Production d'énergies renouvelables (Conclusions de la CMP)

Mme le président.  - L'ordre du jour appelle l'examen des conclusions de la commission mixte paritaire (CMP) chargée d'élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif à l'accélération de la production d'énergies renouvelables.

M. Didier Mandelli, rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; MM. Jean-François Longeot et Jean-Michel Houllegatte applaudissent également.) Il y a trois mois, le Sénat adoptait à la quasi-unanimité ce projet de loi. Après une CMP conclusive, il est temps de transformer l'essai.

Le chemin n'a pas été sans écueil, mais nos efforts collectifs n'ont pas été vains : ce texte fait honneur au travail du Sénat.

La commission de l'aménagement du territoire et du développement durable souhaitait renforcer la planification territoriale afin de passer à une logique ascendante. Nous avons institué un dispositif global de planification territoriale car nous voulions que les élus locaux et les maires soient à la manoeuvre pour définir les zones d'accélération des énergies renouvelables. Nous avions proposé une localisation des parcs éoliens au sein de la zone économique exclusive (ZEE), à plus de 22 km du rivage, afin d'améliorer l'acceptabilité des projets.

Nous voulions aussi simplifier les procédures pour réduire le délai de développement des énergies renouvelables. Nous avions créé un fonds de garantie pour couvrir les porteurs de projet.

Afin de libérer des surfaces artificialisées, nous avions renforcé la couverture photovoltaïque des bâtiments non résidentiels et facilité l'installation d'ouvrages renouvelables.

Nous entendions enfin sécuriser juridiquement le texte en visant l'ensemble des énergies renouvelables.

L'Assemblée nationale a conservé nombre de nos propositions. Sur les 108 articles du texte final, 39 ont été introduits par le Sénat. Certes, nous déplorons la suppression de quelques-uns de nos apports par le Sénat, mais la balance penche en notre faveur. Le texte final est plus ambitieux qu'à l'origine.

Le dispositif de planification territoriale répond au double objectif de développement des énergies renouvelables et d'appropriation territoriale des projets.

Nous avons pérennisé des mesures de simplification administrative. Nous avons rétabli l'article 5 afin de limiter le risque contentieux. Autre apport important du Sénat rétabli en CMP : les bâtiments non résidentiels de plus de 500 mètres carrés devront recevoir des installations photovoltaïques ou être végétalisés. Les bâtiments neufs devront pouvoir accueillir des équipements d'énergies renouvelables.

Il me reste à remercier les présidents de commission, le rapporteur Chauvet et l'ensemble des groupes, ainsi que les rapporteurs de l'Assemblée nationale. Je vous salue également, madame la ministre, pour votre sens du dialogue. J'espère que la loi de programmation quinquennale nous donnera à nouveau l'occasion d'oeuvrer collectivement à l'atteinte de nos objectifs climatiques et énergétiques. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur quelques travées du groupe UC)

Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre de la transition énergétique .  - Le texte se veut une réponse à trois chiffres, démontrant la nécessité d'agir : deux tiers, c'est la part d'énergies fossile, importées, dans la consommation finale d'énergie, dont nous ne pouvons nous passer pour le moment ; 2035, c'est la date à laquelle 26 de nos 56 réacteurs nucléaires atteindront les cinquante années d'exploitation ; 60 %, selon RTE, c'est la proportion d'électricité à produire en plus pour répondre à la demande croissante et pour devenir le premier pays industrialisé à atteindre la neutralité carbone. Nous ne pourrons nous passer d'aucune énergie décarbonée, nucléaire comme renouvelable.

Nous devons accélérer. Nous sommes le seul pays européen à ne pas avoir atteint ses objectifs de renouvelable. Face au dérèglement climatique, nos prochains objectifs devront être encore plus ambitieux. Levons tous les verrous entravant le développement de projets.

Il ne s'agit ni d'allouer des moyens financiers déjà prévus dans la loi de finances, ni d'anticiper la future programmation sur l'énergie et le climat.

Devant vous, je m'étais engagée à coconstruire ce texte, avec tous ceux qui veulent agir en faveur du pouvoir d'achat des Français, de la souveraineté industrielle et de la lutte contre le réchauffement climatique.

Je salue la qualité du travail de chacun.

