Vous pouvez également consulter le compte rendu intégral de cette séance.


Table des matières



Questions orales

Transfert de la compétence eau et assainissement (I)

M. Stéphane Sautarel

M. Olivier Klein, ministre délégué chargé de la ville et du logement

Construction de logements sociaux en zone rurale

M. Guillaume Chevrollier

M. Olivier Klein, ministre délégué chargé de la ville et du logement

Compétence ZAE

Mme Dominique Estrosi Sassone

M. Olivier Klein, ministre délégué chargé de la ville et du logement

Fin des mesures restrictives avant l'épandage des boues

M. Pierre Louault

M. Olivier Klein, ministre délégué chargé de la ville et du logement

Éligibilité de Sedan à la dotation politique de la ville

M. Marc Laménie

M. Olivier Klein, ministre délégué chargé de la ville et du logement

Transfert des compétences eau et assainissement (II)

M. Jean-Michel Arnaud

M. Olivier Klein, ministre délégué chargé de la ville et du logement

Responsabilité élargie du producteur pour les articles de sport et de loisir

M. Daniel Salmon

M. Olivier Klein, ministre délégué chargé de la ville et du logement

Ferme aquacole de Vallauris en baie de Golfe-Juan

M. Philippe Tabarot

M. Olivier Klein, ministre délégué chargé de la ville et du logement

Projet de quartier Charenton-Bercy

M. Christian Cambon

M. Olivier Klein, ministre délégué chargé de la ville et du logement

Contrôle technique des deux roues

Mme Christine Bonfanti-Dossat

M. Olivier Klein, ministre délégué chargé de la ville et du logement

Financement des LGV dans l'Aude

M. Sebastien Pla

M. Olivier Klein, ministre délégué chargé de la ville et du logement

Financement du GPSO

M. Daniel Laurent

M. Olivier Klein, ministre délégué chargé de la ville et du logement

Ligne Paris-Nevers

Mme Nadia Sollogoub

M. Olivier Klein, ministre délégué chargé de la ville et du logement

Éclairage public et responsabilité des maires

Mme Annick Jacquemet

M. Olivier Klein, ministre délégué chargé de la ville et du logement

Rendez-vous médicaux non honorés

Mme Chantal Deseyne

Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée chargée de l'organisation territoriale et des professions de santé

Recrutement de généralistes étrangers dans les Alpes-Maritimes

Mme Patricia Demas

Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée chargée de l'organisation territoriale et des professions de santé

Création d'un CHU régional en Guyane

M. Georges Patient

Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée chargée de l'organisation territoriale et des professions de santé

Abattements de cotisations pour les ESMS publics

M. Alain Milon

Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée chargée de l'organisation territoriale et des professions de santé

Infections invasives à méningocoques

Mme Catherine Deroche

Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée chargée de l'organisation territoriale et des professions de santé

Accueil des jeunes autistes dans le Nord

M. Éric Bocquet

Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée chargée de l'organisation territoriale et des professions de santé

Débouchés pour la laine de brebis

M. Max Brisson

Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée chargée de l'organisation territoriale et des professions de santé

Crise de la filière arboricole

M. Jean-Yves Roux

Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée chargée de l'organisation territoriale et des professions de santé

Difficultés de la filière porcine biologique

Mme Annie Le Houerou

Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée chargée de l'organisation territoriale et des professions de santé

Épidémies de norovirus dans les cultures conchylicoles

M. Jean-François Longeot

Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée chargée de l'organisation territoriale et des professions de santé

Zone organisée d'accès aux soins transfrontaliers

Mme Véronique Guillotin

Mme Chrysoula Zacharopoulou, secrétaire d'État chargée du développement, de la francophonie et des partenariats internationaux

Crimes de guerre de l'armée azerbaïdjanaise

M. Pierre Ouzoulias

Mme Chrysoula Zacharopoulou, secrétaire d'État chargée du développement, de la francophonie et des partenariats internationaux

Modification des heures creuses d'électricité

M. Gilbert Roger

Mme Chrysoula Zacharopoulou, secrétaire d'État chargée du développement, de la francophonie et des partenariats internationaux

Reversement des recettes induites par les obligations de service public

M. Philippe Mouiller

Mme Chrysoula Zacharopoulou, secrétaire d'État chargée du développement, de la francophonie et des partenariats internationaux

Construction de la future cité judiciaire de Marseille

Mme Brigitte Devésa

Mme Chrysoula Zacharopoulou, secrétaire d'État chargée du développement, de la francophonie et des partenariats internationaux

Levée du secret-défense sur l'assassinat de militantes kurdes en 2013

Mme Marie-Arlette Carlotti

Mme Chrysoula Zacharopoulou, secrétaire d'État chargée du développement, de la francophonie et des partenariats internationaux

Fibre optique aux Sables-d'Olonne et à La Roche-sur-Yon

M. Didier Mandelli

M. Roland Lescure, ministre délégué chargé de l'industrie

Conséquence des prix de l'électricité pour le patrimoine religieux

M. François Calvet

M. Roland Lescure, ministre délégué chargé de l'industrie

Encadrement des dark kitchens et des dark stores

Mme Christine Lavarde

M. Roland Lescure, ministre délégué chargé de l'industrie

Substances dangereuses dans les fournitures scolaires

M. Serge Babary

M. Roland Lescure, ministre délégué chargé de l'industrie

Réduction d'assiette du FCTVA

Mme Elsa Schalck

M. Roland Lescure, ministre délégué chargé de l'industrie

Imposition des travailleurs français du secteur public belge

M. Éric Bocquet, en remplacement de Mme Michelle Gréaume, auteure de la question

M. Roland Lescure, ministre délégué chargé de l'industrie

Mixité sociale et égalité des chances à l'école

Mme Martine Filleul

Mme Sarah El Haïry, secrétaire d'État chargée de la jeunesse et du service national universel

Harcèlement scolaire

Mme Marie Mercier

Mme Sarah El Haïry, secrétaire d'État chargée de la jeunesse et du service national universel

Financement de la pédagogie au collège

Mme Angèle Préville

Mme Sarah El Haïry, secrétaire d'État chargée de la jeunesse et du service national universel

Iniquité de traitement des élèves en situation de handicap en milieu urbain ou rural

M. Daniel Gueret

Mme Sarah El Haïry, secrétaire d'État chargée de la jeunesse et du service national universel

Rentrée scolaire 2023 en Seine-Maritime

Mme Céline Brulin

Mme Sarah El Haïry, secrétaire d'État chargée de la jeunesse et du service national universel

Rentrée scolaire 2023 au lycée Darchicourt d'Hénin-Beaumont

Mme Sabine Van Heghe

Mme Sarah El Haïry, secrétaire d'État chargée de la jeunesse et du service national universel

Dotation de l'association « transitions pro » de Mayotte

M. Thani Mohamed Soilihi

Mme Sarah El Haïry, secrétaire d'État chargée de la jeunesse et du service national universel

Travailleurs saisonniers

M. Cyril Pellevat

Mme Sarah El Haïry, secrétaire d'État chargée de la jeunesse et du service national universel

Mises au point au sujet de votes

Encadrement des centres de santé

Discussion générale

Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée chargée de l'organisation territoriale et des professions de santé

M. Jean Sol, rapporteur de la commission des affaires sociales

M. Joël Guerriau

Mme Raymonde Poncet Monge

M. Xavier Iacovelli

Mme Annie Le Houerou

Mme Laurence Cohen

M. Olivier Henno

Mme Véronique Guillotin

Mme Corinne Imbert

M. Jean-Luc Fichet

Mme Pascale Gruny

M. Édouard Courtial

Discussion des articles

AVANT L'ARTICLE 1er

ARTICLE 1er

APRÈS L'ARTICLE 1er BIS A

ARTICLE 1er BIS

ARTICLE 2

APRÈS L'ARTICLE 2

ARTICLE 4

ARTICLE 8

Amélioration de l'accès aux soins (Procédure accélérée)

Discussion générale

Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée chargée de l'organisation territoriale et des professions de santé

Mme Corinne Imbert, rapporteure de la commission des affaires sociales

Mme Mélanie Vogel

M. Xavier Iacovelli

M. Bernard Jomier

Mme Laurence Cohen

Mme Élisabeth Doineau

Mme Véronique Guillotin

Mme Catherine Deroche

M. Daniel Chasseing

Mme Émilienne Poumirol

Mme Florence Lassarade

Mme Patricia Demas

Discussion des articles

AVANT L'ARTICLE 1er

ARTICLE 1er

Mme Anne Ventalon

Mme Raymonde Poncet Monge

Mme Cathy Apourceau-Poly

M. Philippe Mouiller

Mme Émilienne Poumirol

M. François Braun, ministre de la santé et de la prévention

ARTICLE 1er BIS

ARTICLE 2

ARTICLE 2 BIS

APRÈS L'ARTICLE 2 BIS

ARTICLE 3

Mme Laurence Cohen

ARTICLE 3 BIS

ARTICLE 4

ARTICLE 4 TER

APRÈS L'ARTICLE 4 TER

ARTICLE 4 QUATER (Supprimé)

ARTICLE 4 SEXIES

APRÈS L'ARTICLE 4 SEXIES

ARTICLE 4 DECIES

ARTICLE 4 UNDECIES

ARTICLE 4 DUODECIES (Supprimé)

APRÈS L'ARTICLE 4 TERDECIES

Interventions sur l'ensemble

M. Philippe Mouiller

M. Alain Milon

M. Daniel Chasseing

M. Olivier Henno

Mme Annick Billon

Mme Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales

Ordre du jour du mercredi 15 février 2023




SÉANCE

du mardi 14 février 2023

56e séance de la session ordinaire 2022-2023

Présidence de Mme Pascale Gruny, vice-président

Secrétaires : Mme Corinne Imbert, M. Dominique Théophile.

La séance est ouverte à 9 h 30.

Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu intégral publié sur le site internet du Sénat, est adopté sous les réserves d'usage.

Questions orales

Mme le président.  - L'ordre du jour appelle les réponses à des questions orales.

Transfert de la compétence eau et assainissement (I)

M. Stéphane Sautarel .  - La loi NOTRe prévoit le transfert obligatoire de la compétence eau et assainissement aux communautés de communes et d'agglomération le 1er janvier 2026. L'article 14 de la loi Engagement et proximité autorise les communautés de communes à déléguer par convention tout ou partie de leurs compétences à une commune ou à un syndicat infracommunautaire existant au 1er janvier 2019. La loi 3DS renverse ce principe : la compétence sera maintenue aux syndicats, sauf si les communautés de communes en décident autrement.

J'espère encore que nous pourrons garantir la liberté de nos communes dans le choix du mode de gestion. À tout le moins, évitons un mitage contraignant les EPCI à refuser toute délégation ou à les transformer en acteurs partiels ; aidons les acteurs qui le souhaitent à créer de nouveaux syndicats intercommunaux en vue d'exercer cette compétence. Selon quelles modalités pratiques et sous quel délai ?

M. Olivier Klein, ministre délégué chargé de la ville et du logement .  - La loi Engagement et proximité autorise les communautés de communes et les communautés d'agglomération à déléguer tout ou partie de la compétence eau et assainissement à un syndicat.

Au 1er janvier 2026, en application de la loi 3DS, ces syndicats infracommunautaires seront maintenus par voie de délégation, sauf en cas de délibération contraire de l'intercommunalité, qui demeure responsable de la compétence, exercée à son nom et pour son compte, sur l'ensemble de son territoire, que celle-ci soit ou non déléguée.

Rien n'interdit la création, après le 1er janvier 2019, d'un syndicat exerçant cette compétence, à condition que celle-ci soit compatible avec le schéma départemental de coopération intercommunale (SDCI) et que les limites du syndicat dépassent le seul périmètre de la communauté de communes - il ne peut s'agir d'un syndicat infracommunautaire.

Construction de logements sociaux en zone rurale

M. Guillaume Chevrollier .  - L'inflation et l'augmentation du coût des matières premières ralentissent, voire stoppent les projets de logements sociaux en zone rurale, pourtant essentiels. L'augmentation du taux du livret A, passé en un an de 0,5 % à 3 %, alourdit les charges des bailleurs sociaux à hauteur de 3,75 milliards d'euros. La réduction du loyer de solidarité (RLS) grève leur budget. Résultat : les bailleurs se désengagent. Dans mon département, la Mayenne, la commune d'Astillé souhaitait créer quatre logements sociaux. Or le coût du programme a bondi de 12 %, nécessitant une mobilisation de fonds propres trois fois plus importante qu'à l'accoutumée : le projet a été ajourné. Pourtant, les besoins sont là.

Les communes rurales n'ont pas les moyens de financer la construction de logements sociaux. Comment le Gouvernement compte-t-il les aider ?

