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Table des matières
Mise au point au sujet d'un vote
Organisme extraparlementaire (Candidature)
Débat sur la politique du logement
M. Jean-Claude Lenoir, pour le groupe UMP
Mme Sylvia Pinel, ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité
Organisme extraparlementaire (Nomination)
Débat : « la transparence dans le transport aérien »
M. Pascal Allizard, pour le groupe UMP
Situation de l'emploi (Questions cribles)
Organismes extraparlementaires (Candidatures)
Intercommunalités et représentation des communes (Deuxième lecture)
Mme Catherine Troendlé, rapporteur de la commission des lois
Organismes extraparlementaires (Nominations)
Modernisation du secteur de la presse (Procédure accélérée)
Mme Fleur Pellerin, ministre de la culture et de la communication
M. Philippe Bonnecarrère, rapporteur de la commission de la culture
Mme Catherine Morin-Desailly, présidente de la commission de la culture
Ordre du jour du mardi 10 février 2015
SÉANCE
du jeudi 5 février 2015
60e séance de la session ordinaire 2014-2015
présidence de Mme Jacqueline Gourault, vice-présidente
Secrétaires : M. Claude Dilain, M. Philippe Nachbar.
La séance est ouverte à 9 heures.
Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu analytique, est adopté sous les réserves d'usage.
Mise au point au sujet d'un vote
M. Jean-Claude Lenoir. - Hier après-midi, sur le scrutin public n°92, j'ai été porté votant contre alors que je voulais voter pour.
Mme la présidente. - Donc acte. Cela figurera dans l'analyse politique du vote.
Organisme extraparlementaire (Candidature)
Mme la présidente. - Je rappelle que M. le Premier ministre a demandé au Sénat de bien vouloir lui faire connaître le nom d'un sénateur désigné pour siéger au sein du conseil d'administration de l'agence Business France, en application de l'article 7 du décret n° 2014-1571 du 22 décembre 2014.
La commission des affaires économiques propose la candidature de M. Alain Chatillon.
Cette candidature a été publiée et sera ratifiée, conformément à l'article 9 du Règlement, s'il n'y a pas d'opposition à l'expiration du délai d'une heure.
Débat sur la politique du logement
Mme la présidente. - L'ordre du jour appelle un débat sur la politique du logement à la demande du groupe UMP.
M. Jean-Claude Lenoir, pour le groupe UMP . - Il y a un instant, le nom de Business France a été cité. Ce nom m'interpelle pour une structure qui rassemble Ubifrance et l'Afii. Nous devrons certainement y revenir.
Cela dit, j'en reviens à notre sujet : la politique du logement. Notre constat est très sévère et le groupe UMP veut tirer la sonnette d'alarme. Il y a comme une malédiction pesant sur les gouvernements de gauche : pour des raisons qui m'échappent il y a à chaque fois moins de logements construits sous leur mandat. De 1997 à 2002, 1,6 million seulement ont été construits. Malgré la crise de 2008, nous avions, nous, réussi à en construire entre 2007 et 2012 2 millions, dont 600 000 logements sociaux, pour un objectif de 400 000 logements par an. Le président François Hollande s'était engagé sur le chiffre de 500 000 logements.
Or l'année 2014, la dernière de référence, a vu 297 500 logements ouverts : 10 % de moins qu'en 2013, qui était déjà en diminution de 14 % par rapport à 2012...
Pour étayer sa politique, le gouvernement a fait voter trois lois, dont la loi Duflot, ce monument législatif...
M. Philippe Dallier. - Ce qu'il en reste !
M. Jean-Claude Lenoir. - Les résultats ont été nuls. Toute politique, dès lors qu'elle est instable, incertaine, incohérente, mène dans le mur.
Lors de l'examen de la loi Alur, nous disions déjà que le mécanisme de Garantie universelle des loyers (GUL) comme la procédure d'encadrement des loyers étaient si complexes qu'ils en deviendraient inapplicables. Le marché s'est ralenti ; la confiance n'étant plus là, les investisseurs ont fui, littéralement fui. La GUL intéresse exclusivement les jeunes salariés et les personnes précaires ; Paris seulement, et peut-être Lille, vont expérimenter l'encadrement des loyers. Il y a loin du rêve à la réalité, de l'idéologie au pragmatisme.
D'après le rapport du Conseil général de l'environnement et du développement durable (CGEDD), de l'Inspection générale des affaires sociales (Igas) et de l'Inspection générale des finances (IGF), le coût de cette politique est considérable : 46 milliards d'euros. Pour quels résultats ?
La politique manque de cohérence : trop de dispositifs, d'interlocuteurs, on est dans le brouillard. Il y a un effet inflationniste de l'aide à la location qui entraîne une majoration des loyers, sans aucun bénéfice pour les locataires ; il y a une mauvaise appréciation des rapports entre l'offre et la demande : les logements manquent et là où on en construit ils ne répondent pas aux besoins.
Certes, l'élargissement du PTZ et le dispositif Pinel, l'abattement de 30 % sur les cessions de terrains améliorent les choses. Mais qu'envisagez-vous, madame la ministre, à propos des APL, pour conforter les investissements, pour le régime des meublés et les aides à la pierre ? Les jeunes se tournent vers le marché privé actuellement, quel échec...
Les Français demandent des logements décents et adaptés. Les attentes sont fortes. Que ce débat soit l'occasion pour le gouvernement de fournir des précisions sur les corrections que le premier ministre a dit vouloir apporter à la loi Alur et sur les mesures qu'il envisage pour rétablir la confiance ? (Applaudissements à droite et au centre)
M. François Fortassin . - Un débat sur la politique du logement, c'est hélas d'abord un débat sur le mal-logement. Soixante ans après l'appel de l'Abbé Pierre, nous devons constater que malgré le Droit au logement opposable (Dalo), le 115 voit les demandes exploser et qu'un quart des demandes de logement ne sont pas satisfaites.
Madame la ministre, comment ne pas s'indigner qu'en 2015 des gens vivent encore et meurent sur nos trottoirs ? Vous avez annoncé un plan pour réduire le recours aux nuitées hôtelières. Pouvez-vous nous en dire plus ?
Pour faciliter l'accès au logement, le gouvernement a annoncé la construction de 500 000 logements d'ici 2017 et toute une série de mesures comme la GUL, la construction de logements très sociaux dans le cadre des PLAI et super-PLAI. Il faut aussi prévenir les expulsions locatives en sortant de la gestion au thermomètre, que constitue la trêve hivernale.
Encadrement des loyers et Garantie universelle des loyers (GUL) doivent être appliqués avec courage. Il ne s'agit pas de pointer du doigt les propriétaires mais de donner accès au logement.
Autre sujet, les différences de logement entre ceux qui ont la chance d'être logés dans le parc public et le parc privé. À Paris, l'écart de loyer se monte à 1 000 euros entre les locataires du public et du privé.
Madame la ministre, je sais votre engagement à lutter contre les inégalités et le mal-logement. Le groupe RDSE vous fait toute confiance. (Applaudissements sur les bancs socialistes)
M. David Rachline . - Sans m'attarder sur le constat qui est partagé, une politique coûteuse et inefficace, je veux dire mes propositions, qu'aucun autre intervenant ne formulera.
Le communautarisme et le clientélisme minent la politique de la ville. Oui, la France doit d'abord s'occuper de loger ses propres enfants. Elle ne peut pas continuer de loger toute une série de gens, comme les clandestins, que l'Europe nous impose d'abriter. Ma première proposition est donc la priorité nationale pour le logement.
Deuxième proposition, un chèque logement. Ce serait source de mixité sociale : le cadre comme l'ouvrier pourraient habiter dans les mêmes quartiers. On mettrait ainsi fin à la politique d'assistanat et, avec ce chèque, nous redonnerions de la fierté à nos compatriotes.
Nous, les élus locaux, nous devons mener une action de terrain, à condition que l'État au lieu de nous contraindre nous accompagne pour conduire une politique adaptée à nos populations.
M. Joël Guerriau . - Les chiffres du dernier rapport de la Fondation Abbé Pierre sont alarmants : 3,5 millions de mal-logés, 2,6 millions dans des logements surpeuplés, 494 000 foyers en procédure d'impayés et 141 000 SDF. Et pourtant, le coût de la politique du logement est de 46 milliards, soit plus 2 % du PIB.
Avec une diminution de 10 % du nombre de permis de construire, le BTP est inquiet. Au titre de la transition énergétique, comment atteindre l'objectif de rénovation de 500 000 logements par an à compter de 2017 ?
La loi Alur ? L'encadrement des loyers devait s'appliquer à 27 agglomérations, il se limite à Paris. La GUL, dont nous avions critiqué le dispositif, a fait l'objet d'une convention quinquennale en décembre ; nous saluons le ciblage des personnes précaires. Sera-t-elle généralisée ?
La loi SRU ? Son application uniforme est déconnectée des réalités locales. Certaines communes disposent de réserves foncières, d'autres pas. C'est le cas de ma commune où la densité est extrêmement forte. Nous avons augmenté notre offre de logements sociaux de 56 % en dix ans mais le seuil couperet de 25 % nous tombe dessus, de façon injuste : nous sommes sanctionnés. Résultat, notre budget est grevé par une lourde pénalité qui nous empêche d'investir. Ailleurs, on oblige à investir de l'argent public pour atteindre 25 % de logements sociaux quand le territoire se dépeuple. Belle utopie, que cette politique ! Au minimum le seuil de 25 % devrait s'appliquer à la métropole.
Enfin le coût de la construction a augmenté et les mesures de simplification tardent à produire leur effet ; la filière du bâtiment a perdu 60 000 emplois ces dernières années.
Pour le groupe UDI-UC, il faut absolument revoir la politique du logement et l'adapter aux réalités locales. (Applaudissements au centre et à droite)
M. Philippe Dallier . - Ce débat tombe à point nommé, quelques jours après la remise du rapport de la Fondation Abbé Pierre et la publication, après une fuite dans la presse, du rapport demandé à l'Igas, l'IGF et au CGEDD, qui a fait l'effet d'une petite bombe. Certes, l'État peut être accusé de vouloir chercher à réaliser des économies sur les 46 milliards d'euros qu'il consacre au logement ajoutés aux 5 milliards d'Action Logement mais à mon sens il y a des pistes à creuser dans ce rapport.
D'abord il réévalue les besoins en réfutant l'objectif de 500 000 logements ; pour le Grand Paris, il évalue le besoin à 70 000. Si l'on extrapole, cela donne plutôt 332 000 logements. Intéressant ! Le rapport revient également sur la dispersion des moyens, le zonage, la taille des logements. L'évaluation, qui fonde la politique du logement, doit être absolument revue.
Autre question, nous consacrons 49 % des moyens à la solvabilisation des locataires, 17 % au développement de l'offre et 17 % à l'amélioration de l'existant. Le rapport pose le problème de l'aide personnalisée au logement, comme je l'avais fait moi-même lors de la discussion de la loi Apparu puis de la loi Alur : on m'avait alors accusé de vouloir pénaliser ceux qui en bénéficiaient. Le rapport confirme que ces aides personnalisées ont un effet inflationniste sur les loyers, c'est flagrant en Seine-Saint-Denis où de piètres logements trouvent preneurs uniquement parce qu'ils sont solvabilisés par l'APL.
M. Daniel Raoul. - Très juste !
M. Philippe Dallier. - Les aides sont distribuées de manière injuste : à revenu égal un couple de chômeurs est davantage aidé.
M. Joël Guerriau. - En effet !
M. Philippe Dallier. - Madame la ministre, ma question est simple : que comptez-vous faire de ce rapport ? (Applaudissements à droite)
M. Claude Dilain . - Ce débat me rappelle le bon temps où je siégeais à la commission des affaires économiques.
Les chiffres ont été rappelés : 3,5 millions de mal-logés, dont 141 500 SDF. C'est énorme ! Autre point qu'on oublie souvent, 1,7 million demandes de logements sociaux pour 200 000 construits en 2014.
La crise du logement, cependant, n'est pas uniforme sur tout le territoire, nous le rappelions avec mon collègue Roche dans notre rapport; elle ne date pas d'hier. La France a un ratio de 5 logements construits pour 1 000 habitants, elle se situe plutôt dans la moyenne européenne et fait mieux que l'Allemagne dont le ratio est de 3 pour 1 000.
Face à cela, le gouvernement a pris des mesures, entre autres le renforcement du PTZ. Mais l'essentiel est la libération du foncier. En 2013, 1 800 logements ont été construits, 23 terrains ont été cédés sur les 43 hectares. En 2014, 7 terrains ont été cédés. Ce sont des résultats prometteurs.
Dans les quartiers populaires, le mal-logement entraîne un cercle vicieux de la paupérisation. Éric Maurin dans Le ghetto français le montre bien. Les logements sociaux y sont à la fois abondants mais insuffisants, comme si le logement social appelait le logement social. Et l'on voit des villes afficher un taux de logement social de 70 %, ce qui fait obstacle à la mixité sociale.
Ces logements sociaux y sont également inadaptés. Nous avons souvent des familles nombreuses avec plus de cinq enfants quand, dans les grands ensembles, on a plutôt construit dans les années 60 et 70 des F3 et des F4. Les déboutés du logement social se retrouvent, eux, dans des copropriétés dégradées, où sévissent les marchands de sommeil.
S'il faut construire du logement social, il faut également réhabiliter l'existant. L'action de l'Agence nationale de l'habitat (Anah) le montre : avec des moyens moins importants, on peut améliorer l'offre et la qualité du logement. En 2014, 50 000 logements ont été rénovés dans le cadre du programme « Habiter mieux » - on aurait pu faire plus-, 1 000 logements dans le cadre de la lutte contre l'habitat indigne, 13 000 logements pour les copropriétés dégradées - merci madame la ministre pour les opérations concernant Clichy-sous-Bois et Grigny ; et, enfin, 15 000 logements pour l'adaptation à la perte d'autonomie. Ce sont des mesures essentielles pour les bénéficiaires mais aussi pour les artisans locaux qui effectuent les travaux. Quelque 42 % des travaux ont été réalisés en zone rurale, ce qui n'est pas indifférent à la ministre de l'égalité des territoires, et 34 % en zone urbaine.
Sur ce sujet transpartisan, inutile de se lamenter sur le constat, que chacun prenne ses responsabilités - je pense aux maires, en particulier.
Après les élections, on a vu bien des programmes interrompus. En tout cas, je suis certain que madame la ministre assumera ses responsabilités pour nous mener vers le bien-logement. (Applaudissements sur les bancs socialistes)
Mme Aline Archimbaud . - Souffrance quotidienne que le mal-logement... J'étais il y a peu à Bobigny en Seine-Saint-Denis : j'y ai vu des jeunes, qui bénéficient pourtant d'une allocation grâce à l'expérimentation de la garantie jeunes, et ne peuvent pas accéder au logement. Certaines situations sont insolubles !
La loi Alur, accusée de tous les maux, a moins d'un an. Elle n'est pas encore complètement appliquée. Je regrette d'ailleurs le manque de portage politique, par le gouvernement, de certaines mesures, comme l'encadrement des loyers. Il existe bien d'autres causes : la frilosité des banques, le manque de foncier... Bref, la crise du logement ne date pas d'hier. La loi SRU, loi de la République, doit s'appliquer.
M. Joël Guerriau. - Elle n'est pas bonne !
Mme Aline Archimbaud. - On pourrait envisager la mobilisation du parc privé via le conventionnement. Le taux de relogement des bénéficiaires du Dalo est seulement de 46 %...
Il faudrait surtout élargir l'encadrement des loyers, qui se limite hélas à Paris. Le groupe écologiste regrette également la timidité des mesures sur l'aide à la rénovation énergétique.
Dernière piste : s'appuyer sur les initiatives d'innovation sociale. En Grande-Bretagne, Liverpool, dans le cadre du programme « Une maison pour une livre », a vendu des maisons vétustes à des particuliers contre l'engagement de faire des travaux de rénovation. (Applaudissements sur les bancs écologistes)
M. Joël Guerriau. - En France, les communes sont ruinées par la loi SRU...
M. Michel Le Scouarnec . - Moins de 300 000 logements en 2014, 10 millions de personnes touchées de près ou de loin par la crise du logement, voilà ce qui a amené nos collègues du groupe UMP à demander ce débat. Les investisseurs seraient découragés ? Mais les multiples mesures de défiscalisation ont conduit à construire trop de logements dans des agglomérations qui n'en n'avaient pas besoin... 34 000 euros par logement au titre du dispositif Pinel, 100 000 euros pour les donations sur les logements neufs, abattement de 30 % sur plus-values portant sur les terrains à bâtir : 300 millions sont allés à ceux qui détiennent déjà 50 % du patrimoine... Le bilan d'application de la loi SRU n'est toujours pas publié et la baisse des dotations aux collectivités territoriales va encore réduire leurs initiatives. La crise du logement est la face la plus criante de la crise que nous traversons.
Est-il normal d'attendre deux ans pour connaître les statistiques de l'expulsion locative, onze ans pour que l'Insee recense les SDF, 150 000 aujourd'hui ? Une politique du logement ségrégative a créé des ghettos, abîmé la mixité sociale. Trop de familles éligibles au Dalo ne se voient pas proposer de solutions. La priorité a été donnée aux investisseurs, non aux ménages. Pour ces derniers, c'est un cercle vicieux : pour avoir un logement il faut un travail ; pour avoir un travail, il faut un logement...
La construction et la rénovation de logements sociaux, voilà la priorité des priorités. C'est l'application de la loi SRU dans les années 2000 qui a soutenu le logement social. Pour le groupe CRC, il faut élargir le PTZ en direction des bailleurs sociaux, revaloriser le 1 % logement. Il reste des sommes importantes non utilisées dans le fonds géré par la CDC ; et 35 % de l'encours ne sont pas encore centralisés. Il faut aussi réfléchir aux logements du futur, écoresponsables et accessibles à tous. La BCE a annoncé qu'elle financerait la restructuration de dettes publiques et privées : profitons-en pour restructurer la dette de certains organismes HLM.
Il faudrait aussi moduler la taxation des plus-values foncières pour les terrains destinés à des programmes de logements sociaux, ou mettre sur pied un nouveau type de bail pour soulager les bailleurs sociaux.
Le logement est un droit dont l'application relève de l'État. Il faut asseoir cette politique sur des bases solides, humaines et justes.
« Construire des prisons est sans doute nécessaire, mais construire des logements en repensant à l'intérieur des cités tout ce qui fait la cohésion sociale, c'est plus urgent » disait l'Abbé Pierre. C'est la clé du vivre ensemble et de la mixité sociale.
M. Jean-François Mayet . - Le logement est en crise. Aussi loin que je m'en souvienne, je l'ai toujours entendu dire comme si cette crise résistait à toutes les politiques depuis quarante ans. Jamais nous n'avons mis en adéquation l'offre de logements et les attentes des Français.
Je centrerai mon propos sur un sujet qui me tient à coeur, l'accession sociale à la propriété. Les premières initiatives dans les années 1920 allaient dans ce sens avec les coopératives de construction. Notre pays affiche le taux le plus faible de propriétaires en Europe, 56 %, tout en consacrant des sommes considérables aux aides à la location - pour un couple avec deux ou trois enfants, cela représente 300 000 euros sur la durée d'une vie. Cela n'en fait pas pourtant des habitants satisfaits, coopératifs et respectueux des biens qu'on leur confie... D'après des études sérieuses, on pourrait, à budget des ménages égal ou inférieur, engager ces personnes dans un parcours de location-accession à condition de s'y prendre tôt.
Aucune raison ne justifie d'écarter les plus modestes de l'accès à la propriété. Disposer d'un logement amorti à la retraite, n'est-ce pas rassurant ? Chaque locataire résidant doit avoir la possibilité de rester dans son logement ou d'en retrouver un équivalent. Est-il normal qu'une personne qui a été locataire toute sa vie soit privée du droit à la propriété ?
Développons les parcours de cession et d'accession à la propriété ciblés sous l'égide des bailleurs sociaux en les incitant à vendre une partie de leur patrimoine.
M. François Commeinhes . - La politique du logement devient de plus en plus complexe. Les gouvernements ont multiplié les dispositifs coûteux pour soutenir le logement. Dans ma commune de taille moyenne, j'ai eu à faire face au dépeuplement du centre et à la détérioration des zones périphériques, bloquant les parcours résidentiels.
L'urbanisme et la construction souffrent de l'empilement des normes, le droit devient inaccessible ou inapplicable. Les dispositifs ne cessent de changer, au point qu'on ne peut les évaluer sérieusement. Les normes renchérissent le coût unitaire des logements. La loi Duflot a accentué le mouvement, même si la loi Pinel a tenté de rétablir un équilibre.
Malgré la décentralisation, le logement demeure une compétence de l'État. C'est lui qui fixe le montant des enveloppes, ce sont ses agences qui distribuent les aides sur les territoires, sans prise en compte des programmes locaux de développement durable de l'habitat. Il y a une crise de l'articulation entre le local et le national. Pourquoi ne pas décentraliser les aides à la pierre ? Mutualiser davantage ? Élargir le champ de la convention de délégation, introduite par la loi Alur, à une décentralisation de la participation des employeurs à l'effort de construction ? Ce serait un premier pas vers une décentralisation des aides à la personne... L'Agence nationale de contrôle du logement social pourrait être chargée de la collecte des fonds.
