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Table des matières



Ouverture de la session ordinaire 2018-2019

Échec en CMP

CMP (Nominations)

Pastoralisme

Discussion générale

Mme Patricia Morhet-Richaud, auteur de la proposition de résolution

M. Alain Marc

M. Cyril Pellevat

Mme Noëlle Rauscent

M. Guillaume Gontard

M. Alain Duran

Mme Maryse Carrère

Mme Denise Saint-Pé

Mme Dominique Estrosi Sassone

M. Jean-Claude Tissot

M. Jean-Yves Roux

M. Loïc Hervé

M. Michel Savin

M. Stéphane Travert, ministre de l'agriculture et de l'alimentation

Questions d'actualité

Différenciation fiscale pour l'outre-mer

M. Jean-Louis Lagourgue

Mme Annick Girardin, ministre des outre-mer

Actions violentes contre les commerces de bouche

M. Jean-Noël Cardoux

M. Christophe Castaner, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement

Corridor de la mer du Nord et Méditerranée (I)

Mme Catherine Fournier

Mme Élisabeth Borne, ministre auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, chargée des transports

Parcoursup

Mme Françoise Cartron

Mme Frédérique Vidal, ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation

Transports en Ile-de-France

M. Olivier Léonhardt

Mme Élisabeth Borne, ministre auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, chargée des transports

Corridor de la mer du Nord et Méditerranée (II)

Mme Cathy Apourceau-Poly

Mme Élisabeth Borne, ministre auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, chargée des transports

Nomination du procureur de Paris

M. Jérôme Durain

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux, ministre de la justice

Malaise dans la ruralité

M. Jacques Genest

M. Jacques Mézard, ministre de la cohésion des territoires

État du réseau routier

M. Jean-Pierre Corbisez

Mme Élisabeth Borne, ministre auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, chargée des transports

Politique générale

Mme Jacqueline Eustache-Brinio

M. Édouard Philippe, Premier ministre

Clause de conscience sur l'IVG

M. Bernard Jomier

Mme Agnès Buzyn, ministre des solidarités et de la santé

Pouvoir d'achat des retraités

M. Jean Louis Masson

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État auprès du ministre de l'action et des comptes publics

Comités de protection des personnes

Explications de vote

Mme Delphine Gény-Stephann, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances

M. Jean Sol, rapporteur de la commission des affaires sociales

M. Michel Amiel

Mme Laurence Cohen

M. Bernard Jomier

Mme Véronique Guillotin

M. Jean-Marie Mizzon

M. Daniel Chasseing

Mme Catherine Deroche

Politique énergétique

M. Daniel Gremillet, pour le groupe Les Républicains

M. François de Rugy, ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire

M. Didier Rambaud

M. Fabien Gay

M. Roland Courteau

M. Jean-Claude Requier

M. Jean-Claude Luche

M. Jérôme Bignon

M. Jean-François Husson

Mme Martine Filleul

M. Claude Kern

M. Guillaume Chevrollier

M. Jean-Claude Tissot

Mme Agnès Canayer

M. Pierre Cuypers

M. Jacques Genest

M. Michel Savin

Mme Sophie Primas, pour le groupe Les Républicains

Annexes

Ordre du jour du mercredi 3 octobre 2018

Analyse des scrutins publics

Composition d'une CMP




SÉANCE

du mardi 2 octobre 2018

1re séance de la session ordinaire 2018-2019

présidence de M. Philippe Dallier, vice-président

Secrétaires : Mme Françoise Gatel, M. Michel Raison.

La séance est ouverte à 14 h 30.

Le procès-verbal de la précédente séance est adopté.

Ouverture de la session ordinaire 2018-2019

M. le président.  - En application de l'article 28 de la Constitution, la session ordinaire 2018-2019 est ouverte depuis le 1er octobre.

Échec en CMP

M. le président.  - J'informe le Sénat que les commissions mixtes paritaires chargées de proposer des textes sur les dispositions restant en discussion de la proposition de loi et de la proposition de loi organique relatives à la lutte contre la manipulation de l'information ne sont pas parvenues à l'adoption de textes communs.

CMP (Nominations)

M. le président.  - J'informe le Sénat que des candidatures ont été publiées pour siéger au sein de la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif à la lutte contre la fraude.

Ces candidatures seront ratifiées si la Présidence n'a pas reçu d'opposition dans le délai d'une heure prévu par notre Règlement.

Pastoralisme

M. le président.  - L'ordre du jour appelle l'examen de la proposition de résolution sur le pastoralisme présentée, en application de l'article 34-1 de la Constitution, par Mme Sophie Primas et plusieurs de ses collègues.

Discussion générale

Mme Patricia Morhet-Richaud, auteur de la proposition de résolution .  - (Applaudissements sur les bancs des groupes Les Républicains et UC ; MM. Didier Guillaume, Michel Amiel et Mme Maryse Carrère applaudissent également.) Le pastoralisme est en danger. Il croule sous une avalanche de contraintes et la concurrence déloyale d'autres pays.

Comme si leur métier n'était pas assez exigeant, les éleveurs souffrent des actes de prédation et se sentent abandonnés.

Le Sénat entend leur détresse et veut leur envoyer un signal fort en ce début de session. Cette proposition de résolution, cosignée par plus de cent sénateurs de tous bords, s'inscrit dans la continuité des travaux du groupe d'étude sur la montagne, présidé par Cyril Pellevat, du groupe d'étude sur la chasse, présidé par Jean-Noël Cardoux et du groupe de travail sur le pastoralisme que je préside. Ces travaux ont vocation à se poursuivre : cette proposition de résolution constitue un coup d'envoi, et non un coup de sifflet final. Elle vise à revenir à l'essentiel : le pastoralisme est la vitrine de l'agriculture de demain.

Dans la nuit du 24 au 25 septembre, une vingtaine de brebis ont été tuées dans le massif du Dévoluy. Jean-Claude Michel, président de groupement pastoral, est à bout. Rendez-vous compte : 36 jours seulement sans attaque dans mon département des Hautes-Alpes, depuis le début de l'année !

Le pastoralisme est d'abord une question géographique : il concerne les territoires de montagne tout autant que le Cotentin normand, le delta camarguais, les marais poitevins et les prairies inondables de la Loire ; il s'invite même en zone périurbaine. Son rôle dans l'aménagement du territoire n'est plus à démontrer, sa contribution à l'activité touristique non plus - on sait son apport à la conservation des pistes de ski.

Le pastoralisme est une question économique. Il représente 14 000 fermes en France et près de 5 % du cheptel français. Dans les massifs montagneux, les surfaces utilisant des pâturages collectifs sont parfois supérieures à 50 %.

C'est aussi une question agricole - le pastoralisme promeut une agriculture de qualité, artisanale et environnementale, car le pastoralisme est une forme d'élevage respectueuse des territoires et soucieuse du bien-être animal.

Le pastoralisme est, enfin, partie intégrante du patrimoine français depuis des siècles. Les pratiques ancestrales sont modernes, en témoigne leur attrait auprès des jeunes agriculteurs.

Cette proposition de résolution ne se borne pas aux enjeux de prédation. Bien au contraire, nous appelons les pouvoirs publics à reconnaître à leur juste valeur toutes les externalités positives du pastoralisme. Nous invitons le Gouvernement à sanctuariser les moyens accordés à l'agriculture pastorale, notamment dans les négociations en cours sur la PAC car les éleveurs pastoraux ne sauraient être les grands oubliés du second pilier. Enfin, il est urgent de rénover la politique de gestion des grands prédateurs. La réintroduction d'ours ne devrait pas être décidée depuis un bureau parisien mais être précédée d'une étude d'impact et d'une concertation locale approfondie. S'agissant des loups, il convient de fiabiliser les données scientifiques, notamment sur l'hybridation, de réapprendre aux loups à se tenir à l'écart des troupeaux et des hommes par des méthodes complémentaires aux tirs de prélèvement ; le choix du Gouvernement de conditionner les indemnisations à la mise en place de mesures de protection doit être questionné tout comme doivent être mieux reconnus les troupeaux non protégeables.

Cette résolution témoigne du soutien que les agriculteurs pastoraux trouveront toujours chez les parlementaires représentant les territoires. (Applaudissements)

M. Alain Marc .  - (Applaudissements sur les bancs des groupes Les Indépendants et UC et sur quelques bancs du groupe Les Républicains.) Le canis lupus est protégé par la convention de Berne de 1979, ratifiée par la France en 1990, ainsi que par la directive Habitat de 1992. D'où la réintroduction de l'espèce sur le continent européen, provoquant la hausse du nombre de bêtes tuées, de 2 500 en 2007 à 12 000 en 2017, et la baisse des exploitations ovines, de 95 000 en 2010 à 70 000 en 2016.

Le nombre de meutes de loups reste difficile à estimer mais semble avoir augmenté compte tenu de l'accroissement des attaques. Le comportement de l'animal envers les humains serait modifié par son hybridation avec des chiens, fait insuffisamment étudié.

Le pastoralisme participe de la richesse de nos territoires. On lui doit le classement au patrimoine mondial de l'Unesco du Larzac où, chaque printemps, des touristes d'Europe du Nord viennent photographier nos plantes rares et nos orchidées.

Les éleveurs demandent la révision de la convention de Berne. Et, à raison : le loup n'est plus une espèce menacée et la convention ne distingue pas les loups des hybrides qui, pour la plupart, sont à l'origine des attaques de troupeaux. Si rien n'est fait, nos paysages s'ensauvageront.

En France, en Italie, en Allemagne, en Espagne, en Autriche, en Pologne, en Roumanie, la situation n'est pas satisfaisante. À Bruxelles, on considère que la cohabitation fonctionne correctement. D'après le commissaire européen à l'écologie, le portail électrique serait efficace, il resterait à convaincre les éleveurs... Un portail pour des centaines d'hectares ? Notre réponse l'a ébranlé...

M. Didier Guillaume.  - Il n'a jamais vu un territoire rural !

M. Alain Marc.  - En effet... La cohabitation heureuse avec le loup n'existe pas, c'est un mythe La réglementation européenne doit évoluer pour que le pastoralisme ne disparaisse pas au profit de l'élevage industriel hors sol qui, lui, n'a rien à craindre du loup.

Il y a également lieu de s'interroger sur la brigade loup. Comment douze personnes seulement, localisées dans le Sud-Est, peuvent-elles couvrir 25 départements ?

La plupart des membres du groupe Les Indépendants voteront cette résolution. (Applaudissements)

M. Cyril Pellevat .  - L'actualité nous rappelle la vulnérabilité du monde pastoral. Il y a quelques jours, la brigade loup a été dépêchée dans les Pyrénées-Atlantiques, en vallée d'Ossau, pour protéger les éleveurs.

La commission du développement durable m'a confié - et j'en remercie Hervé Maurey - la rédaction de propositions pour défendre le pastoralisme et je me réjouis qu'elles aient été reprises dans cette proposition de résolution. Je salue l'initiative de Patricia Morhet-Richaud qui m'a associé, ainsi que les présidents Maurey et Primas, à la rédaction de ce texte.

Le pastoralisme, qui contribue au maintien de la biodiversité, est exposé à des dangers mortels. Les éleveurs ne sont pas que les gardiens des montagnes et des plaines, ils sont les premiers écologistes ; ils participent à la protection des sols, de l'eau et des paysages.

L'attitude des pouvoirs publics à l'égard des prédateurs, au regard de leur relative passivité face à la disparition des oiseaux et des abeilles, semble totalement déséquilibrée. Et défavorable aux éleveurs : les attaques ont augmenté de 60 % depuis 2013 et les dépenses d'indemnisation sont passées de 4 à 26 millions d'euros entre 2006 et 2017. Cela signe la faillite de la cohabitation entre loups et éleveurs, telle qu'elle est pensée depuis vingt ans. Qui plus est, nous sommes en train de perdre la bataille de la communication, face à une pensée urbaine de la ruralité.

Je sais le ministre attentif à ces questions. Je vous invite, chers collègues, à voter cette résolution car les éleveurs ne peuvent pas attendre davantage. (Applaudissements)

Mme Noëlle Rauscent .  - L'économie pastorale, élément incontournable de l'agriculture française, appartient à notre patrimoine. Il est de notre devoir de nous mobiliser pour sauvegarder cette tradition ancestrale. Les gains qu'elles génèrent bénéficient à toute la société : aménagement des paysages, protection de la biodiversité, forte composante artisanale favorisant des denrées alimentaires de qualité et les circuits courts.

Depuis quelques années, la population de loups augmente de manière exponentielle. Une refonte du modèle de gestion du loup est nécessaire pour offrir aux éleveurs des perspectives d'avenir crédibles. C'est ce à quoi s'est attelé le Gouvernement avec le plan national d'action 2018-2023.

Nous devons tenir deux objectifs : le maintien de nos écosystèmes et la pérennisation de notre modèle pastoral. Tout en saluant le travail que M. Pellevat a mené en amont de cette proposition de résolution, je vois dans ce texte une opposition entre protection du loup et modèle pastoral. Le plan du Gouvernement, fruit d'une riche consultation... (On se récrie sur les bancs du groupe Les Républicains.)

M. Gilbert Bouchet.  - Ce qu'il ne faut pas entendre !

Mme Noëlle Rauscent.  - ... se fonde sur une meilleure connaissance de l'espèce et une nouvelle approche territoriale grâce à l'implication des préfets de départements et des élus locaux. Des mesures significatives sont mises en oeuvre pour protéger les troupeaux et indemniser les éleveurs - chiens de protection, gardiennage...

M. Alain Marc.  - Gardiennage de qui ? Des loups ou des brebis ?

Mme Noëlle Rauscent.  - Le plan prévoit encore une meilleure aide à l'emploi,... (On hue l'oratrice sur les bancs du groupe Les Républicains en imitant le hurlement du loup.)

M. le président.  - S'il vous plaît, un peu de calme !

Mme Noëlle Rauscent.  - ...un soutien aux filières de produits agricoles de qualité et de réelles mesures d'amélioration des conditions de vie des bergers.

Certains ont manifesté leurs craintes à l'égard de la tournure des négociations en cours à Bruxelles. Faisons confiance, chers collègues, au ministre de l'agriculture.