Nous créons un système de planification qui fait confiance aux élus locaux. La CMP a simplifié le système et les comités régionaux de l'énergie ont été renforcés. Je le rappelle : pas de zone d'accélération, pas de zone d'exclusion. Les élus pourront décider des zones où seront développées les énergies renouvelables. Aucune commune ne se verra imposer de projets sur son territoire.

Le volet agrivoltaïsme est un autre apport du Sénat, qui reprend une proposition de loi de MM. Decool, Menonville, Longeot et Moga. Nous voulons concilier souveraineté alimentaire et souveraineté énergétique. Pour la première fois, nous définissons l'agrivoltaïsme en droit et prévoyons un cadre pour concilier les différentes activités.

Le texte encadre l'installation de panneaux photovoltaïques afin qu'aucune terre fertile ne soit abîmée.

Nous favorisons le développement des énergies renouvelables sur des zones déjà artificialisées, tels que les bâtiments neufs et existants. La CMP a introduit une obligation de couverture pour les bâtiments non résidentiels d'une emprise au sol de plus de 500 mètres carrés.

Par ailleurs, nous avons facilité les projets sur tous les délaissés ferroviaires, routiers et fluviaux, ainsi que l'installation des ombrières sur parkings, suivant vos propositions.

Les communes pourront être associées au partage de la valeur et à la réussite des installations.

Un fonds dédié aux actions locales, un autre à la biodiversité - j'ose dire aux geckos - et l'ouverture d'un financement participatif des habitants aux projets de leur territoire complètent le dispositif.

Ce texte n'aurait pas été complet sans des dispositions pour l'outre-mer, les énergies renouvelables étant absolument stratégiques pour leur autonomie énergétique. Je remercie les parlementaires des zones non interconnectées pour ce travail.

Les chemins des compromis existent. Empruntons-les pour lutter contre le dérèglement climatique, construire notre indépendance énergétique, protéger le pouvoir d'achat et la compétitivité des entreprises.

Discussion du texte élaboré par la CMP

Mme le président.  - Je rappelle qu'en application de l'article 42, alinéa 12, du Règlement, le Sénat examinant après l'Assemblée nationale le texte élaboré par la CMP, il se prononce par un seul vote sur l'ensemble de ce texte en ne retenant que les amendements présentés ou acceptés par le Gouvernement.

En conséquence, le vote sur les amendements et sur les articles est réservé.

ARTICLE 1er BIS

Mme le président.  - Amendement n°11, présenté par le Gouvernement.

Alinéa 4, première phrase

Remplacer les mots :

concernant les installations et les opérations mentionnées au II de l'article 1er de la loi n°  du  relative à l'accélération de la production d'énergies renouvelables

par les mots :

de développement des énergies renouvelables et des projets industriels nécessaires à la transition énergétique

ARTICLE 1er TER

Mme le président.  - Amendement n°12, présenté par le Gouvernement.

Alinéas 4 et 7

Remplacer les mots :

la production d'énergies renouvelables

par les mots :

l'implantation d'installations terrestres de production d'énergies renouvelables

Mme le président.  - Amendement n°13, présenté par le Gouvernement.

Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :

...° À l'article L. 181-17, les mots : « de l'avant-dernier » sont remplacés par les mots : « du cinquième ».

ARTICLE 1er QUINQUIES A

Mme le président.  - Amendement n°15, présenté par le Gouvernement.

Alinéa 1

Remplacer le mot :

renouvellement

par le mot :

rééquipement

ARTICLE 3

Mme le président.  - Amendement n°6, présenté par le Gouvernement.

I.  -  Alinéa 16

Remplacer la référence :

L. 181-28-4

par la référence :

L. 181-28-10

II.  -  Alinéa 26

Après le mot :

installations

insérer le mot :

terrestres

III.  -  Alinéa 46

Remplacer les mots :

du e

par le mot :

de

IV.  -  Alinéa 84

Remplacer la référence :

L. 181-28-4

par la référence :

L. 181-28-10

ARTICLE 4

Mme le président.  - Amendement n°14, présenté par le Gouvernement.

Alinéa 6

Remplacer la référence :

L. 141-5-2

par la référence :

L. 141-5-3

ARTICLE 5

Mme le président.  - Amendement n°16, présenté par le Gouvernement.

