Bilan de l'application des lois
M. le président. - L'ordre du jour appelle un débat sur le bilan de l'application des lois.
Nous nous retrouvons cet après-midi pour débattre, comme tous les ans, du bilan de l'application des lois que nous avons votées au cours de la session écoulée.
Je salue M. Marc Fesneau, ministre chargé des Relations avec le Parlement, qui nous répondra au nom du Gouvernement.
Ce débat est essentiel pour les parlementaires que nous sommes : à quel moment les lois que nous votons deviennent-elles une réalité concrète pour nos concitoyens ? Pas avant sept mois après leur promulgation en moyenne cette année.
Le décalage est grand entre cette mise en oeuvre tardive et le rythme effréné auquel s'enchaînent les projets de loi inscrits à l'ordre du jour du Parlement. Et ce décalage n'est pas bon pour notre démocratie.
Nous avons récemment souhaité aller encore plus loin dans notre contrôle sur un aspect essentiel : le suivi des ordonnances.
Nous le déplorons en effet tous : le nombre d'ordonnances explose. À la fin du mois de mars, 259 ordonnances avaient été publiées depuis le début du quinquennat, soit une hausse de 48 % par rapport à la même période du quinquennat précédent et de près de 150 % par rapport au quinquennat 2007-2012.
Comme le relève le rapport d'information de Mme Pascale Gruny, que je remercie pour son travail, le processus législatif ordinaire n'est plus le principal mécanisme d'adoption de la loi : avec cent ordonnances pour quarante-trois lois au cours de la session dernière, la tendance est inquiétante.
Face à cette évolution, la résolution que nous avons adoptée hier permettra au Sénat, sous réserve de la décision du Conseil constitutionnel, de renforcer le contrôle du recours à cet outil.
Dès l'année prochaine, nous nous retrouverons d'ailleurs chaque année en séance publique pour un débat sur le suivi du recours aux ordonnances, en plus de notre rendez-vous traditionnel sur l'application des lois.
Le contrôle parlementaire sur les ordonnances passe aussi par leur ratification expresse, via des propositions de loi de ratification que nous pourrons inscrire lors des semaines de contrôle. Je songe à l'ordonnance relative à la réforme de la haute fonction publique, adoptée ce matin en conseil des ministres, et évoquée lors des questions d'actualité au Gouvernement par M. Sueur.
Mme Pascale Gruny, président de la délégation du Bureau chargée du travail parlementaire, du contrôle et du suivi des ordonnances . - (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC) En cinquante ans, le bilan annuel de l'application des lois est devenu un outil incontournable du contrôle parlementaire. C'est aussi une condition du bon fonctionnement de la démocratie. Comment faire adhérer les Français aux réformes s'ils n'en voient pas la concrétisation sur le terrain ?
Le 1er octobre 2019, les articles 19 bis A et 19 bis B de notre Règlement sont entrés en vigueur, qui consacrent le rôle des commissions permanentes et celui du rapporteur d'un texte pour en suivre l'application.
Je salue la disponibilité du Secrétariat général du Gouvernement. Nous avons avancé sur la question du décompte des mesures d'application. Mais je regrette que le suivi soit limité aux seuls décrets, et ne soit pas étendu aux arrêtés. Pour l'application d'une loi, peu importe que la disposition adoptée renvoie à un décret ou à un arrêté ! Même si seul le Premier ministre exerce le pouvoir réglementaire de droit commun, le Secrétariat général du Gouvernement pourrait suivre la publication des différents arrêtés ministériels.
Au cours de la session 2019-2020, 43 lois ont été adoptées, dont 15 étaient d'application directe. Le taux d'application a chuté de dix points, à 62 %, en raison essentiellement de la crise sanitaire qui a perturbé la chaîne normative. Cette dégradation traduit également un manque d'anticipation de la part du Gouvernement, dont les services travaillent à de nouveaux chantiers avant même d'avoir élaboré les textes d'application des lois votées. Cela explique que le délai moyen de prise des textes d'application soit passé de cinq mois et douze jours pour la session 2018-2019 à sept mois et un jour pour la session 2019-2020, soit un mois de plus que l'objectif de six mois.
Les consultations obligatoires, les notifications à la Commission européenne expliquent aussi ce retard. Le projet de décret prévu par la loi du 30 juillet 2020 sur les violences conjugales n'a ainsi été notifié à la Commission européenne que sept mois après la promulgation de la loi...
Le Gouvernement ne s'astreint pas à l'exigence de rapidité qu'il impose au Parlement, qui a examiné 26 textes sur 43 en procédure accélérée. Les textes relatifs à la situation sanitaire ont été examinés en dix-huit jours en moyenne ; à trois reprises, la navette s'est déroulée en moins de huit jours !
Bien qu'examinée en procédure accélérée, la loi du 30 juillet 2020 sur les chèques vacances pour les soignants est devenue caduque avant même d'avoir reçu ses décrets d'application. Comprenez que les parlementaires s'interrogent !
Dans le même esprit, que penser de la tendance à généraliser une mesure avant même d'avoir tiré le bilan de son expérimentation prévue par la loi ? Quelle utilité accordez-vous aux expérimentations ?
