Questions d'actualité

M. le président.  - L'ordre du jour appelle les questions d'actualité au Gouvernement. Vous connaissez la règle : deux minutes trente par orateur.

Affaire Jouyet-Fillon

M. Philippe Dallier .  - (Applaudissements sur les bancs UMP) Ma question s'adresse au Premier ministre.

Edwy Plenel (M. Henri de Raincourt s'exclame), qu'on ne peut guère soupçonner de complaisance envers la droite, ni d'ailleurs envers la gauche, je le concède, écrit : « L'affaire Fillon n'est pas une affaire Jouyet, c'est une affaire Hollande. »

M. Jean-Louis Carrère.  - C'est l'affaire Sarkozy !

M. Philippe Dallier.  - Il s'agirait de faire diversion après la mort de Rémi Fraisse.

Il ne s'agit pas ici de l'affaire Bygmalion et de ses suites judiciaires -mais de savoir quelle mouche a piqué M. Jouyet. A-t-il commis une gaffe, prêtant à M. Fillon des propos, démentis par un tiers ?

M. Didier Guillaume.  - Excellent !

M. Philippe Dallier.  - Ou a-t-il sciemment tenu à des journalistes des propos visant à déstabiliser l'opposition et faire diversion ? Voyez la Une de Libération de ce matin !

M. Jean-Pierre Sueur.  - Ce n'est pas la revue de presse mais la séance de questions au Gouvernement.

M. Philippe Dallier.  - Le mensonge de M. Jouyet était-il une gaffe ou était-il destiné à détourner l'attention, quitte à salir l'honneur de François Fillon ? Les Français ont le droit de savoir. (Applaudissements sur les bancs UMP et UDI-UC)

M. Manuel Valls, Premier ministre .  - Aujourd'hui, c'est la journée de la gentillesse (Sourires et applaudissements sur les bancs socialistes). Poser une question sur un tel sujet, quelle perte de temps ! Je ne changerai pas la réponse faite hier à l'Assemblée nationale. Vous vous érigez en juge et en procureur. La justice est saisie, elle apportera sa réponse. Ni vous ni moi n'avons à nous faire les exégètes de telle ou telle déclaration, pas plus que nous n'avons à nous ériger en juges ou procureurs. Tenons-nous en donc aux faits. C'est le Conseil constitutionnel qui a rejeté les comptes de votre candidat en 2012, c'est votre formation politique qui a saisi la justice le 1er juillet dernier.

M. Alain Gournac.  - La question porte sur l'affaire Jouyet.

M. Manuel Valls, Premier ministre.  - Ce Gouvernement respecte l'indépendance de la justice -cela change des pratiques passées. Mettez votre talent au service d'autres causes, monsieur le sénateur ! (Applaudissements sur les bancs socialistes)

Recherche sur les biotechnologies

M. Gilbert Barbier .  - Ma question s'adresse à Mme la ministre de la recherche. Comme vient nous le rappeler le beau succès de Rosetta, la France est en pointe de l'innovation dans des domaines stratégiques. Elle l'est encore aussi pour les biotechnologies, mais pour combien de temps encore ? La semaine dernière, un groupe d'une centaine de personnes s'est introduit dans un laboratoire de Limagrain pour dénoncer des recherches autorisées sur le blé transgénique. Cette action illégale est inacceptable ; l'ordre républicain commence par le respect des lois.

Les OGM, n'en déplaise à une minorité agissante, ne sont pas, par nature, dangereux pour la santé. Sans recherche, aucun doute ne sera levé. Les biotechnologies peuvent apporter une réponse aux enjeux agricoles du futur, à la faim dans le monde, dans un contexte de changement climatique. Le laboratoire attaqué la semaine dernière est le seul en France à travailler sur la culture du blé OGM adapté à des situations de sécheresse. Le Gouvernement condamne-t-il fermement cette entrave à la recherche ? (Applaudissements au centre et à droite)

Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche .  - La recherche française, publique comme privée, répond à des normes éthiques. On ne peut donc que condamner les agissements de la semaine dernière. (Applaudissements sur quelques bancs socialistes) Ces dernières années, les recherches en biotechnologie ont beaucoup progressé ; la France se situe au 5e rang mondial en la matière et au 3e rang européen. Elle compte 400 entreprises, 6 000 employés, dont la moitié affectés à la Recherche et Développement. L'an dernier, 2,5 milliards ont été investis pour la recherche par les entreprises françaises.

