure précisément l'évolution de la part respective des financements sur projets et des financements récurrents dans les programmes de recherches. Certes, il y a les investissements d'avenir ; ils représentent cependant seulement 15 % des crédits publics alloués à la recherche.

Il y a de quoi s'étonner de cette réduction des crédits de l'ANR et de s'interroger sur sa place dans le financement de la recherche. La loi de 2005 qui la créait prévoyait la conclusion d'une convention d'objectifs et de moyens ; il est temps d'y venir et de clarifier les choses. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué .  - Merci à tous les orateurs de leur contribution à ce débat. Aux sénatrices et sénateurs de la majorité, j'apprécie votre soutien. Aux sénatrices et sénateurs de l'opposition, je m'attendais à vos propos : ils étaient parfaitement conformes à ceux que j'ai entendus à l'Assemblée nationale.

Je suis prêt à ne pas invoquer l'héritage, comme me l'a demandé M. Arthuis, à condition qu'on n'occulte pas le fait que nous sommes arrivés au pouvoir il y a dix-huit mois. On ne peut pas nous reprocher ce que d'autres n'ont pas fait en dix ans.

Sur la dépense publique, voilà que l'opposition considère qu'il faudrait la baisser de manière drastique. Elle a augmenté de 170 milliards entre 2007 et 2012, soit de 1,7 %, après une augmentation de 2,3 % entre 2002 et 2007. Elle ne progresse plus que de 0,4 % : nous avons divisé son rythme de progression par cinq en dix-huit mois ! Que n'avez-vous donc fait ?

M. Francis Delattre.  - Nous n'étions pas tous ministres !

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - Donneur de leçons ! Vous n'acceptez pas que l'opposition s'exprime !

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué.  - C'est grandement souhaitable pour la démocratie. Rien ne me chagrinerait plus que de susciter votre irritation, monsieur Marini ! Souffrez néanmoins que je rappelle les faits et les chiffres.

L'évolution tendancielle de la baisse ? M. Baroin et Mme Pécresse s'y référaient déjà, la Cour des comptes et la Commission européenne la reconnaissent comme l'alpha et l'oméga de la bonne gestion. Nos 15 milliards d'économie, en un an seulement, soit 5 milliards de plus que les 10 milliards qu'ils projetaient d'atteindre en trois ans, ne seraient pas réellement une économie ?

Parlons du déficit : quand il passe de 5,3 % à 4,8 %, puis à 4,1 %, avec un objectif de 3,6 % pour l'année suivante, s'envole-t-il ?

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - Il diminue moins que prévu !

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué.  - C'est exact. Il faut toutefois tenir compte de l'impact de la moindre croissance. D'autant que le déficit structurel s'est dégradé de deux points de PIB sous les gouvernements que vous souteniez. Le Gouvernement ne se satisfait évidemment pas de ces résultats. Nous devons faire mieux et plus. Notre effort structurel sera de 1,3 % en 2012, de 1,7 % en 2013 et de 1 % en 2014.

M. Francis Delattre.  - L'arithmétique est claire !

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué.  - Autre argument, nous réaliserions des économies seulement sur le dos des collectivités territoriales. Et les économies sur les opérateurs de l'État, avec 2 500 postes supprimés depuis le début du quinquennat, alors qu'ils avaient augmenté de 15 % sous le précédent, les interventions de l'État et la rationalisation de l'action publique. Nous demandons un effort important aux collectivités territoriales de 1,5 milliard d'euros, c'est exact. Votre programme se chiffrait à 10 milliards d'euros...

M. Albéric de Montgolfier.  - 200 millions d'euros !

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué.  - 200 millions, c'est ce que vous avez fait, 10 milliards, ce que vous vouliez faire. 

Nous avons veillé à répartir cet effort d'1,5 milliard d'euros selon les capacités de chacun : 56 % pour les communes, 37 % pour les départements et le reste pour les régions. À la demande des départements, nous avons transféré 827 millions d'euros de frais de gestion aux départements pour qu'ils fassent face à leurs dépenses de solidarité et gardent leur capacité d'investissement.