M. Olivier Klein, ministre délégué chargé de la ville et du logement .  - Quelque 16 203 logements locatifs sociaux ont été créés en zone rurale en 2022. Les montants moyens de subvention par logement locatif en offre nouvelle ont été revalorisés de 5,4 % à l'échelle nationale en 2023.

Le Gouvernement promeut aussi les opérations d'acquisition-amélioration, en particulier dans les zones détendues, qui concentrent 74 % du parc privé durablement vacant. C'est un levier important pour créer une offre cohérente avec les objectifs de diminution de l'artificialisation des espaces naturels, agricoles et forestiers. Parvenir à l'équilibre financier est parfois complexe : une dotation de 23 millions d'euros a ainsi été créée en 2022. Elle sera portée à 45 millions d'euros en 2023 et élargie à toutes les opérations contribuant à la sobriété foncière de l'offre nouvelle de logements locatifs sociaux.

Le programme Action Coeur de ville vise, entre autres, à favoriser la réhabilitation des logements. La lutte contre la vacance des logements en milieu rural et l'amélioration du parc seront des éléments essentiels du second souffle de l'agenda rural en cours d'élaboration.

Compétence ZAE

Mme Dominique Estrosi Sassone .  - La loi 3DS assouplit les modalités de certains transferts de compétence ; malheureusement, pas celle concernant les zones d'activité économique (ZAE), qui doit obligatoirement être transférée aux EPCI à fiscalité propre.

Pourtant, l'action des communes serait parfois plus pertinente. Dans mon département, la commune de Touët-sur-Var souhaite créer une zone artisanale, pour laquelle le maire a déjà obtenu des subventions de l'État et du conseil régional. Les opérations d'aménagement comportant des cessions de terrains sont assujetties de plein droit à la TVA. Mais la commune ne peut la récupérer, puisque la compétence relève de l'EPCI.

Le Gouvernement compte-t-il revenir sur la législation en vigueur ? À tout le moins, les EPCI devraient pouvoir subdéléguer cette compétence aux communes qui le souhaitent.

M. Olivier Klein, ministre délégué chargé de la ville et du logement .  - La loi NOTRe prévoit que les EPCI à fiscalité propre exercent la compétence obligatoire relative aux ZAE.

La loi 3DS autorise un EPCI à fiscalité propre à déléguer à un conseil départemental ou à un conseil régional tout ou partie d'une compétence facultative qui lui a été transférée. Le Gouvernement n'envisage pas de revenir sur l'attribution de la compétence de développement économique au niveau intercommunal : cet acquis de la loi favorise le développement de projets ambitieux et rationalise la création des zones d'activité.

Toutefois, de nombreux outils existent pour mieux associer les maires aux décisions des EPCI, notamment le pacte de gouvernance, créé par la loi Engagement et proximité. En l'espèce, seul le dialogue entre la commune de Touët-sur-Var et son EPCI permettra de statuer sur le projet de création de ZAE.

Mme Dominique Estrosi Sassone.  - J'ai écouté vos arguments. Mais la communauté de commune est de taille modeste et n'a pas les moyens de mener à bien ce type de projet.

Fin des mesures restrictives avant l'épandage des boues

M. Pierre Louault .  - En avril 2020, en vue de limiter la transmission du covid-19, le Gouvernement imposait un traitement hygiénique supplémentaire avant l'épandage agricole des boues de stations d'épuration. Des collectivités ont alors massivement investi pour moderniser leurs stations, notamment grâce à l'aide d'une subvention exceptionnelle de l'État - qu'elles ne reçoivent plus aujourd'hui. Par ailleurs, elles subissent l'augmentation du prix de l'énergie et la hausse du point d'indice des fonctionnaires.

En octobre 2022, le Haut Conseil de la santé publique (HCSP) estimait inutile de maintenir les mesures restrictives d'épandage en vigueur. La signature des décrets abrogeant ces traitements serait imminente : monsieur le ministre, le confirmez-vous ? Cette application disproportionnée du principe de précaution aura coûté plusieurs millions d'euros aux collectivités locales.

M. Olivier Klein, ministre délégué chargé de la ville et du logement .  - Lors de l'épidémie de covid-19, les conditions d'épandage agricole des boues d'épuration urbaines et industrielles ont été modifiées en vue d'assurer un traitement hygiénique des boues avant leur épandage.

L'État a rapidement créé un dispositif de soutien financier exceptionnel par l'intermédiaire des agences de l'eau. En 2021 et en 2022, les investissements nécessaires ont ainsi été pris en charge par le plan de relance - ainsi, la capacité des agences à aider les collectivités n'a pas été amoindrie.

En juillet 2022, le Gouvernement a saisi le HCSP afin de savoir si ces mesures étaient toujours utiles. Dans son avis du 21 octobre 2022, celui-ci s'est montré favorable à la levée des restrictions en la matière. Le Gouvernement a alors préparé un arrêté abrogeant l'arrêté du 30 avril 2020, modifié le 20 avril 2021. Sa publication est imminente.

M. Pierre Louault.  - Je souhaite que le décret d'abrogation soit publié rapidement. Les hauts fonctionnaires sont prompts à imposer des contraintes, mais beaucoup plus lents à les lever. (M. Jean-Michel Arnaud applaudit.)

Éligibilité de Sedan à la dotation politique de la ville

M. Marc Laménie .  - Depuis 2021, la ville de Sedan n'est plus éligible à la dotation politique de la ville (DPV), faute de convention avec l'Agence nationale pour la rénovation urbaine (Anru).

Toutefois, le centre ancien de la ville est reconnu comme quartier prioritaire de la ville (QPV). Sedan bénéficie également d'une convention avec l'Anru au titre du nouveau programme national de renouvellement urbain (NPNRU) 2021-2024, mais aussi au titre du programme national de requalification des quartiers anciens dégradés (PNRQAD).

L'intégration du quartier Le Lac-Centre Ancien permettrait à la ville de Sedan de figurer parmi les communes éligibles à la DPV. Monsieur le ministre, pouvez-vous reconsidérer l'éligibilité de Sedan à ce dispositif ?

M. Olivier Klein, ministre délégué chargé de la ville et du logement .  - La commune de Sedan n'est effectivement plus éligible à la DPV depuis 2021, car elle ne remplit plus l'un des trois critères d'éligibilité prévu par la loi. Sa convention avec l'Anru a expiré en 2019.

La convention portant sur le centre ancien de Sedan relève du PNRQAD, dont l'objectif est de lutter contre l'habitat indigne uniquement dans les quartiers dégradés des centres-villes. C'est pourquoi la DPV ne peut plus être attribuée à Sedan.

Pour ses investissements, la ville peut toutefois recourir à d'autres financements, tels que la dotation de soutien à l'investissement local (DSIL), la dotation d'équipement des territoires ruraux (DETR) ou encore le nouveau fonds vert. Sa dotation globale de fonctionnement (DGF) a ainsi progressé de 158 415 euros entre 2017 et 2022, à 577 euros par habitant, contre 164 euros en moyenne pour l'ensemble des communes. Ces hausses devraient se poursuivre en 2023, car l'État abondera la dotation de solidarité rurale (DSR) de 200 millions d'euros et la dotation de solidarité urbaine et de cohésion sociale (DSU) de 90 millions d'euros.

M. Marc Laménie.  - Merci. Nous souhaitons que les choses aillent dans le bon sens pour la ville de Sedan.

Transfert des compétences eau et assainissement (II)

M. Jean-Michel Arnaud .  - La loi NOTRe a rendu obligatoire le transfert des compétences eau et assainissement des communes aux communautés de communes et aux communautés d'agglomération au 1er janvier 2020. Puis un report à 2026 a été rendu possible. Monsieur le ministre, allez-vous entendre les demandes des communes rurales et de montagne, et respecter leur liberté de choix et d'exercice de leurs compétences ?

M. Olivier Klein, ministre délégué chargé de la ville et du logement .  - Un report a bien été rendu possible jusqu'en 2026, mais ce transfert se fera, c'est une volonté forte du Gouvernement. L'émiettement des services est un facteur d'inefficacité, comme le dit la Cour des comptes. Plus les services couvrent une population importante, meilleure est la connaissance du réseau, plus durable et plus performant est le service rendu. Les interconnexions sont nécessaires pour sécuriser les approvisionnements ; elles se feront à l'échelle des bassins de vie ou du département.

Des solutions ont été élaborées avec les collectivités, et le Sénat y a activement contribué. Les communes peuvent pratiquer des prix individualisés et conserver des syndicats de gestion.

Le Gouvernement ne soutiendra aucun retour en arrière. Le Comité national de l'eau (CNE) a rappelé que la stabilité de la législation est nécessaire pour éviter tout attentisme des collectivités récalcitrantes.

M. Jean-Michel Arnaud.  - Toujours les mêmes arguments sur l'inefficacité des communes rurales ! Parler de collectivités récalcitrantes, quelle violence ! C'est déplacé, surtout de la part de ceux qui prônent le dialogue entre le préfet et le maire. Attendez-vous à de futures propositions de loi sénatoriales sur le sujet. Écoutez la présidente de la délégation aux collectivités territoriales et les deux tiers des EPCI qui n'ont pas réalisé le transfert. Bougez les lignes, sinon ce seront les présidents des EPCI et les maires qui vous feront bouger.

Responsabilité élargie du producteur pour les articles de sport et de loisir

M. Daniel Salmon .  - La loi de 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire, dite loi Agec, a étendu le principe de responsabilité élargie du producteur (REP) aux articles de sport et loisir. Or le barème des contributions, calculé principalement sur le critère du poids des produits, ne prend pas en compte les coûts réels des entreprises.

En 2024, un jeu de palets bretons de 80 euros sera est taxé à 2,22 euros, contre 5,34 euros pour une table de billard de 1 000 euros. Une entreprise bretonne se voit ainsi taxée à 55 000 euros au titre de la REP pour un résultat de 150 000 euros, alors que ses produits sont faits de matériaux durables. Il est urgent de revoir les barèmes.

M. Olivier Klein, ministre délégué chargé de la ville et du logement .  - Chaque année, 200 000 tonnes d'articles neufs de sport et de loisir sont mises sur le marché. L'État a chargé un éco-organisme d'organiser la collecte des produits usagés, de financer les associations qui réparent ces produits et de développer le recyclage des matériaux. La REP instaure une contribution des entreprises pour financer cet éco-organisme.

La loi Agec a aussi prévu des bonus-malus d'écoconception, pour valoriser les critères de durabilité et de recyclabilité des produits. L'éco-organisme gestionnaire proposera des bonus-malus dès 2024, et je serai attentif à ce que ces critères soient bien valorisés, pour favoriser les produits durables et recyclables.

Ferme aquacole de Vallauris en baie de Golfe-Juan

M. Philippe Tabarot .  - Le projet de ferme aquacole sur la commune de Vallauris est démesuré. En rassemblant trois concessions, la surface prévue de 24 000 m2 ferait passer la production de 570 à 1 200 tonnes. Voilà qui questionne sur la préservation des habitats et des espèces. Pêcheurs, professionnels de la mer, riverains, tous sont opposés à ce projet pharaonique. Les conséquences des rejets seront désastreuses, alors que la baie de Golfe-Juan est en zone Natura 2000.

L'enquête publique est en cours. L'État se prononcera-t-il contre cette autorisation ? Le maire de Vallauris se sent spectateur, malgré lui, d'un projet d'implantation rejeté par la population. Il n'a même pas été associé !

M. Olivier Klein, ministre délégué chargé de la ville et du logement .  - L'enquête publique s'est achevée le 6 février et celle portant sur l'étude d'impact et l'autorisation environnementale s'achèvera le 22 février. Si la création du site est autorisée, les autorisations devront être assorties de prescriptions environnementales.

L'instruction par les services de l'État assure un développement en conformité avec les objectifs de conservation du site Natura 2000, avec le schéma régional de développement de l'aquaculture marine (SRDAM) et avec le document stratégique de façade Méditerranée. Le volume de 1 200 tonnes évoqué est la production totale espérée par l'entreprise sur l'ensemble de son parc aquacole du littoral des Alpes-Maritimes, et la pertinence du site a été confirmée par le document stratégique de façade. En compensation est prévue la fermeture de trois sites, représentant une surface de 6 000 m2 et une production de 400 tonnes.

L'État joue pleinement son rôle pour faire respecter les exigences environnementales. Des échanges ont lieu régulièrement entre le préfet, les collectivités et les acteurs concernés.

M. Philippe Tabarot.  - Votre réponse est inquiétante. Vous cautionnez un projet qui va détruire des années d'efforts pour préserver la faune et la flore marine méditerranéenne.