Revoyons aussi la cohérence entre les différents outils de planification, privilégions les objectifs qualitatifs, adaptons-nous à la diversité des territoires, tenons compte des bassins de vie, simplifions les dispositifs d'ingénierie. L'État doit faire davantage confiance aux collectivités territoriales. Il est urgent de rapprocher la décision des citoyens.
Mme Sylvia Pinel, ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité . - Je salue la qualité des interventions et de vos propositions, qui marque votre intérêt pour un sujet évidemment majeur et votre esprit de responsabilité. Pour que la confiance revienne, nous avons pris des mesures pragmatiques adaptées aux différentes situations et aux territoires.
MM. Lenoir, Guerriau et Le Scouarnec ont évoqué les chiffres de la construction. Le bâtiment est un secteur économique majeur, essentiel pour permettre aux Français de se loger dans des conditions dignes. Le gouvernement entend relancer la construction, dont la crise a commencé en 2009. Nous cherchons un rééquilibrage entre les territoires pour accentuer nos efforts sur les zones en pénurie. Cette année 110 000 logements sociaux ont été construits malgré la crise. Les mesures en vigueur depuis l'automne - nouveau dispositif de logement locatif, abattement sur les plus-values lors de la vente de terrain, élargissement du PTZ - n'ont pas encore produit leurs effets. D'autres ne sont applicables que depuis le 1er janvier.
Nous avons cinq priorités. Favoriser l'accession à la propriété est d'abord une des clés pour relancer la construction. Le PTZ a été élargi aux classes moyennes, et sera utilisable dans l'ancien dans 6 000 communes rurales pour revitaliser les centres-villes.
Ensuite simplifier les règles d'urbanisme pour faire baisser les coûts et accélérer les projets : 70 mesures de simplification ont été annoncées en juin. Le Conseil supérieur de la construction sera installé bientôt et évaluera leur impact.
Nous voulons ensuite soutenir la construction de logements intermédiaires. Le dispositif d'investissement locatif a été revu, l'État et la CDC prendront leur part de l'effort dans les zones les plus tendues. Les investisseurs institutionnels ont déserté, monsieur Lenoir, depuis vingt ans... Nous cherchons à les faire revenir avec une TVA réduite, une exonération du foncier. Le fonds Argos a levé 500 millions d'euros auprès des assureurs et des caisses de retraite.
Nous renforçons la mobilisation du foncier, public comme privé. Enfin, nous avons lancé un plan de rénovation du parc social ; les ressources des bailleurs sont mutualisées à hauteur de 750 millions, les prêts de la CDC ont été renforcés. Je pense aussi au crédit d'impôt transition énergétique, à la simplification de l'éco-PTZ ou au programme « Habiter mieux ».
Nous voulons que tous ces instruments soient accessibles et connus. Nous devons faire oeuvre de pédagogie pour les faire connaître.
Le dispositif de mobilisation du foncier public est pleinement opérationnel. J'ai installé la commission en juillet dernier. Elle a donné un véritable coup d'accélérateur à notre politique. Elle a établi un premier bilan des opérations de cession menées depuis la loi du 18 janvier 2013. Lors de ses trois premières séances, elle a examiné quinze terrains relevant de la défense, de l'intérieur, de Bercy et de RFF. Elle a décidé la cession de trois d'entre eux, les négociations sur cinq d'entre eux aboutiront au premier semestre 2015. L'arbitrage du Premier ministre a été sollicité pour deux projets à Paris, comprenant une centaine de logements. La prochaine réunion aura lieu le 10 février. Le décret soumettant les établissements publics de santé au régime de la décote a été signé le 30 décembre. Je veux souligner l'effort financier de l'État, 28 millions d'euros pour les premières cessions.
La loi Alur appelle 177 mesures d'application et une centaine de décrets. Le gouvernement a choisi de publier en priorité ceux qui touchent le pouvoir d'achat des ménages et la sécurisation des relations bailleurs-locataires. Deux tiers des textes seront publiés d'ici le printemps. Plusieurs décrets importants ont été pris comme celui créant le Conseil national de la transaction et de la gestion immobilières, l'encadrement des honoraires de location, l'encadrement des loyers au moment du renouvellement ou encore celui relatif aux opérations de requalification à Clichy.
L'encadrement des loyers se heurte à des difficultés techniques. Nous invitons les communes à créer les observatoires des loyers, car il faut recueillir des données précises avant de mettre en place un éventuel encadrement.
La caution locative pour les étudiants a été généralisée. Nous avons aussi conclu un accord avec Action Logement pour élargir la garantie universelle aux jeunes salariés, avant de le faire pour les personnes qui, recherchant un emploi, sont en mobilité géographique vers une zone tendue.
Le rapport d'inspection auquel MM. Lenoir et Dallier ont fait allusion, commandé en 2013, n'exprime pas la position du gouvernement. Certaines de ses préconisations sont d'ores et déjà appliquées : mutualisation de la trésorerie des bailleurs sociaux ; facilitation de l'accession sociale à la propriété dans le parc social ; renforcement du PTZ et encadrement des loyers à titre expérimental. D'autres sujets lourds appellent une réflexion approfondie. C'est le cas des aides personnelles au logement. L'Assemblée nationale a créé un groupe de travail sur ce thème après l'adoption de la loi de finances pour 2015. Le Sénat s'apprête à en faire de même. Les deux assemblées nous feront des propositions... La politique du logement a besoin de stabilité, mais nous sommes ouverts aux mesures qui favoriseraient la territorialisation de la politique du logement - cela va dans le sens du tour de France de la construction.
À la suite de la publication du rapport de la Fondation Abbé Pierre, j'ai proposé un plan triennal pour réduire le nombre des nuitées hôtelières. Nous déploierons 22 millions d'euros par an pour créer 13 000 places dans des dispositifs alternatifs, dont 9 000 places en intermédiation locative, 2 500 places d'hébergement dans des centres pour familles ou des logements sociaux vacants et 1 500 en maisons relais. Il faut ajouter 6 000 places dans des dispositifs alternatifs pour des demandeurs d'asile logés à l'hôtel.
Il faut aussi améliorer la prévention des expulsions. Les expulsions des ménages éligibles au Dalo sont suspendues tant que les préfets n'auront pas proposé de solution de relogement. Une charte sera élaborée en 2015 pour prévoir entre autres une procédure plus précoce de traitement des impayés.
Le gouvernement restera ferme sur l'application de l'article 55 de la loi SRU, moteur de solidarité entre les territoires. Les collectivités territoriales doivent prendre leurs responsabilités.
M. Joël Guerriau. - Elles n'en ont pas les moyens !
Mme Sylvia Pinel, ministre. - L'État prendra les siennes face aux communes récalcitrantes. L'État soutiendra les communes qui, comme la vôtre, monsieur Guerriau, s'efforcent de combler leur retard.
Monsieur Dilain, nous améliorons la transparence dans l'attribution des logements sociaux. Il faut réfléchir à l'échelle pertinente de traitement des dossiers. Un comité interministériel en traitera en mars.
Je salue l'action et l'efficacité de l'Anah. Nous avons déjà amélioré l'éco-prêt pour la rénovation du parc social. La loi sur la transition énergétique renforce plusieurs autres dispositifs. La priorité est donnée à la lutte contre la précarité énergétique.
Monsieur Le Scouarnec, le financement du logement social ne peut être abordé seulement sous l'angle des aides à la pierre. L'État a déjà fait beaucoup, TVA réduite, exonération de TFNB, prêts à taux faible de la Caisse des dépôts et consignations : tout est mis en oeuvre pour dynamiser la création et la rénovation de logements sociaux. L'innovation est soutenue, numérique dans les bâtiments, détection et emport de l'amiante, la formation des entreprises aux techniques innovantes.
Monsieur Mayet, la France n'a pas le plus bas taux de propriétaires en Europe. Elle occupe une position médiane.
Outre le PTZ dans le neuf, le PTZ dans l'ancien favorise aussi la mobilité, ainsi que l'élévation du plafond de ressources. Enfin, les procédures d'urbanisme ne seront pas oubliées par la loi Macron.
C'est en agissant sur tous les leviers que nous relancerons la politique du logement. Le gouvernement a besoin de la mobilisation de tous les acteurs pour réussir. Nous comptons sur le soutien des parlementaires pour y parvenir. (Applaudissements à gauche)
Le débat est clos.
Organisme extraparlementaire (Nomination)
Mme la présidente. - Je rappelle que la commission des affaires économiques a proposé une candidature pour le conseil d'administration de l'agence Business France.
La présidence n'ayant reçu aucune opposition dans le délai d'une heure prévu par l'article 9 du Règlement, je proclame M. Alain Chatillon membre du conseil d'administration de l'agence Business France.
Débat : « la transparence dans le transport aérien »
Mme la présidente. - L'ordre du jour appelle un débat sur la transparence dans le transport aérien, à la demande du groupe UMP.
M. Pascal Allizard, pour le groupe UMP . - Ryanair vient de fêter ses trente ans, un couronnement pour son envol extraordinaire, tandis que les anciennes compagnies nationales se heurtent à de graves difficultés.
L'air connaît une concurrence totalement singulière par rapport à la route et au fer : des concurrents extra-européens, prétendument domiciliés en Thaïlande, avec des agents sous contrat de travail singapourien. La solution serait de s'en remettre à l'Agence internationale de l'aviation civile, peut-être...
La Commission européenne a rendu des décisions importantes ces derniers temps : le 1er octobre sur les aides publiques aux compagnies européennes, le 7 décembre sur le ciel unique européen. Sujets importants, à commencer par le premier où les trois compagnies du Golfe ont bénéficié, outre un environnement fiscal et réglementaire plus que favorable, de 40 milliards de dollars de subventions. Est-ce pour que ses habitants puissent s'ouvrir aux autres cultures ? Pour attirer les touristes dans les supermarchés de leurs cités artificielles ? Que non. Si Dubaï est devenu la quatrième destination internationale au départ de Paris, c'est pour capter la clientèle vers l'Asie. Les compagnies du Golfe ont ainsi siphonné les trois quarts du trafic vers le Moyen-Orient, l'Asie et l'Océanie.
Venons-en aux désormais célèbres compagnies low cost. Ryanair, qui a démarré en 1990 avec un seul avion à hélice reliant Londres à Dublin, affiche désormais une capitalisation boursière quatre fois supérieure à celle d'Air France KLM, et est la deuxième compagnie européenne après Lufthansa. Quant à easyJet, créée en 1995, elle emploie 200 avions et dessert 700 villes.
Son modèle - ou plutôt : son contre-modèle - consiste à vendre des billets à bas prix pour le moins de services possible. Ses agents sont sous contrat irlandais : quatre fois moins de charges ! Et encore, 70 % des pilotes et 60 % des stewards et hôtesses sont des travailleurs indépendants. Les puristes de notre droit du travail y verraient un recel de main-d'oeuvre... Main-d'oeuvre dont le recrutement est fort rentable puisque les pilotes doivent payer une formation, soit 4 000 euros par an pour les pilotes et 3 000 pour le personnel de cabine. La condamnation de l'entreprise le 2 octobre 2013 à Marseille pour travail illicite a entraîné une réaction simple : aucune base de Ryanair ne sera ouverte en France. Donc acte.
Premier commandement : les subventions publiques, tu moissonneras. Les aides publiques représentent ainsi 800 millions, soit 25 % de son chiffre d'affaires, et sont supérieures à son bénéfice : 569 millions.
Deuxième commandement, les impôts, tu éviteras. La compagnie enregistre des charges pour des locations d'avion à une filiale abritée, comme par hasard, dans l'île de Man, à Chypre ou dans le Delaware qui exonère d'impôts les activités dans les pays étrangers. Il fallait oser !
Face à l'imagination des compagnies low cost et de celle des pays du Golfe, que fera l'Europe ? Ces dernières années, la Commission européenne a fait deux communications, en 2005 et en 2010, qui n'ont été soumises ni au Conseil européen ni au Parlement européen. Grâce aux lignes directrices de 2014, meilleures que celles de 2005, il a été possible de trouver une issue au conflit entre Ryanair et Charleroi. Certes, mais les sommes n'ont pu être récupérées qu'à partir de la date d'entrée en vigueur des nouvelles règles.
Cependant, il n'y a guère de quoi se réjouir : pourquoi la Commission européenne soutient-elle le projet de Norwegian Air, une compagnie qui veut s'installer en Irlande pour ouvrir une liaison directe entre Londres et les États-Unis avec des salariés domiciliés en Thaïlande ? Cela s'appelle du dumping social. Pourtant l'article 17 bis de l'accord Ciel ouvert est clair : il ne doit pas servir à contourner les normes sociales.
Les retombées économiques des compagnies low cost sont cinq fois moins importantes que celles des compagnies classiques. Un passager de Ryanair rapporte 350 euros à l'économie française, contre 1 700 euros pour un passager Air France.
Mme la présidente. - Veuillez conclure.
M. Pascal Allizard. - Puisse ce débat éclairer les travaux que le groupe d'études de la commission des affaires économiques débute ! (Applaudissements unanimes)
M. Éric Bocquet. - Excellent discours !
M. Vincent Dubois . - D'après une récente étude de l'organisation internationale de l'aviation civile, les voyageurs se déterminent pour une compagnie aérienne selon le prix du billet, mais 43 % d'entre eux s'estiment mal informés : renseignements inexacts ou incomplets sur les tarifs, la disponibilité de tarifs réduits, les surtaxes ; augmentation subite des tarifs en période de vacances, publicité trompeuse, clauses subtiles dans l'annonce des tarifs.
Dans un arrêt fameux du 15 janvier 2015, la Cour de justice de l'Union européenne a obligé les compagnies et les agences de voyage à plus de transparence. Cependant, les tarifs des billets fluctuent constamment, notamment en fonction du taux de remplissage. Le cours du pétrole pèse moins : sa baisse n'est pourtant pas répercutée sur les prix et les compagnies facturent toujours une surcharge carburant.
En 2014, les tarifs des billets ont été relativement stables : plus 1,1 %. La compagnie Air Tahiti a, elle, décidé une baisse de ses prix si le cours du pétrole continuait de diminuer. Louable effort !
Élu ultramarin, je déplore le manque de vols en période de fêtes. Les ultramarins veulent retrouver leurs familles. Air France, Corsair, Air Caraïbes ont prévu des sièges à bas coût ou des facilités de paiement. Que ce soit un exemple. La région Île-de-France a débloqué 50 000 euros pour les ultramarins frappés par un décès ; ces initiatives devraient se développer.
Après cette parenthèse ultramarine, un seul mot : plus de transparence sur le coût du transport aérien ! (Applaudissements)
M. Michel Vaspart . - Le monde aérien a été bouleversé : l'époque où l'avion était l'apanage d'une élite est révolue et nous pouvons nous en réjouir. Les vols moyen-courriers sont devenus low cost, les long-courriers ont été captés par les compagnies du Golfe. En Europe ne se maintiennent que trois compagnies nationales porte-drapeaux : Air France-KLM, British Airways et Lufthansa. Pour combien de temps ? Nos décisions seront déterminantes pour leur avenir.
Les compagnies du Golfe reçoivent quelque 40 milliards de dollars d'aides directes et les compagnies européennes ont perdu 30 millions de passagers, soit l'équivalent de l'exploitation de trente A 380. C'est ainsi que 30 000 emplois en France ont été détruits et qu'un milliard d'euros de charges sociales n'a pas été perçu.
Je ne reviendrai pas en détail sur les méthodes inacceptables de Ryanair dont le business revient à optimiser les subventions publiques. Que fait l'Europe ? Les taxes et redevances aéroportuaires sont les plus élevées en Europe. Ce qui fragilise la croissance de nos compagnies : le groupe Air France-KLM a payé 4,2 milliards d'euros de taxes pour un chiffre d'affaires de 25,5 milliards. Les taxes ont augmenté de 30 % en huit ans à Paris quand ADP, qui rend un service plus que contestable à Roissy, engrange des bénéfices. Il faut revoir leur coût et leur formation. Est-il normal que les redevances versées par les communes aient été sorties du calcul, ce qui entraîne mécaniquement une hausse de 3 % par an du coût de la taxe ? La taxe sur les nuisances sonores et la taxe sur les solidarités s'assimilent à un impôt, qui coûte 165 millions à Air France.
Enfin, quel scandale que la grève des pilotes d'Air France ! Le groupe a besoin d'une compagnie low cost pour se développer. J'espère que Transavia Europe sera relancée.
C'est l'intérêt de la France et de l'Europe.
Face à une progression du transport aérien de 3 % par an, parce que les citoyens ne veulent pas voyager uniquement sur l'Internet, l'Europe doit réagir pour préserver sa souveraineté et ses emplois. (Applaudissements)
M. François Aubey . - Le transport aérien représente 150 000 emplois en France, et génère de fortes retombées économiques. Pourtant, bien que la France possède un grand constructeur d'avions, une grande compagnie et le premier groupe aéroportuaire, la croissance du trafic ne lui profite pas.
Rapporteur pour avis, j'avais alerté le Sénat en décembre dernier sur la situation de nos compagnies menacées par le bas par les compagnies low cost et par le haut par les compagnies du Golfe. Une concurrence déloyale, faussée...
En février dernier, la Commission européenne s'est montrée ouverte aux subventions publiques pour les aéroports régionaux. Malheureusement, elle n'a pas pris la mesure du monopole qu'exercent certaines compagnies en certains lieux ; elle n'a pas voulu non plus demander des contreparties sociales. Pourtant, ce dernier est désormais mené à grande échelle : faux travailleurs indépendants, faux détachement, fausses bases, etc.
Dubaï, depuis la semaine dernière, a détrôné Londres, comme premier aéroport international. Là encore, concurrence déloyale. Les compagnies du Golfe peuvent n'être soumises à aucune condition de rentabilité ; leur seule vocation est de faire rayonner leur pays. Équipements neufs mis à disposition, carburant à proximité dans les champs pétrolifères, que d'avantages ! La France ne doit plus leur accorder de nouvelles possibilités de vol.
Les comparateurs de prix n'assurent pas au consommateur la garantie du meilleur choix tant viennent s'ajouter, en fin d'opération, frais de services, assurances et autres suppléments.
Enfin, je m'interroge sur la privatisation programmée des aéroports ; ces infrastructures sont stratégiques, je l'ai dit pour Toulouse ; je le répéterai pour Lyon et Nice. Ne bradons pas ces biens de la Nation qui sont rentables. Le précédent des autoroutes devrait faire réfléchir. Ne capitulons pas, défendons les intérêts économiques de la France. (Applaudissements)
M. Jean Desessard . - Cela a été dit, nos compagnies traditionnelles ne luttent pas à armes égales avec les compagnies low cost et les compagnies du Golfe. Le groupe de travail de l'Assemblée nationale, présidé par Bruno Le Roux, préconise, face à cette situation, des solutions souples, voire simplistes : réduire les taxes sur le transport aérien.
Pour les écologistes, la question est d'abord de savoir si le transport aérien peut être vertueux. Recours à des travailleurs indépendants, travailleurs détachés, déclaration de fausses bases d'affectation... En attendant une harmonisation, l'Europe doit agir.
L'environnement, vous ne serez pas étonnés que je l'aborde. L'avion dégage 145 kg de CO2 par kilomètre, la voiture 70 et le train 10. C'est le moyen de transport le plus polluant ! Le roulage des avions à Roissy dégage 300 000 tonnes de CO2 par an, soit autant que le périphérique ! Il y a des solutions : le nouveau moteur électrique de Safran.
Bref, plus de respect des salariés et de l'environnement.
M. Éric Bocquet . - Je souscris à chacun des mots du brillant exposé de mon collègue Allizard. Hélas, quand le savant désigne la lune, l'idiot regarde son doigt. Oui, nos compagnies traditionnelles ont pâti de la déréglementation européenne, qui a facilité l'émergence de compagnies à bas coût - je refuse les anglicismes.
Les conclusions de la mission d'information sont sans appel : faux travailleurs indépendants, faux détachements, contrats à bas coût, sociétés « boîte aux lettres », les compagnies à bas coût sont à la poursuite du dumping social ! Les conditions de travail dégradées mettent en danger la sécurité des voyageurs et des équipages, malgré la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne depuis 2011 qui leur garantit une meilleure protection.
Oui, il faut mieux évaluer les conséquences sociales et fiscales de la formation d'un ciel unique européen. Dans son rapport remis au Premier ministre en octobre dernier, Bruno Le Roux affirmait que le transport aérien demeure une activité porte-drapeau pour un pays, qu'il est multiplicateur d'emplois. Je salue la création d'un groupe de travail au Sénat, en attendant peut-être une mission d'information voire une commission d'enquête. (Applaudissements)
M. François Fortassin . - Le transport aérien représente un million d'emplois, dont 300 000 directs. Grâce aux mutations technologiques, il a fait face à la hausse continue du trafic. Les compagnies européennes ont lutté contre la concurrence en formant des alliances ou en constituant des hubs. Elles sont toutefois en difficulté face aux compagnies low cost et aux compagnies du Golfe. En 2013, le Commissariat général à la prospective titrait : « Les compagnies aériennes sont-elles mortelles ? ».