La remise des rapports demandés au Gouvernement demeure insuffisante, avec un taux de 28 %. Le Parlement en demande sans doute trop, mais on ne peut imputer cette dérive au Sénat, qui pratique depuis longtemps la chasse aux rapports !
La crise sanitaire a été l'occasion d'un recours massif, voire excessif, aux ordonnances qui ont représenté 70 % des textes dans le domaine de la loi. Pour 43 lois promulguées, 100 ordonnances ont été publiées. Beaucoup reconduisaient certes des mesures d'urgence liées à la pandémie, mais certaines excèdent parfois le champ de l'habilitation... avec un risque juridique à la clé. Le Conseil d'État a ainsi annulé une partie de l'ordonnance contre les prix abusivement bas, prévue par la loi EGalim. Le Gouvernement peut alors être tenté d'étendre préventivement ce champ d'habilitation - mais s'expose là encore à un risque juridique. Le Conseil constitutionnel a ainsi censuré l'habilitation prévue à l'article 38 de la loi Sécurité globale.
Je déplore enfin que si peu de projets de loi de ratification soient inscrits à notre ordre du jour. Le groupe de travail sur les méthodes de travail du Sénat propose que nous déposions des propositions de loi de ratification lors des semaines de contrôle, voire des semaines sénatoriales. L'organisation d'un débat spécifique en séance publique dès l'année prochaine va dans le bon sens. Espérons que la résolution adoptée hier par le Sénat conduise le Gouvernement à se modérer !
Le projet de loi Climat contient une habilitation visant à mettre en place, par ordonnance, une écotaxe régionale - or les régions n'exercent pas encore la compétence sur le réseau routier national, dont le transfert est prévu par le projet de loi 4D, qui sera prochainement examiné...
Ordonnance prévue par un projet de loi qui se télescope avec un autre texte : notre débat a de beaux jours devant lui ! (Sourires ; applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)
M. Marc Fesneau, ministre délégué chargé des relations avec le Parlement et de la participation citoyenne . - Je tiens à remercier Pascale Gruny et l'ensemble des présidents de commission pour leur travail minutieux.
L'an dernier, nous avions constaté des divergences de calcul entre le Sénat et le Gouvernement. Cette année, nous avons trouvé un point d'équilibre avec un indicateur d'application des lois ne prenant en compte que les mesures actives, dont l'entrée en vigueur n'est pas différée du fait de la crise sanitaire.
Le Premier ministre, titulaire du pouvoir réglementaire, assure le suivi des décrets, mais les arrêtés relèvent des ministères qui les signent. Difficile d'exiger du SGG une veille sur les huit mille arrêtés publiés chaque année, soit vingt à quarante par jour...
Au 31 mars 2021, le taux d'application s'établit à 73 %, en recul de neuf points par rapport à l'an dernier compte tenu de la crise sanitaire.
Le Gouvernement est mobilisé pour rattraper le retard pris en 2020 - nous sommes à 80 % de mesures publiées - et rendre applicables dans les meilleurs délais les réformes votées. Je réunis un comité interministériel de l'application des lois et j'interviens régulièrement en conseil des ministres pour rappeler cette exigence. Le SGG organise également des réunions interministérielles, et la perspective de notre débat annuel a également un effet d'aiguillon...
Je salue l'engagement des agents des ministères en cette période de crise sanitaire qui a eu un impact sur la publication de textes attendus. La charge de travail a augmenté, avec la préparation de 91 ordonnances, 95 décrets et 54 arrêtés dans le cadre de l'état d'urgence sanitaire. Le déploiement massif du télétravail simplifiera les choses à l'avenir.
Le délai de pré-notification à la Commission européenne est classique, et permet un dialogue entre le Gouvernement et la Commission.
Il est vrai que le recours aux ordonnances s'est accru : 259 ordonnances ont été publiées depuis le début du quinquennat mais 99 d'entre elles sont liées à la crise sanitaire. Si l'on retranche ces dernières, le nombre d'ordonnances prises sous ce quinquennat est comparable à celui du quinquennat de Nicolas Sarkozy et inférieur à celui du quinquennat de François Hollande.
Chaque fois que cela a été possible, le Gouvernement a limité au maximum les demandes d'habilitation.
Vous jugez les délais d'habilitation trop importants, mais le délai de publication des ordonnances est en moyenne inférieur de 25 % à la durée de l'habilitation votée par le Parlement. Je ne peux laisser penser que le Gouvernement retarderait le rythme des réformes !
La répartition entre le pouvoir législatif et le pouvoir législatif délégué permet de concentrer la discussion parlementaire sur l'essentiel et de réserver les écritures les plus techniques aux ordonnances.
Mme Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques . - Deux ans et demi après la promulgation de la loi EGalim, le Conseil d'État vient d'enjoindre le Gouvernement de publier le décret d'application de l'article prévoyant un moratoire sur les bâtiments de poules pondeuses en cage. Que fait le Gouvernement de la volonté exprimé par le législateur ?
Nous avons aussi des interrogations sur le respect du champ d'habilitation - je pense à l'ordonnance sur les coopératives - ou encore sur la généralisation d'expérimentations qui n'ont pas été évaluées. Ainsi, le projet de loi Climat pérennise-t-il l'expérimentation prévue à l'article 24 de la loi EGalim sur les menus végétariens dans les cantines scolaires...