Projet de quartier Charenton-Bercy

M. Christian Cambon .  - Dix hectares de friches industrielles séparent Paris et sa banlieue est au niveau de Charenton. En 2016, un contrat d'intérêt national (CIN) a été signé entre la ville de Charenton-le-Pont, l'État, l'établissement public territorial Paris Est Marne&Bois (PEMB), Grand Paris Aménagement (GPA) et SNCF Réseau, afin de créer un nouveau quartier qui gommera cette fracture urbaine.

Bouygues, lauréate du concours « Inventons la métropole du Grand Paris », porte le programme immobilier. Déjà 1,6 million d'euros ont été dépensés en études ; 1 600 logements seront créés, dont 30 % de logements sociaux. En sus des équipements publics, bureaux, hôtels et commerces, 15 000 emplois sont attendus. Ce projet est essentiel pour redynamiser ce territoire en déclin.

Une grande partie du projet est assise sur des fonciers en sursol des voies de chemin de fer ; le dépôt du permis de construire nécessite donc l'accord formel de la SNCF. Or voilà que, malgré l'accord conclu avec le préfet de région en 2022, cette dernière fait volte-face : elle veut décaler le dépôt du permis de construire de deux à trois ans, pour mener des études complémentaires. Ramenez la SNCF à la raison !

M. Olivier Klein, ministre délégué chargé de la ville et du logement .  - Cette opération de grande ampleur est essentielle pour le désenclavement et la requalification de la zone. L'État soutient pleinement le projet depuis plusieurs années, grâce aux initiatives de GPA. Le projet a été qualifié de « grande opération d'urbanisme » en 2021. Cependant, la SNCF s'inquiète à juste titre des conséquences du projet sur l'exploitation du réseau Paris sud-est. Par ailleurs, des voies de fret sont prévues pour le futur hôtel logistique parisien, ce qui crée de fortes contraintes.

Les ministères concernés et le préfet de la région Île-de-France suivent la situation avec attention. Un travail technique est en cours pour trouver un compromis, et les discussions se poursuivent avec M. Christophe Béchu.

M. Christian Cambon.  - Je vous remercie de votre action pour débloquer la situation.

Contrôle technique des deux roues

Mme Christine Bonfanti-Dossat .  - Une directive européenne de 2014 instaure un contrôle technique obligatoire pour les véhicules motorisés cylindrés supérieurs à 125 cm3, afin de réduire le nombre de morts sur les routes.

Le Gouvernement avait décidé, à raison, de reporter cette obligation de 2022 à 2023. Or le 31 octobre 2022, le Conseil d'État a annulé pour excès de pouvoir le décret du 25 juillet 2022, tout en précisant que la transposition de la directive peut faire l'objet de mesures d'application différenciées. Le Gouvernement a donc encore une marge de manoeuvre.

En France, le pourcentage d'accidents des deux-roues liés à des défaillances techniques n'est que de 0,3 %. Le contrôle technique obligatoire n'est pas une solution pertinente. Que comptez-vous faire ?

M. Olivier Klein, ministre délégué chargé de la ville et du logement .  - Ce contrôle est en effet obligatoire, sauf si les États membres peuvent démontrer qu'ils ont mis en place des mesures alternatives de sécurité routière, appuyées par des statistiques pertinentes sur cinq ans.

Le Gouvernement avait privilégié les mesures alternatives, mais à la suite de plusieurs procédures contentieuses initiées par des associations environnementales, le Conseil d'État a jugé qu'elles étaient manifestement insuffisantes.

Le Gouvernement a pris acte de cette décision. Toutefois, elle n'implique pas une entrée en vigueur immédiate du contrôle technique : il faut publier préalablement les textes d'application du décret du 9 août 2021 qui instaure le contrôle. Pour déterminer des modalités de mise en oeuvre acceptables par tous, une consultation a été lancée en novembre par le ministre chargé des transports avec les associations de motards, des associations environnementales et les représentants des professionnels du contrôle technique. La représentation nationale sera informée des résultats des échanges.

Mme Christine Bonfanti-Dossat.  - D'autres solutions existent, les motards sont prêts à travailler avec vous.

Financement des LGV dans l'Aude

M. Sebastien Pla .  - Un arrêté du 31 décembre dernier instaure une taxe spéciale d'équipement destinée au financement du Grand Projet ferroviaire du Sud-Ouest (GPSO). Les communes assujetties subissent une double peine, car les élus du département se sont déjà engagés à financer la ligne nouvelle Montpellier-Perpignan (LNMP). Ce chaînon manquant est prioritaire et d'intérêt européen.

Monsieur le ministre, venez donc à Perpignan avec moi : vous verrez qu'on est plus vite arrivé à Madrid qu'à Paris ! Le Gouvernement nous impose de participer au financement du GPSO, mais quand la liaison Toulouse-Narbonne verra-t-elle le jour ? Vous avez ignoré les alertes des élus locaux, or la facture risque d'être salée pour les communes situées à moins de 60 minutes d'une gare de future ligne à grande vitesse (LGV). Les communes de l'Ouest Audois vont devoir financer les deux LGV ! C'est injuste pour ces collectivités dont les moyens sont limités. Quels ajustements comptez-vous prendre pour éviter cette double imposition ?

M. Olivier Klein, ministre délégué chargé de la ville et du logement .  - Afin d'alléger la contribution budgétaire des collectivités territoriales au GPSO, une taxe spéciale d'équipement a été instaurée par la loi de finances pour 2022. Elle concerne certaines communes de l'Ouest Audois. Par amendement du Sénat à la loi de finances pour 2023, une taxe additionnelle à la taxe de séjour a été affectée au GPSO et à la LNMP à partir de 2024. Chaque projet a son propre périmètre : ainsi les recettes perçues dans l'Aude bénéficient à la seule société de la LNMP ; mais certains contribuables de l'Ouest Audois, à moins de 60 minutes de Toulouse, seront assujettis à la taxe spéciale d'équipement au bénéfice du GPSO. Quant aux visiteurs, ils s'acquitteront de la taxe additionnelle à la taxe de séjour au titre de la LNMP. Les contribuables de l'Ouest Audois ne sont pas davantage imposés que ceux de l'est de la Haute-Garonne.

M. Sebastien Pla.  - On ne parle pas de la même chose : la taxe de séjour est payée par les touristes et la taxe spéciale d'équipement par les contribuables du territoire. Dans l'Ouest Audois, il y a double imposition.

Financement du GPSO

M. Daniel Laurent .  - Soixante-sept communes de mon département seront concernées par la taxe spéciale d'équipement du Grand Projet du Sud-Ouest (GPSO), car elles se trouvent à moins de 60 minutes d'une gare desservie par la ligne à grande vitesse (LGV). Mais il faut voir les conditions de circulation dans la métropole bordelaise, les nuisances des LGV pour les riverains et l'absence de travaux de maintenance sur la ligne Nantes-Bordeaux ! Ce prélèvement supplémentaire pèsera sur les propriétaires et les entreprises : c'est inadmissible et inéquitable. Pourquoi leur imposer une telle taxe - estimée pour l'instant entre 4 à 8 euros - pendant 40 ans ?

M. Olivier Klein, ministre délégué chargé de la ville et du logement .  - À la demande des régions Nouvelle-Aquitaine et Occitanie, le Gouvernement a créé la société du GPSO pour faciliter le financement du projet via notamment des ressources fiscales dédiées. Afin d'alléger la contribution budgétaire des collectivités territoriales, une taxe spéciale d'équipement a été instaurée dans la loi de finances pour 2022, à hauteur de 24 millions d'euros dans les communes situées à moins de 60 minutes en voiture d'une gare desservie. Ce dispositif a été complété par un amendement sénatorial à la loi de finances pour 2023. L'arrêté du 31 décembre fixe la liste des communes concernées. Les contribuables de certaines communes de Charente-Maritime seront donc assujettis. Soulignons toutefois que l'effort financier demandé est limité - moins de 3,5 euros pour un bien d'une valeur locative de 1 000 euros.

M. Daniel Laurent.  - C'est injuste : nous devons tous bénéficier des mêmes équipements sur un même territoire. C'est aux collectivités territoriales d'en assumer le financement.

Ligne Paris-Nevers

Mme Nadia Sollogoub .  - Le train d'équilibre du territoire Nevers-Paris ne peut éviter le goulot d'étranglement de Moret-sur-Loing, en Seine-et-Marne. Les trains de banlieue ne peuvent y être dépassés qu'en gare et le passage d'un train en sens contraire nécessite une procédure manuelle peu performante. L'aménagement des voies à Moret-sur-Loing est indispensable.

En outre, compte tenu de la saturation de la gare de Lyon, les trains qui desservent la Nièvre partent et arrivent désormais de la gare de Paris-Bercy. Il faudrait toutefois y réaliser un saut-de-mouton.

De tels investissements, nécessaires pour limiter les retards en cascade, sont-ils prévus ?

M. Olivier Klein, ministre délégué chargé de la ville et du logement .  - La modernisation de la ligne Paris-Clermont est une priorité pour l'État. Un groupe de travail a été lancé le 15 septembre dernier pour améliorer la qualité de service.

Le schéma directeur de la ligne prévoit d'importants investissements, avec un programme de régénération doté de 760 millions d'euros jusqu'en 2025 et la préparation d'un programme de modernisation de 130 millions d'euros, cofinancé par l'État et la région Auvergne-Rhône-Alpes. Enfin, 250 millions d'euros de nouveaux matériels roulants sont également prévus.

L'actualisation de la programmation pluriannuelle des investissements dans le domaine des transports sera prochainement effective et permettra de relancer la discussion avec les cofinanceurs du projet, et en particulier la région Île-de-France.

Mme Nadia Sollogoub.  - Ma question ne concerne pas les matériels roulants, mais la saturation de la ligne. Pensez à ceux qui font l'aller-retour Nevers-Paris tous les jours, avec des dysfonctionnements quotidiens ! Ce ne sont plus des trains d'équilibre du territoire, mais des trains qui déséquilibrent nos territoires.

Éclairage public et responsabilité des maires

Mme Annick Jacquemet .  - Dans mon récent rapport pour l'Opecst, j'invite les maires à faire un effort de sobriété en matière d'éclairage public, pour des raisons de transition écologique, de santé publique et de préservation de la biodiversité. L'éclairage public représente 41 % de la consommation électrique de nos communes : sa modulation dégage des économies budgétaires. Quelque 12 000 communes ont déjà réduit voire supprimé l'éclairage la nuit, mais ces maires prennent des risques, car faute de cadre légal clair, leur responsabilité pourrait être engagée. Comment le Gouvernement envisage-t-il d'agir ?

M. Olivier Klein, ministre délégué chargé de la ville et du logement .  - Amateur d'astronomie, je sais tout l'intérêt de lutter contre la pollution lumineuse.

Le juge administratif examine au cas par cas si l'absence ou l'insuffisance d'éclairage public est susceptible d'engager la responsabilité administrative de la collectivité. La carence du maire dans l'exercice de ses pouvoirs de police peut aussi conduire à engager sa responsabilité pénale. En cas de dommage directement causé par l'absence d'éclairage public, sa responsabilité pénale ne sera recherchée que s'il n'a pas accompli les diligences dites « normales ». En cas de dommage indirect, sa responsabilité ne sera engagée qu'en cas de faute caractérisée ou de violation manifestement délibérée d'une obligation de prudence ou de sécurité.

Cet état du droit semble équilibré : le Gouvernement n'estime pas nécessaire de faire évoluer le cadre législatif.

Rendez-vous médicaux non honorés

Mme Chantal Deseyne .  - Chaque année, près de 27 millions de rendez-vous médicaux ne sont pas honorés. Dans un contexte de difficulté d'accès aux soins, c'est insupportable pour les médecins comme pour les patients en attente d'un rendez-vous.

Le code de la santé publique n'autorise la perception d'honoraires que sur les actes réellement effectués. Mais le service de réservation ne pourrait-il faire l'objet d'une facturation ? Une régulation financière ne pourrait-elle être mise en place avec l'aide des plateformes de réservation afin de dédommager les professionnels de santé ? Que compte faire le Gouvernement ?

Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée chargée de l'organisation territoriale et des professions de santé .  - J'ai pu constater ces difficultés sur le terrain. Je partage votre préoccupation, car le temps médical est précieux. Le Président de la République a annoncé un travail de l'Assurance maladie sur la responsabilisation des patients. Le ministère de la santé sensibilise la population à cet enjeu de responsabilité collective.

Avant d'envisager une pénalisation financière, nous avons besoin de données précises - il pourrait s'agir de 28 millions de rendez-vous non honorés... Une fois le constat établi, nous travaillerons à réduire ce phénomène, en lien avec toutes les parties prenantes.