La France a longtemps mis en avant la notion de base d'affectation mais les sociétés contournent les règles sociales, grâce à de faux détachements, et les règles fiscales grâce à des montages astucieux et des domiciliations dans des paradis fiscaux.
Le gouvernement doit refuser d'accorder aux compagnies du Golfe de nouvelles lignes tant que les conditions n'auront pas été améliorées.
Il faut aussi assurer la transparence pour les consommateurs. Les compagnies pratiquent des tarifs personnalisés en modulant leurs prix en fonction du taux d'occupation de l'avion, du jour de la semaine. La tarification devient opaque.
Enfin la transparence doit aussi prévaloir pour les contrôleurs du ciel... Les arrêts de travail sont autant de grèves perlées dissimulées sous les termes d'avaries techniques ou d'aléas climatiques. Le consommateur a le droit de savoir ce qui se passe dans les tours de contrôle. (Applaudissements)
M. Alain Vidalies, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche . - Je vous remercie pour vos interventions et salue la qualité des propos introductifs de M. Allizard.
Le transport aérien est en croissance continue : 65 millions de passagers en 2013, contre 60 millions en 2010, mais la part du pavillon français se dégrade, passant de 54,3 % en 2003 à 44,8 % en 2014, avec une diminution plus accentuée sur le trafic intérieur et le moyen-courrier international.
Cette diminution est due à la concurrence des compagnies à bas coût, qui transportent près d'un quart des passagers, et des compagnies du Golfe dont le trafic a bondi de 70 % ces trois dernières années ! Air France-KLM n'est pas restée inactive : son plan de transport 2015 s'est traduit par les départs volontaires de 5 300 salariés et un plan de transformation structurelle auquel succède le plan Perform 2020.
Elle a aussi créé Transavia qui a provoqué un très long mouvement social en septembre dernier. Le projet de Transavia Europe avec une délocalisation pour profiter de salaires inférieurs a été heureusement abandonné.
Air France a raison de créer Transavia France pour ne pas abandonner une part de marché au low cost. En revanche créer Transavia Europe, ce serait reconnaître que l'on ne pourrait être compétitif qu'au prix du dumping social, avec des salariés sous statut portugais.
M. Roland Courteau. - Très bien !
M. Alain Vidalies, secrétaire d'État. - Ce conflit social a coûté 330 millions d'euros. D'autres compagnies comme Corsair, Air Austral ou Air Méditerranée ont engagé des réformes structurelles, et réduit leurs effectifs et leur réseau.
Mais ces réformes ne suffiront pas devant la distorsion de concurrence créée par la libéralisation du ciel. Il faut plus de transparence en ce domaine et le gouvernement s'y emploie.
Il faut contrôler l'application des règles sociales par les transporteurs qui bénéficient du caractère international de leur activité. Ryanair a été condamné à 200 000 euros d'amende et à rembourser 8 millions à l'Urssaf, à Pôle emploi et aux caisses de retraite. Dans d'autres cas, l'action de l'État a conduit à des régularisations avant condamnation. Mon ministère est attentif aussi à l'emploi de faux travailleurs indépendants pour contourner les lois sociales.
Soyons clairs : nous ne condamnons pas le principe des compagnies low cost qui répondent à une attente des consommateurs, mais le détournement des règles sociales et fiscales n'est pas justifiable.
M. Roland Courteau. - Absolument !
M. Alain Vidalies, secrétaire d'État. - La concurrence provient aussi des compagnies du Golfe, qui profitent des avantages directs et fiscaux que vous avez décrits. Les nouvelles lignes directrices européennes clarifient la régularité des accords de marketing et de publicité passés entre les aéroports et les compagnies.
Les aides au démarrage des compagnies doivent être limitées dans le temps et encadrées.
En juillet 2014, la Cour européenne a condamné les compagnies à bas coût à rembourser des aides publiques indûment perçues : pour Ryanair, cela représentait 9 millions d'euros. Nous avons lancé une campagne d'information auprès de nos aéroports pour que les situations litigieuses soient régularisées.
Nous avons un cadre légal protecteur sur l'information des consommateurs ; un règlement européen impose un affichage du prix et un arrêt récent de la CJUE renforce encore la protection du consommateur.
La prétendue taxe surcharge carburant ne peut être réduite ou supprimée pour la bonne raison qu'elle n'existe pas. C'est un pur affichage commercial de la part des compagnies aériennes au moment où le prix du pétrole augmentait. On ne peut nous demander de diminuer cette fausse taxe maintenant que ce prix baisse... Il est vrai que les compagnies ont voulu se couvrir en achetant par avance une grande partie de leur carburant, à 120 euros le baril à l'époque.
Je le dis solennellement : le gouvernement n'octroie plus de droits de trafic aux compagnies du Golfe, qui ont bénéficié des accords de 2010 et 2011 et de l'utilisation de gros porteurs comme l'A 380. De ce fait Air France a dû réduire sa desserte de l'Inde, du Vietnam et de la Thaïlande; il a dû y renoncer avec l'Australie, les Maldives, les Seychelles et le Sri Lanka. Bientôt notre connectivité avec l'Afrique ou l'Asie pourrait dépendre des compagnies du Golfe.
Ce problème ne concerne pas que la France. Avec mon homologue allemand, nous saisirons dans une démarche conjointe et lors du prochain conseil des transports, en mars, la Commission européenne : cette question ne doit plus relever de négociations bilatérales entre pays. C'est à la Commission d'agir.
M. Jean Desessard. - Bien sûr !
M. Alain Vidalies, secrétaire d'État. - L'objectif n'est pas le protectionnisme mais une concurrence équitable, assortie de contrôles. La réglementation communautaire doit être renforcée à l'égard des investisseurs. Vous avez cité Norwegian Airlines qui condense tous les travers : de l'ignorance des lois sociales à l'optimisation fiscale. Est-il normal que les États-Unis s'inquiètent et que la Commission européenne tergiverse ?
MM. Jean Desessard et Roland Courteau. - Très bien !
M. Alain Vidalies, secrétaire d'État. - Non, la ligne rouge est clairement franchie. Naturellement, nous devons poursuivre notre travail pour améliorer la compétitivité du transport aérien français. Nous ne pouvons pas assister au démantèlement du secteur aérien sans réagir. Je le redirai autant de fois qu'il le faudra.
Les propositions de Bruno Le Roux ne sont pas restées lettre morte. Les passagers en correspondance seront exonérés de la taxe sur l'aviation civile en 2016, ce qui sera un atout pour les compagnies et nos aéroports.
La modernisation des redevances aéroportuaires est une priorité dans le cadre de la négociation des contrats avec ADP et Aéroports de Lyon.
Le rapport évoque le décalage entre la faible marge des compagnies aériennes en cours de restructuration et la rentabilité des aéroports. Nous devons rééquilibrer la chaîne de valeurs entre les acteurs du transport aérien. De même, il faut poursuivre la simplification des normes.
L'ouverture du capital des aéroports a provoqué un débat démocratique légitime. La cession des parts de l'État est cohérente avec la loi de 2005. De plus, nous ne privatisons pas l'infrastructure qui reste propriété de l'État, mais le capital de la société qui l'exploite, ce qui est déjà le cas dans la plupart des aéroports décentralisés aux collectivités.
Parallèlement, le rôle de l'État comme régulateur s'accroît. Le gouvernement a accepté d'introduire dans la loi pour la croissance et l'activité des dispositions renforçant les conditions imposées par les cahiers des charges et les contrôles sur les candidats au rachat.
Un autre débat à ne pas occulter : des aéroports régionaux regrettent que le gouvernement n'octroie pas de nouveaux droits de trafic aux compagnies du Golfe. Ce n'est pas cohérent avec ce que nous avons dit tout à l'heure. Ils peuvent très bien développer leur activité vers l'Europe, le Canada, les États-Unis, Israël, le Maroc, la Chine, le Brésil, l'Inde, où bien des droits de trafic sont disponibles ; mais octroyer des droits nouveaux vers le Golfe ne créerait pas de nouvelles destinations que l'on atteint par Roissy ou Francfort.
Vous le voyez, le gouvernement joue son rôle de régulateur, sans relâche, en arbitrant entre des intérêts parfois contradictoires et en soutenant la compétitivité de notre transport aérien, afin que le pavillon national ne soit pas structurellement désavantagé.
Au-delà des questions sociales et fiscales, la place et l'attractivité de la France dans le monde dépendent aussi de ses liaisons aériennes. Le maintien des connectivités directes est aussi un enjeu de souveraineté.
Je vous remercie pour ce débat auquel j'ai pris plaisir à participer.
La séance est suspendue à 12 h 45.
présidence de Mme Jacqueline Gourault, vice-présidente
La séance reprend à 15 heures.
Situation de l'emploi (Questions cribles)
Mme la présidente. - L'ordre du jour appelle les questions cribles thématiques sur la situation de l'emploi posées à M. François Rebsamen, ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social.
Je vous rappelle que la séance est retransmise en direct sur France 3 et Public Sénat.
M. Dominique Watrin . - L'année 2014 a été noire pour l'emploi : 300 000 chômeurs supplémentaires, explosion des emplois de courte durée. Les plus de 50 ans et les jeunes sont les plus durement touchés en raison des effets limités des contrats d'avenir et de génération. Face à cela, le gouvernement continue imperturbablement de distribuer des milliards d'euros aux entreprises avec le CICE et le pacte de responsabilité. C'est une impasse.
Il y a pourtant tant d'emplois à sauver. Dans le Pas-de-Calais par exemple, Arc International, malgré sa reprise par un fonds d'investissement américain, supprimera 200 emplois. MyFerryLink, interdite d'accès au port de Douvres, est menacée de la suppression de 600 emplois. J'aurais pu aussi citer Mecaplast, Stora Enso, la Française de Mécanique ou Bridgestone.
Lorsque Pierre Laurent cite le cas du plan social de Sanofi, annulé par la justice, on lui répond qu'il a été négocié... Vous avez rendu les salariés impuissants à coups d'assouplissements du code du travail Qu'allez-vous faire, monsieur le ministre, pour renverser la vapeur ? Quand redonnerez-vous aux salariés le pouvoir de contrer les logiques financières destructrices ?
M. François Rebsamen, ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social . - L'année 2014 est effectivement une année noire, inutile d'en rajouter : 188 000 demandeurs d'emplois de plus en catégorie A. Je ne nie pas la chute de l'emploi industriel, elle ne date pas d'hier ; elle a commencé il y a deux décennies. Elle s'est accélérée de 2000 à aujourd'hui. La part de l'emploi industriel est passée de 17,5 % à 11 % des emplois depuis 2002. Pour y remédier, le gouvernement a choisi de redonner, par le pacte de responsabilité et de solidarité, des marges de manoeuvre aux entreprises pour qu'elles investissent et embauchent.
M. Dominique Watrin. - Je comprends que votre réponse soit contrainte par le temps mais dans la section VI du projet de loi sur la croissance et l'activité, le gouvernement propose de réduire encore les pouvoirs d'intervention des salariés et de contrôle de l'administration en cas de licenciement collectif...
Cela dit, je suis prêt à participer à toute action de sauvegarde de l'emploi, par exemple sur le dossier de MyFerryLink - il est temps de défendre le pavillon français face une décision unilatérale qui bafoue nos intérêts - ou sur le projet innovant de Stora d'éco-emballages à base de chanvre. Cela suppose de s'opposer aux intérêts égoïstes des actionnaires et des multinationales. En avez-vous le courage et la volonté politique, monsieur le ministre ? (Applaudissements sur les bancs CRC)
M. Claude Bérit-Débat . - Le chômage continue de progresser, même moins fortement. Vous avez impulsé dans ce contexte une politique volontariste fondée sur l'emploi aidé destiné aux jeunes. C'est un effort remarquable - 445 000 sont budgétés en 2015. Mais quel est son impact réel sur le chômage ? Quel type de contrats faut-il privilégier ? Les contrats aidés dans le secteur marchand semblent permettre une meilleure insertion, pour un coût moins élevé, tandis que ceux du secteur non marchand s'adressent à un public jeune souvent très éloigné de l'emploi, auxquels ils offrent une première chance. Ce recours à l'emploi aidé doit être adapté aux publics ciblés. Comment renforcer l'efficacité de ces contrats, monsieur le ministre ?
M. François Rebsamen, ministre. - En effet, les contrats aidés forment une politique visant à préparer différents publics à l'insertion dans l'emploi. Il est normal que l'État y ait recours. Oui, il y a 445 000 emplois aidés dans la loi de finances initiale pour 2015. À la fin des années 1990, nous en étions à 800 000 emplois aidés... Beaucoup de contrats très courts, en 2012, ont été attribués à des fins purement électorales. (Exclamations sur les bancs UMP) Je vous rappelle que M. Sarkozy à Dijon avait dit qu'il fallait allonger leur durée. Nous en sommes à onze mois aujourd'hui.
Dans le secteur non marchand, les emplois aidés ont, selon l'administration, un meilleur impact pour l'insertion. Je suis, comme vous, convaincu qu'il faut développer les emplois aidés dans le secteur marchand : 80 000 seront destinés en 2015 aux seniors et aux chômeurs de longue durée.
Mme Catherine Procaccia. - On l'avait demandé dès le vote de la loi !
M. Claude Bérit-Débat. - Un peu d'humilité, s'il vous plaît... Je suis un ardent défenseur des contrats aidés. Dans le secteur marchand, il peut y avoir en effet une meilleure insertion. (M. François Rebsamen, ministre, en convient) Mais il faut marcher sur ses deux pieds... Je vous encourage, monsieur le ministre à poursuivre dans cette voie !
M. Francis Delattre. - Nous voilà rassurés !
Mme Françoise Gatel . - Le secteur du BTP se trouve dans une situation catastrophique. Aux effets négatifs de la loi Alur s'ajoutent des contraintes administratives très lourdes, le compte pénibilité, que M. Sapin reconnaît lui-même comme impraticable, et les dispositions restrictives sur le travail des mineurs, qui rend impossible l'apprentissage dans certains métiers. En Bretagne, depuis cinq ans, le secteur du BTP a perdu 800 postes d'apprentis.
Un mot des salariés détachés d'entreprises de l'Union européenne, dont beaucoup ne respectent pas la réglementation en vigueur en matière de conditions de travail ou de salaire. Ces travailleurs sont plus de 200 000 en 2013 contre 26 000 en 2008. En Ille-et-Vilaine, cela se solde par la disparition de 2 000 emplois dans le BTP.
Nous savons que beaucoup travaillent le soir, les week-ends ou les jours fériés. Certes la loi Savary de 2014 a prévu des dispositifs assez coercitifs en cas de fraude. Il faut néanmoins mieux cibler les contrôles...
Comment le gouvernement favorisera-t-il le développement de l'apprentissage ? La règlementation en vigueur est un frein à l'embauche.
M. François Rebsamen, ministre. - Je partage vos attendus. L'emploi dans le secteur du BTP se dégrade indéniablement, le nombre de travailleurs détachés augmente sensiblement - ce qui n'est pas un problème quand ils sont déclarés.
Pour lutter contre le travail détaché, illégal, non déclaré, le Parlement a adopté la loi Savary, qui augmente très fortement l'amende administrative et permet la suspension des prestations de services en cas de manquement grave. À la demande de la Fédération du bâtiment, nous avons mis en place une carte d'identité professionnelle. (Mme Catherine Procaccia s'exclame)
Pour lever les freins à l'apprentissage, je vais prendre un décret sur les travaux dits dangereux pour les jeunes, afin de passer d'une demande d'autorisation à une déclaration. Les contrôles seront renforcés. Je prendrai dans les semaines qui viennent une initiative très forte, avec le Premier ministre, pour lutter contre le travail illégal.
Mme Françoise Gatel. - Dans ma commune, je me suis approchée d'un chantier, un dimanche après-midi, les peintres se sont envolés comme des moineaux...
Mme Catherine Procaccia . - D'après une étude de la Dares, un peu plus d'un tiers des CDI sont rompus avant la fin de la première année : c'est curieux, paradoxal, d'autant plus que la cause la plus importante est la démission du salarié. Le taux de rupture prématurée est particulièrement élevé chez les 16-25 ans, tandis que la part des licenciements et des ruptures conventionnelles est marginale. La moitié des démissions est le fait des personnes les moins qualifiées. Les jeunes sont-ils instables, mal préparés au travail salarié ? Le CDI n'est plus synonyme de stabilité et de fidélité pour l'entreprise, presque 50 % des contrats sont rompus la deuxième année et 60 % la troisième.
Monsieur le ministre, comme le Premier ministre l'avait envisagé un temps, allez-vous rapprocher les obligations des différents contrats ? Cela faciliterait la vie des entreprises, en particulier, des plus petites. Allez-vous suivre la préconisation d'économistes tels que Jean Tirole, prix Nobel d'économie, tendant à créer un contrat unique ? Ou aligner les dispositions relatives aux contrats courts ?
M. François Rebsamen, ministre. - Il est vrai que les ruptures conventionnelles, depuis leur création en 2008-2009, ont connu un franc succès : elles ont augmenté en 2014 de 6 %, pour atteindre le nombre record de 333 000. La moyenne mensuelle tourne depuis 2009 entre 25 000 et 30 000. Vous savez que les partenaires sociaux sont très attachés à ce dispositif. La rupture n'est pas toujours liée à la conjoncture, surtout aux démissions, plus qu'aux licenciements. Je vous laisse tirer des conclusions qui risqueraient de m'attirer les foudres des partenaires sociaux. (M. Philippe Dallier s'exclame)
Le CDI est-il dépassé ? 87 % des salariés sont en CDI, un pourcentage qui a peu varié depuis quinze ans. Faut-il passer à un contrat unique ? Nous avons en France, j'en suis persuadé, tous les types de contrats utiles. Cette question mériterait toutefois une plus longue analyse.
Mme Catherine Procaccia. - Je vous interrogeais uniquement sur les démissions des jeunes en CDI, de l'ordre de 40 % la première année. Le problème de fond n'est-il pas lié à toutes les charges qui pèsent sur les CDD et qui ont été augmentées récemment par la loi de sécurisation de l'emploi ?
M. Pierre-Yves Collombat . - Durant le quinquennat de Nicolas Sarkozy, le nombre de chômeurs en catégorie A a progressé de 780 000. Sur la première moitié de celui de François Hollande, déjà 610 000 de plus. Je vous fais grâce des autres chiffres. Avant comme après le changement, le diagnostic, les remèdes, les résultats sont les mêmes... Pourtant, comme le dit lui-même Michel Sapin, la conjoncture n'a jamais été aussi favorable ; ni le taux de l'euro, ni le cours du pétrole ne freinent aujourd'hui l'activité. Et si, au lieu de s'acharner à libérer des entraves imaginaires à une mystérieuse croissance, toute prête à bondir, on pratiquait enfin la relance par l'investissement public, tout particulièrement celui des collectivités territoriales ? Qu'en pense le maire de Dijon, monsieur le ministre ?
M. François Rebsamen, ministre. - Les chiffres sont mauvais, je le reconnais. Raison de plus pour ne pas en rajouter, monsieur Collombat ! Entre 2008 et 2012, le nombre de demandeurs d'emploi de catégorie A a augmenté de 740 000, de 550 000 depuis le début du présent quinquennat.
Notre pays a fait collectivement le choix du chômage de masse, c'est-à-dire de la sécurisation générale contre la compétition. D'autres ont choisi le travail à temps très partiel : la Grande-Bretagne a des contrats « zéro heure » qui ne sont, pas plus que les 7,5 millions de mini-jobs en Allemagne, comptabilisés dans les chiffres du chômage... Nous avons des chômeurs qui travaillent plus de 78 heures et sont comptabilisés comme demandeurs d'emploi. Comparaison n'est pas raison.
M. Pierre-Yves Collombat. - Merci pour cette réponse de stricte observance libérale. (Sourires) Pour vous, il n'y aurait pas d'autre choix qu'entre précarité et chômage de masse... Et l'alternative entre politique de l'offre, que l'on nous sert depuis vingt ans, et de la demande, y avez-vous pensé ? (Applaudissements sur les bancs CRC)
M. Jean Desessard . - À reprendre les chiffres de l'Insee, un travailleur d'aujourd'hui produit la même valeur en trois fois moins d'heures que le travailleur des années 1960 : le nombre d'emplois a augmenté de 28 %, celui d'heures travaillées a baissé de 8 %, le temps de travail a diminué de 28 % et dans le même temps le PIB par habitant a été multiplié par trois... Avec deux conséquences : le chômage de masse et la précarisation des travailleurs.
La mécanisation du travail hier, la robotisation aujourd'hui, l'intelligence artificielle demain... La productivité a fortement augmenté, dont les fruits ont été accaparés par le capital. Seule solution : le partage du travail. Monsieur le ministre, quand il y a globalement moins de travail, comment faire pour y donner accès à tous ?
M. François Rebsamen, ministre. - Question vaste à laquelle je ne peux pas répondre en deux minutes...Dans tous les pays d'Europe, on a observé une baisse de la durée collective de travail et un développement du temps partiel, choisi ou subi.
Face à cela, les pays ont fait des choix différents. Par exemple, le taux d'employabilité des femmes est beaucoup plus bas en Allemagne, faute de structures d'accueil pour les jeunes enfants.
La baisse du temps de travail est-elle inéluctable ? Si la croissance ne revenait jamais à ses niveaux antérieurs, la question se poserait à tout le monde ...