Une évaluation du plan Loup aura lieu à mi-parcours, qui conditionnera la mise en place de la deuxième phase du plan. (Même mouvement sur les bancs du groupe Les Républicains ; M. Arnaud de Belenet applaudit.)

M. Guillaume Gontard .  - Cette proposition de résolution représente une initiative bienvenue. Le pastoralisme respecte les animaux, préserve le territoire, il est indispensable à la montagne. Or il est en danger. Rudesse du métier, crise des vocations, raréfaction du foncier, concurrence déloyale par les accords de libre-échange, fragilité des subventions européennes... Le retour des grands prédateurs noircit ce tableau alarmant après des problèmes déjà nombreux.

Le plan Loup porte en germe une véritable politique pastorale mais les moyens manquent pour développer les brigades, recruter des aides-bergers, dresser des chiens de protection, mieux accompagner les éleveurs avant et après les attaques et mener les recherches nécessaires. On entend dire dans les rangs de la majorité sénatoriale, que le loup coûte trop cher mais, sur les 26 millions du plan national d'action pour le loup, entre la moitié et les trois quarts vont directement aux éleveurs. C'est peu d'ailleurs, comparé à l'indemnisation des dégâts causés par les sangliers, une espèce non protégée : 50 millions d'euros par an.

L'heure est grave, elle appelle à une mobilisation générale. Malgré nos réserves, nous voterons cette proposition de résolution que nous avons pu amender. À notre sens, le salut du pastoralisme ne passera pas par une extermination des loups, c'est un miroir aux alouettes. Pour les chasser, nous avons, sous l'Empire, mobilisé l'armée et brûlé des hectares de forêt avec le succès que l'on sait. En 2017, 37 prédateurs seulement ont été tués pour 1 240 tirs autorisés, me confiait le directeur de l'Office national de la chasse et de la faune sauvage (ONCFS). Mieux vaut accompagner la cohabitation et développer de nouvelles techniques d'effarouchement tels que les tirs non létaux et le piégeage en prenant exemple sur le plan honnête et équilibré que le parc du Vercors a adopté à l'unanimité le 19 septembre dernier. Sortons de l'affrontement stérile sur le loup et l'ours pour défendre d'une seule voix le pastoralisme et la biodiversité. (Applaudissements sur les bancs des groupes CRCE et SOCR et sur les bancs du groupe Les Républicains)

M. Marc Daunis.  - Très bien !

M. Alain Duran .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR) Le Sénat donne la parole aux territoires ruraux et de montagne en ouverture de sa session ordinaire, il est dans son rôle. Mon département de l'Ariège est un département pastoral. L'estive, qui est pratiquée par plus de 50 % des exploitations, a une mission d'entretien des espaces pastoraux - 25 % du département - qui appartiennent à 90 % à l'État ou aux communes.

Le pastoralisme, qui favorise la production de la fourche à la fourchette, garantit un paysage ouvert ; un troupeau de moins, c'est un sentier qui se ferme.

En Ariège, les bergers sont exaspérés devant la recrudescence des attaques de l'ours : en 2016, 96 attaques faisant 228 victimes ; en 2017, 166 attaques et 500 victimes ; fin août 2018, déjà 232 attaques et 372 victimes. Alors qu'une nouvelle réintroduction d'ours slovènes a été annoncée pour les semaines à venir sans aucune concertation préalable, nous demandons une étude d'impact approfondie et des mesures efficaces de protection contre les prédations par respect de l'article 113-8 du code rural. Chiens de protection et parcs de nuit ne suffisent plus, il faut envisager d'autres pistes. Le CNRS et l'INRA ont réfléchi au principe de réciprocité avec le loup -  il faut de même travailler à faire comprendre à l'ours qui attaque un troupeau qu'il court un risque par son comportement. Si nous n'en finissons pas avec une approche romantique de l'ours, le pastoralisme, qui rend de si précieux services, sera mis à mal.

Nous voulons une montagne vivante pour ceux qui y vivent, une montagne profitable à ceux qui y séjournent quelques jours par an et m'ont inondé de SMS avant que je ne monte à cette tribune... Il faut agir si nous voulons ne pas avoir, un jour, à réintroduire le berger dans nos montagnes ! (Applaudissements sur tous les bancs, à l'exception de ceux du groupe LaREM)

Mme Maryse Carrère .  - Cette proposition de résolution est bienvenue ; elle met l'accent sur le rôle crucial du pastoralisme.

Monsieur le Ministre, je sais que vous connaissez bien les Hautes-Pyrénées. Vous avez entendu le cri d'alarme des jeunes agriculteurs lors de leur congrès en juin dernier. Comment comprendre la réintroduction de deux ours dans le Béarn ? C'est sacrifier toute une profession pour des raisons idéologiques. La montagne deviendra-t-elle un espace réservé aux prédateurs ? Ce n'est pas notre vision.

Comment imposer à des bergers déjà harassés de travail de monter à plus de 2 000 mètres tous les soirs pour surveiller leur troupeau ? Depuis la réintroduction de l'ours, aucune mesure d'accompagnement n'a fonctionné. Il y a une réelle incompatibilité entre la présence des grands prédateurs et celle des troupeaux. Cette proposition de résolution est un cri d'alarme.

Monsieur le Ministre, je sais que vous n'êtes pas responsable de cette réintroduction mais vous avez le devoir de prendre en compte la détresse des éleveurs et de les défendre. Le groupe RDSE votera dans sa grande majorité pour cette résolution. (Applaudissements sur les bancs des groupes RDSE, Les Indépendants, UC, Les Républicains ; M. Marc Daunis applaudit également.)

Mme Denise Saint-Pé .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe UC) Cette proposition de résolution envoie un message clair. La cohabitation entre grands prédateurs et éleveurs inquiète. On a le sentiment que la concertation n'a été que de forme, que la décision était déjà prise.

Le métier est déjà difficile ; avalanche de contraintes, poids des mesures, concurrence, prédation... La liste est longue. Les récentes discussions sur la PAC l'ont mis en évidence. Nous devons nous acheminer vers une agriculture plus qualitative que quantitative. Les éleveurs pastoraux n'y ont-ils pas toute leur place ?

Je partage les constats et les objectifs de cette résolution mais il faut aller plus loin, notamment en développant l'attractivité du métier. Nous ne voulons pas des territoires sanctuarisés, mais des territoires vivants.

L'État devrait partager la localisation des grands prédateurs par GPS avec les éleveurs. Enfin, le quad leur permettrait de rejoindre plus vite les estives depuis la vallée.

J'appelle le Gouvernement à préserver le pastoralisme et à mettre en place des solutions pragmatiques et respectueuses des éleveurs. (Applaudissements sur les bancs du groupe UC et sur quelques bancs des groupes Les Républicains et SOCR)

Mme Dominique Estrosi Sassone .  - (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains) Cette proposition de résolution constitue un signal fort alors que la cohabitation entre prédateurs et troupeaux est de plus en plus difficile. Comme me le disait un berger, le loup a changé son métier.

Mon département des Alpes-Maritimes détient le triste record des attaques : 3 000 en 2016 contre 1 500 en 2007. Les brebis, 10 000 il y a des décennies, ne sont plus que 3 000. Nous ne voulons pas l'éradication du loup, Monsieur Gontard, mais une régulation plus forte de sa population.

M. Charles Revet.  - Très bien !

Mme Dominique Estrosi Sassone.  - On veut soumettre l'attribution des aides à l'acquisition par les éleveurs d'équipements de protection alors que des permis de construire pour des bergeries en dur sont refusés. Et les chiens patous sont massacrés par le loup, eux aussi !

Un moyen simple serait de multiplier les brigades, les collectivités locales pourraient en créer. Le quota annuel d'abattage de loups montre toutes ses limites : c'est une décision administrative qui s'avère souvent inadaptée aux besoins, Nicolas Hulot a dû l'élever en urgence en 2017. La méthode des tirs isolés de prélèvements se révèle également inefficace.

Le Gouvernement doit apporter des réponses concrètes aux difficultés que nous rencontrons dans les Alpes-Maritimes. Les dommages pastoraux ne sont pas répartis de manière uniforme : d'un côté, des attaques continuelles et concentrées sur des territoires comme le mien ; de l'autre, des attaques sporadiques dans des territoires plus vastes.

Les éleveurs veulent seulement exercer leur métier.

M. Charles Revet.  - Très bien !

Mme Dominique Estrosi Sassone.  - Le Loup n'a pas le monopole de la biodiversité, d'abord préservée par les bergers et leurs troupeaux. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains jusqu'aux bancs du groupe SOCR)

M. Jean-Claude Tissot .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR) J'ai été berger pendant plus de vingt ans.

Le pastoralisme protège les paysages ouverts, il participe de l'aménagement du territoire, on a dit ses externalités positives. Les pelouses d'altitude sont un des écosystèmes français les plus performants pour le stockage du CO2. Et je ne parle pas de la prévention des avalanches ou de la valeur patrimoniale des paysages des Cévennes et des Causses, inscrits au patrimoine mondial.

Cette proposition de résolution aborde la difficile cohabitation entre ours, loups et troupeaux. Les bergers ne parlent pas seulement de rendement, ils parlent d'abord de leurs brebis qu'ils doivent enfermer pour les protéger, de leurs brebis qui avortent parce qu'elles ont la peur du prédateur au ventre. (Marques d'approbation à droite) Caricaturer le débat ne permettra pas d'apporter les bonnes réponses. Mon groupe votera pour cette résolution.

M. Jean-Yves Roux .  - Signataire de la proposition de résolution sur le pastoralisme, je m'associe aux alertes répétées sur le loup.

Le plan d'actions repose sur un équilibre qui n'existe pas : seule subsiste la détresse des bergers impuissants face à la destruction de leur travail et la mort de leurs animaux.

Dans mon département des Alpes-de-Haute-Provence, dans 90 communes sur 198, 378 attaques pour 1 208 victimes ont été à déplorer cette année, en hausse, respectivement, de 13 % et 28 %. Mais seuls les animaux mordus sont comptabilisés - les sauts dans le vide des moutons apeurés, les avortements des brebis stressées ne sont pas enregistrés.

Les loups franchissent les lisières des forêts et se rapprochent des habitations ; ils s'adaptent, évoluent, en fonction de nous, comme l'explique le chercheur Michel Meuret.

Le rôle des éleveurs n'est pas de tuer des loups, de se transformer en éleveurs professionnels de chiens d'Anatolie ou patous, ni de monter des dossiers d'indemnisation. Voulons-nous faire de nos montagnes des déserts, livrés aux désastres entraînés par le réchauffement climatique, faute d'activité pastorale ? Il faut aussi prendre en compte le désarroi des élus concernés, qui vivent dans la crainte permanente d'accidents.

Monsieur le Ministre, chacun doit trouver sa place. Il faut soutenir les bergers, embaucher des contrats aidés dédiés à la sécurité, adapter le code rural, notamment sur la responsabilité des maires face aux chiens de berger.

Quiconque s'est trouvé face à un loup sait que le tir de prélèvement négocié n'est pas réaliste. Je plaide pour que le loup puisse, dans un cadre très réglementé, lorsque la situation s'impose, être classé comme nuisible...

M. Loïc Hervé.  - Très bien !

M. Jean-Yves Roux.  - Nous avons besoin de solutions pragmatiques et humaines. (Applaudissements des bancs du groupe Les Républicains à ceux du groupe SOCR)

M. Loïc Hervé .  - Avant d'être à l'origine de la carte postale traditionnelle de la montagne, le pastoralisme est une activité économique, et représente une agriculture vertueuse, garante des équilibres depuis des siècles.

Je remercie les présidents Primas et Maurey, ainsi que nos collègues Morhet-Richaud, Cardoux et Pellevat de leur contribution. Il s'agit de préserver un maillon de la chaîne alimentaire et un atout touristique et écologique incontestable. Le pastoralisme est aussi un élément majeur de la protection des espaces naturels, grâce à l'entretien régulier des vastes étendues d'alpages par les troupeaux, au coeur de nos parcs.

Le 4 juillet, le Premier ministre a indiqué vouloir rémunérer les agriculteurs pour les services rendus à la nature. La proposition de résolution s'inscrit dans ce prolongement. Elle met aussi en débat le soutien au retour de certains prédateurs, dont le loup et l'ours.

Oui, il faut protéger ces espèces, mais pas au prix d'une disparition du pastoralisme. Entendez, Monsieur le Ministre, notre cri d'alarme.

La question doit être abordée au niveau européen ; au plan national, il faut apporter toutes les sécurités aux éleveurs par des solutions pérennes. Le groupe UC votera cette proposition de résolution. (Applaudissements des bancs des groupeUC et Les Républicains à ceux du groupe SOCR)

M. Michel Savin .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains et sur quelques bancs du groupe UC) Les éleveurs de l'Isère sont confrontés à des attaques de loups qui se multiplient et les réponses qui leur sont apportées ne sont pas satisfaisantes. Parler de pastoralisme dans cet hémicycle parisien peut faire sourire - et je n'oublie pas le mépris, Monsieur le Ministre, (M. le ministre : « pas moi ! ») d'un de vos prédécesseurs lors d'une séance de questions d'actualité.

La défense du pastoralisme est un enjeu majeur. Il est en danger, avec plus de 12 000 attaques de loups par an, dont 40 % ont lieu en plein jour. Près de 500 loups adultes seraient présents en France ; les indemnisations ont dépassé les 20 millions d'euros annuels. La pression sur les randonneurs et les chiens de protection, elle aussi, augmente avec des drames humains à la clé.

Le loup est en train de gagner la bataille géographique en étendant son territoire ; la bataille économique, parce que de nombreux éleveurs en détresse renoncent à leur activité ; la bataille politique enfin car les pouvoirs publics ne proposent rien ou presque. On nous opposera, je le sais, la convention de Berne et la directive Habitats. Mais peut-on encore considérer le loup comme une espèce en voie de disparition ?

Le Gouvernement a présenté un plan ambitieux pour 2018-2023, mais, sur le terrain, les réponses ne sont pas à la hauteur. Revoyons à la hausse les prélèvements au niveau européen.

