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Table des matières
Mise au point au sujet d'un vote
Service public d'eau potable et d'assainissement en Guadeloupe (Conclusions de la CMP)
Mme Françoise Dumont, rapporteure pour le Sénat de la commission mixte paritaire
M. Sébastien Lecornu, ministre des outre-mer
Réforme de la formation des élus locaux (Procédure accélérée)
Mme Françoise Gatel, rapporteur de la commission des lois
ARTICLES ADDITIONNELS après l'article premier
ARTICLES ADDITIONNELS après l'article premier quinquies
ARTICLE ADDITIONNEL après l'article premier quaterdecies
ARTICLE ADDITIONNEL après l'article 3
Respect des principes de la République (Procédure accélérée - Suite)
Discussion des articles (Suite)
ARTICLES ADDITIONNELS après l'article 27
ARTICLES ADDITIONNELS après l'article 29
ARTICLE 32 (Suppression maintenue)
ARTICLES ADDITIONNELS avant l'article 33
Mise au point au sujet d'un vote
Discussion des articles (Suite)
ARTICLES ADDITIONNELS après l'article 35
ARTICLE ADDITIONNEL avant l'article 37
ARTICLE ADDITIONNEL après l'article 37
ARTICLE ADDITIONNEL après l'article 38
ARTICLES ADDITIONNELS après l'article 39
ARTICLE ADDITIONNEL après l'article 39 bis
ARTICLES ADDITIONNELS après l'article 43
M. Gérald Darmanin, ministre de l'intérieur
Ordre du jour du lundi 12 avril 2021
SÉANCE
du jeudi 8 avril 2021
83e séance de la session ordinaire 2020-2021
présidence de M. Vincent Delahaye, vice-président
Secrétaires : M. Joël Guerriau, Mme Corinne Imbert.
La séance est ouverte à 10 h 30.
Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu analytique, est adopté sous les réserves d'usage.
Décès d'un ancien Sénateur
M. le président. - J'ai le regret de vous faire part du décès de notre ancien collègue Gérard Claudel, qui fut sénateur du Val-d'Oise de mai à septembre 2004.
Mise au point au sujet d'un vote
M. Jean-Yves Roux. - Au scrutin public n°105 du 7 avril sur l'amendement n°237 rectifié bis, Mme Véronique Guillotin souhaitait voter pour.
M. le président. - Acte vous est donné de cette mise au point. Elle sera publiée au Journal officiel et figurera dans l'analyse politique du scrutin.
Service public d'eau potable et d'assainissement en Guadeloupe (Conclusions de la CMP)
M. le président. - L'ordre du jour appelle l'examen des conclusions de la commission mixte paritaire chargée d'élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion de la proposition de loi rénovant la gouvernance des services publics d'eau potable et d'assainissement en Guadeloupe.
Mme Françoise Dumont, rapporteure pour le Sénat de la commission mixte paritaire . - La commission mixte paritaire (CMP), réunie le 23 mars, est parvenue sans difficulté à un accord sur ce texte utile.
Nos concitoyens guadeloupéens ont des difficultés inacceptables à accéder à l'eau potable. Il nous fallait donc agir avec célérité et efficacité.
La CMP a repris pour l'essentiel le texte adopté par le Sénat le 10 mars dernier.
Le texte initial, qui a été utilement enrichi par notre assemblée, prévoyait déjà un syndicat mixte unique (SMU) de gestion des services publics d'eau et d'assainissement. L'Assemblée nationale avait prévu la création d'une commission de surveillance ad hoc, pour garantir la pleine association des usagers.
Nous avons parfait le fonctionnement de ce SMU. De nouveaux membres pourront le rejoindre sans modification législative. Le comité syndical pourra également déroger, à l'unanimité, à la clé de répartition des contributions financières, pour éviter une rigidité excessive dans les décisions d'investissement.
Le Sénat a également renforcé, à l'article 2, les attributions de la commission de surveillance et en a modifié la composition, en y renforçant la représentation des élus locaux et en l'ouvrant à des personnalités qualifiées. Nous avons enfin prévu une audition annuelle du président du comité syndical par la commission de surveillance.
La proposition de loi a recueilli le plein assentiment des députés. Je salue tout particulièrement Justine Benin, auteure et rapporteure du texte à l'Assemblée nationale, et notre collègue Dominique Théophile.
Le texte de la CMP apportant une réponse pragmatique, je vous invite à l'adopter. Ce ne sera pas donner quitus au Gouvernement, car ce texte n'est qu'un premier pas et ne suffira pas à lui seul à restaurer la confiance et résoudre les problèmes d'accès à l'eau.
Tout ne relève pas du législatif. Le Parlement a fait sa part, à l'État, qui en a les moyens humains, techniques et financiers, de se montrer à la hauteur des attentes des Guadeloupéens pour agir rapidement et efficacement.
M. Sébastien Lecornu, ministre des outre-mer . - Merci pour le travail accompli dans une bonne intelligence entre les deux chambres, entre le Parlement et le Gouvernement, entre Paris et Pointe-à-Pitre.
La compétence de l'eau est le symbole même de la décentralisation. C'est aussi un enjeu de service public. Comment tolérer que cent mille Français n'aient pas accès à l'eau potable en 2021 ? Comment 65 % de l'eau potable produite en Guadeloupe peut-elle être perdue lors de l'acheminement ? Il y a un impact environnemental, sanitaire, économique.
Comment rétablir ce service public sans abîmer la décentralisation ? Vous enjoignez le Gouvernement d'être à la hauteur, nous le sommes, avec 90 millions d'euros investis depuis 2014. La compétence est décentralisée, oui, mais l'élu-bashing constaté en Guadeloupe n'est pas justifié. L'État est là en matière d'ingénierie. En 2020, quatre mille fuites ont été réparées, pour 6 millions d'euros - derrière ces chiffres, il y a des foyers, des familles. Je veux souligner la continuité de l'action de l'État en la matière.
Ce n'est pas qu'une affaire d'argent, mais aussi d'organisation.
En milieu insulaire tout particulièrement, il y a besoin de solidarité entre production, acheminement et distribution, d'interconnexion des réseaux. Pour avancer, il fallait un acteur unique.
Nous n'étions pas sûrs de fédérer toutes les collectivités territoriales, c'est pourquoi le législateur devait intervenir. Et quand le Sénat intervient pour organiser la vie locale, cela ne peut être au détriment de la démocratie locale !
Nous devions trouver un équilibre dans la gouvernance pour que les usagers soient entendus sans empiéter sur les prérogatives des élus.
Mes propos ont pu être caricaturés ; c'est peut-être l'approche des échéances électorales... Il faut renforcer l'ingénierie, mobiliser les équipes, répondre aux besoins de formation.
En matière de ressources humaines, le Gouvernement s'est engagé à ce qu'aucun agent du syndicat intercommunal d'alimentation en eau et d'assainissement de la Guadeloupe (SIAEAG) ne soit abandonné.
Une solution sur mesure sera trouvée sur les dettes, EPCI par EPCI.
La loi sera rapidement promulguée, pour une mise en place du SMU dès septembre.
Avec ce texte, Mme Benin et M Théophile nous ont donné l'occasion de faire un bond en avant. Merci au Sénat, les Guadeloupéens nous attendaient !
M. Jean Louis Masson . - Je me réjouis qu'une solution constructive soit issue de la CMP. Il fallait régler ce problème qui durait depuis trop longtemps. Nous n'enterrons pas l'affaire pour autant : cela doit nous faire réfléchir sur les dysfonctionnements dans la gestion quotidienne induits par la décentralisation.
Honnêtement, le Gouvernement n'y est pour rien. Il a reçu un héritage de longue date. L'inaction du pouvoir central s'explique par la décentralisation. Les vrais responsables sont les élus locaux ! S'ils avaient bien géré l'eau et l'assainissement, nous n'en serions pas là.
La décentralisation est très positive, mais suppose des responsables locaux parfaits. C'est loin d'être toujours le cas - en Guadeloupe comme en métropole d'ailleurs.
Je ne propose pas un retour en arrière, mais avant 1982, le pouvoir central jouait son rôle, on ne laissait pas filer les choses à l'échelon local. Les nouvelles équipes municipales découvrent parfois des situations calamiteuses...
M. le président. - Veuillez conclure.
M. Jean Louis Masson. - Il faut tirer des leçons de ce dossier.
M. Jean-Louis Lagourgue . - Depuis plusieurs années, la gouvernance de l'eau en Guadeloupe n'est pas satisfaisante. Cent mille usagers sont en effet victimes de « tours d'eau », suscitant colère et exaspération, d'autant que la ressource est abondante.
La gestion éclatée des services d'eau et d'assainissement fait obstacle à la gouvernance d'ensemble dont la Guadeloupe a besoin. Les syndicats compétents sont dans une situation difficile : ils ne sont plus en mesure d'entretenir le réseau, d'entreprendre des travaux d'urgence ni de payer les fournisseurs.
Nous ne pouvons laisser nos compatriotes souffrir davantage d'une telle indignité. Je me réjouis donc de ce texte et de la réussite de la CMP.
Le Sénat a enrichi la proposition de loi, notamment en assouplissant l'article premier. Par exemple, le comité syndical pourra déroger à la clé de répartition des contributions financières.
L'article 2 prévoit une commission de surveillance ; le Sénat en a rationalisé la composition en renforçant la présence des représentants des communes et des personnalités qualifiées, et en supprimant celle des parlementaires. La commission entendra chaque année le président du comité syndical.
Je salue la qualité des travaux de Françoise Dumont.
Cette proposition de loi constitue une étape importante dans la résolution du problème, en apportant une solution concrète et pragmatique. Le groupe INDEP votera ce texte.
M. Daniel Salmon . - En effet, la gestion de l'eau en Guadeloupe est un problème. Il était urgent d'agir contre le gaspillage de l'eau et d'en améliorer la qualité.
La réussite de la CMP est une victoire en soi : la rénovation concrète permise par le texte est nécessaire mais pas suffisante.
Le groupe régional d'experts sur le climat (GREC) a pointé le grand gaspillage de la ressource : 26,4 millions de mètres cubes consommés pour 73,1 millions de mètres cubes produits, soit 177 % de pertes à la consommation ! Pour un litre d'eau consommé, un litre et demi de perdu ! Et la qualité de l'eau est inquiétante, en raison du mauvais niveau d'assainissement et de l'utilisation historique du chlordécone. Enfin, le GREC a mis en avant des possibles problèmes de sécheresse.
Le texte de la CMP conserve deux apports du Sénat : la possibilité de futures adhésions au syndicat mixte et l'ouverture d'une réflexion sur la tarification sociale de l'eau.
Je regrette l'absence de personnalités qualifiées et de représentants des usagers au comité syndical. Au vu des enjeux, ces derniers devraient être pleinement associés aux décisions.
Les conditions de transfert de la dette restent trop floues, les pouvoirs de la commission de surveillance trop faibles.
Le GEST reste prudent et attend un engagement financier fort de l'État. Une attention particulière devra être apportée au volume des dettes transférées. Tout en alertant sur ces points de vigilance, notre groupe votera ce texte.
M. Dominique Théophile . - La CMP, réunie le 23 mars, est parvenue à un accord. Les quelques dispositions restant en discussion ont fait l'objet d'un consensus, que nous saluons.
Nous avons déjà décrit les dysfonctionnements du service public de l'eau en Guadeloupe, et leurs conséquences.
Cette proposition de loi répond à une revendication ancienne : la création d'un SMU. Elle se veut fidèle aux attentes des élus et usagers que j'ai longuement rencontrés avec Justine Benin.
Une commission de surveillance a été créée à la place de la commission consultative initialement envisagée pour garantir la juste représentation des usagers et rétablir la confiance. Un compromis a été trouvé avec le Gouvernement sur la question des dettes fournisseurs.
Le Sénat a apporté de la souplesse et renforcé les prérogatives de la commission de surveillance.
Ce texte est un préalable à la remise en état du système de distribution d'eau en Guadeloupe, mais ce n'est qu'une étape.
Plusieurs chantiers vont s'ouvrir : clarification du traitement de la ressource pour une gestion durable du sous-sol, mobilisation de financements pérennes, réalisation des investissements les plus urgents.
J'invite toutes les parties prenantes à s'atteler dès à présent à la mise en oeuvre de la nouvelle structure ; l'État, lui, devra assurer un accompagnement financier à la hauteur des enjeux.
Le groupe RDPI votera ce texte.
M. Jean-Yves Roux . - Lors de la première lecture, des inquiétudes fortes s'étaient exprimées sur la gestion de l'eau en Guadeloupe. Il est inacceptable que certains de nos concitoyens n'aient pas accès à l'eau potable, en raison non d'une catastrophe soudaine mais d'une gestion défaillante.
Cette proposition de loi apporte donc un correctif bienvenu à une faillite de la liberté locale.
Le sujet fait consensus ; les solutions proposées - création d'un syndicat mixte et d'une commission de surveillance - sont satisfaisantes.
La navette a introduit des souplesses dans la gestion du syndicat mixte, notamment pour l'intégration de nouveaux membres, tandis que la commission de surveillance pourra associer tous les acteurs locaux ; la présence, en revanche, de parlementaires n'était pas pertinente et aurait dilué la représentation des usagers.
Cependant, le travail accompli n'est qu'une première étape.
Le groupe RDSE votera ce texte mais restera vigilant, pour que ce territoire de la République ne demeure pas enlisé dans la crise.
Mme Marie-Claude Varaillas . - Le texte de la CMP conserve les assouplissements introduits par le Sénat, ainsi que la réflexion sur la tarification sociale de l'eau. Mais cette structure imposée d'en haut demeure contraignante pour les intercommunalités, qui voient dans la feuille de route adressée par l'État une mise sous tutelle. La crainte du retour des multinationales pour gérer la production et la distribution ainsi que la nécessité de recueillir une aide financière renforcent la pression sur les élus.
Ce consensus forcé pour aboutir à une entité formelle ne garantit en rien un bon fonctionnement.
L'État s'engage à ne pas alourdir les dépenses des collectivités territoriales, mais comment concrétiser cet engagement ? Les élus locaux ne peuvent se contenter de promesses. Si les dettes des EPCI ne sont pas transférées au nouveau syndicat, la question reste posée.
L'avenir des salariés n'est pas garanti. Le comité de défense des usagers n'est pas satisfait du texte ; il demande un référendum et une meilleure implication des usagers dans la gouvernance, un tarif équitable et l'arrêt des poursuites judiciaires.
La vétusté des réseaux fait que la moitié de l'eau se perd en fuites. Pourtant, les habitants, victime de coupures d'eau récurrentes, continuent de payer les factures.
L'eau est un bien commun, d'où la nécessité d'une gestion publique. Le droit à l'eau et à un assainissement de qualité a été reconnu en 2010 comme un droit fondamental essentiel par l'ONU ; en Guadeloupe, ce droit est bafoué et les inégalités s'aggravent.
Le groupe CRCE défendra bientôt une proposition de loi pour faire de ce droit fictif un droit réel, avec la gratuité des premiers litres.
Notre groupe reste sceptique quant à l'architecture envisagée et s'abstiendra sur ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE)
M. Philippe Bonnecarrère . - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) Le groupe UC a approuvé ce texte en première lecture ; il y reste favorable après l'accord en CMP. Je salue le travail tenace de la rapporteure.
Nous nous exprimons avec humilité sur ces sujets, en présence de MM. Lurel et Théophile. Cependant, nous restons perplexes sur quelques points, à commencer par le fait que les ressources humaines ne sont pas abordées, pas plus que la situation financière des structures concernées. Ces ambiguïtés sont gages de difficultés futures...
Même si nous oublions l'autonomie de gestion des collectivités territoriales, la situation étonne. Il n'est guère rassurant que le futur syndicat mixte rassemble les intercommunalités, le département et la région sur la base de statuts rédigés par l'État : l'expérience montre que quand il n'y a pas de réel dirigeant, les ambiguïtés prospèrent.
En matière d'ingénierie, qui aura la main sur le système d'information géographique ? Le syndicat, les intercommunalités, le département, la région ?
Monsieur le ministre, le « quoi qu'il en coûte » n'a pas vocation à s'appliquer à tous les domaines des politiques publiques.
M. Sébastien Lecornu, ministre. - On est d'accord !
Mme Françoise Gatel. - C'est très vrai !
M. Philippe Bonnecarrère. - Cela étant, la question ne pouvait être traitée que par la voie législative. Il est stupéfiant que dans notre pays, des « tours » d'eau soient encore organisés dans certains territoires.
Le droit à l'eau n'est pas en débat : la ressource est suffisante en Guadeloupe, le problème n'est pas la production mais la distribution. Le débat sur le prix de l'eau n'a pas lieu d'être, au vu du taux de paiement.
La situation de la Guadeloupe ne relève pas des grands principes mais des bonnes pratiques. J'espère que les parties prenantes sauront mener à bien ce chantier considérable. (Applaudissements sur les travées du groupe UC)
M. Victorin Lurel . - (Applaudissements sur les travées du groupe SER) Je suis partagé. J'aime bien mon ministre...
M. Sébastien Lecornu, ministre. - C'est réciproque.
M. Victorin Lurel. - ... sa bonhomie, sa rondeur. Il est difficile de dire du mal d'un texte qu'il porte, mais voilà un curieux objet - encore que la rapporteure, par son excellent travail légistique, l'ait rendu plus acceptable.
Le groupe SER s'abstiendra sur ce texte, par sagesse même, mais c'est une abstention constructive. (M. Mathieu Darnaud s'amuse.)
Nous avons beaucoup évolué sur le sujet : sans les initiatives bonapartistes du ministre, les élus seraient encore à en discuter. Ce texte les force à s'entendre - c'est sa seule plus-value.
Je me souviens d'une séance du conseil départemental en 1978, sous la présidence de Lucette Michaux-Chevry ; le contrôle de légalité n'existait pas, le préfet faisait les appels d'offres. Je ne sous-estime pas la responsabilité de nos élus ; les communes ont délégué aux syndicats, aux intercommunalités, les opérateurs ne s'entendaient pas... et l'État restait spectateur de ce désordre et finançait, via le Fonds national de développement des adductions d'eau potable (FNDAE).
Avec la décentralisation, il y a eu, c'est vrai, de la gabegie, des relations incestueuses, de la corruption. Nous sommes tous coupables.
Ce texte est insuffisant, mais nécessaire pour forcer un des cinq établissements publics à siéger effectivement.
Les opérateurs cumulent 193 millions d'euros de dettes. M. le ministre a eu la générosité de dire que 144 millions d'euros de dettes seraient repris. Au 31 décembre 2019, il y avait 81 millions d'euros de dette bancaire. Mais il y a aussi 11 millions d'euros de dette fiscale.
Le SIAEAG emploie 153 salariés. M. le ministre assure qu'il n'y aura pas de licenciements secs, mais les syndicats n'y croient pas. Revoyons-nous pour discuter d'un plan d'apurement des dettes.
M. le président. - Il faut conclure.
M. Victorin Lurel. - Trouvons une solution pérenne.
M. Mathieu Darnaud . - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Qu'il me soit d'abord permis de saluer le travail accompli par notre rapporteure. Ce texte était nécessaire : il y avait urgence, même s'il nous faudra y revenir, sur les financements notamment, même si l'État assure qu'il sera au rendez-vous.
Le Sénat a essayé de trouver des assouplissements ; son travail, je le crois, sera salué comme pragmatique et, surtout, utile. Ainsi de la possibilité de déroger à la clé de répartition financière, de la composition de la commission de surveillance, de l'évaluation de la possibilité d'une tarification sociale.
Je partage les inquiétudes de M. Bonnecarrère : je me méfie des structures qui associent toutes les strates des collectivités, au détriment de la prise de décision et de l'agilité.
Le groupe Les Républicains votera ce texte, en espérant qu'il apportera une réponse aux usagers guadeloupéens.
Ce n'est pas la première fois que nous parlons de l'eau au Sénat, et pas la dernière. (Mme Françoise Gatel le confirme.) Je ne doute pas que nous y reviendrons dans les prochaines semaines. Le Sénat trouve toujours des solutions ! (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC)
La discussion générale est close.
M. le président. - Conformément à l'article 42, alinéa 12, du Règlement, je mets aux voix l'ensemble de la proposition de loi dans la rédaction résultant du texte élaboré par la commission mixte paritaire.
La proposition de loi est adoptée.
Rappels au Règlement
Mme Nathalie Goulet . - Mon rappel au Règlement se fonde sur l'article 25 de notre Règlement, relatif à l'organisation de nos travaux. Il reste plus de cent amendements à examiner au texte sur les principes de la République, dont l'examen a été haché. Est-il envisagé d'ouvrir le vendredi ? Je ne sais pas si nous serons en mesure de terminer l'examen du texte ce soir sans brader le traitement de certains sujets extrêmement importants. (Applaudissements sur les travées du groupe UC)
M. Laurent Burgoa. - Absolument.
M. le président. - Nous ne pouvons préjuger de la vitesse de l'examen des 155 amendements restant en discussion. Si l'examen n'est pas achevé ce soir, la séance sera ouverte demain.
M. Jean-Pierre Sueur . - Il faut aussi songer à l'organisation de nos vies de sénateurs. La semaine dernière, nous avons déjà tenu séance le vendredi ; mais nous sommes nombreux à avoir des rendez-vous prévus demain. Le groupe SER n'est donc pas favorable à une ouverture demain. Le cas échéant, reprenons la discussion la semaine prochaine.
M. le président. - Un point sera fait avec la commission des lois en début d'après-midi ; nous risquons de siéger tard ce soir. Acte est donné de vos rappels au Règlement.
Mme Catherine Di Folco, vice-présidente de la commission des lois. - Je ne crois pas que le président de la commission des lois me contredira : nous ne souhaitons pas ouvrir la séance demain. Il appartient à chacun de mesurer la durée de ses interventions. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; Mme Françoise Gatel applaudit également.)
Réforme de la formation des élus locaux (Procédure accélérée)
Discussion générale
Mme Jacqueline Gourault, ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales . - La formation des élus locaux est essentielle au bon fonctionnement de la démocratie. En 2015, vous avez adopté la proposition de loi portée par M. Jean-Pierre Sueur et moi-même sur le droit individuel à la formation des élus (DIFE).
Ces derniers tirent leur légitimité du seul suffrage universel, mais doivent aussi maîtriser des dossiers d'une complexité croissante. Il faut qu'ils soient mieux armés pour l'exercice de leurs fonctions, avec deux principes : la pluralité de l'offre de formation, qui doit couvrir des aspects publics et techniques, et la qualité des contenus.
Le retour à la vie professionnelle à l'issue d'un mandat est en outre parfois difficile.
Fin 2019, le Parlement, dans la loi Engagement et proximité, a habilité le Gouvernement à légiférer par ordonnance sur le sujet.
Après un rapport d'inspection préoccupant, nous avons lancé une vaste concertation avec les associations nationales d'élus et les organismes de formation agréés, qui a conduit à un projet d'ordonnance ayant fait l'objet d'un avis favorable à l'unanimité du Conseil national d'évaluation des normes.
M. Alain Richard. - Ce n'est pas si fréquent !!
Mme Jacqueline Gourault, ministre. - Les organismes de formation doivent disposer d'un agrément qui évite les dérives.
La formation des élus est financée par deux dispositifs complémentaires. Depuis 1992, les collectivités territoriales doivent prévoir une enveloppe équivalente à 2 % des indemnités - soit 34 millions d'euros par an. Mais souvent, les petites communes n'en ont pas les moyens.
Depuis 2019, les élus ont un droit individuel à la formation de 20 heures par an - soit 16 millions d'euros.
Nous constatons des dérives : prix élevé, faible nombre d'élus formés, concentration des organismes, déficit très important.
L'ordonnance conforte le dispositif de financement par les collectivités. Les intercommunalités pourront participer au financement des formations des élus de petites communes sans en prendre la compétence. Une collectivité pourra abonder le DIFE de ses élus.
Certains organismes indélicats ont présenté à tort leurs formations comme gratuites alors qu'elles étaient de plus en plus chères. Le fait de passer d'un système par heure à un système en euros permettra aux élus de choisir le meilleur rapport qualité-prix.
La procédure d'inscription sera accélérée et les frais réduits, la gestion reposant toujours sur la Caisse des dépôts et consignations (CDC), dont je salue l'engagement.
Pour la réinsertion professionnelle, l'élu pourra cumuler les avantages acquis dans sa carrière professionnelle, le bénévolat et son mandat d'élu.
Le sauvetage du DIFE s'imposait. Pour 15,9 millions d'euros de recettes, son déficit atteignait 11,9 millions d'euros en 2019 et 23,6 millions en 2020 ! La Caisse des dépôts pourra lui consentir une avance de fonds. Le pouvoir réglementaire pourra notamment, après avis du Conseil national de la formation des élus locaux (CNFEL), moduler la cotisation ou l'enveloppe de chaque élu.
Le Gouvernement est favorable aux deux amendements déposés par la rapporteure, l'un garantissant la stabilité de l'enveloppe annuelle pour trois ans à compter de 2023 et l'autre convertissant les heures non consommées en euros après une période transitoire de six mois.
Cela s'ajoutera à l'enveloppe annuelle identique distribuée à tous les élus.
Cette réforme garantira des formations de qualité délivrées par des organismes rigoureux. Un répertoire national sera élaboré dans la concertation, avec une attention particulière aux besoins spécifiques des outre-mer, comme Mme Lana Tetuanui me l'a demandé.
Les organismes de formation des élus seront soumis aux mêmes obligations que pour la formation de droit commun, et l'agrément pourra être retiré en cas de manquement.
L'ordonnance conforte aussi la gouvernance du DIFE, en confiant au CNFEL les prérogatives de la commission DIFE, et en le faisant bénéficier d'un conseil d'orientation où seront représentés les organismes de formation. La commission des lois a apporté des amendements utiles. (Applaudissements sur quelques travées des groupes UC et Les Républicains ; M. Jean-Pierre Sueur applaudit également.)
Mme Françoise Gatel, rapporteur de la commission des lois . - Ce dossier est très important. Je salue les auteurs des différentes avancées dans le domaine : Mme la ministre, Jean-Pierre Sueur en tant que ministre en 1992 et Catherine Di Folco, rapporteure sur le DIFE.
La formation des élus est essentielle pour l'exercice de leurs compétences, pour faciliter leur engagement et un retour à la vie professionnelle parfois non souhaité.
Le DIFE a été créé à l'image du droit individuel à la formation de droit commun. Je remercie la ministre et ses collaborateurs de leur travail - même si le Parlement aime peu les ordonnances.
Le DIFE souffre de plusieurs maux : il est alimenté par un prélèvement sur les indemnités des élus qui en reçoivent, à hauteur de 16 millions d'euros pour 520 000 élus éligibles - la collecte est donc trop faible ; sans vouloir critiquer les organismes de formation, la qualité des formations dispensées n'est souvent pas proportionnelle à leur coût - et vice versa.
L'enveloppe a été asséchée par quelques organismes qui ont mis beaucoup d'énergie à offrir des formations, et le déficit s'élève à 24 millions d'euros, soit davantage que les 16 millions d'euros de collecte.
Que chaque élu ait son enveloppe, avec une plateforme unique, améliorera la situation. Madame la ministre, la CDC devra réduire ses frais de gestion. (M. Jean-Pierre Sueur renchérit.) Il faut aujourd'hui cinquante personnes pour gérer 16 millions d'euros ; demain, il en faudra vingt.
Nous proposons enfin un meilleur contrôle des formations. Il doit y avoir un référentiel et une évaluation des formations. Chaque élu doit pouvoir en apprécier le sérieux avant de choisir.
Quand vous signez un contrat de formation, vous devez savoir qui l'assurera. La sous-traitance doit être limitée au second rang - sauf exception dûment justifiée.
Autre problème, nous avons une consommation cyclique des crédits de DIFE, avec une concentration en fin de mandat. Or nous manquons de visibilité. Il est indispensable de connaître le montant des crédits en euros dont on dispose à un horizon de trois ans : ce sera le cas à partir de 2023.
Jusqu'à présent, les élus cumulaient vingt heures de DIFE par an. À partir de juillet, ce droit sera calculé en euros. Merci, madame la ministre, d'avoir accepté un système de conversion qui ne réduira pas les droits acquis.
Nous proposons le cumul des droits tout en le plafonnant. Nous avons conforté le CNFEL, qui exercera sa vigilance sur les décisions de Mme la ministre. Je veux saluer le travail réalisé par les collègues de chaque groupe. (Applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains ; M. Alain Richard applaudit également.)
M. Antoine Lefèvre . - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) J'ai présidé l'Union des maires de mon département, l'Aisne, pendant plusieurs années. La formation des élus en était l'un des principaux dossiers car le besoin d'ingénierie a augmenté. Nous avons ainsi accompagné les 816 maires de l'Aisne avec des sessions de formation qui ont rencontré un grand succès.
J'ai consacré en 2012 un rapport de la délégation aux collectivités territoriales - que vous présidiez alors, madame la ministre - exposant une quinzaine de propositions dont bon nombre ont été mises en oeuvre.
En 2018, avec Michelle Gréaume et François Bonhomme nous avons remis, comme dirait Boileau, l'ouvrage sur le métier avec un nouveau rapport sur le sujet.
La formation des élus est un serpent de mer. C'est un défi crucial, car elle permet de compenser les inégalités de départ et de démocratiser les fonctions électives.
Elle permet aussi de les préparer à l'après mandat, quand plus personne n'envisage une carrière d'élu à vie.
Fin 2019, décision fut prise de légiférer par ordonnance. Nous l'avons regretté ; nous avons perdu un temps précieux.
Les dispositifs doivent faciliter l'accès de la formation à tous, qu'ils soient urbains ou ruraux, de la majorité ou de l'opposition.
Notre groupe votera pour cette avancée essentielle. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. Mme Françoise Gatel, rapporteur, applaudit également.)
M. Dany Wattebled . - La France compte 510 000 élus locaux ; pour faire face à leurs responsabilités, ils doivent être formés. Ils doivent aussi être accompagnés dans leur réinsertion professionnelle après leur mandat.
Depuis 1992, les collectivités territoriales doivent consacrer l'équivalent de 2 % des indemnités des élus à leur formation.
Depuis 2015, le fonds DIFE est abondé par 1 % des indemnités, soit 11 millions d'euros annuels.
Depuis, de nombreux abus et dérives ont été constatés. La gestion par la Caisse des dépôts est scandaleuse : comment justifier un prélèvement de 20 % de frais ?