L'expérimentation est un outil pertinent mais il ne faudrait pas qu'elle devienne un outil politique. Ne faudrait-il pas imposer la remise de l'évaluation avant toute généralisation, ou à tout le moins assurer une durée d'expérimentation minimale ?
M. Marc Fesneau, ministre délégué. - Le Gouvernement avait considéré que l'article 68 de la loi EGalim était suffisamment clair pour entrer en vigueur sans décret, mais il prend acte de la décision du Conseil d'État et en tirera les conséquences dans les meilleurs délais.
La répartition des rôles dans le contentieux des ordonnances est claire : il appartient au Conseil d'État d'apprécier le respect de l'habilitation par le gouvernement lorsqu'il publie son ordonnance. La décision relative à l'ordonnance du 24 avril 2019 témoigne de l'efficacité des mécanismes de contrôle.
Une expérimentation était prévue à l'article 21 de la loi EGalim jusqu'en novembre 2021. Au cours de l'examen du projet de loi Climat, l'Assemblée nationale a souhaité généraliser cette expérimentation. Votre assemblée se prononcera sur le fond. Au demeurant, le Parlement ne saurait être lié par une loi antérieure.
M. Philippe Paul, en remplacement de M. Christian Cambon, président de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées . - Permettez-moi d'excuser le président Cambon.
Notre commission s'inquiète du sort réservé à l'article 44 de la loi de programmation militaire (LPM) du 2 juillet 2018, qui visait à lever des pesanteurs dans les procédures d'achats du ministère des Armées. Or ces dispositions ont été effacées à la faveur d'une codification. C'est un mépris total de la volonté du législateur. M. Cédric Perrin a interpellé Mme Landais, secrétaire générale du gouvernement, lors de son audition le 12 mai dernier : elle nous a indiqué que l'amendement voté desservait l'objectif recherché par les parlementaires...
Appliquer les lois, c'est d'abord ne pas revenir sur la volonté du législateur ! Cet incident est révélateur du peu de cas fait des travaux parlementaires.
M. Marc Fesneau, ministre délégué. - Le Gouvernement partage votre volonté de souplesse et de rapidité dans les procédures d'achat pour nos forces armées, et respecte la loi votée.
La codification a permis de conserver l'ambition du législateur, car la disposition votée à l'article 44 de la LPM était en réalité contraire aux objectifs poursuivis par le Parlement en ce qu'elle rigidifiait le cadre dérogatoire. La rédaction actuelle transpose strictement la directive sans ajouter de restrictions supplémentaires. Cela permettra une plus grande réactivité dans les acquisitions les plus sensibles des forces armées.
Mme Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales . - Chacun sait que la crise sanitaire a bouleversé l'application de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2020. Même si la loi organique ne l'impose pas, nous aurions souhaité être saisis d'un collectif social. Le Parlement ne peut se satisfaire d'informations sans débat, en ayant à constater a posteriori des dépenses de plusieurs milliards d'euros. La dotation de Santé publique France a été portée de 150 millions à 5 milliards d'euros par simple arrêté ! Le Parlement peut-il se contenter d'un courrier lorsque le découvert de la sécurité sociale est porté de 39 à 95 milliards d'euros ? Notre commission propose de faire évoluer la LOLFSS.
Nous avons constaté que le décret de transfert de déficit à la Caisse d'amortissement de la dette sociale excédait de 174 milliards d'euros le montant voté l'été dernier. Le Gouvernement aurait très bien pu demander sa modification en loi de financement. Que comptez-vous faire pour régulariser cette situation ? Les plafonds prévisionnels des exercices 2021 à 2023 seront-ils réajustés ?
M. Marc Fesneau, ministre délégué. - Les crédits votés en loi de financement de la sécurité sociale sont évaluatifs, car les dépenses de la sécurité sociale sont des dépenses de guichet ; c'est ce qui a permis aux Gouvernement d'acheter 9 000 respirateurs ou de déployer un système d'information de suivi des tests, par exemple.
Le Parlement n'a pas été tenu à l'écart : ces dépenses exceptionnelles ont été présentées devant la commission des comptes de la sécurité sociale et devant le conseil d'administration de Santé publique France, instances dans lesquelles siègent des parlementaires.
Vu l'imprévisibilité des dépenses et la réactivité nécessaires pour précommander les vaccins, les prévisions d'un éventuel collectif social auraient été caduques dès avant la fin de leur examen.
Prévoir des crédits limitatifs en loi de financement interdirait cette souplesse. En contrepartie, le Parlement est informé : l'avis du comité d'alerte de l'Ondam vous a été remis hier.
Le Parlement sera bientôt saisi d'une proposition de loi organique visant à réformer la LOLFSS.
M. le président. - La commission des comptes de la sécurité sociale, même si des parlementaires y siègent, ce n'est pas le Parlement. Nous attendons un rapport devant le Parlement ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; M. Laurent Lafon, président de la commission de la culture, applaudit également.)