Le 25 janvier, le président de la République annonçait vouloir remettre l'éleveur au milieu de la montagne ; pour le moment, les loups restent au milieu de la bergerie... (Applaudissements sur les bancs des groupes Les Républicains, UC, RDSE et Les Indépendants, ainsi que sur plusieurs bancs du groupe SOCR)

M. Stéphane Travert, ministre de l'agriculture et de l'alimentation .  - Je vous remercie de votre engagement et de la qualité des travaux de la mission d'information sur le loup dont vous étiez le rapporteur, Monsieur Pellevat. Un groupe de travail sur le pastoralisme travaillera ainsi, tout au long de la session, présidé par Mme Morhet-Richaud. Vos nombreuses auditions nous fournissent une matière précieuse.

Je n'ignore rien des difficultés des éleveurs ; 430 loups sont présents dans 74 zones de présence permanente, dont 57 contiennent des meutes. Leurs aires de vie s'étendent ; la prédation a fait 12 000 victimes, essentiellement ovines.

Le ministère de l'agriculture et le Fonds européen agricole pour le développement rural (Feader) ont alloué 23 millions d'euros d'indemnisations par an, auxquels s'ajoutent 3,5 millions du ministère de la transition écologique ; certes, ce n'est qu'une partie des dépenses pour assurer la cohabitation et l'élevage.

L'État et moi-même sommes aux côtés des éleveurs, dont j'ai pu mesurer l'angoisse et la fatigue. Le Plan national d'actions (PNA) finalisé en février a pris en compte tous les points de vue ; il « remet l'éleveur au centre de la montagne ». (Exclamations et commentaires ironiques sur divers bancs) Ce plan contient de réelles avancées, notamment une gestion adaptée à l'impact sur l'élevage. Sur le gardiennage, le Gouvernement négociera avec la Commission européenne la prise en charge à 100 % des coûts afférents, et non plus 80 %.

Un réseau de référents techniques, déjà opérationnel, sécurisera l'utilisation des chiens de protection par des formations collectives et de soutien individuel ; une brigade de bergers mobiles expérimentés interviendra dans les foyers d'attaques, dans un premier temps dans les parcs du Mercantour et de la Vanoise.

La conditionnalité de l'indemnisation des dommages suscite des incompréhensions ; résultant des lignes directrices européennes, elle vise à assurer la sécurité juridique et financière du dispositif. Mais son déploiement sera graduel ; par exemple, il ne concernera ni les nouvelles zones de présence du loup, ni la première attaque. Des dérogations seront prévues, sur les fronts de colonisation ainsi que pour les troupeaux considérés comme non protégeables.

M. Alain Marc.  - C'est trop techno ! (On approuve sur divers bancs.)

M. Stéphane Travert, ministre.  - Les barèmes seront revalorisés pour prendre en compte les conséquences indirectes, notamment les troubles de la lactation et le stress des animaux.

Reste à réguler la population de loups. La destruction de 10 % des animaux - 43 cette année - a été autorisée. Ce taux pourra être porté à 12 % si nécessaire.

M. Bruno Sido.  - Que c'est techno ! (Marques d'approbation sur les bancs du groupe Les Républicains)

M. Stéphane Travert, ministre.  - Les modalités de tir seront assouplies : tirs de défense simples avec une arme à canon rayée ou tir d'effarouchement sans autorisation administrative.

M. Bruno Sido.  - Et le tir à l'arc ? (Sourires)

M. Stéphane Travert, ministre.  - Le suivi des populations, fondé sur des données solides et des méthodes de collecte rigoureuses, est assuré par l'Office national de la chasse : les données sont disponibles sur une base de données nationale ; avec également un suivi des dommages sur la base de données Géoloup.

Une fois le seuil de viabilité de la population lupine atteint - soit 500 loups - les modalités seront révisées. (Exclamations à droite)

Une étude prospective sur le pastoralisme à l'horizon 2035 a été lancée ; elle éclairera nos choix politiques futurs.

Trois fois par an, le suivi du plan Loup est assuré sous la direction du préfet coordinateur.

Ce plan permettra, je l'espère, une cohabitation plus apaisée. Le plan sera évalué à mi-parcours en vue d'éventuelles adaptations. Nous faisons confiance aux acteurs et aux élus locaux pour dépassionner le débat.

Comme votre président le souligne, le pastoralisme a modelé nos paysages. Il participe, chaque jour, à la conservation de la biodiversité sauvage et domestique.

Sans pastoralisme, pas de milieux ouverts, de prairies fleuries, de tourisme d'été ; pas de développement économique ni de produits de qualité qui font l'excellence de notre patrimoine gastronomique. (On renchérit sur les bancs du groupe Les Républicains.) Le prix du lait payé aux producteurs dans cette filière est le plus élevé. Appuyons-nous sur ces réussites.

Le ministère est pleinement mobilisé, notamment via les plans de filière. Je serai vigilant lors de la négociation de la PAC post-2020.

Je vous invite à poursuivre vos travaux (Marques d'ironie à droite)...

M. Bruno Sido.  - Merci !

M. Stéphane Travert, ministre.  - ... L'adoption de cette résolution me semble, en l'état de la réflexion, prématurée. (Huées sur les bancs du groupe Les Républicains, ainsi que sur plusieurs bancs, des bancs du groupe SOCR à ceux du groupe UC )

La discussion générale est close.

À la demande du groupe Les Républicains, la proposition de résolution est mise aux voix par scrutin public.

M. le président. - Voici le résultat du scrutin n°1 :

Nombre de votants 344
Nombre de suffrages exprimés 334
Pour l'adoption 313
Contre    21

Le Sénat a adopté.

(Applaudissements et hululements sur les bancs du groupe Les Républicains, ainsi que sur plusieurs bancs, de ceux du groupe SOCR à ceux du groupe UC)

La séance est suspendue à 16 heures.

présidence de M. Gérard Larcher

La séance reprend à 16 h 45.

Questions d'actualité

M. le président.  - L'ordre du jour appelle les questions d'actualité au Gouvernement.

Je vous rappelle que la séance est retransmise en direct sur Public Sénat, sur le site Internet du Sénat et sur Facebook.

Au nom du Bureau du Sénat, j'appelle chacun de vous, mes chers collègues, à observer au cours de nos échanges l'une des valeurs essentielles du Sénat : le respect, des uns et des autres et le respect du temps de parole.

« Le temps, le temps et rien d'autre... » (Applaudissements sur tous les bancs), si vous me permettez ce clin d'oeil respectueux.

Différenciation fiscale pour l'outre-mer

M. Jean-Louis Lagourgue .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Indépendants) Madame le Ministre des outre-mer, votre projet de budget se place sous le signe de la récompense du travail, du soutien aux entreprises et du pouvoir d'achat.

Nous approuvons ces lignes directrices, mais nous nous interrogeons sur la méthode. Pouvons-nous continuer à loger tout le monde à la même enseigne ? Élu d'outre-mer, je suis toujours frappé par les velléités d'uniformisation de la métropole.

Votre Gouvernement entendait encourager la différenciation. Laissons de l'air aux territoires d'outre-mer ! Ce sont eux qui savent ce qui est le mieux pour eux.

Je pense à la réforme de l'abattement fiscal pour les populations d'outre-mer, pourtant justifié pour compenser la vie chère et les dépenses liées à l'octroi de mer : pouvez-vous me garantir que cet abattement sera pérennisé ? Je pense également à la suppression de la TVA non perçue récupérable, qui a des effets positifs pour le financement d'investissements productifs outre-mer. Ces mesures ne sont pas des avantages en nature, mais le reflet des spécificités outre-mer.

Comment respecterez-vous les différences entre territoires riches et pauvres, urbains et ruraux, métropolitains et ultramarins ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Indépendants ; MM. Jean-Marc Gabouty et Jean-Noël Guérini applaudissent également.)

Mme Annick Girardin, ministre des outre-mer .  - Nous plaçons ce budget sous le signe de la transformation et nous entendons donner de l'air aux territoires, précisément. Ces dépenses n'étaient pas des avantages indus, mais des dépenses inefficaces et parfois hors d'âge. L'abattement fiscal a été créé « pour permettre aux départements d'outre-mer de s'acclimater à la fiscalité nationale »... en 1960 ! Aujourd'hui, cet abattement d'impôt sur les revenus creuse les inégalités de revenus, qui sont déjà particulièrement importantes outre-mer, et il bénéficie à une épargne qui échappe très largement aux territoires ultramarins. Ensuite, nous diminuerons le plafond et non le taux : 96 % des foyers ne seront pas touchés - pour les couples avec deux enfants, par exemple, seuls seront concernés ceux dont les revenus dépassent 80 000 euros annuels, ce n'est pas ce que j'appelle les ménages les plus pauvres...

Il en ira de même pour la TVA non perçue récupérable, outil inefficace. Nous remettrons la dépense au service du plus grand nombre. Ce sont, pour les quatre prochaines années, 700 millions d'euros qui seront mieux employés. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM)

Actions violentes contre les commerces de bouche

M. Jean-Noël Cardoux .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains) Cette question s'adressait au ministre de l'intérieur...

Plusieurs voix à droite.  - Où est-il ?

M. Jean-Noël Cardoux.  - On ne compte plus les attaques de boucheries, charcuteries, poissonneries ou fromageries, au nom de la soi-disante cause animale. Vendredi dernier, le saccage de l'abattoir du Haut-Valromey, dans l'Ain, a laissé quatre-vingts salariés sur le pavé.

Les associations à l'origine de ce vandalisme sont ultra-minoritaires mais bénéficient de forts soutiens médiatiques et financiers.

Personne ne nie la nécessité de prendre en compte le bien-être animal, pour les animaux d'élevage comme pour les animaux de compagnie, mais il n'est pas acceptable qu'une minorité, au nom d'une utopie importée du monde anglo-saxon, impose un mode de vie qui met en danger le nôtre.

Que compte faire le Gouvernement pour protéger ceux qui exercent une activité légalement autorisée ? (Vifs applaudissements à droite et au centre)

M. Christophe Castaner, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement .  - (Exclamations à droite) Chacun est libre de ses choix de consommation, mais cela ne doit pas contrevenir à la liberté de vente et à la sécurité des étals et commerces. Les mouvements spécistes, animalistes et vegans font l'objet d'une surveillance particulière, compte tenu du durcissement de certains d'entre eux ces dernières années.

Le Gouvernement a reçu le président de la Confédération française de la boucherie, boucherie-charcuterie, traiteurs. Le 5 juillet, le ministre de l'Intérieur a demandé aux préfets de région de réunir les représentants des artisans dans chaque département. Une vigilance ferme est organisée autour des commerces de viande et des lieux particulièrement menacés.

Les 10 et 11 septembre, des investigations ont conduit à l'interpellation de six activistes dans le Nord-Pas-de-Calais.

M. Bruno Sido.  - Il faut dissoudre ces associations !

M. Christophe Castaner, secrétaire d'État.  - Tout sera mis en oeuvre pour protéger les activités visées. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM, Les Indépendants et sur quelques bancs du groupe UC).

M. Jean-Noël Cardoux.  - Il faut aller plus loin : sanctionner les associations, vérifier leurs financements. Ce sont nos terroirs qui sont en danger. Que dirait M. Collomb si les bouchons lyonnais ne pouvaient plus servir de tabliers de sapeurs ? (Sourires et vifs applaudissements sur les bancs des groupes Les Républicains et UC)

Corridor de la mer du Nord et Méditerranée (I)

Mme Catherine Fournier .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe UC) Le 1er août dernier, était annoncé le règlement européen excluant tous les ports français du corridor maritime mer du Nord-Méditerranée pour le fret maritime reliant l'Irlande à l'Europe continentale - qui passe actuellement, pour la majeure partie, par les ports du Royaume-Uni.

Le Brexit est une occasion à saisir pour les ports français ; mais ce règlement européen ferait des ports du Benelux comme Rotterdam ou Anvers les grands gagnants du Brexit.

La commissaire chargée des transports a déclaré que ce règlement ne remettrait pas en cause le Mécanisme d'interconnexion en Europe (MIE), qui prévoit 30,6 milliards d'euros entre 2021 et 2027. Or, ce règlement ne pourra que creuser les écarts de développement entre nos ports et ceux de nos voisins, ce qui ne manquera pas d'avoir des effets sur le MIE.

Madame la Ministre, quelle sera votre position dans les négociations avec la Commission européenne ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UC et RDSE et quelques applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)

Mme Élisabeth Borne, ministre auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, chargée des transports .  - Cette proposition n'était pas acceptable, je l'ai dit dès le mois d'août à la commissaire européenne aux transports. Je l'ai rencontrée à nouveau le 18 septembre. Les ports qui figuraient déjà dans le corridor, comme Calais, y resteront. Mais j'ai aussi demandé la révision du corridor pour tenir compte du Brexit. Les ports français doivent avoir toute leur place. Nous travaillons avec l'Irlande sur ce sujet. Comptez sur ma détermination, comme je sais pouvoir compter sur votre soutien. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM et sur quelques bancs du groupe UC)

Parcoursup

Mme Françoise Cartron .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM) Madame le Ministre de l'Enseignement supérieur, je veux d'abord rendre hommage à Gérard Mourou, qui vient de se voir décerner le prix Nobel de physique. (Applaudissements)

Parcoursup vise à gérer les voeux des futurs étudiants ; il remplace APB qui avait instauré une loterie injuste. (On se récrie sur quelques bancs du groupe SOCR.)

L'instauration d'un quota de mobilité a conduit à presque doubler la part des bacheliers de l'académie de Créteil acceptés à Paris : 43 % contre 26 % en 2017 ; 55 % des bacheliers professionnels ont reçu une proposition en section de technicien supérieur, contre 53 % en 2017 ; 65 % des bacheliers professionnels ont reçu une proposition en section de technicien supérieur contre 53 % en 2017 ; 21 % des bacheliers technologiques ont reçu une proposition en DUT, deux fois plus qu'en 2017. Moins de mille bacheliers restent aujourd'hui en accompagnement. (On se récrie à nouveau à gauche.) Confirmez-vous ces résultats et l'amélioration de l'accueil des étudiants ? Comment comptez-vous parfaire le dispositif, raccourcir les délais d'attente et amoindrir le stress bien compréhensible des étudiants ? (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM)

Mme Frédérique Vidal, ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation .  - Moins d'un an après, le plan Étudiants, six mois après la loi relative à l'orientation et à la réussite des étudiants, les trois engagements pris ont été tenus.