Il fallait rénover le dispositif. Ce projet de loi ratifie deux ordonnances prises sur le fondement de l'article 105 de la loi Engagement et proximité pour garantir le financement du DIFE et en améliorer la qualité et la gouvernance.
La commission a rétabli le cumul des droits à formation des élus sur toute la durée du mandat ; elle a aussi permis à l'État ou à Pôle Emploi d'abonder les formations à la reconversion professionnelle.
Il fallait aussi renforcer le contrôle des organismes de formation, notamment en soumettant la sous-traitance à un encadrement par les organismes agréés : elle devra en outre être justifiée et sera interdite à partir du deuxième rang.
Le groupe Les Indépendants votera pour cette réponse bienvenue aux dysfonctionnements actuels.
Mme Raymonde Poncet Monge . - Le problème est simple à énoncer, mais complexe à résoudre : mieux et davantage former les élus.
Les moyens sont trop faibles et mal utilisés. Ce texte était nécessaire ; il est insuffisant. Les deux ordonnances ratifiées encadrent la formation juridiquement, financièrement et qualitativement.
Un premier dispositif, entré en vigueur en 1992, est sous-utilisé : près de deux tiers des collectivités territoriales n'utilisent pas ou peu les crédits budgétés. Le second dispositif, en vigueur depuis 2015, permet un cumul des droits sur cinq ans.
Il y a eu des abus : en 2019, deux organismes ont capté 40 % du financement du DIFE. Il y a des inégalités dans l'accès à la formation selon le territoire, la taille des communes, l'appartenance des élus ou non à la majorité. La commission a introduit une visibilité à trois ans : cela est bienvenu.
La rationalisation des frais de gestion de la Caisse des dépôts est également une avancée.
Le texte crée de nouvelles obligations qui devraient mettre fin aux dérives sur la qualité.
Le coût moyen des formations professionnelles dans le privé via le compte personnel de formation (CPF) est de 1 200 euros ; pour les élus, le montant annuel du DIF est de 700 euros. Mon groupe restera vigilant sur l'encadrement financier.
Nous regrettons le recours aux ordonnances, mais les mesures prises sont nécessaires. Ce n'est qu'un début. Malgré les réserves sur le fond et sur la forme, le GEST votera ce texte. (Mme le rapporteur s'en réjouit.)
M. Thani Mohamed Soilihi . - On dénombre environ 500 000 élus locaux en France. Face à la complexité croissante que requiert l'exercice de leur mandat et faciliter leur reconversion, deux dispositifs ont été introduits, en 1992 par Jean-Pierre Sueur, et en 2015 par ce dernier et vous-même, madame la ministre.
Pourtant, dans la pratique, seule une poignée d'élus des plus grandes communes a pu se former.
Une refonte du système était nécessaire ;
L'article 105 de la loi Engagement et proximité a habilité le Gouvernement à prendre les ordonnances nécessaires dans un délai de neuf mois. Le rapport de l'Inspection générale des affaires sociales (IGAS) et de l'Inspection générale de l'administration (IGA) a confirmé l'urgence à agir.
Ces ordonnances, nous les examinons aujourd'hui avec quelque retard à cause de la crise sanitaire ; elles faciliteront l'accès à la formation grâce à une plateforme pour mieux visualiser ses droits, à un décompte en euros et non plus en heures et à un meilleur recouvrement, via un prélèvement à la source des cotisations des élus.
Ces ordonnances moralisent également le système, avec une rationalisation de la gestion par la CDC et une lutte contre les abus des organismes.
La commission, qu'il faut féliciter pour son travail, a voté un amendement de M. Richard pour une sortie plus douce du système en vigueur.
La formation est particulièrement importante dans les collectivités d'outre-mer, dont les ressources en ingénierie sont plus modestes - surtout dans les collectivités territoriales récentes comme Mayotte - et l'offre de formation plus limitée.
Le groupe RDPI votera volontiers ce texte. (Mme le rapporteur et M. Jean-Pierre Sueur applaudissent.)
Mme Nathalie Delattre . - Ce texte est issu d'une habilitation quelque peu forcée, obtenue dans le cadre de la loi Engagement et proximité. Vous êtes - Covid oblige - un peu en retard, madame la ministre. Je salue la qualité des échanges avec le cabinet du ministre Sébastien Lecornu, puis avec le vôtre.
La réforme partait d'un double échec. Le rapport de l'IGAS et de l'IGA a été explicite sur les organismes peu scrupuleux qui, croyant trouver un nouvel Eldorado, ont essoré le système. Échec aussi de la Caisse des dépôts, qui affiche des frais de gestion injustifiables.
Vous êtes allée, madame la ministre, plus loin que l'habilitation. La portabilité des droits dans le CPF, sans aller jusqu'à créer un vrai statut de l'élu, constitue un pas bienvenu dans cette direction.
J'ai une divergence avec vous sur le cumul de DIFE. Tout ne se joue pas lors du premier mandat. Je ne vois pas ce qui s'oppose à un cumul au-delà, d'autant que vous proposez un amendement pour le plafonner.
Il conviendra d'actualiser fréquemment le référentiel de formation. J'étais inquiète quant à l'adaptabilité du référentiel aux nouvelles problématiques. C'était un équilibre à trouver entre les nécessités de l'encadrement et de la souplesse.
Sur l'intercommunalisation, le Gouvernement a répondu à nos demandes.
Il fallait aussi renforcer le contrôle des organismes de formation. Quels seront les moyens ? Quelle sera la procédure d'agrément ?
La Caisse des dépôts devra rendre des comptes sur sa gestion. C'est un point dur sur lequel nous ne devons pas céder. Le délai de sept jours pour répondre à une demande d'inscription me semble difficile à tenir. Le RDSE votera cette réforme si nous parvenons aujourd'hui à un compromis. (Applaudissements sur les travées du RDSE)
Mme Michelle Gréaume . - Les objectifs des ordonnances - méthode que nous désapprouvons - étaient ambitieux : le résultat de ce travail à huis clos est décevant. Certaines mesures sont insuffisantes ou créent la confusion. La commission a adopté des amendements bienvenus, renforçant les obligations des organismes de formation et permettant un abondement par les collectivités du DIFE, mais cela ne lève pas les inquiétudes : comment les communes qui ne font pas face aujourd'hui à leurs obligations de formation pourraient-elles le financer ?
Cela ne fera que renforcer les inégalités entre les collectivités territoriales, donc entre les élus. L'objectif de la loi ne pourra pas être atteint sans moyens nouveaux. Le DIFE est déficitaire, alors que moins de 3 % des élus en bénéficient. Qu'en sera-t-il demain ?
Les frais de gestion de 25 % de la CDC seront-ils revus à la baisse ? Depuis 1992, les compétences des collectivités territoriales sont plus techniques. Nous déplorons que les obligations de formation soient sous-exécutées par les communes, dont plus de 50 % n'ont engagé aucune dépense à ce titre en 2018.
Les communes de plus de 200 000 habitants ont consacré l'équivalent de 1,9 % des indemnités à la formation, contre 0,4 pour celles de moins de 500 habitants - pour ces dernières, le coût des formations peut s'avérer prohibitif. Leurs élus préfèrent souvent consacrer leurs maigres ressources à d'autres dépenses d'intérêt général.
Le groupe CRCE propose des dispositions spécifiques pour celles-ci.
Depuis 2015, les élus peuvent recevoir des formations sans lien avec leurs fonctions, ce qui facilite leur réinsertion. C'est indispensable si nous ne voulons pas réserver l'élection aux élites et aux technocrates.
Il y a un déséquilibre entre formations technique et politique ; les formations à la reconversion sont très peu utilisées.
Le groupe CRCE s'abstiendra sur ce texte auquel le Parlement aurait dû être associé.
M. Jean-Pierre Sueur . - (Applaudissements sur les travées du groupe SER) Lorsqu'en 1992, je présentais ici même au nom du Gouvernement de l'époque la première loi sur les conditions d'exercice des mandats locaux, j'étais loin de me douter que nous y reviendrions trois décennies plus tard.
À l'époque, il n'y avait aucun droit spécifique à la formation pour les élus locaux - pas plus que de droit à la retraite, d'ailleurs.
Quand Jean-Pierre Bel organisa les États généraux de la démocratie locale, il fit appel à une sénatrice et à un sénateur dont le travail aboutit à deux propositions de loi, la première créant un conseil d'évaluation des normes applicables aux collectivités, la seconde portant sur l'exercice des mandats locaux.
C'était nécessaire, cependant ce dispositif doit être mieux encadré, en raison des dérives constatées.
Le groupe SER souscrit donc pour l'essentiel à ce projet de loi, qu'il votera.
M. Kerrouche reviendra sur la question de l'agrément. En 1992, je n'étais pas favorable à ce que des partis politiques puissent créer des instances de formation. J'étais minoritaire, peu suivi du côté du Gouvernement.
La procédure d'agrément doit être rigoureuse sur les compétences des organismes, leur indépendance de gestion, la pluralité et le coût des formations.
Je ne serai pas choqué que des agréments soient retirés, puisque c'est de l'argent public et une mission de service public. Le recours à la formation est faible : 3 % des élus seulement. Le coût est soixante fois plus élevé pour les élus régionaux que pour les élus municipaux ; et 50 % des dépenses du DIFE bénéficient à 14 % des bénéficiaires. La réforme est nécessaire.
Le pragmatisme, c'est le recours à l'intercommunalité car on ne peut pas demander davantage aux communes. (Applaudissements sur les travées du groupe SER)
M. Philippe Bonnecarrère . - La formation des élus est une question en clair-obscur. Le groupe UC votera ce texte.
Je salue le travail de la ministre et de ses équipes, qui ont fait preuve de bonne volonté après le rapport sévère de l'IGA en janvier 2020, mais aussi de la rapporteure qui améliorera le texte par deux amendements auxquels le Gouvernement sera favorable.
Le Sénat n'aime pas les ordonnances mais vous n'en avez pas abusé, madame la ministre.
La situation financière est préoccupante. Nous réussissons à créer des déficits partout, y compris pour le régime du DIFE, avec une performance de 24 millions d'euros de déficit.
Environ 3 % des élus locaux ont bénéficié d'une formation alors que le besoin est très important, notamment en raison de la technicité des sujets. Étonnamment, il y a peu de demandes. Nous le constatons tous, localement, lorsque nous organisons des sessions.
Le DIFE répond cependant à un fort besoin de reconversion professionnelle individuelle, non tant parce que les élus seraient déstabilisés en fin de mandat, mais souvent parce qu'ils ont découvert des champs passionnants dans la vie locale et souhaitent aller plus loin.
Les maires du Tarn m'ont alerté sur l'évolution des demandes de formation : des formations en coaching ou en médiation ont remplacé les formations au droit de l'urbanisme d'antan...
Les EPCI sont le bon niveau pour prévoir des formations. N'étant pas spécialiste, je ne comprends pas très bien la séparation marquée entre la formation des élus et celle des agents. Il y a de vraies compétences au Centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT).
La plateforme numérique du DIFE est proche de celle du privé. Il serait plus judicieux de pouvoir cumuler les différents droits à la formation, pour donner le maximum de chances de reconversion aux élus. (Applaudissements sur les travées du groupe UC)
M. François Bonhomme . - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)
La formation est un enjeu essentiel pour les élus et les agents des collectivités. Le dispositif actuel est insatisfaisant, et la réforme attendue.
La loi du 31 mars 2015 a doublé le droit à la formation des élus mais cela reste insuffisant. Moins de 3 % des élus locaux suivent une formation et les collectivités territoriales ne déboursent que la moitié des sommes budgétées. Le système souffre de nombreux dysfonctionnements.
Le système dysfonctionne, avec une sous-exécution chronique de dépenses potentielles non plafonnées, et des ressources plafonnées, ce qui fragilise l'équilibre financier. De nombreux organismes peu scrupuleux ont abusé de la sous-traitance avec des tarifs exorbitants pour une qualité pas toujours avérée.
Ces défaillances justifient une réforme, qui doit avoir plusieurs objectifs : créer un droit à la formation tout au long de la vie pour les élus locaux ; faciliter leur accès à la formation ; créer un référentiel unique des formations avec une possibilité de mutualiser le financement entre communes et intercommunalités ; enfin, instaurer une transparence sur la qualité et la disponibilité des formations, avec un contrôle accru sur les organismes.
La commission des lois a amélioré le dispositif en rendant les contrôles effectifs et en préservant les droits acquis.
La formation des élus est une condition indispensable de l'exercice de leur mandat. Le groupe Les Républicains votera ce texte. (Mme le rapporteur s'en félicite.)
M. Éric Kerrouche . - (Applaudissements sur les travées du groupe SER) Nous ne serions pas là sans les travaux de M. Jean-Pierre Sueur en 1992 et ceux qu'il a menés en 2015 avec Mme Jacqueline Gourault. Nous nous félicitons du texte et des améliorations apportées par la commission des lois. Nous étions arrivés au bout d'un système, un vrai statut de l'élu est nécessaire.
Malheureusement, cette réforme est trop budgétaire et va au-delà de l'habilitation à légiférer par ordonnances. Nous pouvons faire mieux.
En réponse à notre questionnaire de 2018, les élus locaux indiquaient que la formation était essentielle et qu'ils en voulaient davantage. Ils déploraient la sous-utilisation des possibilités de formation, concentrées sur quelques élus, et la sous-budgétisation par les collectivités. Les dispositions de la loi de 2015 s'appliquent mal ou pas du tout : 83 % des répondants ignorent les possibilités offertes, notamment d'aide à la validation des acquis de l'expérience.
En France, deux catégories d'élus s'opposent : les simples conseillers et les exécutifs. Ces derniers sont eux-mêmes divisés, entre ceux des petites et ceux des grandes communes. Les premiers, notamment dans les zones rurales, ne peuvent accéder aux formations pourtant nécessaires faute de moyens et d'ingénierie.
Les élus des communes moyennes reçoivent, eux, des formations techniques précises sur les déchets et la mobilité ; ils devraient pouvoir bénéficier d'une variabilité du prélèvement sur leur indemnité et du quota d'heures disponibles. Ce serait nécessaire pour plus de démocratisation.
La formation participe de la professionnalisation. Il faut aller enfin vers un vrai statut de l'élu, question qui n'a été traitée qu'en creux dans ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe SER)
M. André Reichardt . - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Les ordonnances étaient largement attendues par les élus locaux. Elles visent juste en renforçant le droit des élus à la formation et l'assainissement budgétaire du fonds. Même si le champ de l'habilitation ne semble pas avoir été totalement respecté, la commission des lois approuve la ratification.
Le plafond du fonds DIFE a explosé, il fallait agir rapidement. La conversion des droits d'heures en euros devrait réduire le prix des formations. Les collectivités territoriales pourront, après délibération, abonder elles-mêmes le DIFE, ainsi que les élus avec leur CPF.
La mutualisation des dépenses de formation à l'échelle intercommunale sera très utile pour les petites communes. En as de déséquilibre, la Caisse des dépôts pourra apporter une avance de trésorerie.
La commission des lois propose plusieurs améliorations : cumul du DIFE sur toute la durée du mandat ; élargissement des possibilités d'abondement du fonds à l'État, à Pôle Emploi et aux autres collectivités pour la reconversion professionnelle ; activation des droits dès la première année. Il est très important qu'un élu local bénéficie au plus vite des compétences liées à l'exercice de son mandat. Des formations individualisées sont très importantes. Il reste à créer une plateforme dématérialisée sur la formation.
Nous appelons à un statut de l'élu. Gageons que la réforme tant attendue de la formation des élus fera de nombreux heureux.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. - Je remercie chacun des intervenants. Le Gouvernement partage l'objectif de réduire les frais de gestion de la Caisse des dépôts. J'ai bien noté les préoccupations sur les petites communes ; les intercommunalités apporteront une contribution financière.
La procédure d'agrément sera considérablement renforcée, avec un nouveau critère de régularité de gestion de l'organisme. La Cour des comptes pourra transmettre ses alertes aux préfets.
Un consensus se dégage pour maintenir deux systèmes différents de formation pour les agents et les élus, l'un reposant davantage sur des composantes professionnelles, et l'autre sur des missions politiques.
Le cumul entre DIFE et CPF ne sera autorisé que pour la réinsertion professionnelle, mais accessible par un simple clic.
Le travail avec la commission a été très positif, dans un esprit d'équilibre. Cette réforme nécessaire renforcera l'effectivité de ce droit essentiel aux élus.
La discussion générale est close.
Discussion des articles
ARTICLE PREMIER
Mme Hélène Conway-Mouret . - Je souhaite associer à cette discussion les 443 conseillers des Français de l'étranger, élus à part entière des deux millions de nos compatriotes dans cette situation, qui sont attachés à bien exercer leur mandat.
La formation est essentielle pour tous ceux qui siégeront pour la première fois en juin prochain. Le décret du 18 février 2014 prévoit une formation pour les conseillers consulaires mais il n'est pas suffisamment appliqué. La loi Engagement et proximité du 27 décembre 2019 l'a renforcé. Pilotées par le ministère de l'Europe et des affaires étrangères, les formations devraient être offertes à distance ou lors des sessions de l'assemblée des Français de l'étranger. Il faut qu'elles se tiennent au plus tard à la rentrée prochaine, et qu'elles soient réalisées en présentiel dès que possible.
Ces élus devraient disposer également d'un droit à la formation par tout autre organisme agréé. Pourquoi seraient-ils les seuls à ne pouvoir bénéficier que d'une formation dispensée par une seule administration ?
M. Christian Klinger . - La mise en place du DIFE a été une excellente initiative, aidant à l'exercice des fonctions.
Mais il a engendré des abus qui justifient les modifications proposées. Malheureusement, le Gouvernement a seul tenu la plume de ces ordonnances, au détriment des élus des communes rurales.
Or les formations locales des associations départementales de maires sont du cousu main, pour un coût inférieur à celles des grands cabinets ; c'est ce qui explique leur succès. Avec votre rédaction, les associations risquent d'être victimes de la préférence pour les formations délivrées par les grands cabinets. Pourquoi recentraliser ? L'Association des maires du Haut-Rhin, que je préside, préfère recourir à un avocat strasbourgeois qui connaît le droit local plutôt qu'à un avocat parisien. Ces associations départementales sont agréées. Encadrer le tarif horaire des formations est positif. Madame la ministre, faites-leur confiance, n'allez pas trop vite ni trop fort. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)
Mme Michelle Gréaume . - Il faut renforcer les lois de 1992 et 2015. Les propositions du Gouvernement doivent être encadrées. Nous ne comprenons pas que notre amendement consacrant les deux voies de formation, et qui ne créait pas de charge financière supplémentaire, ait été déclaré irrecevable.
L'article premier est adopté.
ARTICLES ADDITIONNELS après l'article premier
M. le président. - Amendement n°6 rectifié, présenté par M. Klinger, Mme Belrhiti, MM. Burgoa, Courtial, Paccaud et Pellevat, Mme Deromedi, MM. Cardoux et Meurant, Mmes Dumont et Noël, MM. Bonhomme et Lefèvre, Mmes Deroche et Lassarade, MM. Milon, Mouiller, Laménie, Rapin et Brisson, Mme Muller-Bronn, MM. Savary, Rietmann, Perrin et D. Laurent, Mmes Garnier et Drexler, MM. Bouchet, B. Fournier, Rojouan et Sautarel, Mme Gosselin, M. Cuypers et Mme Gruny.
Après l'article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au second alinéa du I de l'article L. 1221-4 du code général des collectivités territoriales, les mots : « à un montant fixé par décret » sont remplacés par les mots : « à un seuil fixé à 200 000 euros ».
M. Christian Klinger. - Cet amendement, cosigné par trente-trois sénateurs, fixe le seuil à 200 000 euros pour les organismes agréés, au lieu de renvoyer sur ce point à un décret - qui retiendrait 100 000 euros, selon les rumeurs - afin de promouvoir les associations départementales dans la formation des élus locaux.
Les associations départementales, très mobilisées, ont été quelque peu oubliées par l'Association des maires de France (AMF). (Mme Jacqueline Gourault s'en étonne.) Si cependant le seuil de 200 000 euros apparaissait dans le décret, nous serions satisfaits, et cet amendement s'autodétruirait. Ce n'est pas une mission impossible... (Sourires ; Mme Elsa Schalck applaudit.)
Mme Françoise Gatel, rapporteur. - Je rends hommage au travail de ces associations départementales. Nous avons travaillé en étroite concertation avec les assemblées d'élus.
Le Sénat n'aime pas beaucoup les seuils, surtout en l'absence d'étude d'impact ! Ils ne sont pas pertinents dans le temps et relèvent du niveau réglementaire.
Je considère cet amendement comme un appel. Retrait ou avis défavorable.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. - J'ai présidé une association départementale de maires. Nous allons poursuivre la concertation pour fixer un seuil dans un décret. Nous faisons confiance aux élus locaux. Je ne peux croire que l'AMF ne vous ait pas consultés. (M. Christian Klinger semble sceptique.)
Les seuils fixés dans la loi sont toujours politiques... Il faut souvent y revenir, or le décret favorise la souplesse, la négociation et l'adaptation. Retrait ?
M. Christian Klinger. - Il n'était donc pas impossible de dialoguer. Cet amendement s'autodétruit !
L'amendement n°6 rectifie est retiré.
M. le président. - Amendement n°4, présenté par Mme Gréaume et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Après l'article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le I de l'article L. 2123-14-1 du code général des collectivités territoriales est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Le montant prévisionnel des dépenses de formation ne peut être inférieur à 2 % du montant total des indemnités de fonction qui peuvent être allouées aux membres du conseil municipal des communes membres ayant transféré la compétence. Le montant réel des dépenses de formation ne peut excéder 20 % du même montant. L'établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre fixe le montant entre ces deux seuils et fait connaître sa base de calcul. »
Mme Michelle Gréaume. - Le Gouvernement veut faciliter la mutualisation du droit à la formation à l'échelle intercommunale. Cela peut être une réponse aux difficultés des communes. Dans une commune de moins de 2 000 habitants, la dépense moyenne de formation par élu n'est que de 9 euros, contre 376 euros dans les communes de plus de 10 000 habitants.
Les relations entre EPCI et petites communes freinent parfois la mutualisation, les élus craignant une régression de leurs droits. Cet amendement reprend le dispositif prévu pour les communes, afin de sécuriser juridiquement les modalités financières des mutualisations.
Mme Françoise Gatel, rapporteur. - Cet amendement met en avant l'intérêt de la mutualisation pour inciter le maximum d'élus à se former.
Madame la ministre, faites preuve de souplesse en imaginant des mutualisations qui ne conduiraient pas à des transferts automatiques de compétences.
La loi prévoit que le transfert de compétences emporte le transfert des obligations : l'intercommunalité devra inscrire les dépenses nécessaires à ces formations. L'amendement semble satisfait : la ministre peut-elle le confirmer ? Retrait.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. - Soit il y a transfert, et les intercommunalités ont les mêmes obligations de financement, soit il n'y a pas transfert et l'EPCI peut participer au financement.
L'amendement n°4 est retiré.
M. le président. - Amendement n°3, présenté par Mme Gréaume et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Après l'article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La deuxième phrase du deuxième alinéa de l'article 10 de l'ordonnance n°2021-45 du 20 janvier 2021 portant réforme de la formation des élus locaux est ainsi rédigée : « Ce conseil est composé de personnalités qualifiées et, pour moitié au moins, d'élus locaux représentatifs de la diversité politique et de l'ensemble des collectivités. »
Mme Michelle Gréaume. - Le CNFEL régule le marché de la formation ; cette ordonnance renforce sa gouvernance, et la commission des lois a prévu qu'il rende un avis contraignant sur les projets de rétablissement de l'équilibre financier du fonds DIFE. Nous sommes favorables à la publication de son rapport annuel.
Nous tenons à ce que ce conseil demeure composé pour moitié d'élus locaux, afin de garantir le pluralisme politique et territorial.
Mme Françoise Gatel, rapporteur. - Dans la plupart des communes, les élus n'ont pas d'étiquette politique et n'en veulent surtout pas. (Mme Michelle Gréaume en doute.) Il appartiendra à chaque famille politique de veiller à la représentativité des membres du CNFEL, désignés par les associations d'élus. Retrait ou avis défavorable.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. - Même avis. Je m'engage à ce que le décret maintienne le minimum de 50 % d'élus.
L'amendement n°3 est retiré.
L'article premier bis est adopté.
ARTICLE PREMIER TER
M. le président. - Amendement n°7, présenté par le Gouvernement.
Après le mot :
mandat
insérer les mots :
dans la limite d'un plafond
Mme Jacqueline Gourault, ministre. - Le cumul des droits à la formation doit être concilié avec la pérennité financière du DIFE, d'où cet amendement qui introduit un plafonnement, comme pour le CPF. Sans quoi, à 700 euros par élu et 13 000 bénéficiaires, nous arriverons d'ici six ans à 54 millions d'euros de dépenses annuelles pour 16 millions d'euros de recettes.
Mme Françoise Gatel, rapporteur. - Initialement, l'ordonnance ne prévoyait pas le cumul des droits - oubli involontaire réparé par la vigilance du Sénat. Il faut faire preuve de responsabilité, sachant que le système doit être assaini. En fin de mandat, les fonds sont beaucoup plus sollicités.
Avis favorable donc, en soulignant que ce plafond ne doit pas être un plancher.
L'amendement n°7 est adopté.
L'article premier ter, modifié, est adopté.
ARTICLE PREMIER QUATER
M. le président. - Amendement n°8, présenté par Mme Gatel, au nom de la commission.
I. - Alinéa 3
Supprimer cet alinéa.
II. - Alinéa 4
Remplacer les mots :
des droits individuels
par les mots :
du droit individuel
Mme Françoise Gatel, rapporteur. - MM. Reichardt et Bonnecarrère verront dans cet amendement de tuyauterie une réponse à leurs questions.
La collectivité peut abonder les droits de l'élu en toute transparence, et les droits acquis à titre personnel peuvent augmenter le DIFE. Le CPF est géré par le ministère du Travail : il faut une bonne coordination.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. - Avis favorable.
L'amendement n°8 est adopté.
L'article premier quater, modifié, est adopté.
ARTICLE PREMIER QUINQUIES
M. le président. - Amendement n°9, présenté par Mme Gatel, au nom de la commission.
I. - Alinéa 1
1° Remplacer les mots :
Après le huitième alinéa
par les mots :
Le 3°
2° Remplacer les mots :
, il est inséré
par les mots :
est complété par
II. - Alinéa 2
Après les mots :
à la formation
supprimer la fin de cet alinéa.
L'amendement rédactionnel n°9, accepté par le Gouvernement, est adopté.
L'article premier quinquies, modifié, est adopté.
ARTICLES ADDITIONNELS après l'article premier quinquies
M. le président. - Amendement n°10 rectifié, présenté par Mme Gatel, au nom de la commission.
Après l'article 1er quinquies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - La première phrase du premier alinéa des articles L. 2123-12-1, L. 3123-10-1, L. 4135-10-1, L. 7125-12-1, et L. 7227-12-1 du code général des collectivités territoriales, dans leur rédaction issue de l'article 6 de l'ordonnance n°2021-45 du 20 janvier 2021 portant réforme de la formation des élus locaux, est complétée par les mots : « dont le montant annuel est arrêté pour une période de trois ans ».
II. - Le premier alinéa de l'article L. 121-37-1 du code des communes de la Nouvelle-Calédonie est ainsi modifié :
1° Après le sigle : « CFP », sont insérés les mots : « , dont le montant annuel est arrêté pour une période de trois ans. » ;
2° Le mot : « et » est remplacé par les mots : « Il est ».
III. - Le quatrième alinéa de l'article L. 1621-3 du code général des collectivités territoriales, dans sa rédaction issue de l'article 8 de l'ordonnance n°2021-45 du 20 janvier 2021 portant réforme de la formation des élus locaux, est ainsi modifié :
1° Après la première phrase, est insérée une phrase ainsi rédigée : « Cet équilibre est apprécié sur une période de trois ans. » ;
2° Au début de la deuxième phrase, les mots : « garantir cet équilibre » sont remplacés par les mots : « le garantir ».
IV. - Le présent article entre en vigueur le 1er janvier 2023.
Mme Françoise Gatel, rapporteur. - Cet amendement apporte une visibilité à chaque élu sur ses droits, mais aussi aux organismes de formation.
La prévision triennale ne pourra être établie par le CNFEL de manière fiable qu'à partir de 2023, une fois le déficit de 24 millions d'euros résorbé.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. - Avis favorable.
L'amendement n°10 est adopté et devient un article additionnel.
M. le président. - Amendement n°5 rectifié, présenté par MM. Wattebled, Decool, A. Marc, Guerriau et Chasseing, Mme Paoli-Gagin, MM. Verzelen, Menonville et Capus, Mme Mélot, MM. Lagourgue, Daubresse, Longeot et Bonhomme, Mme Borchio Fontimp, M. Lefèvre, Mme Saint-Pé, MM. Milon, Laménie et Klinger, Mme Dumont et M. Houpert.
Après l'article 1er quinquies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après la troisième phrase du onzième alinéa de l'article 8 de l'ordonnance n°2021-45 du 20 janvier 2021 portant réforme de la formation des élus locaux, est insérée une phrase ainsi rédigée : « Sans préjudice des dispositions du présent article, le conseil national de la formation des élus locaux mentionné au même article L. 1221-1 formule une proposition de montant minimum garanti de la valeur des droits individuels à la formation. »
M. Dany Wattebled. - Le retour à l'équilibre d'un fonds déjà déficitaire de 25 millions d'euros en 2020 peut entraîner une baisse substantielle de la valeur des droits à la formation si des garanties ne sont pas fixées.
Les ajouts de la commission sont bienvenus. Cet amendement complémentaire charge le CNFEL d'établir un montant minimal garanti de la valeur des droits individuels à la formation des élus locaux, pour plus de visibilité. Ce montant sera communiqué au ministère des collectivités territoriales afin qu'il en tienne compte dans le cumul annuel des droits.
Mme Françoise Gatel, rapporteur. - Nous vous avons donné satisfaction sur la prévisibilité. La Caisse des dépôts doit contribuer à l'optimisation du fonds : 20 % de frais de gestion, ce n'est plus acceptable. Je vous fais confiance, madame la ministre. L'amendement me semble satisfait : retrait ou avis défavorable.