M. Jean Desessard. - Ne court-on pas après une croissance qui ne reviendra pas ? Ne faut-il pas faire travailler tout le monde plutôt que distribuer l'argent au capital ? On en rediscutera, bien sûr. (Applaudissements sur les bancs CRC)
M. Alain Richard . - Une question sur les chiffres de l'emploi : depuis 2010, l'écart se creuse entre les chiffres de Pôle emploi et ceux du BIT - 3,4 millions demandeurs d'emploi comptabilisés par le premier, 2,8 millions par le second, dont les critères servent à établir les comparaisons européennes. Il faudrait mieux comprendre cet écart pour dresser des comparaisons utiles avec nos voisins.
M. François Rebsamen, ministre. - L'écart est en effet de plus de 600 000 unités entre les deux échelles statistiques en 2014. Intéressant car cet écart n'existait pas en 2009. D'où vient-il ? D'abord, de la dispense de recherche d'emplois pour les seniors - 180 000 de 2008 à 2012 se sont trouvés ainsi inscrits à Pôle emploi, auxquels il faut ajouter 200 000 de plus depuis 2012. Autre explication, la possibilité de s'inscrire à Pôle emploi à partir de quatre mois au lieu de six.
M. Alain Richard. - Réfléchissons au cas de ces dispensés de recherche d'emploi. Ils sont employables et même si l'on peut comprendre les motifs sociaux ou liés à la surcharge de nos services de l'emploi qui sont invoqués, pourquoi ne seraient-ils pas comptabilisés dans les chiffres du chômage ?
M. Jean-Baptiste Lemoyne . - Les chiffres sont cruels, monsieur le ministre : 3,5 millions de chômeurs au 31 décembre 2014. Dans nos départements, nous rencontrons tous des entrepreneurs qui souffrent de devoir supprimer des emplois. Au troisième trimestre, l'emploi salarié marchand recule deux fois plus en Bourgogne, notre région commune, monsieur le ministre, qu'ailleurs en moyenne en France.
Alors, « que faire ? », pour reprendre une célèbre formule. Les emplois aidés ? 60 % de ceux qui ont en occupé un dans le secteur non marchand sont inactifs six mois après la fin de leur contrat. Le CICE ? Son impact est ralenti par sa qualité de crédit d'impôt et il ne s'applique pas directement sur la feuille de paie. Il faut continuer à alléger les contraintes qui pèsent sur le travail, à relancer l'apprentissage et la voie professionnelle. Monsieur le ministre, quel est votre plan de route ?
M. François Rebsamen, ministre. - Dans notre belle région, le taux de chômage est heureusement moins élevé que la moyenne française. Il varie beaucoup de région à région : 8,5 % en Bretagne, 13 % dans des territoires anciennement industrialisés.
Nous avons entrepris des réformes structurelles : droits rechargeables, réforme de la formation professionnelle avec le compte personnel de formation, y compris pour les chômeurs, relance de l'apprentissage qui a donné des fruits dès septembre et octobre derniers, loi de sécurisation de l'emploi, réforme des prud'hommes.
L'engagement que vous me demandez, je le prends : il n'est pas question d'alourdir les contraintes qui pèsent sur les PME et TPE ; il faut au contraire, tout en garantissant les droits des salariés, donner plus de souplesse et d'agilité aux entreprises.
M. Jean-Baptiste Lemoyne. - Le président de la République a parlé, ce matin, dans sa conférence de presse, du renforcement de l'éducation prioritaire et la Bourgogne, pendant ce temps, perd des ZEP... Sur le terrain, l'apprentissage régresse, comme à Migennes. Il faut passer des pétitions de principe aux actes. Et travailler à une micro-échelle, c'est pas à pas qu'on gagnera la bataille de l'emploi...
La séance est suspendue à 15 h 45.
présidence de M. Jean-Pierre Caffet, vice-président
La séance reprend à 16 heures.
Organismes extraparlementaires (Candidatures)
M. le président. - Je rappelle que M. le Premier ministre a demandé au Sénat de bien vouloir désigner les sénateurs appelés à siéger, d'une part, au sein de la Commission supérieure des sites, perspectives et paysages et, d'autre part, au sein du Haut Comité pour la transparence et l'information sur la sécurité nucléaire.
La commission du développement durable a fait connaître qu'elle propose les candidatures de M. Gérard Miquel et de M. Alain Fouché pour siéger au sein de ces organismes extraparlementaires. Ces candidatures ont été publiées et seront ratifiées, conformément à l'article 9 du Règlement, s'il n'y a pas d'opposition à l'expiration du délai d'une heure.
Intercommunalités et représentation des communes (Deuxième lecture)
M. le président. - L'ordre du jour appelle la discussion, en deuxième lecture, de la proposition de loi, modifiée par l'Assemblée nationale, autorisant l'accord local de répartition des sièges de conseiller communautaire.
M. André Vallini, secrétaire d'État auprès de la ministre de la décentralisation et de la fonction publique, chargé de la réforme territoriale . - Oui, c'est avec plaisir que je reviens devant vous pour l'examen en deuxième lecture de cette proposition de loi. Cette séance marquera la fin de la remise en cause des conseils communautaires constitués de bonne foi, mais remis en cause pour des raisons de conformité au droit constitutionnel sur lesquelles je ne reviens pas.
Votre proposition de loi a été adoptée par l'Assemblée nationale le 18 décembre avec quelques modifications pour tenir compte de l'avis du Conseil d'État et quelques précisions élaborées en bonne intelligence entre le rapporteur de l'Assemblée nationale, M. Dussopt et M. Richard. Texte co-élaboré par les deux assemblées, texte transpartisan qui reçoit l'aval total du gouvernement : c'est assez rare pour être remarqué. Votre rapporteur en propose l'adoption sans modification.
Il faudra sans doute envisager une saisine du Conseil constitutionnel en application de l'article 61 de la Constitution, pour sécuriser la solution ainsi trouvée, en cas de future QPC. Merci à tous les groupes : ce texte était attendu par les élus locaux. (Applaudissements)
Mme Catherine Troendlé, rapporteur de la commission des lois . - Adoptée le 18 décembre 2014 par l'Assemblée nationale, cette proposition de loi vise à remédier à la censure par le Conseil constitutionnel, le 20 juin 2014, des dispositions introduites par la loi du 16 décembre 2010, permettant aux communes membres d'une communauté de communes ou d'agglomération de répartir entre elles, par un accord conclu à la majorité qualifiée, les sièges de conseillers communautaires en « tenant compte » de leurs populations respectives. La proposition de loi réintroduit la faculté d'un accord, plus strictement contraint, pour respecter la décision du Conseil.
En première lecture, le Sénat s'est attaché à renforcer l'encadrement de l'accord local proposé pour resserrer les écarts à la proportionnelle démographique qui en résultent, au regard des limites admises par le Conseil constitutionnel dans sa jurisprudence sur le respect du principe d'égalité devant le suffrage.
L'Assemblée nationale, suivant son rapporteur, M. Dussopt, a poursuivi la démarche sénatoriale. Entre-temps, le Conseil d'État a été saisi par le Premier ministre. Son avis, rendu le 20 novembre 2014 et transmis à votre rapporteur par le gouvernement, a conduit le rapporteur de l'Assemblée « à récrire l'article premier afin d'intégrer l'essentiel des réserves admises par le Conseil d'État ».
La proposition de loi a été complétée par les députés pour « sécuriser juridiquement la possibilité de recourir à un accord local en cas d'annulation » juridictionnelle de la répartition antérieure des sièges.
Notre commission a modifié sur trois points l'article premier pour exclure de l'attribution autorisée d'un siège supplémentaire par rapport à l'effectif qui résulterait de l'application de la proportionnelle démographique les communes qui ont bénéficié de la garantie du siège de droit pour toute commune ; attribuer à ces communes un siège supplémentaire au cas où leur représentation serait inférieure de plus d'un cinquième à la proportionnelle démographique ; apprécier la sous-représentation d'une commune par sa part dans la population totale de l'intercommunalité. En séance, nous avions adopté un amendement de M. Joyandet pour définir l'écart autorisé par le tunnel de 20 % permis par la jurisprudence constitutionnelle.
Ce travail a été poursuivi et complété par l'Assemblée nationale. Au terme de ses travaux, un écart à la limite des 20 % serait autorisé lorsque la répartition des sièges par application des principes légaux, notamment l'attribution d'un siège au moins à chaque commune et l'interdiction pour l'une d'entre elles de détenir plus de la moitié des sièges, conduirait à un écart de représentation d'une commune supérieur à 20 % de la moyenne. Cette dérogation ne serait possible que si l'accord maintenait ou réduisait cet écart.
Lorsque, d'autre part, par application de la représentation proportionnelle à la population, une commune obtiendrait un siège de conseiller communautaire, elle pourrait en obtenir un second en vertu de l'accord pour « favoriser une représentation plurielle et paritaire de chacune des communes au sein de l'organe délibérant ». Le rapporteur de l'Assemblée nationale précise que ce tempérament lui a été suggéré par l'auteur de la proposition de loi, Alain Richard.
L'Assemblée nationale a renforcé la condition de majorité qualifiée exigée pour l'adoption de l'accord local en y intégrant le conseil municipal de la commune la plus peuplée, si elle représente plus du quart de la population totale. Elle a étendu les principes retenus pour encadrer l'accord local à la faculté, aujourd'hui offerte aux communes, de créer et répartir un volant de sièges au plus égal à 10 % du nombre total de sièges résultant de l'application des règles légales. Pour les communautés de communes et d'agglomération, ce dispositif est ouvert aux communes qui n'auraient pas conclu d'accord local. Cette décision est prise à la majorité qualifiée. La répartition des sièges supplémentaires serait soumise aux mêmes règles que celles retenues pour encadrer l'accord local en ce qui concerne les écarts de représentation à la moyenne.
L'article premier bis fixe les modalités de désignation des conseillers communautaires entre deux renouvellements des conseils municipaux, en cas d'annulation de la composition d'un organe délibérant d'un EPCI à fiscalité propre. Ce dispositif complète l'article L. 5211-6-2 du code général des collectivités territoriales, pour y intégrer expressément l'hypothèse de l'annulation par le juge administratif de la répartition des sièges au sein du conseil communautaire.
Les députés ont adopté un amendement du gouvernement, destiné à assouplir la constitution des listes de conseillers municipaux non titulaires d'un mandat communautaire pour pourvoir les sièges supplémentaires attribués à une commune par rapport au nombre qu'elle détenait lors du dernier renouvellement.
Désormais, les communes auraient la possibilité de constituer des listes incomplètes. Dans ce cas, les sièges non pourvus seraient attribués à la liste qui aurait obtenu la plus forte moyenne suivante. Cette novation permettra à tous de constituer une liste, quand bien même le nombre de candidats serait inférieur au nombre de sièges à pourvoir.
L'article 2 vise à permettre aux intercommunalités concernées de recourir à l'accord local dans sa version rénovée par le présent texte pendant une période de six mois à compter de sa promulgation.
Le Sénat en avait adopté le principe sous réserve de clarification rédactionnelle. Le dispositif a été complété par la commission des lois de l'Assemblée nationale puis modifié, en séance, par l'adoption d'un amendement du gouvernement.
Ainsi, en cas de renouvellement intégral ou partiel du conseil municipal d'une commune membre d'un EPCI ayant fait l'objet d'un accord local avant le 20 juin 2014, il serait procédé à une nouvelle détermination du nombre et de la répartition des sièges communautaires, dans un délai de deux mois. On fixe ainsi la nouvelle répartition et le nombre de conseillers communautaires à élire avant le début des opérations électorales, lesquelles doivent être organisées dans les trois mois après l'annulation définitive en application de l'article L. 251 du code électoral.
Monsieur le ministre, pourriez-vous préciser les conséquences des modifications de l'exécutif des communes membres sur l'exécutif de l'intercommunalité ?
Nous nous sommes efforcés de préserver dans les meilleures conditions de sécurité juridique la faculté d'un accord local pour faciliter le consensus intercommunal. Je vous propose d'adopter cette proposition de loi sans modification, pour apporter une réponse rapide aux attentes des EPCI. (Applaudissements)
Mme Jacqueline Gourault . - Pour répartir dans une intercommunalité le nombre de sièges, nous avions depuis la loi de 2010 deux solutions : soit appliquer un tableau établissant le nombre de sièges à la proportionnelle de la population, soit passer un accord « en tenant compte de la population ».
C'est ce qui s'est passé dans une intercommunalité de mon département, la communauté des Rivières. Il y avait une majorité qualifiée contre la commune de Salbris. Le Conseil constitutionnel, après la question prioritaire de constitutionnalité déposée par Salbris, a jugé que la répartition des sièges était « manifestement disproportionnée » par rapport à la réalité de la population des communes membres. Le Conseil constitutionnel a donc considéré que cette décision méconnaissait le principe d'égalité devant le suffrage et devait être déclarée contraire à la Constitution.
La décision du Conseil constitutionnel n'a pas d'effets que pour Salbris puisque 90 % des communes de France ont passé un accord. Quand le conseil municipal d'au moins une des communes membres était renouvelé, il fallait re-répartir les sièges. Il fallait donc trouver une solution. Je remercie Alain Richard et Jean-Pierre Sueur d'avoir proposé cette modification qui soulagera certaines situations.
Sur la modification des conditions de majorité, il y a une sorte de droit de veto de la commune centre lorsqu'elle représente plus du quart de la population totale de l'intercommunalité.
M. Pierre-Yves Collombat. - Égalité !
Mme Jacqueline Gourault. - Je suis pour un tel droit de veto. On ne peut faire d'intercommunalité sans l'accord de la commune centre, ni sans les communes plus petites.
M. Pierre-Yves Collombat. - C'est cela, oui !
Mme Jacqueline Gourault. - L'accord se fait non plus « en tenant compte de », mais « en fonction de la population ». C'est un progrès.
L'accord local sera encadré : chaque commune dispose au moins d'un siège, comme avant ; aucune commune ne pourra plus détenir plus de la moitié des sièges ; le nombre de sièges détenus par une commune pourra être majoré d'un tiers. Cela demeure. Toutefois, l'ensemble des sièges détenus par chaque commune ne pourra s'écarter du tunnel de plus ou moins 20 %, sauf lorsque la répartition appliquée en cas de désaccord, selon le tableau, s'écarterait de plus de 20 % de celle découlant de l'accord, ou lorsque la plus forte moyenne contribuerait à l'attribution d'un siège.
Bref, soit l'on applique le tableau et il y a des endroits où cela marche...
M. Pierre-Yves Collombat. - Oh !
Mme Jacqueline Gourault. - ... soit on passe un accord « en fonction de la population » et il doit respecter le tunnel des 20 %.
Le groupe UDI-UC est ravi de voter cette proposition de loi. (Applaudissements sur les bancs écologistes et UDI-UC)
présidence de Mme Jacqueline Gourault, vice-présidente
M. Alain Richard . - Je rappelle que l'intention à l'origine de cette proposition de loi était palliative, réparatrice. Il s'agit de corriger des écarts de population de 1 à 1,5, ce que traduit le tunnel de plus ou moins 20 %. Il m'a semblé que l'on pouvait rétablir les conditions d'un accord local souhaité par la majorité des intercommunalités.
Cette proposition de loi a donc tenté, en interprétant la jurisprudence du Conseil constitutionnel, d'ouvrir un peu la possibilité d'écart de représentation. Le Conseil a énoncé en 1995 de façon précise ce que doit être la représentation des communes dans une communauté d'agglomération. La loi de 2010 a pris en compte cette décision, tout en rétablissant la possibilité d'un accord local. Nous avons donc désormais la certitude que le Conseil constitutionnel admet la possibilité d'un tel accord.
La question porte maintenant sur l'étendue des écarts. Nous pouvons avoir une différence d'appréciation sur la présence de la ville la plus importante dans l'accord local. Il m'a paru cohérent de l'accepter.
La jurisprudence du Conseil constitutionnel a érigé en principe que l'on doive toujours expliciter le motif d'intérêt général qui justifie que l'on s'écarte de l'égalité des citoyens devant le suffrage. Quand il était question du conseiller territorial, le Conseil a accepté l'idée que tout département devait être représenté par un nombre incompressible de quinze conseillers territoriaux, même si cela créait une surreprésentation de certains départements. On peut appliquer le même raisonnement à une intercommunalité.
Nous avons tenu compte des observations de l'Assemblée nationale. Nous avions dans l'urgence négligé une circonstance : la transformation du conseil communautaire peut se produire ex post. Il y a aussi la « désélection » : des conseillers communautaires ont été élus en 2014 et, à la suite d'accords locaux ou de fusions, il peut y avoir, selon la loi de 2013, une re-désignation des conseillers communautaires par les conseils municipaux.
Il reste à espérer que ce texte stabilisera durablement le droit dans la Constitution des intercommunalités. D'où le projet de saisine du Conseil constitutionnel que j'ai établi. Certains collègues ont fait une saisine « blanche », sans énoncer la moindre considération de droit. Il me semble qu'il vaut mieux argumenter un peu. Cela ne nous garantit pas absolument contre de nouvelles QPC, mais au moins, sur le point central qu'est l'écart de représentation, nous obtiendrons une réponse en droit, que j'espère positive, grâce à laquelle nous éviterons des incertitudes juridiques et des contentieux préjudiciables à la sérénité de la vie locale intercommunale. (Applaudissements sur les bancs socialistes)
Mme Catherine Troendlé, rapporteur. - Très bien !
M. Jean Desessard . - Cette proposition de loi sécurise juridiquement les accords, conclus entre les communes composant une intercommunalité, pour les élus qui siègent au conseil communautaire. Elle réintroduit la faculté d'un accord plus restreint et ajoute un peu de souplesse, pour prendre en compte les spécificités locales. Le nombre d'habitants ne peut être le seul critère. Le sentiment de relégation répandu dans une partie de la société française peut trouver sa source dans certaines communes périurbaines. Dans les campagnes, aussi, où les territoires, la faune, la flore, les paysages, doivent être suffisamment représentés au-delà de la seule population humaine.
Les écologistes ont toujours soutenu la montée en puissance des intercommunalités, car elles correspondent à des bassins de vie cohérents. Les dernières élections municipales ont donné lieu à une innovation : le fléchage sur les bulletins de vote des élus appelés à siéger dans les intercommunalités. Pour autant, les écologistes sont favorables à l'élection au suffrage universel direct des conseillers communautaires... (Exclamations sur les bancs socialistes et du RDSE) Cela ne signifie pas la fin des communes, (murmures sur les mêmes bancs) auxquelles les citoyens restent attachés. Ils connaissent bien leur maire ; nous souhaitons qu'ils connaissent aussi bien leurs élus communautaires, dès lors que ceux-ci prennent désormais des décisions importantes.
Le groupe écologiste votera cette proposition de loi utile.
Mme Éliane Assassi . - Cette deuxième lecture nous renvoie à la première lecture. Nous ne sommes pas favorables à l'intercommunalité forcée inscrite dans la loi de 2010, à laquelle nous nous étions opposés. Nous nous étions abstenus sur la proposition de loi d'Alain Richard de 2012. La loi de 2010, nous en avons la confirmation hélas, n'est que la première marche de la suppression du lien des élus communaux avec la population. Pour autant, il fallait tirer les conséquences de la décision du Conseil constitutionnel de juin dernier, qui découle elle-même de l'intercommunalité forcée.
Nous sommes attachés non pas à la représentation des territoires en soi, mais aux pouvoirs des élus locaux représentant les femmes et les hommes qui vivent dans leurs communes. La surreprésentation de la commune centre et l'absence de représentation de certaines communes participe à la technocratisation, à ce sentiment d'éloignement des citoyens, à la rupture du lien entre commune et intercommunalité.
Nous avons refusé l'augmentation du seuil des intercommunalités à 20 000 habitants lors de la discussion de la loi NOTRe. Nous n'avons pas non plus soutenu l'amendement socialiste portant ce seuil à 15 000 habitants. Selon Mme Lebranchu, 623 intercommunalités seront obligées de fusionner dans le premier cas, 475 dans le deuxième. Ce n'est donc pas neutre !
Le groupe CRC votera ce texte pour éviter de corseter la démocratie locale. Un accord local est une bonne chose. Il ne faudrait pas que l'Assemblée nationale revienne sur la décision du Sénat de supprimer le relèvement du seuil des intercommunalités dans la loi NOTRe. Pourquoi voter des lois si c'est pour devoir y revenir un an ou deux après, pour en atténuer les conséquences dénoncées par le Conseil constitutionnel ? (Applaudissements sur les bancs CRC et quelques bancs socialistes)
Mme Catherine Troendlé, rapporteur. - Très bien ! On est d'accord !
M. Pierre-Yves Collombat . - S'il restait quelques élus ruraux ignorant que toutes les communes n'étaient pas égales dans l'intercommunalité, le Conseil constitutionnel est là pour le leur rappeler. Son raisonnement vaut qu'on s'y arrête, ce que l'on fait rarement. Lisez donc son quatrième considérant : même si une intercommunalité n'est pas une collectivité territoriale en tant que telle, prise compétence par compétence, elle l'est quand même, puisqu'elle les exerce en lieu et place des communes. C'est ce qu'on appelle, en bon français, un sophisme. Après la validation des comptes de campagne de Jacques Chirac et d'Édouard Balladur, ce monument de l'État de droit mérite que l'on célèbre sa légitimité, tellement supérieure à celle des parlementaires, soumis, on le sait, à tant de pressions. Les « Sages » ne sont pas élus mais ils sont en communication directe avec le Ciel. L'intercommunalité, c'est une commune sans la compétence générale : peu importe, c'est le Conseil constitutionnel qui fait la Constitution et non l'inverse.