Le Gouvernement soutient le secteur avec le programme des investissements d'avenir et la stratégie nationale pour la recherche. L'Agence nationale de la recherche a lancé des appels d'offres ciblés sur les biotechnologies. Vous l'aurez compris, le Gouvernement accompagne la recherche et les entreprises : c'est ce qui participe au développement et à la compétitivité de notre pays.

Restriction de la dépense publique

Mme Marie-Christine Blandin .  - Ma question ne porte pas sur la pertinence des économies mais sur la rationalité de leur mise en oeuvre, encadrée par Bercy. Ministères et collectivités locales, bon gré mal gré, se mettent au pas. Mais, dans les faits et au plus près du terrain, à ceux qui ne se dérobent pas, on refuse des embauches aux DRH, on impose des expédients, on pousse au recours à des entreprises prestataires. Les résultats sont accablants. Le coût de location du matériel dépasse celui de l'achat, les jeunes diplômés sont livrés en pâture à ceux qu'on nomme, dans le secteur, des « marchands de viande ».

Ces pratiques, qui interpellent le bon sens, sont-elles évaluées ? Sont-elles ponctuelles ou structurelles ? La précarité de l'emploi ne doit pas se banaliser sinon on risque de désespérer la jeunesse diplômée. N'est-on pas en train de glisser de l'investissement vers le fonctionnement ? Quel gâchis d'argent public, un peu comme les partenariats public-privé, cette « bombe à retardement » comme dit le rapport sénatorial de MM. Sueur et Portelli. (Applaudissements sur les bancs écologistes)

M. Michel Sapin, ministre des finances et des comptes publics .  - Ce n'est pas Bercy qui a décidé d'encadrer la dépense publique. C'est le cap fixé par le Gouvernement, sous l?autorité du président de la République.

M. Francis Delattre.  - Le président de la République a un cap, quel scoop !

M. Michel Sapin, ministre.  - Si l'on ne maîtrise pas les dépenses de l'État, des collectivités locales, de la protection sociale, on ne pourra pas financer nos priorités, comme l'Éducation nationale ou le maintien d'un haut niveau de budget pour nos armées afin qu'elles remplissent leurs missions.

Les cas que vous décrivez sont évidemment aberrants. Ce n'est pas comme cela que nous faisons en sorte de maîtriser la dépense. Je peux vous citer la rationalisation du parc immobilier, des transports, du parc informatique : il y a des manières intelligentes de maîtriser la dépense publique. Bercy peut donner des conseils utiles.

Nous nous battons en Europe pour que, dans la situation de faible croissance et de faible inflation, l'économie soit réorientée vers les investissements, publics et privés, dans les collectivités locales (Exclamations à droite), au niveau de l'État, pour retrouver des marges de manoeuvre et le chemin de la croissance.

Recrutement des enseignants

Mme Brigitte Gonthier-Maurin .  - Entre petites annonces publiées par Pôle emploi sur internet et postes non pourvus, le problème du recrutement dans l'enseignement national est patent. La Seine-Saint-Denis paie un lourd tribut : 450 postes vacants en primaire, soit 38 classes sans enseignant, 322 contractuels recrutés en urgence et pas de remplaçants disponibles. Après la suppression de plus de 80 000 postes et la destruction de la formation des enseignants par la droite, (Protestations à droite) le Gouvernement a rompu avec cette logique et s'est engagé à créer 54 000 postes d'ici 2017.