L'amendement n°5 est retiré.
L'article premier sexies est adopté, de même que les articles premier septies et premier octies.
ARTICLE PREMIER NONIES
Mme Michelle Gréaume. - Notre amendement, déclaré irrecevable, prévoyait une formation obligatoire pour tous les élus municipaux dès la première année, et non pour les seuls élus qui ont une délégation.
M. le président. - Amendement n°11, présenté par Mme Gatel, au nom de la commission.
Alinéa 2
Remplacer les mots :
de droits individuels à la formation
par les mots :
desdits droits
L'amendement rédactionnel n°11, accepté par le Gouvernement, est adopté.
L'article premier nonies, modifié, est adopté ainsi que les articles premier decies et premier undecies.
ARTICLE PREMIER DUODECIES
M. le président. - Amendement n°12, présenté par Mme Gatel, au nom de la commission.
I. - Alinéa 3
1° Première phrase
a) Supprimer les mots :
au titre de leur droit individuel à la formation mentionné aux articles L. 2123-12-1, L. 3123-10-1, L. 4135-10-1, L. 7125-12-1, L. 7227-12-1 du présent code
b) Remplacer les mots :
qu'à la condition de justifier l'absence d'un savoir-faire particulier, d'expertise ou de capacités techniques non satisfaisants ou d'une insuffisance ponctuelle d'effectifs
par les mots :
qu'à un organisme également titulaire d'un agrément, dans la limite d'un plafond exprimé en pourcentage du montant total des frais pédagogiques de la formation, fixé par arrêté du ministre chargé des collectivités territoriales
2° Après la première phrase
Insérer une phrase ainsi rédigée :
Les prestations de son contrat ou marché peuvent toutefois être réalisées, en tout ou partie, par une personne physique non titulaire d'un agrément qui exerce à titre individuel une activité de formation.
II. - Alinéa 4, seconde phrase
Supprimer cette phrase.
Mme Françoise Gatel, rapporteur. - Madame Gréaume, la commission a proposé un module sur les compétences et le paysage institutionnel pour les élus des municipalités, des intercommunalités, des départements et des régions. Cette mesure n'induit pas de dépenses supplémentaires.
Cet amendement encadre la sous-traitance. Par ailleurs, les associations d'élus ont souligné le besoin d'expertise pointue sur une durée limitée - par exemple sur le droit de l'urbanisme et l'environnement, pour répondre aux exigences de zéro artificialisation. Cet amendement autorise le recours ponctuel à un formateur individuel. Ne soyons pas condamnés à l'inefficacité.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. - Je suis tout à fait d'accord. Nous avons besoin de spécialistes dans certains domaines : artificialisation des sols, enseignement du breton dans les écoles... (M. André Reichardt renchérit.)
M. Jean-Pierre Sueur. - Le groupe SER ne votera pas cet amendement. La première partie est excellente, qui met fin au dévoiement de la sous-traitance, mais il faut aller jusqu'au bout. Un organisme agréé peut embaucher directement toute personne ayant une compétence particulière ; le recours aux autoentrepreneurs n'est pas justifié. Nous voterons cet amendement si vous retiriez le 2° du I.
Mme Françoise Gatel, rapporteur. - Un organisme ne signera pas un contrat de travail pour deux heures de formation, mais nous serons vigilants.
L'amendement n°12 est adopté.
L'article premier duodecies, modifié, est adopté.
ARTICLE PREMIER TERDECIES
M. le président. - Amendement n°13, présenté par Mme Gatel, au nom de la commission.
Alinéa 4
Remplacer le mot :
le
par les mots :
la première occurrence du
L'amendement rédactionnel n°13, accepté par le Gouvernement, est adopté.
L'article premier terdecies, modifié, est adopté.
ARTICLE PREMIER QUATERDECIES
M. le président. - Amendement n°14, présenté par Mme Gatel, au nom de la commission.
Rédiger ainsi cet article :
I. - L'article 18 de l'ordonnance n°2021-45 du 20 janvier 2021 portant réforme de la formation des élus locaux est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Au terme de ce délai, les droits individuels à la formation comptabilisés en heures détenus par les élus locaux à cette date sont convertis en euros ou en francs CFP selon des modalités fixées par décret en Conseil d'État. Ces droits convertis n'entrent pas en compte dans le calcul du montant annuel des droits individuels à la formation des élus mentionnés au premier alinéa des articles L. 2123-12-1, L. 3123-10-1, L. 4135-10-1, L. 7125-12-1, et L. 7227-12-1 du code général des collectivités territoriales, dans leur rédaction issue de l'article 6 de la présente ordonnance, et font l'objet d'un versement qui augmente le montant des droits précités. »
II. - L'article 5 de l'ordonnance n°2021-71 du 27 janvier 2021 portant réforme de la formation des élus des communes de la Nouvelle-Calédonie est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Au terme de ce délai, les droits individuels à la formation comptabilisés en heures détenus par les élus locaux à cette date sont convertis en francs CFP selon des modalités fixées par décret en Conseil d'État. Ces droits convertis n'entrent pas en compte dans le calcul du montant annuel des droits individuels à la formation des élus mentionnés au premier alinéa de l'article L. 121-37-1 du code des communes de la Nouvelle-Calédonie, dans sa rédaction issue de l'article 2 de la présente ordonnance, et font l'objet d'un versement qui augmente le montant des droits précités. »
Mme Françoise Gatel, rapporteur. - Alain Richard, Michelle Gréaume et Cécile Cukierman se sont penchés sur la transition du système des droits en heures à celui des droits en euros.
Les élus ayant acquis des droits en heures ne doivent pas être perdants. Je ne peux vous donner de chiffres, car cela relève du domaine réglementaire, mais cet amendement offre une forme de bonus.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. - Les élus municipaux élus en 2020 et les futurs élus départementaux et régionaux pourront en bénéficier. Avis favorable.
L'amendement n°14 est adopté et l'article premier quaterdecies est ainsi rédigé.
ARTICLE ADDITIONNEL après l'article premier quaterdecies
M. le président. - Amendement n°17, présenté par le Gouvernement.
Après l'article 1er quaterdecies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'ordonnance n°2021-45 du 20 janvier 2021 portant réforme de la formation des élus locaux est ainsi modifiée :
1° Le tableau constituant le troisième alinéa de l'article 14 est ainsi rédigé :
«
DISPOSITIONS APPLICABLES |
DANS LEUR REDACTION RESULTANT DE |
L. 1221-1 |
La loi n° du ratifiant les ordonnances n°2021-45 du 20 janvier 2021 et n°2021-71 du 27 janvier 2021 portant réforme de la formation des élus locaux |
L. 1221-2 |
L'ordonnance n°2021-45 du 20 janvier 2021portant réforme de la formation des élus locaux |
L. 1221-3 et L. 1221-4 |
La loi n° du ratifiant les ordonnances n°2021-45 du 20 janvier 2021 et n°2021-71 du 27 janvier 2021 portant réforme de la formation des élus locaux |
» ;
2° La quatrième ligne du tableau constituant le troisième alinéa de l'article 15 est remplacée par trois lignes ainsi rédigées :
«
L. 1621-3 |
La loi n° du ratifiant les ordonnances n° 2021-45 du 20 janvier 2021 et n°2021-71 du 27 janvier 2021 portant réforme de la formation des élus locaux |
L. 1621-4 |
L'ordonnance n°2021-45 du 20 janvier 2021 portant réforme de la formation des élus locaux |
L. 1621-5 |
La loi n° du ratifiant les ordonnances n°2021-45 du 20 janvier 2021 et n 2021-71 du 27 janvier 2021 portant réforme de la formation des élus locaux |
» ;
3° Le tableau constituant le quatrième alinéa de l'article 16 est ainsi rédigé :
«
L. 2123-12 et L. 2123-12-1 |
La loi n° du ratifiant les ordonnances n°2021-45 du 20 janvier 2021 et n°2021-71 du 27 janvier 2021 portant réforme de la formation des élus locaux |
».
Mme Jacqueline Gourault, ministre. - C'est un amendement de coordination pour les outremers.
L'amendement n°17, accepté par la commission,est adopté et devient un article additionnel.
L'article 2 est adopté.
ARTICLE 3
M. le président. - Amendement n°15, présenté par Mme Gatel, au nom de la commission.
Alinéas 3 à 6
Remplacer ces alinéas par deux alinéas ainsi rédigés :
2° Au début du deuxième alinéa, sont ajoutées deux phrases ainsi rédigées : « Pour assurer le financement d'une formation, le droit individuel à la formation peut être complété, à la demande de son titulaire, par des abondements en droits complémentaires. Ces abondements peuvent être financés par le conseil municipal selon les modalités définies à l'article L. 121-37 du présent code. » ;
3° Le troisième alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée : « Ces abondements n'entrent pas en compte dans les modes de calcul du montant des droits individuels à la formation des élus définis au premier alinéa du présent article. »
L'amendement n°15, accepté par le Gouvernement, est adopté.
L'article 3, modifié, est adopté.
ARTICLE ADDITIONNEL après l'article 3
M. le président. - Amendement n°16, présenté par le Gouvernement.
Après l'article 3
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au premier alinéa de l'article L. 121-37-1 et aux articles L. 121-37-2 et L. 121-37-3 du code des communes de la Nouvelle-Calédonie, dans leur rédaction résultant de l'ordonnance n°2021-71 du 27 janvier 2021 portant réforme de la formation des élus des communes de la Nouvelle-Calédonie, les mots : « l'ordonnance n°2021-45 du 20 janvier 2021 portant réforme de la formation des élus locaux » sont remplacés par les mots : « la loi n° du ratifiant les ordonnances n 2021-45 du 20 janvier 2021 et n°2021-71 du 27 janvier 2021 portant réforme de la formation des élus locaux ».
Mme Jacqueline Gourault, ministre. - Cet amendement porte sur la Nouvelle Calédonie.
L'amendement n°16, accepté par la commission, est adopté et devient un article additionnel.
À la demande du Gouvernement, l'ensemble du projet de loi, modifié, est mis aux voix par scrutin public.
M. le président. - Voici le résultat du scrutin n°106 :
Nombre de votants | 345 |
Nombre de suffrages exprimés | 330 |
Pour l'adoption | 330 |
Contre | 0 |
Le Sénat a adopté.
(Applaudissements sur plusieurs travées)
La séance est suspendue à 13 h 40.
présidence de M. Pierre Laurent, vice-président
La séance reprend à 15 h 10.
Respect des principes de la République (Procédure accélérée - Suite)
M. le président. - Nous reprenons l'examen du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, confortant le respect des principes de la République.
Discussion des articles (Suite)
ARTICLE 26
M. Pierre Ouzoulias . - Ces dispositions nous plongent dans le désarroi. Un bilan complet aurait dû être fait dans l'étude d'impact des différentes formes juridiques d'exercice du culte.
Sans même parler de l'Alsace-Moselle ou de la Guyane, il y a une grande diversité de dispositifs, en France métropolitaine et outre-mer : associations diocésaines, associations 1901, associations 1905. Au lieu d'homogénéiser ces statuts sur le principe de l'article 2 de la loi de 1905, selon lequel l'État ne reconnaît ni ne subventionne aucun culte, votre texte ajoute de la complexité en introduisant dans le droit local d'Alsace-Moselle un nouveau régime d'association cultuelle et en restreignant l'accès aux prérogatives de la loi de 1905. Il y aura deux régimes 1905, selon que l'association bénéficiera du rescrit fiscal ou non.
M. Stéphane Ravier. - Toutes les religions sont une affaire d'État : les protestants avec Richelieu, les juifs avec Napoléon, les catholiques en 1905. Aujourd'hui, faute de vouloir nommer l'ennemi islamiste, vous infligez une punition collective à ces religions.
La laïcité n'est pas l'amnésie de l'histoire. Nous légiférons sous le regard bienveillant de Saint Louis ; sur le plafond de la salle des Conférences, nous voyons Sainte Clotilde et Saint Remi, Sainte Jeanne d'Arc et même Charles Martel ; dans l'ancienne chapelle des pairs de France, où se réunit la commission des affaires étrangères, les Tables de la Loi et le mariage de la Vierge. Tout nous rappelle que la France plonge ses racines dans seize siècles de chrétienté ! Les noms de nos villages, notre calendrier grégorien, l'union des Français, croyants ou non, au chevet de Notre-Dame martyrisée, tout cela montre que la France reste la fille aînée de l'Église. Rendons à César ce qui est à César et à Dieu ce qui est à Dieu, comme l'a dit un célèbre fils de charpentier.
Cet article brise l'équilibre précieux de la loi de 1905 en supprimant les prérogatives des associations mixtes et diocésaines. Il est historiquement justifié de le supprimer.
M. Julien Bargeton. - C'était long.
Mme Dominique Vérien, rapporteure de la commission des lois. - Il ne s'agit pas de remettre en cause les associations diocésaines, qui résultent d'un accord international, mais de moderniser les règles de fonctionnement des associations cultuelles régies par la loi de 1905.
Un dispositif anti-putsch est également prévu, qui s'inspire du système en vigueur chez les protestants ; beaucoup de représentants des cultes, confrontés au risque d'entrisme, se sont déclarés favorables à ce régime lors des auditions. Avis favorable.
M. Gérald Darmanin, ministre de l'intérieur. - Même avis.
M. Pierre Ouzoulias. - M. Ravier a parlé de seize siècles de christianisme. Il fait sûrement référence au baptême de Clovis. J'ai du mal à comprendre cette fascination pour des barbares germains qui ont pénétré illégalement dans l'empire romain...
La référence devrait plutôt être celle des martyrs chrétiens à Lyon en 177 - mais ils venaient de Turquie et parlaient grec ; Irénée, lui, était né à Smyrne. Le développement du christianisme en Gaule est la conséquence d'une immigration massive et incontrôlée !
Sans oublier que le fils du charpentier était juif. Il faut aussi rendre hommage aux synagogues du Ier siècle.
M. Gérald Darmanin, ministre. - En matière de références, je préfère Saint Augustin, né en Algérie. Puisse son exemple de sagesse chrétienne vous inspirer, monsieur Ravier... Avis défavorable.
L'amendement n°503 n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°562, présenté par Mmes Assassi et Cukierman, M. Bacchi, Mme Brulin, M. Ouzoulias, Mme Apourceau-Poly, M. Bocquet, Mme Cohen, M. Gay, Mme Gréaume, MM. Lahellec, P. Laurent et Savoldelli et Mme Varaillas.
Alinéa 2, première phrase
Compléter cette phrase par les mots :
, considéré comme l'accomplissement de certains rites ou de certaines pratiques organisés par des personnes réunies par une même croyance ou une même spiritualité
M. Pierre Ouzoulias. - La notion de culte ne figure pas dans la loi de 1905 ; elle a été précisée par la jurisprudence du Conseil d'État dans un arrêt du 24 octobre 1997. Nous reprenons cette définition en ajoutant la notion de spiritualité, plus adaptée que celle de croyance pour certaines religions. Cette définition aidera les juridictions administratives à définir ce qu'est un objet cultuel.
M. le président. - Amendement n°138 rectifié bis, présenté par Mme N. Delattre, MM. Artano, Bilhac et Cabanel, Mme M. Carrère, MM. Fialaire et Guérini, Mme Pantel, MM. Requier et Roux, Mme Guillotin et MM. Guiol, Gold et Corbisez.
Après l'alinéa 2
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Les associations formées pour l'exercice d'un culte, au sens de la présente loi, ont pour objet la célébration de cérémonies organisées en vue de l'accomplissement, par des personnes réunies par une même croyance religieuse, de certains rites ou pratiques.
Mme Nathalie Delattre. - Il faut renforcer notre arsenal face à la radicalisation. Allons plus loin dans la clarification, soyons rigoureux dans les termes. Une association cultuelle ne doit viser qu'à la célébration de cérémonies.
L'amendement n°357 rectifié n'est pas défendu.
Mme Dominique Vérien, rapporteure. - Nous ne sommes pas persuadés que cette définition réponde à un besoin juridique. D'ailleurs, aucun culte ne la demande. En outre, la notion de spiritualité introduite par M. Ouzoulias serait source d'incertitudes. La jurisprudence est abondante et stabilisée, ne rouvrons pas le débat.
L'amendement n 138 rectifié bis exclurait les associations diocésaines, qui ont pour spécificité de ne pas viser l'exercice du culte.
Retrait, sinon avis défavorable.
M. Gérald Darmanin, ministre. - Même avis. Ces amendements percuteraient l'équilibre des associations diocésaines, historiquement traitées comme des associations cultuelles 1905.
La République n'a jamais entendu définir ce qu'est un culte. Ce n'est pas son rôle. Des cultes, il peut s'en créer tous les jours que Dieu fait... (Sourires) Nous pourrions ici rendre un culte au Dieu Larcher. (Sourires)
De même, personne n'a jamais défini ce qu'est un ministre du culte - d'où la difficulté à calquer le modèle chrétien sur les imams...
La liberté religieuse est fondamentale : ce n'est pas à l'État de donner une définition, surtout dans un domaine où il y a tant d'innovations. Pour l'État, la croyance est une opinion.
Un culte ne suppose pas nécessairement une association cultuelle ; il peut être organisé par un groupement de fait, sans base juridique.
Prévoir que le ministère de l'Intérieur valide, tous les cinq ans, la qualité cultuelle de l'association entretient la confusion. Il n'a pas à définir ce qu'est un culte.
Mme Laurence Harribey. - Exactement.
M. Gérald Darmanin, ministre. - Sans parler des dérives, des nébuleuses...
Une telle définition ne correspond ni à l'esprit de la Déclaration des droits de l'Homme et du citoyen, ni à celui du législateur de 1905. « Le christianisme est une secte juive qui a réussi », dit-on. Qui sommes-nous pour juger de ce qu'est un culte ? Ce serait dangereux pour la République et pour la liberté de croyance.
M. Pierre Ouzoulias. - Merci, monsieur le ministre, pour la qualité de votre argumentation, dont je partage pleinement la première partie. La loi de 1905 a été pensée pour les cultes de Concordat, pas pour certaines religions extrême-orientales qui se rapprochent plutôt de la spiritualité.
En effet, il ne revient pas à l'État de définir ce qu'est un culte. Cela a-t-il encore un sens de différencier les régimes de 1901 et de 1905 ? Il y a des contentieux et la France a été condamnée au niveau européen : l'Union des athées et les Témoins de Jéhovah ont ainsi été reconnus comme relevant de la loi de 1905.
Restons-en à une stricte neutralité de l'État.
M. Gérald Darmanin, ministre. - C'est toute la question de la police du culte. Le ministre des cultes ne contrôle pas le contenu de ces derniers - la langue utilisée, par exemple. Outre la liberté de culte et de réunion, la loi de 1905 apporte des avantages aux associations concernées, par exemple l'exonération d'impôts locaux.
Quand le ministre de l'Intérieur refuse la qualité cultuelle à une association, c'est pour éviter qu'elle ne bénéficie d'avantages indus. Il est normal de faire appliquer la loi de la République.
Bien sûr, nous devons défendre notre modèle de laïcité au niveau européen et international.
Il faut distinguer les régimes de 1901 et de 1905. Ce texte a le grand mérite de consacrer cette différence. Ne confondons pas cultuel et culturel.
Quelque 92 % des associations musulmanes sont sous le régime de la loi de 1901. Elles reçoivent des subventions pour leurs activités sportives et culturelles par exemple - mais les emploient parfois pour des activités cultuelles. D'où l'intérêt d'imposer à ceux qui restent dans le cadre de 1901 - hors droit local - d'avoir deux comptes bancaires, deux états de comptes séparés. Nous tenons à cette distinction. Historiquement, les communistes ont toujours été favorables à la séparation de l'Église et de l'État...
M. Pierre Ouzoulias. - Je le confirme.
M. Gérald Darmanin, ministre. - Si l'on confond le culturel et le cultuel, on confond le politique et le religieux. Les protestants et les juifs l'ont compris et presque tous sont sous le régime de 1905. N'en déplaise à M. Ravier, les catholiques, initialement, n'étaient pas favorables à la loi de 1905 : il leur a fallu quinze ans pour l'accepter.
Preuve que c'est une richesse, l'Alsace-Moselle a répliqué cette distinction dans son droit local.
Tout aux croyants en tant que culte, mais rien aux croyants en tant que force politico- culturelle. Tel est l'objet du texte.
Mme Nathalie Delattre. - Vous nous avez convaincus.
L'amendement n°138 rectifié bis est retiré.
L'amendement n°562 n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°331, présenté par Mme Benbassa, MM. Benarroche et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme Taillé-Polian.
Alinéa 2, deuxième phrase
Supprimer cette phrase.
Mme Esther Benbassa. - En quoi le maintien de l'ordre public concerne-t-il les associations ?
Les représentants du culte s'inquiètent de ces dispositions floues et imprécises. Ainsi, une association cultuelle souhaitant venir en aide à une personne sans papiers, au nom du devoir de fraternité, pourrait être considérée comme transgressant l'ordre public. En 1996, l'église Saint-Bernard, dans le XVIIIe arrondissement, avait accueilli une centaine d'étrangers en situation irrégulière, afin de les protéger de l'expulsion.
Ce dispositif constitue un empiétement du politique sur le religieux, et porte le risque d'un renforcement du contrôle social.
Mme Dominique Vérien, rapporteure. - Avis défavorable. La commission a inséré cette mention pour lutter contre certaines formes de séparatisme religieux. Elle s'inspire de la jurisprudence du Conseil d'État sur les Témoins de Jéhovah.
M. Gérald Darmanin, ministre. - Même avis.
M. Jean-Pierre Sueur. - Nous poursuivons la même logique depuis le début de nos débats. Tout citoyen, toute association doit respecter l'ordre public. Cela découle de la Constitution et des lois de la République. Pourquoi le préciser et créer ainsi une suspicion ? Nous voterons cet amendement.
L'amendement n°331 n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°563 rectifié, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Alinéa 2, troisième phrase
Remplacer les mots :
la circonscription religieuse définie
par les mots :
le département du siège social défini
M. Pierre Ouzoulias. - Nous arrivons aux limites de votre argumentation, monsieur le ministre. La notion de « circonscription religieuse » n'a pas de pertinence pour de nombreux cultes. De fait, elle renvoie au diocèse. Il est préférable que l'État ne reconnaisse que la domiciliation officielle de l'association cultuelle.
Vous appelez à distinguer associations 1901 et 1905, mais le faites-vous dans la pratique ? L'État a versé aux associations diocésaines plus de 14 millions d'euros au titre du chômage partiel ; les ministres du culte ont été indemnisés, mais pas les associations juives et protestantes relevant de la loi de 1905.
Le régime de 1901 semble manifestement plus intéressant. D'où l'intérêt de dresser un bilan des subventions publiques aux différentes associations en fonction de leur statut.
Mme Dominique Vérien, rapporteure. - Vous vous éloignez de l'objet de l'amendement.
M. Pierre Ouzoulias. - Je le reconnais. (Sourires)
Mme Dominique Vérien, rapporteure. - La notion de circonscription religieuse est pertinente. Une communauté protestante qui a son siège à Auxerre, dans l'Yonne, s'étend sur les départements voisins. Avis défavorable.
M. Jean-Pierre Sueur. - Il y a bien un siège.
M. Gérald Darmanin, ministre. - Avis défavorable. C'est aux religions de définir les circonscriptions religieuses. Un département peut compter plusieurs sièges : dans les Bouches-du-Rhône, il y a le diocèse de Marseille mais aussi celui d'Aix et Arles. Ce n'est pas à l'État de définir les circonscriptions religieuses. Ne soyons pas trop jacobins !
Dans les territoires non concordataires, aucun ministre du culte n'a bénéficié du chômage partiel - uniquement les personnels laïcs des associations tant 1901 que 1905.
Le non-subventionnement des cultes n'est pas un principe constitutionnel, à la différence de la non-reconnaissance : il est prévu par la loi ordinaire. En réalité, la propriété des édifices religieux et le financement des travaux par les collectivités sont une forme de subventionnement.
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. - Au titre du patrimoine.
M. Gérald Darmanin, ministre. - La vraie mesure républicaine aurait été de nationaliser tous les biens religieux, comme en 1905 - y compris les mosquées. Mais cela aurait été politiquement difficile.
Les baux emphytéotiques, les garanties d'emprunts et les reçus fiscaux sont aussi une forme de subventionnement. Je l'ai bien vu à Bercy !
M. Pierre Ouzoulias. - Merci de ces explications très claires.
Dans la nomenclature de Bercy, la sous-classe 94-91 concerne les services fournis aux fidèles dans les lieux de cultes. Bercy ferait une différence entre laïcs et ministre des cultes ? Faute d'avoir obtenu des informations complémentaires, nous considérons que les 14 millions d'euros ont bien été versés pour la pratique du culte.
M. Gérald Darmanin, ministre. - Je m'engage à obtenir de Bercy une réponse circonstanciée.
L'amendement n°563 rectifié n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°447 rectifié, présenté par M. Sueur et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
I. - Alinéa 5
Supprimer cet alinéa.
II. - Alinéa 6
Remplacer les mots :
Les modalités d'application
par les mots :
Les procédures mentionnées au
Mme Laurence Harribey. - Les associations cultuelles devront dorénavant comporter un ou plusieurs organes délibérants chargés de décider de l'adhésion de tout nouveau membre, de la modification des statuts, de la cession de tout bien immobilier appartenant à l'association, et, lorsque l'association y procède, du recrutement d'un ministre du culte.
Une telle ingérence dans les statuts des associations est contraire au principe selon lequel l'État n'assure pas l'organisation des cultes.
La nécessité et la proportionnalité de mesures aussi intrusives dans l'exercice des cultes posent également question.
M. le président. - Amendement n°330, présenté par Mme Benbassa, MM. Benarroche et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme Taillé-Polian.
Alinéa 5
Supprimer cet alinéa.
Mme Esther Benbassa. - Cet alinéa soumet toute nouvelle adhésion à une association cultuelle à une décision d'un organe délibérant. C'est une véritable immixtion dans l'activité des cultes, contraire à la liberté d'association et au principe de séparation de l'Église et de l'État. Laissons les cultes libres de choisir les modalités de recrutement de leurs officiants !
Enfin, ce dispositif apparaît disproportionné au regard de l'objectif du texte. Jusqu'où ira le Gouvernement dans son obsession sur l'islam ? Combien de principes va-t-il encore renier ?
M. le président. - Amendement n°46, présenté par Mme N. Goulet.
Alinéa 5
Après le mot :
prévoient
insérer les mots :
à peine de nullité
Mme Nathalie Goulet. - Amendement de précision.
Mme Dominique Vérien, rapporteure. - Le Conseil d'État a estimé que ces dispositions protégeaient la liberté de conscience et ne portaient pas une atteinte disproportionnée aux libertés de culte et d'association.
Les dispositions anti-putsch obéissent à un objectif d'intérêt général. Avis défavorable aux amendements nos447 rectifié et 330.
L'amendement n°447 rectifié renvoie la définition des procédures au décret, or cela relève de la loi.
L'amendement n°46 est déjà satisfait par l'article 23 de la loi de 1905 : les tribunaux pourront prononcer la dissolution. Avis défavorable.
M. Gérald Darmanin, ministre. - M. Sueur défend un amendement contraire à ce que les socialistes ont défendu en 1905 - cela ne manque pas de sel.
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. - On peut évoluer !
M. Gérald Darmanin, ministre. - La loi de 1905, sous l'impulsion de la gauche, avait prévu la collégialité des décisions. Cela conduisait à faire élire les évêques - ce que Rome a bien entendu refusé. Il a fallu quinze ans pour parvenir à un compromis, qui ne concerne d'ailleurs que les catholiques.
Le Conseil d'État l'a dit, notre texte apporte une protection que les amendements de suppression font disparaître.
Madame Benbassa, mon obsession est-elle névrose ou hystérie ? À force de vous entendre employer de tels mots, on finirait par penser que c'est vous qui êtes atteinte... (Mme Esther Benbassa proteste.) Il faut vraiment n'avoir jamais eu à gérer une collectivité et détenir une culture exclusivement livresque pour ne pas voir les coups d'État - il n'y a pas d'autre mot - que font les salafistes dans les associations musulmanes.
Ce fut le cas à Pantin (M. Philippe Dallier le confirme), où 1 200 croyants respectueux de la République se sont vus privés de leur droit fondamental à pratiquer leur culte parce que le président de l'association s'était accaparé le pouvoir de choisir le responsable religieux et avait usurpé l'expression collective en reprenant ceux qui armaient idéologiquement l'assassin de Samuel Paty. (Mme Jacqueline Eustache-Brinio, rapporteure de la commission des lois, le confirme.)
Nous avons dû fermer la mosquée, parce que la loi de 1905 n'a pas prévu les putschs de salafistes. Nous sommes conformes à l'esprit d'Aristide Briand avec ce texte qui protège les croyants, que vos obsessions mettent en danger. Avis défavorable.
M. Jean-Pierre Sueur. - Monsieur le ministre, votre dernière intervention est remarquable ! Peut-être est-ce votre inconscient qui parle : vous rêvez d'organiser les cultes ; vous aimeriez que l'Église fût une entité démocratique. ..
Pour notre part, nous préférons poser trois principes : la liberté de culte est garantie ; l'État n'a pas pour mission d'organiser les cultes ; l'État veille à l'application de la loi y compris dans la sphère religieuse, et notamment au respect de l'ordre public.
À Pantin, vous avez privé une partie des fidèles de leur liberté d'exercer leur culte. Nous souhaitons ôter du texte tout ce qui a trait à l'organisation des cultes.
Mme Esther Benbassa. - Monsieur le ministre, faites votre métier, mais pas de la psychanalyse de bazar, car vous n'êtes pas calé en la matière. Névrose, hystérie... Vous avez lu ça dans Le Figaro ? (Rires)
M. Sueur a raison : ce n'est pas à l'État d'organiser les cultes. Vous infantilisez les religions ! Que voulons-nous ? Un État faible qui entre dans les méandres du culte, ou une République forte qui les laisse s'organiser ?
L'amendement n°447 rectifié n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°330.
L'amendement n°46 est retiré.
L'article 26 est adopté.
ARTICLE 27
M. le président. - Amendement n°333, présenté par Mme Benbassa, MM. Benarroche et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme Taillé-Polian.
Supprimer cet article.