M. Cyril Pellevat, en remplacement de M. Jean-François Longeot, président de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable . - L'application de la LOM et de la loi AGEC, qui ont beaucoup occupé notre commission au cours de la session 2019-2020, demeure incomplète. Comment faire pour que la mobilisation des services des ministères intéressés sur la loi Climat ne complique encore l'application de ces deux lois ?
Le Gouvernement s'écarte parfois de la volonté clairement exprimée par le législateur. Ainsi, le décret d'application de l'article 35 de la loi AGEC, relatif au réemploi des invendus, n'oblige pas l'entreprise donatrice à contribuer aux frais de stockage...
Comment entendez-vous modifier cet état de fait, qui envoie un message déplorable aux associations qui promeuvent le réemploi ?
Enfin, notre commission s'inquiète elle aussi des habilitations de convenance, par exemple dans le cadre de la LOM. Nous regrettons le retard pris dans la publication de la stratégie pour le fret ferroviaire, attendue au 1er janvier dernier.
M. Marc Fesneau, ministre délégué. - Ce retard pris dans l'application de la LOM et de la loi AGEC est largement imputable à la crise sanitaire. Plusieurs décrets sont en cours de contreseing ou d'examen au Conseil d'État.
Nous devrions atteindre un taux d'application de la loi AGEC de 80 % d'ici fin juillet, et de 90 % pour la LOM, contre moins de 70 % aujourd'hui. La mobilisation des services sur la loi Climat ne freine nullement la publication des textes d'application.
L'interdiction de destruction des invendus non-alimentaires, prévue par l'article 35 de la loi AGEC, est une avancée majeure. Nous avons privilégié la souplesse : le décret prévoit des conditions minimales relatives aux conventions de don qui pourront être complétées par des engagements supplémentaires.
Sur les 57 habilitations de la LOM, seules trois d'entre elles n'ont pas donné lieu à ordonnance. Il n'y a donc aucun détournement de procédure.
M. Laurent Lafon, président de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication . - En dépit des vicissitudes de la covid-19, deux lois ont été adoptées dans notre champ de compétence. La première, créant le Centre national de la musique (CNM), est entièrement applicable, le décret en Conseil d'État requis ayant été publié deux semaines après sa promulgation. Cette célérité est à saluer, d'autant que le CNM a joué un rôle précieux pour soutenir la filière musicale ces derniers mois.
En revanche, trois mesures d'application de la loi relative à la modernisation de la distribution de la presse manquent à l'appel. Monsieur le ministre, quand seront-elles publiées ?
L'article 276 de la loi de finances pour 2019 prévoyait un rapport avant juin 2019 sur la réforme de la contribution à l'audiovisuel public dans la perspective de la disparition de la taxe d'habitation - il n'a jamais été remis. Alors que Mme Bachelot vient d'annoncer un nouveau groupe de travail sur le sujet, pouvez-vous nous dire quand ce rapport sera publié ?
M. Marc Fesneau, ministre délégué. - Le rapport sur la contribution à l'audiovisuel public n'a pas été jugé satisfaisant. Les ministres de la culture et des comptes publics ont annoncé l'installation d'un groupe de travail, qui associera des parlementaires, afin de proposer des pistes de réforme d'ici 2022. La crise sanitaire en a ralenti la mise en place, mais Mme Bachelot souhaite voir le dossier avancer. Il s'agit d'assurer un financement pérenne et affecté, sans pour autant créer de nouvel impôt.
Le décret en Conseil d'État désignant l'autorité compétente pour reconnaître le caractère d'information politique et générale des titres de presse a été publié le 2 mai 2021.
S'agissant du seuil de chiffre d'affaires des kiosques numériques, les projets de décret ont été notifiés à la Commission européenne en avril 2021. La fin du statu quo est donc prévue au mois de juillet 2021.
M. Vincent Éblé, vice-président de la commission des finances . - La commission des finances regrette que le taux de mise en oeuvre de la loi de finances pour 2020 soit en recul mais note que les mesures d'urgence votées dans les trois premières lois de finances rectificatives ont été rapidement appliquées.
Le 12 mai dernier, le président Raynal a interrogé Mme Landais. J'insisterai donc simplement sur trois points.
L'article 147 de la loi de finances pour 2020 qui transpose le paquet TVA sur le commerce électronique doit entrer en vigueur au 1er juillet. Notre commission, très impliquée sur le sujet de la fiscalité du numérique, avait souligné l'importance pour les opérateurs de pouvoir se préparer. Un décret et un arrêté ont finalement été publiés hier : dont acte.
Le crédit d'impôt pour dépenses de création audiovisuelle et cinématographique n'a toujours pas reçu le feu vert européen. La secrétaire générale du gouvernement n'a pas su nous dire si la fumée blanche allait sortir. Êtes-vous optimiste ? La loi a été promulguée le 30 juillet 2020, la pré-notification européenne a eu lieu en novembre, la notification en avril 2021 : n'est-ce pas trop long ?
Enfin, l'article 66 de la troisième loi de finances rectificative pour 2020 porte sur les engagements climatiques des entreprises à capitaux publics. Une récente table ronde sur la finance durable a montré l'acuité du sujet. L'arrêté nécessaire serait toujours au stade de la consultation. Ne devrait-il pas être pris au plus vite ?