Hélas, la pénurie perdure : manque d'attractivité d'un métier dévalorisé et mal rémunéré, problème de la formation. D'où une gestion dans l'urgence, par à-coups, avec des contractuels inexpérimentés. Il faut de véritables pré-recrutements, où les étudiants ne soient plus utilisés comme remplaçants et qui assure la mixité sociale du corps enseignant. La formation doit cumuler stages, recherche et pratique. Il faut également une politique de recrutement par discipline. (Applaudissements sur les bancs CRC)

Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche .  - Je réaffirme que le recrutement des enseignants est une priorité du Gouvernement. (Exclamations à droite) La crise du recrutement a sa source dans la destruction massive de postes sous la précédente majorité. (Protestations à droite)

M. Alain Gournac.  - Cela fait deux ans que vous êtes aux manettes !

Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre.  - Depuis deux ans, qu'avons-nous fait ? (« Rien ! » à droite) Les chiffres parlent d'eux-mêmes : 22 206 postes ont déjà été créés (Exclamations à droite) ; le reste le sera d'ici 2017. Le budget triennal de l'Éducation nationale prévoit une hausse de 800 millions d'euros à cette fin. Je rappelle qu'au total, le budget de l'Éducation nationale augmente d'1 milliard d'euros. Les professeurs stagiaires sont en formation - car celle-ci avait été détruite. Or apprendre, cela s'apprend. Les nouvelles écoles du professorat ont un succès supérieur à celui des IUFM. (Exclamations au centre et à droite)

Il y a des disciplines moins attractives, c'est vrai. Je lancerai bientôt une grande stratégie pour les mathématiques (Exclamations ironiques à droite) Preuve que nous avons déjà amélioré l'attractivité de l'enseignement, le nombre d'inscription au concours de professeur des écoles est passé de 40 000 en 2013 à 70 000, soit une hausse de 75 % ! (Applaudissements sur les bancs socialistes et écologistes)

Difficulté des agriculteurs

M. Henri Cabanel .  - Ma question s'adresse au ministre de l'agriculture. Alors que s'ouvre le salon du Made in France, je voulais revenir sur la valorisation des produits français pour faire vivre nos territoires et répondre aux attentes des consommateurs. Les circuits courts constituent une déclinaison locale du Made in France.

Dans la Drôme chère au président Guillaume, une plate-forme met en relation producteur et acheteur publics. C'est un exemple à suivre. Que fait le Gouvernement pour soutenir ces initiatives locales et favoriser les bonnes pratiques ? La concertation entre les différents acteurs est un facteur-clé de leur succès. La loi sur la consommation et celle sur la modernisation de l'agriculture attendent une concrétisation réglementaire.

Quels outils le Gouvernement a-t-il mis en place pour protéger les agriculteurs de la guerre des prix dévastatrice que se livrent les distributeurs ? (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Stéphane Le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement .  - Il existe des plates-formes numériques dans 26 départements sur les circuits courts, qui favorisent la rencontre de l'offre et de la demande locales. Beaucoup reste à faire en la matière. Le 26 novembre, au Congrès des maires, nous remettrons aux élus un guide pour faciliter l'achat local dans les appels d'offre pour les cantines scolaires et les autres restaurations collectives. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

Après le scandale des lasagnes, de gros progrès ont été faits en matière de traçabilité : plus de 25 % de la viande est étiquetée « Made in France » : née, élevée, abattue, transformée en France. Dès avril 2015, ce sera le cas de toutes les viandes fraîches. Reste à améliorer la traçabilité au niveau communautaire. Je travaille également sur un logo « Fleurs de France ».