L'économie en dépenses de fonctionnement n'est pas néfaste, monsieur Bocquet. Elle n'érode pas leur capacité d'investissement, bien au contraire. Je le sais pour avoir été maire, réalisé une fusion qui a entraîné 20 % d'économies sur le fonctionnement, pour investir comme jamais auparavant dans des équipements publics. Toute dépense publique n'est pas bonne en soi, quelle que soit sa nature...

M. Aymeri de Montesquiou.  - Très Bien !

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué.  - La mauvaise dépense, qui peut compromettre notre modèle social, ne doit pas chasser la bonne, voilà ce qui doit guider notre action.

J'en viens à l'évolution des prélèvements obligatoires. Aux théoriciens du matraquage fiscal, qui furent virtuoses en maniement de la matraque, je rappelle que nous avons subi 20 milliards d'euros supplémentaires en 2011, 21 milliards en 2012. Cette année, les prélèvements obligatoires ont augmenté de 0,5 %. Dans le budget que je vous présente, ils n'augmentent plus que de 0,15 % en 2013.

M. Albéric de Montgolfier.  - Cela se cumule !

M. Francis Delattre.  - En effet !

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué.  - Ce n'est pas un argument.

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - Les Français ne le perçoivent pas comme ça, car l'affaire est complexe, comprenez-les !

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué.  - En réalité, si l'on exclut la lutte contre la fraude fiscale, pour deux milliards d'euros, les prélèvements supplémentaires n'augmentent que de 0,05 %, soit un milliard.

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - C'est parfait, donc.

M. Francis Delattre.  - Tout va bien !

M. Albéric de Montgolfier.  - Et la fiscalisation des heures supplémentaires ?

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué.  - Je conclurai par la compétitivité.

M. Francis Delattre.  - En la matière, il y a tout à faire !

M. Jean-Pierre Caffet. - Quel aveu !

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué.  - Précisément ! En dix ans, il ne s'est rien passé. Nous allégeons les charges des entreprises de 20 milliards à travers le CICE. Cela aurait coûté beaucoup plus avec la TVA sociale.

M. Francis Delattre.  - Quels sont les résultats ?

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - Tout va bien, vous dis-je !

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué.  - J'ai répondu à plusieurs reprises à des questions au Gouvernement, vous connaissez parfaitement les chiffres.

M. Francis Delattre.  - Lesquels ?

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué.  - Les prélèvements sur les entreprises par-delà le CICE baisseront de 2 milliards d'euros par rapport à l'an passé. Les entreprises le reconnaissent. A-t-on fait mieux sous le précédent quinquennat ?

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - La taxe professionnelle ! 7 milliards d'euros !

M. Albéric de Montgolfier.  - Les heures supplémentaires !

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué.  - Et ce n'est pas fini : réforme des jeunes entreprises innovantes, de l'assurance vie, des plus-values mobilières, programme d'investissements d'avenir de 12 milliards d'euros, qui contribuent aux fonds propres des entreprises...

Quant au pouvoir d'achat des ménages, la hausse du RSA de 2 % au-delà du smic, la décote renforcée, le dégel du barème, les 150 000 à 200 000 jeunes en contrats de génération et contrats d'avenir, les tarifs sociaux de l'énergie pour 400 millions d'euros, l'élargissement de la CMU qui bénéficiera à 750 000 personnes, les 55 000 boursiers supplémentaires... Qui peut dire que ce ne sont pas des mesures de pouvoir d'achat ?

M. Francis Delattre.  - Et les 9 millions de salariés qui voient leurs heures supplémentaires fiscalisées ?

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué.  - J'espère que vous serez nombreux à voter ce budget ! (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Albéric de Montgolfier.  - Vous allez être déçu !

La discussion générale est close.

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - Je demande une brève suspension de séance pour réunir la commission.

La séance, suspendue à 19 h 40, reprend à 19 h 50.

Renvoi en commission

Mme la présidente.  - Motion n°I-359 présenté par M. de Legge et les membres du groupe UMP.