Mme Esther Benbassa. - En transformant le rescrit, cet article crée, malgré les assouplissements apportés par la commission, des lourdeurs administratives fondées sur une suspicion injustifiée et généralisée à l'égard des associations cultuelles. Il entrave la liberté de culte de celles qui n'ont pas les moyens administratifs de remplir ces obligations. C'est un dévoiement de la loi de 1905.
Mme Dominique Vérien, rapporteure. - Avis défavorable. L'obligation de déclaration de l'association pour bénéficier d'avantages fiscaux tels que l'exemption de taxe foncière et d'habitation est juste. Nous l'avons assouplie concernant son renouvellement. Le préfet doit disposer d'une vision précise des cultes dans son département.
M. Gérald Darmanin, ministre. - Même avis.
L'amendement n°333 n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°445 rectifié, présenté par M. Sueur et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
I. - Alinéa 2
Remplacer cet alinéa par deux alinéas ainsi rédigés :
« Art. 19-1. - L'association cultuelle est déclarée au représentant de l'État dans le département dans lequel elle a son siège. Cette déclaration est assortie du dépôt de ses statuts qui précisent le caractère cultuel de l'association. Il sera donné récépissé de celle-ci dans le délai de deux mois.
« Le représentant de l'État dans le département refuse de délivrer le récépissé lorsqu'il constate que l'association ne remplit pas les conditions prévues aux articles 18 et 19.
II. - Alinéas 3 à 6
Supprimer ces alinéas.
III. - Alinéa 7
Remplacer cet alinéa par deux alinéas ainsi rédigés :
« Sans préjudice de l'article 111 V de la loi n° 2009-526 du 12 mai 2009 et de l'article L. 212-1 du code de la sécurité intérieur, lorsque le représentant de l'État dans le département constate que l'association ne remplit plus les conditions prévues aux articles 18 et 19, il en informe le ministère public compétent en application de l'article 7 de la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d'association.
« Les modalités d'application du présent article sont précisées par décret en Conseil d'État. »
M. Jean-Pierre Sueur. - La double déclaration constitue une rupture par rapport à la loi de 1905 - loi que nous connaissons un peu, monsieur le ministre, même si nous raisonnons par rapport à la France de 2021.
Restons-en au régime de déclaration unique. Pourquoi l'association devrait-elle répéter tous les cinq ans ce qui est déjà dans ses statuts ?
La Défenseure des droits a dénoncé l'alourdissement du formalisme et estimé que ce texte créerait une nouvelle catégorie d'associations relevant de 1905 - mais sans les avantages afférents. Même chose pour la Commission nationale consultative des droits de l'homme.
La Cour européenne des droits de l'Homme a condamné la France pour avoir appliqué des dispositions fiscales insuffisamment précises vis-à-vis de groupes sectaires. Attention : la France pourrait de nouveau avoir maille à partir avec elle.
M. le président. - Amendement n°449 rectifié, présenté par M. Sueur et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
Alinéa 2
Après la première occurrence du mot :
association
insérer les mots :
qui n'en bénéficie pas à la date d'entrée en vigueur de la loi n° ... du ... confortant le respect des principes de la République et est
Mme Laurence Harribey. - Cet amendement de repli allège la procédure en excluant les associations cultuelles existantes avant la promulgation de la loi.
M. le président. - Amendement n°47, présenté par Mme N. Goulet.
Alinéa 2
Compléter cet alinéa par les mots :
, qui précise dans son objet qu'elle a vocation à accomplir des actes en relation avec l'exercice public d'un culte
Mme Nathalie Goulet. - Amendement de précision et de cohérence.
M. le président. - Amendement n°450 rectifié, présenté par M. Sueur et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
Alinéa 3, après la première phrase
Insérer une phrase ainsi rédigée :
La décision d'opposition doit être motivée.
Mme Laurence Harribey. - Le préfet disposerait de deux mois pour s'opposer au bénéfice des avantages découlant de la qualité d'association cultuelle s'il constate que l'association ne remplit pas ou plus les conditions.
Nous demandons une motivation de cette décision pour que la procédure soit plus transparente et que les associations puissent, le cas échéant, mieux se défendre.
L'amendement n°358 n'est pas défendu.
M. le président. - Amendement n°448 rectifié, présenté par M. Sueur et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
Alinéa 4 et alinéa 5, seconde phrase
Remplacer le mot :
cinq
par le mot :
huit
Mme Laurence Harribey. - Cet amendement porte la durée de l'agrément de cinq à huit ans afin d'alléger les contraintes imposées aux associations et de désengorger les services préfectoraux.
M. le président. - Amendement n°651, présenté par le Gouvernement.
I. - Alinéa 4
Compléter cet alinéa par les mots :
, renouvelable par déclaration au représentant de l'État dans le département, dans les conditions mentionnées aux premier et deuxième alinéas
II. - Alinéa 5
Supprimer cet alinéa.
M. Gérald Darmanin, ministre. - Quand une association cultuelle se crée, elle le précise dans ses statuts. Cela lui procure divers avantages non négligeables : exemption d'impôts locaux, de droits de mutations à titre onéreux (DMTO), droit d'émettre des reçus fiscaux.
Mais l'expérience du ministère de l'Intérieur enseigne qu'il est utile de vérifier que son activité est conforme aux statuts. Certains estiment que ce serait liberticide ou compliqué ? Ce ne l'est pourtant pas pour les partis politiques - ce n'est pas à des élus que j'apprendrai ce qu'est la Commission nationale de contrôle des comptes de campagnes et des financements politiques.
Dans son avis, le Conseil d'État indique que la procédure de l'article 27 sera moins contraignante et permettra à l'administration de se concentrer sur les cas les plus litigieux.
Aujourd'hui, l'association cultuelle demande un rescrit administratif : la qualité d'association cultuelle ne se décrète pas unilatéralement.
Nous pouvons attaquer une association devant le juge judiciaire quand son activité ne correspond pas à son statut. Il y a beaucoup d'argent public en jeu, et les détournements sont très courants. Certaines associations utilisent le lieu qu'elles exploitent pour des activités scolaires, sportives ou culturelles. Il y a un détournement du régime de 1901 pour des activités relevant de 1905, et inversement.
La confusion des genres ne sert ni la laïcité ni les élus locaux.
M. le président. - Amendement n°332, présenté par Mme Benbassa, MM. Benarroche et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme Taillé-Polian.
Alinéa 5
Rédiger ainsi cet alinéa :
« L'association bénéficie d'une reconduction tacite de la reconnaissance de sa qualité cultuelle pour une nouvelle durée de cinq années.
Mme Esther Benbassa. - Cet article instaure un renouvellement quinquennal tacite de la déclaration initiale de qualité cultuelle d'une association auprès du préfet, qui peut l'écarter selon son bon vouloir. Or les associations cultuelles sont déjà soumises à une obligation de déclaration préfectorale.
Cet amendement de repli allège la procédure pour une reconduction tacite et sans condition pour cinq années supplémentaires. Évitons un nouvel empiétement du politique sur le religieux, une nouvelle atteinte à la séparation des Églises et de l'État.
M. le président. - Amendement n°392 rectifié, présenté par M. Cuypers, Mmes Chain-Larché et Thomas, MM. Regnard et Cardoux, Mme V. Boyer, MM. Mandelli et Reichardt, Mme Gruny, MM. Brisson et Charon, Mmes Lopez et Lavarde, MM. Rapin, B. Fournier, Laménie et Belin, Mme Pluchet, M. Bonne, Mme Boulay-Espéronnier, MM. de Nicolaÿ, Houpert, Bas et de Legge, Mme Lassarade et MM. Longuet, Lefèvre et Mouiller.
Alinéa 5
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigé :
Après quinze ans d'existence, la qualité cultuelle fait l'objet d'une reconduction tacite à chaque échéance de cinq ans sauf si deux mois auparavant, le représentant de l'État dans le département invite l'association concernée à renouveler la procédure de déclaration dans les conditions mentionnées aux deux premiers alinéas du présent article.
Mme Anne Chain-Larché. - Avec cet amendement de compromis, la reconnaissance serait tacite après quinze ans sauf si, deux mois avant, le préfet invitait l'association à renouveler sa déclaration.
Mme Dominique Vérien, rapporteure. - Il est utile que le préfet connaisse les cultes de son territoire. Avis défavorable à l'amendement n°445 rectifié.
Nous sommes pour le renouvellement de la déclaration : avis défavorable à l'amendement n°449 rectifié.
Retrait ou avis défavorable à l'amendement n°47, satisfait par les articles 18 et 19 de la loi de 1905.
L'amendement n°450 rectifié est également satisfait par la disposition générale sur la motivation des actes administratifs.
Cinq ans est un bon délai pour la clause de revoyure. Avis défavorable à l'amendement n°448 rectifié.
Nous sommes plutôt d'accord avec vous, monsieur le ministre. Mais nous préférons que tous les cinq ans, l'association n'ait qu'à se manifester, sans avoir à renvoyer tout son dossier.
Le préfet n'aura pas à se pencher sur toutes les associations, mais seulement sur celles qui ont changé de gouvernance ou de pratique. On imagine que ce ne sera pas le cas des associations diocésaines, par exemple.
Avis défavorable à l'amendement n°332 comme à l'amendement n°392 rectifié. Le délai de cinq ans nous paraît tout à fait supportable.
M. Gérald Darmanin, ministre. - Avis défavorable à tous les amendements. Soutien franc et massif à l'amendement n°651.
M. Pierre Ouzoulias. - Dans son avis, le Conseil d'État signale, à propos de cet article, une « atteinte certaine » au régime actuel selon lequel les associations cultuelles se constituent librement. C'est une interpellation en direction du Conseil constitutionnel.
« Un régime d'exception est tout sauf un régime de liberté » - voilà ce qu'a dit le président Retailleau à propos de l'instruction en famille... Son analyse pourrait s'appliquer ici.
L'exercice du culte n'est pas une activité neutre, lit-on dans l'étude d'impact. C'est vrai, et je sais faire la différence entre une association diocésaine et une association de pétanque. (Sourires) Mais l'État doit adopter une stricte neutralité - sauf en cas de désordre à l'ordre public ou de non-respect des lois. Je n'imagine pas qu'un culte puisse transgresser l'ordre public. Ne jetons pas une suspicion de principe sur l'exercice du culte. Je crains un rejet massif du fait religieux. Ce n'est pas l'engagement de la loi de 1905.
M. Arnaud de Belenet. - Le contrôle a posteriori adopté par l'Assemblée nationale est plus proportionné que le dispositif initial. Je ne comprends pas l'amendement n°651 : l'alinéa 5 ajouté par la commission est un signe d'apaisement envers les associations cultuelles. Elle ne change pas l'intention du texte, mais permet d'atteindre l'objectif de manière apaisée.
M. Gérald Darmanin, ministre. - M. Ouzoulias élargit son spectre idéologique en citant le président Retailleau... (Sourires)
Se déclarer une fois ne garantit pas une conformité ad vitam æternam à l'objet de l'association.
M. Jean-Pierre Sueur. - C'est dans les statuts !
M. Gérald Darmanin, ministre. - À moins de vivre dans le monde merveilleux des enfants qui peuvent - encore - avoir des rêves...
Monsieur Sueur, il est évident que les activités d'une association créée il y a un siècle peuvent avoir évolué ! On peut donc imaginer de se pencher tous les cinq ans sur ces activités pour s'assurer de leur conformité aux statuts. La République, dans sa grande bonté, a prévu de grands avantages - preuve qu'elle aime les cultes !
De ce point de vue, la déclaration tacite ne suffit pas. Du reste, les préfets changent d'affectation à un intervalle inférieur à cinq ans - parfois à la demande des élus, d'ailleurs... (Sourires)
Les partis politiques sont contrôlés tous les ans, car ils bénéficient aussi d'exemptions fiscales.
La loi ne peut pas distinguer les associations diocésaines des autres, car la République ne reconnaît aucun culte.
L'avis du Conseil d'État cité par M. Ouzoulias est antérieur au travail de l'Assemblée nationale. La disposition a été corrigée et le décret y sera conforme.
Mme Dominique Vérien, rapporteure. - Dans notre dispositif, l'association envoie un courrier : ce n'est donc pas une tacite reconduction.
Je citais les associations diocésaines comme un exemple de stabilité. Mais beaucoup d'autres peuvent être stables aussi, qu'elles soient musulmanes, protestantes ou bouddhistes. Dans ce cas-là, les services ne demanderaient pas un nouveau dossier. Ils pourraient se concentrer sur les cas douteux. Ils y gagneraient du temps, autant que les associations.
L'amendement n°445 rectifié n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°449 rectifié.
L'amendement n°47 est retiré.
L'amendement n°450 rectifié n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°448 rectifié.
Mme Nathalie Goulet. - Je voterai l'amendement n°651. Ces dispositions sont attendues de longue date pour mettre de l'ordre dans la maison.
L'amendement n°651 n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°332.
L'amendement n°392 rectifié est retiré.
L'article 27 est adopté.
ARTICLES ADDITIONNELS après l'article 27
M. le président. - Amendement n°686, présenté par le Gouvernement.
Après l'article 27
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :
1° L'article L. 1311-2 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsque le bail a pour objet l'affectation à une association cultuelle d'un édifice du culte ouvert au public, la collectivité territoriale informe le représentant de l'État dans le département de son intention de conclure un tel bail trois mois au moins avant sa conclusion. » ;
2° L'article L. 2252-4 est ainsi rédigé :
« Art. L. 2252-4. - Une commune peut garantir les emprunts contractés pour financer la construction, par des associations cultuelles ou, dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle, par des établissements publics du culte ou par des associations inscrites de droit local à objet cultuel, d'édifices répondant à des besoins collectifs de caractère religieux.
« La commune informe le représentant de l'État dans le département de son intention d'accorder une telle garantie trois mois au moins avant que celle-ci soit accordée. » ;
3° L'article L. 3231-5 est ainsi rédigé :
« Art. L. 3231-5. - Les départements peuvent garantir les emprunts contractés pour financer la construction, par des associations cultuelles ou, dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle, par des établissements publics du culte ou par des associations inscrites de droit local à objet cultuel, d'édifices répondant à des besoins collectifs de caractère religieux.
« Le département informe le représentant de l'État dans le département de son intention d'accorder une telle garantie trois mois au moins avant que celle-ci soit accordée. »
M. Gérald Darmanin, ministre. - Cet amendement étend les possibilités de garantie d'emprunts par les collectivités territoriales pour la construction de lieux de culte et, en contrepartie, prévoit l'information du préfet dans les trois mois qui précèdent une décision d'attribution d'une telle garantie ou d'un bail emphytéotique. Cela lui permettra de vérifier le caractère cultuel de l'activité et de guider les collectivités dans le soutien qu'elles peuvent apporter à des cultes.
Je ne reviendrai pas sur des débats récents, mais la République doit pouvoir se prémunir contre des décisions de collectivités mues par l'ignorance - ou par autre chose...
Mme Dominique Vérien, rapporteure. - Avis favorable à une meilleure information de l'administration sur le financement des édifices cultuels et à l'assouplissement des modalités de financement pour les garanties d'emprunt. C'était une demande des chrétiens évangéliques. Des amendements déposés par M. Maurey dans ce sens s'étaient vus opposer l'article 40.
M. Jean-Pierre Sueur. - Je ne crois pas, monsieur le ministre, que ce soit le Saint-Esprit - s'il existe - qui vous ait inspiré cet amendement il y a deux jours. On ne fait pas de bonnes lois à partir d'une revue de presse.
Vous oubliez que l'article 27 que nous venons d'adopter satisfait votre objectif en prévoyant une vérification de la qualité d'association cultuelle, nécessaire pour bénéficier des baux emphytéotiques et garanties d'emprunt.
Il va de soi que cet amendement est démonstratif... Certes, il ne vous est pas interdit de faire de la politique, mais vous pourriez le dire clairement.
M. Gérald Darmanin, ministre. - Vous commettez une grave confusion. Cet amendement n'a rien à voir avec l'article 27, même s'il peut y avoir plusieurs demeures dans la maison du Père... (Sourires)
L'actualité nous renseigne utilement. Je n'imaginais pas que, dans notre République, une collectivité territoriale, pourtant prévenue par le ministère de l'Intérieur sur la foi d'un rapport des services de renseignement - il n'est donc pas question de naïveté - décide ainsi de subventionner une ingérence étrangère sur le sol de la République. C'est presque antipatriotique ! En tout cas, c'est faire de la politique contre la Nation.
M. Pierre Ouzoulias. - Que les choses soient claires : les élus communistes de Strasbourg ont voté contre la subvention à l'association Millî Görü?, faux nez en France du gouvernement d'Erdo?an, qui mène une politique néo-ottomane nationaliste et fasciste. Notre groupe vous a d'ailleurs saisi à plusieurs reprises pour dénoncer les agissements de la Turquie contre les communautés arménienne et kurde. Nous sommes intransigeants à cet égard - non seulement en France, mais aussi à l'étranger. Il y a effectivement de quoi s'interroger sur le fait que la Turquie soit encore considérée comme notre alliée au sein de l'OTAN ; un jour, il faudra tirer cela au clair !
Hier, lorsque j'ai proposé une très légère inflexion au droit local d'Alsace-Moselle, on m'a répondu qu'il était tabou. Je constate qu'avec cet amendement - que nous voterons - le Gouvernement y touche. Il faudra un jour mener une analyse complète du droit local, avec les élus de ces départements, mais pas seulement.
Mme Nathalie Goulet. - Je voterai cet amendement qui règle un vrai problème. Souvenons-nous de l'affaire pathétique de Rouen : la location d'une salle par la mairie à une organisation affiliée aux Frères musulmans pour un séminaire avec un orateur bien connu des services. J'ai saisi le préfet, puis la mairie - ils n'étaient pas au courant !
Plus la République sera forte, plus nous serons tranquilles, a dit le Grand rabbin de France.
Mme Esther Benbassa. - La subvention de Strasbourg concerne une association qui a été plusieurs fois en relation avec les services de l'État. La préfecture elle-même l'a subventionnée par le passé : elle a reçu 25 000 euros au titre du fonds de solidarité lors du premier confinement ; elle a conclu une convention avec l'État en 2020 pour une action de promotion de la sécurité routière ; d'après Le Canard enchaîné, elle a touché 22 400 euros pour la construction de sa mosquée.
La mairie n'a pas de services pour obtenir des renseignements ; la préfecture n'avait qu'à la renseigner. (M. Philippe Dallier s'exaspère.)
On en a fait un pataquès pour nourrir l'écolo-bashing. Mais ces rumeurs et polémiques ne servent personne.
Le président Macron n'a-t-il pas été pris en photo à l'Élysée avec M. Sarikir, qui est toujours secrétaire général du Conseil français du culte musulman ? La maire de Strasbourg n'avait pas à se méfier. (Mme Jacqueline Eustache-Brinio, rapporteure, ironise.)
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. - Cet amendement est important. J'aimerais que le ministre le précise.
Chacun appréciera l'actualité, que vous avez exploitée de manière vitupérante sur les réseaux sociaux. Vous avez engagé une procédure à Strasbourg ; l'État a donc déjà des moyens d'agir. Je suis gênée par ce qui me semble être un contrôle a priori des actes délibératifs des collectivités territoriales. En fonction de vos explications, notre groupe définira sa position.
M. André Reichardt. - Sénateur alsacien, je voterai cet amendement qui ne porte nullement atteinte au droit local, monsieur Ouzoulias. (M. Pierre Ouzoulias proteste.)
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. - Il le modifie.
M. André Reichardt. - Ce droit local étant un bloc, le modifier c'est lui porter atteinte.
Ce n'est pas le Concordat qui a rendu possible la décision de la maire de Strasbourg mais la non-application de la loi de 1905 en Alsace-Moselle. Pour autant, le conseil municipal aurait dû s'interroger sur cette subvention au regard de l'intérêt général.
Instaurer une obligation d'informer le préfet ne me choque pas. Cet amendement est utile.
M. Philippe Dallier. - Ne soyons pas naïfs ! Nous savons tous que les élus locaux subissent des pressions et que certains y résistent difficilement, voire flirtent avec la ligne rouge.
Tout ce qui va dans le sens d'un meilleur contrôle en amont et d'une meilleure coordination entre l'État et les collectivités territoriales me paraît pertinent. Cela évitera à des élus de se trouver dans des situations inconfortables. Je voterai l'amendement du Gouvernement. (Mme Nathalie Goulet s'en félicite.)
M. Gérard Longuet. - Je le voterai également.
Les collectivités territoriales ont besoin d'être informées. La religion musulmane est très décentralisée ; c'est l'une des raisons de son succès.
Certaines communautés sont liées à des États étrangers. Les collectivités territoriales, à la différence de l'État, ne peuvent le savoir. Informer l'État, c'est donc être protégé dans sa prise de décision. Cet amendement apporte une sécurité aux élus locaux.
Mme Valérie Boyer. - Je voterai cet amendement pour renforcer la protection des collectivités territoriales et des maires face aux pressions de certaines associations.
Je ne vois aucun problème à voter en fonction de l'actualité lorsqu'elle nous bouscule et nous oblige, qu'il s'agisse du financement de la mosquée de Strasbourg par Millî Görü? ou du traitement indigne de Mme von der Leyen qui a reçu un camouflet de la part d'un pays qui reçoit des subventions extrêmement importantes de l'Union européenne.
Nous devons réagir pour stopper cet entrisme cultuel et religieux et ses manifestations agressives.
M. Pascal Savoldelli. - Nous avons un débat de fond sur lequel nous sommes cohérents : il faut respecter la loi de 1905, utile et moderne.
L'État veut-il institutionnaliser un droit local au financement des cultes, quels qu'ils soient ?
Soyons honnêtes intellectuellement. Chacun votera en conscience... Certains comportements d'élus - de droite comme de gauche - sont effectivement condamnables, monsieur Dallier. (M. Philippe Dallier acquiesce.)
Nous sommes opposés à tout financement public d'un culte. (M. Pierre Ouzoulias approuve.)
M. Gérald Darmanin, ministre. - Madame Benbassa, vous défendez bien mal la maire de Strasbourg en assénant des contre-vérités. L'État aide au financement de la vidéo-surveillance, notamment pour les lieux culturels et écoles juives qui sont menacés, mais ce n'est pas une subvention directe du lieu de culte. Vous oubliez aussi que Millî Görü? a refusé de signer la charte des valeurs de l'islam qui respecte les valeurs de la République. Vous faites référence à une photographie, mais vous savez bien dans quelles conditions elles sont parfois prises... (Mme Esther Benbassa proteste.)
Chacun devrait s'interroger sur la position de la Turquie...
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. - Il faut seulement s'interroger ?
M. Gérald Darmanin, ministre. - ...lorsqu'elle se retire de la Convention d'Istanbul contre les violences faites aux femmes. Il faut en tirer des conséquences. Enfin, il est faux de dire que la maire de Strasbourg n'a pas été informée. Je l'ai fait personnellement. Plusieurs personnes, dont le président de la communauté européenne d'Alsace, en sont témoins La préfète elle-même lui en a parlé à deux reprises.
Dans le quartier de la Meinau, il n'y a pas seulement un lieu de culte, mais aussi un centre socioculturel, des écoles et des lieux de restauration, juste à côté du siège du parti Saadet, qui est pire que l'AKP.
Il n'y a pas pire sourd que celui ne veut pas entendre. (Mme la rapporteure Eustache-Brinio approuve.)
Nul besoin d'écolo-bashing : les faits parlent d'eux-mêmes... La maire de Strasbourg, au coeur d'une nouvelle polémique sur l'antisémitisme, a de bien curieuses manières de se défendre.
Madame de La Gontrie, cette disposition n'est pas contraire à l'article 72 de la Constitution. Initialement, j'avais prévu que le maire soit dépossédé du permis de construire sur les lieux cultuels, au profit du préfet.
M. Philippe Dallier. - Nous avons adopté un amendement qui lui accorde un avis simple.
M. Gérald Darmanin, ministre. - J'ai changé d'avis à regret. Il n'y a pas, en droit de l'urbanisme, de spécialisation, et cela aurait pu conduire à une censure du Conseil constitutionnel. En outre, l'AMF ne le souhaitait pas. Enfin, la destination d'un bâtiment peut être décidée ultérieurement. Mon amendement n'est donc pas issu de la tyrannie de l'instant...
Pour autant, dans l'affaire de Strasbourg, le droit actuel est insuffisant. Je me fais peu d'illusion sur la décision du tribunal administratif auquel la préfète a déféré l'acte du conseil municipal.
Avant le bail emphytéotique et la garantie d'emprunt, le préfet pourra retirer à l'association sa qualité cultuelle. Cela ne touche donc pas au droit des collectivités territoriales, mais empêche seulement une association d'obtenir un financement alors que son activité ne serait pas cultuelle. C'est un accompagnement bienvenu de l'État aux collectivités territoriales, et non un contrôle a priori de légalité.
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. - Il n'y a aucune sanction ?
M. Jacques Fernique. - Je suis élu du Bas-Rhin. Apaisons les choses, évitons les instrumentalisations et permettons aux musulmans turcophones de disposer d'un lieu de culte satisfaisant.
Curieusement, nous n'avons aucune trace des avertissements qui auraient été émis en amont et lors des réunions préparatoires, et aucune force politique du conseil municipal n'a demandé que cette délibération fasse l'objet d'un débat public : elle ne posait donc pas problème.
En 2017, la pose de la première pierre de la mosquée a réuni tous les responsables politiques alsaciens dont Roland Ries et le député, ainsi que le préfet. Lors des municipales, toutes les listes ont rencontré les promoteurs.
Certes, près du lieu de culte est toléré le local d'un parti politique - contre lequel j'ai d'ailleurs manifesté -, mais le gros oeuvre a été achevé aux deux tiers sans que cela émeuve qui que ce soit. L'adjoint au culte de Roland Ries avait fait les démarches normales pour accompagner les promoteurs dans la recherche de financement, notamment qatari. (Marques d'impatience) Apaisons le débat. La subvention sera effectivement versée sous condition de respect des principes de la République.
M. Philippe Bas. - Ce débat est très intéressant. Les baux emphytéotiques et les garanties d'emprunt existent, mais ne sont possibles que dans les agglomérations « en voie de développement », c'est-à-dire dont la population augmente et nécessite la création de lieux de culte. Le Gouvernement propose d'étendre ce régime à l'ensemble du territoire - ainsi, Saint-Poix dans la Manche, commune de 500 habitants, pourra soutenir la création de lieux de culte.
Vous resserrez ensuite le verrou en prévoyant l'information du préfet, afin de vérifier la qualité cultuelle de l'association, qui ouvre droit à une série d'avantages Cette information au préfet lui sera profitable. Je voterai cet amendement. Et grâce à ces débats, je m'estime plus instruit.
L'amendement n°686 est adopté et devient un article additionnel.
M. le président. - Amendement n°386 rectifié bis, présenté par MM. Maurey et Cigolotti, Mmes Vermeillet, Pluchet et Billon, MM. Longeot, Louault, Delcros et Canevet, Mme Guidez, MM. de Belenet, Henno, Bonnecarrère et Capo-Canellas, Mme Morin-Desailly, MM. Folliot, Bonneau et Lefèvre, Mme Demas, MM. Mandelli, Vogel, Mizzon, D. Laurent et Bouchet, Mme Jacquemet, MM. Pellevat, Sautarel et Laménie, Mme Férat, M. A. Marc, Mmes Gruny, Herzog et de Cidrac, MM. Hingray et Duffourg, Mme Dumont, M. Le Nay, Mme Bonfanti-Dossat et M. Wattebled.
Après l'article 27
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - L'article L. 3112-1 du code général de la propriété des personnes publiques est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Ces biens peuvent également être cédés, sans déclassement préalable, à une association cultuelle, lorsqu'ils ont fait l'objet d'un bail emphytéotique arrivé à échéance, conclu en application des articles L. 1311-2 à L. 1311-4-1 du code général des collectivités territoriales, et qu'ils sont directement affectés à l'usage du culte. »
II. - L'article L. 1311-3 du code général des collectivités territoriales est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« ...° À l'issue du bail, le bien peut réintégrer le patrimoine de la collectivité territoriale bailleresse ou être acquis par le preneur dans les conditions prévues à l'article L. 3112-1 du code général de la propriété des personnes publiques. L'avis prévu à l'article L. 2241-1 du présent code doit alors prendre explicitement en compte les coûts d'entretien ou de réparation prévisibles du bien, ainsi que l'impossibilité de son exploitation commerciale. »
III. - La perte de recettes résultant pour les collectivités territoriales du I est compensée, à due concurrence, par une majoration de la dotation globale de fonctionnement.
IV. - La perte de recettes résultant pour l'État du paragraphe précédent est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
Mme Sylvie Vermeillet. - La loi autorise les collectivités territoriales à conclure des baux emphytéotiques avec les associations cultuelles pour la construction de lieux de culte.
Cet outil est répandu notamment dans les zones où le coût du foncier est élevé. Ainsi, sur 1 800 églises paroissiales d'Ile-de-France édifiées après 1905, 450 ont eu recours à un bail emphytéotique. Ce dispositif a permis l'édification de nombreux lieux de culte de toutes confessions.
Au terme du bail, les édifices reviennent à la collectivité, ce qui implique une charge d'entretien, et parfois de réparation... Cela peut devenir une bombe à retardement. Cet amendement prévoit que la commune puisse céder l'édifice aux associations cultuelles tout en déduisant de l'estimation les frais prévisibles d'entretien, de réparation, et l'impossibilité d'une exploitation commerciale.
M. le président. - Amendement n°425 rectifié ter, présenté par M. Sueur et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
Après l'article 27
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - L'article L. 3112-1 du code général de la propriété des personnes publiques est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Ces biens peuvent également être cédés, sans déclassement préalable, à une association cultuelle lorsqu'ils ont fait l'objet d'un bail emphytéotique arrivé à échéance, conclu en application des articles L. 1311-2 à L. 1311-4 du code général des collectivités territoriales, et qu'ils sont directement affectés à l'usage du culte. »
II. - La perte de recettes résultant pour les collectivités territoriales du I est compensée, à due concurrence, par une majoration de la dotation globale de fonctionnement.
III. - La perte de recettes résultant pour l'État du paragraphe précédent est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
Mme Hélène Conway-Mouret. - Le financement des associations cultuelles diminue en raison de la baisse des dons des fidèles. En vertu de la loi de 1905, les collectivités ne peuvent subventionner les cultes, exception faite du bail emphytéotique. Celui-ci est une facilité financière efficace dans les territoires où le foncier est cher. Mais quand le bail échoit, c'est aux collectivités territoriales d'assumer la charge de l'entretien des édifices. Le Conseil d'État appelle à régulariser ces contrats de bail, qui équivalent à une subvention.