M. Marc Fesneau, ministre délégué. - La publication hier d'un décret et de trois arrêtés n'est peut-être pas sans lien avec notre débat de ce jour - et illustre la vertu du contrôle parlementaire !
Le crédit d'impôt sur la création audiovisuelle et cinématographique a été notifié à la Commission européenne le 9 novembre 2020, ce qui a permis d'échanger et d'obtenir une décision d'approbation le 17 mai : le décret devrait être rapidement publié. Ces délais sont plutôt resserrés, sachant que la Commission a eu, elle aussi, un programme de travail très chargé.
La disposition relative aux engagements climatiques des entreprises à capitaux publics soulevait certaines difficultés. Un point d'accord a toutefois été trouvé et le projet d'arrêté soumis aux parties prenantes. Les choses avancent.
M. François-Noël Buffet, président de la commission des lois . - Notre commission a examiné 23 des 43 lois promulguées sur la période. Elle constate, hélas, qu'un quart des mesures d'applications prévues par ces textes n'ont pas été prises.
Faute de pouvoir sanctionner un gouvernement défaillant, la publicité du contrôle parlementaire est notre seule arme... Notons toutefois que le contexte était objectivement difficile, et que nos échanges avec la secrétaire générale du Gouvernement ont été constructifs.
Deux textes demeuraient entièrement inapplicables au 31 mars : la loi du 3 juillet 2020 créant le statut de citoyen sauveteur et la loi du 24 juillet 2020 visant à encadrer le démarchage téléphonique. Huit mois après leur promulgation, toujours aucun décret...
La commission regrette vivement que la loi du 30 juillet 2020 sur les violences conjugales n'ait toujours pas été rendue pleinement applicable.
Comment assurer un pilotage plus efficace des consultations préalable à la parution des mesures réglementaires ? Quels enseignements tirer de ces retards ?
M. Marc Fesneau, ministre délégué. - Les propositions de loi représentent 18 des 43 lois adoptées pendant la session. Votre travail approfondi avec le SGG a permis d'avancer sur certains points.
Sur le citoyen sauveteur, quatre mesures d'application restent à prendre ; le décret visant à former les arbitres aux gestes qui sauvent sera publié en juin, les autres sont en cours de rédaction.
Sur le démarchage téléphonique, un décret soumis pour consultation fait débat. Les positions des associations de consommateurs et des organisations professionnelles sont très éloignées. Des arbitrages ministériels sont attendus, je ne peux annoncer de date de publication à ce stade. Un second décret, examiné par la CNIL, sera soumis au Conseil d'État avant d'être publié en juillet 2021.
S'agissant de la proposition de loi visant à protéger les victimes de violence conjugale, le décret sur le contrôle de l'accès aux sites pornographiques a été notifié à la Commission européenne le 2 avril dernier.
M. Jean-François Rapin, président de la commission des affaires européennes . - Notre suivi des résolutions européennes s'inscrit dans le contrôle plus général des suites données à nos travaux. Le Sénat français est parmi les dix assemblées les plus actives sur les trente-neuf que compte l'Union européenne. Son influence à Bruxelles est réelle. Nous avons adopté dix-sept résolutions européennes lors de la dernière session ; dans 83 % des cas, la position du Sénat a été prise en compte.
Nous observons un recours croissant aux ordonnances pour la transposition des directives. En juin 2019 le Règlement du Sénat avait déjà confirmé notre commission dans sa mission d'alerte sur les sur-transpositions. À l'initiative du président Larcher, le Sénat vient de modifier son Règlement pour permettre le suivi des ordonnances. Nous pourrons ainsi étendre notre champ de contrôle sur ces ordonnances, souvent ratifiées trop discrètement.
M. Marc Fesneau, ministre délégué. - Le Gouvernement est attaché aux questions européennes et salue le travail des commissions des affaires européennes des deux assemblées, qui nourrit la réflexion du Gouvernement, tout particulièrement à l'approche de la présidence française de l'Union européenne.
Pour maintenir un taux de transposition élevé, le Gouvernement use des « Ddadue » - textes portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne - qui comportent des habilitations à légiférer par ordonnance sur des sujets souvent très techniques.
Le déficit de transposition de la France est de 0,3 %, inférieur à l'objectif de 0,9 %. Nous pouvons nous en féliciter.
Les rapports du Président de la République qui accompagnent les ordonnances au moment de leur publication mentionnent la base de l'habilitation et la référence de la directive transposée, ce qui renseignera utilement le Parlement.
Mme Nadège Havet . - Merci à la présidente Gruny pour son travail sur le bilan d'application des lois. Ce débat fait suite à l'adoption, hier, d'une modification de notre Règlement, qui comprend une mesure utile et consensuelle en ce qui concerne le suivi des ordonnances. Quelle en sera la portée pour vous, monsieur le ministre ?
Le bilan souligne une banalisation de l'usage des ordonnances : c'est que la crise sanitaire a conduit le Gouvernement à prendre cent ordonnances cette année, soit le double de l'année précédente. Pour ces ordonnances-là, le délai moyen a été de 29 jours entre l'habilitation et la publication. Cette célérité peut expliquer le retard pris sur d'autres mesures.