Enfin, sur les relations entre producteurs et distributeurs, la loi Hamon a constitué un progrès. Il faut pouvoir renégocier quand les coûts de production évoluent. Avec Emmanuel Macron, nous avons saisi la Haute Autorité de la concurrence sur les centrales d'achat. Enfin, une charge de l'achat responsable est désormais disponible. (Applaudissements sur les bancs socialistes et écologistes)

Politique spatiale européenne

M. Loïc Hervé .  - Plus de dix ans après le lancement de la mission Rosetta, le 12 novembre 2014 restera dans l'histoire de la conquête spatiale comme une date majeure avec la première mise en orbite autour d'une comète et le déploiement d'un atterrissage à sa surface. Cette prouesse technique a suscité un véritable engouement populaire. Le coût de la mission a été évalué à 1,4 milliard d'euros. Principale contributrice avec l'Allemagne, la France participe à hauteur de 20 % sur les crédits du Cnes, avec le concours de nos industriels de l'aéronautique : Alcatel Space, Astrium, EADS, Snecma, Thomson.

Madame la ministre, quelles perspectives pour notre économie et notre industrie ? (Applaudissements au centre et à droite)

Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche .  - Je me réjouis de la réussite de cette mission, à laquelle j'ai eu le bonheur d'assister hier avec le président de la République. (Exclamations ironiques à droite)

Il y avait beaucoup d'émotion, le 12 novembre, le lendemain d'un 11 novembre. (Mêmes mouvements) Oui, un siècle après les déchirements de l'Europe, nous pouvons nous réjouir de cet acquis de la coopération spatiale européenne.

Le conseil de l'Agence spatiale européenne se tiendra le 2 décembre prochain à Luxembourg. Nous nous concentrons sur cette échéance décisive : Mme Fioraso est en train de la préparer à Cologne avec ses homologues européens. Ce conseil a trois objets : d'abord, l'avenir d'Ariane. C'est le chantier d'Ariane 6, lancé en 2012. Sur le plan industriel, une entité forte construira ce lanceur en partenariat, en sortant de la logique de sous-traitance.

Ensuite, la station spatiale internationale, dont l'exploitation se poursuivra jusqu'en 2020 pour un coût de 1 milliard d'euros.

Enfin, il est envisagé de conserver la spécificité de l'ESA pour utiliser au mieux ses compétences. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

Pause fiscale ?

M. Alain Gournac .  - Une question gentille, qui plaira au Premier ministre et intéressera tous les Français. (Exclamations amusées à gauche)

M. Jean-Louis Carrère.  - Ah ! Ah !

M. Alain Gournac.  - Depuis plus de deux ans, les déclarations du président de la République et du Gouvernement se succèdent ; elles promettent aux Français qu'il n'y aurait plus de hausse d'impôts. M. Moscovici a parlé de ras-le-bol fiscal,...

M. Manuel Valls, Premier ministre.  - Oui.

M. Alain Gournac.  - ...et le Premier ministre de « haut-le-coeur fiscal », après deux ans de hausse sans précédent : 30 milliards d'euros !

M. Jean-Pierre Caffet.  - Vous avez fait autant !

M. Alain Gournac.  - Le président de la République a déclaré jeudi dernier devant des millions de Français qu' « il n'y aura pas d'impôt supplémentaire pour qui que ce soit ». Et hier, au Conseil des ministres, vous avez annoncé une taxe sur les résidences secondaires en zones tendues, ce qui est catastrophique pour le marché immobilier.

En fait, pas une semaine sans une nouvelle taxe, sur le diesel ou sur les dividendes. Pire, le secrétaire d'État au budget déclare ce matin que la promesse du président de la République n'est « pas gravée dans le marbre ». (Vives exclamations à droite)

Où est passée la parole de l'État ? (Exclamations à gauche) Gouverner, c'est prévoir, ce n'est pas cafouiller !

Vous passez votre temps à vous renier, coincé entre vos oripeaux idéologiques et la pression de Bruxelles. (Nouvelles exclamations à gauche)

M. le président.  - Votre question.

M. Alain Gournac.  - Pouvez-vous assurer aux Français que la route à tout nouvel impôt est effectivement coupée ? Quand commencerez-vous à réduire sérieusement la dépense publique ? (Applaudissements nourris à droite et au centre, huées à gauche)

M. Pierre Charon.  - Très bonne question !

M. Michel Sapin, ministre des finances et des comptes publics .  - Vous avez fait des citations, légèrement tronquées. (Exclamations à droite)

Que sont devenus le calme et la sérénité que le président Larcher semblait avoir apportés au Sénat depuis quelques semaines ?