Ce texte franchit une nouvelle étape : une commune représentant 25 % de la population d'une intercommunalité pourra faire prévaloir son point de vue, via un véritable droit de veto. Le texte qui nous vient de l'Assemblée nationale ôte tout intérêt à la proposition de loi. Il aurait été inspiré par le Conseil d'État - c'est ce qu'on appelait, dans la Chine impériale, « gouverner derrière le paravent ». Sans doute vise-t-il aussi à répondre aux intérêts de quelques communes centres, qui redoutaient de se retrouver ligotées, comme Gulliver par les Lilliputiens. Le Sénat doit pourtant sa légitimité à la représentation de chaque portion, fût-elle petite, du territoire. Je ne voterai pas ce texte méprisant pour les petites communes. Il y a des moments où les symboles importent.
M. David Rachline . - L'enjeu de ce texte est de trouver un équilibre nécessaire entre la proportionnalité démographique et les situations locales particulières, traduit par des accords locaux, qui fondent 90 % des communautés de communes.
Mais le Conseil constitutionnel a considéré que cela méconnaissait le principe d'égalité devant le suffrage, etc. Un territoire n'est pas que l'addition d'un nombre d'habitants, c'est le fruit d'une histoire et d'une géographie. Les auteurs de ce texte en tiennent compte. Le texte qui revient de l'Assemblée nationale renforce la place de la ville-centre. C'est important, car elle joue un rôle clé. Un accord local doit être un outil de souplesse, et je rejoins le rapporteur sur ce point.
Les intercommunalités se sont trop souvent développées de manière locale et anarchique, s'apparentant davantage à de petits arrangements entre amis, plutôt qu'à des regroupements de projets. Je sais de quoi je parle, j'en suis la victime. Je voterai ce texte.
Mme Nicole Duranton . - Au-delà des mots, il y a des réalités. Le territoire en est une, qui est le coeur de l'identité, le lieu de vie, d'action de nos concitoyens. La décision du Conseil constitutionnel du 20 juin 2014 est apparue comme très dure pour nos territoires ruraux. Si un maire d'une commune rurale ne peut être présent pour siéger au conseil communautaire, personne n'y représentera la ruralité. Tout ira à la ville-centre. Évitons qu'une décision du Conseil constitutionnel ne cristallise la réalité territoriale au profit des seules villes, contre la ruralité. C'est ce que ressentent les maires de l'Eure.
Cette proposition de loi est bienvenue. Le Sénat s'est attaché en première lecture à la proportionnelle démographique. Je me réjouis que l'Assemblée nationale ait poursuivi notre démarche. Je la salue, comme je l'avais fait en tant que maire d'une petite commune de l'Eure. Ce sont des élus locaux qui construisent patiemment, quotidiennement, l'intercommunalité, dans la concertation, pour leurs territoires. Ils sont pris dans un paradoxe, entre une décision constitutionnelle et une réforme territoriale gouvernementale. Un peu de clarté s'impose. Cette proposition de loi va dans le bon sens. Laissons les intentions locales éclore.
J'ai écouté avec attention la position du gouvernement sur la proposition de loi constitutionnelle de Philippe Bas et Gérard Larcher. Où est la cohérence du PS qui n'a de cesse de réduire le débat à une opposition entre réformateurs et conservateurs ? Et qui sont les conservateurs ?
Pourquoi émettre un avis défavorable à ce texte qui prolonge l'esprit de la présente proposition de loi dans la Constitution ? N'est-ce pas réformateur que de sortir, via la Constitution, de la règle réductrice arithmétique ? Au-delà des conservateurs et des réformateurs, il faut en ce temps de crise, du courage politique et je soutiens pour ma part cette proposition de loi. (Applaudissements sur quelques bancs UMP)
M. Cyril Pellevat . - Cette proposition de loi est attendue par de nombreux EPCI, fragilisés par la décision du Conseil constitutionnel du 20 juin 2014, annulant le principe des accords locaux : plus d'aménagements, adaptés à la situation de chaque territoire, seule demeure l'application de la règle démographique.
Dans mon département, la communauté de communes du Genevois, de 38 000 habitants, avec une ville-centre de 12 000 habitants, ne dispose plus que de 42 conseillers communautaires contre 52 conseillers auparavant. Certes, les 17 communes sont représentées mais deux voient leur nombre de délégués passer de trois à deux et huit d'entre elles n'ont plus qu'un seul délégué.
L'accord local permettrait d'équilibrer la représentation du territoire, de déterminer une gouvernance adaptée. La solidarité ne se mesure pas qu'en termes d'habitants. Il y avait urgence à stabiliser la situation. Le groupe UMP a déposé une proposition de loi allant dans le même sens que celle-ci, je le rappelle : redonner un fondement aux accords locaux tout en les encadrant.
Écoutons les dynamiques locales, ayons confiance dans l'intelligence locale. Je voterai ce texte, car il préserve un peu de démocratie locale. (Applaudissements sur les bancs UDI-UC)
La discussion générale est close.
Discussion des articles
ARTICLE PREMIER
M. Pierre-Yves Collombat . - On ne peut pas faire une intercommunalité contre la ville-centre, nous a-t-on dit, mais on peut désormais la faire contre toutes les autres communes, représentant 75 % de la population. Cherchez l'erreur... Mais ce n'est pas une erreur, c'est le produit d'une volonté. Il me navre qu'elle soit très largement partagée.
L'article premier est adopté, de même que les articles premier bis, premier ter et 2.
L'ensemble de la proposition de loi est définitivement adopté.
Mme la présidente. - Voici un exemple de navette bicamérale positive !
M. André Vallini, secrétaire d'État. - Je réponds à la question de Mme le rapporteur : les membres du bureau ayant le mandat de conseiller communautaire perdent leur fonction exécutive en même temps que le président. Pour les vice-présidents, délégués du président, si ce dernier est remplacé, tout le bureau est à renouveler. Un texte du Secrétariat général du ministère de l'intérieur et de la DGCL du 15 juillet dernier est venu préciser la situation après la décision du Conseil constitutionnel : je vous le ferai parvenir.
La séance, suspendue à 17 h 5, reprend à 17 h 10.
Organismes extraparlementaires (Nominations)
Mme la présidente. - Je rappelle que la commission du développement durable a proposé des candidatures pour deux organismes extraparlementaires.
La présidence n'ayant reçu aucune opposition dans le délai d'une heure prévu par l'article 9 du Règlement, je proclame M. Gérard Miquel membre de la Commission supérieure des sites, perspectives et paysages et M. Alain Fouché membre du Haut Comité pour la transparence et l'information sur la sécurité nucléaire.
Modernisation du secteur de la presse (Procédure accélérée)
Mme la présidente. - L'ordre du jour appelle la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, portant diverses dispositions tendant à la modernisation du secteur de la presse.
Discussion générale
Mme Fleur Pellerin, ministre de la culture et de la communication . - La presse tient dans notre pays une place à part, par sa participation au débat démocratique. Elle n'est pas seulement un pouvoir ou un contre-pouvoir. Elle est l'espace de liberté et de débat essentiel à la démocratie. La liberté de la presse ne doit pas rester une pétition de principe, une liberté virtuelle, un slogan de manifestation ; elle doit s'exercer pleinement. Cela suppose des journaux nombreux, divers, robustes financièrement.
Le contexte a changé depuis l'examen de ce texte à l'Assemblée nationale. L'attaque abjecte contre Charlie Hebdo il y a un mois visait à frapper au coeur la République. Ce coeur, c'est la presse. Le 11 janvier, les Français ont rappelé que la France se lèvera toujours pour défendre la liberté. « Nous n'insultons personne quand nous défendons nos idées, quand nous proclamons la liberté : le drapeau français est toujours celui de la liberté », a dit le président de la République lors du 70e anniversaire de l'Agence France-Presse.
Avec ce texte, nous contribuerons au maintien du pluralisme dans la presse.
Je salue le travail d'orfèvre du rapporteur de l'Assemblée nationale, le député Françaix, le travail constructif de votre rapporteur, monsieur Bonnecarrère, ainsi que l'implication du groupe communiste, Pierre Laurent au Sénat, Marie-George Buffet à l'Assemblée nationale.
Le numérique bouleverse l'accès à la presse. Cette proposition de loi renforce la distribution de la presse, modernise la gouvernance de l'Agence France-Presse (AFP) et crée un nouveau statut d'entreprise solidaire de presse d'information.
Ce secteur de la presse connaît une crise profonde liée au déclin de la distribution. Le nombre de distributeurs est passé de 29 749 fin 2012 à 26 816 fin 2013. Dans le respect des principes fondateurs de la loi Bichet - gouvernance paritaire, solidarité et égalité des titres, il convient de renforcer les logiques de solidarité coopérative au sein des messageries, qui seront soumises à une procédure d'homologation. Les principes de coopération et d'équilibre financier général seront réaffirmés. Après consultation de la profession, il apparaît que l'aménagement proposé par votre commission va dans le bon sens.
Le texte propose d'ouvrir le dernier kilomètre aux éditeurs de presse. Je sais les craintes que cela suscite. Cependant, la mutualisation est nécessaire en temps de crise. Les éditeurs de la Presse quotidienne régionale (PQR) pourront ainsi acheminer vers les points de vente des titres de la Presse quotidienne nationale (PQN).
L'AFP est la seule agence internationale non anglophone. Elle apporte, depuis soixante-dix ans, une information exacte, impartiale et digne de confiance, conformément à l'article 2 de sa charte. Or la concurrence s'accroît, avec le développement de l'agence chinoise. Cette proposition de loi propose la création d'une filiale, c'est une réponse efficace à son besoin de financement. La loi de finances initiale 2015 consacre 2 millions d'euros à l'AFP : c'est un traitement très favorable.
L'Assemblée nationale a proposé une modification de la composition de son conseil d'administration, intégrant des personnalités qualifiées et visant la parité. Le conseil supérieur est également renouvelé.
Troisième évolution, la participation de la commission financière au conseil d'administration ; quatrième évolution, l'allongement du mandat du président de trois à cinq ans.
Votre rapporteur propose une fusion de la commission financière et du conseil supérieur en un comité de surveillance. Cela me semble prématuré, voire aventureux. Nous en reparlerons.
La mise en place d'une comptabilité séparée pour les activités ne relevant pas des missions d'intérêt général et la fin du régime spécifique pour les créances de l'AFP, qui seront désormais soumises au droit commun, étaient nécessaires pour respecter le droit européen.
La création d'un nouveau modèle d'entreprise est une formidable motivation pour faire émerger de nouveaux projets éditoriaux. C'est ce que permet le statut d'entreprise solidaire de presse d'information.
Le soutien des Français à la liberté de la presse doit se traduire concrètement. C'est pourquoi le gouvernement soutiendra la création d'une disposition fiscale permettant un abattement pour ceux qui investiront dans la presse - au même titre que les partis politiques. Merci aux sénateurs socialistes, et notamment à M. Assouline, pour leur initiative, que le gouvernement complètera par un sous-amendement. Avec cette disposition, nous pourrons soutenir tous les titres de presse d'information, et tout particulièrement les entreprises solidaires. C'était un voeu de Charb, qui s'était mobilisé pour une telle loi.
Le titre III regroupe des dispositions diverses relatives au secteur de la presse, nous en débattrons en détail. Le gouvernement s'est attaché à la protection du secret des sources des journalistes, qui est une pierre angulaire de la liberté de la presse, fait l'objet d'un amendement. Un texte sera déposé cette année pour le renforcer.
La récente tragédie rappelle l'impérieuse nécessité de ne plus opposer les exigences républicaines. Un décret sera pris prochainement étendant l'aide financière aux titres politiques fragiles, comme je m'y suis engagée devant Marie-George Buffet.
Merci de voter ce texte utile pour notre vie démocratique. (Applaudissements sur les bancs socialistes)
M. Philippe Bonnecarrère, rapporteur de la commission de la culture . - Ce texte n'est pas la grande loi de modernisation de la presse qui serait nécessaire. (M. Jacques Legendre approuve) Il ne mérite ni louange ni excès de critiques : il vise avant tout à résoudre des problèmes ponctuels. C'est dans cet esprit que la commission l'a examiné, sans en modifier le périmètre, faute de temps : trois semaines seulement.
Nous avons travaillé autour de deux axes : synthèse et approfondissement, avec le souci cher au Sénat de la qualité de la loi.
Cette proposition de loi traduit l'engagement du gouvernement de mettre les statuts de l'AFP en conformité avec le droit européen dans les délais, avant le 27 mars 2015. D'où la procédure accélérée.
Les engagements pris par le gouvernement au nom de notre pays me paraissent tout à fait adaptés.
Les autres dispositions - celles relatives à la gouvernance de l'AFP entre autres - sont reprises du rapport de M. Françaix et d'une proposition de loi de Jacques Legendre déposée en mai 2011, à laquelle M. Assouline avait participé. Autant dire que ces mesures sont largement consensuelles.
Concernant l'AFP, votre commission ne propose que peu de modifications : qu'au moins trois des cinq personnalités qualifiées soient de nationalité étrangère ou puissent justifier d'une expérience au niveau européen ou international, et qu'un contre-pouvoir au conseil d'administration soit institué afin de mieux distinguer fonction de direction et fonction de supervision. J'ai été étonné par la faiblesse des instances de direction de l'AFP. Le conseil d'administration se réunit deux fois par an, le conseil supérieur, une fois par an, ou pour examiner une plainte d'un client de l'AFP...
Cela ne peut durer : il faut un lieu où la stratégie de la maison soit exposée, examinée, contrôlée. La création d'une filiale de moyens qui pourra s'endetter à hauteur de 26 millions d'euros va porter l'endettement de l'entreprise à un niveau inédit. Or le plan d'investissement prévu, de 30 millions, ne fera l'objet d'aucun examen contradictoire. Pour dire les choses clairement, la situation de l'AFP n'est pas bonne : ses résultats seront négatifs en 2014, de même que ses fonds propres. La dette de 26 millions devra être remboursée. À part un partenariat public-privé, tous les moyens de déconsolidation de dette ont été utilisés...
L'AFP n'a pas tant besoin d'une gouvernance que d'une gestion moderne. Les personnels sont conscients de la nécessité de faire évoluer les choses. C'est pourquoi votre commission propose de créer une commission de surveillance en fusionnant le conseil supérieur et la commission financière, sur le modèle du conseil de surveillance de la Caisse des dépôts et consignations. J'ai entendu vos réserves, madame la ministre. Du temps pour expertiser, dites-vous ? Si le plan d'investissement de 30 millions était un échec, vous seriez sans solution, puisqu'il ne peut y avoir d'apport en capital.
L'AFP n'a pas droit à l'échec : ou vous avez un conseil de surveillance ou un conseil d'administration fort. Or vous n'avez pas de véritable conseil d'administration, et vous ne l'aurez jamais ! Le pouvoir de nomination des présidents de l'AFP est en réalité politique, on le sait ; l'actionnaire principal, c'est-à-dire l'État, n'est pas au conseil d'administration. On ne sera donc jamais dans le scénario de la SNCF où l'État prend ses responsabilités. De fait, qui achèterait les informations de l'AFP si on recrée une agence Tass ou Chine nouvelle ? C'est l'indépendance même de l'Agence qui conduit à la faiblesse du conseil d'administration, et à l'absence de gouvernance.
C'est pourquoi nous préconisons un conseil de surveillance, approuvé par la quasi-unanimité de la commission, par le président de la commission financière, par la société des journalistes - et même par les syndicats de l'AFP.
L'indépendance de la presse passe par la modernisation du secteur et par un basculement vers le numérique. Je ne reviens pas sur la situation financière, très tendue, de Presstalis et des Messageries lyonnaises de presse (MLP). Elles ne pourraient survivre sans les aides publiques. Presstalis annonce un résultat d'exploitation de l'ordre de 2 milliards d'euros pour 2014, c'est mieux mais l'État lui a versé près de 19 millions d'aides.
Les kiosquiers se meurent, leur revenu moyen annuel ne dépasse pas 11 000 euros brut. Là aussi je n'y reviens pas. À défaut de grand soir, ce texte propose des dispositions utiles pour les messageries de presse. Nous avons suivi M. Françaix et le gouvernement à l'article 7, et proposé une modification à l'article premier sur l'homologation des barèmes.
Nous reviendrons lors de l'examen des amendements sur la défiscalisation des souscriptions, à laquelle la commission est favorable.
Bref, nous avons cherché à apporter à cette proposition de loi une valeur ajoutée sénatoriale forte. Nous souhaitons qu'un accord global puisse être trouvé au-delà des clivages politiques. L'avenir de la presse le mérite. (Applaudissements)
Mme Catherine Morin-Desailly, présidente de la commission de la culture . - Je salue le travail de notre rapporteur et les apports de la Haute Assemblée à ce texte. La nouvelle majorité sénatoriale souhaite un travail de qualité avec le gouvernement et l'Assemblée nationale, dans un esprit constructif. Ce sujet s'y prête. Nous avons tenu en commission des débats approfondis : merci à chacun.
Les dispositions relatives à l'AFP sont largement issues d'une proposition de loi déposée en son temps par M. Legendre. Il n'y a ici que des femmes et des hommes attachés à une presse libre et indépendante, déterminés à assurer l'avenir de l'AFP. Permettre à la PQR de distribuer la PQN, renforcer le conseil d'administration de l'AFP, ces mesures font aujourd'hui consensus. Un accord semble donc à notre portée, à deux conditions.
D'abord reconnaître l'apport du Sénat sur la gouvernance de l'AFP, avec la création d'une commission de surveillance. Notre rapporteur a montré qu'il était à l'écoute pour améliorer la rédaction. Deuxième condition, rester dans le cadre raisonnable de cette proposition de loi sans en outrepasser le champ : la question de la protection des sources des journalistes mérite un texte dédié. Je me réjouis que le président de la République s'y soit engagé.
L'adaptation de la presse au numérique est un grand chantier.
Mesurons les limites inhérentes au cadre qui nous est imparti. Sur l'amendement dit Charb relatif à la participation des citoyens au financement de la presse, une nouvelle proposition de rédaction est en discussion. Un accord devrait pouvoir être trouvé, respectant notre volonté d'aider la presse sans en fragiliser l'édifice.
Ce secteur est aussi précieux que fragile. Si nous réunissons un consensus, nous montrerons que la représentation nationale est unie pour l'aider et pour défendre les valeurs de notre démocratie. (Applaudissements)
Mme Colette Mélot . - Ce texte, qui nous rassemble au-delà de nos clivages politiques, contient plusieurs avancées.
Sur la forme, nous déplorons toutefois la procédure accélérée, et l'inscription tardive à l'ordre du jour, qui n'ont laissé que trois semaines à notre rapporteur pour travailler. Le gouvernement, une fois de plus, s'est retrouvé au pied du mur, sommé de légiférer pour respecter ses engagements européens.
Les rapports se sont succédé pour dresser un sombre constat de l'état du secteur de la presse. Une réforme globale s'impose pour faire face à une chute de la vente au numéro de 12 % depuis 2013. Certes, cette proposition de loi n'est pas à la hauteur des attentes, mais comporte des dispositions équilibrées et pragmatiques : le groupe UMP la soutiendra, et salue les apports du rapporteur. Le texte initial reprenait déjà plusieurs dispositions de la proposition de Jacques Legendre sur l'AFP qui n'avait jamais été inscrite à l'ordre du jour.
Notre rapporteur va plus loin en demandant la présence de personnalités qualifiées ayant une expérience internationale : nous sommes pour. M. Bonnecarrère va plus loin en créant une commission de surveillance ; espérons que les députés nous suivront.
Le rapport Jevakhoff, inspecteur général des finances, n'a pas été rendu public. Il préconise une fusion entre les deux messageries de presse existantes et le sous-traitement de la dimension logistique. Ce rapport contient-il d'autres pistes intéressantes ? Sur la défiscalisation de l'aide financière aux entreprises de presse par des particuliers ou des entreprises, nos propositions de rédaction varient - dons, participation au capital... - mais révèlent un consensus, après l'ampleur des dons à Charlie Hebdo.
Pour conclure, le groupe UMP apportera bien évidemment son vote à ce texte et invite le gouvernement à résoudre les problèmes quotidiens rencontrés par la presse. À la réflexion doit succéder l'action ! (Applaudissements à droite et au centre)
M. David Assouline . - Mme la ministre l'a dit, ce débat intervient alors que la liberté de la presse a été attaquée en son coeur. Elle fait trop souvent l'objet de peu d'attention. C'est pourquoi, j'avais proposé d'inscrire la liberté de la presse et le pluralisme des médias dans la Constitution parce qu'ils traduisent concrètement ce que l'on entend lorsque l'on prononce le mot « liberté ».