Quel bilan le Gouvernement tire-t-il de cette période de crise ?
M. Marc Fesneau, ministre délégué. - Il n'appartient pas au Gouvernement de commenter l'évolution du Règlement de votre assemblée. Il se pliera à ce nouvel exercice qui permettra aux sénateurs de mieux contrôler l'application des lois.
Grâce aux cent ordonnances prises pour faire face à la crise sanitaire, les dispositifs de soutien ont été mis en place en un temps record. Je salue la mobilisation exceptionnelle de tous les agents publics, au niveau central et déconcentré. Ils ont permis à notre pays de faire face efficacement à la crise grâce à un usage adapté des ordonnances.
M. Jean-Yves Roux . - Le bilan de l'application des lois s'inscrit dans une tradition parlementaire. Ce pan de notre travail n'est sans doute pas suffisamment pris en compte, alors qu'il est au coeur des missions de contrôle et de responsabilité partagée du législateur. Le débat tombe à pic cette année, juste avant le projet de loi Déconcentration, décentralisation, différenciation, décomplexification (4D), texte tentaculaire, qui pourrait ne pas être applicable rapidement.
Le temps laissé entre le dépôt en ligne du texte modifié par la commission et l'examen en séance nous impose parfois de travailler dans des conditions rocambolesques, aux dépens de la qualité. Nous devons améliorer cette procédure.
Le recours croissant aux ordonnances, s'il se comprend en cette période particulière, n'est pas une solution pérenne.
Comment mieux mobiliser l'outil des questions écrites au Gouvernement ? Il faut identifier plus rapidement celles touchant aux décrets d'application ou au caractère opérationnel de certaines dispositions votées. La balle est dans votre camp, pour faire évoluer le fonctionnement de ces questions.
Les rapports au Parlement et les expérimentations enrichissent les textes, mais comment sont-ils traités et comment les améliorer ?
M. Marc Fesneau, ministre délégué. - La sortie de la crise sanitaire favorisera une meilleure organisation des travaux parlementaires. Les ordonnances ont été surutilisées dans ces circonstances particulières, il faut revenir à un usage plus modéré. Les rapports sont un outil d'information des parlementaires, à vous de vous en saisir.
Les questions écrites constituent un instrument de contrôle intéressant, mais plus de 60 000 ont été déposées depuis le début du quinquennat, ce qui crée d'évidentes contraintes pour la réponse : il ne faut pas en faire un indicateur de suivi ! Outil de contrôle, certes, mais le bilan de l'application des lois me semble à cet égard plus adapté.
Quant aux expérimentations, elles sont parfois intéressantes. Le Sénat est toujours libre d'en proposer, notamment sur les collectivités territoriales. Après le bilan, la généralisation suppose toujours une nouvelle loi : là encore, aux parlementaires de s'en saisir.
Mme Cécile Cukierman . - Ces jours-ci, avec la réforme du Règlement, la suppression de lois obsolètes, le bilan de l'application des lois, nous réfléchissons à l'élaboration de la loi. Mais finalement, de quelle loi s'agit-il ? Les ordonnances se multiplient, les ratifications se raréfient : le pouvoir exécutif empiète de plus en plus sur le travail législatif. Il faut veiller à l'équilibre des pouvoirs !
Sur 92 ordonnances liées à la crise sanitaire, aucune n'a été ratifiée par le Parlement. Selon la décision du Conseil constitutionnel du 28 mai 2020, passé le délai d'habilitation, elles ont force de loi. Laisser traîner deviendrait-il un moyen de légiférer ? Que pense le Gouvernement de la décision du Conseil constitutionnel ?
Il ne faudrait pas non plus donner le sentiment que la démocratie serait une question de ratio horaire, que le temps long du débat législatif serait une perte d'efficacité.
M. Marc Fesneau, ministre délégué. - Loin de moi l'idée de rationaliser le temps parlementaire. Si, depuis 2007, la moyenne est à 42 ordonnances par an hors crise sanitaire, la « banalisation » des ordonnances n'en demeure pas moins un fait. Jean-Marc Sauvet le soulignait dès 2014 : « L'inflation législative a trouvé dans sa législation déléguée un exutoire durable d'abord pour répondre à l'urgence de certaines réformes ou pour décharger le Parlement de l'adoption de textes techniques, ensuite pour investir très largement le domaine devenu très extensif de la loi. »
Ce phénomène a plusieurs causes. Le Gouvernement s'engage généralement, au moment de la demande d'habilitation pour des sujets d'intérêt pour le Parlement, à inscrire à l'ordre du jour un projet de loi de ratification. Nous l'avons fait par exemple sur le premier projet de loi d'habilitation en matière de dialogue social, ou plus récemment sur celui relatif à la justice pénale des mineurs.
Le Parlement peut aussi inscrire ces demandes de ratification sur son ordre du jour, conformément à l'article 48 de la Constitution, mais il le fait rarement. Le Gouvernement n'est pas favorable à une inscription systématique à l'ordre du jour prioritaire, quand il n'y a pas de volonté politique de modifier la teneur de l'ordonnance.