Alinéa 3

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Les conditions d'application du présent alinéa sont précisées par décret en Conseil d'État.

ARTICLE 6 BIS A

Mme le président.  - Amendement n°2, présenté par le Gouvernement.

Alinéa 1

Remplacer les mots :

et aux opérations de modifications d'installations industrielles mentionnées aux 2° et 5° du II de l'article 1er de la présente loi

par les mots :

d'hydrogène renouvelable ou bas-carbone, mentionné à l'article L. 811-1 du même code, et aux opérations de modifications d'installations industrielles ayant pour objectif le remplacement de combustibles fossiles pour la production d'énergie, l'amélioration de l'efficacité énergétique ou la diminution significative des émissions de gaz à effet de serre

ARTICLE 6 BIS B

Mme le président.  - Amendement n°3, présenté par le Gouvernement.

Alinéa 1

Remplacer les mots :

aux 2° et 5° du II de l'article 1er

par les mots :

au premier alinéa du I de l'article 6 bis A

ARTICLE 6 BIS

Mme le président.  - Amendement n°4, présenté par le Gouvernement.

Alinéa 31

Remplacer cet alinéa par trois alinéas ainsi rédigés :

...° Le 1° de l'article L. 342-11 est ainsi modifié :

a) Le deuxième alinéa est supprimé ;

b) Au dernier alinéa, les mots : « ne sont pas pris en compte dans cette part. Ces coûts » sont supprimés ;

ARTICLE 6 TER C

Mme le président.  - Amendement n°5, présenté par le Gouvernement.

Alinéa 2

Supprimer les mots :

ou de l'ouvrage

ARTICLE 11 BIS

Mme le président.  - Amendement n°17, présenté par le Gouvernement.

I.  -  Alinéa 6

Rédiger ainsi cet alinéa :

« Les aires de stationnement associées aux bâtiments ou parties de bâtiments mentionnés au II du présent article, lorsqu'elles sont prévues par le projet, doivent également intégrer des revêtements de surface, des aménagements hydrauliques ou des dispositifs végétalisés favorisant la perméabilité et l'infiltration des eaux pluviales ou leur évaporation et préservant les fonctions écologiques des sols.»

II.  -  Alinéa 12

Remplacer les mots :

premier alinéa du I

par les mots :

premier alinéa du I du

ARTICLE 11 TER

Mme le président.  - Amendement n°18, présenté par le Gouvernement.

Alinéa 10

Supprimer les mots :

ainsi que par les officiers ou agents de police judiciaire, les fonctionnaires et les agents mentionnés au premier alinéa de l'article L. 480-1 du code de l'urbanisme

ARTICLE 11 DECIES

Mme le président.  - Amendement n°1, présenté par le Gouvernement.

I.  -  Après l'alinéa 7

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

...) Au premier alinéa de l'article L. 314-31, le mot : « huitième » est remplacé par le mot : « neuvième » ;

II.  -  Alinéa 60

Remplacer les mots :

L. 111-2, en précisant notamment la durée mentionnée au b du même article L. 111-2

par les mots :

L. 111-31, en précisant notamment la durée mentionnée au quatrième alinéa du même article L. 111-31

III.  -  Après l'alinéa 62

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

...  -  Au cinquième alinéa de l'article L. 1425-2 du même code, le mot : « sixième » est remplacé par le mot : « septième ».

ARTICLE 16 NONIES

Mme le président.  - Amendement n°9, présenté par le Gouvernement.

Alinéa 7

Rédiger ainsi cet alinéa :

4° Avant le dernier alinéa du I de l'article L. 161-4, dans sa rédaction résultant de l'article 3 de la présente loi, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

ARTICLE 16 DUODECIES

Mme le président.  - Amendement n°8, présenté par le Gouvernement.

Alinéa 17

Remplacer la référence :

par la référence :

ARTICLE 17

Mme le président.  - Amendement n°10, présenté par le Gouvernement.

Alinéa 23

Remplacer la référence :

L. 311-2

par la référence

L. 311-12

ARTICLE 18

Mme le président.  - Amendement n°7, présenté par le Gouvernement.

Alinéa 32

Après la seconde occurrence du mot :

projets

insérer les mots :

, en application des articles L. 311-10, L. 314-29, L. 446-5, L. 446-14, L. 446-15 ou L. 446-24 du même code,

Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre.  - Ces dix-huit amendements sont de cohérence rédactionnelle ou de coordination.