M. le président.  - C'est de la vitalité, monsieur le ministre !

M. Michel Sapin, ministre.  - En 2009-2010, un déficit historique : 160 milliards d'euros ! Pour y faire face, vous comme nous, avons augmenté les impôts. Près de 30 milliards d'euros en deux ans ? C'est vrai. (Exclamations à droite) Mais vous oubliez les 30 milliards que vous aviez votés en 2011 et 2012 ! (Mêmes mouvements)

Vous ne pouvez pas, en citant telle ou telle petite taxe supplémentaire, dissimuler une autre vérité : en 2015, les impôts et charges qui pèsent sur les entreprises baisseront de 12 milliards d'euros ! Les ménages modestes bénéficieront de plus de 3 milliards de baisse d'impôt. C'est une baisse massive de l'impôt sur le revenu.

Quant à la taxe sur les résidences secondaires, elle est à la disposition des communes (Exclamations à droite)...

M. le président.  - Concluez, Monsieur le ministre

M. Michel Sapin, ministre.  - ...dans des zones très denses où la spéculation et la rareté des logements rend nécessaire de telles mesures. (Applaudissements sur les bancs socialistes et écologistes)

Accords sur le climat

M. Jean-Jacques Filleul .  - Nous avons tous conscience de l'impact désastreux des émissions de CO2 sur le climat et les populations. D'après le GIEC, les températures devraient augmenter de 3°C d'ici la fin du siècle. Les conséquences seraient analogues à celles d'une guerre.

L'accord qui vient d'être conclu entre la Chine et les États-Unis est historique : les États-Unis s'engagent à réduire de 26 à 28 % par rapport à 2005 leur émission de gaz à effet de serre d'ici 2025 ; la Chine, elle, s'engage sur un plafond à atteindre en 2030, voire avant. C'est un pas encourageant, mais il faudra aller plus loin lors de la Conférence de Paris de 2015.

Avec le projet de loi de transition énergétique, la France s'est engagée de son côté à réduire ses émissions de 40 % d'ici 2030.

Nous avons été entendus au niveau européen. L'Union européenne contribue à ce mouvement au premier chef, avec le paquet Énergie-climat, pour un nouveau modèle énergétique de développement.

Monsieur le ministre, nous connaissons votre engagement, mais comment ferez-vous pour faire fructifier ces bons résultats à la Conférence de Paris ?

M. le président.  - Votre question.

M. Jean-Jacques Filleul.  - Il faut un accord global pour la paix entre les peuples ; cet accord devra être consensuel, mais contraignant. (Applaudissements sur les bancs socialistes et écologistes)

M. Laurent Fabius, ministre des affaires étrangères et du développement international .  - La Conférence de Paris sera un évènement majeur : 20 000 délégués, 20 000 invités supplémentaires pour un enjeu crucial : sauver la planète. La France est honorée d'avoir été choisie pour organiser cette Conférence.

L'accord entre la Chine et les États-Unis marque une étape majeure car ce sont les deux plus grands pollueurs dans le monde -ce n'est pas une injure de le dire- avant l'Inde. Cet accord, avec les chiffres que vous avez cités, s'ajoute à l'accord européen pour faire pression sur tous les autres pays. Novembre 2014 marquera un tournant historique -même si ce mot est souvent galvaudé- dans l'attitude des deux plus grands pollueurs dans le monde. Chacun d'entre nous ne peut que s'en réjouir. (Applaudissements sur les bancs socialistes et écologistes)

RSA et suppression de la PPE

M. Philippe Mouiller .  - (Applaudissements sur les bancs UMP) M. le Premier ministre a signalé jeudi dernier, devant les présidents de conseils généraux réunis à Pau, le rôle essentiel des collectivités départementales dans la lutte contre la pauvreté, paroles bienvenues, indispensables mais insuffisantes pour apaiser toutes les craintes qui pèsent, en particulier sur la gestion des minima sociaux.