Je rappelle aussi que le Sénat a écarté de lui-même l'option d'un débat en séance publique pour la moitié des ratifications sous ce quinquennat. Ainsi, l'article 71 de la loi Pacte (Plan d'action pour la croissance et la transformation des entreprises) prévoyait 23 habilitations ; il a été examiné en procédure de législation en commission à la demande de la commission spéciale.
Quand le délai d'habilitation pour prendre l'ordonnance est expiré, la contestation de l'ordonnance au regard des droits et libertés garantis par la Constitution prend la forme d'une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) - c'est le sens de la décision du Conseil constitutionnel. En revanche, le Conseil d'État contrôlera toujours la conformité de l'ordonnance aux principes de valeur constitutionnelle et aux engagements internationaux. Le Parlement conserve l'entièreté de ses pouvoirs pour ratifier l'ordonnance ou pour la modifier
M. Dany Wattebled . - L'exercice auquel nous nous prêtons est austère mais utile. Il donne toute sa force à la séparation des pouvoirs et à la crédibilité de l'action publique. Le recours à la procédure accélérée devient trop fréquent : l'exception est désormais la règle. En 2020, sur les 23 lois promulguées examinées au fond par la commission des lois, 17 ont été adoptées après un engagement de cette procédure accélérée. Les délais restreints affectent la qualité des débats et de la loi elle-même.
Trop de rapports au Parlement ne sont pas remis ou le sont avec retard : ainsi, seuls quatre rapports sur les sept demandés dans ces 23 lois ont été transmis au Parlement, soit 57 %.
Comment comptez-vous remédier à ces dysfonctionnements ? (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP)
M. Marc Fesneau, ministre délégué. - La tendance au recours croissant à la procédure accélérée est antérieure à ce quinquennat. Elle est notamment liée à la réforme constitutionnelle de 2008 : un texte déposé depuis moins de six semaines ne peut être inscrit à l'ordre du jour.
Depuis 2017, le Gouvernement s'efforce de ménager des conditions d'examen raisonnables, même en procédure accélérée. Ainsi, la loi pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et une alimentation saine et durable (EGalim), la loi Pacte et la loi d'orientation des mobilités (LOM) ont été examinées en procédure accélérée, mais avec des délais supérieurs à la procédure de droit commun.
Les rapports au Parlement sont effectivement remis avec des retards. Je salue l'effort du Parlement pour en demander moins. Le Gouvernement doit s'astreindre à les remettre en temps et en heure.
M. Guillaume Gontard . - Le code de l'environnement est mal appliqué par les préfets. Ainsi, en Isère, l'extension d'une zone industrielle de 221 hectares en bordure de Rhône a reçu un avis défavorable des commissaires enquêteurs en raison de mesures de compensation insuffisantes au regard des atteintes à l'environnement. Pourtant, le préfet n'a pas refusé l'autorisation.
Selon l'article L. 163-1, les mesures de compensation doivent se traduire par une obligation de résultat. L'insuffisante communication de documents relevant de l'environnement nous a valu une mise en demeure de la Commission européenne. Un an plus tard, une circulaire a enfin été transmise aux préfets. Comment expliquer que les préfets outrepassent la loi ?
M. Marc Fesneau, ministre délégué. - Vous laissez entendre que les préfets ne joueraient pas leur rôle de garants de l'application de la loi dans les territoires, et que le Gouvernement leur donnerait des instructions pour que la loi ne soit pas respectée. C'est évidemment faux. Les préfets, ces très grands serviteurs de l'État, ont, en relation avec les élus, contribué à maintenir notre pays debout face à la crise.
J'ai du mal à faire le lien entre votre question et l'application des lois. C'est au juge administratif de faire les contrôles nécessaires au plan local, par le biais du contrôle de légalité. Selon l'article 20 de la Constitution, l'administration est à la disposition du Gouvernement.
M. François Bonneau . - L'excès de normes dévalue la norme. Selon le rapport public du Conseil d'État de 1991, les textes d'affichage et le droit mou aggravent cette tendance.
Les textes sur l'environnement pâtissent particulièrement de cette nonchalance des autorités. La loi sur l'économie bleue, celle sur la reconquête de la biodiversité, la loi Montagne, datant toutes de 2016, restent en partie inappliquées. Pour la loi Montagne, cela représente 25 % des dispositions.
Le récent projet de loi constitutionnel sur l'environnement énonce une énième formule incantatoire, probablement sans effet juridique. Le Gouvernement n'entend pas prendre le contrepied de la tendance malheureuse à transformer la loi en instrument de communication. Les projets de loi cosmétiques nuisent gravement à la lisibilité du droit et à l'autorité de la loi.
Anticipons un peu : quelles garanties pouvons-nous avoir sur la mise en oeuvre effective du tentaculaire projet de loi Climat ?
M. Marc Fesneau, ministre délégué. - Votre question porte sur le sens de la loi. Celle-ci n'est pas un instrument d'affichage ; elle doit produire des effets.
Plus de 4 000 amendements ont été déposés à l'Assemblée nationale sur la loi Climat - ce n'est pas le fait du Gouvernement ! Et de nombreux autres seront déposés par les sénateurs. Sur des sujets complexes, il faut parfois des dispositions nombreuses.