M. David Assouline.  - Faux !

Mme Frédérique Vidal, ministre.  - Pas de tirage au sort, remettre de l'humain dans le système, rendre la rentrée 2018 moins chère qu'en 2017.

Nous sommes à 23 % de boursiers supplémentaires accueillis dans l'enseignement supérieur, 28 % de boursiers supplémentaires dans les prépas parisiennes les plus sélectives, 20 % en plus de bacheliers professionnels ont trouvé une place en BTS ; 19 % des bacheliers techno en plus ont trouvé une place en IUT. Tout cela grâce aux efforts des équipes pédagogiques, qui ont travaillé d'arrache-pied. Parcoursup est une réussite, les familles le reconnaissent ! (Exclamations sur les bancs du groupe SOCR) Et nous avons fait économiser 100 millions d'euros avec le passage au régime général de sécurité sociale ! Bien sûr, nous tâcherons d'améliorer encore le système. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et Les Indépendants)

Transports en Ile-de-France

M. Olivier Léonhardt .  - Madame la Ministre des transports, Gilles Carrez a remis un rapport sur le financement du Grand Paris Express proposant la hausse des taxes sur les bureaux, foncière et du Grand Paris. Il n'est pas question de remettre en cause la nécessité de ce projet, mais il risque d'obérer les dépenses d'entretien de l'existant.

Estimé initialement à 26 milliards d'euros, son coût se monte aujourd'hui à 35 milliards d'euros, en attendant plus... On aurait pu faire beaucoup moins cher et plus écologique, plus adapté aux besoins, sans parler des 5,5 millions d'habitants de grande couronne qui n'en bénéficieront pas, mais qui subissent les problèmes - je songe aux catastrophes, telle celle de Brétigny - sur les réseaux existants. Il y a urgence. Nous ne pourrons attendre quinze ans de plus !

Madame la Ministre, envisagez-vous réellement de faire payer la grande banlieue pour les investissements ? (Applaudissements sur les bancs du groupe RDSE)

Mme Élisabeth Borne, ministre auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, chargée des transports .  - Le Grand Paris Express changera la vie de millions de Franciliens ; 200 km de nouvelles lignes, 68 gares, c'est un défi énorme qui bénéficiera à tous. Ne l'opposons pas à la rénovation du réseau existant, qui a fait l'objet, dans le cadre du CPER 2015-2020, d'un plan de 7,6 milliards d'euros, avec le prolongement du RER E, du RER C, de lignes de métro ou de tram, des trains...

Cela est conforme à nos deux priorités : développement du réseau et transport du quotidien. Nous consacrons ainsi 50 % de moyens de plus que ces dix dernières années pour régénérer le matériel ferroviaire. C'est inédit. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM)

Corridor de la mer du Nord et Méditerranée (II)

Mme Cathy Apourceau-Poly .  - Suite au Brexit, la Commission européenne a décidé, autoritaire et technocratique, de redessiner les routes maritimes européennes en excluant les ports français de la façade Nord au profit d'Anvers et de Rotterdam, qui n'ont pas les mêmes moyens.

Elle bafoue ainsi son sacro-saint principe du libéralisme, au détriment de Calais qui avait investi 600 millions pour moderniser ses équipements.

Comment une telle décision a-t-elle pu être prise sans l'aval de la France ? Où en êtes-vous dans vos échanges avec la Commission européenne ? Vous contenterez-vous de regarder passer les navires ? (Applaudissements sur les bancs du groupe CRCE ; Mme Maryvonne Blondin applaudit également.)

Mme Élisabeth Borne, ministre auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, chargée des transports .  - Le Gouvernement ne regarde pas passer les navires ; il agit. Je l'ai dit, la proposition de la Commission européenne n'était pas acceptable. La majorité des flux entre l'Irlande et le continent passant par le Royaume-Uni, on ne saurait dire quelles routes vont se dessiner, donc pas les décider de manière autoritaire.

Les ports français déjà dans le corridor y resteront, j'en ai eu l'assurance. Le Gouvernement va nommer un coordinateur interministériel pour le Brexit qui travaillera avec les ports concernés et les collectivités locales.

Il faut vingt heures pour relier Dublin à Cherbourg, contre trente-huit heures pour Zeebruges. Les ports français doivent avoir toute leur place : Calais, le Havre, mais aussi Cherbourg, Brest et Roscoff. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM)

Mme Cathy Apourceau-Poly.  - Je vous ai proposé, par lettre, un plan B : un accord bilatéral France-Royaume-Uni pour préserver le hub logistique exceptionnel du Calaisis ; j'attends toujours votre réponse. (Applaudissements sur les bancs du groupe CRCE)

Nomination du procureur de Paris

M. Jérôme Durain .  - (Applaudissements nourris sur les bancs du groupe SOCR) Madame la Garde des Sceaux, il flotte dans l'air un désagréable parfum d'ingérence du pouvoir exécutif. Vis-à-vis du Parlement d'abord. L'exécutif a tenté d'intimider la commission d'enquête présidée par M. Philippe Bas. Malgré quelques coups de fils déplacés, le Sénat a tenu bon. (Applaudissements sur les bancs des groupes SOCR, Les Républicains et UC ; Mme Esther Benbassa applaudit également.)

Vis-à-vis de la justice ensuite. Les trois candidatures présentées pour la succession du procureur de Paris, François Molins, ont été écartées, malgré un grand oral passé devant le Premier ministre. C'est une mauvaise manière pour ces magistrats, un désaveu pour vous.

Dans ces circonstances, comment pouvez-vous nous rassurer sur l'indépendance de l'autorité judicaire et, surtout, garantir la crédibilité du futur procureur de Paris ? (Vifs applaudissements sur tous les bancs, à l'exception de ceux des groupes LaREM et RDSE)

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux, ministre de la justice .  - Je veux vous rassurer : on ne saurait douter de l'indépendance des procureurs, et du procureur de Paris en particulier.

Voix à droite.  - Et du suivant ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Il est toujours important, comme je l'ai fait sur la commission d'enquête, de rappeler les principes constitutionnels. (Marques d'ironie à droite)

M. Jean-François Husson.  - Ah ! On nous fait la leçon !

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Le dialogue entre le garde des Sceaux, le Premier ministre et le président de la République autour d'une nomination aussi importante est normal et naturel ; il repose sur l'article 20 de la Constitution, selon lequel « le Gouvernement détermine et conduit la politique de la Nation ». Quelle politique plus importante que la politique pénale de notre Nation ? Il est donc naturel que les procureurs s'inscrivent dans une chaîne hiérarchique, sous mon autorité et celle du Premier ministre.

La Constitution garantit l'indépendance des magistrats, qui décident librement de l'opportunité des poursuites et ne reçoivent strictement aucune instruction individuelle. (Mouvements à droite)

Le projet de révision constitutionnelle, que j'espère avoir le plaisir de défendre prochainement devant vous (Exclamations sur divers bancs), conforte ces garanties en donnant au Conseil supérieur de la magistrature un avis conforme sur les nominations.

M. le président.  - Veuillez conclure.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux.  - Ce dialogue est de bon sens. Comment imaginer s'en passer, s'agissant d'un poste aussi important... (Huées à droite et à gauche, quelques applaudissements sur les bancs du groupe LaREM)

M. Jérôme Durain.  - Nous connaissons ces arguments, peu convaincants. Il faut garantir l'indépendance de la justice et rompre le lien entre le ministère et le parquet. Donnez-nous donc le calendrier de la réforme constitutionnelle !

Et que dire de l'ambiance gouvernementale ? Après déjà six départs, certains ministres font leurs valises, d'autres songent aux municipales - ils sont quatre à viser la mairie de Paris ! Nous avons besoin d'un Gouvernement concentré sur sa tâche, respectueux de la justice comme du Parlement. (Vifs applaudissements sur les bancs des groupes Les Républicains, SOCR et CRCE, ainsi que sur plusieurs bancs du groupe UC)

Malaise dans la ruralité

M. Jacques Genest .  - Roger Gicquel ouvrait son journal télévisé, il y a quelques années, en déclarant : « La France a peur ». Aujourd'hui, je peux vous affirmer : les ruraux en ont ras-le-bol. Ras-le-bol d'être oubliés, ignorés, méprisés. Ras-le-bol de la taxation du carburant, qui les pénalise doublement, de la limitation aveugle à 80 km/heure, des déserts médicaux, de la fracture numérique... Qui s'en émeut, quand ils sont régulièrement privés de téléphone fixe ?

Cette année, le Gouvernement a refusé de porter les retraites agricoles à 85 % du SMIC, alors qu'il fait des cadeaux aux super-riches... Curieuse conception de la solidarité !

Les retraités ruraux, souvent déjà exonérés de taxe d'habitation, perdent du pouvoir d'achat. La colère gronde dans les campagnes, et la taxation du transport routier risque de déclencher la révolte dans les champs. Les ruraux ne sont ni les premiers ni les derniers de cordée mais les oubliés de la Macronie !

Monsieur le Premier Ministre, que comptez-vous faire pour leur redonner espoir ? (Applaudissements sur les bancs des groupes Les Républicains et UC ; Mme Mireille Jouve applaudit également.)

M. Jacques Mézard, ministre de la cohésion des territoires .  - (« Ah ! » à droite) Je sais votre attachement au monde rural et le partage. Ne cédons pas au poujadisme rural. (Mouvements à droite) Rappelons que le monde rural avance, innove. Mais ce monde s'estime plus éloigné des centres de décisions qu'avant la décentralisation. Les fusions autoritaires de régions et d'intercommunalités n'ont pas aidé ! (Vifs applaudissements sur les bancs des groupes Les Républicains, UC et RDSE ; M. Patrick Kanner applaudit également.) Le Gouvernement ne touchera pas à la carte et entend respecter les communes, qui sont fondamentales.

Le plan Santé de Mme Buzyn est excellent pour les territoires (mouvements dubitatifs sur divers bancs). Le Gouvernement agit dans le domaine du numérique : l'Ardèche aura de nouveaux pylônes cette année. Enfin, nous avons besoin de donner davantage de liberté aux services déconcentrés de l'État, qui connaissent mieux le territoire que les administrations centrales. (Applaudissements sur les bancs du groupe RDSE)

M. François Grosdidier.  - Il faudrait vous nommer au Gouvernement !

M. Jacques Genest.  - Si défendre la ruralité, c'est être poujadiste, je le suis ! Je vous invite, avec le Premier ministre, à venir constater le désarroi des habitants de nos territoires très ruraux comme la montagne ardéchoise. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)

État du réseau routier

M. Jean-Pierre Corbisez .  - « Faites une pause for me... formidable », pouvait-on lire ce matin sur l'A1. Nous connaissons enfin les conclusions de l'audit externe sur l'état du réseau routier national; elles sont sans appel.

Depuis 2007, la proportion de chaussée en bon état est passée de 57 % à 47 %. Dans les Hauts-de-France, 67 % du réseau non concédé méritent des travaux d'entretien, sans parler du viaduc d'Echinghen. De plus en plus d'ouvrages d'art nécessitent un entretien ; plus de la moitié des ponts nécessiteraient des interventions préventives. Après le drame de Gênes, le Sénat a d'ailleurs mis en place une mission d'information sur le sujet.

Le budget annoncé par le Gouvernement, considérable, reste en deçà des attentes. Les 13,4 milliards d'investissement ne permettront pas d'atteindre le scénario 2 du Conseil d'orientation des infrastructures.

Quel sera l'arbitrage, sur le montant global de l'enveloppe et sur les clés de répartition ? (Applaudissements sur les bancs du groupe RDSE)

Mme Élisabeth Borne, ministre auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, chargée des transports .  - L'entretien du réseau routier et sa remise en état sont la priorité des priorités. Il ne doit plus être une variable d'ajustement. Le drame de Gênes nous le rappelle.

Dès 2018, le Gouvernement a augmenté de 100 millions d'euros le budget d'entretien et de régénération des routes nationales, et lancé des audits sur l'ensemble des réseaux, dont les conclusions ont été rendues publiques. J'ai ainsi publié l'état des principaux ponts : les citoyens ont le droit de savoir.

Notre réseau n'est pas neuf, les infrastructures vieillissent mais font l'objet d'un suivi rigoureux : il n'y a pas de situations d'urgence. Les travaux nécessaires sont entrepris immédiatement, comme sur le viaduc d'Echinghen.

Avec 850 millions d'euros d'ici 2022 et 930 millions sur le quinquennat suivant, nous atteignons un niveau inédit. Il faudra cependant trouver des ressources pour financer les besoins prioritaires. Je compte sur votre sagesse pour nous en donner les moyens. (Quelques applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et RDSE.)

Politique générale

Mme Jacqueline Eustache-Brinio .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains) Monsieur le Premier Ministre, début septembre, le ministre de l'Intérieur ne ménageait pas ses critiques envers le président de la République. Quelques jours plus tard, il annonçait sa candidature à la mairie de Lyon - tant pis pour le renouvellement de la classe politique - puis présentait sa démission, refusée... Mais, nous l'apprenons aujourd'hui, maintenue ! C'est inédit, c'est un grand moment politique : alors que l'insécurité atteint un niveau de plus en plus insupportable, on joue une pièce de boulevard au plus haut sommet de l'État !

On ne peut être ministre de l'Intérieur qu'à 100 %. Comment faire croire que c'est le cas à présent ? Les Français ne veulent plus de ces mises en scène, ils attendent de la sincérité et des résultats.

M. Collomb va-t-il oui ou non quitter le ministère de l'Intérieur ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains et sur quelques bancs du groupe SOCR)

M. Édouard Philippe, Premier ministre .  - (Ah ! sur plusieurs bancs) Vous posez la question de la sécurité des Français.

Des voix à droite.  - Non ! (On s'en amuse à gauche.)

M. Édouard Philippe, Premier ministre.  - C'est la première priorité de ce Gouvernement. C'est ce qui a motivé notre action : réorganisation et coordination des services de renseignement, renforcement des moyens budgétaires, matériels et humains du ministère de l'Intérieur. Ce matin encore, une opération minutieusement préparée a été conduite avec succès, toujours dans le souci constant de protéger nos concitoyens.

Oui, les ministres doivent se consacrer pleinement à leur tâche. C'est pourquoi aucun des membres de mon Gouvernement ne dirige un exécutif local.