Le Premier ministre a annoncé un nouveau groupe de travail. Est-ce une façon de retarder les décisions qui s'imposent ? Je n'ose le croire.

Trois questions. Premièrement, le Gouvernement envisage-t-il une recentralisation du PSA ? Si tel est le cas, selon quelles modalités ? Deuxièmement, le RSA jeune s'adresse seulement à 7 882 jeunes. Le Gouvernement entend-il élargir ses conditions d'accès ? Dans cette hypothèse, avec quel financement ? Enfin, la suppression de la PPE a été annoncée en Conseil des ministres. Sera-t-elle fusionnée avec le RSA activité, comme s'y est engagé le président de la République le 20 août dernier, ou remplacée par un autre dispositif ? J'attends des réponses courageuses. (Applaudissements à droite et au centre)

Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes .  - En effet, le Premier ministre a annoncé, le 6 novembre à Pau, la mise en place d'un groupe de travail sur les politiques d'insertion. Le rôle des départements et celui des conseils généraux est, à cet égard, fondamental, nous en sommes tous d'accord.

Recentraliser le RSA ? Le groupe de travail y réfléchira. Le Gouvernement a engagé une évaluation de sa politique. Le projet de loi de finances rectificative propose la suppression de la PPE. De nombreux Français ne savaient même pas qu'ils pouvaient compter sur ce dispositif. D'où la fusion entre cette PPE et le RSA chapeau pour créer une nouvelle prestation plus simple, plus lisible, qui bénéficieraient aux jeunes qui sont en effet trop peu nombreux à bénéficier du RSA activité. Tel est l'objet de ce groupe de travail. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

Autoroutes

M. Philippe Kaltenbach .  - Depuis la privatisation des autoroutes, les sociétés concessionnaires réalisent des bénéfices colossaux pour un risque minime : 15 milliards d'euros de dividendes ont été versés de 2006 à 2013 ! Pour l'Autorité de la concurrence, leur rentabilité disproportionnée est assimilable à une rente. Lors de la privatisation des autoroutes par la droite, en 2005-2006, l'État a été doublement lésé. D'abord sur le prix : 15 milliards, alors que la Cour des comptes avait évoqué 24 milliards ; ensuite en s'engageant contractuellement dans des rapports déséquilibrés avec les sociétés autoroutières qui ont permis des augmentations de péages très supérieure à l'inflation.

Mme Éliane Assassi.  - Il faut renationaliser ! (On renchérit sur les bancs CRC)

M. Philippe Kaltenbach.  - Selon la loi du 18 avril 1965, l'usage des autoroutes est en principe gratuit ; « toutefois, un péage peut être institué pour couvrir les dépenses de construction, d'exploitation ou d'extension des infrastructures ». L'exception au principe de la gratuité profite à des sociétés privées à la rentabilité maximale. Comment faire pour mettre fin à cette situation scandaleuse, dégager des moyens pour nos infrastructures et limiter la hausse des péages ? (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Michel Le Scouarnec.  - Nationalisez !

M. Emmanuel Macron, ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique .  - En effet, la privatisation des autoroutes s'est faite dans de mauvaises conditions pour nos concitoyens ; la Cour des comptes et l'Autorité de la concurrence l'ont souligné.

Pour le prix de vente, il faut rester prudent.

En revanche, les tarifs de péages ont augmenté bien plus vite que l'inflation : 25 % en dix ans. La politique de travaux est peu satisfaisante : ainsi, le plan Vert, voulu par Jean-Louis Borloo, était une bonne idée. (« Très bien ! » à droite) Mais il a été mis en oeuvre par les sociétés d'autoroutes de manière bien peu transparente : elles ont construit des télépéages qui réduisaient effectivement la pollution, mais qu'elles auraient construits de toute façon... Il faut donc créer les conditions de la transparence, pour les tarifs et les travaux. C'est pourquoi le plan autoroutier que nous avons proposé avec Ségolène Royal vise à mettre en oeuvre les recommandations en ce sens de l'Autorité de la concurrence.