Le Gouvernement, de son côté, doit prendre des mesures d'application concrètes. Le taux d'application des lois est la meilleure preuve de leur utilité. Après avoir été en recul l'année dernière, il a fortement augmenté pour atteindre 80 %. Cet été, il sera de 88 % : je salue la gestion des stocks de textes par l'administration.
M. Jérôme Durain . - La copie du Gouvernement est plutôt bonne, celle des parlementaires aussi. Ce rapport sans vitriol en témoigne !
L'obstruction parlementaire existe-t-elle ? On accuse le Parlement de ne pas être assez moderne, d'être trop lent, mais la lecture de ce rapport prouve que nous savons légiférer vite.
Quel est l'avenir des ordonnances ? Tels sujets seraient trop techniques pour le Parlement et nécessiteraient une ordonnance. Mais certaines habilitations ne sont pas utilisées ; et certaines ordonnances sont mal ficelées. Notre collègue Jean-Pierre Sueur s'inquiète d'une ratification facultative. Le Président du Sénat suggère des propositions de loi de ratification. Quelle doctrine d'utilisation des ordonnances préconisez-vous ?
Enfin, les statistiques ne seraient pas si bonnes si le Conseil constitutionnel ne nettoyait pas les textes en les censurant... Je pense à la proposition de loi Retailleau sur les casseurs, à la proposition de loi Avia, à la proposition de loi Sécurité globale.
M. Marc Fesneau, ministre délégué. - Il ne m'appartient pas d'aborder la révision du Règlement du Sénat. Je connais la capacité du Parlement à aller vite quand cela est nécessaire ; jamais le Gouvernement n'a dit le contraire durant la crise sanitaire.
Le Conseil constitutionnel censure des dispositions d'initiative gouvernementale mais aussi parlementaire ; c'est l'exercice normal de ses prérogatives.
M. Louis-Jean de Nicolaÿ . - L'application des lois est un gage d'efficacité. La loi du 22 juillet 2019 créant l'Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT) n'est pas appliquée pour 25 % de ses dispositions.
La convention pour la reprise des missions de l'Agence du numérique prévue à l'article 2, ainsi que les conventions avec les cinq opérateurs partenaires prévoyant les conditions de leur participation financière, mentionnées à l'article 7, n'ont pas encore été transmises au Parlement. À l'article 11, un décret manque pour déterminer les catégories de personnes pouvant entrer dans la réserve citoyenne. Selon la DGCL, il est en cours de rédaction... depuis un an.
Le succès de l'ANCT dépendra de sa capacité à répondre efficacement aux besoins des élus, de l'apport d'ingénierie qu'elle leur fournira, du dialogue qui se nouera dans le cadre des comités locaux et de la coordination avec les partenaires de l'agence.
Il faut une application rigoureuse pour conserver la confiance des territoires.
M. Marc Fesneau, ministre délégué. - Je connais votre attachement à l'ANCT ; vous êtes membre de son conseil d'administration. La convention sur l'Agence du numérique est en cours de rédaction et sera présentée en juin au conseil d'administration, puis rapidement publiée. Afin de suivre les recommandations de la Cour des comptes, les conventions avec les opérateurs partenaires seront bientôt contresignées par le ministre de la cohésion des territoires et les parties prenantes, avant d'être transmises au Parlement par l'ANCT.
Les travaux sur la réserve citoyenne sont en cours. Ils devraient aboutir à l'été 2021.
Il ne faut pas décevoir les attentes fortes des élus à l'égard de l'ANCT, notamment en matière d'ingénierie.
M. le président. - Merci à chacun pour sa contribution à ce débat important pour la vie parlementaire.
La loi, nous ne la faisons pas pour nous, nous ne sommes pas occupés à nous entre-regarder. Nous la faisons pour les Français, dans une définition concrète de l'État de droit dans une démocratie.
Des lois, nous en faisons trop, de plus en plus, parfois de manière impulsive, pour répondre le mercredi à un événement du samedi...
Mais grâce à cet exercice de contrôle, nous nous interrogeons sur l'utilité de la loi. Il ne s'agit pas un doute existentiel. Simplement, nous devons éviter la banalisation de la loi, qui affaiblit l'État de droit.
Ma responsabilité de Président du Sénat porte également sur la question des ordonnances. La ratification est nécessaire. Comment admettre qu'on ne ratifiera jamais les ordonnances et continuer à voter des habilitations !
J'attends de savoir ce que dira le Conseil constitutionnel sur la résolution que nous avons adoptée. C'est un point important : nous devons cesser de croire que l'État de droit se mesure à la quantité des normes.
Monsieur le ministre, merci de vous être livré à un exercice difficile, parfois acrobatique !
Je rappelle que la législation en commission n'est pas une législation au rabais. Elle n'a rien d'automatique mais elle est parfois la plus adaptée, et la séance publique peut prendre le relais en cas de désaccord.
Je tiens fortement à ce débat, car une des missions du Sénat est de contrôler. Nous poursuivons ce travail essentiel en commission, dans nos missions d'informations et dans nos missions de contrôle. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; M. André Gattolin applaudit également.)
La séance est suspendue pour quelques instants.
présidence de M. Roger Karoutchi, vice-président