M. Didier Mandelli, rapporteur.  - Avis favorable à tous les amendements.

Explications de vote

Mme Nadège Havet .  - (Applaudissements sur les travées du RDPI) Madame la ministre, vous avez posé le cadre : deux tiers d'énergies fossiles importées dans notre consommation finale d'énergie. Or il faudra produire 60 % d'électricité en plus en 2050.

Le défi est immense pour respecter nos engagements environnementaux et préserver notre souveraineté.

Il y a deux semaines, le baromètre Observ'ER expliquait notre retard sur les énergies renouvelables au regard de la programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE) notamment par la complexité de notre réglementation. Il faut aller plus vite, et c'est ce que nous faisons.

Réunis pendant près de cinq heures en CMP, nous sommes parvenus à un compromis, fruit d'une construction transpartisane. Je salue les rapporteurs et la ministre pour leur coconstruction.

En simplifiant les procédures, en dégageant du foncier, en partageant la valeur produite, nous allons accélérer.

Le conseil municipal garde un rôle clé sur les zones d'accélération.

L'agrivoltaïsme est encadré, pour que l'électricité ne vienne pas concurrencer la production alimentaire ou modifier l'attribution des aides européennes.

Nous axons les énergies renouvelables sur le foncier déjà artificialisé. Le partage de la valeur figure aussi dans le texte, avec de nouveaux financements pour les communes.

Je me réjouis des avancées sur l'éolien : la CMP a autorisé une dérogation à la loi Littoral pour le raccordement de l'éolien en mer.

Une voie médiane a été empruntée sur les architectes des bâtiments de France (ABF), qui se verront confier non seulement la protection du patrimoine, mais aussi une autre mission, celle de la transition énergétique.

Le RDPI votera ce texte, qui concourt à notre souveraineté et à notre indépendance. (Applaudissements sur les travées du RDPI, du groupe INDEP, du RDSE et du groupe UC)

M. Hervé Gillé .  - Notre groupe appelle depuis longtemps à passer d'une écologie de principe à une écologie d'action. Mais nous nous interrogeons sur le calendrier législatif, qui met la charrue avant les boeufs.

C'est parce que la France a manqué son objectif de production des énergies renouvelables en 2020 que le groupe socialiste a agi en responsabilité pour améliorer ce texte nécessaire. Il conserve son objectif d'accélération tout en tenant compte du rôle des collectivités territoriales et de la biodiversité.

Saluons quelques améliorations. La CMP est revenue sur l'article 4 : pour bénéficier de la raison impérative d'intérêt public majeur, les projets d'énergies renouvelables devront répondre à des conditions définies par décret en Conseil d'État. Par ailleurs, la modification de la répartition de la taxe sur l'éolien en mer a été supprimée.

Nous avons privilégié le développement du photovoltaïque sur le bâti existant, plutôt que l'artificialisation ; sur ce point, le texte est amélioré.

Le compromis trouvé en CMP, qui prévoit de recueillir l'avis des associations d'élus, est satisfaisant.

Nous prenons acte du processus de planification partant des communes, qui ne pourront définir des zones d'exclusion des énergies renouvelables que lorsque les zones d'accélérations l'auront été. Nous évitons donc les vétos arbitraires.

Mais nous restons dans un entre-deux politique. Le consensus trouvé sur les ABF reflète surtout le manque de moyens alloués aux services pour planifier les installations en fonction du terrain.

Notre devoir est de protéger les agriculteurs contre les excès de l'agrivoltaïsme. Il faut rechercher un modèle économique.

Nous déplorons la suppression de la disposition, introduite par l'Assemblée nationale, interdisant aux producteurs de suspendre leur contrat de complément de rémunération avant terme pour profiter seuls, au détriment de la collectivité, de l'envolée des prix de l'énergie. L'État, privé de recettes, est systématiquement perdant.

Le sujet mérite d'être retravaillé, mais le texte va dans le bon sens.

M. Fabien Gay .  - Le CRCE défend un mix équilibré, avec une part de nucléaire et une part de renouvelable. Mais il y a un problème de méthode. J'ai rarement vu autant d'amendements du Gouvernement - et ils sont loin d'être tous rédactionnels. Lisez l'amendement n°16 !