Mme Laurence Rossignol.  - Ils y pensent très fort !

M. Édouard Philippe, Premier ministre.  - Cela n'a pas toujours été le cas, sous les quinquennats précédents. (On se récrie à droite.)

L'implication et l'engagement d'un ministre au service du pays doivent être entiers. Gérard Collomb l'a dit : dès qu'il entrera en campagne, il quittera le Gouvernement. Cette attitude n'a pas toujours été celle des responsables ministériels candidats à une élection - je le dis sans esprit de polémique. (M. André Gattolin applaudit.)

Vous citez un article de presse. Aux termes de l'article 21 de la Constitution, le Premier ministre dirige l'action du Gouvernement. Aux termes de l'article 8, il lui revient de proposer au président de la République la désignation ou la fin des fonctions des membres de son Gouvernement. Les choses sont claires et je prendrai prochainement mes responsabilités à cet égard. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM et sur quelques bancs du groupe UC)

M. François Grosdidier.  - Le plus tôt sera le mieux !

Mme Jacqueline Eustache-Brinio.  - Ma question était claire : M. Collomb va-t-il quitter le Gouvernement ? Vous n'y avez pas répondu. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)

Clause de conscience sur l'IVG

M. Bernard Jomier .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR) Récemment, le président d'un syndicat de gynécologues-obstétriciens a créé la polémique sur la clause de conscience en matière d'IVG. Le code de déontologie, à son article 47, interdit qu'on contraigne un médecin à pratiquer quelque acte que ce soit, c'est entendu. Mais on ne peut accepter les remises en cause répétées du droit fondamental à l'IVG. Cette clause superfétatoire est une double peine pour les femmes, dont 5 000 se rendent encore à l'étranger pour pratiquer une IVG. C'est pourquoi, à l'initiative de Mme Rossignol, nous demandons sa suppression. Quand allez-vous enfin rendre effectif le droit à l'IVG, notamment en renforçant le rôle des sages-femmes et des généralistes en la matière ? (Applaudissements sur les bancs des groupes SOCR et CRCE)

Mme Agnès Buzyn, ministre des solidarités et de la santé .  - J'ai condamné avec virulence les propos que vous évoquez. Nul ne doute de ma volonté de faciliter l'accès à l'IVG. Si des femmes se rendent à l'étranger, c'est parce qu'elles ont dépassé le délai légal appliqué en France.

Le nombre d'IVG est totalement stable depuis dix ans, il n'y a donc aucune difficulté de recours. On pourrait d'ailleurs souhaiter qu'il y en ait moins - et c'est ma responsabilité de faciliter l'accès à la contraception et à la pilule du lendemain. J'ai ainsi instauré une consultation pour les jeunes filles dès 17 ans pour parler de prévention et de santé sexuelle, que le PLFSS ouvrira également aux garçons.

M. Didier Guillaume.  - Très bien !

Mme Agnès Buzyn, ministre.  - Les difficultés d'accès dues à la clause de conscience n'ont touché qu'un hôpital, et ont été immédiatement résolues. J'ai demandé à mes services d'évaluer les difficultés potentielles, les ARS y travaillent.

Nul ne peut imposer à un médecin de pratiquer un acte médical non vital. La clause de conscience protège les femmes d'une conversation peu agréable et d'actes réalisés dans de mauvaises conditions. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM et sur quelques bancs du groupe UC)

M. Bernard Jomier.  - Aucun droit sociétal ne doit être limité par une clause spécifique. Et pour la PMA que vous voulez ouvrir à toutes les femmes, que ferez-vous ? (Applaudissements sur les bancs des groupes SOCR et CRCE)

Pouvoir d'achat des retraités

M. Jean Louis Masson .  - Le Gouvernement matraque les personnes âgées : hausse de 3 % de la CSG, mise en cause de la pension de réversion des veuves, gel des retraites...

Pour le président Macron, les retraités seraient des privilégiés. Pourtant, beaucoup ont commencé à travailler à 14 ans, aux 40 heures, avec quatre semaines de congés payés... Il en va tout autrement pour les actifs d'aujourd'hui, qui bénéficient du travail des générations précédentes. Il faut être de mauvaise foi pour prétendre que les retraités vivent à leurs crochets !

Les retraites ne sont pas des aides sociales mais le produit de cotisations versées tout au long d'une vie de travail. Pour réduire le déficit, évitons d'abord les mesures démagogiques comme la suppression de la taxe d'habitation ou la baisse du prix du permis de chasse ! Le Gouvernement allemand vient de revaloriser les retraites de 3,4 %... N'est-il pas honteux de prendre le chemin inverse ?

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État auprès du ministre de l'action et des comptes publics .  - Certes, la retraite est un droit acquis à la suite de cotisations. Mais dans notre système par répartition, ce sont les actifs qui financent, par leurs cotisations, les pensions de leurs aînés. C'est pourquoi nous sollicitons un effort des retraités, via une hausse de la CSG.

Les pensions ne sont pas gelées, mais revalorisées de 0,3 % contre 0,4 % en moyenne les années précédentes.

Quant aux pensions de réversion actuellement servies, elles ne sont aucunement menacées : le Premier ministre et Agnès Buzyn l'ont déclaré assez clairement. Nous voulons un système durable, qui assure une juste pension.

Dès cette année, la baisse de la taxe d'habitation compensera presque intégralement la hausse de la CSG pour la plupart des retraités. Enfin, le minimum vieillesse a été revalorisé de 35 euros cette année et le sera de 100 euros sur les trois prochains exercices. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM)

M. Jean Louis Masson.  - C'est de la poudre aux yeux ! Un franc courant n'est pas un franc constant. (M. Pierre-Yves Collombat applaudit, tandis que certains rappellent à l'orateur que l'euro a remplacé le franc.) Une revalorisation de 0,3 %, c'est une baisse en termes réels. Une étude récente montre que huit retraités sur dix perdront en moyenne 700 euros en deux ans. Ne venez pas dire, Monsieur le Ministre, que vous défendez les retraités !

La séance est suspendue à 17 h 45.

présidence de M. Philippe Dallier, vice-président

La séance reprend à 17 h 50.

Comités de protection des personnes

M. le président.  - L'ordre du jour appelle les explications de vote et le vote, sur la proposition de loi relative à la désignation aléatoire des comités de protection des personnes.

La Conférence des Présidents a décidé que ce texte serait discuté selon la procédure de législation en commission prévue au chapitre VII bis du Règlement du Sénat.

Au cours de cette procédure, le droit d'amendement des sénateurs et du Gouvernement s'exerce en commission, la séance plénière étant réservée aux explications de vote et au vote sur l'ensemble du texte adopté par la commission.

Explications de vote

Mme Delphine Gény-Stephann, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances .  - Cette proposition de loi répond à un enjeu important : renforcer l'efficacité du tirage au sort des membres des comités de protection des personnes (CPP). Le texte, auquel la ministre Buzyn a donné un avis favorable en première lecture à l'Assemblée nationale, contribue à une priorité du Gouvernement : renforcer l'attractivité de la France en matière de recherche clinique tout en préservant la sécurité des personnes qui s'y prêtent. C'était une préconisation des sénateurs Daudigny, Deroche et Guillotin dans leur rapport sur les médicaments innovants.

Notre pays est l'un des trois pays européens les plus attractifs pour les recherches avec l'Allemagne et le Royaume-Uni mais accuse un retard pour les essais de phase 1. Lors du huitième conseil stratégique des industries de santé, qui s'est tenu en juillet dernier, le Premier ministre a fixé pour ambition de faire de la France le premier pays européen en recherche clinique d'ici cinq ans. Il a souhaité abaisser, dès 2019, les délais à 45 jours pour l'Agence nationale de sécurité du médicament et à 60 jours pour les comités de protection des personnes - c'est l'objet de cette proposition de loi.

Mme Buzyn l'a dit, ce texte maintient une exigence déontologique forte tout en répondant à la volonté des malades d'accéder plus rapidement aux traitements innovants. Il s'agit bien d'améliorer le tirage au sort, non de le mettre en cause par une spécialisation des CPP.

Pour rendre le tirage au sort plus efficace, l'Assemblée nationale a ajouté deux critères : celui de disponibilité, afin d'éviter l'engorgement des comités et de lisser l'activité entre les CPP ; celui de compétence, pour résoudre la question du défaut d'expertise de certains CPP, étant entendu que l'ensemble des CPP gardera une compétence générale.

Le Gouvernement s'est engagé à améliorer les conditions d'exercice des CPP ; notamment, en établissant une grille commune d'évaluation des dossiers.

Le Gouvernement est satisfait de voir les deux chambres s'accorder dès la première lecture sur ce texte utile. Il l'est d'autant plus que les nouveaux règlements européens sur les essais cliniques de médicaments et sur les dispositifs médicaux, qui entreront en vigueur respectivement en 2020 et en 2022, feront de l'absence de réponse d'un CPP dans les délais qui lui sont impartis un avis favorable.

M. Jean Sol, rapporteur de la commission des affaires sociales .  - La commission des affaires sociales a adopté ce texte le 25 septembre en procédure de législation en commission. La concurrence internationale s'intensifiant, le rang de notre pays dans la recherche clinique est en jeu. S'il continue de faire partie des cinq pays de tête dans ce domaine, avec les États-Unis, le Royaume-Uni, le Canada et l'Allemagne, l'Espagne et la Belgique tirent leur épingle du jeu.

Pour autant, la question ne doit pas être examinée sous le seul prisme de l'attractivité. La sécurité des volontaires doit demeurer notre première préoccupation, à l'heure où les esprits restent marqués par le souvenir de l'affaire Biotrial en 2016.

Le tirage au sort allonge-t-il les délais d'examen des projets de recherche ? D'après les enquêtes, les délais moyens sont supérieurs à l'objectif de délai maximal de 60 jours. En réalité, le tirage au sort met en lumière des inégalités qui lui préexistaient. Certains CPP n'étaient pas préparés à traiter un flux continu de dossiers, d'autres éprouvent des difficultés à mobiliser des spécialistes. En 2017, trois CPP manquaient d'un pédiatre ; sept, d'experts des essais de phase 1 ; onze, d'experts en radioprotection. Autres spécialités où les CPP peinent à trouver des experts : l'oncologie, l'oncohématologie, la virologie et l'ophtalmologie.

Il y va de l'accès des patients aux thérapies innovantes, en particulier en oncologie et en oncohématologie, domaines dans lesquels les essais de phase 1 se concentrent en France. D'où les propositions du rapport Deroche-Guillotin-Daudigny de modifier les règles du tirage au sort que cette proposition de loi module selon la disponibilité et les compétences des CPP.

En commission, Madame la Ministre, vous avez dit que le critère de compétences sera apprécié souverainement par le CPP. Nous plaidons pour la mise en place d'un réseau national d'experts mobilisables et d'un programme de formation des CPP et de leur secrétariat ; l'objectif est que plus aucun CPP ne se déclare incompétent.

Outre le tirage au sort, les déclarations publiques de liens d'intérêts des membres des CPP et le fonctionnement collégial des comités sont une garantie puissante d'indépendance.

Notre commission a adopté cette proposition de loi sans modification, j'invite le Sénat à en faire de même. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)

M. Michel Amiel .  - Sujet technique s'il en est... Cette proposition de loi a beau être simple et courte, elle est porteuse d'espoir. En bref, les CPP s'assurent de la qualité éthique d'un projet de recherche impliquant la personne humaine. Leur « randomisation » ou tirage au sort trouve sa source dans la loi Jardé de 2012.

La commission des affaires sociales a réaffirmé son attachement à la désignation aléatoire qui réduit mécaniquement les risques de conflits d'intérêts. La situation est toutefois préoccupante : la moyenne du traitement des dossiers est de 71 jours, soit 11 de plus que le délai légal. D'où cette proposition de loi pour répartir le travail entre les 39 CPP de façon optimale, issue d'une proposition du rapport Deroche-Guillotin-Daudigny.

Le groupe LaREM la votera, en insistant, comme l'a fait le rapporteur, sur la nécessité de mettre au point un réseau d'experts et de renforcer l'expertise de tous les CPP.

Espérons que ce texte facilitera les avancées thérapeutiques et confortera la place de l'industrie pharmaceutique française par rapport à celle d'autres pays peut-être moins sensibilisés aux questions éthiques. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM, RDSE et Les Indépendants)

Mme Laurence Cohen .  - Les délais d'examen des CPP, trop longs, nuiraient à la recherche médicale en France. C'est vrai, et certains CPP manquent d'experts compétents. En revanche, la solution retenue est une fausse bonne idée qui pourrait aggraver la situation.

Les CPP manquent en réalité de moyens et d'accès aux experts. En cause, entre autres, le peu d'attractivité de la fonction de rapporteur, faiblement indemnisée. Cette proposition de loi n'y remédie pas ; en réduisant le nombre de CPP où le tirage au sort sera effectué, elle ouvre la porte à la collusion entre les CPP et les porteurs de projets - les industriels ont tout intérêt à ce que leur projet soit accepté le plus vite possible. J'ajoute que les garanties démocratiques ne sont pas suffisantes quand la mise en relation entre comités et promoteurs des projets s'effectuera au moyen d'algorithmes. La solution, pour nous, est de donner des moyens suffisants aux comités.

Renforcer l'attractivité de la recherche française est un but légitime puisque la recherche concourt au progrès médical mais vous donnez, avec ce texte, le sentiment de donner priorité aux considérations économiques. Le marché du médicament dépasse les 1 000 milliards d'euros au niveau mondial, il est temps de soustraire la recherche à la loi du marché. C'est le sens de notre proposition d'un pôle public du médicament en France et en Europe.

Le groupe CRCE ne votera pas ce texte.

M. Bernard Jomier .  - Il y a consensus sur les difficultés des CPP, pas sur les moyens de remédier au problème. Les ressources financières des CPP ont fondu de 200 000 euros depuis leur création tandis que leur activité n'a cessé de croître. Un seul ETP de secrétariat quand le nombre de dossiers est passé de trois-quatre à neuf-dix par mois. Quand les bénévoles que sont les membres des CPP peuvent-ils trouver le temps d'étudier tous ces projets ?