Nous proposons d'inclure une option d'achat à l'échéance du bail emphytéotique. Actuellement, les musulmans ne disposent pas de lieux de culte en nombre suffisant, ce qui ne favorise pas le développement d'un islam de France. Nous nous appuyons sur un vecteur juridique en vigueur.
Mme Dominique Vérien, rapporteure. - Le sujet est délicat. Il n'y aurait pas de déclassement nécessaire, mais une évaluation à la baisse du prix. Il s'agit de répondre à un problème qui va se poser dans les années 2030, avec l'arrivée à échéance des baux des églises parisiennes construites dans les années 1930. Quels sont les obstacles concrets en réalité, puisque la commune peut déclasser l'édifice ?
Aujourd'hui déjà, il arrive que des églises soient reconverties en habitation. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Gérald Darmanin, ministre. - J'entends l'interrogation, mais le sujet est délicat. Sagesse ? (Sourires) L'État ne doit pas aider les cultes en espèces sonnantes et trébuchantes, mais il y a une inégalité de facto entre les cultes présents au moment de la nationalisation des biens et ceux arrivés postérieurement. En Hexagone, la grande mosquée de Paris est le seul édifice cultuel musulman qui a été financé avec de l'argent public.
Les baux emphytéotiques ont été pensés notamment pour le culte musulman.
Les amendements mentionnent le prix du marché : or ces bâtiments peuvent être si chers qu'il faudrait emprunter de l'argent rapidement à l'étranger... Il serait absurde de préparer toute une loi pour éviter l'ingérence étrangère en s'appuyant sur le principe « qui paie décide » ; tout en votant ces amendements qui entraîneraient un financement étranger massif.
Je ne peux pas non plus proposer un rachat à titre gratuit, sans quoi il s'agirait d'un financement direct que vous trouveriez scandaleux.
Nous ne sommes pas tout à fait mûrs. Il faudra résoudre cette équation dans un prochain projet de loi sur l'urbanisme.
Nous avons encore quelques années avant l'arrivée à échéance massive des baux.
Mme Dominique Vérien, rapporteure. - Nous avons largement débattu du sujet. Dans son rapport sur les relations entre les collectivités locales et les cultes, Hervé Maurey avait émis la proposition formalisée dans les amendements. Les cultes ne demandent pas forcément à récupérer ces édifices, et certaines collectivités territoriales ne souhaitent pas entretenir encore plus de lieux de culte.
Nous émettrons un avis défavorable pour que le sujet puisse être retravaillé.
Mme Nathalie Goulet. - L'amendement n°386 rectifié bis provient d'un rapport sénatorial qui a déjà six ans... Il serait souhaitable que le ministre aille débattre avec la délégation aux collectivités territoriales pour régler le problème. Six ans de gestation, c'est plusieurs éléphants ! (Sourires)
M. Gérard Longuet. - L'amendement n°686 pourrait-il s'appliquer à l'amendement n°386 rectifié bis ? La commune pourrait-elle céder le lieu à une association revendiquant l'héritage religieux, mais qui poursuit des activités strictement politiques, étrangères à l'entretien de la foi ? (M. André Reichardt acquiesce.)
M. Arnaud de Belenet. - L'amendement n°386 rectifié bis ouvre une voie médiane. Il évite l'écueil de la subvention comme l'écueil inverse.
Ne peut-on le voter afin de réfléchir d'ici la commission mixte paritaire ?
M. Pierre Ouzoulias. - Le sujet est lourd. Il faut élargir notre vision. Historiquement, le culte catholique a profité d'un très grand nombre d'églises et de cathédrales entretenues par les pouvoirs publics, à la suite de la plus grande nationalisation de l'histoire de la République, le 2 novembre 1789. (Sourires)
Nous savons tous que la pratique religieuse n'augmente pas. Des communes devront prochainement assumer des lieux qui n'auront plus d'affectataires. Serviront-ils à d'autres cultes, à des affectations autres ?
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. - L'échéance approche, y compris à Paris, où de nombreux édifices sont concernés. Deux amendements ont été déposés. Évidemment, je préfère celui de M. Sueur. Le Sénat pourrait voter l'un ou l'autre en vue de la commission mixte paritaire, bien qu'il existe un petit problème de gage - une majoration de la dotation globale de fonctionnement. Il faudra bien trouver une solution.
M. François-Noël Buffet, président de la commission. - Ce débat ne se règlera pas en quelques minutes. On ne peut pas accepter de voter un amendement de cette nature, car nous n'arriverons pas à une solution d'ici la commission mixte paritaire. (Mme Marie-Pierre de la Gontrie proteste.)
La commission des lois s'engage à se mettre au travail rapidement pour mener une analyse précise sur ce sujet.
L'amendement n°386 rectifié bis est retiré.
M. Gérald Darmanin, ministre. - Monsieur Longuet, l'amendement n 686 conditionne les avantages à l'assentiment du préfet. La vente au prix coûtant n'est pas un avantage.
L'amendement n°425 rectifié ter n'est pas adopté.
M. François-Noël Buffet, président de la commission. - Depuis la reprise, nous examinons neuf amendements à l'heure... Cela nous mène tranquillement au petit-déjeuner de demain. Je vous propose de terminer vers minuit et demi ce soir et de reprendre nos travaux lundi 12 avril à 17 heures. (Marques d'approbation sur diverses travées)
M. le président. - Nous siégerions donc l'après-midi à partir de 17 heures et le soir.
Il en est ainsi décidé.
M. Philippe Bas. - Nous avons adopté l'article additionnel après l'article 27. Quelle sera la conséquence exacte de l'information du préfet ? Je n'en vois nulle trace dans le texte et je ne vois rien non plus dans le code général des collectivités territoriales.
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. - J'avais posé la même question, malheureusement sans réponse...
M. Gérald Darmanin, ministre. - Le préfet pourra retirer sa qualité cultuelle à l'association.
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. - Ce n'est pas notre question.
M. Gérald Darmanin, ministre. - Actuellement, quand une collectivité territoriale veut accorder une garantie d'emprunt ou un bail à une association cultuelle, elle n'informe pas le préfet.
Il est rare que ce soit déféré au tribunal administratif. Une information du préfet entraîne au moins un dialogue entre l'État et les collectivités territoriales. Le préfet pourra profiter de cette interpellation pour vérifier la qualité cultuelle de l'association. Il pourra, le cas échéant, lui retirer cette qualité.
Actuellement, le préfet découvre l'existence d'une garantie d'emprunt lors du contrôle de légalité. Instruction sera donnée que ces vérifications soient bien menées par le préfet, portant sur la qualité cultuelle, les comptes et les dirigeants de l'association.
Grâce à ce rescrit, le maire pourra être sûr que l'association est bien cultuelle.
La délibération, elle, ne relève que du contrôle de légalité a posteriori. Il ne s'agit pas d'empêcher les collectivités territoriales de prendre une délibération.
M. le président. - Nous débattons d'un amendement déjà voté...
M. Jean-Pierre Sueur. - Je remercie M. Laurent pour sa présidence ouverte qui permet une discussion de fond. Je ne regrette pas d'avoir provoqué un débat un peu plus long en faisant le lien entre l'amendement du Gouvernement et l'actualité.
M. Bas, lui aussi, a posé une question essentielle et je l'en remercie. Si le maire n'informe pas le préfet, pas de sanction. S'il le fait, pas de conséquence pour les collectivités territoriales... Tout cela est confus. D'où notre abstention. Il serait plus simple d'appliquer des principes clairs : oui à la liberté de culte, non à ses dévoiements.
M. Gérald Darmanin, ministre. - Le maire sera obligé d'informer le préfet. S'il ne le fait pas, ce sera un motif d'illégalité de la délibération. Je ne suis pas sûr que la confusion soit de mon côté...
ARTICLE 28
M. le président. - Amendement n°549 rectifié, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Supprimer cet article.
M. Pierre Ouzoulias. - Notre position est claire : il faut s'en tenir à l'article 2 de la loi de 1905. La République ne reconnaît, ne salarie, ne subventionne aucun culte. Or ce principe latitudinaire ne s'applique pas pareillement à toutes les situations. Il faut un bilan des différentes formes de libéralités destinées aux cultes, avant d'envisager d'aller plus loin.
Mme Dominique Vérien, rapporteure. - L'adoption de cet amendement supprimerait toute forme de subventionnement des cultes. Ce serait un peu violent... (Sourires) Avis défavorable.
M. Gérald Darmanin, ministre. - Vous auriez pu prévoir aussi le remboursement de toutes les sommes perçues depuis un siècle : somme toute, votre amendement est assez modéré... (Sourires) Avis défavorable.
L'amendement n°549 rectifié n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°431 rectifié, présenté par Mme Conway-Mouret et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
Alinéas 5 et 6
Supprimer ces alinéas.
Mme Hélène Conway-Mouret. - Les alinéas 5 et 6 remettent en cause les principes de la République dont le projet de loi entend conforter le respect. En autorisant les associations cultuelles à conserver et gérer les immeubles reçus par dons et legs, on leur permet de se livrer à des activités commerciales et immobilières, alors que la loi de 1905 limite strictement leur objet à l'exercice du culte. C'est la rupture avec l'équilibre posé par l'article 19 du texte fondateur de 1905.
Les associations cultuelles bénéficient déjà de nombreux avantages fiscaux : ces niches ne sauraient être étendues à la gestion lucrative d'immeubles de rapport, sans relation avec le culte.
Devant les protestations suscitées à l'Assemblée nationale, le Gouvernement a proposé de plafonner par décret le montant du patrimoine considéré : nous y voyons la reconnaissance du caractère anti-laïc de la disposition, que l'on atténue tout en la maintenant...
M. le président. - Amendement identique n°473, présenté par Mme Taillé-Polian, M. Benarroche, Mme Benbassa, M. Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge et M. Salmon.
Mme Esther Benbassa. - Nous entendons préserver la loi de 1905, en particulier son article 19. Les associations cultuelles n'ont pas vocation à devenir des structures immobilières.
En quoi la mesure proposée permettrait-elle de combattre les intégrismes ?
M. le président. - Amendement n°139 rectifié bis, présenté par Mme N. Delattre, MM. Artano, Bilhac et Cabanel, Mmes M. Carrère et Pantel et MM. Requier, Roux, Gold, Fialaire et Guiol.
Alinéa 5
Supprimer cet alinéa.
M. Henri Cabanel. - Comment admettre que ces associations tirent des revenus de l'administration d'immeubles acquis à titre gratuit ? Elles organisent des cérémonies religieuses. Veut-on les transformer en sociétés immobilières ?
M. le président. - Amendement n°451 rectifié, présenté par M. Sueur et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
Alinéa 5
Remplacer les mots :
et administrer
par les mots :
mettre à disposition ou louer
M. Jean-Yves Leconte. - L'article 28 maintient les modalités de financement en vigueur et ajoute la possibilité pour les associations cultuelles de posséder et d'administrer des immeubles de rapport acquis à titre gratuit. C'est un assouplissement notoire du financement des associations cultuelles.
Les associations cultuelles n'ont pas vocation à être des spécialistes du droit immobilier. En revanche, il est légitime qu'elles tirent des biens acquis à titre gratuit, par exemple par la mise à disposition, des revenus ensuite affectés à leur activité. Cela mettrait un terme à une différence de traitement entre ces associations et les associations d'intérêt public.
M. le président. - Amendement n°580 rectifié ter, présenté par MM. de Belenet, L. Hervé, Bonnecarrère, Duffourg, Marseille, P. Martin, Détraigne, Capo-Canellas, Kern, Henno et Levi, Mme Billon, M. Delahaye, Mme Saint-Pé, MM. S. Demilly et Laugier, Mmes Perrot et Morin-Desailly, MM. Chauvet, Le Nay, J.M. Arnaud et Folliot, Mme Gatel et M. Longeot.
Alinéa 5
Supprimer les mots :
acquis à titre gratuit
M. Arnaud de Belenet. - Cet amendement autorise les associations cultuelles à gérer et à administrer non seulement des immeubles acquis à titre gratuit, mais également ceux acquis à titre onéreux.
Il s'agit de rétablir l'équité avec les associations loi 1901, mais aussi de prévenir les financements étrangers. Il n'y a plus lieu de craindre la puissance immobilière des cultes...
L'amendement n°581 rectifié ter rétablit la mention des immeubles acquis à titre onéreux.
M. le président. - Amendement n°265 rectifié, présenté par MM. Capus, Menonville, Guerriau et Decool, Mme Mélot, MM. Lagourgue, Wattebled, Verzelen et Chasseing, Mme Joseph, M. de Legge, Mmes Bonfanti-Dossat et de Cidrac et M. Chatillon.
Alinéa 5
Après les mots :
à titre gratuit
insérer les mots :
et à titre onéreux
M. Jean-Louis Lagourgue. - Cette restriction touchant les biens immobiliers acquis à titre onéreux porte atteinte à la liberté de gestion des associations et, dans bien des cas, risque de compromettre gravement leur équilibre financier. Notre amendement corrige cette inégalité de traitement.
M. le président. - Amendement identique n°402 rectifié ter, présenté par M. Cuypers, Mmes Chain-Larché et Thomas, MM. Regnard, Boré, Le Rudulier et Reichardt, Mme Gruny, MM. Brisson, Longuet et Lefèvre, Mme Lassarade, MM. Bas, Houpert et de Nicolaÿ, Mme Boulay-Espéronnier, M. Bonne, Mme Pluchet, MM. Belin, Laménie et B. Fournier, Mme Lopez et MM. Charon et Mouiller.
Alinéa 5
Après les mots :
à titre gratuit
insérer les mots :
et à titre onéreux
Mme Anne Chain-Larché. - Il est bon de faciliter les conditions de l'exercice du culte en élargissant les ressources propres des associations.
M. le président. - Amendement identique n°581 rectifié ter, présenté par MM. de Belenet, L. Hervé, Bonnecarrère, Duffourg, Marseille, P. Martin, Détraigne, Capo-Canellas, Kern, Henno et Levi, Mme Billon, M. Delahaye, Mme Saint-Pé, MM. S. Demilly et Laugier, Mmes Perrot et Morin-Desailly, MM. Chauvet, Le Nay, J.M. Arnaud et Folliot, Mme Gatel et M. Longeot.
M. Arnaud de Belenet. - Défendu.
M. le président. - Amendement n°140 rectifié, présenté par Mme N. Delattre, MM. Artano, Bilhac et Cabanel, Mme M. Carrère, MM. Fialaire, Guérini et Guiol, Mme Pantel, MM. Requier, Roux, Corbisez et Gold et Mme Guillotin.
Alinéa 5
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Ces immeubles ne peuvent bénéficier des exonérations fiscales prévues aux articles 1380 et 1407 du code général des impôts.
Mme Nathalie Delattre. - Les associations propriétaires d'immeubles de rapport ne doivent pas être exonérées de taxe foncière et de taxe d'habitation.
L'amendement n°52 n'est pas défendu.
M. le président. - Amendement n°432 rectifié, présenté par Mme Conway-Mouret et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
Après l'alinéa 6
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
« Sans préjudice de l'application aux édifices affectés à l'exercice public d'un culte du 10° de l'article 795 et du 4° de l'article 1382 du code général des impôts, les immeubles mentionnés au troisième alinéa du présent II sont soumis au droit commun des biens immobiliers. Les associations cultuelles les administrant établissent leurs comptes annuels de telle sorte que leurs activités en relation avec cette gestion constituent une unité fonctionnelle présentée séparément.
« Un décret en Conseil d'État détermine les modalités d'application du présent article.
Mme Hélène Conway-Mouret. - Les biens immobiliers des associations cultuelles sont exemptés de taxe foncière : c'est une forme de subventionnement déguisé, justifié par leur objet social.
Ce régime d'exemption ne doit pas être étendu aux immeubles gérés en dehors de cet objet.
Le Gouvernement justifie son projet par la nécessité d'accorder aux cultes une plus grande autonomie financière, mais sont concernés uniquement des immeubles acquis à titre gratuit.
Si l'objectif d'assurer des ressources autonomes régulières aux associations cultuelles est légitime, elles ne sauraient échapper au droit commun.
Le Gouvernement a retenu un amendement plafonnant à 33 % la part des revenus locatifs dans le total des ressources ; ces revenus locatifs seront assujettis à l'impôt.
Il faut préciser que les immeubles non consacrés à l'exercice du culte sont soumis au droit commun fiscal et donc dissocier, dans les comptes, les activités en relation avec l'exercice du culte de celles relatives à la gestion des immeubles.
Mme Dominique Vérien, rapporteure. - Les associations cultuelles pourront désormais administrer des immeubles acquis à titre gratuit. Elles en tireront des revenus plus réguliers qu'une vente ou des dons fluctuants.
La commission des lois a supprimé le plafonnement à 33 %. En effet, comment calculer ce pourcentage ? Quelles conséquences en cas de dépassement ? L'application nous semblait complexe. En outre, notre souci est surtout d'éviter les financements étrangers.
L'extension de ce dispositif aux immeubles acquis à titre onéreux irait en revanche trop loin. Nous proposons un moyen terme.
Nous avons voulu écarter la tentation d'appliquer un loyer peu onéreux en échange de la fréquentation du culte. Nous verrons plus tard si une extension est opportune.
Avis défavorable aux amendements restrictifs nos431 rectifié, 473 et 139 rectifié bis. L'amendement n°140 rectifié est satisfait. Retrait ou avis défavorable.
L'amendement n°432 rectifié est satisfait pour sa première partie. Nous sommes défavorables à la seconde.
Avis défavorable également aux amendements plus permissifs que notre rédaction : nos265 rectifié, 402 rectifié ter et 501 rectifié ter.
L'amendement n°451 rectifié apporte une précision terminologique dont nous n'avons pas saisi la finesse. Avis défavorable.
M. Gérald Darmanin, ministre. - Avis défavorable à tous ces amendements. Le culte doit se financer. Il faut savoir tirer les conclusions du monde mercantile dans lequel nous vivons...
Mais nous avons fixé deux règles. D'abord, le non-subventionnement prévu par la loi de 1905. Il y a des exceptions, mais pas de subventionnements directs. Ensuite, le refus de financements étrangers, qu'ils soient étatiques - les imams « détachés », payés par l'étranger, ne pourront plus exercer à partir de 2023 - ou autres, émanant d'une fondation, par exemple.
Nous devons conditionner ces financements et pouvoir nous y opposer. Il faut donc prévoir un financement qui ne soit ni public direct ni étranger.
Certes, les fidèles contribuent au financement du culte, aidés par des dispositions fiscales pour les 55 % de Français qui paient l'impôt sur le revenu. Mais les fidèles sont en moyenne moins aisés que les autres. Nous n'avons pas proposé le crédit d'impôt demandé par certains.
Il fallait donc trouver un financement national différent. Il était déjà possible de donner un immeuble à titre gratuit à une association cultuelle ; celles-ci peuvent aussi détenir des actions.
Nous ne souhaitons pas créer d'empire immobilier ou financier, ni de géographie communautaire. À cet effet, l'Assemblée nationale a établi un taquet de 33 % de recettes, sur lequel le Gouvernement a émis un avis de sagesse. De fait, les recettes peuvent fluctuer. Il ne faut pas non plus aller jusqu'aux immeubles acquis à titre onéreux. Tel est l'équilibre que nous proposons.
Il n'y aura pas d'exception fiscale, bien entendu, hors de celles applicables aux lieux de cultes. La loi de 1905 en dresse, bien mal, la liste.
Cet amendement vise à lutter contre les ingérences étrangères.
M. Jean-Yves Leconte. - Une association cultuelle ne doit pas devenir un gestionnaire de biens. Il faut préciser les actions autorisées. Le terme « administrer » nous semble trop large.
M. Arnaud de Belenet. - Je ne suis pas insensible à l'avis de la commission des lois. Le seuil de 33 % est impossible à mettre en oeuvre, le ministre a raison.
Les amendements nos580 rectifié ter, 581 rectifié ter et 140 rectifié sont retirés.
Les amendements identiques nos431 rectifié et 473 ne sont pas adoptés.
Les amendements nos139 rectifié bis et 451 rectifié ne sont pas adoptés
Les amendements identiques nos265 rectifié et 402 rectifié ter ne sont pas adoptés.
L'amendement n°432 rectifié n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°685, présenté par le Gouvernement.
Alinéa 7, seconde phrase
Après le mot :
réparations
insérer les mots :
ainsi que pour travaux d'accessibilité
M. Gérald Darmanin, ministre. - Cet amendement important devrait faire hésiter le groupe CRCE. (Sourires) Il autorise des subventions publiques pour l'accessibilité des lieux de culte, sachant qu'elles sont déjà possibles pour la sécurisation. Il s'agit souvent de bâtiments anciens et les fidèles ne sont pas tous jeunes. Nous n'avons pas étendu cette possibilité aux travaux de rénovation énergétique.
Mme Dominique Vérien, rapporteure. - Nous avons été convaincus. Avis favorable.
M. Pierre Ouzoulias. - Il est rare qu'une association cultuelle gère seule un lieu de culte. Elle est souvent couplée à une association culturelle qui bénéficie de subventions des collectivités territoriales pour les travaux d'accessibilité. Je m'oppose toujours à ces subventions au conseil municipal de ma commune, et me sens souvent seul, y compris dans mon groupe... (Sourires)
M. Philippe Dallier. - Ça peut arriver ! (Rires)
M. Pierre Ouzoulias. - Il est difficile, cependant, de ne pas voter cet amendement.
Mme Nathalie Goulet. - Le Sénat a adopté l'amendement n°297 à l'article 12 bis incluant le contrôle des parts de SCI. Je compte sur le Gouvernement pour veiller aux coordinations...
L'amendement n°685 est adopté.
L'article 28, modifié, est adopté.
La séance est suspendue quelques instants.
L'article 29 est adopté.
ARTICLES ADDITIONNELS après l'article 29
M. le président. - Amendement n°148 rectifié, présenté par Mme N. Delattre, MM. Artano et Bilhac, Mme M. Carrère, MM. Guérini et Guiol, Mme Pantel, MM. Requier, Roux, Cabanel et Gold et Mme Guillotin.
Après l'article 29
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le quatrième alinéa de l'article L. 211-4 du code de l'urbanisme, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« ...) À l'aliénation d'un bien en vue d'être cédé à une association cultuelle à un prix manifestement inférieur à celui du marché. »
Mme Guylène Pantel. - Les relations entre les collectivités territoriales et les associations cultuelles doivent être encadrées, neutres et prudentes. Nous devons empêcher toute possibilité d'accointance.
Le droit de préemption ne saurait être exercé à mauvais escient. Il n'est pas souhaitable qu'il le soit pour une association cultuelle.
Mme Dominique Vérien, rapporteure. - Cet amendement ne nous semble pas utile au regard des règles encadrant la préemption, réservée à un motif d'aménagement ou d'urbanisme. Une cession à vil prix à une association cultuelle serait sanctionnée. Retrait ou avis défavorable.
M. Gérald Darmanin, ministre. - Même avis.
L'amendement n°148 rectifié est retiré.
M. le président. - Amendement n°277 rectifié, présenté par MM. Roux, Artano, Bilhac et Cabanel, Mme M. Carrère, M. Guérini, Mme Pantel et M. Requier.
Après l'article 29
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans un délai de douze mois, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur le statut juridique de l'imam. Ce rapport détermine les solutions pouvant être apportées en vue de permettre aux imams de bénéficier d'un statut de ministre du culte ou équivalent.
M. Henri Cabanel. - Le statut de l'imam est source de difficultés et d'inégalités pour le culte musulman. Rien ne justifie que celui-ci ne bénéficie pas des mêmes obligations et mêmes droits que les ministres des autres cultes.
Il faut un travail de fond sur le sujet. Un rapport du Gouvernement au Parlement pourrait servir de base à cette réflexion.
Mme Dominique Vérien, rapporteure. - Avis défavorable à cet amendement d'appel.
M. Gérald Darmanin, ministre. - Avis défavorable.
L'amendement n°277 rectifié est retiré.
ARTICLE 30
M. le président. - Amendement n°334, présenté par Mme Benbassa, MM. Benarroche et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme Taillé-Polian.
Supprimer cet article.
Mme Esther Benbassa. - Cet amendement supprime l'extension des contraintes administratives de la loi de 1905 aux associations loi 1901. Les activités des associations loi 1901 seront soumises au contrôle de l'administration et entreront dans le champ de l'article 30. Or les activités des scouts, les collectes alimentaires ou l'aide aux personnes âgées peuvent être animées par des convictions spirituelles. Comment distinguer les activités relevant du culte des autres ?
Mme Dominique Vérien, rapporteure. - Nous sommes dans le coeur du réacteur... La partie cultuelle d'une association, même relevant de la loi de 1901, doit être déclarée comme telle. La liberté d'association empêche qu'on leur impose de passer au régime de 1905, mais on peut les y inciter.
Nous sommes contre la suppression de cet article.
La commission des lois est bien consciente du cas des scouts et des associations qui exercent le culte à titre accessoire. Une association de scoutisme s'apparente plus à une association loi 1901. La rédaction de la commission a déjà pris ces éléments en compte.
Avis défavorable à l'amendement n°334.
M. Gérald Darmanin, ministre. - Nous sommes au coeur du réacteur, mais la matière nucléaire est complexe... II existe aujourd'hui les associations uniquement culturelles, les associations uniquement cultuelles et les associations mixtes.
Les associations mixtes se voient imposer deux états de comptes différents ; on sépare en quelque sorte le temporel du spirituel.
Il y a enfin les associations culturelles qui, à titre accessoire, « logent » des activités cultuelles. Il ne s'agit pas d'interdire aux scouts d'organiser, à titre accessoire, une messe ou un autre office religieux. Mais la rédaction du Sénat conduit à requalifier les associations culturelles « logeant des activités cultuelles accessoires » en associations mixtes. Autre inconvénient, la rédaction exclut du champ d'intervention du ministère de l'Intérieur les associations qui se déclarent culturelles mais ont en fait une activité cultuelle. Je peux citer l'exemple de l'association interculturelle du Grand Nancy, dont les statuts mentionnent maintes activités éducatives, sociales, sportives - folklore, couture, cours de langues,... - mais qui gère surtout une mosquée et qui dépend du ministère turc des affaires religieuses.
La rédaction du Gouvernement vise ceux qui se disent uniquement culturels mais sont en fait cultuels, et ce, sans dégât collatéral.
Avis défavorable à l'amendement n°334.
Mme Nathalie Goulet. - Cela fait des années que l'on demande que les dispositions de l'article 30 soient inscrites dans la loi. L'Union des mosquées de France le proposait dans un rapport de 2018. Le sujet est connu et l'article 30 apportera des solutions. Je suis favorable à la rédaction du Gouvernement.
L'amendement n°334 n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°652, présenté par le Gouvernement.
I. - Alinéa 5
Supprimer les mots :
Sauf lorsque leurs activités liées à l'exercice public du culte revêtent un caractère strictement accessoire,
II. - Alinéa 7
Supprimer les mots :
Sauf lorsque leurs activités liées à l'exercice public du culte revêtent un caractère strictement accessoire,
III. - Alinéa 13
Supprimer les mots :
, tels que l'acquisition, la location, la construction, l'aménagement et l'entretien des édifices servant au culte ainsi que l'entretien et la formation des ministres et autres personnes concourant à l'exercice du culte,
et les mots :
et sauf dans le cas où ces activités revêtent un caractère strictement accessoire,
M. Gérald Darmanin, ministre. - Défendu.
Mme Dominique Vérien, rapporteure. - Avis défavorable. Nous tenons à notre rédaction, qui exclut les scouts. C'est une demande du Grand rabbin, notamment. Notre rédaction s'appuie sur la jurisprudence. Nous en reparlerons !
L'amendement n°652 n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°667, présenté par Mme Eustache-Brinio, au nom de la commission des lois.
Alinéa 5
Remplacer les références :
, 36-1 et 36-2
par la référence :
et 36-1
L'amendement de coordination n°667, accepté par le Gouvernement, est adopté.
M. le président. - Amendement n°156 rectifié, présenté par Mme N. Delattre, MM. Artano, Bilhac et Cabanel, Mme M. Carrère, MM. Fialaire et Guérini, Mme Pantel, MM. Requier, Roux et Gold, Mme Guillotin et M. Guiol.
I. - Alinéa 7, deuxième phrase
1° Remplacer les mots :
de sorte que
par les mots :
en instaurant une comptabilité autonome pour
2° Supprimer les mots :
constituent une unité fonctionnelle présentée séparément
II. - Alinéa 11
Remplacer les mots :
leur budget annuel
par les mots :
l'ensemble de leurs ressources annuelles
Mme Nathalie Delattre. - Les associations mixtes et cultuelles ont de nombreux points de convergence. Cet amendement encadre mieux les ressources des associations dont l'objet n'est pas exclusivement cultuel, en leur imposant d'établir une comptabilité autonome pour leurs activités en relation avec l'exercice public d'un culte.
Mme Dominique Vérien, rapporteure. - L'article impose une comptabilité séparée pour les activités cultuelles. Cet amendement apporte une précision rédactionnelle en évoquant une comptabilité autonome. Qu'en pense le Gouvernement ?
M. Gérald Darmanin, ministre. - Avis défavorable.
Mme Nathalie Delattre. - Par principe ou y a-t-il une raison ?
Mme Dominique Vérien, rapporteure. - L'amendement paraît satisfait : retrait ou avis défavorable.
Mme Nathalie Delattre. - Je maintiens qu'il s'agit d'une clarification.
L'amendement n°156 rectifié n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°382 rectifié, présenté par MM. Maurey et Cigolotti, Mmes Vermeillet, Billon, Pluchet et Létard, MM. Canevet, Longeot, Louault, Moga, Delcros, Henno et Folliot, Mme Morin-Desailly, MM. Chasseing, Bonneau, Bonne et Lefèvre, Mme Demas, M. Mandelli, Mme Férat, M. Laménie, Mme Saint-Pé, MM. Sautarel et Pellevat, Mme Jacquemet, MM. Bouchet, D. Laurent, Mizzon et Vogel, Mmes Paoli-Gagin, Schalck, Herzog et Gruny, MM. A. Marc, Tabarot et Wattebled, Mme Bonfanti-Dossat, M. Le Nay, Mme Dumont, MM. Duffourg et Hingray et Mme de Cidrac.