Tout est fait dans le désordre, avec une segmentation des débats. Mais il y a une cohérence : en aucun cas, vous en faites sortir l'énergie d'une logique de marché. Pourtant, nous voyons où cela nous mène : à l'augmentation de 15 % des tarifs de l'électricité et du gaz au 1er février et à la suppression des tarifs réglementés du gaz en juin prochain. Un jour, il faudra nous donner votre position sur cette question.

Avec les Power Purchase Agreements (PPA) et le partage de la valeur, on est en opposition totale avec le service public de l'énergie. Qui développera ces énergies renouvelables ? Le public ou le privé ?

Il faudra des personnes formées pour construire et démanteler, à moins que vous ne soyez résignée à une énième dépendance à l'égard de la Chine ?

Vous dites impliquer les communes dans le développement des énergies renouvelables et utiliser les surfaces déjà artificialisées, mais au prix de régressions à l'égard des documents d'urbanisme. Nous nous y opposons : il est paradoxal de défendre des énergies renouvelables au détriment des espaces naturels !

Limiter le dialogue et les recours sur les projets, par exemple dans les espaces forestiers littoraux, n'est pas une bonne idée.

La France est régulièrement condamnée pour son inaction en matière d'émissions de gaz à effet de serre. Pour y échapper, il faut aussi développer le ferroviaire et les mobilités douces, accompagner de notre agriculture. Vous voulez accélérer la libéralisation du secteur, qui est responsable de nos maux : nous nous abstiendrons donc sur le texte. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE)

M. Jean-François Longeot .  - (Applaudissements sur les travées des groupes UC et INDEP) Trois mois après le début de son examen, je me félicite de l'accord en CMP sur ce texte indispensable à la préservation de notre souveraineté énergétique et à l'atteinte de nos objectifs climatiques.

La France fait figure de mauvais élève dans le développement des énergies renouvelables. Notre responsabilité était donc de taille. Le texte initial nous avait laissés sur notre faim : secteurs non couverts, comme le gaz et la chaleur renouvelables, manque d'ambition simplificatrice et d'association des acteurs locaux.

Notre ambition était claire : accélérer les projets, grâce à une planification territoriale et à une simplification administrative.

L'Assemblée nationale a poursuivi le travail engagé par le Sénat, en confirmant nombre de nos ajouts, sur le fonds de garantie pour les porteurs de projets par exemple.

Les divergences de vues ont donné lieu à de riches échanges en amont de la CMP, permettant de trouver une rédaction de compromis, grâce, entre autres, au travail des rapporteurs et de la présidente Primas.

Ce texte est un texte de progrès, enrichi de nombreux apports sénatoriaux, notamment sur la simplification administrative, l'association des collectivités territoriales ou la planification ascendante.

Il permet d'avancer sur l'agrivoltaïsme, ce dont M. Moga et moi-même nous réjouissons. L'attribution de la compétence de premier et dernier recours au Conseil d'État n'y figure pas, mais l'équilibre trouvé fait honneur au travail sénatorial.

Rendez-vous au projet de loi de programmation quinquennale. (Applaudissements sur les travées du groupe UC ; M. Franck Menonville applaudit également.)

M. Jean-Pierre Corbisez .  - Sept titres, une centaine d'articles, plus de cent pages... Heureusement qu'il s'agissait de simplifier ! Le texte est dense, mais pour tenir les objectifs, il nous faudra attendre les textes réglementaires. Et les moyens budgétaires devront être considérables...

Une seconde lecture n'aurait pas été de refus, le Sénat n'ayant pu s'exprimer sur les ajouts de l'Assemblée nationale.

Consultation, concertation, avis conforme rendront aux élus locaux la maîtrise de leur territoire. La possibilité d'introduire dans les plans locaux d'urbanisme (PLU) des zones d'exclusion conforte le principe selon lequel les élus locaux sont les mieux placés pour valider les aménagements les plus pertinents. Je sais que certains industriels y voient une source de retard ; c'est au contraire un gage de réussite.

À titre personnel, je me félicite des dispositions sur l'hydrogène renouvelable et le bas-carbone, ainsi que sur la biodiversité, comme de l'obligation pour les entreprises de plus de 500 salariés de réaliser un plan de revalorisation du foncier.