Mme Chantal Deseyne.  - Merci de vous pencher sur ce problème crucial dans un climat de pénurie de médecins. Je compte sur le Gouvernement pour responsabiliser les patients.

Recrutement de généralistes étrangers dans les Alpes-Maritimes

Mme Patricia Demas .  - Pour lutter contre la désertification médicale, le maire de Puget-Théniers, dans les Alpes-Maritimes, a identifié une médecin marocaine disposée à s'installer. Diplômée en Espagne, elle a fait un stage en France et maîtrise parfaitement notre langue.

Or le parcours administratif pour valider sa venue se révèle très long. La vérification des compétences est indispensable, mais la procédure n'est pas assez connue et les délais de vérification des documents sont anormalement longs, tout particulièrement pour la certification par le centre national de gestion (CNG) ; on ne comprend pas ce qui les justifie.

Alors que les mesures du Gouvernement contre les déserts médicaux tardent à produire leurs effets, ces lenteurs pénalisent les médecins jusqu'à les dissuader. Le Gouvernement en a-t-il conscience ? Envisage-t-il une communication sur les procédures à respecter et une réduction des délais de traitement par le CNG ?

Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée chargée de l'organisation territoriale et des professions de santé .  - Pour exercer en France, les praticiens à diplôme hors Union européenne (Padhue) doivent réussir l'épreuve de vérification des connaissances (EVC) organisée annuellement par le CNG. Ils doivent ensuite passer deux années en établissement avant d'obtenir l'autorisation de plein exercice, salarié ou libéral. Les agences régionales de santé (ARS) sont à la disposition des élus pour leur préciser les documents à réunir.

Le projet de loi relatif à l'immigration qui sera prochainement présenté prévoit une carte de séjour pluriannuelle pour les professions médicales et de la pharmacie, connue sous le nom de « passeport talents ». Elle permettra aux Padhue qui s'engagent à passer l'EVC d'exercer en France sans attendre, pour une durée limitée.

Création d'un CHU régional en Guyane

M. Georges Patient .  - J'ai déjà adressé un courrier, resté sans réponse, au ministre de la santé précédent sur le projet de centre hospitalier régional et universitaire (CHRU) de Guyane. L'objectif initial d'ouverture fixé au 1er janvier 2025 semble en effet compromis. Les Guyanais attendent depuis trop longtemps. La santé est une priorité actée dans les accords de Guyane de 2017 ; depuis mars 2021 et la décision de création du CHRU, les choses n'avancent guère. Des dissensions et blocages freinent le projet, voire interpellent sur la volonté des acteurs.

La fusion prévue entre les trois centres hospitaliers existants reste inopérante faute de consensus. Les formations du personnel sont-elles mises en place ? Le financement des chantiers immobiliers et du matériel suscite également des inquiétudes : les besoins ont été évalués à 800 millions d'euros, or rien n'a été décidé. Il est pourtant nécessaire d'accorder ces financements, notamment au vu du dynamisme démographique et de l'effort massif de rattrapage à réaliser. Quand se matérialiseront-ils ?

Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée chargée de l'organisation territoriale et des professions de santé .  - Ce projet ambitieux reposera sur quatre piliers : les trois hôpitaux du territoire et les dix-sept centres délocalisés de prévention et de soins (CDPS).

La première étape est la création de trois hôpitaux de proximité, à Maripasoula, Grand-Santi et Saint-Georges-de-l'Oyapock. Les trois projets d'établissement ont été présentés en 2022. Les autorisations ont été délivrées et les hôpitaux ouvriront cette année, pour de courts séjours, avec une offre de radiologie et de biologie de proximité.

La deuxième étape est l'universitarisation et l'intégration du projet médical entre les établissements. Le chantier administratif n'interviendra qu'une fois ce projet finalisé. Il en va de même pour les investissements complémentaires à réaliser. Les premières orientations médicales et de recherche semblent partagées. Je suis confiante dans la possibilité d'aboutir à un projet de territoire, pour une universitarisation en 2025.

Abattements de cotisations pour les ESMS publics

M. Alain Milon .  - En 2019, un abattement de cotisations sociales a été attribué aux établissements publics de santé et établissements et services médico-sociaux (ESMS) du secteur privé, qui représente une réduction de 8 % du coût salarial. Les ESMS du secteur public n'en ont, eux, pas bénéficié. Au vu des errements de certains groupes privés bénéficiaires de ces abattements, il semble impensable de taxer plus lourdement les établissements publics. Que va mettre en oeuvre le Gouvernement et dans quel délai ?

Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée chargée de l'organisation territoriale et des professions de santé .  - La réduction de six points du taux de cotisation d'assurance maladie s'est substituée au crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE), dont les établissements publics ne bénéficiaient pas puisqu'ils ne sont pas redevables de l'impôt sur les sociétés. Cette mesure n'a donc eu aucun effet sur l'équilibre entre les secteurs public et privé. Élargir l'abattement aux ESMS publics reviendrait à faire financer une augmentation de leur financement par l'Assurance maladie. Le canal des exonérations n'est pas le plus approprié.

Par ailleurs, le Ségur a prévu d'engager 2,1 milliards d'euros entre 2021 et 2025 pour l'investissement dans le secteur social et médico-social ; le personnel des établissements publics de santé et des Ehpad recevra une revalorisation de 183 euros nets a minima, majorée pour les soignants. La mesure a été étendue aux autres ESMS lors de la conférence des métiers du 18 février 2022.

Enfin, une prime Grand Âge spécifique pour le secteur public a été créée en 2020, pour un montant de 161 millions d'euros.

M. Alain Milon.  - Souvent avancé comme excuse par le Gouvernement, le Ségur ne fait que rattraper un retard accumulé. La tarification du public progresse beaucoup moins vite que celle du privé. Il en résulte une fragilisation majeure de l'offre médico-sociale publique. Il est grand temps d'agir pour la renaissance du secteur public...

Infections invasives à méningocoques

Mme Catherine Deroche .  - Le 24 janvier, Santé publique France rapportait une recrudescence inquiétante des infections invasives à méningocoques liée à la levée des gestes barrières, avec une accélération fin 2022, en particulier chez les plus jeunes. Derrière les chiffres, il y a des vies humaines, comme celle de cet enfant de trois ans décédé à Angers, en octobre dernier, d'une méningite de sérogroupe Y. Cela doit conduire les ARS à revoir la recommandation en matière de vaccin, qui date de mars 2021, alors que l'épidémiologie des maladies infectieuses était ralentie par les mesures barrière.

La solution est simple : la substitution du vaccin C existant par un vaccin ACWY, qui maintiendrait un nombre de rendez-vous et d'injections constant, sans surcharge de travail pour le personnel.

Les trois vaccins ACWY ne sont ni recommandés ni remboursés. Il faut donc une prise en charge par la solidarité nationale. Où en sommes-nous ?

Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée chargée de l'organisation territoriale et des professions de santé .  - La situation épidémiologique fait l'objet d'une surveillance en temps réel. La vaccination des nourrissons contre les infections à méningocoques de sérogroupe B est prise en charge par l'Assurance maladie depuis avril 2022.

En mars 2021, la Haute autorité de santé (HAS) n'avait, en effet, pas recommandé la vaccination des nourrissons par le vaccin tétravalent ACWY, au vu de l'importante variabilité épidémiologique de la maladie.

Or après deux années de faible incidence, les infections sont en hausse, en majorité dans le sérogroupe B, qui représente 53 % du total. La HAS est donc en train de réviser la stratégie 2021. Les recommandations actualisées seront mises en oeuvre dès leur publication.

Mme Catherine Deroche.  - J'ai participé, jeudi, à un colloque de l'association Audrey, devenue Méningites France. Nos voisins ont des vaccins quadrivalents : la France est isolée en la matière. Au vu des mouvements d'étudiants liés à Erasmus, il y a des risques importants. (Mmes Florence Lassarade et Brigitte Devésa applaudissent.)

Accueil des jeunes autistes dans le Nord

M. Éric Bocquet .  - La presse régionale des Hauts-de-France s'est récemment fait l'écho des difficultés des familles dont un enfant est atteint de troubles du spectre de l'autisme.

Dans le cadre de la stratégie nationale pour l'autisme 2018-2022, 999 enfants ont été intégrés aux plateformes de coordination et d'orientation, et 1 184 ont bénéficié d'une prise en charge dans la région. C'est un progrès en matière de repérage et de diagnostic, mais en devenant adultes, ces enfants n'ont plus de structures pour les accueillir.

L'amendement Creton, entré en vigueur en 1999, permet le maintien des jeunes autistes en institut médico-éducatif (IME) entre 18 et 20 ans, en l'absence de structures alternatives pour les accueillir. Mais ces établissements ne sont pas adaptés à leurs besoins, et ils se retrouvent sans solution à 20 ans. Souvent, l'un des parents doit cesser de travailler pour s'occuper de son enfant. Dans le Nord, les délais d'attente atteignent plusieurs années. Depuis que l'ARS ne finance plus les placements en Belgique, les familles nordistes sont démunies. Des associations spécialisées sont prêtes à accueillir quarante jeunes adultes, pour peu qu'un appel à projets soit lancé par l'ARS.

Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée chargée de l'organisation territoriale et des professions de santé .  - L'autisme est l'une de nos préoccupations majeures : en témoignent les 490 millions d'euros engagés dans le cadre de la stratégie nationale pour l'autisme. Dans les Hauts-de-France, nous avons mis en place huit plateformes de coordination, vingt unités d'enseignement en maternelle. Trois unités de vie pour adultes autistes en situation complexe ouvriront bientôt leurs portes.

Au 1er janvier 2022, 1 508 adultes et 693 enfants du Nord voient leur accompagnement en Belgique financé par l'État français. En matière d'autisme, la France était en retard, et nous avons entrepris un rattrapage.

Toutes les personnes concernées ne trouvent pas de solution, mais le cap est clair. L'ouverture de la future Maison de l'autisme, voulue par le Président de la République, sera une ressource supplémentaire pour les familles désemparées et pour les associations ; elle fera également mieux connaître l'autisme auprès du public.

Débouchés pour la laine de brebis

M. Max Brisson .  - La production de laine de brebis des trois races laitières présentes dans les Pyrénées-Atlantiques s'élève à 1 000 tonnes par an, dont une grande partie n'est pas valorisée. Pourtant, quoiqu'inadaptée à certaines valorisations, notamment textiles, cette laine présente de nombreux atouts.

Sur l'initiative de la chambre d'agriculture des Pyrénées-Atlantiques et de la chambre de commerce et d'industrie Pau-Béarn, deux prototypes concluants ont été développés : le compostage, qui permet aux éleveurs de valoriser la laine directement dans leur exploitation, et la production de granulés fertilisants, un engrais durable, par les coopératives et entreprises locales.

Deux débouchés intéressants pour les acteurs du secteur, mais dont la mise en oeuvre bute sur la réglementation européenne, alors que le processus de compostage lève les risques microbiologiques et que les granulés fertilisants sont commercialisés dans d'autres pays européens, au mépris de la législation européenne. Il en résulte une distorsion de concurrence inacceptable.

Le Gouvernement est-il prêt à soutenir ces prototypes innovants en engageant une négociation pour faire évoluer la législation européenne ?

Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée chargée de l'organisation territoriale et des professions de santé .  - Le ministère de l'agriculture accompagne la filière ovine dans la structuration d'une filière laine à travers le plan d'action national Bioéconomie, le plan de relance, via le projet Tricolor, et la mise en place par FranceAgriMer d'un Observatoire du marché des cuirs, laines, peaux et plumes, ainsi que d'un groupe de travail chargé d'identifier des pistes de valorisation.

La laine a le statut de sous-produit animal de catégorie 3, ce qui ouvre de multiples possibilités de valorisation. Néanmoins, la réglementation européenne limite son usage direct dans le sol en tant que fertilisant, compte tenu des risques sanitaires de diffusion de maladies animales. L'expérimentation Lanaland mérite d'être analysée avec attention.

Le compostage de la laine sur l'exploitation est autorisé mais nécessite un agrément sanitaire. Afin de faciliter les démarches des exploitants, la direction générale de l'alimentation a travaillé avec la filière sur un dossier de demande d'agrément-type et un assouplissement des analyses d'autocontrôle.

En complément, le Conseil général de l'alimentation, de l'agriculture et des espaces ruraux (CGAAER) élabore une feuille de route pour améliorer la valorisation et les débouchés de ces produits ; son rapport est attendu pour avril prochain.

M. Max Brisson.  - Les professionnels et les deux chambres consulaires, qui ont beaucoup investi dans ces deux prototypes, espèrent un agrément, car les éleveurs ont besoin de ces débouchés.