Après l'alinéa 11
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Tout projet de construction, par les associations mentionnées au premier alinéa du présent article, d'édifices répondant à des besoins collectifs de caractère religieux fait l'objet d'un plan de financement prévisionnel mentionnant dans des conditions fixées par un décret en Conseil d'État, l'origine des fonds et certifié par un commissaire aux comptes. À l'issue de la réalisation du projet, un bilan financier est présenté dans les mêmes conditions.
Mme Sylvie Vermeillet. - Cet amendement soumet tout projet de construction d'un édifice du culte par une association mixte loi 1901 à l'élaboration d'un plan de financement prévisionnel certifié par un commissaire aux comptes.
Cette mesure, issue du rapport d'information de 2014, accroît la traçabilité des flux financiers. Le niveau de sanction est le même pour les associations cultuelles et les associations mixtes.
Cette disposition a déjà été adoptée par le Sénat dans le cadre du projet de loi Essoc.
M. le président. - Sous-amendement n°682 rectifié à l'amendement n°382 rectifié de M. Maurey, présenté par MM. Dallier et Bascher.
Amendement n°382 rect., alinéa 3
Après la première phrase, insérer deux phrases ainsi rédigées :
Le plan de financement est transmis au représentant de l'État dans le département au plus tard lors du dépôt de la demande de permis de construire ou d'aménager. Il est rendu public selon des modalités fixées par le décret mentionné à la première phrase.
M. Philippe Dallier. - Mon premier amendement transférait au représentant de l'État la délivrance des permis de construire et des permis d'aménagement pour les lieux de culte. Je me suis rangé à l'avis de la commission, qui a opté pour un avis simple du préfet.
Mon second amendement visait à assurer la transparence du financement des travaux. La commission m'a demandé de le transformer en sous-amendement ; il s'agit de prévoir la communication des plans de financement au représentant de l'État.
Mme Dominique Vérien, rapporteure. - Avis favorable. La transparence est tout à fait bienvenue. Nous avons adopté un dispositif très proche dans le cadre de la loi Essoc.
Avis favorable à l'amendement n° 382 sous réserve de l'adoption du sous-amendement.
M. Gérald Darmanin, ministre. - Même avis.
Mme Nathalie Goulet. - J'avais déposé un amendement dans le même esprit, mais moins bien rédigé.
Le sous-amendement n°682 rectifié est adopté.
L'amendement n°382, sous-amendé, est adopté.
M. le président. - Amendement n°452 rectifié, présenté par M. Sueur et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
Alinéa 13
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Cette décision est susceptible de recours sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative.
M. Jean-Yves Leconte. - Cet article soumet les associations mixtes aux prescriptions applicables aux associations cultuelles. Or, en l'état, aucune modalité de recours n'est prévue. C'est pourtant la liberté d'association, droit fondamental, qui est en jeu.
Cet amendement ouvre au bénéfice des associations cultuelles un recours en référé contre l'astreinte qui leur est adressée lorsque le préfet juge qu'elles n'ont pas satisfait aux exigences imposées. C'est une contrepartie aux nombreuses exigences et obligations nouvelles qui s'imposeront à elles avec ce texte.
Mme Dominique Vérien, rapporteure. - Retrait ou avis défavorable car satisfait. La demande du préfet est une décision administrative et donc susceptible de recours, y compris en référé.
M. Gérald Darmanin, ministre. - Même avis.
L'amendement n°452 rectifié n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°585 rectifié ter, présenté par MM. de Belenet, L. Hervé, Bonnecarrère, Duffourg, Détraigne, Capo-Canellas, Kern, Henno et Levi, Mmes Billon, Guidez et Saint-Pé, MM. S. Demilly et Laugier, Mme Morin-Desailly, MM. Chauvet, Le Nay, J.M. Arnaud et Folliot, Mme Gatel et M. Longeot.
Alinéa 14
Rédiger ainsi cet alinéa :
« À la demande du représentant de l'État dans le département dans lequel est situé le siège social de l'association, le président du tribunal judiciaire, statuant en référé, peut, si l'association n'a pas satisfait à la mise en demeure à l'expiration du délai prévu au premier alinéa, enjoindre sous astreinte aux dirigeants de l'association de mettre en conformité son objet avec ses activités.
M. Arnaud de Belenet. - Quel juge saisir ? Nous sommes aussi soucieux de préserver la liberté d'association et le libre exercice des cultes que de lutter contre le séparatisme. Cet amendement confie au juge du contrat associatif, en référé, le pouvoir d'enjoindre sous astreinte à une association de mettre en conformité son objet avec ses activités cultuelles.
Mme Dominique Vérien, rapporteure. - Nous en avons longuement débattu en commission. Nous avons considéré qu'il ne fallait pas se priver de la rapidité et de l'efficacité de l'action du préfet, d'autant que sa décision est susceptible de recours. Avis défavorable.
M. Gérald Darmanin, ministre. - Même avis.
L'amendement n°585 rectifié ter n'est pas adopté.
L'article 30, modifié, est adopté.
ARTICLE 32 (Suppression maintenue)
L'amendement n°396 rectifié n'est pas défendu.
L'article 32 demeure supprimé.
ARTICLES ADDITIONNELS avant l'article 33
M. le président. - Amendement n°48, présenté par Mme N. Goulet.
Avant l'article 33
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le 21° de l'article 128 de la loi n°2005-1720 du 30 décembre 2005 de finances rectificative pour 2005, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« ...° Financement des associations régies par la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d'association, la loi du 9 décembre 1905 concernant la séparation des Églises et de l'État et la loi du 2 janvier 1907 concernant l'exercice public des cultes ; ».
Mme Nathalie Goulet. - Le jaune budgétaire sur l'effort financier de l'État en faveur des associations est notre livre de chevet. Il faut dire que le montant des dégrèvements accordés est spectaculaire !
Plutôt qu'un rapport, cet amendement propose que le Gouvernement institue un document politique transversal ou « orange budgétaire », pour une meilleure information du Parlement.
Mme Dominique Vérien, rapporteure. - L'amendement est satisfait. Il existe déjà un jaune budgétaire consacré à l'effort financier de l'État à destination des associations. Avis défavorable.
M. Gérald Darmanin, ministre. - Même avis.
Mme Nathalie Goulet. - Le jaune budgétaire n'a rien à voir avec ce que je demande. Néanmoins, je retire l'amendement.
L'amendement n°48 est retiré.
M. le président. - Amendement n°574 rectifié bis, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Avant l'article 33
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans les six mois suivant l'adoption du présent texte un rapport est remis au Parlement par le Gouvernement sur les relations diplomatiques et économiques avec les États finançant des cultes sur le territoire français.
M. Pierre Ouzoulias. - Nous avons déjà abordé ce sujet à propos d'une certaine affaire alsacienne.
Il est important d'évaluer en toute transparence les modalités, formes et volumes des ingérences étrangères dans l'organisation des cultes en France. Certains États mettent à profit le lien avec leur diaspora pour peser sur la politique française ou diffuser des propos violents contre certaines communautés. Je redis toute ma solidarité à la communauté arménienne victime des Loups gris, faux nez du gouvernement Erdo?an qui, malgré les interventions du ministre, continuent de tenir un discours pro-génocidaire inadmissible dans notre République, et ce alors que le Parlement a reconnu le génocide arménien.
L'ingérence ne doit pas être acceptée - même celle de soi-disant alliés de l'OTAN. Ce doit être un des éléments constitutifs de notre dialogue diplomatique avec la Turquie.
Mme Dominique Vérien, rapporteure. - Je le prends pour un amendement d'appel.
M. Pierre Ouzoulias. - Un cri d'alarme !
Mme Dominique Vérien, rapporteure. - Ce projet de loi vise une meilleure connaissance des financements étrangers des cultes, une plus grande transparence. Le Parlement pourra décider d'une mission d'information ou d'une commission d'enquête. Avis défavorable.
M. Gérald Darmanin, ministre. - Même avis. Nous ne connaissons pas les financements étrangers sur notre sol. C'est tout l'objet de ce projet de loi !
M. Philippe Dallier. - On a quelque idée...
M. Gérald Darmanin, ministre. - Certes, mais ils passent souvent par des faux nez. Dans quelques années, grâce à cette loi, le Gouvernement pourra répondre à votre demande.
Mme Valérie Boyer. - Je partage totalement les propos de M. Ouzoulias. Malgré les injonctions, les Loups gris continuent de narguer la République. Je regrette que ce texte n'aille pas plus loin et que la reconnaissance du génocide de 1915 n'emporte pas de pénalisation du négationnisme et des provocations arménophobes.
Cette revendication n'est pas communautariste. Il s'agit de protéger des Français qui ont souffert dans leur histoire, dans leur mémoire. La concurrence des mémoires est inacceptable : il n'est pas normal que la négation des deux génocides reconnus pareillement par la loi française ne soit pas pénalisée de la même façon.
Je regrette que mes amendements n'aient pas trouvé d'écho favorable. Le Gouvernement s'honorerait à pénaliser ce négationnisme.
M. Jean-Yves Leconte. - La demande de rapport n'est pas illégitime. Puisque ce texte fait un effort de transparence et de traçabilité, il n'est pas illogique d'en tirer les conséquences sur nos relations diplomatiques et économiques. On parle de la Turquie, on pourrait parler aussi de l'Arabie Saoudite et d'autres pays.
M. Jean-Pierre Sueur. - Absolument !
M. Jean-Yves Leconte. - Le délai de six mois après la promulgation est un peu court ; mais après un an ou deux, par exemple, un tel rapport aurait un réel intérêt.
Mme Nathalie Goulet. - Avec Corine Féret et André Reichardt, j'ai demandé aux ambassades les chiffres des financements, directs et indirects. À l'exception du Qatar, toutes ont répondu, et notre rapport de 2016 fournit déjà un état assez précis.
Pour ne pas nourrir le fantasme d'une France inondée de pétrodollars, j'ai réitéré la même demande cette année. L'Arabie Saoudite a fourni des chiffres très précis, sur les mosquées de Nanterre, de Lyon ou de Tours notamment. Les fonds transitent directement de l'ambassade à l'entreprise de construction.
Procédons à un tel tour de table et élaborons un guide des bonnes pratiques. Tracfin suit ces financements de près. Interrogeons les ambassades au lieu de leur faire un procès d'intention.
M. Jean-Pierre Sueur. - Mon réflexe de membre de la commission des lois est de refuser les demandes de rapports, mais c'est un tort d'être trop pénétré d'habitudes ! On parle tellement de financements étrangers qu'il serait très utile que le Gouvernement communique au Parlement, en toute transparence, les informations dont il dispose. À titre exceptionnel, nous voterons cet amendement.
L'amendement n°574 rectifié bis n'est pas adopté.
ARTICLE 33
M. le président. - Amendement n°335, présenté par Mme Benbassa, MM. Benarroche et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme Taillé-Polian.
Supprimer cet article.
Mme Esther Benbassa. - L'article 33 prévoit une astreinte pour les dirigeants d'associations cultuelles qui ne produiraient pas leurs comptes annuels. Ces nouvelles contraintes nuisent à la vitalité des petites et moyennes associations cultuelles.
En quoi cette mesure permettra-t-elle de lutter contre l'islam radical, objectif affiché du projet de loi ? Dans la pratique, c'est une opération très lourde pour des petites associations parfaitement respectueuses des valeurs de la République. Encore une ingérence de l'État dans le libre exercice des cultes !
M. le président. - Amendement identique n°454 rectifié, présenté par M. Sueur et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
M. Jean-Pierre Sueur. - Notre logique est inchangée : la liberté de culte doit être intégralement garantie ; l'État n'a pas à organiser les cultes, mais fait respecter la loi républicaine, y compris dans la sphère religieuse.
L'article 33 alourdira considérablement la tâche d'un certain nombre d'associations, et n'est pas de nature à inciter des associations loi 1901 à opter pour le statut de 1905.
Mme Dominique Vérien, rapporteure. - Cet article permettra de mieux connaître les comptes des associations cultuelles, notamment les financements étrangers. Vous venez de demander un rapport sur le sujet, et voilà que vous voulez supprimer un article qui permet le recueil des informations ! Avis défavorable.
M. Gérald Darmanin, ministre. - Même avis.
M. Jean-Pierre Sueur. - Nous demandions des informations à l'État, mais ne sommes pas favorables à cette contrainte sur les associations.
Les amendements identiques nos335 et 454 rectifié ne sont pas adoptés.
M. le président. - Amendement n°405 rectifié, présenté par Mme N. Delattre, MM. Artano, Bilhac et Cabanel, Mmes M. Carrère et Guillotin, M. Guiol, Mme Pantel et MM. Requier et Roux.
I. - Alinéa 2, deuxième phrase
Remplacer les mots :
, qui prévoit notamment la tenue d'un état séparé des ressources provenant d'un État étranger, d'une personne morale étrangère ou d'une personne physique non résidente en France
par une phrase ainsi rédigée :
. En outre, elles établissent un état séparé des avantages et ressources provenant d'un État étranger, d'une personne morale étrangère ou d'une personne physique non résidente en France.
II. - Alinéa 6
Remplacer les mots :
assurent la certification de leurs
par les mots :
font attester l'état séparé des avantages et ressources mentionné au premier alinéa par un commissaire aux
III. - Après l'alinéa 6
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Elles assurent également la certification de leurs comptes lorsque l'ensemble de leurs ressources annuelles dépasse un seuil défini par décret en Conseil d'État.
IV. - Alinéa 7, deuxième phrase
Remplacer les mots :
qui est annexé aux comptes de l'exercice en cours
par les mots :
qui est mentionné dans l'annexe des comptes de l'exercice
V. - Alinéa 10
1° Remplacer les mots :
du quatrième alinéa
par les mots :
des quatrième et cinquième alinéas
2° Après le mot :
obligation
insérer les mots :
d'attestation et le montant des ressources annuelles à compter duquel s'applique l'obligation
Mme Nathalie Delattre. - Le traité d'apport, trop volumineux pour être annexé, doit être au moins mentionné dans les comptes annuels.
M. le président. - Amendement n°455 rectifié, présenté par M. Sueur et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
Alinéa 6
Supprimer cet alinéa.
M. Jean-Pierre Sueur. - Amendement de repli.
L'amendement n°395 n'est pas défendu.
M. le président. - Amendement n°679, présenté par Mme Vérien, au nom de la commission des lois.
Alinéas 9 et 10
Remplacer ces alinéas par cinq alinéas ainsi rédigés :
4° Sont ajoutés quatre alinéas ainsi rédigés :
« Un décret en Conseil d'État détermine les modalités d'application du quatrième alinéa du présent article, notamment :
« 1° Le montant des avantages et ressources en-dessous duquel l'obligation de certification ne s'applique pas ;
« 2° Le montant des avantages et ressources en-dessous duquel l'obligation de certification est remplie par la désignation d'un commissaire aux comptes nommé pour un mandat de trois exercices et dispensé de certaines diligences définies par décret en Conseil d'État. Une norme d'exercice professionnel homologuée par arrêté du ministre de la justice précise les modalités d'exécution des diligences à accomplir par le commissaire aux comptes et le formalisme qui s'attache à la réalisation de sa mission dans ce cadre ;
« 3° Le montant des avantages et ressources au-dessus duquel l'obligation de certification est remplie par la désignation d'un commissaire aux comptes dans les conditions prévues à l'article L. 612-4 du code de commerce. »
Mme Dominique Vérien, rapporteure. - Les cultes nous ont alertés sur le coût d'une certification par un commissaire aux comptes : 3 000 euros par an, pour un contrôle sur six ans. Une simple attestation, ponctuelle, n'a pas la même valeur que la certification, qui entraîne un signalement à Tracfin le cas échéant. Difficile toutefois d'imposer une obligation dont le coût, sur six ans, pourrait excéder la valeur du don reçu par l'association...
Nous propos donc de fixer des seuils par décret en Conseil d'État. En cas de dons ponctuels ou de faibles montants, les obligations seraient allégées.
Je demande le retrait des amendements nos405 rectifié et 455 rectifié au profit de l'amendement de la commission ; sinon, avis défavorable.
M. Gérald Darmanin, ministre. - Je souscris à l'argumentation de la rapporteure. Je me suis engagé à régler la question par voie réglementaire : en dessous de 153 000 euros, l'obligation de certification par un commissaire aux comptes ne s'applique pas - si l'association relève de la loi de 1905.
Si elle relève de la loi de 1901, l'obligation s'appliquera dès le premier euro, comme pour les partis politiques. C'est une arme pour favoriser la migration vers le régime de la loi de 1905.
Mme Dominique Vérien, rapporteure. - Le seuil de 10 000 euros pour les financements étrangers est maintenu.
M. Gérald Darmanin, ministre. - Il n'y aura pas de commissariat aux comptes exigé en dessous du seuil de 153 000 euros, même en cas de financements étrangers, dès lors que l'association relève de la loi de 1905. Je m'engage à ce que le décret le précise.
Mme Dominique Vérien, rapporteure. - Ce n'était pas tout à fait notre lecture : je maintiens l'amendement, nous y reviendrons.
Mme Nathalie Delattre. - L'amendement de la commission des lois ne prévoit pas la mention des traités d'apport. Y aurait-il moyen de les inclure ?
L'amendement n°405 rectifié n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°455 rectifié.
L'amendement n°679 est adopté.
M. le président. - Amendement n°383 rectifié bis, présenté par MM. Maurey et Cigolotti, Mme Vermeillet, M. Canevet, Mmes Pluchet et Billon, MM. Longeot, Louault, Moga, Delcros, Henno et Folliot, Mme Morin-Desailly, MM. Chasseing, Bonneau, Bonne et Lefèvre, Mme Demas, M. Mandelli, Mme Paoli-Gagin, MM. Vogel, Mizzon, D. Laurent et Bouchet, Mme Jacquemet, MM. Pellevat et Sautarel, Mme Saint-Pé, M. Laménie, Mmes Férat et Létard, M. A. Marc, Mme Gruny, MM. P. Martin, Tabarot et Wattebled, Mme Bonfanti-Dossat, M. Le Nay, Mme Dumont, MM. Duffourg et Hingray et Mmes de Cidrac, Schalck et Herzog.
Après l'alinéa 7
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Tout projet de construction, par les associations et les unions, d'édifices répondant à des besoins collectifs de caractère religieux fait l'objet d'un plan de financement prévisionnel mentionnant, dans des conditions fixées par un décret en Conseil d'État, l'origine des fonds et certifié par un commissaire aux comptes. À l'issue de la réalisation du projet, un bilan financier est présenté dans les mêmes conditions. »
Mme Sylvie Vermeillet. - Cet amendement soumet tout projet de construction d'un édifice du culte par une association cultuelle à l'élaboration d'un plan de financement prévisionnel certifié par un commissaire aux comptes. Il s'agit de renforcer les obligations de transparence qui pèsent sur ces associations en permettant de connaître, avec fiabilité, l'origine des fonds.
M. le président. - Sous-amendement n°683 rectifié à l'amendement n°383 rectifié de M. Maurey, présenté par MM. Dallier et Bascher.
Amendement n°383 rect., alinéa 3
Après la première phrase, insérer deux phrases ainsi rédigées :
Le plan de financement est transmis au représentant de l'État dans le département au plus tard lors du dépôt de la demande de permis de construire ou d'aménager. Il est rendu public selon des modalités fixées par le décret mentionné à la première phrase.
M. Philippe Dallier. - Même objectif que mon sous-amendement à l'article 30.
Mme Dominique Vérien, rapporteure. - Avis favorable.
M. Gérald Darmanin, ministre. - Même avis.
Le sous-amendement n°683 rectifié est adopté.
L'amendement n°383 rectifié bis, sous-amendé, est adopté.
L'article 33, modifié, est adopté.
La séance est suspendue à 20 heures.
présidence de Mme Valérie Létard, vice-présidente
La séance reprend à 21 h 30.
Mise au point au sujet d'un vote
M. Jean-Louis Lagourgue. - Au scrutin public n°105 du 7 avril, M. Claude Malhuret souhaitait s'abstenir.
Mme la présidente. - Acte est donné de cette mise au point. Elle sera publiée au Journal officiel et figurera dans l'analyse politique du scrutin.
Discussion des articles (Suite)
ARTICLE 34
Mme la présidente. - Amendement n°669, présenté par Mme Eustache-Brinio, au nom de la commission des lois.
Alinéa 2
Compléter cet alinéa par les mots :
et sont ajoutés les mots : « de la présente loi »
L'amendement rédactionnel n°669, accepté par le Gouvernement, est adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°384 rectifié, présenté par MM. Maurey et Cigolotti, Mmes Vermeillet et Pluchet, M. Canevet, Mme Billon, MM. Longeot, Louault, Moga, Delcros, Henno, Folliot, Chasseing, Bonneau, Bonne et Lefèvre, Mme Demas, MM. Mandelli et Cabanel, Mme Paoli-Gagin, MM. Vogel, Mizzon, D. Laurent et Bouchet, Mme Jacquemet, MM. Pellevat et Sautarel, Mme Saint-Pé, M. Laménie, Mme Férat, M. A. Marc, Mmes Gruny, Herzog, Schalck et de Cidrac, MM. Hingray et Duffourg, Mme Dumont, M. Le Nay, Mme Bonfanti-Dossat et MM. Wattebled, Tabarot et P. Martin.
I. - Alinéa 5
Remplacer le mot :
cinq
par le mot :
six
II. - Alinéa 6, première phrase
Après la première occurrence du mot :
association
insérer les mots :
ou le projet de construction de l'édifice répondant à des besoins collectifs de caractère religieux
Mme Sylvie Vermeillet. - Cet amendement étend à la construction des lieux de culte les obligations en matière de transparence régissant le financement des associations cultuelles.
Toute personne intéressée, le ministère public ou le représentant de l'État dans le département pourront saisir le président du tribunal judiciaire pour enjoindre sous astreinte les dirigeants de l'association maîtresse d'ouvrage de produire le plan de financement et, le cas échéant, le bilan financier de l'opération.
Mme Dominique Vérien, rapporteure. - Par cohérence avec les amendements nos382 et 383 adoptés précédemment, avis favorable.
M. Gérald Darmanin, ministre. - Avis favorable.
L'amendement n°384 rectifié est adopté.
L'article 34, modifié, est adopté.
ARTICLE 35
L'amendement n°359 n'est pas défendu.
Mme la présidente. - Amendement n°202 rectifié, présenté par Mme V. Boyer, MM. Boré et Le Rudulier, Mme Goy-Chavent, MM. Bascher, Meurant, Charon, Longuet et Bouchet, Mme Drexler, MM. Genet, Savary et H. Leroy, Mme Bourrat et MM. Segouin et Tabarot.
I. - Alinéa 2
Supprimer les mots :
par un État étranger,
II. - Après l'alinéa 16
Insérer trois alinéas ainsi rédigés :
« .... - Les associations cultuelles ne peuvent bénéficier directement d'avantages ou de ressources versés en numéraire ou consentis en nature par un État étranger.
« Un financement indirect est autorisé par l'intermédiaire d'une fédération départementale regroupant les associations cultuelles auxquelles sont destinés ces avantages ou ressources, ou, à défaut, d'une fondation nationale regroupant ces associations cultuelles. Les fédérations départementales ou la fondation nationale précitées sont organisées sur le fondement de l'article 18 de la présente loi.
« La fédération départementale et la fondation nationale sont soumises aux dispositions du présent article.
Mme Valérie Boyer. - La maire de Strasbourg a accepté de financer la construction d'une mosquée à hauteur de 2,5 millions d'euros. Derrière l'association bénéficiaire, il y a la Turquie d'Erdo?an, nouveau calife qui veut mettre le feu à l'Europe, comme on l'a encore vu à Ankara avec le traitement réservé à Mme von der Leyen. Sa stratégie : le séparatisme. Son but : entraver l'intégration des Français d'origine turque et plus largement des musulmans. Pour lui, cette intégration est un crime contre l'humanité ! Cela passe par les réseaux sociaux et par toutes sortes d'actions de lobbying, mais aussi par les 300 à 400 lieux de culte liés à la Turquie - soit 15 % des 2 600 mosquées de France.
Cet amendement pose un principe d'interdiction du financement direct des organisations, établissements et lieux cultuels musulmans par des États étrangers, qui ne pourraient plus financer qu'une fédération départementale ou, à défaut, une fédération nationale, l'État gardant la possibilité de suspendre ou d'interdire un financement qu'il juge contraire à ses intérêts.
Mme Dominique Vérien, rapporteure. - Cet amendement comporte des risques juridiques, celui d'être considéré comme une entrave disproportionnée à la liberté de culte, et celui d'être contraire à la libre circulation des capitaux consacrée par l'article 63 du Traité de fonctionnement de l'Union européenne.
L'article 35 vise à identifier les financements étrangers, pas forcément à les interdire. Avis défavorable.
M. Gérald Darmanin, ministre. - Même avis.
L'amendement n°202 rectifié n'est pas adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°406 rectifié, présenté par Mme N. Delattre, MM. Artano, Bilhac et Cabanel, Mmes M. Carrère et Guillotin, M. Guiol, Mme Pantel et MM. Requier et Roux.
I. - Alinéa 2
Après le mot :
déclaration
insérer les mots :
attestée par un commissaire aux comptes
II. - Alinéa 17
1° Après le mot :
particulier
insérer les mots :
le montant des avantages et ressources à compter duquel s'applique l'obligation d'attestation mentionnée au I, ainsi que
2° Supprimer les mots :
avantages et
Mme Guylène Pantel. - Cet amendement donne les moyens aux commissaires aux comptes de mieux identifier les financements étrangers d'associations cultuelles.
Mme Dominique Vérien, rapporteure. - L'idée est d'attester, plutôt que de certifier les comptes. Avis défavorable.
M. Gérald Darmanin, ministre. - Même avis.
L'amendement n°406 rectifié est retiré.
L'amendement n°360 n'est pas défendu.
Mme la présidente. - Amendement n°616, présenté par M. Mohamed Soilihi et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants.
I. - Alinéa 4
Supprimer les mots :
, les titres de créance, les échanges, cessions ou transferts de créance
II. - Alinéa 14, première phrase
Remplacer les mots :
des obligations de déclaration prévues
par les mots :
de l'obligation de déclaration prévue
III. - Alinéa 17
Remplacer les mots :
organismes, entités, personnes et dispositifs mentionnés au II
par les mots :
fiducies et les personnes morales de droit français mentionnées au dernier alinéa du II
M. Thani Mohamed Soilihi. - L'article 35 encadre utilement les ressources des associations cultuelles provenant de l'étranger.
Cet amendement clarifie les opérations juridiques constituant un avantage ou une ressource soumises à déclaration en excluant certains titres de créance ; il apporte également des correctifs rédactionnels.
Mme Dominique Vérien, rapporteure. - Cet amendement revient sur l'extension votée à l'Assemblée nationale après avis favorable du Gouvernement. Qu'en pense donc ce dernier ?
M. Gérald Darmanin, ministre. - C'est un toilettage nécessaire. Avis favorable.
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. - Quel talent ! (Sourires)
Mme Dominique Vérien, rapporteure. - Avis favorable.
L'amendement n°616 est adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°300, présenté par Mme N. Goulet.
Alinéa 4
Après les mots :
transferts de créance,
insérer les mots :
les parts des sociétés civiles immobilières
Mme Nathalie Goulet. - Coordination avec un amendement à l'article 12 bis, incluant les parts de SCI dans les éléments à déclarer.
Mme Dominique Vérien, rapporteure. - Avis favorable à ce complément utile.
M. Gérald Darmanin, ministre. - Il me semblait satisfait, mais avis favorable, pour complaire à Mme Goulet.
L'amendement n°300 est adopté.
L'amendement n°361 n'est pas défendu.
Mme la présidente. - Amendement n°87 rectifié, présenté par MM. Karoutchi et Pemezec, Mmes Garriaud-Maylam et Thomas, MM. Burgoa, D. Laurent, Regnard et Bonne, Mme Chauvin, MM. Guerriau et Mandelli, Mmes Drexler et Dumont, M. Sido, Mme Procaccia, MM. Cambon, Lefèvre, Meurant, Vogel et Decool, Mmes Belrhiti et V. Boyer, M. Menonville, Mmes Bellurot et Imbert, M. Laugier, Mmes Puissat, Goy-Chavent, Billon et Férat, MM. Cuypers et Moga, Mme F. Gerbaud, MM. Saury, P. Martin, Gremillet, Boré, Le Rudulier, C. Vial et Bouchet, Mmes Delmont-Koropoulis et Lassarade, M. Sautarel, Mme Micouleau, M. Longeot, Mme Deroche, M. Duplomb, Mmes Pluchet et Malet, MM. Belin, Chasseing et Pointereau, Mme Bourrat, M. Houpert, Mme Paoli-Gagin, MM. Le Gleut, Babary, Savin et Laménie, Mmes Schalck, Boulay-Espéronnier et Di Folco, M. Maurey, Mme de Cidrac, MM. Bonhomme et H. Leroy, Mme Morin-Desailly, M. Rapin, Mme Guidez et M. Segouin.
I. - Alinéa 12
Remplacer les mots :
peut s'opposer
par les mots :
s'oppose
II. - Alinéa 13
Remplacer les mots :
peut être exercée
par les mots :
s'exerce
Mme Catherine Di Folco. - Défendu.
Mme Dominique Vérien, rapporteure. - Avis défavorable.
M. Gérald Darmanin, ministre. - Avis défavorable.
L'amendement n°87 rectifié est retiré.
L'article 35, modifié, est adopté.
ARTICLES ADDITIONNELS après l'article 35
L'amendement n°362 n'est pas défendu.
Mme la présidente. - Amendement n°44, présenté par Mme N. Goulet.
Après l'article 35
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le Gouvernement remet au Parlement, dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, un rapport établi conjointement entre le ministère de l'intérieur, le ministère chargé de la culture et le ministère des affaires étrangères évaluant les possibilités de mettre en place un guide des bonnes pratiques à destination des ambassades étrangères en France.
Ce guide porte sur les méthodes et les précautions à mettre en place préalablement au financement d'associations ayant un lien direct ou indirect avec une activité cultuelle, et ce afin d'assurer cohérence et transparence.