Je regrette que l'on n'ait pas allégé les procédures d'avis des ABF pour faciliter l'implantation de photovoltaïque à proximité de sites classés. Panneau noir sur toiture noire, il n'y a plus d'espoir ?

Ce texte est loin de faire l'unanimité : les professionnels sont partagés, les défenseurs de l'environnement le contestent, les associations d'habitants ne sont pas convaincues... Seuls les élus locaux s'en satisfont.

Le verre étant plus qu'à moitié rempli, notre groupe votera majoritairement pour.

Mme Sophie Primas .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; Mme Cathy Apourceau-Poly applaudit également.) La France doit doubler sa production d'électricité décarbonée pour atteindre la neutralité carbone à l'horizon 2050. Cela implique de consolider le parc nucléaire et de développer les énergies renouvelables. Mais, faible d'une décennie d'atermoiements, la France est à la traîne.

L'objectif d'accélération est partagé, car essentiel à notre souveraineté. Mais je regrette que nous devions légiférer dans le désordre : il aurait fallu commencer par la PPE. Seuls 15 % des 112 articles du texte ont fait l'objet d'une étude d'impact. Enfin, le texte initial était muet sur l'hydraulique comme sur les collectivités, qui pourtant contribuent pour 5,5 milliards d'euros à la transition énergétique.

Le Sénat a corrigé le tir : nous avons associé les collectivités, respectant leurs compétences et leurs finances en privilégiant une approche décentralisée. Les communes pourront définir les zones d'accélération, recourir au dispositif 3DS en vue de réglementer l'implantation des différentes énergies renouvelables, voire en exclure certains. L'avis des communes sera requis en cas de projet d'implantation en zone littorale.

Certes, cela impose aux élus de plancher à nouveau sur leurs plans d'urbanisme, mais mieux vaut leur laisser la main que de leur imposer les schémas de l'État profond.

Rien ne protège les maires contre les implantations parfois flibustières. Demain, ce seront eux, les conseils municipaux et les populations qui décideront.

Nous avons aussi imposé une contribution territoriale au partage de la valeur à tous les projets d'EnR, assuré l'accès des collectivités aux contrats d'achat de long terme, à leur prise de participation dans des groupements d'implantation d'EnR, facilité l'autoconsommation.

Notre objectif était que les collectivités s'approprient la transition énergétique.

Soucieux de ne pas déroger à la neutralité technologique, nous avons introduit des dispositions en faveur du biogaz, de l'hydroélectricité et de l'hydrogène.

Nous avons également comblé les impensés du texte. L'emprise foncière des EnR, d'abord : pour la première fois, l'agrivoltaïsme fait l'objet d'une définition légale, et bénéficiera d'appels d'offres dédiés.

La dépendance minière, ensuite, les EnR étant très consommatrices en métaux critiques. C'est pourquoi nous avons imposé un bilan carbone pour tous les projets. Le sujet est stratégique, nous ouvrons le débat.

Bien que ce texte laisse des regrets à certains membres du groupe Les Républicains, notamment sur l'éolien en mer, nous le voterons. Le Sénat a imprimé sa marque en territorialisant les projets et en remettant les élus locaux au centre du dispositif.

Madame la ministre, je vous remercie pour le travail en commun mené avec vos services. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC, ainsi qu'au banc des commissions ; M. Franck Menonville applaudit également.)

M. Pierre Médevielle .  - (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP) Après des turbulences à l'Assemblée nationale, la CMP a produit un texte équilibré qui répond à l'objectif fixé : gagner du temps.

J'espère qu'il en sera de même pour le volet réglementaire, tout aussi essentiel que son pendant législatif.

Nos positions n'étaient pas toujours alignées, mais nous avons enrichi le texte. Le Sénat a notamment intégré au texte une proposition de loi du groupe INDEP sur l'agrivoltaïsme, récemment votée par notre assemblée.

Ainsi cette activité reçoit un cadre bien défini : l'agriculture restera l'activité principale, pour ne pas faire obstacle aux aides de la PAC. En ces temps de crise, l'agrivoltaïsme coche toutes les cases du bon sens.