Faut-il toucher par une proposition de loi, donc sans étude d'impact, à la loi Jardé ? J'en doute, d'autant que nous sommes à quelques mois d'une révision des lois bioéthiques et d'une modification du cadre européen qui permettra de passer d'une logique de compétition entre États membres à une logique de compétitivité européenne. D'ailleurs, la France se prépare déjà à ce changement, l'ANSM s'est fixée pour objectif, en 2018, d'instruire la moitié des demandes selon les futures exigences européennes.

L'article qu'il est question de modifier, l'article 1123-6, consacre le principe de désignation aléatoire, pensé par le député Jardé contre les potentiels conflits d'intérêts. Les conditions de la désignation aléatoire relèvent d'un autre article, le L.1123-14, qui renvoie à un décret en Conseil d'État. Nul besoin de toucher à la loi !

L'introduction du critère de compétence à l'article L.1123-6 est plus problématique. Comment s'assurer que suffisamment de CPP se déclarent compétents sur une aire thérapeutique ? Devons-nous déterminer un seuil minimum de candidats pour sécuriser le caractère aléatoire de la désignation ? Et comment fixer ce seuil ? D'autres pistes existent, comme la constitution de listes d'experts dans chaque domaine. Les associations de patients y sont favorables. Pourtant, elles n'ont toujours pas été établies.

Notre groupe s'abstiendra. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOCR)

Mme Véronique Guillotin .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe RDSE) Le 6 juin dernier, j'apportais mon soutien à la proposition de loi Milon autorisant les analyses génétiques sur les personnes décédées. L'ambition de ce texte est identique : prise en charge précoce des patients et meilleur accès à l'innovation. Je me réjouis du soutien du Gouvernement.

L'innovation en santé est une chance pour les patients mais aussi pour notre vitalité économique. Il faut être capable d'adapter nos procédures, sans remettre en cause nos exigences éthiques. J'ai la conviction que l'équilibre est préservé dans le texte.

Pour certains patients, la rapidité d'accès au traitement innovant est une question de vie ou de mort. Avec Yves Daudigny et Catherine Deroche, nous avons proposé un renforcement des CPP et de leur expertise. Il faut préserver le tirage au sort mais en atténuer les limites : certains CPP tirés au sort n'ayant pas les compétences requises, ils font appel à des compétences extérieures, ce qui allonge les délais. Il faut donc l'adapter de manière à ce que le tirage au sort se pratique entre les CPP compétents.

Dès 2020, faute d'adaptation de notre dispositif, le droit européen fera peser un risque sur la sécurité des personnes, puisque l'avis du CPP sera réputé favorable en l'absence d'avis rendu dans le délai fixé.

Comme notre rapporteur, je veux conclure sur la nécessaire montée en compétences de tous les CPP. La liste de leurs expertises ne doit pas rester figée dans le temps, sous peine de voir ressurgir les risques de conflit d'intérêts. Dans notre rapport, nous avons également souligné l'importance de l'harmonisation des procédures d'évaluation et, bien entendu, du renforcement des moyens administratifs des comités.

Espérons que la prochaine loi de financement de la sécurité sociale et la stratégie de transformation de notre système de santé seront à la hauteur. En attendant, le groupe RDSE votera cette proposition de loi.

M. Jean-Marie Mizzon .  - Les 39 CPP s'assurent que les droits, la santé, le bien-être des participants à des études pharmaceutiques sont préservés. L'allongement des délais de traitement, pointé dans l'excellent rapport de notre collègue Jean Sol, pourrait compromettre le déploiement des projets les plus innovants, d'autant plus avec la réglementation européenne à venir. Cette proposition de loi pourrait conserver à la France sa compétitivité.

Le manque de moyens des CPP est patent. Leur secrétariat étant assuré par un seul ETP, les périodes de congés paralysent leur activité. La rémunération des fonctions de rapporteur est insuffisante : de 67 euros bruts le dossier ! Le niveau d'expertise élevé épuise la disponibilité des spécialistes.

Une fois tiré au sort, un CPP ne peut se dessaisir ; il doit actuellement attendre l'expiration du délai qui équivaut à un rejet. L'article unique de cette proposition de loi assure que les CPP tirés au sort sont disponibles et compétents pour se prononcer, ce qui contribuera à réduire les délais de traitement. Cette proposition de loi mérite d'être soutenue, il est urgent de doter les CPP d'un soutien financier et administratif plus important. Notre groupe votera ce texte. (Applaudissements sur les bancs du groupe UC)

M. Daniel Chasseing .  - La loi Jardé a amélioré le régime des essais cliniques en l'unifiant et en l'encadrant. Les CPP y jouent un rôle essentiel, ils se prononcent sur la protection des personnes participantes et la qualité méthodologique. Tous leurs membres sont soumis à une déclaration publique d'intérêts afin que nul ne puisse remettre en cause leur indépendance.

Cet édifice juridique est cependant biaisé. En effet, la composition des CPP varie d'un territoire à l'autre, au point que certains CPP n'ont pas l'expertise nécessaire à l'évaluation des projets de recherche. Il fallait remédier à cette situation, ce que fait ce texte de bon sens que le groupe Les Indépendants votera. (M. Michel Amiel et Mme Mireille Jouve applaudissent.)

Mme Catherine Deroche .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains) Merci au groupe Les Républicains et à son président Retailleau d'avoir inscrit cette proposition de loi dans son espace réservé. Dans notre rapport présenté en juin dernier sur les médicaments innovants, notre attention a été attirée sur les difficultés que rencontrent les CPP en dépit du dévouement de leurs membres. Il faut éviter les effets de cliquets, qui écartent de la France les essais pour lesquels la phase 1 ne s'y est pas déroulée. Merci à M. le rapporteur Sol pour son travail. Si le tirage au sort des CPP n'est effectif que depuis novembre 2016, les équipes de recherche clinique d'excellence s'en inquiétaient bien avant. Le président Larcher avait été alerté, lors de sa visite à l'Institut Gustave Roussy à Villejuif en septembre 2015. Présidente du groupe Cancer, j'ai relayé ces inquiétudes dès 2016 au ministère de la santé. Un seul exemple : l'essai AcSé-ESMART aurait subi un retard majeur, voire un refus, avec la procédure actuelle de tirage au sort.

La route est encore longue pour un accès précoce des patients aux innovations médicales, espérons que le Gouvernement saura relever le défi. Le groupe Les Républicains votera en faveur de ce texte. (M. Bruno Sido et Mme Véronique Guillotin applaudissent.)

La proposition de loi est adoptée définitivement.

(Applaudissements sur les bancs des groupes Les Républicains, UC et RDSE)

Politique énergétique

M. le président.  - L'ordre du jour appelle un débat sur la politique énergétique à la demande du groupe Les Républicains. Il se déroulera sous la forme d'une série de questions-réponses dont les modalités ont été fixées par la Conférence des Présidents.

Je vous rappelle que l'orateur du groupe ayant demandé ce débat disposera d'un temps de parole de huit minutes, y compris la réplique, puis le Gouvernement répondra pour une durée équivalente.

M. Daniel Gremillet, pour le groupe Les Républicains .  - (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains) Trois ans après l'adoption de la loi de transition énergétique et quelques semaines avant la présentation de la nouvelle programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE), le groupe Les Républicains a jugé ce débat nécessaire. Il l'est d'autant plus que le Parlement n'est pas associé à la déclinaison des grands objectifs de la PPE. Cela mériterait une loi de programmation, comme le demande, avec raison, notre collègue Husson.

La politique énergétique est traitée par petit bout : les éoliennes en mer dans la loi Droit à l'erreur, le droit à l'injection du biogaz dans la loi Egalim - et on y reviendra dans la loi Mobilités, ou encore la suppression des tarifs réglementés dans la loi Pacte. Ce n'est pas sérieux.

Nous disposons désormais des premiers chiffres pour évaluer les effets des choix faits en 2015. Ils révèlent ce qu'a toujours dit le Sénat : les objectifs fixés étaient irréalistes, voire dangereux pour certains. Notre taux d'indépendance énergétique a baissé de trois points, ce qui a contribué à un rebond de 23 % de la facture énergétique.

En 2017, la consommation électrique finale a progressé de près de 1 % avec la croissance économique - mais la loi prévoyait une division par deux en 2050.

Le Sénat avait eu raison de plaider pour une diversification plus progressive du mix électrique. Ce n'est pas parce que nous serions au Sénat des « nucléocrates » béats - nous n'ignorons pas que ce n'est pas une énergie comme les autres et connaissons l'importance de la sûreté nucléaire, et la France possède l'une des autorités de contrôle les plus exigeantes du monde.

N'oublions pas que le nucléaire nous a permis d'avoir une énergie peu chère et parmi les moins carbonées en Europe, tout en assurant notre sécurité d'approvisionnement.

Il faut remettre de la raison dans le débat. Qu'on le veuille ou non, la lutte contre le changement climatique passe par le nucléaire, auquel votre prédécesseur, Monsieur le Ministre, était opposé. Le flou règne au Gouvernement.

Monsieur le Ministre, vous engagez-vous à ce que la PPE précise le nombre de réacteurs à fermer, voire leur nom et leur calendrier de fermeture ?

Le nucléaire n'a représenté que les trois quarts de l'électricité - qui ne représente qu'un quart de notre consommation d'énergie, laquelle est aux deux tiers alimentée par les énergies fossiles.

Sur ce sujet, nos concitoyens ruraux n'ont souvent pas d'autre choix que de prendre leur voiture diesel et de se chauffer au fioul. (M. Roland Courteau le confirme.) Or vous les matraquez : l'an dernier, nous avions calculé qu'entre 2018 et 2022, la pression fiscale augmenterait en cumulé de 46 milliards d'euros par le seul effet de la fiscalité énergétique.

Vous prétendez avoir une vision non punitive de la fiscalité environnementale, mais vous ne poursuivez en réalité qu'un objectif de rendement budgétaire. Il est temps d'entendre nos appels à la compensation, à la modération, sans quoi vous casserez la croissance en cassant le moral des Français.

Dans le bâtiment, les aides sont insuffisantes. Pour 2019, c'est raté - mais vous engagez-vous pour 2020, Monsieur le Ministre ?

Il faut remettre le paquet sur le verdissement du gaz, notamment grâce à la méthanisation. Biocarburants, bio-GNV, hydrogène renouvelable : ces pistes doivent être explorées...

M. le président. - Veuillez conclure.

M. Daniel Gremillet.  - Je termine d'un mot sur un enjeu qui les englobe tous : celui de la solidarité, envers les plus modestes de nos concitoyens mais aussi entre les territoires. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)

M. le président. - Vous avez huit minutes, Monsieur le Ministre.

M. François de Rugy, ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire .  - Ma première intervention à la tribune du Parlement en tant que membre du Gouvernement est donc pour le Sénat... (Sourires)

M. Bruno Sido.  - Très bien !

M. François de Rugy, ministre.  - C'est l'occasion de réaffirmer mon attachement au bicamérisme, très utile pour notre démocratie...

M. Jérôme Bignon.  - Très bien ! (On renchérit sur divers bancs.)

M. François de Rugy, ministre.  - ... et de saluer le président Gérard Larcher, avec qui j'ai beaucoup travaillé pendant quatorze mois. Merci, Monsieur Gremillet, d'avoir inscrit à l'ordre du jour ce débat qui tombe à point nommé, à la veille de l'examen de la PPE. C'est la traduction des engagements de la loi Transition énergétique de 2015 ; nous l'avons dit, nous nous inscrivons dans ce cadre législatif.

Notre politique énergétique doit traduire en actes la stratégie climat de la France - laquelle découle de l'accord de Paris de décembre 2015. L'objectif, c'est la neutralité carbone en 2050.

Première priorité, la réduction de la consommation énergétique. L'objectif est une baisse de 45 % à l'horizon 2050. L'énergie la moins polluante et la moins chère est celle que l'on ne consomme pas... Baisser la consommation, c'est aussi un bouclier contre les augmentations et les variations de prix - le marché de l'énergie est tendanciellement à la hausse.

J'ai récemment annoncé l'initiative Faire pour la rénovation énergétique des logements, avec l'objectif de 500 000 rénovations par an.

Deuxième axe : le transport. Le président de la République a réuni hier, à quelques jours de l'ouverture du salon de l'automobile, les grands dirigeants de l'industrie automobile française, européenne et mondiale, afin de discuter concrètement de la réduction des émissions de gaz à effet de serre dans les transports individuels. Je participais à cette rencontre. Nous n'allons pas promettre aux Français de basculer totalement dans la voiture électrique dans les cinq ans qui viennent, ce serait irréaliste. Pour atteindre l'objectif de décarboner les transports d'ici à 2050, il faut diversifier les solutions : véhicules électriques, hybrides, gaz naturel pour les bus, les cars et les camions, auxquels la motorisation électrique ne convient pas.

Un mot sur la fiscalité écologique. Parlementaire, j'ai entendu mes collègues en appeler sans cesse à la fixation d'un prix au carbone. Mais quand il faut voter une fiscalité, il y a moins de monde, et moins encore pour en défendre l'application. Moi, je l'assume.

Le Gouvernement a publié une trajectoire qu'il assume. Nous voulons baisser la taxation sur le travail, sur les entreprises ; mais il faut des recettes compensatrices...

M. Jean-François Husson.  - Un « pognon de dingue » ! (Sourires sur quelques bancs du groupe Les Républicains)

M. François de Rugy, ministre.  - C'est la base du changement des comportements. J'étais à New York, à l'assemblée générale des Nations Unies, où la différence de taille entre les véhicules américains et européens, plus sobres, plus compacts, est patente. Aux États-Unis, les voitures consomment beaucoup plus, parce que le carburant y est moins cher. Le signal prix est fondamental.

M. le président.  - Veuillez conclure.

M. François de Rugy, ministre.  - Je croyais avoir 10 minutes !

M. le président.  - Je vous ai dit 8 minutes !

M. François de Rugy, ministre.  - J'y reviendrai dans mes réponses aux questions. Le Gouvernement organise l'accompagnement des Français dans la réduction de leur consommation, sur le logement comme sur les transports.

M. le président. - Chaque orateur dispose à présent de 2 minutes maximum pour présenter sa question, le Gouvernement de 2 minutes pour répondre. Vous pouvez répliquer, si et seulement si vous n'avez pas dépassé les 2 minutes : vous avez alors 30 secondes supplémentaires.