Mme Nathalie Goulet. - S'agissant d'une mesure réglementaire, j'ai utilisé la voie d'une demande de rapport - que je sais vouée à l'échec. Monsieur le ministre, il s'agit de moraliser le comportement des ambassades, notamment celles des pays à forte capacité contributive, à travers un guide de bonnes pratiques pour le financement des lieux de culte.
Mme Dominique Vérien, rapporteure. - Avis défavorable à cet amendement d'appel. Sur le fond, le guide de bonnes pratiques est une bonne idée.
M. Gérald Darmanin, ministre. - Je suis prêt à travailler avec vous ce sujet, madame Goulet. Avis défavorable à cette demande de rapport.
L'amendement n°44 est retiré.
L'article 36 bis est adopté, ainsi que l'article 36 bis.
ARTICLE 36 TER
Mme la présidente. - Amendement n°263 rectifié, présenté par MM. Capus, Menonville, Guerriau et Decool, Mme Mélot, MM. Lagourgue, Wattebled, Verzelen et Chasseing, Mmes Joseph et Bonfanti-Dossat et M. Chatillon.
Supprimer cet article.
M. Jean-Louis Lagourgue. - Il est important de lutter contre les ingérences de puissances étrangères sur le sol français en contrôlant le financement de certaines associations cultuelles. L'article 36 ter, qui plafonne les dons en liquide, semble pourtant manquer sa cible et risque de créer des contraintes injustifiées.
Mme la présidente. - Amendement identique n°336, présenté par Mme Benbassa, MM. Benarroche et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme Taillé-Polian.
Mme Esther Benbassa. - Cet article est discriminatoire et injustifié : comment appliquer l'interdiction de tout don en espèces de plus de 150 euros lorsqu'un don est reçu anonymement au cours d'une collecte ?
Il aurait été préférable d'aligner sur le droit commun associatif les obligations imposées aux associations cultuelles. Le paiement en espèces de certaines créances est autorisé jusqu'à 1 000 euros par le code monétaire et financier. Certes, nous devons lutter contre le blanchiment d'argent et le financement du terrorisme, mais cette mesure est inefficace. Ne créons pas de nouvelles contraintes pour les associations cultuelles.
Mme la présidente. - Amendement identique n°554 rectifié, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
M. Pierre Ouzoulias. - Défendu.
Mme Dominique Vérien, rapporteure. - Notre amendement n°670 prévoit la fixation du seuil par décret. Sur le principe, la limitation est utile et facilite la traçabilité des financements des associations cultuelles. Il est vrai que le seuil de 150 euros est difficilement contrôlable. Avis défavorable.
M. Gérald Darmanin, ministre. - Le Gouvernement a donné un avis de sagesse à l'amendement du président Lagarde qui a été adopté à l'Assemblée nationale. Même chose ici.
Les amendements identiques nos263 rectifié, 336 et 554 rectifié ne sont pas adoptés.
Mme la présidente. - Amendement n°583 rectifié quinquies, présenté par MM. de Belenet, L. Hervé, Bonnecarrère, Duffourg, Détraigne et Capo-Canellas, Mme Férat, MM. Kern, Henno et Levi, Mmes Billon et Saint-Pé, MM. S. Demilly et Laugier, Mmes Perrot et Morin-Desailly, MM. Chauvet, Le Nay, J.M. Arnaud et Folliot, Mme Gatel et M. Longeot.
I. - Alinéa 1, au début
Insérer la mention :
I. -
II. - Alinéa 2
1° Remplacer les mots :
de plus de 150 euros
par les mots :
supérieur à un montant fixé par décret
2° Après le mot :
cultuelle
rédiger ainsi la fin de cet alinéa :
ne peut être effectué en espèces.
III. - Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
II. - Est puni de l'amende prévue par le 4° de l'article 131-13 du code pénal, et, en cas de récidive, d'une amende double, le fait pour le directeur ou l'administrateur d'une association ou d'une union de recevoir un don en méconnaissance de l'interdiction prévue au I du présent article.
M. Arnaud de Belenet. - Il vient d'être très bien défendu par Mme la rapporteure.
Mme la présidente. - Amendement identique n°670, présenté par Mme Eustache-Brinio, au nom de la commission des lois.
Mme Dominique Vérien, rapporteure. - Défendu.
Mme la présidente. - Amendement n°417 rectifié, présenté par MM. Cuypers et Retailleau, Mmes Chain-Larché et Thomas, M. Regnard, Mme de Cidrac, MM. de Legge, Cardoux, D. Laurent et Boré, Mme V. Boyer, MM. Mandelli, Reichardt et Le Rudulier, Mme Gruny, MM. Brisson, Longuet et Lefèvre, Mme Lassarade, MM. Bas et de Nicolaÿ, Mme Boulay-Espéronnier, MM. Bonne, Belin, Laménie et B. Fournier, Mme Lopez et MM. Charon et Mouiller.
Alinéa 2
Remplacer les mots :
de 150 euros
par les mots :
d'un montant supérieur à celui fixé en application du 1° du I de l'article D. 112-3 du code monétaire et financier
M. Pierre Cuypers. - Défendu.
Mme la présidente. - Amendement n°582 rectifié quater, présenté par MM. de Belenet, L. Hervé, Bonnecarrère, Duffourg, Marseille, P. Martin et Capo-Canellas, Mme Férat, MM. Kern, Henno et Levi, Mmes Billon et Saint-Pé, MM. S. Demilly et Laugier, Mmes Perrot et Morin-Desailly, MM. Chauvet, Le Nay, J.M. Arnaud et Folliot, Mme Gatel et M. Longeot.
Alinéa 2
Remplacer le nombre :
150
par le nombre :
1000
M. Arnaud de Belenet. - Défendu.
Mme la présidente. - Amendement n°264 rectifié, présenté par MM. Capus, Menonville, Guerriau et Decool, Mme Mélot, MM. Lagourgue, Wattebled, Verzelen et Chasseing, Mme Joseph, M. de Legge, Mme Bonfanti-Dossat et M. Chatillon.
Alinéa 2
Remplacer le nombre :
150
par le nombre :
3 000
M. Jean-Louis Lagourgue. - Cet amendement de repli aligne le seuil de déclaration sur celui applicable aux cadeaux d'affaires figurant parmi les frais généraux, soit 3 000 euros pour chaque exercice.
M. Jean-Pierre Sueur. - De plus en plus spirituel !
Mme Dominique Vérien, rapporteure. - Avis défavorable à tous ces amendements au profit de l'amendement n°670 de la commission.
M. Gérald Darmanin, ministre. - Je continue sur la voie de la sagesse.
Les amendements identiques nos583 rectifié quinquies et 670 sont adoptés.
Les amendements nos417 rectifié, 582 rectifié quater et 264 rectifié n'ont plus d'objet.
L'article 36 ter, modifié, est adopté, ainsi que l'article 36 quater.
SECTION 2 : POLICE DES CULTES
L'amendement n°586 rectifié ter est retiré.
ARTICLE ADDITIONNEL avant l'article 37
Mme la présidente. - Amendement n°504, présenté par M. Ravier.
Avant l'article 37
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l'article L. 102-2 du code de l'urbanisme, il est inséré un article L. 102-2-... ainsi rédigé :
« Art. L. 102-2-.... - L'aspect extérieur des bâtiments voués à l'exercice du culte doit respecter les conditions d'une insertion harmonieuse dans l'environnement local, en cohérence avec les caractéristiques architecturales des constructions qui l'entourent.
« La présence d'éléments ostentatoires, notamment par leur forme ou leurs dimensions, au-dessus d'eux, accolés ou à proximité, est soumise à autorisation du représentant de l'État dans le département dans les conditions fixées par décret en Conseil d'État. Cette autorisation ne peut être accordée si ces éléments sont de nature à provoquer un trouble à l'ordre public.
« L'espace, bâti ou non bâti, voué à l'exercice du culte, avec ses dépendances, ne peut en aucun cas servir de support à la manifestation ou diffusion d'idéologie fondamentaliste allant à l'encontre des principes de la République. »
M. Stéphane Ravier. - Depuis quelques années, on voit pousser d'étranges bâtiments tout en hauteur et peu esthétiques : dans les campagnes, les éoliennes ; dans nos villes, les minarets.
Attaché à nos paysages, je ne veux ni des unes, ni des autres. Quand ils viendront chez vous, vous les refuserez aussi. S'ils poussent partout, nous vivrons peut-être toujours en République, mais plus en France. La France, n'en déplaise aux militants laïcs (protestations à gauche), ce sont nos villages et leurs clochers ; si vous voulez voir des minarets, je vous invite à traverser la Méditerranée.
Nous n'avons pas à subir les délires de conquête de ceux qui veulent imposer leur religion, comme à Poitiers, où une mosquée géante dotée d'un minaret financée par le Qatar porte le nom de Pavé des Martyrs - référence non aux soldats de Charles Martel mais à ceux de l'armée musulmane. Imagine-t-on une église anglicane en France porter le nom de Waterloo, une église orthodoxe celui de Bérézina ?
Cet amendement met une limite aux provocations ; si vous le rejetez, vous en porterez la responsabilité devant les maires et les Français attachés à l'identité de leur ville et de leur village.
Mme Jacqueline Eustache-Brinio, rapporteure de la commission des lois. - Ces bâtiments sont soumis au code de l'urbanisme. Après, tout est question de goût... Avis défavorable.
M. Gérald Darmanin, ministre. - Vous faites de la politique médiatique : vous vous intéressez moins au texte qu'à la vidéo que vous allez publier sur internet en sortant de séance...
Il y a toujours le PLU. Élu local, il m'est arrivé de conditionner le permis de construire à l'absence de minaret, et l'association a très bien compris. Comme le demande souvent le Sénat, faisons confiance aux élus locaux !
Mme Esther Benbassa. - Il y a un complot des écologistes, qui veulent des éoliennes, et des islamistes, qui veulent des minarets. C'est bien connu ! (Rires)
M. Stéphane Ravier. - C'est la convergence !
Mme Esther Benbassa. - Contre la France ! (Sourires)
L'amendement n°504 n'est pas adopté.
ARTICLE 37
Mme la présidente. - Amendement n°337, présenté par Mme Benbassa, MM. Benarroche et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme Taillé-Polian.
Supprimer cet article.
Mme Esther Benbassa. - L'aggravation du quantum de peines relatives à la police des cultes, de 450 euros au plus à 1 500, voire 3 000 euros, est superflue et abusive. Cette accumulation de contraintes n'est pas compatible avec le libre exercice des cultes et n'aura aucun effet concret sur la lutte contre le terrorisme et l'islamisme radical.
Mme Jacqueline Eustache-Brinio, rapporteure. - Cet article actualise la police des cultes, dont le quantum des peines est devenu obsolète, générant un décalage avec le code pénal. Les infractions à la liberté de conscience et à la laïcité sont paradoxalement moins punies que l'incitation à la haine. Avis défavorable.
M. Gérald Darmanin, ministre. - Même avis.
L'amendement n°337 n'est pas adopté.
L'article 37 est adopté.
ARTICLE ADDITIONNEL après l'article 37
Mme la présidente. - Amendement n°180 rectifié, présenté par Mme V. Boyer, MM. Le Rudulier et Boré, Mme Goy-Chavent, MM. Bascher, Meurant, Charon, Longuet et Bouchet, Mme Drexler, MM. Genet et H. Leroy, Mmes Bourrat et Schalck et MM. Segouin et Tabarot.
Après l'article 37
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article 25 de la loi du 9 décembre 1905 concernant la séparation des Églises et de l'État est complété par une phrase ainsi rédigée : « À l'exception de la lecture des textes fondateurs, la langue utilisée pour les prêches est le français ».
Mme Valérie Boyer. - Lorsque certains usages sont en contradiction avec la culture nationale, ils doivent être combattus. C'est le sens de ce texte. La langue vernaculaire de la religion musulmane doit être le français, langue de la République selon l'article premier de la Constitution.
Cet amendement, inspiré du livret tricolore d'Oser la France sur l'islam, interdit l'usage d'une langue étrangère pour les prêches, à l'exception bien évidemment de la lecture des textes fondateurs.
Mme Jacqueline Eustache-Brinio, rapporteure. - On peut comprendre cet amendement (on le conteste sur les travées du GEST et du groupe SER) mais on ne peut pas s'immiscer dans l'organisation du culte. Retrait ou avis défavorable.
M. Gérald Darmanin, ministre. - Même avis.
Mme Nathalie Goulet. - J'ai un conflit de loyauté sur un tel amendement : il viole complètement la loi de 1905 ; mais dans le cadre des travaux que nous avons conduits avec MM. Sueur et Reichardt sur la radicalisation, les imams nous ont dit que la khutba - le prêche - devait être dans la langue du pays. En Turquie, il est en turc, par exemple. Mais si je suis favorable sur le fond, je ne peux pas le voter.
M. Jean-Pierre Sueur. - Nous arrivons à des extrémités, madame Boyer. La langue de la France est le français, c'est entendu. Mais cela n'a jamais entraîné une interdiction de parler une autre langue.
Allez-vous dire à la paroisse portugaise, à la paroisse polonaise, que leurs cultes devront se tenir en français ? Vous allez jusqu'à distinguer les textes fondateurs du reste. Et le latin ? « Sans le latin... », comme le chantait Georges Brassens.... (Sourires) Il ne revient pas à l'État d'entrer dans ces considérations. Laissons les cultes libres tant qu'ils respectent la loi. C'est aussi simple que cela. (M. Thani Mohamed Soilihi applaudit.)
Mme Esther Benbassa. - Madame Boyer, avez-vous déjà été dans un lieu de culte autre qu'une église ? La séparation entre lecture des textes fondateurs et paroles rituelles n'est pas si simple ! Que voulez-vous, à la fin ? Que les musulmans se convertissent ? Ce n'est pas à l'État, dans un pays laïc, de dicter les langues du rituel. Cela va trop loin. Diriez-vous la même chose pour une église orthodoxe où l'on parle russe, ou pour une église anglicane où l'on parle anglais ? Qui ciblez-vous ? Un peu de décence ! Qui ciblez-vous, monsieur Ravier, avec vos minarets ? (Protestations à droite)
M. Philippe Pemezec. - Gardez vos leçons de morale !
Mme Esther Benbassa. - L'histoire s'en souviendra. (Protestations à droite)
M. Gérald Darmanin, ministre. - Je pensais qu'il s'agissait d'un amendement d'appel... Le débat a pourtant déjà eu lieu en 1902 : le petit père Combes avait publié une circulaire pour interdire l'usage du breton dans le catéchisme - cela avait été beaucoup débattu, singulièrement au Sénat ! « Le presbytère, sans le latin, a perdu de son charme »... Le mieux est l'ennemi du bien et l'excès ne rend pas service à l'intérêt général.
Quant à interdire l'arabe dans les mosquées, c'est une violation évidente de la séparation des églises et de l'État. Je ne vais pas me transformer en grand mamamouchi, prêchant pour les musulmans le vendredi, les juifs le samedi, les chrétiens le dimanche, et les autres religions le reste de la semaine ! (Sourires)
Ce n'est pas à nous de dire ce qu'est une langue sacrée et ce qui ne l'est pas ! Madame Boyer, vous auriez pu écrire une version 2.0 du sketch des Inconnus sur les sectes ! (Sourires à gauche)
Les salafistes ne professent pas en arabe - sinon en arabe de cuisine - mais en français. L'imam de Brest, de triste mémoire, qui prétendait qu'écouter de la musique vous changeait en porc, ne parlait pas arabe, sinon quelques mots, comme les médecins de Molière parlaient latin ; ce n'était pas un imam détaché.
La radicalisation se fait bien plus sur internet que dans les lieux de culte. Le problème est plutôt que les musulmans français, surtout les plus jeunes d'entre eux, ne sont plus capables de se faire une idée de l'interprétation des textes sacrés.
Madame Boyer, je sais que vous avez beaucoup critiqué l'évocation par le Président de la République, aux Mureaux, de l'apprentissage de l'arabe ou du turc, qu'il juge préférable d'organiser à l'école, comme pour les autres diasporas, plutôt que dans les lieux de culte. Interdire une langue, c'est rajouter une vexation.
À Tourcoing, les harkis ont une mosquée avec un drapeau français, où les gens parlent arabe. Irais-je le leur interdire, eux qui se sont battus pour notre pays, qui portent la Légion d'honneur et la médaille militaire au revers du veston - et ainsi les jeter dans les bras des islamistes ? Ce n'est pas raisonnable !
Pour l'honneur de ce débat, vous feriez mieux de retirer cet amendement.
Mme Valérie Boyer. - Je ne voulais pas être excessive. Ce n'est pas une raison pour être méprisant et caricatural.
De nombreux rapports soulignent l'importance que les prêches soient en français. Il est essentiel que la langue française soit employée majoritairement. Nous parlons d'extrémismes. Monsieur le ministre, vous savez combien j'ai travaillé sur les harkis, combien je suis aux côtés de ceux qui ont choisi la France. Cet amendement est issu du travail sérieux de plusieurs parlementaires.
L'amendement n°180 rectifié n'est pas adopté.
ARTICLE 38
L'amendement n°363 n'est pas défendu.
Mme la présidente. - Amendement n°427 rectifié, présenté par M. Sueur et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
Après l'alinéa 2
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
...° Après la première occurrence du mot : « culte, », sont insérés les mots : « à manifester ou à s'abstenir de manifester son appartenance à l'exercice d'un culte sans préjudice des dispositions législatives ou réglementaires qui régissent l'absence de manifestation à l'exercice d'un culte, » ;
M. Jean-Pierre Sueur. - Cet article modifie la loi de 1905 afin de renforcer les peines prévues en cas d'atteinte à la liberté d'exercer un culte ou de s'abstenir de l'exercer, en les alignant sur celles prévues par le code pénal pour des infractions similaires.
Notre amendement, encore plus précis, sanctionne les pressions sur une personne d'afficher ou de ne pas afficher des signes religieux contre sa volonté, afin que chacun soit libre.
Mme Jacqueline Eustache-Brinio, rapporteure. - Je comprends l'objectif mais la rédaction pose problème au regard du libre exercice du culte. Avis défavorable.
M. Gérald Darmanin, ministre. - Même avis.
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. - Je n'ai pas compris l'explication de la rapporteure. S'il y a un problème de rédaction, nous pouvons le rectifier. Cet amendement va dans votre sens, soyez cohérente !
Mme Jacqueline Eustache-Brinio, rapporteure. - Je maintiens ma position.
M. Jean-Pierre Sueur. - Sans aucune argumentation !
L'amendement n°427 rectifié n'est pas adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°426 rectifié, présenté par M. Sueur et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
Alinéa 3
Supprimer cet alinéa.
L'amendement n°426 rectifié est retiré.
L'article 38 est adopté.
ARTICLE ADDITIONNEL après l'article 38
Mme la présidente. - Amendement n°142 rectifié, présenté par Mme N. Delattre, MM. Artano et Bilhac, Mme M. Carrère, MM. Fialaire et Guérini, Mme Pantel, MM. Requier, Roux, Cabanel et Gold, Mme Guillotin et M. Guiol.
Après l'article 38
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans le respect des dispositions de la loi du 9 décembre 1905 concernant la séparation des Églises et de l'État, le principe de laïcité signifie : d'une part, que la République assure la liberté de pensée, de conscience et de religion en garantissant le droit de manifester son appartenance religieuse comme son absence d'appartenance religieuse, ainsi que, le cas échéant, de changer de religion ; d'autre part, que la République garantit une stricte neutralité des personnes exerçant une mission de service public vis-à-vis de leurs usagers et réciproquement, qu'elle interdit à quiconque de se prévaloir de ses croyances religieuses pour s'affranchir des règles communes régissant les relations entre collectivités publiques et particuliers.
Mme Véronique Guillotin. - Cet amendement définit le principe de laïcité. Nous reprenons dans ce texte l'article premier de la loi de 1905 affirmant la liberté de conscience avec pour corollaire la liberté de religion, l'article 2 concernant la séparation de l'État et des Églises, la neutralité des personnes exerçant une mission de service public, consacrée depuis dans la loi du 20 avril 2016, et enfin la définition ajoutée par la jurisprudence du Conseil constitutionnel de 2004.
Mme Jacqueline Eustache-Brinio, rapporteure. - Il est très difficile d'avoir une définition exhaustive. Gare à la complexification. Retrait ou avis défavorable.
M. Gérald Darmanin, ministre. - Même avis.
L'amendement n°142 rectifié est retiré.
ARTICLE 39
Mme la présidente. - Amendement n°338, présenté par Mme Benbassa, MM. Benarroche et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme Taillé-Polian.
Alinéa 2
1° Après le mot :
provocation
insérer le mot :
directe
2° Supprimer les mots :
ou à conduire une section du peuple à se prévaloir de son origine ou de sa religion pour s'exonérer du respect de la règle commune,
3° Remplacer les mots :
sept ans d'emprisonnement et du 75 000 euros d'amende
par les mots :
d'un emprisonnement de trois mois à deux ans
Mme Esther Benbassa. - Cet article aggrave les peines prévues par l'article 35 de la loi du 9 décembre 1905, portant la sanction d'une peine de trois mois à deux deux ans d'emprisonnement à sept ans et 75 000 euros d'amende. Cette aggravation est superflue et abusive.
Le Conseil d'État a émis un avis sévère sur l'alourdissement des peines prévues et la suppression de la responsabilité spécifique des ministres du culte. Revenons à la rédaction initiale.
Les amendements nos 365 et 364 ne sont pas défendus.
Mme Jacqueline Eustache-Brinio, rapporteure. - La place du ministre du culte est plus importante que toute autre dans le lieu de culte, ce qui justifie des peines spécifiques. Avis défavorable.
M. Gérald Darmanin, ministre. - Même avis.
L'amendement n°338 n'est pas adopté.
M. Jean-Pierre Sueur. - L'Assemblée nationale avait supprimé l'article 35 de la loi de 1905. Patrick Weil a expliqué combien cet article était précieux historiquement et je salue son rétablissement par le Sénat. Le groupe SER votera donc cet article.
L'article 39 est adopté.
ARTICLES ADDITIONNELS après l'article 39
Mme la présidente. - Amendement n°91 rectifié bis, présenté par MM. Karoutchi et Pemezec, Mmes Garriaud-Maylam et Thomas, MM. Burgoa, Bascher, D. Laurent, Regnard et Bonne, Mme Chauvin, MM. Guerriau et Mandelli, Mmes Drexler et Dumont, M. Sido, Mme Procaccia, MM. Cambon, Lefèvre, Meurant, Vogel et Decool, Mme Belrhiti, M. Menonville, Mmes Bellurot et Imbert, M. Laugier, Mmes Puissat, Goy-Chavent, Billon et Férat, MM. Cuypers, de Belenet et Moga, Mme F. Gerbaud, MM. Saury, Gremillet, Boré, Le Rudulier et Bouchet, Mmes Delmont-Koropoulis et Lassarade, M. Sautarel, Mme Micouleau, M. Longeot, Mmes Canayer et Deroche, M. Duplomb, Mmes Pluchet et Malet, MM. Belin et Chasseing, Mme Bourrat, M. Houpert, Mme Paoli-Gagin, MM. Le Gleut et Laménie, Mmes L. Darcos, Schalck et Boulay-Espéronnier, MM. Maurey, Bonhomme, H. Leroy et Rapin, Mme Guidez et M. Segouin.
Après l'article 39
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le septième alinéa de l'article 24 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse est complété par une phrase ainsi rédigée : « Les mêmes peines sont applicables aux individus qui auront provoqué à la haine de la France. »
M. Philippe Pemezec. - Les propos haineux contre la France se banalisent, en particulier sur les réseaux sociaux, dans des chansons et des écrits. Ces comportements témoignent non seulement d'une défiance à l'égard des valeurs et des symboles de la France mais aussi d'une absence d'assimilation à la communauté nationale.
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. - D'intégration !
M. Philippe Pemezec. - Dans certains cas, ils peuvent constituer un préalable au terrorisme.
Or notre droit est silencieux sur ce point. Cet amendement crée un délit d'incitation à la haine de la France. À l'instar de ce qui existe pour l'incitation à la haine raciale, les individus en cause seront passibles d'une peine d'emprisonnement d'un an et de 45 000 euros d'amende.
Mme la présidente. - Amendement identique n°181 rectifié bis, présenté par Mme V. Boyer et MM. Charon, Longuet, Genet, Savary et Tabarot.
Mme Valérie Boyer. - L'article 24 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse ne prévoit pas le délit d'incitation à la haine de la France. Il prévoit cependant une sanction pour tout cri ou chant séditieux proféré dans des réunions publiques. Notre droit définit aussi un mouvement insurrectionnel comme une violence collective contre les institutions de la République ou qui porte atteinte à l'intégrité du territoire national. Rien n'interdit d'exprimer la haine de la France.
Je citerai Clemenceau pour finir : « La France, hier soldat de dieu, aujourd'hui soldat de l'humanité, sera toujours soldat de l'idéal. » La France doit être respectée et les injures condamnées.
Mme Jacqueline Eustache-Brinio, rapporteure. - Nous condamnons tous la haine de la France. L'article 24 de la loi de 1881 condamne déjà à un an et 45 000 euros d'amende tout appel à la haine en raison de l'origine. Votre amendement est satisfait.
Peut-être qu'avec ce texte, nous nous battrons ensemble pour que tout le monde aime la France. Avis défavorable.
M. Gérald Darmanin, ministre. - Même avis.
Mme Valérie Boyer. - J'ai déposé cet amendement, comme le vice-président de l'Assemblée nationale et de nombreux collègues, parce que ce délit n'existe pas.
Compte tenu de toutes les injures dont la France fait l'objet, il est important de créer ce délit.
Mme Éliane Assassi. - Pauvre France !
Mme Valérie Boyer. - Cet amendement pourrait être voté par tous dans cette assemblée car si nous y siégeons, c'est parce que nous aimons la France, et ne voulons pas la voir injuriée.
Les amendements identiques nos91 rectifié bis et 181 rectifié bis ne sont pas adoptés.
Mme la présidente. - Amendement n°182 rectifié, présenté par Mme V. Boyer, MM. Le Rudulier et Boré, Mme Goy-Chavent, MM. Bascher, de Legge, Meurant, Charon, Longuet et Bouchet, Mme Drexler et MM. Genet, Savary, H. Leroy, Segouin et Tabarot.
Après l'article 39
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La loi du 9 décembre 1905 concernant la séparation des Églises et de l'État est ainsi modifiée :
1° Après l'article 35, il est inséré un article 35-1 ainsi rédigé :
« Art. 35-1. - Est puni de cinq ans d'emprisonnement et de 50 000 euros d'amende le fait de qualifier publiquement l'apostasie comme étant un crime. La peine est portée à sept ans d'emprisonnement et 75 000 euros d'amende si cette qualification publique est assortie d'un appel à la violence ou à la haine à l'encontre d'une personne présentée comme un apostat. » ;
2° À l'article 36, les mots : « et 35 » sont remplacés par les mots : « , 35 et 35-1 ».
Mme Valérie Boyer. - L'article premier de la loi de 1905 consacre le principe de la liberté de conscience. Un siècle plus tard, l'intolérance religieuse et les accusations de blasphème resurgissent dans le débat public.
Quitter sa religion, pour se tourner vers une autre ou pour ne pas croire, est une liberté fondamentale.
Contrairement à ce qui a été indiqué en commission, aucun texte ne prévoit le délit de déni d'apostasie. L'article 21 de la loi de 1881 a été abrogé ; la loi de 1905 ne concerne pas l'apostasie mais traite d'une situation où l'on obligerait quelqu'un à pratiquer le culte. L'apostasie, elle, renvoie à la croyance.
Par parallélisme avec la charte prévue dans le projet de loi, nous devons inscrire ce principe dans la loi. La liberté de conscience est attaquée un peu plus chaque jour. Créer ce délit, c'est la sacraliser. La liberté de conscience fait partie du patrimoine culturel de notre pays ; c'est une exception qu'il faut cultiver et protéger.
Mme Jacqueline Eustache-Brinio, rapporteure. - Cet amendement est satisfait par l'article 24 de la loi de 1881. Retrait ?
M. Gérald Darmanin, ministre. - Même avis.
Mme Valérie Boyer. - (Protestations sur les travées du groupe SER et du GEST) Désolée d'insister, mais je ne peux pas entendre qu'il est satisfait, car ce délit n'existe pas.
L'amendement n°182 rectifié n'est pas adopté.
ARTICLE 39 BIS
Mme la présidente. - Amendement n°456 rectifié, présenté par M. Sueur et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
Supprimer cet article.
M. Jean-Pierre Sueur. - L'article 39 bis aggrave les peines lorsqu'un ministre du culte procède à un mariage religieux avant un mariage civil. Est-ce cela qui terrassera le radicalisme islamiste ? Cela n'a aucun rapport avec votre objectif !
Vous n'ignorez pas que dans la théologie sunnite, il n'y a pas de ministre du culte. Tout fidèle peut présider à une cérémonie.
Ce projet de loi est truffé de considérations sans rapport avec l'objectif qu'il poursuit.
Mme Jacqueline Eustache-Brinio, rapporteure. - La pratique existe. La commission est favorable à l'article, qui réaffirme la prééminence du mariage civil sur le mariage religieux. Il a une visée pédagogique, ce qui est utile - ce n'est pas l'ancien professeur que je suis qui dira le contraire. D'après la Chancellerie, la qualification de ministre du culte ne pose pas problème.
M. Gérald Darmanin, ministre. - Le président Sueur se trompe de combat.
Les actes civils sont les seuls qui vaillent dans la République et ils précèdent toujours les actes religieux. Le ministre du culte demande un certificat de mariage civil avant de célébrer le mariage religieux.
Mais de plus en plus, le mariage religieux est utilisé à des fins de polygamie ou pour obtenir des papiers.
Nous aggravons la peine prévue à des fins pédagogiques. De plus, une peine complémentaire d'interdiction du territoire français pourra être prononcée contre celui qui procède au mariage illégal.
L'infraction va souvent de pair avec d'autres : ceux qui président ces mariages illégaux appartiennent en général à des tendances non acceptables de l'islam.
J'ai découvert que la loi ne prévoyait pas obligatoirement le passage devant un officier d'état civil, puisque le code pénal punit ceux qui célèbrent « de manière habituelle » des mariages religieux avant des mariages civils. Parfois, la République peut reconnaître un mariage religieux in extremis réalisé pour que la veuve obtienne une pension.