En application de l'article 44, alinéa 5 du Règlement du Sénat, le Sénat décide qu'il y a lieu de renvoyer à la commission des finances, le projet de loi de finances pour 2014, adopté par l'Assemblée nationale (n°155, 2013-2014)

M. Dominique de Legge .  - Si nous présentons cette motion, cela ne signifie pas que notre rapporteur général, dont nous connaissons la qualité du travail, ait failli : en toute bonne volonté, on ne peut pas faire du bon avec du mauvais. Monsieur le ministre, vous parlez avec aisance, mais vos actes sont aux antipodes de vos propos : vous avez augmenté la pression fiscale de 45 milliards d'euros depuis 2012, au point d'aboutir à un ras-le-bol fiscal, dixit M. Moscovici lui-même. L'annonce récente d'une remise à plat complète de la fiscalité par le Premier ministre démontre l'impréparation qui gouverne votre politique.

Ce budget persiste dans l'erreur : hausse de la TVA et des cotisations vieillesse, baisse du plafond du quotient familial, suppression de la déduction pour enfant scolarisé, rétablie in extremis devant la bronca qu'elle a suscitée au sein même de votre majorité, suppression des avantages fiscaux sur les mutuelles dont profitent 76 % des salariés, soit une hausse d'un milliard d'euros, durcissement de la déductibilité des intérêts d'emprunt, taxation supplémentaire des entreprises de 2,5 milliards d'euros via l'IS. Où est la pause fiscale ?

On attend toujours votre loi sur les familles, leur sort est réglé au détour de cette loi de finances ; ce ne sont pas les plus aisés que vous touchez.

Quant aux entreprises, le CICE est inefficace. Nous proposerons de le supprimer pour rétablir la TVA sociale.

Quant à la baisse de la dépense publique, c'est un leurre. Là où nous supprimions des emplois, les dépenses de solidarité dérapent. Les objectifs affichés ne sont qu'un vaste écran de fumée.

Il est d'autant plus nécessaire de revoir la copie qu'elle est un brouillon. Nous naviguons en pleine impréparation, au gré de volte-face qui provoquent un véritable tournis fiscal.

Un sentiment justifié par des rétropédalages nombreux : sur l'écotaxe, la fiscalité de l'épargne, l'EBE, la TVA... c'est un tournis fiscal. Le budget a effacé la trace de ces volte-face. Où sont les 370 millions annoncés mardi par le Premier ministre pour financer la réforme des rythmes scolaires en 2014 ?

Les recettes sont moindres que prévu : moins 2,6 milliards pour l'impôt sur le revenu, moins 3,8 pour l'impôt sur les sociétés, moins 5,6 pour la TVA. Le manque à gagner de 11 milliards. Ces chiffres, je les tire de l'excellent rapport de M. Marc.

Le budget est insincère. Vous devez à nos concitoyens un budget lisible fondé sur des objectifs clairs. C'est pourquoi nous demandons le renvoi en commission.

M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances.  - La commission a rejeté cette motion. Il n'y a pas lieu de produire un rapport différent de celui que nous avons adopté il y a quelques jours.

Vous contestez d'abord l'effort fait en matière de dépenses. Or il est plus important qu'auparavant. M. de Legge réclame des économies plus considérables : les dépenses publiques ont pourtant augmenté de 1,6 % par an entre 2007 et 2012.

Ensuite, vous déplorez la hausse des prélèvements obligatoires. Or ils sont stabilisés dans la trajectoire des finances publiques jusqu'en 2017. Hors produit de la lutte contre la fraude fiscale, cette hausse est limitée à 0,05 % du PIB.

Enfin, la baisse des recettes nécessiterait de réviser le budget, dites-vous. C'est techniquement difficile : je devrais revenir devant vous, toutes affaires cessantes, pour vous présenter un texte nouveau sur le fondement de simulations économétriques plus approfondies... Les prévisions qui fondent ce projet de loi de finances ont été validées par tous les organismes nationaux et internationaux qui les ont étudiées.

Je préconise, par conséquent, le rejet de cette motion.