Autre sujet qui nous tient à coeur, le rôle des collectivités. Entre le droit de veto et l'exigence de développement rapide des EnR, nous considérons que les maires doivent rester des acteurs majeurs : mieux les associer est le gage d'une transition réussie.

Les schémas de cohérence territoriale (Scot) prendront en compte les objectifs de développement durable, qui ont été améliorés.

Le sujet du raccordement est essentiel. On peut installer toutes les énergies renouvelables que l'on veut, l'effet est nul si elles ne sont pas intégrées au réseau. L'enjeu est entre les mains du Gouvernement et des gestionnaires de réseaux.

Je salue enfin la mesure sur le stockage, qui répond à l'intermittence de certaines énergies. Il convient de compléter le bouquet énergétique par le nucléaire, qui fournit une électricité permanente.

M. Jean-Claude Requier.  - C'est vrai.

M. Pierre Médevielle.  - Le mois dernier, nous avons étudié le texte sur l'accélération du nucléaire, qui reste une filière d'excellence en France. Nous devons augmenter notre potentiel de production d'énergie bas-carbone. Ces deux textes, nécessaires, ne sont qu'un préalable : nous compléterons le dispositif lors des lois de programmation. Le groupe INDEP votera pour ce projet de loi. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP et au banc des commissions ; M. Jean-Claude Requier applaudit également.)

M. Ronan Dantec .  - (Applaudissements sur les travées du GEST ; Mme Nadège Havet applaudit également.) Tout avait très bien commencé. Sept ans après la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte portée par Ségolène Royal, l'État et le Gouvernement proposaient une loi pour les énergies renouvelables, permettant de crédibiliser la réduction de la part du nucléaire à l'horizon 2035.

Tout s'était bien poursuivi. Évidemment, il reste au Sénat la nostalgie des années Pompidou, où nos centrales nucléaires produisaient assez pour nos besoins électriques - électriques seulement. L'offensive a bien eu lieu, mais elle a échoué, fauchée par les pales d'éoliennes ! Le Sénat a finalement refusé d'imposer l'éloignement des parcs d'éoliennes à 40 km des côtes, ainsi que le droit de veto accordé aux maires sur les implantations.

Je remercie les rapporteurs, qui ont donné un avis favorable à plusieurs amendements du GEST ensuite adoptés, à notre grande surprise... Ils portent sur la planification régionale, l'alourdissement des pénalités pour défaut d'équipement en panneaux photovoltaïques, et la création d'un fonds dédié à la biodiversité. Fort de ces avancées, le GEST avait voté en faveur du texte amendé par le Sénat.

Mais depuis, l'horizon s'est assombri. Ainsi la pénalisation en cas de manquement d'équipements des parkings en photovoltaïque est désormais insuffisante, et les mesures sur l'autoconsommation ont été affaiblies.

L'article 3 marquait la volonté d'associer les élus locaux, répondant à une volonté unanime du Sénat. L'équilibre trouvé paraissait séduisant, mais l'avis conforme des maires à deux étapes du processus risque de bloquer les projets.

Cela dit, n'ignorons pas les apports du texte : l'ouverture des contrats de long terme pour les collectivités territoriales, notamment.

La création d'un fonds dédié à la biodiversité constitue enfin, en dépit des montants rabotés en CMP, une avancée importante. Le gecko vert de Manapany vous remercie !

À l'horizon se profile le retour du nucléaire, sur lequel le Gouvernement et le Président de la République multiplient les signaux. L'avis des filières productrices d'énergies renouvelables quant à l'impact de cette loi était mesuré. Le vote du GEST le sera également : nous nous abstiendrons sur ce texte, insuffisant pour que la France respecte ses objectifs de réduction d'émission des gaz à effets de serre. (Applaudissements sur les travées du GEST ; Mme Nadège Havet applaudit également.)

À la demande du groupe Les Républicains, le texte élaboré par la CMP, modifié par les amendements du Gouvernement, est mis aux voix par scrutin public.

Mme le président. - Voici le résultat du scrutin n°125 :

Nombre de votants 343
Nombre de suffrages exprimés 313
Pour l'adoption 300
Contre   13

Le projet de loi est définitivement adopté.

(MM. Jean-Claude Anglars et Jean-Michel Houllegatte applaudissent.)

La séance est suspendue quelques instants.