Ce texte sanctionne le ministre du culte qui prononce ces mariages de manière habituelle : cela me semble proportionné.
M. Jean-Pierre Sueur. - Si l'on reconnaît des exceptions et que l'on met l'accent sur le caractère habituel de la pratique, je me range à vos arguments.
L'amendement n°456 rectifié est retiré.
L'article 39 bis est adopté.
ARTICLE ADDITIONNEL après l'article 39 bis
Mme la présidente. - Amendement n°230 rectifié, présenté par Mme N. Delattre, MM. Artano, Bilhac et Cabanel, Mme M. Carrère, MM. Fialaire et Guérini, Mme Pantel et MM. Requier et Roux.
Après l'article 39 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l'article 433-21 du code pénal, il est inséré un article 433-... ainsi rédigé :
« Art. 433-.... - Le refus de prononcer un divorce religieux par un ministre d'un culte, ou une personne désignée à cette fonction par son culte, alors qu'il lui a été présenté l'acte de divorce justifiant le changement de l'état civil est puni d'un an d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende. »
Mme Nathalie Delattre. - Trop de femmes et de jeunes filles vivent dans une captivité conjugale. Or une cour peut dissoudre un mariage civil, mais pas un mariage religieux. Il faut refuser ce diktat en condamnant tout ministre du culte ou toute personne habilitée à prononcer le divorce dans son culte, lorsqu'il refuserait d'y procéder alors qu'un divorce civil aurait déjà été prononcé. Plusieurs pays et associations nous y incitent.
Mme Jacqueline Eustache-Brinio, rapporteure. - C'est une atteinte excessive à la liberté de culte. L'article 433-21 du code pénal impose seulement au ministre du culte de ne pas prononcer le mariage religieux avant le mariage civil. De plus, le divorce n'existe pas dans certaines religions. Avis défavorable.
M. Gérald Darmanin, ministre. - Même avis.
Mme Nathalie Goulet. - Cet amendement viole la loi de 1905. Le judaïsme a le guett, le divorce religieux. La République va-t-elle intervenir devant le tribunal rabbinique pour exiger un divorce ?
Mme Nathalie Delattre. - Ce qui est excessif, c'est la situation de ces femmes, dont les témoignages sont glaçants.
M. Jean-Yves Leconte. - Sur le territoire de la République, les Françaises et les Français sont protégés par la loi de la République, mais ce n'est pas forcément le cas des femmes étrangères. On ne peut pas voter cet amendement tel qu'il est rédigé, mais il soulève une question légitime.
Mme Valérie Boyer. - Je partage l'intention de Mme Delattre. C'est une situation que nous avons tous rencontrée. Dans toutes les religions, il y a des moyens de séparation : guett, annulation du mariage... La délégation sénatoriale aux droits des femmes pourrait travailler sur ce sujet essentiel.
M. Thani Mohamed Soilihi. - Une femme peut obtenir le divorce devant le juge. Qu'est-ce qui l'empêche de se séparer de son mari ? C'est un cas classique d'exécution d'une décision de justice. Que vient faire le ministre du culte dans cette affaire ?
M. Gérald Darmanin, ministre. - Le divorce, introduit par le Premier consul et par Cambacérès, a suscité des débats nourris. Nous ne nous intéressons qu'aux lois de la République, sans nous intéresser aux dogmes de telle ou telle religion. Nulle femme ne peut être forcée à rester mariée. Elle peut demander le divorce sans l'accord de son mari.
Mme Nathalie Delattre. - Combien de femmes faut-il exfiltrer des quartiers pour cette raison ?
M. Gérald Darmanin, ministre. - Personne ne nie la possibilité de pressions psychologiques ou de violences, mais il n'y a pas lieu de légiférer sur le divorce religieux. Il faut plutôt accompagner ces femmes pour que la République et la justice les protègent.
L'amendement n°230 rectifié n'est pas adopté.
ARTICLE 40
Mme la présidente. - Amendement n°457 rectifié, présenté par M. Sueur et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
I. - Alinéa 3
Compléter cet alinéa par les mots :
ou d'y permettre la prise de parole publique de tout candidat à des fonctions électives
II. - Alinéa 5
Après le mot :
vote
insérer les mots :
ou des initiatives de campagne électorale
M. Jean-Pierre Sueur. - Je retire cet amendement qui interdit la prise de parole politique dans une enceinte religieuse.
L'amendement n°457 rectifié est retiré.
Mme la présidente. - Amendement n°428 rectifié, présenté par M. Sueur et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
Alinéa 6
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Les personnes coupables de cette infraction encourent également, dans les conditions prévues aux articles 131-26 et 131-26-1 du code pénal, une peine complémentaire d'inéligibilité.
M. Jean-Pierre Sueur. - En revanche, mener une campagne électorale dans un lieu de culte est une infraction à la séparation entre l'Église et l'État ; d'où cet amendement qui prévoit une peine d'inéligibilité.
Mme la présidente. - Amendement n°278 rectifié, présenté par MM. Roux, Artano, Bilhac et Cabanel, Mme M. Carrère, M. Corbisez, Mme N. Delattre, MM. Gold et Guérini, Mme Pantel et MM. Requier et Guiol.
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
.... - Le II de l'article 131-26-2 du code pénal est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« ...° Les délits prévus à l'article 26 de la loi du 9 décembre 1905 concernant la séparation des Églises et de l'État. »
Mme Guylène Pantel. - Une personne condamnée pour avoir contrevenu aux dispositions de l'article 26 de la loi de 1905 doit être également condamnée à une peine d'inéligibilité, sans quoi elle pourrait être élue à des fonctions publiques.
Mme Jacqueline Eustache-Brinio, rapporteure. - Avis favorable à l'amendement n°428 rectifié. Retrait de l'amendement n°278 rectifié à son profit.
M. Gérald Darmanin, ministre. - De tels amendements paraissent disproportionnés, et pourraient être censurés par le Conseil constitutionnel.
Quelle « neutralité » des élus dans les espaces religieux ? La loi de 1905 n'avait rien prévu qui soit réellement applicable. Actuellement, un élu n'est pas tenu d'être neutre - hormis un maire, un adjoint au maire ou un conseiller ayant reçu une délégation dans des fonctions d'état civil. Nous avons débattu presque toute une journée à l'Assemblée nationale sur le sujet. Un élu a-t-il le droit de communier, de prier, de chanter, de prendre la parole dans un lieu de culte ?
M. Sueur, qui a été maire d'Orléans, connaît bien ces questions. Quand on est très connu dans sa commune, se présenter dans un lieu de culte est déjà de la politique. Il y a un devoir de bienséance : le général de Gaulle, très croyant, ne communiait jamais en public.
M. Jean-Pierre Sueur. - Sauf en Russie !
M. Gérald Darmanin, ministre. - Malgré sa ferveur catholique, il voulait montrer sa neutralité. Faisons confiance aux électeurs pour juger ceux qui seraient trop démonstratifs !
Ce qui doit nous inquiéter, plus que les réunions publiques, ce sont les élections des diasporas dans les lieux de culte. Il ne saurait y avoir de maîtrise des diasporas par les consulats et les ambassades. L'organisation de scrutins présidentiels ou législatifs d'autres pays dans ces lieux comporte un risque pour notre pays : il ne faut pas raisonner seulement en politique nationale, mais réfléchir à l'ingérence étrangère sur notre sol, dans ces lieux.
Pour le reste, laissons à chacun le soin de la décence. Les élus peuvent se rendre à des cérémonies sans que cela soit perçu comme une démarche politicienne... On ne va pas envoyer des policiers dans les églises ou les mosquées pour les contrôler !
Avis défavorable aux amendements.
L'amendement n°428 rectifié est adopté.
L'amendement n°278 rectifié n'a plus d'objet.
L'article 40, modifié, est adopté.
L'article 41 est adopté, ainsi que l'article 42.
ARTICLE 43
Mme la présidente. - Amendement n°86 rectifié bis, présenté par MM. Karoutchi et Pemezec, Mmes Garriaud-Maylam et Thomas, MM. Burgoa, D. Laurent, Regnard et Bonne, Mme Chauvin, MM. Guerriau et Mandelli, Mmes Drexler et Dumont, M. Sido, Mme Procaccia, MM. Cambon, Lefèvre, Meurant, Vogel et Decool, Mmes Belrhiti et V. Boyer, M. Menonville, Mmes Bellurot et Imbert, M. Laugier, Mmes Puissat, Goy-Chavent, Billon et Férat, MM. Cuypers et Moga, Mme F. Gerbaud, MM. Saury, Gremillet, Boré, Le Rudulier, C. Vial et Bouchet, Mme Delmont-Koropoulis, M. Sol, Mmes Lassarade et Raimond-Pavero, M. Sautarel, Mme Micouleau, M. Longeot, Mme Deroche, M. Duplomb, Mmes Pluchet et Malet, MM. Belin, Chasseing et Pointereau, Mme Bourrat, M. Houpert, Mme Paoli-Gagin, MM. Le Gleut, Babary, Savin et Laménie, Mmes Schalck, Boulay-Espéronnier et Di Folco, M. Maurey, Mme de Cidrac, MM. Bonhomme et H. Leroy, Mme Morin-Desailly, M. Rapin, Mme Guidez et M. Segouin.
Rédiger ainsi cet article :
Après l'article 4 de la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d'association, il est inséré un article 4... ainsi rédigé :
« Art. 4 .... - Toute personne condamnée pour l'une des infractions prévues aux articles 421-1 a? 421-8 du code pénal ne peut diriger ou administrer une association pendant une durée de trente ans a? compter de la date a? laquelle la condamnation est devenue définitive. »
M. Philippe Pemezec. - Cet amendement interdit la direction ou l'administration d'une association à une personne condamnée pour des faits de terrorisme, pour une durée de trente ans a? compter de la date de condamnation définitive.
Mme Jacqueline Eustache-Brinio, rapporteure. - Tel que rédigé, c'est une peine automatique, ce qui n'est pas conforme au principe d'individualisation des peines. Ce n'est pas non plus conforme au principe de proportionnalité.
Tenons-nous en à la rédaction de la commission. Avis défavorable.
M. Gérald Darmanin, ministre. - Même avis.
L'amendement n°86 rectifié bis est retiré.
Mme la présidente. - Amendement n°429 rectifié, présenté par M. Sueur et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
Alinéa 2, première phrase
Après le mot :
cultuelle
insérer les mots :
à un titre quelconque
M. Jean-Pierre Sueur. - C'est un amendement de précision.
Mme Jacqueline Eustache-Brinio, rapporteure. - Il est satisfait par la rédaction de la commission. Retrait ?
M. Gérald Darmanin, ministre. - Même avis.
L'amendement n°429 rectifié est retiré.
Mme la présidente. - Amendement n°97 rectifié bis, présenté par Mmes Borchio Fontimp et Demas, M. H. Leroy, Mme Garnier, MM. Genet, Le Rudulier, Bascher, Babary et Bacci, Mme Belrhiti, MM. Bonhomme, Boré, Bouchet et Bouloux, Mme V. Boyer, MM. Burgoa, Charon et Cuypers, Mmes de Cidrac, Deroche, Drexler et Dumont, MM. Favreau et B. Fournier, Mmes Goy-Chavent et Gruny, M. Houpert, Mme Joseph, MM. Laménie, Mandelli et Meurant, Mmes Micouleau et Raimond-Pavero et MM. Saury et Savin.
Aline?a 2, première phrase
Remplacer le mot :
des enfants
par les mots :
exclusivement des mineurs
Mme Valérie Boyer. - La guerre contre le totalitarisme islamiste doit s'intensifier. La France est la première cible des terroristes parce qu'elle est l'héritière des Lumières, de la civilisation juive et chrétienne, et parce qu'elle est porteuse d'une laïcité exigeante. Tout cela nourrit la haine des islamistes et fait planer un risque énorme sur notre pays. Il y a des bombes humaines sur notre sol, et si nous livrons la guerre pour les libertés à l'extérieur, nous refusons parfois de la mener chez nous, ou nous nous montrons trop naïfs.
Cet amendement englobe tous les mineurs dans le dispositif de l'article 43. Il faut protéger nos enfants mais aussi nos adolescents des intentions malveillantes de personnes condamnées pour des infractions en lien avec le terrorisme.
Mme Jacqueline Eustache-Brinio, rapporteure. - Avis favorable à cet amendement pertinent.
M. Gérald Darmanin, ministre. - Nous comprenons la philosophie de cet amendement même si « enfant » et « mineur » sont des termes différents. Une association exclusivement composée de mineurs, c'est extrêmement rare.
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. - Il s'agit d'associations qui « accueillent » des mineurs.
M. Gérald Darmanin, ministre. - Il y a un problème de rédaction, qui pourrait certes se régler. L'amendement ne vise pas une catégorie juridique existante, il faudra en créer une, celle des associations qui accueillent des mineurs. Pourquoi pas... Mais il y a aussi les personnes fragiles, sous emprise, etc. Il faudra revoir cela avant la CMP, peut-être en visant l'ensemble des personnes sous influence. Sagesse.
L'amendement n°97 rectifié bis est adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°143 rectifié, présenté par Mme N. Delattre, MM. Artano, Bilhac et Cabanel, Mme M. Carrère, MM. Fialaire, Gold, Guérini et Guiol, Mme Pantel, MM. Requier et Roux et Mme Guillotin.
Alinéa 2, première phrase
Après le mot :
durée
insérer les mots :
au moins égale au quantum de peine de la condamnation aux infractions mentionnées et d'un minimum
Mme Nathalie Delattre. - Cet amendement interdit aux personnes condamnées pour terrorisme de diriger des associations cultuelles pendant une durée égale à la peine d'emprisonnement prononcée, et dans tous les cas pendant au minimum dix ans - a fortiori en cas de liberté anticipée.
Mme Jacqueline Eustache-Brinio, rapporteure. - Avis favorable.
M. Gérald Darmanin, ministre. - Sagesse.
L'amendement n°143 rectifié est adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°144 rectifié, présenté par Mme N. Delattre, MM. Artano, Bilhac et Cabanel, Mme M. Carrère, MM. Fialaire, Guérini et Guiol, Mme Pantel, MM. Requier, Roux, Corbisez et Gold et Mme Guillotin.
Alinéa 2, première phrase
Remplacer le mot :
dix
par le mot :
quinze
L'amendement n°144 rectifié est retiré.
L'amendement n°366 n'est pas défendu.
Mme la présidente. - Amendement n°505, présenté par M. Ravier.
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
« Le statut de réfugié peut être refusé ou retiré à tout étranger condamné, même à la peine de mort, pour participation à une organisation terroriste, telle que reconnue par le Conseil de l'Union européenne, dans un État tiers figurant sur la liste, fixée par décret en Conseil d'État, des États dont la France reconnaît les législations et juridictions pénales au vu de l'application du droit dans le cadre d'un régime démocratique et des circonstances politiques générales. »
M. Stéphane Ravier. - Il y a quelques mois, j'avais proposé de refuser le statut de réfugié à toute personne condamnée pour terrorisme dans son pays ; je me félicite d'avoir été entendu.
Pourquoi ne pas étendre cette interdiction à tous ceux qui ont participé à une entreprise terroriste, même s'ils sont condamnés à mort dans leur pays ? La France est une terre d'asile mais pas d'asile de fous ! Pourquoi sauver la vie de ceux qui veulent nous tuer ?
Je préfère un terroriste bien mort à l'étranger que bien vivant en France. Vous allez me parler de valeurs, chers collègues de gauche qui n'aimez rien tant que de défendre l'indéfendable, mais l'aveuglement idéologique se paie au prix du sang français. Qu'ils assument leur responsabilité jusqu'au bout, même au bout d'une corde, si le droit de leur pays le prévoit.
Mme Jacqueline Eustache-Brinio, rapporteure. - Cet amendement est satisfait par le droit en vigueur : le statut de réfugié est retiré à tout étranger condamné pour acte de terrorisme dans son pays, quelle que soit la peine, dès lors que sa présence constitue une menace grave pour la société française. Retrait ou avis défavorable.
M. Gérald Darmanin, ministre. - Même avis.
L'amendement n°505 n'est pas adopté.
L'article 43, modifié, est adopté.
ARTICLES ADDITIONNELS après l'article 43
Mme la présidente. - Amendement n°161 rectifié bis, présenté par Mme V. Boyer, MM. Le Rudulier et Boré, Mme Goy-Chavent, MM. Bascher, de Legge et Meurant, Mme Joseph, MM. B. Fournier, Charon, Longuet et Bouchet, Mme Drexler, MM. Genet, Savary et H. Leroy, Mmes Bourrat et de Cidrac, MM. Segouin et Tabarot et Mme Berthet.
Après l'article 43
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le 5° de l'article L. 133-6 du code de l'action sociale et des familles, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« ...° Au titre II du livre IV du même code ; ».
Mme Valérie Boyer. - Depuis la fin du proto-État de l'État islamique, Daech, la menace sur la France est totalement endogène. L'entrisme est de rigueur. Le djihad s'attaque à tous les territoires de notre Nation, à toutes les institutions, à tous les domaines.
Afin de protéger d'abord les plus fragiles, il est indispensable d'éloigner les personnes condamnées pour des actes de terrorisme.
Cet amendement écarte les auteurs de tels actes de toute fonction relevant du champ du code de l'action sociale et des familles.
Il convient de faire de l'interdiction le principe et de la non-application l'exception. Le juge pourra toujours décider de ne pas appliquer l'interdiction après décision spécialement motivée.
Mme la présidente. - Amendement identique n°415 rectifié bis, présenté par Mme Havet et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants.
M. Thani Mohamed Soilihi. - Défendu.
Mme Jacqueline Eustache-Brinio, rapporteure. - Avis favorable. C'est légitime.
M. Gérald Darmanin, ministre. - Avis favorable.
Les amendements identiques nos161 rectifié bis et 415 rectifié bis sont adoptés et deviennent un article additionnel.
Mme la présidente. - Amendement n°245 rectifié bis, présenté par M. Mizzon, Mmes Thomas et Belrhiti, MM. Duffourg, Masson, Canevet, Delahaye, Kern et Cuypers, Mme Saint-Pé, MM. J.M. Arnaud et Moga, Mme Herzog, MM. Bouchet et Le Nay, Mmes Bonfanti-Dossat et Gatel et M. Détraigne.
Après l'article 43
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article 721-1-1 du code de procédure pénale est ainsi modifié :
1° A la première phrase, les mots : « , à l'exclusion de celles définies aux articles 421-2-5 à 421-2-5-2 du même code, » sont supprimés et la référence : « à l'article 721 » est remplacée par les références : « aux articles 721 et 721-1 » ;
2° La seconde phrase est supprimée.
M. Pierre Cuypers. - Cet amendement supprime toute possibilité de réductions et aménagements de peine des individus condamnés pour terrorisme ou pour apologie du terrorisme.
Mme Jacqueline Eustache-Brinio, rapporteure. - Les infractions relatives à l'apologie du terrorisme, en ce qu'elles touchent à la liberté d'expression, sont très précisément étudiées par le Conseil Constitutionnel. Retrait ou avis défavorable.
L'amendement n°245 rectifié bis est retiré.
ARTICLE 43 BIS
Mme la présidente. - Amendement n°671, présenté par Mme Eustache-Brinio, au nom de la commission des lois.
Alinéa 1
Remplacer la référence :
L. 711-6
par la référence
L. 511-7
L'amendement de coordination n°671, accepté par le Gouvernement, est adopté.
L'article 43 bis, modifié est adopté.
ARTICLE 44
M. Gérald Darmanin, ministre de l'intérieur . - C'est un article très important. Aujourd'hui, le ministère de l'Intérieur ne peut faire fermer les lieux de culte, sauf pour deux motifs.
D'abord pour des raisons d'urbanisme liées à l'accueil du public : porte qui ferme mal, risque d'incendie, par exemple. C'est l'essentiel des cas ; mais le jour viendra où les ennemis de la République sauront lire le code de l'urbanisme.
Le second motif se trouve dans la loi SILT : on peut faire fermer un lieu de culte directement lié à un attentat terroriste. Mais la liberté de culte est en jeu et c'est une liberté constitutionnelle. La mosquée de Pantin avait relayé des vidéos appelant à l'assassinat de Samuel Paty. Le juge administratif a pris en compte la présence d'un autre lieu de culte à proximité - à 12 kilomètres - pour confirmer la fermeture. Gageons que le juge ne l'aurait pas acceptée si la distance avait été plus grande.
Il n'y a actuellement aucun moyen de fermer un lieu de culte où l'on clamerait qu'il faut exterminer les juifs, que les chrétiens sont des mécréants, les femmes des inférieures, ou que l'on se transforme en porc si l'on écoute de la musique.
C'est pourquoi cet article 44 est très important pour lutter contre le séparatisme et les propos incitant à la haine et la sédition. Il est une arme contre le séparatisme lorsque celui-ci n'est pas en lien direct avec un attentat terroriste. Il est une réponse à la question qui s'affiche aux manchettes des journaux : « Pourquoi ne ferme-t-on pas ces lieux de culte séparatistes ? »
Cet article est équilibré. Le Conseil d'État et le juge constitutionnel le vérifieront au trébuchet. C'est un texte révolutionnaire, nous nous assurons néanmoins d'éviter toute mesure too much - comme on dit en patois nordiste - qui entraînerait la censure de tout l'article.
Je suis en désaccord avec la commission des lois qui a retiré le motif de l'encouragement à la haine ou à la violence. Elle souhaite en outre une durée de fermeture de trois mois. Ce sera certainement censuré car considéré comme exorbitant du droit commun. C'est pourquoi j'ai préféré deux mois. À titre personnel, un ou deux ans m'auraient parfaitement convenu !
Nous sommes à un point d'équilibre. Gardons cette arme administrative et ne nous exposons pas à une censure du Conseil constitutionnel, qui nous priverait d'une arme importante.
Mme la présidente. - Amendement n°339 rectifié, présenté par Mme Benbassa, M. Benarroche, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme Taillé-Polian.
Supprimer cet article.
Mme Esther Benbassa. - L'article 44 précise que le préfet pourra prononcer la fermeture administrative temporaire des lieux de culte dans lesquels des propos haineux sont tenus. Un tel dispositif existe déjà depuis la loi SILT de 2017 et est inscrit au code de la sécurité intérieure.
Ce code prévoit également la dissolution des groupements lorsque sont proférés des propos constituant une provocation à la haine, à la violence, à la commission d'actes de terrorisme.
Dès lors, cet article est redondant, et cette nouvelle incrimination rend la loi pénale peu lisible et peu accessible.
La notion d'idées ou théories diffusées est trop floue.
Mme Jacqueline Eustache-Brinio, rapporteure. - Le ministre a été clair : il faut des outils pour fermer les lieux qui propagent la haine de la France. Que chacun prenne ses responsabilités. Avis défavorable.
M. Gérald Darmanin, ministre. - Le code pénal permet de poursuivre les personnes, pas de fermer les lieux ! Ne le confondons pas avec la police administrative. Avis défavorable.
L'amendement n°339 rectifié n'est pas adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°655, présenté par le Gouvernement.
I. - Alinéas 1 et 2
Remplacer ces alinéas par un alinéa ainsi rédigés :
Le titre V de la loi du 9 décembre 1905 concernant la séparation des Églises et de l'État est complété par un article 36-3 ainsi rédigé :
II. - Alinéa 3
Remplacer la référence :
Art. L. 227-1 A.
par la référence :
Art. 36-3.
III. - Alinéa 7
Rédiger ainsi cet alinéa :
« IV. - La violation d'une mesure de fermeture d'un lieu de culte ou d'un lieu en dépendant prise en application du présent article est punie de six mois d'emprisonnement et de 7 500 euros d'amende. »
M. Gérald Darmanin, ministre. - C'est un amendement rédactionnel, dirons-nous.
Mme Jacqueline Eustache-Brinio, rapporteure. - La divergence porte sur l'inscription de cette mesure ; la commission a préféré la rapprocher des mesures prévues par la loi SILT et du code de sécurité intérieure, le ministre l'inscrit dans la loi de 1905. Avis défavorable.
L'amendement n°655 n'est pas adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°430 rectifié, présenté par M. Sueur et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
Alinéa 3
Après le mot :
peut
insérer les mots :
, après saisine et avis du juge,
M. Jean-Yves Leconte. - Je regrette que l'amendement du Gouvernement n'ait pas été adopté. On ne peut comparer la loi de 1905 et le code de sécurité intérieure : les lieux de culte doivent relever de la première et non du second. C'est une question de symbole et de narratif.
L'article 44 crée une nouvelle mesure de fermeture administrative des lieux de culte où sont diffusés des propos incitant à la haine.
À titre de garantie, s'agissant de la liberté de culte, l'amendement n°430 rectifié fait intervenir le juge en amont de la procédure.
Mme la présidente. - Amendement n°458 rectifié, présenté par M. Sueur et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
Alinéa 3
Remplacer les mots :
les idées ou théories qui
par le mot :
ou
M. Jean-Yves Leconte. - La rédaction n'est pas assez claire : il faut cibler les propos tenus de manière active ; les concepts, idées et théories sont très sujets à interprétation subjective.
Mme Jacqueline Eustache-Brinio, rapporteure. - La saisine du juge est contraire à la notion même de mesure de police administrative. Il existe des voies de recours. Avis défavorable à l'amendement n°430 rectifié.
M. Gérald Darmanin, ministre. - Le pouvoir exécutif ne saurait soumettre systématiquement son action à l'avis du juge. Au reste, toute action de police administrative peut être contestée en référé, ou par un recours pour excès de pouvoir. Mais le contrôle a priori retire ses pouvoirs à l'exécutif.
M. Jean-Yves Leconte. - J'entends l'argument sur l'amendement n°430 rectifié ; mais l'amendement n°458 rectifié est d'autant plus pertinent.
L'amendement n°430 rectifié est retiré.
Mme Jacqueline Eustache-Brinio, rapporteure. - Avis défavorable à l'amendement n°458 rectifié ; les idées et théories peuvent être partagées via des tracts, des affiches.
M. Gérald Darmanin, ministre. - La notion d'idées et de théories figure dans les articles 212-1 et 227-1 du code de sécurité intérieure, qui ont une décennie. Il n'y a pas de problème d'interprétation. On ne lutte pas contre les consciences mais contre l'expression de certaines idées. Avis défavorable.
M. Jean-Yves Leconte. - Lorsque la diffusion d'idées et de théories menace l'ordre public, il faut fermer le lieu. Si elles ne font pas porter un risque immédiat sur la sécurité, c'est par le débat et la conviction qu'il faut les combattre, et non par une interdiction. Il ne s'agit pas de sécurité intérieure, mais de police des cultes.
La menace au faire-Nation, on y répond par la conviction. Un lieu de culte ne saurait être fermé que sur la base d'éléments avérés.
M. Jean-Pierre Sueur. - Il n'existe pas, monsieur le ministre, d'idées qui se propagent sans le support de mots. Comment sanctionner des idées qui sont dans le for intérieur, voire dans l'inconscient ? Jacques Lacan a dit que l'inconscient était structuré comme un langage ; Michel Foucault, que les mots étaient des choses. Condamnons les formulations, les messagers, les paroles, les écrits, mais les idées ? Laissons-les vivre, ou combattons-les... par les mots !
Comment sanctionner une substance appelée « idée » qui serait dépourvue de tout langage ?
M. Gérald Darmanin, ministre. - Vous faites une erreur d'interprétation, monsieur Sueur. Le texte mentionne bien « les propos qui sont tenus, les idées ou théories qui sont diffusées ».
M. Jean-Pierre Sueur. - « Propos » suffit : les idées ou théories sont des propos !
M. Gérald Darmanin, ministre. - Il s'agit bien de propos verbalisés, pas d'une police des esprits !
Monsieur Leconte, avec votre raisonnement, on n'aurait pas condamné l'antisémitisme. Le législateur et le juge constitutionnel ont posé des limites à la liberté d'expression. Ce qui compte, c'est la teneur des propos, même s'il y a toujours un champ d'interprétation. Quid d'un ministre du culte qui poserait la question : « les juifs sont-ils des hommes comme les autres » ou « les femmes sont-elles l'égal des hommes » ?
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. - Trop facile !
M. Gérald Darmanin, ministre. - Ce n'est pas une incitation directe à la haine, mais est-ce tolérable pour autant, en République ?
« Les chrétiens sont des mécréants, il faut les condamner » - les condamner moralement, diront ceux qui combattent la République, mais ne soyons pas naïfs face à ceux qui manient les subtilités du langage.
Nous combattons une idéologie. La rédaction du Gouvernement prévoit une fermeture limitée, soumise au contrôle du juge, qui garantit à la foi l'exercice du culte, la liberté d'expression et l'ordre public.
L'amendement n°458 rectifié n'est pas adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°656, présenté par le Gouvernement.
Alinéa 3
Compléter cet alinéa par les mots :
ou tendent à justifier ou encourager cette haine ou cette violence
M. Gérald Darmanin, ministre. - Nous avons sur ce point une différence d'appréciation.
Des dispositions similaires figurent à l'article L. 277-1 du code de la sécurité intérieure. Cette rédaction, que la commission a supprimée, a été validée par la jurisprudence du Conseil d'État - c'est l'arrêt Association « Envie de rêver » du 30 juillet 2014 - et par la décision QPC du Conseil constitutionnel du 29 mars 2018.
Plus large que celle de la commission, notre rédaction offre au ministère de l'Intérieur de plus grandes possibilités d'action.
Mme Jacqueline Eustache-Brinio, rapporteure. - La commission n'a rien supprimé ; elle a précisé les motifs pouvant conduire à la fermeture des cultes. La justification ou l'encouragement à la haine et à la violence ne nous semble pas suffisamment précis. Avis défavorable.
L'amendement n°656 n'est pas adopté.
L'amendement n°367 n'est pas défendu.
Mme la présidente. - Nous avons examiné 111 amendements ; il en reste 42.
Prochaine séance, lundi 12 avril 2021, à 17 heures.
La séance est levée à 23 h 55.
Pour la Directrice des Comptes rendus du Sénat,
Rosalie Delpech
Chef de publication
Ordre du jour du lundi 12 avril 2021
Séance publique
À 17 heures et le soir
Présidence : M. Roger Karoutchi, vice-président Mme Pascale Gruny, vice-président
Secrétaires : Mme Victoire Jasmin - M. Pierre Cuypers
. Suite du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, confortant le respect des principes de la République (texte de la commission, n°455 rect., 2020-2021)