M. Philippe Marini, président de la commission des finances.  - Quelle déception !

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué.  - Mon avis est identique. La Commission européenne a donné son avis sur nos efforts en dépenses, le Haut Conseil des finances publiques les a jugés crédibles.

La situation des prélèvements obligatoires suscite des contestations. Ils n'augmentent pourtant que de 0,05 %. Ce qui compte, c'est la réalité, non le détournement du débat à des fins politiciennes en vue de créer la confusion.

À la demande du groupe UMP, la motion n°I-359 est mise aux voix par scrutin public.

Mme la présidente.  - Voici les résultats du scrutin n° 68 :

Nombre de votants 327
Nombre de suffrages exprimés 327
Pour l'adoption 139
Contre 188

Le Sénat n'a pas adopté.

Mme la présidente.  - Je vous rappelle que 537 amendements ont été déposés sur la première partie.

Prochaine séance demain, vendredi 22 novembre 2013, à 10 h 30.

La séance est levée à 21 h 15.

Jean-Luc Dealberto

Directeur des comptes rendus analytiques

Ordre du jour du vendredi 22 novembre 2013

Séance publique

À 10 h 30

Présidence : M. Jean-Claude Carle, vice-président

Secrétaire : M. Hubert Falco

1. Question orale avec débat n° 7 de M. Jean-Patrick Courtois à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur la gestion et la conservation des scellés judiciaires.

À 14 h 30 et le soir

Présidence : Mme Bariza Khiari, vice-présidente

M. Jean-Léonce Dupont, vice-président

2. Suite du projet de loi de finances pour 2014 (n° 155, 2013-2014).

Rapport de M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances (n° 156, 2013-2014).

- Examen des articles de la première partie.

Analyse des scrutins publics

Scrutin n° 67 sur l'ensemble du projet de loi organique portant application de l'article 11 de la Constitution, dans la rédaction du texte proposé par la commission mixte paritaire modifié par l'amendement du Gouvernement.

Résultat du scrutin

Nombre de votants :346

Suffrages exprimés :346

Pour :326

Contre :20

Le Sénat a adopté.

Analyse par groupes politiques

Groupe UMP (132)

Pour : 132

Groupe socialiste (127)

Pour : 125

N'ont pas pris part au vote : 2 - M. Jean-Pierre Bel, président du Sénat, Mme Bariza Khiari, présidente de séance

Groupe UDI-UC (32)

Pour : 32

Groupe CRC (20)

Contre : 20

Groupe du RDSE (19)

Pour : 19

Groupe écologiste (12)

Pour : 12

Sénateurs non inscrits (6)

Pour : 6

Scrutin n° 68 sur la motion n° I-359, présentée par M. Dominique de Legge et les membres du groupe UMP, tendant au renvoi en commission du projet de loi de finances pour 2014, adopté par l'Assemblée nationale.

Résultat du scrutin

Nombre de votants :327

Suffrages exprimés :327

Pour :139

Contre :188

Le Sénat n'a pas adopté.

Analyse par groupes politiques

Groupe UMP (132)

Pour : 132

Groupe socialiste (127)

Contre : 127

Groupe UDI-UC (32)

Contre : 31

N'a pas pris part au vote : 1  -  Mme Jacqueline Gourault

Groupe CRC (20)

N'ont pas pris part au vote : 20  -  Mmes Éliane Assassi, Marie-France Beaufils, MM. Michel Billout, Éric Bocquet, Mmes Laurence Cohen, Cécile Cukierman, Annie David, Michelle Demessine, Évelyne Didier, MM. Christian Favier, Guy Fischer, Thierry Foucaud, Mme Brigitte Gonthier-Maurin, MM. Pierre Laurent, Gérard Le Cam, Michel Le Scouarnec, Mmes Isabelle Pasquet, Mireille Schurch, MM. Paul Vergès, Dominique Watrin

Groupe du RDSE (19)

Pour : 1 - M. Gilbert Barbier

Contre : 18

Groupe écologiste (12)

Contre : 12

Sénateurs non inscrits (6)

Pour : 6