Crise de la filière arboricole

M. Jean-Yves Roux .  - Les pommes des Alpes-de-Haute-Provence, grâce à un climat qui favorise une bonne teneur en sucre et une acidité remarquable, sont une fierté pour notre département.

Depuis 2018, les 250 exploitations arboricoles, qui produisent surtout les variétés Golden et Gala, se sont diversifiées pour s'adapter aux embargos russe, chinois et algérien, ainsi qu'aux épisodes de grêle. Mais la flambée des coûts de production - électricité, eau, emballages - a conduit à une hausse de 8 % du prix de vente des fruits, alors que les pommes extra-hexagonales, qui ne respectent pas nos normes sanitaires, sont vendues 7 % moins cher.

Pris en étau, nos arboriculteurs en sont réduits à arracher leurs pommiers pour ne pas vendre à perte. Les plus petites exploitations n'arrivent plus à dégager un revenu décent. Une partie de notre patrimoine alimentaire est menacée, alors que nous importons des pommes à prix cassé et aux normes sanitaires dégradées.

Comment le Gouvernement entend-il nous aider à préserver la production de grande qualité des arboriculteurs de Haute-Provence ?

Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée chargée de l'organisation territoriale et des professions de santé .  - Le ministre de l'agriculture a rencontré les professionnels de la filière à Angers, lors du Salon international des techniques de production végétale.

Premier sujet : le prix du kilo de pommes. La loi EGalim 2 ne couvre pas les fruits et légumes, à la demande des producteurs. Il faut sans doute y remédier, car des contrats conclus dans le cadre de cette loi protégeront la rémunération des agriculteurs. Le bon prix, c'est celui qui rémunère le producteur.

Deuxième sujet : le retrait des produits phytosanitaires. Il nous faut penser, en Européens, des transitions ambitieuses et soutenables, sur les néonicotinoïdes ou le phosmet pour la cerise, sans pénaliser les producteurs français. La France promeut une action européenne coordonnée et va déclencher une clause de sauvegarde afin d'éviter toute distorsion de concurrence. Nous défendons cette logique de réciprocité des normes et de clauses miroirs dans les accords commerciaux.

Enfin, il faut rechercher des alternatives, pour ne pas laisser la filière sans solution technique. D'où les renouvellements de vergers, actuellement de 4,2 %, avec des variétés plus résistantes, mieux adaptées au climat. C'est tout l'enjeu de la planification écologique.

Le plan de souveraineté Fruits et Légumes, qui sera présenté au Salon de l'agriculture, intégrera les enjeux d'innovation au coeur de la troisième révolution agricole. L'objectif est de retrouver, d'ici 2030, notre souveraineté sur ces filières, dans une logique de transition et de planification.

M. Jean-Yves Roux.  - L'enjeu est vital pour nos arboriculteurs, aujourd'hui contraints d'arracher leurs pommiers !

Difficultés de la filière porcine biologique

Mme Annie Le Houerou .  - Il est urgent de soutenir la filière porcine biologique en Bretagne. Depuis le second semestre 2021, la consommation de viande de porc bio chute. En situation de surproduction, les producteurs biologiques sont obligés d'aligner leurs prix sur ceux des porcs conventionnels et ne peuvent plus couvrir leurs coûts de production.

L'envol du prix des matières premières, de l'alimentation et de l'énergie se conjugue à l'amortissement des investissements qui ont été nécessaires à la conversion en bio. L'avenir de la filière est en danger, alors même que l'objectif fixé par le plan de développement de passer de 0,5 à 5 % de production bio est loin d'être atteint. En 2021, seuls 1,45 % des porcs abattus était bio.

La loi EGalim, complétée par la loi Climat et résilience, prévoit au moins 50 % de produits de qualité et durables, dont au moins 20 % de produits biologiques, dans la restauration collective. Nous en sommes très loin. Le simple respect de cette loi garantirait la pérennité de la filière porcine bio en Bretagne et en France.

L'agriculture biologique a un impact positif sur la santé, le climat, la biodiversité ; elle répond aux enjeux agricoles et sociétaux actuels et à venir.

Que prévoit le Gouvernement pour venir en aide aux producteurs ? Sans soutien d'urgence, ces producteurs de Plouisy, de Plélo et d'ailleurs courent à la catastrophe.

Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée chargée de l'organisation territoriale et des professions de santé .  - L'atteinte de l'objectif de 20 % de produits bio en restauration collective ne résoudrait pas le problème, car il n'y a pas d'obligation de servir du porc bio...

La difficulté de la filière est avant tout de mieux valoriser toute la carcasse de porc. À ce jour, seuls les jambons sont valorisés en bio, le reste intègre des circuits conventionnels.

Deuxième difficulté : produire du porc bio nécessite des bâtiments d'élevage et une organisation de production qui entraînent d'importants surcoûts. Impossible de déclasser transitoirement les viandes en conventionnel comme d'autres filières, car les pertes financières sont vite intenables.

Aux assises de la Bio, le 6 décembre 2022, le ministre a annoncé un projet de structuration de la filière porc bio et un travail engagé avec l'Agence Bio et les représentants de la filière ; un abondement du fonds Avenir Bio de 2 millions d'euros supplémentaires, à destination des filières les plus touchées ; une campagne de communication dotée de 750 000 euros, pour augmenter la demande ; une autre campagne, lancée en 2023 grâce au financement européen, axée sur la restauration commerciale.

Enfin, les régions pourront mobiliser les reliquats du Feader 2014-2022 pour financer en 2023 une aide au maintien de l'agriculture biologique. La région Bretagne l'a fait.

Par ailleurs, le programme Ambition Bio sera l'occasion de construire avec les acteurs une stratégie d'accompagnement et de structuration de ces filières de qualité, tenant compte des études prospectives en cours, et de mieux équilibrer l'offre et la demande.

Épidémies de norovirus dans les cultures conchylicoles

M. Jean-François Longeot .  - À la faveur des épidémies hivernales, certains virus, présents en grande quantité dans les eaux usées, résistent aux phases de traitement des eaux. Ainsi, dans les zones littorales, nous assistons régulièrement à une contamination des huîtres par des norovirus, responsables de la gastro-entérite.

Comment le Gouvernement compte-t-il garantir la sécurité sanitaire des consommateurs ? Les ostréiculteurs touchés par les restrictions de production, nullement responsables de la situation, en payent le prix fort. À quand un mécanisme pérenne pour les soutenir face à ces aléas ?

En réponse à une question d'actualité posée en 2020 durant un tel épisode de crise, le Gouvernement s'était engagé à améliorer le contrôle du traitement des eaux usées, en adressant des instructions aux préfets. Où en est cette stratégie, et quel impact a-t-elle eu sur la situation actuelle des épidémies de norovirus dans la conchyliculture ?

Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée chargée de l'organisation territoriale et des professions de santé .  - Veuillez excuser l'absence d'Hervé Berville. En tant que Normande, je suis très attentive à cette question...

Les cultures conchylicoles ont été touchées de plein fouet cet hiver par les contaminations au norovirus, qui ont entraîné de lourdes pertes en pleine période de fêtes de fin d'année.

Le Gouvernement travaille à des solutions de court et moyen termes. La mise en conformité des systèmes d'assainissement avec l'augmentation des populations côtières et l'évolution de la réglementation environnementale est un chantier long et complexe.

Face à l'urgence, le Gouvernement travaille avec les préfets pour lancer rapidement les travaux de mise en conformité pour les zones à usages sensibles, comme celles destinées à la conchyliculture. Il faudra lister les chantiers prioritaires, valoriser les bonnes pratiques et identifier les blocages.

En complément, le Gouvernement va également travailler sur un plan d'action, avec les collectivités concernées.

Enfin, un accompagnement financier pourra être apporté aux conchyliculteurs, notamment via le Fonds européen pour les affaires maritimes, la pêche et l'aquaculture (Feampa), afin de financer des bassins de mise à l'abri ou de purification, des systèmes d'alerte, des projets portés par les régions ou encore la constitution d'un système d'assurances pour laquelle l'État est prêt à accompagner la profession.

M. Jean-François Longeot.  - C'est un sujet important pour l'avenir. Il est temps d'adapter les modes de traitement des eaux à nos modes de vie actuels !

Zone organisée d'accès aux soins transfrontaliers

Mme Véronique Guillotin .  - Je veux vous parler de ceux qui vivent l'Europe au quotidien, notamment les plus de 30 000 Français qui vivent à la frontière avec le Luxembourg. Pour eux, la frontière n'est qu'une réalité administrative, tant les échanges entre les deux pays sont fréquents. Mais l'administration complique leur quotidien. Alors que l'accès aux soins devient de plus en plus difficile côté français, de nombreux frontaliers se voient refuser le remboursement par l'Assurance maladie d'une consultation au Luxembourg.

Dans certaines zones frontalières françaises, belges et allemandes, afin de simplifier l'accès aux soins à l'étranger, il existe des zones organisées d'accès aux soins transfrontaliers (Zoast). Mais aucune n'a encore vu le jour entre la France et le Luxembourg. Alors que nous avons déjà de nombreux projets communs, une Zoast serait particulièrement pertinente.

Le Gouvernement entend-il se saisir de ce sujet ?

Mme Chrysoula Zacharopoulou, secrétaire d'État chargée du développement, de la francophonie et des partenariats internationaux .  - La santé est, avec les transports, la première attente de nos concitoyens en matière de coopération frontalière. Le développement d'une offre mutualisée aux frontières améliore efficacement l'accès aux soins. C'est bien l'objectif des Zoast, dans l'Eurodistrict SaarMoselle par exemple.

Toutefois, ces mécanismes sont complexes à déployer et n'apportent qu'une réponse partielle aux difficultés. L'imbrication de deux systèmes de santé nationaux implique en effet une préparation et une mise en oeuvre importantes, qui mobilisent d'importants moyens.

Une réflexion a été entamée entre les ministères de la santé français et luxembourgeois sur la mise en place d'un tel dispositif.

Mme Véronique Guillotin.  - J'entends que la réflexion progresse. Si des Zoast existent ailleurs, c'est possible entre la France et le Luxembourg.

Crimes de guerre de l'armée azerbaïdjanaise

M. Pierre Ouzoulias .  - Pendant la guerre de quarante jours de l'Azerbaïdjan contre la petite République d'Artsakh, puis de nouveau en septembre 2022, l'armée azérie s'est livrée à des exactions contre des militaires mais aussi contre des civils. Que fera la France pour faire reconnaître ces crimes de guerre par les instances internationales ?

Depuis deux mois, en raison d'un blocus de la république d'Artsakh, 120 000 Arméniens sont privés de tout et n'ont le choix qu'entre fuir ou périr. La France et l'Europe ont des moyens de pression contre l'Azerbaïdjan. Pourquoi ne les utilisent-elles pas ?

En 1939, la France a abandonné à la Turquie le sandjak d'Alexandrette, condamnant à l'exil 550 000 Arméniens. Allons-nous abandonner la République d'Artsakh ?

Mme Chrysoula Zacharopoulou, secrétaire d'État chargée du développement, de la francophonie et des partenariats internationaux .  - Lors de l'offensive azerbaïdjanaise de septembre 2022, la France a immédiatement dénoncé la violation de l'intégrité territoriale de l'Arménie. Elle a dit que les crimes de guerre devaient être jugés et leurs auteurs punis. La lutte contre l'impunité est essentielle à la paix.

La réunion organisée par le Président de la République à Prague le 6 octobre 2022, en présence de Nikol Pachinian, Ilham Aliyev et Charles Michel, a permis l'envoi d'une mission européenne de deux mois, qui a contribué à faire baisser la tension sur le terrain. Les 27 ont décidé, le 23 janvier, d'une nouvelle mission en territoire arménien, pour deux ans cette fois-ci, à laquelle la France contribuera.

La diplomatie française est mobilisée au plus haut niveau. La semaine dernière encore, le Président de la République échangeait avec ses homologues arménien et azerbaïdjanais.

La France n'importe pas de gaz azerbaïdjanais et soutient les efforts de la Commission européenne de réduction de notre dépendance au gaz russe. Notre position est constante : les efforts européens en faveur de la souveraineté énergétique ne doivent en aucun cas se faire au détriment de nos principes.

M. Pierre Ouzoulias.  - J'aurais aimé que la France reconnaisse la violation de l'intégrité territoriale de l'Arménie mais aussi de la République d'Artsakh, qu'il faut reconnaître, pour sauver ses 120 000 Arméniens. Or vous n'avez rien dit sur son blocage. Il faut agir maintenant. (Mme Brigitte Devesa applaudit.)