M. Roland Courteau.  - Oh là là !

M. Didier Rambaud .  - Il y a un obstacle majeur au développement des énergies renouvelables : l'hostilité de nos concitoyens aux éoliennes, aux stations de méthanisation près de leurs lieux de vie. Je le constate en Isère, où nous sommes interpellés par des associations : dans leur grande majorité, les Français sont favorables à l'essor des énergies vertes, « partout, sauf dans mon jardin » !

Or la méthanisation est un procédé prometteur, qui a fait l'objet d'un groupe de travail piloté par votre secrétaire d'État, Sébastien Lecornu, et qui permet aux agriculteurs de compléter leurs revenus tout en augmentant la part décarbonée du mix.

Comment pouvez-vous vous engager sur une pédagogie de grande ampleur pour soutenir ces projets et le développement d'une filière française ?

M. François de Rugy, ministre.  - Vous avez raison d'évoquer cette question de l'acceptabilité. Sur les énergies renouvelables, nous avons beaucoup progressé. Les procédures d'information sont transparentes, et assez longues. Les collectivités territoriales, l'Ademe, tous les acteurs y participent. Beaucoup voient aussi ces projets comme des opportunités de développement local. C'est une énergie made in France.

L'objectif fixé par la loi de transition énergétique est qu'en 2030 10 % du gaz produit soit bio. Il faut promouvoir les circuits courts. Le transport urbain adopte de plus en plus les bus au gaz.

M. Fabien Gay .  - La PPE s'inscrit dans un contexte de déréglementation accélérée de l'énergie. Les États devront abandonner des prérogatives alors que le pilotage national semble plus important que jamais.

Or l'énergie n'est pas une marchandise mais un bien commun. Mais le découpage d'EDF et GDF et d'autres mesures ont fragilisé le secteur.

La transition énergétique ne se fera qu'avec les citoyens et des investissements massifs dans la recherche.

Quels moyens seront mis en place pour créer de véritables filières d'énergies renouvelables pourvoyeuses d'emplois durables et facteurs de prix modérés ? (Applaudissements sur les bancs du groupe CRCE ; Mme Martine Filleul applaudit également.)

M. François de Rugy, ministre.  - Nos approches divergent sur le plan idéologique. Votre idéologie est étatique, monopolistique. Je préfère la concurrence de plusieurs acteurs, y compris privés - étant entendu que l'opérateur public, EDF, contrôle encore tout de même 85 % du marché - et l'incitation, par les nouvelles technologies, les nouvelles pratiques, à maîtriser la consommation, qui n'a pas toujours été au coeur de l'action de l'opérateur historique.

Abandonne-t-on pour autant tout pilotage politique ? Certainement pas ! La loi de transition énergétique de 2015 en est la preuve. (M. Roland Courteau approuve.) C'était la première fois que le Parlement s'exprimait sur ce sujet !

Les collectivités locales, le privé, les citoyens, je le crois, doivent être mobilisés - je songe aux coopératives citoyennes, qui en Allemagne possèdent 50 % des éoliennes. Nous développons en outre une filière industrielle forte. À Saint-Nazaire, 100 % de la production locale d'éoliennes est exportée !

Mme Cécile Cukierman.  - Il n'y a plus de filière française !

M. Fabien Gay.  - D'après vous, nous sommes en pleine idéologie ; mais c'est vous qui défendez l'idéologie libérale ! Le prix du gaz a augmenté de 70 %, les dividendes pour les actionnaires ont explosé avec la fin de GDF. Ce n'est pas notre idéologie !

Mme Cécile Cukierman.  - Très bien !

M. Roland Courteau .  - La France prend du retard. Plus de 8 millions de logements consomment 330 kWh par mètre carré par an. La fiscalité écologique pèse lourd. La transition énergétique doit être socialement inclusive, or elle ne l'est pas. Pour certains, le fioul et l'automobile sont incontournables. Ils se sentent pénalisés.

Que prévoyez-vous, Monsieur le Ministre, afin que la transition énergétique n'aggrave pas la fracture sociale ? Le remplacement du crédit d'impôt pour la transition énergétique (CITE) par une prime sera-t-il acté en 2019 ?

M. François de Rugy, ministre.  - La question énergétique est de nature tout aussi sociale qu'écologique.

Quant aux passoires énergétiques, le président de la République a pris l'engagement de les sortir du marché avant 2025. C'est difficile, mais l'enjeu est avant tout social : les factures de chauffage sont un trou dans le budget pour les habitants de ces logements.

Dans le projet de loi de finances pour 2019, 50 euros supplémentaires sont prévus pour la prime à la conversion automobile, qui est un grand succès : 200 000 véhicules vendus en fin d'année sans doute, à 70 % par des ménages non imposables.

M. Roland Courteau.  - Les enjeux sont climatiques mais concernent aussi au premier chef la santé : selon l'Organisation mondiale de la santé, un euro investi dans la rénovation énergétique conduit à 0,42 euro d'économies en dépenses de santé. Prenons garde à ce que la transition énergétique ne reste pas vécue par beaucoup comme un luxe inaccessible !

M. Jean-Claude Requier .  - L'hydrogène « vert » contribue à l'indépendance énergétique ; c'est le « couteau suisse » de la transition énergétique, selon votre prédécesseur, Monsieur le Ministre. La France doit, à l'image de l'Allemagne, du Japon et des États-Unis, se saisir de cette opportunité. Or la stratégie en la matière, élaborée très tardivement, demeure en-deçà des attentes, avec l'objectif de 100 stations de distribution en 2023, quand l'Allemagne en prévoit 400 à la même échéance. Quelle place occupera l'hydrogène dans la prochaine PPE ? Quels moyens seront alloués à son développement ?

M. François de Rugy, ministre.  - Vous avez raison d'insister sur le rôle que peut jouer l'hydrogène, mais soyons clairs : il n'y a pas d'énergie miracle ! Je crois à la diversification ; l'hydrogène a toute sa place. Le Gouvernement a débloqué 100 millions d'euros pour des recherches. Mais 95 % de l'hydrogène utilisée en France dans l'industrie est issu d'énergies fossiles. Il faut développer l'usage de l'hydrogène propre, renouvelable, comme carburant. Son stockage implique des contraintes particulières. Le président de la République a évoqué ce sujet hier avec les constructeurs. C'est une perspective intéressante.

M. Jean-Claude Requier.  - Vous n'avez pas d'équivalent du groupe RDSE à l'Assemblée nationale, dont vous venez... Nous sommes attachés au nucléaire. (M. Ronan Dantec fait signe que non ; on s'en amuse à droite)... du moins en majorité ! (Sourires) Mais nous n'en sommes pas moins ouverts aux énergies renouvelables. (Applaudissements sur les bancs du groupe RDSE et sur divers autres bancs)

M. Jean-Claude Luche .  - Comme l'an dernier, le Gouvernement décide d'augmenter les taxes sur l'essence et encore plus fortement sur le diesel. Cela touche lourdement le pouvoir d'achat des périurbains et des ruraux qui n'ont ni métro ni RER, et de nombreuses activités.

Or le plus gros porte-conteneurs français pollue autant que 50 millions de voitures ! Et les transports maritimes et aériens ne sont pas inclus dans l'accord de Paris sur le climat... (M. Jean-François Husson confirme.)

Pendant ce temps, de nombreux emplois demeurent liés à cette filière, mise en difficulté. Dans l'Aveyron, Bosch fabrique des moteurs diesel, ce qui fait vivre 600 personnes directement et 10 000 indirectement. Comment, pour éviter la disparition ou la délocalisation de ces emplois, assurer la reconversion de cette filière mise à mal ?

M. François de Rugy, ministre.  - Votre comparaison entre le transport maritime et le transport automobile ne me semble pas fondée : un porte-conteneurs émet un million de tonnes de CO2 par an : c'est beaucoup, mais ce n'est pas la même chose ! Quoi qu'il en soit, les transports doivent tous évoluer.

Nous avons souhaité que la prime à la conversion concerne autant les véhicules neufs que d'occasion : c'est la première fois ! Ainsi, à 80 %, ce sont les vieux véhicules diesel qui sont mis à la casse, et 70 % des bénéficiaires touchent 2 000 euros car ne sont pas imposables. Cela profite à 95 % des ménages hors Île-de-France !

Nous n'avons certes pas assez anticipé la chute du marché du diesel qui ne représente plus que 40 % des ventes contre 75 % il y a dix ans. Cette chute n'est pas due uniquement aux politiques publiques. Il y a eu le dieselgate et d'autres facteurs. Près de 18 millions d'euros sont consacrés à l'accompagnement de la filière.

M. Jérôme Bignon .  - Ce débat est opportun qui vient quinze jours après la présentation du rapport sur le débat public sur la PPE.

Vous avez évoqué la diversification. L'énergie marémotrice en fait partie. La création, dans les Hauts-de-France, sur la côte picarde, ainsi que sur la côte ouest de la Normandie, seules zones françaises de fort marnage, d'un parc de cinq lagons marémoteurs produisant quinze gigawatts zéro carbone, soit 15 % des besoins français, a été estimée possible. Cela protègerait la biodiversité et limiterait l'érosion du trait de côte. Comment l'envisagez-vous dans le mix énergétique, et quelle place pour cette énergie dans la PPE, cinquante ans après l'usine de la Rance, Monsieur le Ministre ?

M. François de Rugy, ministre.  - Le prochain projet offshore, près de Dunkerque, arriverait à un coût de l'énergie, de l'ordre de 50 à 60 euros, proche de celui du marché pour l'éolien flottant. Mais les centrales marémotrices peuvent pâtir de l'envasement, comme ce fut le cas dans l'estuaire de la Rance...

Quoi qu'il en soit, nous continuerons à accompagner les acteurs, à évaluer l'acceptabilité des chantiers et la compétitivité de ces offres. Dans la baie de Somme, ce n'est pas facile, mais je suis prêt à y travailler avec vous.

M. Jérôme Bignon.  - Merci pour cette réponse ouverte, que je transmettrai en baie de Somme et en Normandie.

M. Jean-François Husson .  - L'énergie est corrélée à la préservation de l'environnement ou à la pollution de l'air, elles-mêmes liées à la fiscalité environnementale. Le Gouvernement poursuit la politique menée sous la présidence Hollande, qui se limite à un coup d'assommoir fiscal. L'État ferait mieux d'associer tous les acteurs pour donner un vrai sens à l'écologie, enfin. L'écologie punitive est-elle la seule solution ?

Quand ferez-vous le pari d'une économie décarbonée au service d'une croissance durable ?

M. François de Rugy, ministre.  - J'ai cru un moment que vous alliez me demander si j'étais pour l'écologie punitive... Je ne vous ferai pas cet aveu. Parleriez-vous aussi de « solidarité punitive » pour décrire la protection sociale, où les montants en jeu sont d'une tout autre ampleur ?

Pour dépenser, il faut des recettes. Je préfère taxer la pollution plutôt que le travail... Croyez-vous que l'on taxe sans contrepartie ? Non, nous investissons en retour.

Il faut développer les transports en commun pour faciliter la mobilité propre. C'est l'objet des chantiers du Grand Paris et de la loi sur les mobilités. Tout cela exige des ressources. Aux dépenses d'investissement nécessaires doivent correspondre des recettes à la hauteur. On veut un TGV ici, un métro ou un CDG Express là... Et la vignette poids lourds ne représente que 500 millions d'euros !

Nous donnons ainsi aux collectivités territoriales, aux entreprises et aux Français les moyens de réussir la transition énergétique.

M. Jean-François Husson.  - L'an dernier, le budget a prélevé 3,7 milliards d'euros de recettes environnementales pour 180 millions d'euros distribués !

La contribution climat énergie (CCE) représente 47 milliards d'euros sur le quinquennat ! Par ailleurs, la pollution de l'air due au trafic maritime est égale à celle due au trafic automobile... Sachons raison garder.

Mme Martine Filleul .  - Nous ne remplissons pas nos objectifs et en sommes même loin puisque notre consommation d'énergie a progressé de 4,2 points et les énergies renouvelables ont baissé de 12 points.

Notre politique est illisible. Le CNTE est une instance de discussion mais ses moyens humains et financiers sont insuffisants et il n'est pas toujours consulté !

Comment mieux coordonner la politique énergétique et mieux la décliner localement ?

M. François de Rugy, ministre.  - Je partage votre souhait d'aller plus vite, plus fort ; pour cela il faut mobiliser tout le monde. Je l'ai dit dès le départ, la politique énergétique ne se fait pas du seul bureau du ministre. Il faut mobiliser les entreprises - en accompagnant par exemple les industries, les électro-intensives en particulier, qui seraient étranglées si on leur appliquait la taxe carbone - les collectivités territoriales, bénéficiaires des deux tiers du fonds chaleur qui augmentera à 300 millions d'euros en 2019.

Nous n'oublions pas les citoyens : le chèque énergie, pour passer le cap, est porté à 800 millions d'euros ; le CITE, à 1 milliard d'euros !

Les transports publics, je le redis, ne sont pas autofinancés. Après le débat que vous avez suivi l'an dernier, le budget de l'État finance jusqu'à la dette de la SNCF, soit 25 milliards plus 10 milliards, donc 35 milliards d'euros en deux ans ! Tout cela, il faut le financer.

M. Claude Kern .  - Une incinération performante des déchets reste la meilleure solution pour les éliminer tout en valorisant leur apport énergétique. Mais les réseaux de chaleur restent trop rares car ils nécessitent des capitaux sur le long terme.

Malgré les ambitions de la loi Transition énergétique - multiplier par cinq les déchets traités ainsi - les investisseurs ne sont pas au rendez-vous, faute de visibilité. Le budget 2019 ne paraît pas renverser la tendance. Éclairez-nous, Monsieur le Ministre d'État, sur les mesures destinées à favoriser les sites de valorisation énergétique.

M. François de Rugy, ministre.  - Une feuille de route pour l'économie circulaire a été présentée avant ma prise de fonctions qui vise la baisse de la mise en décharge, encore trop importante en France, et au recyclage total des plastiques d'ici 2025. N'oublions pas la biomasse (bois, déchets agricoles, notamment) et la géothermie, à laquelle sont raccordés 400 000 logements en Île-de-France. Le développement des réseaux de chaleur sera une priorité dans la PPE et le soutien au fonds chaleur, outil d'intervention que l'État donne aux collectivités locales, sera augmenté.