Je veux rendre hommage à Charlie Hebdo qui a si souvent été attaqué, par des gens qui pensaient, sans doute, avoir de bonnes intentions. Quand leurs locaux ont été brûlés dans mon territoire, le XXe arrondissement, certains se sont demandé si les journalistes ne l'avaient pas mérité... Charlie Hebdo s'est toujours battu pour la liberté et contre le racisme. Ne mélangeons pas tout : le racisme et l'antisémitisme qui sont punis dans notre pays, et la liberté de critiquer, pratiquée par Charlie Hebdo, qui est autorisée par la loi.
Nous avions commencé avec Jacques Legendre à corriger certains des archaïsmes de procédure et d'organisation qui pèsent sur le secteur de la presse. Une fois n'est pas coutume, ce texte fait consensus dans les deux assemblées. Il faut dire que l'urgence est là : urgence économique, européenne, politique, démocratique. Nous ne pouvons pas laisser le droit qui consacre la liberté de la presse contesté par les faits.
Mme Mélot regrette la procédure accélérée. Soit, mais ne poussons pas certains arguments trop loin, à notre propre détriment. Réjouissons-nous plutôt que cette proposition de loi socialiste soit inscrite dans une niche socialiste. Si nous n'en achevons pas l'examen ce soir, il faudra attendre un mois pour conclure. Sans cela, avec la navette et les allers-retours qu'elle implique, peut-être eût-il fallu au total renoncer... Si nous ne faisions pas face à l'urgence, les Français auraient le sentiment, et à juste titre, que nous ne sommes pas à leur écoute, pas dans le coup. Autant je demande du temps, de la réflexion sur des textes ayant trait à l'organisation territoriale de la République et défends le Sénat en tant qu'assemblée, autant, ici l'urgence est réelle. Évitons les critiques de posture.
L'AFP est un joyau, la seule agence européenne de rang mondial. Ce texte ne la remet nullement en cause. Il soutiendra son développement, lui donnera les moyens de répondre aux injonctions européennes. En mai 2011, une agence allemande a contesté, devant la Commission européenne, le système de financement public de l'AFP. Il était donc primordial de conforter celle-ci. Après des années de réflexion, nous aboutissons à une modification de son statut - elle est salutaire.
Sur la distribution, là encore, nous profitons du travail lancé avec M. Jacques Legendre. Il a fallu lever des préventions et des frilosités. Le numérique atteint au coeur les distributeurs. Nous avions bien travaillé avec ces derniers. Globalement, le groupe socialiste ne mettra en cause ni le travail de l'Assemblée nationale ni la réforme proposée par le Gouvernement. Le rapporteur, parfois, est allé trop loin.
Les journalistes accompagnant les parlementaires en prison ? D'abord, cela ne sort pas de nulle part. Les parlementaires visitent les prisons dans un cadre légal bien défini. Ensuite, mieux vaut ne pas interdire la présence des journalistes. Sinon, ils en sont réduits à s'appuyer sur nos propos ou aux vidéos que font eux-mêmes les prisonniers. J'ai déposé un amendement pour rétablir ce droit.
Espérons que nous réunirons un consensus sur un autre sujet qui me tient à coeur : l'amendement Charb. (Applaudissements sur les bancs socialistes)
M. André Gattolin . - Ce débat intervient malheureusement à point nommé, après l'attentat perpétré contre Charlie Hebdo le 7 janvier.
Ce texte, par petites touches, apporte des améliorations bienvenues à un secteur particulier, particulier parce qu'il participe au pluralisme de l'information et du débat public.
Depuis la Révolution française, la presse a toujours fait l'objet d'une attention particulière du législateur, parce que la liberté de circulation des idées et de la presse est le corollaire indispensable de la liberté d'opinion et d'expression. Il faudrait d'ailleurs s'interroger sur les critères d'attribution des aides, qui ne tiennent pas compte de la nature et de l'apport en information des titres aidés.
Le groupe écologiste votera ce texte. Toutefois, cela ne nous dispense pas de repenser notre système d'aide à la presse. Pourquoi aider les entreprises de presse ? La question est légitime, ne serait-ce que parce que nous évoluons dans un système libéral, où ces entreprises sont pour la plupart privées. En fait, si nous aidons la presse, ce n'est pas, au fond, pour des raisons économiques, mais au nom du pluralisme et de la diversité de l'information.
Voilà le principe ; dans le détail, il y a parfois de quoi tomber de sa chaise...
M. Jean-Baptiste Lemoyne. - Oui !
M. André Gattolin. - Il faut féliciter le gouvernement, à défaut d'avoir remis à plat notre système d'aides à la presse, de l'avoir largement rendu public. Je vous invite à y aller voir. TéléStar se place au douzième rang des aides et devance « Le Point » ; Le Canard enchaîné au quatre-vingt-sixième rang, après Gala et Point de vue, et précède de peu le Journal de Mickey et Closer... Politis, hebdomadaire sans publicité, n'est pas aidé... Et Charlie Hebdo, brandi en étendard de la liberté de presse aujourd'hui, qui était jusqu'à il y a peu en grande difficulté financière, ne figure même pas parmi les 200 titres aidés en 2012-2013. Les seules aides perçues le sont de façon automatique, et destinées à tous les titres quel que soit leur objet. Il existe bien une ligne spécifique dans le budget de la culture et de la communication, intitulée « aides au pluralisme », dotée de 11,4 millions d'euros, mais elle ne concerne que les quotidiens et la presse régionale. Nous défendons depuis des années une réforme profonde des aides à la presse.
Le président de la République a eu le courage, il y a quelques semaines, de nous inviter à défendre nos valeurs, nous ne pouvons pas ne pas y répondre. Ce texte doit être l'occasion d'une remise à plat à laquelle nous ne pouvons pas nous soustraire.
M. Pierre Laurent . - Les millions de manifestants qui ont défilé en France et dans le monde après les horribles attentats de Charlie Hebdo nous invitent, nous, législateurs, à mieux défendre la liberté de la presse, à lutter contre l'ignorance et la censure. Or cette liberté n'est rien sans les conditions matérielles qui la garantissent.
Cette proposition de loi, sans être le grand texte attendu, s'inscrit dans le droit fil de la loi de 1947. Elle procède à des ajustements bienvenus de la gouvernance du système coopératif. Si on peut se féliciter de la réaffirmation du principe de solidarité, la coexistence de deux messageries en temps de crise pose problème. Oui à la mutualisation mais mieux vaudrait une fusion des deux coopératives. Nous sommes réservés sur la création d'une exception à la clause d'exclusivité de diffusion.
L'AFP, elle aussi affaiblie, est un bien précieux pour l'information en France. Plus que jamais, nous devons protéger son indépendance. La commission européenne, saisie d'une plainte, a heureusement admis le bien-fondé des aides publiques pour ses missions d'intérêt général. Cependant, elle oblige à une filialisation des autres activités. Cette proposition de loi en prend acte, le groupe CRC trouve cela dangereux : nous ouvrons une brèche qui pourrait menacer à terme l'indépendance de l'Agence.
Enfin, l'amendement Charb. Nous l'avons déposé dans la loi de finances initiale pour 2015, saisi par Charb lui-même qui s'inquiétait alors du sort de Charlie Hebdo et de sa survie même. Dans un geste d'hommage, nous avions déposé une proposition de loi le reprenant après les attentats. Apporter une sécurité juridique aux dons apportés par les particuliers à la presse serait un beau symbole de l'attachement du Sénat à la liberté de la presse. (Applaudissements à gauche)
M. Robert Hue . - En 1789, la liberté de la presse était la seconde doléance des Français. Plus de deux cents ans après, la presse, chien de garde de la démocratie, est menacée comme jamais par la crise. Une crise économique, d'abord, avec les mutations du lectorat, l'émergence d'Internet et des journaux gratuits. Une crise de confiance, aussi : d'après un sondage récent d'Ipsos, les Français à 77 % doutent de l'information apportée par les médias. Ils seraient 21 % à exprimer leur défiance envers l'armée et 32 % envers l'école... Cette crise de confiance menace notre pacte républicain et fait le lit de la désinformation et de l'obscurantisme dont témoignent tragiquement les événements de début janvier.
Il faut transformer cette crise destructrice en innovation créatrice. La proposition de loi ébauche une réflexion intéressante mais inaboutie sur la régulation du secteur. Elle réforme le fonctionnement du CSMP dans le sens d'une plus grande transparence. Selon le président de l'ARDP lui-même, le mécanisme de péréquation interne est largement détourné par les éditeurs les plus influents. Nous saluons aussi la création du statut d'entreprise solidaire de presse.
L'AFP, forte de 2 000 salariés, dégage un chiffre d'affaires de 287 millions d'euros, dont 40 % proviennent d'abonnements de l'État. Tous les journaux français sont abonnés à l'AFP. Les statuts de 1957 ont fait leur temps, il fallait revoir la gouvernance de l'Agence. La création d'une commission de surveillance va dans la bonne direction.
Cette proposition de loi ne va pas assez loin pour qu'on puisse parler de modernisation de la presse, mais elle amorce une politique des petits pas constructive. C'est pourquoi le groupe RDSE la votera. (Applaudissements sur les bancs socialistes)
M. Claude Kern . - L'infamie a frappé la liberté de la presse et notre pays. Je n'y reviens pas, non plus que sur les causes de la crise de la presse, que ce soit la chute des ventes, le vieillissement du lectorat ou la raréfaction des recettes publicitaires.
Faut-il restructurer les aides à la presse ? Et selon quels critères ? Voilà les questions que posait déjà le rapport de 2010. Si l'on mettait ses préconisations en oeuvre, nous engagerions une véritable réforme structurelle.
Faut-il réformer la distribution ? Plus de 80 % des aides budgétaires lui sont dédiées. MLP et Presstalis, au lieu de se compléter, se concurrencent. Leur fusion est un sujet si sensible que le rapport de l'été 2014 qui le préconise n'a pas été rendu public...
Le groupe UDI-UC soutiendra ce texte, issu du travail de M. Legendre et de la commission de la culture - je le dis avec d'autant plus de fierté que M. Bonnecarrère, le rapporteur, est membre de notre groupe politique...
Grâce à lui, l'homologation des barèmes sera désormais confiée à l'ARDP et non plus au CSMP. Grâce à lui toujours, il existera désormais un véritable contre-pouvoir au sein de l'AFP avec une commission de surveillance regroupant le conseil supérieur et la commission financière. Et trois des cinq personnalités qualifiées au conseil d'administration devront justifier d'une expérience européenne ou internationale.
Autoriser les journalistes à accompagner les parlementaires lors des visites des lieux de privation de liberté n'était pas une bonne idée. Le rapporteur a eu raison de supprimer cette possibilité.
Le groupe UDI-UC votera ce texte. (Applaudissements au centre)
M. Jean-Baptiste Lemoyne . - Un lectorat qui s'étiole, des modes de lecture qui changent, des titres en difficulté, il fallait agir.
Je salue chaleureusement les salariés de l'AFP que j'ai eu l'occasion de côtoyer dans une vie antérieure ; grâce à eux, le soleil ne se couche jamais : une information francophone est diffusée à toute heure dans le monde.
Sans être membre de la glorieuse commission de la culture, je voulais prendre la parole pour souligner l'enjeu de proximité que représentent les points de vente de presse dans nos territoires. Ne faut-il pas réfléchir à la façon d'améliorer leur rémunération ? Ils forment un maillage précieux et sont souvent, en pluriactivité, les derniers commerces en milieu rural.
Quant à la péréquation qui fait l'objet de l'article premier, et qui englobe tous les quotidiens, quels qu'ils soient, et les magazines, faut-il que son champ soit aussi large ? Ne convient-il pas de le restreindre aux quotidiens d'information politique et générale (IPG), car ce sont eux qui sont confrontés aux plus grandes difficultés ? C'est une question à 18 ou 20 millions d'euros.
Au-delà, il faut penser à l'avenir des aides à la presse. On réfléchit actuellement à la constitution d'une filière pour les flux chauds - quotidiens -, et d'un autre pour les flux froids - mensuels.
Il est une presse dont on parle peu, celle qui fleure bon nos terroirs et traite aussi de l'information nationale et internationale : la presse dite un peu vite « agricole et rurale »... (Mme Nathalie Goulet renchérit) Tous les journaux, qu'ils aient le statut de IPG ou non, font face aux mêmes défis. Or certains n'ont pas accès au fonds pour faciliter la transition numérique. Puisqu'on crée des entreprises solidaires de presse dans ce texte, pourquoi ne pas imaginer une nouvelle catégorie, celle de presse de territoire ?
Mme Nathalie Goulet. - Très bien !
M. Jean-Baptiste Lemoyne. - Après avoir voté la proposition de résolution européenne mardi avec le groupe CRC, je voterai cette proposition de loi socialiste. Peut-être faut-il que je me surveille... Je ne crois pas ce faisant trahir le mandat de mes électeurs de l'Yonne. Plaisanterie mise à part, je voterai ce texte. Nous faisons oeuvre utile. (Applaudissements à droite et au centre)
La discussion générale est close.
Discussion des articles
ARTICLE PREMIER
Mme Colette Mélot . - Je veux évoquer la catégorie hors presse, dans laquelle on passe facilement, qui permet d'échapper à la péréquation.
Nous ne pouvons pas régler cette question par voie législative : le hors-barème relève des pouvoirs réglementaires du CSMP. Madame la ministre, ne faut-il pas demander au CSMP de s'emparer du sujet dès la promulgation de la loi ? Il serait regrettable de conforter la péréquation tout en laissant ouvertes des brèches.
Mme Fleur Pellerin, ministre. - Effectivement, le hors-presse ne relève pas du champ de ce texte qui modifie la loi Bichet. Il faudra travailler cette question au sein du CSMP.
La plupart des pistes ouvertes par le rapport Jevakhoff sont connues ; le gouvernement dira lesquelles il privilégie dans les prochains mois.
L'amendement n°3 est retiré.
Mme la présidente. - Amendement n°37, présenté par le Gouvernement.
Alinéa 4, première phrase
Après le mot :
avis
insérer le mot :
motivé
Mme Fleur Pellerin, ministre. - La précision est indispensable.
M. Philippe Bonnecarrère, rapporteur. - La commission n'a pas examiné cet amendement. Avis favorable à titre personnel.
L'amendement n°37 est adopté.
L'article premier, modifié, est adopté.
L'article 2 est adopté, de même que les articles 3, 4, 4 bis, 5 et 6.
L'article 6 bis demeure supprimé.
ARTICLE 7
Mme la présidente. - Amendement n°17, présenté par M. P. Laurent et les membres du groupe CRC.
Alinéas 2 et 3
Supprimer ces alinéas.
M. Pierre Laurent. - Cet amendement introduit une exception au principe de distribution de la presse par des sociétés coopératives.
M. Philippe Bonnecarrère, rapporteur. - Avis défavorable. Le dispositif de cet article constitue une vraie avancée. Il ne faut pas en retirer une brique car c'est un édifice complet.
Mme Fleur Pellerin, ministre. - En effet, même avis défavorable.
L'amendement n°17 n'est pas adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°27, présenté par M. P. Laurent et les membres du groupe CRC.
Alinéa 9
Rédiger ainsi cet alinéa :
« 13° Détermine les conditions de la mise en commun des moyens par les messageries en créant une société commune. »
M. Pierre Laurent. - Amendement de cohérence, pour affirmer clairement l'objectif de la fusion des messageries.
M. Philippe Bonnecarrère, rapporteur. - Avis défavorable. Il n'est pas pertinent d'aller en ce sens. Il y a eu une amélioration de la gestion des opérateurs actuels. La fusion entraînerait en outre un plan social immédiat. Nul doute que M. Laurent sera particulièrement sensible à cet argument.
Mme Fleur Pellerin, ministre. - Même avis. La constitution d'une société commune doit rester une faculté. Le texte de l'Assemblée nationale est équilibré.
M. David Assouline. - En un moment de crise entre Presstalis et MLP, j'avais pensé qu'on en arriverait à la fusion. Pourquoi pas, si la rationalité l'emporte ? Il faudrait que les deux sociétés en aient envie. On ne fait pas cela par la loi.
L'amendement n°27 n'est pas adopté.
L'article 7 est adopté.
ARTICLE 8
Mme la présidente. - Amendement n°7 rectifié bis, présenté par MM. Commeinhes, Calvet, Bizet, Duvernois et J. Gautier et Mme Duchêne.
Alinéa 3
Supprimer cet alinéa.
M. François Commeinhes. - M. le rapporteur m'a rassuré. Je le retire.
L'amendement n°7 rectifié bis est retiré.
L'article 8 est adopté.
ARTICLE 9
Mme la présidente. - Amendement n°28, présenté par M. Bonnecarrère, au nom de la commission.
Alinéa 2
Supprimer cet alinéa.
M. Philippe Bonnecarrère, rapporteur. - Amendement de coordination.
L'amendement n°28, accepté par le gouvernement, est adopté.
L'article 9 est adopté.
L'article 10 est adopté.
ARTICLE 11 A
Mme la présidente. - Amendement n°19, présenté par M. P. Laurent et les membres du groupe CRC.
Supprimer cet article.
M. Pierre Laurent. - Comme l'a dit Mme la ministre, en l'absence d'évaluation du dispositif proposé, nous proposons de nous en tenir aux instances actuelles.
Mme la présidente. - Amendement identique n°33, présenté par le Gouvernement.
Mme Fleur Pellerin, ministre. - Avis favorable à l'amendement de suppression. Nous avons déposé le même.
L'amendement n°33 est retiré.
M. Philippe Bonnecarrère, rapporteur. - Avis défavorable. Cette commission de surveillance est nécessaire et urgente. Quand une maison comme celle-ci, endettée, emprunte 26 millions d'euros et lance un plan d'investissement de 30 millions, alors qu'elle ne dégage pas de ressources, il faut enfin avoir une gestion moderne, avec un pouvoir de décision du PDG, assisté par un conseil d'administration et une instance de surveillance.
Mme Fleur Pellerin, ministre. - Le conseil supérieur, instance de déontologie de l'Agence, est reconnu comme autorité administrative indépendante par le Conseil d'État. J'ai donc un doute sur la validité juridique du dispositif proposé, dès lors que vous lui donnez une compétence financière.
M. David Assouline. - En effet, la fusion du conseil supérieur et de la commission financière pose problème, en dépit des convictions que j'ai exprimées en commission. Ayant entendu la ministre, je m'abstiens donc.
L'amendement n°19 est mis aux voix par scrutin public à la demande de la commission.
Mme la présidente - Voici le résultat du scrutin n° 93 :
Nombre de votants | 334 |
Nombre de suffrages exprimés | 225 |
Pour l'adoption | 42 |
Contre | 183 |
Le Sénat n'a pas adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°29, présenté par M. Bonnecarrère, au nom de la commission.
Alinéa 5, première phrase
Remplacer le mot :
approuve
par les mots :
donne un avis sur
M. Philippe Bonnecarrère, rapporteur. - La commission modère ses audaces...
Mme Fleur Pellerin, ministre. - Avis défavorable : le gouvernement ne souhaite pas que soit créée cette commission de surveillance.
L'amendement n°29 est adopté.
L'article 11 A, modifié, est adopté.
ARTICLE 11
Mme la présidente. - Amendement n°20, présenté par M. P. Laurent et les membres du groupe CRC.
Rédiger ainsi cet article :
I. - La loi n° 57-32 du 10 janvier 1957 portant statut de l'Agence France-Presse est ainsi modifiée :
1° L'article 4 est ainsi modifié :
a) Aux deuxième et troisième alinéas, les mots : « ou honoraire » sont supprimés ;
b) Au sixième alinéa, les mots : « de la radiodiffusion- télévision française » sont remplacés par les mots : « des sociétés nationales de programmes relevant du titre III de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication » ;
b bis) Le septième alinéa est ainsi rédigé :
« Deux parlementaires désignés, respectivement, par les commissions permanentes chargées des affaires culturelles de l'Assemblée nationale et du Sénat. » ;
b ter) Après le septième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Le conseil supérieur est composé de telle sorte que l'écart entre le nombre des hommes désignés, d'une part, et des femmes désignées, d'autre part, ne soit pas supérieur à un. » ;
c) Le huitième alinéa est ainsi rédigé :
« Les membres du conseil supérieur sont désignés pour cinq ans. Leur mandat est renouvelable une fois. Il est incompatible avec celui de membre du conseil d'administration ou de membre de la commission financière. » ;
1° bis L'article 5 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Le président-directeur général est convoqué deux fois par an par le conseil pour rendre compte de l'activité de l'Agence France-Presse au regard des obligations énoncées à l'article 2. » ;
2° L'article 7 est ainsi modifié :
a) Au début du 1°, le mot : « Huit » est remplacé par le mot : « Cinq » ;
b) Au 2°, les mots : « de la radiodiffusion-télévision française » sont remplacés par les mots : « des sociétés nationales de programmes relevant du titre III de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication » ;
c) Après les mots : « par le », la fin du 3° est ainsi rédigée : « ministre des affaires étrangères, le ministre chargé de la communication et le ministre chargé de l'économie ; »
c bis) Les cinquième à septième alinéas sont ainsi rédigés :
« 4° Trois représentants du personnel de l'agence, soit :
« a) Deux journalistes professionnels élus par l'assemblée des journalistes professionnels appartenant au personnel de rédaction de l'agence ;
« b) Et un agent, appartenant aux autres catégories de personnel, élu par l'ensemble des agents de ces catégories ; »
d) Après le septième alinéa, il est inséré un 5° ainsi rédigé :
« 5° Cinq personnalités nommées par le conseil supérieur en raison de leur connaissance des médias et des technologies numériques et de leurs compétences économiques et de gestion, y compris au niveau européen et international. Ces personnalités ne peuvent appartenir ni aux corps d'administration, ni aux entreprises dont sont issus les autres membres du conseil d'administration ou les membres du conseil supérieur. » ;
d bis) À la première phrase du neuvième alinéa, le mot : « trois » est remplacé par le mot : « cinq » ;
e) Le dernier alinéa est ainsi rédigé :
« Les interdictions prévues à l'article L. 249-1 du code de commerce sont applicables aux membres du conseil d'administration. » ;
f) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Le conseil d'administration est composé de telle sorte que l'écart entre le nombre des hommes désignés, d'une part, et des femmes désignées, d'autre part, ne soit pas supérieur à un. » ;
3° L'article 10 est ainsi modifié :
a) À la première phrase du premier alinéa, la seconde occurrence du mot : « trois » est remplacée par le mot : « cinq » ;
b) Le deuxième alinéa est ainsi modifié :
- le mot : « douze » est remplacé par le mot : « treize » ;
- sont ajoutés les mots : « , sur la base de la présentation d'un projet stratégique évalué par le conseil d'administration » ;
c) À la seconde phrase de l'avant-dernier alinéa et au dernier alinéa, le mot : « douze » est remplacé par le mot : « treize » ;
4° L'article 12 est ainsi modifié :
a) (Supprimé)
b) Le deuxième alinéa est ainsi rédigé :
« Cette commission comprend trois membres en activité de la Cour des comptes, désignés par le premier président, dont l'un préside la commission. Les membres de la commission financière sont désignés pour une durée de cinq ans. Leur mandat est renouvelable. » ;
c) Le septième alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Les membres de la commission financière siègent, avec voix consultative, au conseil d'administration. »
II. - Le 3° du I est applicable au mandat de président-directeur général en cours à la date de publication de la présente loi, qui continue à courir.