Modification des heures creuses d'électricité

M. Gilbert Roger .  - Avec la crise énergétique, le Gouvernement a demandé aux Français de faire preuve de sobriété. Les dirigeants d'EDF et d'Engie souhaitent que nos concitoyens étalent l'utilisation de leurs appareils électroménagers pour éviter une surcharge du réseau électrique et privilégient un déclenchement après 22 h. Or les heures creuses en tarif bleu diffèrent selon les abonnements et sont majoritairement comprises entre 23 h 36 et 7 h 36.

Ne pourrait-on uniformiser les abonnements et élargir les heures creuses de nuit entre 22 h 30 et 7 h 30 ? Avec le décret autorisant les fournisseurs d'électricité à suspendre la tranche des heures creuses de 12 h à 14 h via Linky, cette proposition s'insérerait dans une communication cohérente du Gouvernement.

Mme Chrysoula Zacharopoulou, secrétaire d'État chargée du développement, de la francophonie et des partenariats internationaux .  - Les heures creuses recouvrent les plages 12 h-17 h et 20 h-8 h. Or en hiver, la pointe du matin s'étend jusqu'à 13 h, alors que certains équipements étaient programmés pour démarrer à 12 h afin de profiter des heures creuses méridiennes. Cela a conduit le Gouvernement à demander aux gestionnaires de réseau de désactiver partiellement le démarrage des ballons d'eau chaude sur cette plage horaire. Ainsi, une consommation équivalente à la production de deux réacteurs nucléaires a pu être décalée à la nuit.

La ministre de la transition énergétique souhaite développer encore plus les signaux tarifaires, à l'instar des offres Tempo qui ont augmenté fortement en 2022 sous son impulsion.

Une évolution des heures creuses est également en cours d'expertise.

M. Gilbert Roger.  - J'espère que l'on pourra très rapidement établir les heures creuses de 22 h à 7 h 30.

Reversement des recettes induites par les obligations de service public

M. Philippe Mouiller .  - Les acheteurs obligés sont tenus de rembourser à l'État le différentiel entre leur valorisation des productions d'énergie renouvelable et le prix d'achat garanti auquel ils les ont acquises. Or aucun texte n'encadre les modalités d'évaluation de ces recettes et leur reversement au profit de l'État.

Le code de l'énergie prévoit bien le reversement des recettes induites par les obligations de service public, mais la Commission de régulation de l'énergie (CRE) n'intervient que lorsque ces obligations de service donnent lieu à une compensation par l'État des charges induites. Les opérations liées au reversement ne sont pas encadrées lorsque les obligations donnent lieu à des recettes pour les opérateurs concernés.

Le 3 novembre 2022, la CRE a réévalué les recettes induites par l'obligation d'achat pour 2023, mettant en grande difficulté les acheteurs obligés. En effet, les charges de trésorerie considérables qui en résultent pourraient pousser certaines entreprises locales de distribution (ELD) à la cessation de paiement d'ici l'été.

Est-il envisagé de modifier le cadre légal et réglementaire pour sécuriser les acheteurs obligés ?

Mme Chrysoula Zacharopoulou, secrétaire d'État chargée du développement, de la francophonie et des partenariats internationaux .  - La situation actuelle conduit à une contribution positive des énergies renouvelables aux finances publiques. La réévaluation exceptionnelle des charges de service public, en novembre 2022, a en effet conduit à un ajustement des reversements, dans un contexte où les prix de marché ont depuis baissé.

La CRE s'est engagée à réviser ses évaluations de charges pour l'année 2023 en juillet prochain, ce qui permettra un recalibrage direct des reversements.

L'État proposera aux acteurs, et notamment aux ELD, des solutions transitoires, y compris conventionnelles, afin d'éviter des stress de trésorerie insupportables, au premier semestre 2023. Aucun reversement contraint ne sera initié si un doute persiste sur son montant.

Construction de la future cité judiciaire de Marseille

Mme Brigitte Devésa .  - Le 11 février 2022, l'État a annoncé la construction d'une nouvelle cité judiciaire à Marseille, à l'horizon 2028, ce qui mettra enfin terme à l'éclatement géographique des juridictions marseillaises. Cependant, la localisation de la future cité judiciaire n'est toujours pas connue. Trois sites sont envisagés : le centre-ville de Marseille, Euroméditerranée II et la Capelette.

L'absence de feuille de route pose question. Il sera nécessaire de consulter tous les acteurs du monde judiciaire marseillais. Selon un sondage, les avocats sont vivement inquiets, à plus de 99 %. Ils seront les premiers touchés par une nouvelle localisation. Or aucune consultation n'a, pour le moment, été annoncée. C'est pourtant ce qui est préconisé par le conseil consultatif conjoint.

Quel site a la préférence de l'État ? Où en est la concertation ?

Mme Chrysoula Zacharopoulou, secrétaire d'État chargée du développement, de la francophonie et des partenariats internationaux .  - Le garde des sceaux a annoncé en février dernier le projet de construction de cité judiciaire à Marseille, afin de regrouper les juridictions marseillaises au sein d'un même bâtiment fonctionnel, adapté à la justice du XXIe siècle.

La réflexion sur le choix du site se poursuit, en concertation avec les élus locaux, le maire de Marseille et la présidente de la métropole.

Les contraintes fonctionnelles du site actuel excluent d'y créer une cité judiciaire unifiée et un outil de travail fonctionnel, sécurisé et conforme au développement durable. Une construction neuve regrouperait l'ensemble des juridictions dans un seul bâtiment moderne et performant, dans un calendrier beaucoup plus resserré.

La concertation se poursuit avec l'ensemble des parties concernées.

Levée du secret-défense sur l'assassinat de militantes kurdes en 2013

Mme Marie-Arlette Carlotti .  - Il y a dix ans, Sakine, Fidan et Leylan, militantes de la cause kurde, premières femmes à scander « Femme-Vie-Liberté ! », étaient assassinées en plein Paris.

Justice n'a pu être rendue, le principal suspect, qui a toujours nié les faits, étant mort en décembre 2016, quelques mois avant son procès. Depuis dix ans, les familles attendent la vérité, mais les autorités françaises refusent la déclassification des documents détenus par les services secrets français. L'instruction avait pourtant pointé les accointances d'Omer Güney avec les services secrets turcs ; mais la commission consultative sur le secret-défense n'a pas autorisé la divulgation du contenu des écoutes du suspect.

Les avocats des victimes ont saisi le parquet pour que soient identifiés les commanditaires. Nous ne pouvons accepter que des liquidations physiques soient perpétrées sur le sol français.

Le 23 décembre dernier, un nouvel évènement sanglant a rouvert les blessures des Kurdes de France, qui ont désormais peur de vivre dans le pays des droits de l'homme et des lumières.

Le Gouvernement compte-t-il lever le secret-défense ?

Mme Chrysoula Zacharopoulou, secrétaire d'État chargée du développement, de la francophonie et des partenariats internationaux .  - Veuillez excuser Sébastien Lecornu.

Nous avons une pensée pour les victimes de cet assassinat et leurs familles. En 2015, le ministère des armées a déclassifié ces documents après avoir saisi la commission du secret de la défense nationale, autorité administrative indépendante composée de conseillers d'État, de magistrats de la Cour de cassation et de la Cour des comptes et de parlementaires. Le ministère indique qu'il ne détient plus de documents pouvant concourir à la manifestation de la vérité.

Mme Marie-Arlette Carlotti.  - À l'approche du Nouvel an kurde le 21 mars, j'espérais une réponse positive...

Fibre optique aux Sables-d'Olonne et à La Roche-sur-Yon

M. Didier Mandelli .  - Le raccordement en fibre optique des Sables-d'Olonne et de La Roche-sur-Yon, situées en zone d'appel à manifestation d'intention d'investissement (Amii), a pris beaucoup de retard : seuls 77,3 % des locaux sont raccordables dans l'agglomération des Sables, 70,7 % dans celle de La Roche-sur-Yon : on est loin des 100 % promis pour 2020.

L'autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse (Arcep) a mis en demeure Orange fin décembre 2022 pour ces retards et ouvert une procédure de sanction pour manquement. Sa présidente m'a semblé plutôt favorable à une reprise en main par les collectivités. Quelle est votre position sur une éventuelle annulation des contrats avec les opérateurs qui ne respectent pas leurs engagements ?

M. Roland Lescure, ministre délégué chargé de l'industrie .  - En juillet 2018, le Gouvernement a accepté les engagements proposés par Orange sur la zone dite Amii. Le Gouvernement est conscient des efforts de l'ensemble des acteurs.

Les chiffres révèlent cependant que certains engagements d'Orange n'étaient pas atteints. L'Arcep, sur demande du Gouvernement, a donc ouvert une procédure de mise en demeure, décision attaquée par l'opérateur et actuellement instruite par le Conseil d'État.

La France s'est fixé un objectif ambitieux : la généralisation de la fibre en 2025. Il faut éviter que le numérique ne crée des fractures dans notre pays. L'une des pistes peut être la reprise en main des engagements de l'opérateur par des acteurs économiques locaux.

M. Didier Mandelli.  - Nous devons permettre aux collectivités de reprendre à leur compte les opérations qui ne sont pas réalisées par l'opérateur historique.

Conséquence des prix de l'électricité pour le patrimoine religieux

M. François Calvet .  - Si le Gouvernement a déployé un bouclier tarifaire pour les particuliers et les petites entreprises et minoré la taxe intérieure sur la consommation finale d'électricité (TICFE) pour les autres entreprises, les diocèses, eux, ne sont pas aidés face à la hausse du prix de l'électricité.

Pour réduire la facture énergétique dans les églises, souvent astronomique, des prêtres n'hésitent plus à tout éteindre et appellent les fidèles à se vêtir chaudement pour les cérémonies.

Si la loi de 1905 interdit de subventionner les cultes, le législateur a néanmoins autorisé des exceptions à cette interdiction, puisque l'entretien des édifices religieux est confié aux communes depuis 1907. Le Gouvernement envisage-t-il d'étendre le dispositif d'aides aux bâtiments religieux et aux salles annexes servant à l'enseignement religieux ?

M. Roland Lescure, ministre délégué chargé de l'industrie .  - Vous l'avez dit, le Gouvernement a mis en place de nombreuses aides pour accompagner les Français dans cette période difficile, et la crise énergétique provoquée par la guerre en Ukraine a été limitée par le bouclier tarifaire. Les mesures spécifiques sur les TPE, les PME et les grandes entreprises, malgré leur coût, ne permettent malheureusement pas de couvrir tout le monde, notamment les gestionnaires d'édifices religieux.

Je profite de votre question pour appeler à nouveau les TPE et les PME à se signaler auprès de leur fournisseur d'électricité pour bénéficier de l'aide. Il y a encore trop de non-recours.

Le Gouvernement travaille à des mesures complémentaires pour appuyer les associations cultuelles et autres acteurs dans la transition énergétique, mais aussi pour les accompagner à court terme. Le ministre de l'intérieur m'a indiqué ce matin même qu'il réunirait l'instance de dialogue avec l'Église catholique en mars pour évoquer les différentes solutions possibles.

Encadrement des dark kitchens et des dark stores

Mme Christine Lavarde .  - On ne présente plus les dark stores et les dark kitchens, ni les nuisances qui les accompagnent.

Ces locaux doivent-ils être qualifiés juridiquement d'entrepôts, de commerces ou d'espaces de logistique urbaine, comme en a jugé le tribunal administratif de Paris en octobre dernier, au motif qu'ils diminueraient le trafic de camions et le nombre de points de livraison dans Paris intramuros ?

Quid de la promesse de régulation du secteur faite cet été ? Les élus avaient découvert par voie de presse un projet de texte réglementaire qui avait provoqué des réactions vindicatives ; le Gouvernement avait lancé rapidement une concertation aboutissant à un communiqué de presse du 6 septembre annonçant une réglementation rapide. Mais nous attendons toujours, près de six mois plus tard.... Quelle est la cause de ce retard ?

M. Roland Lescure, ministre délégué chargé de l'industrie .  - Le commerce rapide, c'est le commerce livré chez vous en quelques minutes ; les dark stores et les dark kitchens en sont la pierre angulaire. Il fait débat car son équilibre économique n'a pas été trouvé : sur les neuf acteurs présents à Paris il y a un an, il n'en reste plus que trois, et tous les plans de développement ont été gelés. Il fait débat surtout parce qu'il est source de nuisances et interroge notre modèle de société et de consommation.

Avec Olivier Klein et les associations d'élus locaux, nous nous sommes engagés à réguler cette activité via un arrêté à paraître dans les prochains jours : les dark stores seront intégrés dans la sous-destination d'urbanisme « entrepôts », qu'ils aient ou non un point de retrait ; une catégorie ad hoc serait créée pour les dark kitchens.