L'Autorité de régulation des activités ferroviaires verra ses compétences élargies au transport routier afin de garantir la transparence de la politique des tarifs et des travaux des sociétés autoroutières.

M. le président.  - Concluez, monsieur le ministre.

M. Emmanuel Macron, ministre.  - Enfin, il faut aller plus loin sur la question des prix. Nous enrichirons le projet de loi pour l'activité et la croissance des propositions que feront les commissions du développement durable des deux assemblées. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

Prestations sociales

M. Jean Louis Masson .  - « La France n'a pas les moyens d'accueillir toute la misère du monde ». Cette citation de Michel Rocard, alors Premier ministre,...

M. Jean-Pierre Sueur.  - Tronquée ! Il a dit que la France devait en prendre sa part.

M. Jean Louis Masson.  - ...est plus que jamais d'actualité. Au moment où le Gouvernement impose aux Français une cure d'austérité et un matraquage fiscal sans précédent, la France ne peut plus accepter ces étrangers qui viennent uniquement pour profiter de notre système d'aides sociales, en fait pour vivre à nos crochets. (Exclamations sur les bancs CRC) L'Allemagne, la Belgique, le Danemark, le Royaume-Uni ont réagi face à de tels abus ; hélas, la France a fait le contraire : elle a même supprimé le ticket modérateur sur l'aide médical d'État. Le bilan financier est terrifiant : l'AME coute 780 millions d'euros par an ! Est-il normal qu'un ouvrier français qui travaille dur pour toucher le Smic supporte, lui, la charge de ce ticket modérateur quand un étranger qui n'a jamais rien fait pour notre pays use et abuse du système sans débourser un centime ? (Exclamations à gauche)

M. Jean-Pierre Bosino.  - Entendre ça le lendemain du 11 novembre !

Mme Éliane Assassi.  - Scandaleux !

M. Jean Louis Masson.  - Pour justifier son laxisme, le Gouvernement invoque les règles de l'Union européenne. Or la Cour européenne de justice vient de donner tort à des Roumains qui refusaient de travailler mais entendaient quand même bénéficier des aides sociales en Allemagne. Cet arrêt conforte la pertinence des mesures de bon sens prises par l'Allemagne et d'autres pays européens. La France sera-t-elle le dernier pays d'Europe à feindre d'ignorer le problème ? Le Gouvernement va-t-il se décider à réagir ? (Applaudissements sur quelques bancs à droite)

Mme Éliane Assassi.  - Scandaleux !

Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes .  - Que de haine dans vos propos ! Que d'agressivité, de stigmatisation et d'excès ! (Applaudissements sur les bancs socialistes et écologistes) Ce n'est pas en travestissant la réalité que vous convaincrez nos concitoyens. La France applique des règles strictes en matière de prestations sociales. Nous veillons à ce qu'elles soient versées à ceux qui en ont besoin et à ce que les entreprises respectent les droits des salariés étrangers qu'elles emploient.

L'arrêt que la Cour de justice de l'Union européenne a rendu hier rappelle que les États européens peuvent appliquer des règles strictes -condition de séjour régulier et de ressources minimales- pour verser aux étrangers des prestations sociales ; ce sont celles que la France impose pour verser une prestation sociale telle que le RSA aux ressortissants européens vivant en France.

L'AME versée aux étrangers malades en situation irrégulière ou aux professionnels de santé nous permet de mieux contrôler la situation sanitaire et de combattre les maladies infectieuses sur notre sol. (Applaudissements à gauche, protestations à droite) Ce n'est pas en stigmatisant que vous ferez progresser le débat ! La France entend appliquer le droit de manière ferme mais juste. (Applaudissements à gauche)

La séance est suspendue à 16 heures.

présidence de Mme Isabelle Debré, vice-présidente

La séance reprend à 16 h 20.