M. Guillaume Chevrollier .  - Aujourd'hui, deux points de pression s'exercent sur les décideurs politiques : la dégradation du climat, et les cris d'alarme, les attentes légitimes des associations et des citoyens. L'accord de Paris a amorcé une réflexion, mais n'a pas impulsé de nouveau modèle énergétique clair. Reste aussi la question de la pression démographique - nous serons 10 milliards en 2050 - et celle, corrélative, de la pression sur les ressources. Les vidéos de l'astrophysicien Aurélien Barrau, devenues virales sur Internet, pointent que les réfugiés climatiques seront entre 250 millions et un milliard en 2030.

Alors que la COP24 commence bientôt en Pologne, quelle est la position de la France ? Quels outils comptez-vous utiliser ?

M. François de Rugy, ministre.  - Les conséquences sont en effet palpables, non pas seulement chez les autres, loin, mais chez nous. Je l'ai constaté avec le président de la République aux Antilles. Les assureurs le constatent et les conséquences économiques, dans de nombreux secteurs, sont concrètes...

Il faut réduire les émissions de gaz à effet de serre, c'est l'enjeu central de la COP24 ; la négociation sera difficile, il faut faire des choix, sur le plan global, comme national. Nous préparons ces négociations, et nous mobilisons à l'intérieur - j'en ai déjà parlé.

Nous nous dotons aussi d'un plan d'adaptation au changement climatique, dans tous les domaines - au-delà des problèmes posés par l'érosion à Soulac-sur-Mer.

M. Jean-Claude Tissot .  - En matière de prix ou de qualité de service, les progrès ne sont pas perçus par les consommateurs.

La mise en concurrence, en impliquant une multitude d'acteurs, n'a-t-elle pas entraîné un désordre nouveau ? En avez-vous une évaluation globale ? Je pense dans mon département, la Loire, à l'ancienne mine d'uranium de Saint-Priest-la-Prugne, dont la gestion est un véritable casse-tête.

Les tarifs réglementés - que la loi Pacte envisage de supprimer - sont un des derniers garde-fous, pour protéger les consommateurs. Nous avons besoin de plus de volontarisme européen : il ne faut pas se contenter de la construction d'un marché. Comment envisagez-vous cet aspect ?

M. François de Rugy, ministre.  - Certains auraient promis une baisse des prix de l'énergie avec la mise en concurrence - ce n'est pas le cas, mais les prix suivent les prix mondiaux qui sont orientés à la hausse. Les Français doivent comprendre que la France ne peut pas être une oasis de prix bas. C'est pourquoi nous voulons réduire la consommation ; ces choix sont incarnés dans le renoncement à exploiter nos gisements de gaz de schiste, acté par mon prédécesseur.

L'ouverture à la concurrence permet la diversification des énergies et des opérateurs. Autrefois, si l'on n'était pas l'opérateur historique, on ne pouvait pas produire de l'électricité - puisqu'on n'avait pas le droit de la vendre à son voisin.

Dans ce domaine comme dans d'autres, le président de la République et le Gouvernement sont pour la coopération et contre le chacun pour soi.

Le président de la République pèse, au niveau européen, en faveur d'une politique européenne coordonnée, dans ce domaine comme dans d'autres.

Mme Agnès Canayer .  - La PPE doit s'adapter aux enjeux de société et aux innovations techniques. La diversification des sources d'énergie est un enjeu majeur. L'énergie thermique, comme celle du Havre, une des quatre centrales thermiques qui restent, permet de faire face aux pics de consommation. Fermer toutes ces centrales nous obligera à acheter notre énergie lors des pics - en Allemagne par exemple pays qui a rouvert ses centrales à charbon, tandis que les nôtres remplacent de plus en plus le charbon par la biomasse. Monsieur le Ministre, le Gouvernement entend-t-il réellement se passer de l'apport utile des centrales thermiques ?

M. François de Rugy, ministre.  - Mon prédécesseur a décidé de fermer les quatre centrales, dont Gardanne et Saint-Avold, d'ici 2022 - contre 2025 auparavant.

Tout le monde parle de Fessenheim, mais les difficultés sont les mêmes pour les centrales à charbon, la fermeture pose toujours des questions aux territoires, aux populations directement touchées.

Nous assumons pourtant ce choix, car sans cela nous ne pourrions pas demander la fermeture des centrales à charbon à l'étranger. Pour les pics de consommation, il faudra utiliser des centrales à gaz et des nouvelles méthodes de stockage. Quant aux enjeux de la biomasse, nous ne parlons pas de la même puissance.

M. Pierre Cuypers .  - Libérer la croissance verte, tel était le projet de la loi de transition énergétique. Quel retard depuis ! La France, avec 12 millions d'hectolitres par an, est championne du bioéthanol, renouvelable et qui diminue de 60 % les émissions de CO2.

Mais, notre bioéthanol a perdu 15 % de son marché au profit du biocarburant étranger à base d'huile de palme.

Le prochain projet de loi de finances prévoit de transformer la TGAP en taxe incitative à l'incorporation de biocarburants, mais les ambitions sont très modestes : +0,2 % en 2019, +0,1 % en 2020 pour porter le taux de biocarburants dans l'essence à 7,8 %, c'est en-deçà de la trajectoire fixée par notre stratégie bas carbone. Le bioéthanol est insuffisamment utilisé. Il n'est pas compris dans le plafond européen d'énergie de 7 %. Il n'y a donc pas de frein ! (MM. Daniel Gremillet, Jean-Paul Emorine et Jacques Genest applaudissent.)

M. François de Rugy, ministre.  - Le sujet est méconnu mais important : celui des biocarburants, que je préfère nommer agro-carburants ; ils doivent être mesurés au vu de leur bilan global. Il ne s'agit pas d'importer de la déforestation.

La filière française est soutenue. Nous fixerons un niveau de biocarburants - y compris le gaz issu de la méthanisation dans les transports.

Il y aura une place pour les carburants renouvelables dans la PPE.

M. Jacques Genest .  - Les territoires essaient de jouer le jeu de la transition énergétique. Mais combien d'obstacles, en particulier venues de l'État ! Les énergies renouvelables progressent plus vite que les réseaux. Le raccordement est souvent tardif. Les procédures sont bien trop lourdes, il faudrait les simplifier. Le coût du branchement est une taxe exorbitante.

La Commission de régulation de l'énergie (CRE) impose que les éoliennes respectent les règlements d'urbanisme. Que dire de la position rigide de l'armée de l'air sur les réseaux d'entraînement à très basse altitude (RTBA), secteurs qui couvrent la moitié de l'Ardèche, la totalité de la Haute-Loire et de la Loire ainsi qu'une partie du Cantal et du Puy-de-Dôme ?

Que faire Monsieur le Ministre pour réduire ces obstacles, qui viennent souvent de l'État ?

M. François de Rugy, ministre.  - Vous avez raison de souligner que les énergies renouvelables représentent une opportunité pour les campagnes - l'éolien, bien sûr, mais également la filière bois-énergie, qui demande une meilleure exploitation forestière.

Sur les freins et complications administratives, vous connaissez comme moi de quoi il retourne. Bien des gens se sont ingéniés à inventer de nouvelles contraintes, à l'Assemblée nationale, comme ici certains voulaient porter à un kilomètre la distance minimale entre les habitations et les éoliennes aujourd'hui de 500 mètres.

Pour l'armée de l'air, je sais bien quelles sont les règles étranges qu'elle impose, mais pourquoi faudrait-il entraîner les pilotes dans un terrain totalement dégagé ?

Sur la simplification, je vous rejoins également, et l'un de mes tout premiers actes a été de signer l'arrêté ministériel de simplifications administratives, issues du groupe de travail piloté l'an passé par Sébastien Lecornu.

M. Michel Savin .  - L'hydroélectricité est la première source d'énergie renouvelable, avec 12 à 14 % de la production électrique. En 2015, la Commission européenne a mis en demeure notre pays d'ouvrir ses barrages hydrauliques à la concurrence, en application de l'article 106 du Traité. La France ouvrira à la concurrence 136 barrages, soit 35 % de ses possibilités. Mais les autres pays ne le font pas...

On le voit en Isère, il est primordial que la filière soit préservée, alors qu'elle nous offre une autonomie précieuse.

Comment sera assurée la gestion des vallées, si les différents barrages sont attribués à différents acteurs ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains)

M. François de Rugy, ministre.  - L'hydroélectricité est effectivement importante, avec 12 % de notre production électrique. La France a attribué 80 % des 400 concessions à EDF et le reste à la Compagnie nationale du Rhône, filiale d'Engie. C'est une spécificité nationale. Lorsqu'elles arrivaient à expiration, les gouvernements se sont hâtés lentement - peut-être croyant que l'Union européenne fermerait les yeux.

J'estime pour ma part que le statu quo n'est pas tenable, avec des entreprises qui ne savent pas si elles peuvent investir, des élus locaux en proie au doute, alors que des opérateurs les démarchent... Il sera possible de regrouper les concessions hydrologiques liées, les collectivités territoriales pourront jouer un rôle, les concessions pourront être prolongées contre travaux, les personnels verront leur statut être protégé.

Nous avons été élus pour régler les problèmes, pas pour les conserver en l'état.

M. Michel Savin.  - Le problème, ce n'est pas la concurrence ; c'est que les règles sont différentes ici et ailleurs. Les entreprises françaises ne peuvent pas aller sur les marchés européens. La sécurité des vallées ne doit pas être une option, Monsieur le Ministre, il en va de leur sécurité et de leur vitalité mêmes.

Mme Sophie Primas, pour le groupe Les Républicains .  - Nous finissons par penser que le but unique de la politique énergétique est la réduction des gaz à effet de serre ; mais rappelons-nous l'essentiel : s'assurer que nous disposerons toujours de l'énergie nécessaire.

M. Gremillet a dit à raison que la réduction de la part du nucléaire pourrait être un danger car elle dégrade notre autonomie énergétique. Il est essentiel de diversifier nos sources. Lors d'une mission conduite cet été en Russie, notre commission des affaires économiques a mesuré combien ce pays était le réservoir naturel en ressources énergétiques de l'Europe - qui a peu de ressources et qu'elle rechigne à exploiter. Les gisements britanniques et norvégiens sont limités. Nous devons nous tourner vers les États-Unis, le Canada ; - Shell vient d'annoncer un projet à Kitimat, en Colombie-Britannique - le Moyen-Orient, mais aussi la Russie.

Le gaz est une énergie bon marché car abondante, les émissions sont inférieures, et demain, les infrastructures pourront être utilisées pour le biogaz.

La présence en Russie de deux des grandes entreprises énergétiques françaises est un bon point. Mais les sanctions américaines prises après la crise ukrainienne, présentent des obstacles.

Les États-Unis s'opposent à Nord Stream 2, projet de pipeline et placent l'opérateur russe Novatek sur la liste des sanctions. Or le gaz américain est plus cher que le gaz russe. Faut-il penser qu'il s'agit de fausser la concurrence ? Je ne le dirai pas - mais certains le font, en particulier en Russie. Ne soyons pas naïfs ! (Applaudissements sur les bancs des groupes Les Républicains et UC)

Prochaine séance, demain, mercredi 3 octobre 2018, à 14 h 30.

La séance est levée à 20 h 20.

Jean-Luc Blouet

Direction des comptes rendus

Annexes

Ordre du jour du mercredi 3 octobre 2018

Séance publique

À 14 h 30

Présidence : Mme Catherine Troendlé, vice-présidente

Secrétaires : M. Yves Daudigny  - M. Joël Guerriau

1. Examen d'une demande de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable tendant à obtenir du Sénat, en application de l'article 5 ter de l'ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires, qu'il lui confère les prérogatives attribuées aux commissions d'enquête pour six mois afin de mener sa mission d'information sur la sécurité des ponts.

Rapport de M. Philippe Bas, fait au nom de la commission des lois (n° 728, 2017-2018).

2. Désignation des 11 membres de la commission spéciale chargée du contrôle des comptes et de l'évaluation interne.

3. Débat sur la réforme du baccalauréat.

4. Débat sur la politique industrielle et l'avenir de notre industrie.

Analyse des scrutins publics

Scrutin n°1 sur l'ensemble de la proposition de résolution, présentée en application de l'article 34-1 de la Constitution, sur le pastoralisme.

Résultat du scrutin :

Nombre de votants :344

Suffrages exprimés :334

Pour :313

Contre :21

Le Sénat a adopté.

Analyse par groupes politiques :

Groupe Les Républicains (146)

Pour : 144

N'ont pas pris part au vote : 2 - M. Gérard Larcher, Président du Sénat, M. Philippe Dallier, Président de séance

Groupe SOCR (75)

Pour : 73

Abstentions : 2 - M. Christian Manable, Mme Angèle Préville

Groupe UC (51)

Pour : 49

Abstentions : 2 - M. Olivier Henno, Mme Michèle Vullien

Groupe RDSE (23)

Pour : 21

Contre : 1 - M. Ronan Dantec

Abstention : 1 - M. Joël Labbé

Groupe LaREM (22)

Pour : 1 - M. Arnaud de Belenet

Contre : 20

Abstention : 1 - Mme Noëlle Rauscent

Groupe CRCE (15)

Pour : 15

Groupe Les Indépendants (11)

Pour : 7

Abstentions : 4 - MM. Jérôme Bignon, Emmanuel Capus, Alain Fouché, Claude Malhuret

Sénateurs non inscrits (5)

Pour : 3

N'ont pas pris part au vote : 2 - Mme Claudine Kauffmann, M. Stéphane Ravier

Composition d'une CMP

Les représentants du Sénat à la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif à la lutte contre la fraude sont :

Titulaires : MM. Vincent Éblé, Albéric de Montgolfier, Philippe Dominati, Jean-François Husson, Mmes Sylvie Vermeillet, Sophie Taillé-Polian, Nathalie Delattre.

Suppléants : MM. Julien Bargeton, Jérôme Bascher, Éric Bocquet, Thierry Carcenac, Philippe Dallier, Vincent Delahaye, Mme Christine Lavarde.