Les collectivités pourront donc réguler, voire interdire ces installations dans telle ou telle zone du plan local d'urbanisme. La transformation d'un commerce en dark store serait soumise à un accord préalable de la commune.

Les maires disposent déjà de pouvoirs de police concernant les externalités négatives des dark store : regroupement de personnes, stationnements ou même circulation des deux-roues servant à la livraison.

Mme Christine Lavarde.  - Dans quelques jours, dites-vous ? C'est déjà ce que le Gouvernement annonçait en septembre... J'aurais préféré entendre que l'arrêté était déjà dans Solon ! Je me réjouis de la qualification juridique retenue. Quant aux pouvoirs de police, ils ne sont guère efficaces au quotidien sans la coopération des plateformes.

Substances dangereuses dans les fournitures scolaires

M. Serge Babary .  - En mai 2022, l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses) alertait sur la présence de substances dangereuses dans les fournitures scolaires et recommandait de leur appliquer la réglementation européenne relative aux jouets.

Au mois de septembre, une étude d'UFC-Que Choisir, qui l'avait déjà signalé en vain il y a six ans, le confirmait.

En décembre dernier, vous avez répondu à Pascal Allizard qu'il existait déjà une réglementation européenne suffisante sur les substances chimiques et annoncé une enquête de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF).

Nous parlons de conservateurs allergisants, de perturbateurs endocriniens, de substances cancérigènes. Comment s'assurer que les fournitures scolaires de la rentrée prochaine ne contiendront plus de produits toxiques ?

M. Roland Lescure, ministre délégué chargé de l'industrie .  - Les fournitures scolaires recouvrent une vaste gamme de produits, certains pouvant être considérées comme des jouets, les autres non, car non ludiques - ce qui interdit de leur étendre les dispositions réglementaires exigibles pour ceux-ci.

Pour autant, à défaut de texte spécifique, leur sécurité est assurée à travers l'obligation générale de sécurité (OGS) définie par la directive sur la sécurité générale des produits. Leurs matériaux sont encadrés par les règlements sur l'enregistrement, l'évaluation, l'autorisation et les restrictions de substances chimiques (Reach) et sur la classification, à l'étiquetage et à l'emballage des substances et des mélanges (CLP).

Le Gouvernement, très attentif à la protection des consommateurs, notamment les plus vulnérables, a pris note avec la plus grande attention de l'avis de l'Anses. La DGCCRF renforcera le contrôle de ces produits via une enquête spécifique, dont une synthèse sera transmise à l'Anses.

M. Serge Babary.  - Le personnel de la DGCCRF m'a indiqué qu'elle manquait de moyens pour contrôler la masse des produits importés. J'espère que les familles ne découvriront pas un nouveau scandale à la rentrée prochaine, sans parler d'un accident touchant nos enfants.

Réduction d'assiette du FCTVA

Mme Elsa Schalck .  - Depuis le 1er janvier 2021, les dépenses d'acquisition, d'aménagement et d'agencement de terrain sont exclues de l'assiette du fonds de compensation pour la TVA (FCTVA).

Par deux fois, le Sénat a voté la réintégration de ces dépenses pour les communes et leurs groupements. Le ministre des comptes publics lui-même a reconnu la nécessité de revoir la situation. Malheureusement, l'amendement sénatorial au projet de loi de finances pour 2023 n'a pas été retenu dans le cadre du 49.3, alors qu'il reprenait les attentes des collectivités territoriales et les engagements gouvernementaux.

Cette exclusion porte préjudice à l'investissement local, qui pèse 70 % de l'investissement public. Les conséquences financières sont lourdes pour les communes, déjà fortement touchées par l'inflation, notamment de l'énergie.

Il est impératif de mettre fin aux discours contradictoires : on ne peut pas, d'un côté, encourager l'investissement local et, de l'autre, en modifier les règles de financement. Le principe d'autonomie financière des collectivités territoriales doit retrouver une réalité. Quand le Gouvernement réintégrera-t-il ces dépenses dans le FCTVA ?

M. Roland Lescure, ministre délégué chargé de l'industrie .  - Il n'y a pas de contradiction, mais une action publique visant à promouvoir l'investissement tout en préservant les équilibres budgétaires de la Nation.

L'automatisation de la gestion du FCTVA, décidée dans le cadre du projet de loi de finances pour 2021, a conduit à revoir l'assiette des dépenses éligibles. Certains comptes n'ont pas été retenus, dont le compte 212 « Agencement et aménagement de terrains », qui retrace des dépenses hors taxes inéligibles. Toutefois, certaines dépenses réalisées dans le cadre du projet d'aménagement peuvent être éligibles : achats d'équipements sportifs et urbains ou d'outillages techniques, travaux d'éclairage, dépenses relatives à la voirie.

L'inclusion dans le FCTVA de dépenses relevant des comptes 211 et 212 a été écartée au moment du projet de loi de finances pour 2023 compte tenu de son coût budgétaire, plus de 500 millions d'euros, contraire au principe de neutralité budgétaire de la réforme. Celle-ci, considérée dans sa globalité, est favorable à l'investissement public local.

Une évaluation de la mise en oeuvre de l'automatisation est en cours par la direction générale des collectivités locales et la direction générale des finances publiques ; elle sera présentée au printemps.

Imposition des travailleurs français du secteur public belge

M. Éric Bocquet, en remplacement de Mme Michelle Gréaume, auteure de la question .  - Je pose cette question au nom de ma collègue Michelle Gréaume.

Nos compatriotes salariés des services publics belges s'inquiètent d'une modification à venir de leur statut fiscal.

Un Français résidant en France et travaillant dans les services publics non concurrentiels belges, actuellement imposable en France, le sera en Belgique en vertu d'une nouvelle convention entre les deux pays, non encore ratifiée. Plusieurs milliers de personnes verront ainsi leur revenu baisser de 25 à 30 %, et des projets de vie à long terme seront remis en cause.

Une solution existe, déjà mise en oeuvre en 2012 lors de la suppression du statut fiscal frontalier : contraints de payer leurs impôts en Belgique, les travailleurs français du secteur privé belge déjà sous statut frontalier ont bénéficié d'un délai jusqu'en 2033 ; le nouveau régime ne s'est appliqué immédiatement qu'aux nouveaux frontaliers. Les employés français du secteur public belge souhaitent tout simplement bénéficier de la même disposition. La vague promesse d'une lointaine modification de la législation fiscale belge, non confirmée de l'autre côté de la frontière, n'est pas de nature à dissiper leurs craintes légitimes.

Le Gouvernement compte-t-il accéder à leur demande d'un délai équivalent à celui décidé en 2012 ?

M. Roland Lescure, ministre délégué chargé de l'industrie .  - Je remercie Mme Gréaume de revenir sur cette question, déjà abordée il y a quelques semaines à l'initiative de M. Decool.

La convention fiscale du 9 novembre 2021, qui sera soumise au Parlement pour ratification, préserve le régime spécifique des frontaliers. S'agissant des rémunérations publiques, elle prévoit, sauf exception, leur imposition par l'État qui les verse : il s'agit d'éviter qu'un État ne subventionne indirectement l'autre, ce qui est de bon sens. Ainsi, les personnes travaillant en Belgique pour une entité publique belge seront taxées dans ce pays, même si elles habitent en France. L'inverse sera évidemment vrai, ce qui rendra l'emploi public plus attractif de notre côté de la frontière.

Les résidents français possédant la seule nationalité française, exerçant en Belgique et percevant des traitements publics de source belge se verront désormais imposés en Belgique. Afin d'atténuer les effets de ce changement, vous suggérez qu'il ne s'applique qu'aux nouveaux travailleurs. Mais la comparaison avec le statut de frontaliers a ses limites : il s'agit d'un régime historique, qui contraint la France à verser une compensation financière et qui disparaîtra en 2034.

Mixité sociale et égalité des chances à l'école

Mme Martine Filleul .  - En décembre dernier, dans une tribune, le ministre de l'éducation nationale a comparé l'école à un champ de ruines. La publication de l'indice de position sociale (IPS) documente désormais ce constat alarmant : le principe d'égalité est très largement défaillant.

Le déterminisme social frappe dès le plus jeune âge, brisant toute perspective d'égalité des chances. Au sommet d'une hiérarchie qui ne dit pas son nom trône l'enseignement privé, notamment catholique.

Dans le Nord, les voyants sont au rouge, avec un IPS de 97, six points en dessous de la médiane nationale. À Lille, ils sont même au rouge très vif, la moitié des établissements présentant un IPS inférieur ou égal à 93.

Ma question n'est pas simple -  contrairement à l'habitude : par quelles réformes structurelles le Gouvernement entend-il rétablir l'égalité républicaine et la mixité sociale en combattant effectivement la ségrégation ?

Mme Sarah El Haïry, secrétaire d'État chargée de la jeunesse et du service national universel .  - Vous avez doublement raison : pour lutter contre les déterminismes sociaux, la mixité à l'école est la mère des batailles ; et l'exercice n'est pas aisé.

Assurer la transparence des IPS est une première étape. Maintenant que nous savons, il faut agir, à court, moyen et long termes. Je puis vous assurer que le ministre de l'éducation nationale en a fait un combat sincère.

Notre stratégie est construite à partir des territoires, en lien avec les élus locaux et les parlementaires, ou encore les associations de parents d'élèves.

Une politique visant à renforcer la mixité a été expérimentée, notamment, dans l'académie de Lille : révision progressive de la carte de sectorisation fondée sur des dispositifs comme les multi-établissements et le jumelage d'établissements, transformation des conditions d'affectation, accueil d'élèves boursiers dans tous les établissements, contrats de mixité incluant cordées de la réussite ou stages de réussite, enrichissement de l'offre pédagogique.

La réponse la plus fondamentale réside dans une coopération renforcée avec les collectivités territoriales en matière de transport scolaire, d'hébergement ou de restauration, afin de faciliter la mobilité des élèves.

Le 1er mars, lors du débat organisé à l'initiative de votre groupe, le ministre vous répondra plus en détail.

Mme Martine Filleul.  - Il faut une réforme structurelle et globale de notre système éducatif pour endiguer la ségrégation. En particulier, la carte scolaire doit être transformée en profondeur. Les suppressions de classes doivent cesser, la fermeté être de mise à l'égard de l'enseignement privé et les enseignants être mieux rémunérés.

Harcèlement scolaire

Mme Marie Mercier .  - Le harcèlement scolaire est un cauchemar pour un million d'enfants et de jeunes. Il les poursuit en dehors de l'école, à travers les réseaux sociaux. Leur calvaire les expose à des violences répétées et à l'isolement. Ils disent : « personne ne m'écoute, personne ne me croit ».

Un jeune de mon département, appelons-le Maël, après s'être battu pour faire admettre qu'il était victime de harcèlement, doit se battre à présent contre les institutions : il est prévu que le jeune harceleur, qui a probablement aussi besoin d'aide, reste dans l'école, et que Maël la quitte.

Madame la ministre, quel est votre ressenti à cet égard ? Ne me parlez pas de Phare, d'axes ou de piliers d'action : tout cela, nous le connaissons. Dites-nous ce que vous avez envie de faire pour aider et sauver nos enfants.

Mme Sarah El Haïry, secrétaire d'État chargée de la jeunesse et du service national universel .  - Phare, loi Balanant, programmes de lutte : ces outils sont nécessaires pour que Maël, tous les enfants harcelés et leurs parents soient accompagnés. Il faut former les encadrants et mobiliser l'ensemble des maillons de la chaîne éducative.

Le harcèlement est un fléau, un fléau ne s'arrête jamais ; il brise des familles et il tue.

Il est dur d'expliquer à un jeune adolescent que la honte doit s'inverser, qu'il n'y est pour rien. Vous m'avez demandé mon intime conviction : elle est que Maël n'a pas à partir de son établissement. La victime n'a pas à partir, au risque de se sentir deux fois pénalisée.

Face à ce fléau aggravé par les réseaux sociaux, qui brouillent les frontières entre la cour d'école et la chambre de nos enfants, il ne faut jamais avoir peur ni honte ; il faut parler chaque fois que nécessaire ; surtout, il faut une grande prise de conscience sociale.

Mme Marie Mercier.  - Oui, le harcèlement tue. Il faudra peut-être que je meure pour que cela s'arrête, a dit Maël. Je relaierai qu'il n'a pas à changer d'école.

Vous avez parlé de l'ensemble des maillons de la chaîne. Les maires, qui financent les agents territoriaux spécialisés des écoles maternelles (Atsem), la cantine et le transport scolaire, devraient être associés aux comités d'éducation. Je compte sur vous pour que les écoles s'ouvrent.