III. - Les membres du conseil supérieur mentionnés aux deuxième, troisième et septième alinéas de l'article 4 de la loi n° 57-32 du 10 janvier 1957 portant statut de l'Agence France-Presse, dans sa rédaction résultant de la présente loi, sont nommés, dans un délai de trois mois suivant la promulgation de la présente loi, pour la durée restant à courir des mandats en cours des autres membres du conseil supérieur, qui ne sont pas modifiés.
IV. - Les membres du conseil d'administration mentionnés aux 1° et 5° de l'article 7 de la loi n° 57-32 du 10 janvier 1957 précitée, dans sa rédaction résultant de la présente loi, sont désignés dans un délai de trois mois suivant la promulgation de la présente loi, pour la durée restant à courir des mandats en cours des autres membres du conseil d'administration, qui ne sont pas modifiés.
M. Pierre Laurent. - Amendement de cohérence.
Mme la présidente. - Amendement n°36, présenté par le Gouvernement.
Rédiger ainsi cet article :
I. - La loi n° 57-32 du 10 janvier 1957 portant statut de l'Agence France-Presse est ainsi modifiée :
1° L'article 4 est ainsi modifié :
a) supprimé ;
b) Au sixième alinéa, les mots : « de la radiodiffusion-télévision française » sont remplacés par les mots : « des sociétés nationales de programmes relevant du titre III de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication » ;
b bis) Le septième alinéa est ainsi rédigé :
« Deux parlementaires désignés, respectivement, par les commissions permanentes chargées des affaires culturelles de l'Assemblée nationale et du Sénat. » ;
b ter) Après le septième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Le conseil supérieur est composé de telle sorte que l'écart entre le nombre des hommes désignés, d'une part, et des femmes désignées, d'autre part, ne soit pas supérieur à un. » ;
c) Le huitième alinéa est ainsi rédigé :
« Les membres du conseil supérieur sont désignés pour cinq ans. Leur mandat est renouvelable une fois. Il est incompatible avec celui de membre du conseil d'administration ou de membre de la commission financière. » ;
1° bis L'article 5 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Le président-directeur général est convoqué deux fois par an par le conseil pour rendre compte de l'activité de l'Agence France-Presse au regard des obligations énoncées à l'article 2. » ;
2° L'article 7 est ainsi modifié :
a) Au début du 1° , le mot : « Huit » est remplacé par le mot : « Cinq » ;
b) Au 2° , les mots : « de la radiodiffusion-télévision française » sont remplacés par les mots : « des sociétés nationales de programmes relevant du titre III de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication » ;
c) Après les mots : « par le », la fin du 3° est ainsi rédigée : « ministre des affaires étrangères, le ministre chargé de la communication et le ministre chargé de l'économie ; »
c bis) Les cinquième à septième alinéas sont ainsi rédigés :
« 4° Trois représentants du personnel de l'agence, soit :
« a) Deux journalistes professionnels élus par l'assemblée des journalistes professionnels appartenant au personnel de rédaction de l'agence ;
« b) Et un agent, appartenant aux autres catégories de personnel, élu par l'ensemble des agents de ces catégories ; »
d) Après le septième alinéa, il est inséré un 5° ainsi rédigé :
« 5° Cinq personnalités nommées par le conseil supérieur en raison de leur connaissance des médias et des technologies numériques et de leurs compétences économiques et de gestion, y compris au niveau européen et international. Ces personnalités ne peuvent appartenir ni aux corps d'administration, ni aux entreprises dont sont issus les autres membres du conseil d'administration ou les membres du conseil supérieur. » ;
d bis) À la première phrase du neuvième alinéa, le mot : « trois » est remplacé par le mot : « cinq » ;
e) Le dernier alinéa est ainsi rédigé :
« Les interdictions prévues à l'article L. 249-1 du code de commerce sont applicables aux membres du conseil d'administration. » ;
f) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Le conseil d'administration est composé de telle sorte que l'écart entre le nombre des hommes désignés, d'une part, et des femmes désignées, d'autre part, ne soit pas supérieur à un. » ;
3° L'article 10 est ainsi modifié :
a) À la première phrase du premier alinéa, la seconde occurrence du mot : « trois » est remplacée par le mot : « cinq » ;
b) Le deuxième alinéa est ainsi modifié :
- le mot : « douze » est remplacé par le mot : « treize » ;
- sont ajoutés les mots : « , sur la base de la présentation d'un projet stratégique évalué par le conseil d'administration » ;
c) À la seconde phrase de l'avant-dernier alinéa et au dernier alinéa, le mot : « douze » est remplacé par le mot : « treize » ;
4° L'article 12 est ainsi modifié :
a) (Supprimé)
b) Le deuxième alinéa est ainsi rédigé :
« Cette commission comprend trois membres de la Cour des comptes, désignés par le premier président, dont l'un préside la commission. Les membres de la commission financière sont désignés pour une durée de cinq ans. Leur mandat est renouvelable. » ;
c) Le septième alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Les membres de la commission financière siègent, avec voix consultative, au conseil d'administration. »
II. - Le 3° du I est applicable au mandat de président-directeur général en cours à la date de publication de la présente loi, qui continue à courir.
III. - Les membres du conseil supérieur mentionnés à l'article 4 de la loi n° 57-32 du 10 janvier 1957 portant statut de l'Agence France-Presse, dans sa rédaction résultant de la présente loi, sont nommés dans un délai de trois mois suivant la promulgation de la présente loi.
IV. - Les membres du conseil d'administration mentionnés à l'article 7 de la loi n° 57-32 du 10 janvier 1957 précitée, dans sa rédaction résultant de la présente loi, sont désignés dans un délai de trois mois suivant la promulgation de la présente loi.
Mme Fleur Pellerin, ministre. - Cet amendement rétablit la structure de gouvernance de l'AFP proposée par l'Assemblée nationale en première lecture.
La proposition du Sénat de constituer une commission de surveillance arrive trop tardivement dans le débat, sans avoir été expertisée. Une telle fusion risque de rompre l'équilibre proposé par la proposition de loi, et le mécanisme subtil de gouvernance mis au point dans la loi de 1957, qui tient compte des spécificités de l'Agence.
Je l'ai dit, le conseil supérieur de l'AFP est reconnu par le Conseil d'État comme une autorité administrative indépendante. Son rôle d'instance de déontologie pourrait être compromis s'il recevait des compétences financières et stratégiques.
L'amendement rétablit aussi la possibilité de faire appel à des membres honoraires de la Cour de cassation, du Conseil d'État ou de la Cour des comptes là où la proposition de loi adoptée par l'Assemblée nationale limite ces nominations à des membres en activité. Rappelons que, dans les 642 organismes dans lesquels les textes imposent la présence d'un conseiller d'État, le code de justice administrative prévoit que l'on peut nommer aussi bien un conseiller d'État honoraire.
Mme la présidente. - Amendement n°35, présenté par le Gouvernement.
I. - Alinéa 5
Supprimer cet alinéa.
II. - Alinéa 7
Après les mots :
en activité
insérer les mots :
ou honoraires
Mme Fleur Pellerin, ministre. - Même chose : il s'agit de rétablir la possibilité de nommer des membres honoraires.
Mme la présidente. - Amendement n°30, présenté par M. Bonnecarrère, au nom de la commission.
I. - Après l'alinéa 5
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
...) Au deuxième alinéa, les mots : « , président, avec voix prépondérante » sont supprimés ;
II. - Après l'alinéa 15
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
...) À la seconde phrase de l'avant-dernier alinéa, les mots : « du conseil » sont remplacés par les mots : « de la commission » ;
...) Au dernier alinéa, les mots : « du conseil supérieur » sont remplacés par les mots : « de la commission de surveillance » ;
III. - Après l'alinéa 19
Insérer trois alinéas ainsi rédigés :
...) Au deuxième alinéa, les mots : « il est saisi » sont remplacés par les mots : « elle est saisie » ;
...) Aux troisième et quatrième alinéas, le mot : « il » est remplacé par le mot : « elle » ;
...) À l'avant-dernier alinéa, les mots : « le conseil supérieur » sont remplacés par les mots : « la commission de surveillance » ;
M. Philippe Bonnecarrère, rapporteur. - Amendement rédactionnel.
Les amendements du CRC et du gouvernement abrogent le conseil de surveillance que nous créons à l'article 11 A : avis défavorable. Nous avons anticipé l'amendement n°35 pour tenir compte des contraintes des ressources humaines de la Cour des comptes. Des conseillers honoraires ? Je m'en remets à la sagesse du Sénat... Sommes-nous attachés à avoir des conseillers en activité ou honoraires ? Je suis, à titre personnel, assez d'accord pour vous suivre, même si un jour il faudra poser la question de façon plus directe : peut-on continuer à voir ces hautes juridictions représentées par des conseillers retraités ? Cela pose une question, sinon déontologique, du moins statutaire.
Mme Fleur Pellerin, ministre. - Avis favorable à l'amendement n°20, s'il est rectifié pour rétablir la possibilité de nommer des membres honoraires.
Si l'amendement de M. Laurent n'est pas rectifié, le gouvernement maintient son amendement n°35. Avis défavorable à l'amendement n°30.
M. Pierre Laurent. - J'accepte la rectification. Monsieur le rapporteur, nous ne sommes pas partisans du statu quo, nous souhaitons seulement un débat plus large sur cette réforme.
La séance, suspendue à 19 h 25, reprend à 19 h 30.
Mme la présidente. - C'est donc l'amendement n°20 rectifié.
L'amendement n°20 rectifié n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°36.
L'amendement n°35 est adopté, ainsi que l'amendement n°30.
L'article 11, modifié, est adopté.
ARTICLE 12
Mme la présidente. - Amendement n°21, présenté par M. P. Laurent et les membres du groupe CRC.
Supprimer cet article.
M. Patrick Abate. - Nous sommes défavorables à tout ce qui va dans le sens d'une privatisation de l'AFP, dont nous entendons au contraire renforcer le caractère public.
M. Philippe Bonnecarrère, rapporteur. - Cet amendement supprime les engagements pris par notre pays à l'égard de l'AFP dans le cadre des négociations bien menées par le gouvernement avec la Commission européenne. Avis défavorable.
Mme Fleur Pellerin, ministre. - Même avis.
L'amendement n°21 n'est pas adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°38, présenté par le Gouvernement.
Rédiger ainsi cet article :
La loi n° 57-32 du 10 janvier 1957 précitée est ainsi modifiée :
1° Le sixième alinéa de l'article 12 est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Elle s'assure annuellement que la compensation financière versée par l'État, prévue à l'article 13, n'excède pas les coûts nets générés par l'accomplissement des missions d'intérêt général. » ;
2° L'article 13 est ainsi modifié :
a) Après le premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Les activités de l'Agence France-Presse ne relevant pas des missions d'intérêt général définies aux articles 1er et 2 font l'objet d'une comptabilité séparée. » ;
b) Après la seconde occurrence du mot : « des », la fin du deuxième alinéa est ainsi rédigée : « grilles tarifaires générales de l'agence ; elle prévoit les conditions de leur révision. » ;
3° Après la première phrase du second alinéa de l'article 14, sont insérées deux phrases ainsi rédigées :
« Dans chacune des hypothèses, les dispositions du livre VI du code de commerce relatives à la détermination des créances et au désintéressement des créanciers sont applicables. La responsabilité de l'État ne peut se substituer à celle de l'Agence France-Presse envers ses créanciers. »
Mme Fleur Pellerin, ministre. - En cohérence avec notre opposition à la proposition de fusion du conseil supérieur et de la commission financière, nous souhaitons revenir au texte de l'Assemblée nationale sur cet article très important de la proposition de loi, qui met le statut de l'AFP en cohérence avec le droit de de l'Union européenne.
M. Philippe Bonnecarrère, rapporteur. - Avis défavorable. Cet amendement ferait tomber ce que nous avons construit avec les deux articles précédents.
L'amendement n°38 n'est pas adopté.
L'article 12 est adopté, de même que l'article 13.
ARTICLE ADDITIONNEL
Mme la présidente. - Amendement n°1, présenté par Mme N. Goulet.
A. - Après l'article 13
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Après l'article 6 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, il est inséré un article 6 bis ainsi rédigé :
« Art. 6 bis. - Toute entité juridique employant des journalistes professionnels au sens de l'article L. 7111-3 du code du travail, produisant ou diffusant de l'information peut, à l'initiative d'un seul journaliste, constituer un Conseil de rédaction.
« Dans l'hypothèse où l'entité juridique comporte plusieurs titres, il peut être constitué un Conseil de rédaction par titre.
« Le Conseil de rédaction est composé de tous les journalistes professionnels qui contribuent à la production de contenus journalistiques pour celui-ci, quel que soit le support et la technique utilisés.
« Le Conseil de rédaction est doté de la personnalité juridique.
« Le Conseil de rédaction élabore un règlement intérieur qui détermine le nombre de ses représentants, leur fonction, la durée de leur mandat et leurs prérogatives.
« Les modalités de son fonctionnement et de l'exercice de ses missions lui sont conférées par la présente loi. »
II. - Le Conseil de rédaction :
- s'assure au quotidien que tous les journalistes de l'entreprise de presse concernée peuvent exercer leur travail en toute indépendance des pouvoirs publics, des pouvoirs économiques, notamment ceux qui constituent l'actionnariat du média auquel ils contribuent ;
- s'assure que les journalistes qui en sont membres sont à l'abri de pressions ou tentatives des pressions au but d'altérer la pratique indépendante de leur mission d'informer ;
- s'assure que les journalistes qui en sont membres ne se trouvent pas en situation de conflit d'intérêt ;
- est consulté sur la désignation, la démission du directeur et de ses adjoints, lorsqu'elle advient du fait du propriétaire du titre ;
- formule des avis préalables sur l'élaboration et la modification de l'organisation de la rédaction ;
- assure, de manière indépendante de l'actionnaire et de la régie commerciale, la ligne éditoriale du média qui a été définie au préalable avec les cadres de direction représentant des actionnaires ;
- se prononce sur la conformité des écrits ou des images publicitaires avec l'orientation éditoriale du titre ;
- reçoit annuellement des informations sur le montant des aides à la presse touchées par l'entité juridique visée à l'article 6 bis de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, et s'assure de leur utilisation au bénéfice de la qualité de l'information et du pluralisme ;
Le Conseil de rédaction est également informé et consulté :
- lors de mouvements capitalistiques importants représentant plus de 5 % du capital de l'entité juridique visée à l'article 6 bis précité ;
- avant le dépôt au greffe d'une demande d'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire ;
- lors d'une procédure de sauvegarde, lors d'une procédure de redressement judiciaire et lors d'une procédure de liquidation judiciaire.
Lorsque le Conseil de rédaction a connaissance de faits de nature à affecter de manière préoccupante la situation économique de l'entité juridique visée à l'article 6 bis précité , il peut demander que lui soient fournies des pièces comptables ainsi que des explications, sans pour autant se substituer aux prérogatives des autres instances représentatives existantes au sein de l'entité juridique.
Les conditions d'exercice de ce droit à information seront fixées par décret.
Le Conseil de rédaction ne se substitue pas à la direction de la rédaction.
En cas de disparition de l'entité juridique visée à l'article 6 bis précité, le Conseil de rédaction conserve sa personnalité juridique pendant douze mois.
III. - Le Conseil de rédaction peut ester en justice pour assurer la défense et le bon déroulement de toutes ses missions mentionnées au II.
IV. - L'article L. 2328-1 du code du travail est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Le fait d'entraver la constitution ou le fonctionnement régulier d'un Conseil de rédaction est puni des mêmes peines, assorties d'une suspension partielle ou totale des aides publiques directes et indirectes dont bénéficie l'entité ainsi que l'obligation pour celle-ci de publier les sanctions judiciaires dont elle pourrait faire l'objet au titre de ses manquements. »
B. - En conséquence, faire précéder cet article d'une division additionnelle et de son intitulé ainsi rédigés :
Titre....
Reconnaissance juridique du Conseil de rédaction
Mme Nathalie Goulet. - J'ai bien entendu ce qui a été dit en discussion générale par le rapporteur. Je souhaite ouvrir le débat sur le statut juridique des rédactions, dans le contexte actuel de crise de la presse, de financiarisation d'un secteur agité par de nombreux rachats. Cet amendement est complexe, mais le principe en est simple : faire exister la rédaction en tant que telle. Je ne propose pas un kolkhoze journalistique (Sourires), ni une structure concurrente de la direction ; je propose juste que les journalistes disposent d'un droit collectif qui leur serait mieux reconnu.
M. Philippe Bonnecarrère, rapporteur. - Avis défavorable. Le conseil de rédaction que vous créez ainsi n'assure pas que des fonctions consultatives. Il pourrait mener une politique rédactionnelle différente de celle du directeur de la publication, ce qui pose d'abord un problème de droit, celui-ci étant responsable, depuis la loi de 1881, pénalement et civilement. Ensuite, au regard du droit des sociétés, les actionnaires seraient dépourvus du droit de donner leur avis sur l'entreprise dont ils sont propriétaires. À l'égard du droit du travail enfin, comment faire jouer en ce cas la clause de conscience des journalistes ? D'autres arguments du même type vont tous dans le même sens.
Mme Fleur Pellerin, ministre. - Même avis, pour les mêmes raisons, sur un amendement qui s'en prend fortement à des principes établis par la loi de 1881. Dans sa décision sur le pluralisme de la presse écrite, le Conseil constitutionnel a estimé que celui-ci passe par la diversité des titres, à l'inverse de l'audiovisuel, où il doit exister au sein de chaque antenne.
M. David Assouline. - Par rapport au phénomène de concentration à l'oeuvre depuis plusieurs années, essentiellement dans la PQR, où les financiers et des intérêts qui ont peu à voir avec ceux de la presse ont pris position, cet amendement propose une solution qui mériterait un débat approfondi, à l'égard, en effet de la loi de 1881. La clause de conscience est un droit fondamental du journaliste. Peut-être faudra-t-il un jour revoir des dispositions qui datent du XIXe siècle si l'on veut faire bouger les choses ?
Mme Nathalie Goulet. - Certes, il y a des failles dans le dispositif que je propose. Tout de même, j'aimerais que notre commission se penche un jour sur le statut des rédactions. Le syndicat des journalistes en a fait un vrai sujet lors de sa dernière assemblée générale, à laquelle participait d'ailleurs notre collègue Gattolin. On ne peut rester sans réponse juridique. Voyez les problèmes de France Soir, de Libération, du Monde : les journalistes ne sont pas protégés des mouvements financiers. D'un côté, on multiplie les aides, de l'autre on prive les rédactions d'un droit collectif.
L'amendement n°1 est retiré.
L'article 14 est adopté.
ARTICLE 14 BIS
Mme la présidente. - Amendement n°5 rectifié, présenté par Mme Mélot.
Alinéa 5
Après les mots :
arrêté du préfet
insérer les mots :
, après consultation obligatoire des organisations professionnelles des entreprises de presse dont le siège est situé dans le département, ou dont un ou plusieurs titres ont une édition départementale
Mme Colette Mélot. - La publication des annonces légales, par la PQR en particulier, est essentielle à son équilibre financier, car elle lui procure des recettes non négligeables. La suppression de la commission consultative départementale, consultée par le préfet pour dresser la liste des journaux susceptibles de recevoir ces annonces, pour des raisons compréhensibles de conformité à la directive européenne « Services », doit être compensée. Tel est l'objet de ce dispositif.
M. Philippe Bonnecarrère, rapporteur. - Je vous suggère de retirer votre amendement. N'ouvrons pas ici une boîte de Pandore...
M. David Assouline. - On y sera encore demain !
M. Philippe Bonnecarrère, rapporteur. - On s'expose surtout à des conséquences dommageables. Faisons preuve de prudence pour ne pas rompre l'équilibre présent.
Mme la présidente. - Je dois normalement lever la séance à 20 heures. Je ne peux aller plus loin que 20 h 10. Si vous voulez qu'on en finisse ce soir avec cette proposition de loi, soyez concis !
Mme Colette Mélot. - Il importait d'attirer l'attention du Sénat des difficultés de la PQR.
L'amendement n°5 rectifié est retiré.
L'article 14 bis est adopté.
ARTICLE ADDITIONNEL
Mme la présidente. - Amendement n°2 rectifié undecies, présenté par MM. Commeinhes, Béchu et Bizet, Mme Des Esgaulx et MM. Gilles, Cadic et Roche.
Après l'article 14 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au premier alinéa de l'article 2 de la loi n° 55-4 du 4 janvier 1955 concernant les annonces judiciaires et légales, après les mots : « judiciaire ou technique » sont insérés les mots : « ainsi que les services de presse en ligne ».
M. François Commeinhes. - Compte tenu de ce que vous venez de dire, je le retire, pour gagner du temps ! (Applaudissements sur les bancs CRC et socialistes)
M. Philippe Bonnecarrère, rapporteur. - Merci !
L'amendement n°2 rectifié undecies est retiré.
ARTICLE 15 (Supprimé)
Mme la présidente. - Amendement n°9, présenté par M. Assouline et les membres du groupe socialiste et apparentés.
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
L'article 719 du code de procédure pénale est ainsi modifié :
1° A la fin, les mots : « et les établissements pénitentiaires » sont remplacés par les mots : « , les établissements pénitentiaires et les centres éducatifs fermés mentionnés à l'article 33 de l'ordonnance n° 45-174 du 2 février 1945 relative à l'enfance délinquante » ;
2° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« À l'exception des locaux de garde à vue, les députés, les sénateurs et les représentants au Parlement européen mentionnés au premier alinéa du présent article peuvent être accompagnés par un ou plusieurs journalistes titulaires de la carte d'identité professionnelle mentionnée à l'article L. 7111-6 du code du travail, dans des conditions fixées par décret en Conseil d'État. »
M. David Assouline. - J'ai dit en discussion générale combien cet amendement me tient à coeur.
L'amendement identique n°23 est retiré.
M. Philippe Bonnecarrère, rapporteur. - Avis défavorable, après des débats qui ont été équilibrés, il faut le reconnaître.
Mme Fleur Pellerin, ministre. - Avis favorable au rétablissement des dispositions adoptées par l'Assemblée nationale.
Après une épreuve à main levée déclarée douteuse, l'amendement n°9, mis aux voix par assis et levé, est adopté et l'article 15 est rétabli.
(Applaudissements à gauche et au centre)
ARTICLES ADDITIONNELS
Mme la présidente. - Amendement n°25, présenté par M. P. Laurent et les membres du groupe CRC.
Après l'article 15
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article 2 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse est ainsi rédigé :
« Art. 2. - I. - Afin de garantir l'information du public dans une société démocratique, le secret des sources des journalistes est protégé et il ne peut y être porté atteinte que dans les conditions prévues par la loi.
« A droit à la protection du secret des sources :
« 1° Toute personne qui, dans l'exercice de sa profession de journaliste pour le compte d'une ou plusieurs entreprises de presse, de communication au public en ligne, de communication audiovisuelle ou d'édition, d'une ou plusieurs publications quotidiennes ou périodiques ou d'une ou plusieurs agences de presse, pratique le recueil d'informations et leur diffusion au public ;
« 2° Toute personne qui exerce des fonctions de direction de la publication ou de la rédaction pour le compte de l'une des entreprises, publications ou agences mentionnées au 1° ;
« 3° Le collaborateur de la rédaction, soit toute personne qui, par sa fonction au sein de la rédaction dans une des entreprises, publications ou agences mentionnées au 1° , est amenée à prendre connaissance d'informations permettant de découvrir une source et ce, à travers la collecte, le traitement éditorial, la production ou la diffusion de ces mêmes informations.
« II. - Constitue une atteinte directe au secret des sources le fait de chercher à découvrir une source au moyen d'investigations portant sur une des personnes mentionnées au I et sur les archives de son enquête, ou sur toute personne qui, en raison de ses relations habituelles avec une des personnes mentionnées au même I, peut détenir des renseignements permettant de découvrir cette source.
« Il ne peut être porté atteinte au secret des sources qu'à titre exceptionnel et sous réserve que cette information ne puisse être obtenue d'aucune autre manière dans les cas suivants :
« 1° La prévention ou la répression d'un crime ;
« 2° La prévention d'un délit d'atteinte à la personne humaine puni d'au moins sept ans d'emprisonnement ;
« 3° La prévention d'un délit prévu aux titres Ier et II du livre IV du code pénal et puni de dix ans d'emprisonnement ;
« 4° La répression d'un délit mentionné aux 2° et 3° du présent II, lorsque celui-ci est d'une particulière gravité en raison des circonstances de sa commission, de la vulnérabilité de la ou des victimes ou de la qualité de l'auteur du délit, lorsque l'atteinte est justifiée par la nécessité de faire cesser le délit ou lorsqu'il existe un risque particulièrement élevé de renouvellement de celui-ci.
« Les mesures envisagées portant atteinte au secret des sources doivent être strictement nécessaires et proportionnées au but poursuivi.
« Toutefois, une personne mentionnée au I ne peut en aucun cas être obligée de révéler ses sources.
« III. - Il ne peut être porté atteinte au secret des sources au cours d'une enquête de police judiciaire ou d'une instruction que sur décision d'un juge, dans les conditions et selon les modalités prévues par le code de procédure pénale.
« IV. - La détention ou le stockage chez un hébergeur, par une personne mentionnée au I, de documents, d'images ou d'enregistrements sonores ou audiovisuels, quel qu'en soit le support, provenant du délit de violation du secret professionnel ou du secret de l'enquête ou de l'instruction ou du délit d'atteinte à l'intimité de la vie privée ne peut constituer le délit de recel prévu à l'article 321-1 du code pénal lorsque ces documents, images ou enregistrements sonores ou audiovisuels contiennent des informations dont la diffusion au public constitue un but légitime dans une société démocratique. »
M. Pierre Laurent. - Je le retire après les propos liminaires de Mme la ministre. Nous y reviendrons bientôt.
L'amendement n°25 est retiré.
Mme la présidente. - Amendement n°4, présenté par M. Assouline et les membres du groupe socialiste et apparentés.
Après l'article 15
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Après l'article 199 novovicies du code général des impôts, il est inséré un article 199... ainsi rédigé :
« Art. 199... - Les contribuables domiciliés fiscalement en France peuvent bénéficier, dans des conditions fixées par décret, d'une réduction de leur impôt sur le revenu au titre de souscriptions en numéraire réalisées au capital de sociétés soumises à l'impôt sur les sociétés dans les conditions de droit commun et exploitant soit un journal quotidien, soit une publication de périodicité au maximum mensuelle consacrée à l'information politique et générale telle que définie à l'article 39 bis A.
II. - La perte de recettes résultant pour l'État du I est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
M. David Assouline. - C'est un amendement important qui rassemble notre commission et notre Haute Assemblée. Il répond à un souhait exprimé par Charlie Hebdo et par Charb en particulier avant le drame du 7 janvier. Le président de la République a dit lors de ses voeux à l'AFP qu'il soutiendrait une initiative parlementaire allant en ce sens. Adopté à l'unanimité par la commission de la culture hier, cet amendement présenté par le groupe socialiste ne peut porter qu'un nom, celui de Charb.
Avec le sous-amendement du gouvernement, nous devrions avoir une rédaction qui évite tout contournement.
Mme la présidente. - Sous-amendement n°31 à l'amendement n°4 de M. Assouline et les membres du groupe socialiste et apparentés, présenté par le Gouvernement.
Amendement n° 4
A. - Alinéa 3
Remplacer cet alinéa par trois alinéas ainsi rédigés :
Le 15 ter du II de la section V du chapitre premier du titre Ier de la première partie du livre Ier du code général des impôts est ainsi rédigé :
«15 ter.
« Réduction d'impôt accordée au titre des souscriptions en numéraire au capital d'entreprises de presse.
B. - Alinéa 4
1° Avant les mots :
Les contribuables
insérer la référence :
1.
2° Remplacer les mots :
peuvent bénéficier, dans des conditions fixées par décret,
par les mots :
au sens de l'article 4B bénéficient
3° Remplacer les mots :
de leur impôt sur le revenu
par les mots :
d'impôt sur le revenu égale à 30 % des versements effectués jusqu'au 31 décembre 2018
4° Remplacer les mots :
exploitant soit un journal quotidien, soit une publication de périodicité au maximum mensuelle consacrée à l'information politique et générale telle que définie à
par les mots :
définies au I de
C. - Après l'alinéa 4
Insérer six alinéas ainsi rédigés :
« Le taux mentionné au premier alinéa est porté à 50 % lorsque la société bénéficiaire de la souscription a le statut d'entreprise solidaire de presse d'information au sens de l'article 2-1 de la loi n° 86-897 du 1er août 1986 modifiée portant réforme du régime juridique de la presse.
« 2. Les versements ouvrant droit à la réduction d'impôt mentionnée au 1. sont retenus dans la limite annuelle de 1000 € pour les contribuables célibataires, veufs ou divorcés et de 2 000 € pour les contribuables soumis à imposition commune.
« 3. Lorsque tout ou partie des titres ayant donné lieu à réduction d'impôt est cédé avant le 31 décembre de la cinquième année suivant celle de la souscription, la réduction d'impôt obtenue est ajoutée à l'impôt dû au titre de l'année de la cession.
« Le premier alinéa ne s'applique pas en cas de licenciement, d'invalidité correspondant au classement dans la deuxième ou la troisième des catégories prévues à l'article L. 341-4 du code de la sécurité sociale ou du décès du contribuable ou de l'un des époux ou partenaires liés par un pacte civil de solidarité soumis à imposition commune.
« 4. La réduction d'impôt mentionnée au 1. ne s'applique pas aux titres figurant dans un plan d'épargne en actions mentionné à l'article 163 quinquies D ou dans un plan d'épargne salariale mentionné au titre III du livre III de la troisième partie du code du travail, ni à la fraction des versements effectués au titre de souscriptions ayant ouvert droit aux réductions d'impôt prévues au g du 2 de l'article 199 undecies A, aux articles 199 undecies B, 199 terdecies-0 A, 199 terdecies-0 B ou 885-0 V bis du présent code. La fraction des versements effectués au titre de souscriptions donnant lieu aux déductions prévues aux 2° quater et 2° quinquies de l'article 83 n'ouvre pas droit à cette réduction d'impôt. »
II. - Le I s'applique aux versements effectués à compter de l'entrée en vigueur de la présente loi.
D. - Alinéa 5
Supprimer cet alinéa.
Mme Fleur Pellerin, ministre. - Défendu.
M. Philippe Bonnecarrère, rapporteur. - Avis favorable à l'amendement, au bénéfice du sous-amendement qui lui confère une solidité technique incontestable. Tous les groupes l'ont soutenu.
M. Pierre Laurent. - Notre soutien est ferme, en faveur de cet amendement important, fidèle à l'esprit de l'amendement Charb.
Mme Colette Mélot. - L'adoption de cet amendement constituera une avancée pour le secteur. Notre amendement, identique à la proposition de loi communiste déposée précédemment, apporte également une aide à la presse. Le champ d'application de l'amendement socialiste n'est pas le même. Notre proposition correspond au principe du rescrit fiscal mis en place sous la précédente majorité. Si le dispositif adopté le remplaçait, le secteur de la presse serait gravement affecté. Voyez ce qui s'est passé à cet égard pour Charlie Hebdo. L'association qui le soutient existe grâce au rescrit, qui garantit le pluralisme de la presse, là où les aides du gouvernement peuvent se révéler insuffisantes. Je voterai le présent amendement.
Le sous-amendement n°31 est adopté.
L'amendement n°4, ainsi modifié, est adopté et devient un article additionnel.
ARTICLE 16
Mme Fleur Pellerin, ministre. - Cet amendement supprime l'article 16 introduit par la commission qui élargit les fonds de dotation au financement du développement numérique de la presse. Le gouvernement préfère le mécanisme que le Sénat vient d'adopter.
M. Philippe Bonnecarrère, rapporteur. - Avis défavorable, dans la mesure où ces mécanismes ne sont pas contradictoires.
L'amendement n°32 n'est pas adopté.
L'article 16 est adopté.
ARTICLES ADDITIONNELS
Mme la présidente. - Amendement n°24, présenté par M. P. Laurent et les membres du groupe CRC.
Après l'article 16
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - L'article 200 du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Après le f) du 1., sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :
« f bis) D'associations exerçant des actions concrètes en faveur du pluralisme de la presse, par la prise de participations minoritaires, l'octroi de subventions ou encore de prêts bonifiés à des entreprises de presse au sens de l'article de l'article 39 bis A.
« Les donateurs peuvent affecter leur don au financement d'une entreprise de presse, ou d'un titre, ou d'un service de presse en ligne en particulier ; »
2° Après le 2° du g), il est inséré un 3° ainsi rédigé :
« 3° Ou dont la gestion est désintéressée, et qui exercent des actions concrètes en faveur du pluralisme de la presse, par la prise de participations minoritaires, l'octroi de subventions ou encore de prêts bonifiés à des entreprises de presse au sens de l'article de l'article 39 bis A.
« Les donateurs peuvent affecter leur don au financement d'une entreprise de presse, ou d'un titre, ou d'un service de presse en ligne en particulier. »
II. - La perte de recettes résultant pour l'État du I est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
M. Pierre Laurent. - C'est l'amendement dit Charb, plus large que dans la version proposée par M. Assouline.
Mme la présidente. - Amendement identique n°15, présenté par M. Commeinhes, Mme Mélot et M. Retailleau.
Mme Colette Mélot. - Je viens de le défendre.
M. Philippe Bonnecarrère, rapporteur. - Avis favorable. Les trois véhicules distincts sont acceptables. Au gouvernement de voir s'il lève le gage...
Mme Fleur Pellerin, ministre. - Sagesse : le dispositif qui serait ainsi légalisé, en quelque sorte existe déjà. Il n'est pas remis en cause par l'amendement Assouline.
Mme la présidente. - Levez-vous le gage ?
Mme Fleur Pellerin, ministre. - Non.
M. Philippe Dallier. - Que signifie alors l'avis de sagesse ?
Les amendements identiques nos24 et 15 sont adoptés et deviennent un article additionnel.
Mme la présidente. - Amendement n°10 rectifié, présenté par Mme Blandin et les membres du groupe écologiste.
Après l'article 16
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Avant le 31 juillet 2015, le Gouvernement remet au Parlement un rapport proposant une meilleure répartition des aides directes à la presse écrite, en vue de mieux assurer le pluralisme et la diversité des différents titres.
M. André Gattolin. - Le gouvernement a fait de petits pas pour clarifier les aides à la presse, mais il faut aller plus loin. Quand on voit la hiérarchie des titres aidés, on se pose des questions ! D'où cette demande de rapport.
M. Philippe Bonnecarrère, rapporteur. - J'étais défavorable mais la commission a donné un avis favorable.
Mme Fleur Pellerin, ministre. - Sagesse. Le président de la République m'a chargée de préparer une réforme ambitieuse des aides au pluralisme, dans les trois prochains mois. Ces mesures sont essentiellement d'ordre réglementaire mais je souhaite bien sûr y associer étroitement le Parlement.
L'amendement n°10 rectifié n'est pas adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°26 rectifié, présenté par M. P. Laurent et les membres du groupe CRC.
Après l'article 16
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le Gouvernement remet un rapport au Parlement sur la revalorisation et la réaffection des aides publiques de l'État aux sociétés de journaux et de publication périodiques de la presse écrite et numérique, notamment concernant l'affectation de ces aides aux titres d'information politique et générale tels que définis par l'article 39 bis A du code général des impôts, et prévoit la possibilité d'élargir ces aides au-delà de la presse quotidienne.
M. Pierre Laurent. - J'ai entendu l'engagement de Mme la ministre ; nous serons vigilants.
L'amendement n°26 rectifié est retiré.
La proposition de loi, modifiée, est mise aux voix par scrutin public.
Mme la présidente - Voici le résultat du scrutin n° 94 :
Nombre de votants | 344 |
Nombre de suffrages exprimés | 325 |
Pour l'adoption | 325 |
Contre | 0 |
Le Sénat a adopté.
(Applaudissements sur tous les bancs)
Mme la présidente. - Le dépassement horaire était tout à fait exceptionnel.
Prochaine séance mardi 10 février 2015, à 14 h 30.
La séance est levée à 20 h 15.
Jean-Luc Dealberto
Directeur des comptes rendus analytiques
Ordre du jour du mardi 10 février 2015
Séance publique
À 14 h 30 et le soir
1. Conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne dans les domaines de la propriété littéraire et artistique et du patrimoine culturel.
Rapport de Mme Colette Mélot, rapporteur pour le Sénat (n° 229, 2014-2015).
Texte de la commission mixte paritaire (n° 230, 2014-2015).
2. Projet de loi ratifiant l'ordonnance n° 2014-1543 du 19 décembre 2014 portant diverses mesures relatives à la création de la métropole de Lyon (Procédure accélérée) (n° 223, 2014-2015).
Rapport de M. Jean-Patrick COURTOIS, fait au nom de la commission des lois (n° 272, 2014-2015).
Texte de la commission (n° 273, 2014-2015).
3. Projet de loi ratifiant l'ordonnance n° 2014-1335 du 6 novembre 2014 relative à l'adaptation et à l'entrée en vigueur de certaines dispositions du code général des collectivités territoriales, du code général des impôts et d'autres dispositions législatives applicables à la métropole de Lyon (Procédure accélérée) (n° 222, 2014-2015).
Rapport de M. Charles Guené, fait au nom de la commission des finances (n° 274, 2014-2015).
Texte de la commission (n° 275, 2014-2015).
4. Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, relatif à la transition énergétique pour la croissance verte (n° 16, 2014-2015).
Rapport de M. Ladislas Poniatowski, fait au nom de la commission des affaires économiques (n° 263, 2014-2015).
Texte de la commission (n° 264 rect., 2014-2015).
Avis de M. Jean-François Husson, fait au nom de la commission des finances (n° 236, 2014-2015).
Avis de Mme Françoise Férat, fait au nom de la commission de la culture (n° 237, 2014-2015).
Avis de M. Louis Nègre, fait au nom de la commission du développement durable (n° 244, 2014-2015).
Analyse des scrutins publics
Scrutin n° 93 sur l'amendement n° 19, présenté par M. Pierre Laurent et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, tendant à supprimer l'article 11 A de la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, portant diverses dispositions tendant à la modernisation du secteur de la presse.
Résultat du scrutin :
Nombre de votants : 334
Suffrages exprimés : 225
Pour : 42
Contre : 183
Le Sénat n'a pas adopté
Analyse par groupes politiques :
Groupe UMP (143)
Contre : 142
N'a pas pris part au vote : 1 - M. Gérard Larcher, président du Sénat
Groupe socialiste (111)
Abstentions : 108
N'ont pas pris part au vote : 3 - Mme Nicole Bonnefoy, MM. Jeanny Lorgeoux, Gilbert Roger
Groupe UDI-UC (43)
Contre : 41
Abstention : 1 - Mme Nathalie Goulet
N'a pas pris part au vote : 1 - Mme Jacqueline Gourault, présidente de séance
Groupe CRC (19)
Pour : 19
Groupe du RDSE (13)
Pour : 13
Groupe écologiste (10)
Pour : 10
Sénateurs non-inscrits (9)
N'ont pas pris part au vote : 9 - MM. Philippe Adnot, Michel Amiel, Jean-Noël Guérini, Mme Mireille Jouve, MM. Jean Louis Masson, Robert Navarro, David Rachline, Stéphane Ravier, Alex Türk.
Scrutin n° 94 sur l'ensemble de la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, portant diverses dispositions tendant à la modernisation du secteur de la presse.
Résultat du scrutin :
Nombre de votants : 344
Suffrages exprimés : 325
Pour : 325
Contre : 0
Le Sénat a adopté.
Analyse par groupes politiques :
Groupe UMP (143)
Pour : 142
N'a pas pris part au vote : 1 - M. Gérard Larcher, président du Sénat
Groupe socialiste (111)
Pour : 111
Groupe UDI-UC (43)
Pour : 42
N'a pas pris part au vote : 1 - Mme Jacqueline Gourault, présidente de séance
Groupe CRC (19)
Abstentions : 19
Groupe du RDSE (13)
Pour : 13
Groupe écologiste (10)
Pour : 10
Sénateurs non-inscrits (9)
Pour : 7
N'ont pas pris part au vote : 2 - MM. David Rachline, Stéphane Ravier.