Financement de la pédagogie au collège

Mme Angèle Préville .  - Des élus du Lot m'ont alertée sur le financement de la pédagogie dans nos collèges.

Depuis plusieurs années, l'État semble s'en désengager, laissant les collectivités territoriales assumer toujours plus de dépenses. Or le financement des actions pédagogiques ne devrait pas leur incomber. En la matière, aucune logique nationale ne semble prévaloir : d'une année à l'autre, d'une académie à l'autre, les règles de financement sont devenues très variables.

La dotation des départements est destinée à la construction et à l'entretien des collèges. En outre, le conseil départemental du Lot subventionne des projets éducatifs et de prévention, voire la pédagogie elle-même, à travers l'achat de manuels scolaires. Ce choix politique engagé ne pourra peut-être pas s'inscrire dans la durée, compte tenu du contexte financier. Pourtant, les équipes éducatives devraient pouvoir compter sur des budgets pérennes.

N'est-ce pas à l'éducation nationale de donner aux établissements les moyens d'acheter des livres et d'organiser des sorties scolaires - bref, de financer la pédagogie ?

Mme Sarah El Haïry, secrétaire d'État chargée de la jeunesse et du service national universel .  - La question budgétaire est souvent soulevée à propos de l'école. De fait, l'éducation nationale est le premier budget de l'État, en augmentation de plus de 6 % cette année.

La répartition des compétences est claire : le bloc communal est responsable des locaux ; l'État rémunère les enseignants et finance les actions pédagogiques.

Un certain nombre de collectivités territoriales, que je salue, soutiennent des projets pédagogiques complémentaires : classes découvertes, école hors les murs, forums associatifs. En soutenant ainsi des projets d'établissement, les élus locaux dessinent un parcours de citoyenneté ; ils sont les premiers bâtisseurs de la citoyenneté.

L'école peut être considérée comme un lieu d'instruction exclusivement ou d'éducation, y compris à la citoyenneté et à l'engagement. Dans ce dernier cadre, les projets soutenus par les élus locaux sont des bienfaits.

L'enjeu est qu'il n'y ait pas d'inégalités selon les territoires et les sensibilités politiques. C'est pourquoi le Président de la République a souhaité que les projets d'établissement soient plus nourris et qu'un fonds d'investissement soit mis en place, doté de 500 millions d'euros sur le quinquennat.

Mme Angèle Préville.  - J'espère que ce fonds servira à l'achat de manuels et autres matériels pédagogiques. Les départements ne devraient pas avoir à financer ce qui relève de la pédagogie.

Iniquité de traitement des élèves en situation de handicap en milieu urbain ou rural

M. Daniel Gueret .  - Les services départementaux de l'éducation nationale étudient actuellement la carte scolaire pour 2023-2024. Certains élus ont reçu un courrier annonçant des baisses de moyens en raison de l'évolution des effectifs. Cette approche comptable suscite l'inquiétude, et les parents d'élèves multiplient les actions, notamment dans l'Eure-et-Loir.

Élèves et enseignants des unités localisées pour l'inclusion scolaire (Ulis) subiront une iniquité de traitement, car les moyens diffèrent totalement en ville ou en milieu rural, ce qui est choquant. La fermeture d'une classe a pour conséquence l'augmentation du nombre d'élèves Ulis dans les classes restantes, compliquant la tâche d'enseignants très investis, mais sans moyens. Le Gouvernement promeut l'inclusion en milieu scolaire ; quelles mesures concrètes envisagez-vous, en particulier en milieu rural, pour donner à tous ces enfants en difficulté les mêmes chances d'apprentissage, et à tous nos enseignants l'appui nécessaire ?

Mme Sarah El Haïry, secrétaire d'État chargée de la jeunesse et du service national universel .  - À chaque fermeture de classe, les parents et les enseignants sont souvent mobilisés, et l'émotion est légitime. Il ne faut pas d'analyse comptable pour l'école : le rêve français, c'est celui du mérite, et de l'égalité devant la formation.

Malgré la baisse démographique et la singularité des territoires, il faut accompagner chaque élève. Aucune classe Ulis ne sera fermée l'année prochaine. En Eure-et-Loir, quatre classes Ulis seront ouvertes, alors que sur ces quatre dernières années, on compte 2 690 élèves en moins, pour onze postes d'enseignants en moins. Le taux d'encadrement moyen y est meilleur qu'au niveau national.

Les classes Ulis demandent une attention particulière. Il faut considérer la population concernée, la mobilisation essentielle des élus locaux, ainsi que les questions de distance, de mobilité, d'enclavement, de formation professionnelle. S'il y a un seul investissement à faire, c'est celui de l'école.

Rentrée scolaire 2023 en Seine-Maritime

Mme Céline Brulin .  - La soustraction est-elle l'opération préférée du Gouvernement ? Le quart des suppressions de postes en lycée auraient lieu en Normandie, notamment en Seine-Maritime.

Au lycée Maupassant de Fécamp, 98 heures de dotation horaire globale (DHG) supprimées, aucun poste créé malgré le retour des mathématiques. Dans les collèges, comme à Harfleur ou Gruchet-le-Valasse, fermetures de classes, effectifs surchargés. Et les enseignants de technologie ont appris dans les médias la suppression de leur matière en 6e... Au primaire, 111 fermetures sont prévues en Seine-Maritime, notamment en milieu rural ; or nos villages sont aussi des zones prioritaires.

L'argument démographique a bon dos ! Le manque de remplaçants accroît encore les effectifs ; depuis septembre, 46 jours non remplacés à l'école Thomas Pesquet du Fontenay ! Le Gouvernement compte sur le logiciel Andjaro, « solution parfaite face au sous-effectif », mais nos enfants ont besoin d'enseignants !

Comment faire de l'école inclusive une priorité en supprimant quatre postes dans les centres médico-psychopédagogiques (CMPP) du Havre, de Rouen ou de Dieppe ? Des élèves d'unités localisées pour l'inclusion scolaire (Ulis) ne peuvent plus être accueillis dans certains collèges...

L'insuffisance des crédits conduit à la mise en concurrence des besoins dans une gouvernance de la pénurie. Le seul objectif devrait être la réussite des élèves.

Mme le président.  - Je suis également très attachée au lycée de Fécamp, madame la secrétaire d'État.

Mme Sarah El Haïry, secrétaire d'État chargée de la jeunesse et du service national universel .  - Le message est reçu ! Il y a bien une soustraction démographique : d'ici la fin du quinquennat, on comptera 500 000 élèves en moins.

Il faut prendre en compte les besoins spécifiques des territoires, ruraux ou urbains ; dans l'académie de Normandie, il y aura 5 296 élèves en moins en 2023 ; en Seine-Maritime, les effectifs du premier degré ont baissé de 6 747 élèves depuis 2016 ; et pourtant, 270 postes ont été gagnés. Le taux d'encadrement s'améliore, même s'il n'est pas parfait.

Dans le regroupement pédagogique intercommunal de la Forêt d'Eu, 88 élèves sont attendus en 2023. La situation de l'école Thomas Pesquet s'améliore depuis l'arrivée d'une remplaçante il y a trois semaines.

Aucun outil numérique ou pédagogique ne remplacera les enseignants. Le ministre se bat pour l'attractivité de ce métier.

Mme le président.  - Comme ces sujets sont importants et que vous êtes la dernière ministre, je vous laisse dépasser un peu votre temps de parole...

Rentrée scolaire 2023 au lycée Darchicourt d'Hénin-Beaumont

Mme Sabine Van Heghe .  - Au lycée Darchicourt d'Hénin-Beaumont, la situation pour la rentrée 2023 est préoccupante. Les professeurs ont à coeur d'appliquer leur projet d'établissement, et proposent une riche offre de spécialités et d'options ainsi que de nombreux projets.

Le trop maigre abondement de la dotation horaire globale (DHG) conduira à supprimer les demi-groupes en français et en philosophie dans la voie générale, ainsi qu'en français et en mathématique pour la classe de seconde, compromettant la réussite des plus fragiles. Après une forte mobilisation de la communauté éducative, les options sont maintenues, mais certaines sont vouées à disparaître d'ici 2025.

Comment lutter contre le racisme, l'antisémitisme et les discriminations en réduisant autant les moyens dans un bassin fortement marqué par la désespérance sociale ? L'an dernier, les personnels mobilisés avaient récupéré des heures d'enseignement indûment supprimées. Les moyens du second degré dans l'académie de Lille, qui baissent pour la cinquième année consécutive, doivent augmenter. Reviendrez-vous sur leur diminution, en particulier au lycée Darchicourt d'Hénin-Beaumont ?

Mme Sarah El Haïry, secrétaire d'État chargée de la jeunesse et du service national universel .  - Dans ce lycée, on est passé de 1 751 à 1 659 élèves en deux ans, alors qu'au niveau national le nombre de lycéens a augmenté de 0,8 %. Les ajustements de la DHG s'inscrivent dans ce contexte.

L'équipe pédagogique y offre une large palette de formations. Le nombre d'heures par élève est de 1,26 - bien supérieur au taux national.

Les services académiques, qui suivent la situation avec attention, opéreront les ajustements nécessaires fin 2023. Le taux d'encadrement dans l'académie de Lille est l'un des plus favorables au niveau national. Au lieu de comparer, accompagnons intelligemment les plus beaux projets.

Dotation de l'association « transitions pro » de Mayotte

M. Thani Mohamed Soilihi .  - La loi de 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel a créé les commissions paritaires interprofessionnelles régionales, dénommées associations « transitions pro » (ATpro), qui se sont substituées aux fonds de gestion des congés individuels de formation (Fongecif) en 2020.

La quote-part de la dotation allouée aux ATpro est calculée à partir de la masse salariale de chaque territoire. Or à Mayotte, où ces données ne sont ni stabilisées ni fiables, la dotation actuelle ne permet pas de répondre aux besoins. L'ATpro est contrainte à sous-traiter une partie de ses dossiers à La Réunion. Cette sous-dotation met en péril l'existence même de l'association, qui devra cesser toute activité en mars 2023.

Les retards de développement en matière d'emploi et de formation de la population active sont structurels à Mayotte. Comment comptez-vous sauvegarder l'existence de l'ATpro ?

Mme Sarah El Haïry, secrétaire d'État chargée de la jeunesse et du service national universel .  - Le Gouvernement garantira l'accès au dispositif de transition professionnelle sur l'ensemble du territoire mahorais.

Actuellement, la dotation de France compétences est versée aux ATpro au prorata de la masse salariale par région ; des frais de gestion, fonction de la dotation reçue, sont ensuite négociés entre les ATpro et les services déconcentrés.

Avec ce mode de calcul, ATpro Mayotte ne peut pas bénéficier de frais de gestion suffisants. Le partenariat conclu avec ATpro Réunion pour instruire les derniers dossiers a pris fin le 31 décembre 2022 ; son renouvellement a été demandé par la délégation générale à l'emploi et à la formation professionnelle (DGEFP).

Une solution sera trouvée pour remédier aux difficultés financières immédiates, mais Mme Carole Grandjean prendra contact avec les services départementaux pour trouver une solution à long terme.

M. Thani Mohamed Soilihi.  - Notre île rencontre des difficultés, mais nous nous battons. Je ferai part de cette bonne nouvelle aux administrateurs d'ATpro.

Travailleurs saisonniers

M. Cyril Pellevat .  - J'adresse mon soutien au ministre du travail, victime de propos qui n'honorent pas les politiques.

Essentiels au tourisme, les travailleurs saisonniers disposent souvent de deux contrats d'une durée moyenne de quatre mois, séparés par une période d'inactivité d'environ deux mois durant l'intersaison. Les contrats à durée indéterminée restent rares, malgré les efforts des entreprises.

Les effets de bord sont nombreux en matière de logement, ou encore avec la réforme de l'assurance chômage, qui requiert désormais de cotiser durant six mois. Alors qu'auparavant seules les périodes travaillées durant les six derniers mois étaient comptabilisées, les périodes d'inactivité sont maintenant prises en compte pour établir une moyenne sur dix mois, et les droits sont ouverts sur dix mois, contre six avant la réforme. L'objectif était de lutter contre ceux qui profitent du système, mais de nombreux saisonniers n'ont plus accès à l'assurance chômage, ou reçoivent une allocation diminuée.

La réforme des retraites pourrait elle aussi les pénaliser : la pension minimale de 1 200 euros ne vaut que pour les carrières complètes. Du fait de leurs périodes d'inactivité, les saisonniers devront donc travailler jusqu'à plus de 67 ans, alors même qu'ils exercent souvent des métiers physiques. De plus, on pouvait attendre un départ anticipé en raison de la pénibilité, mais les seuils définis par la loi ne seront pas atteints.

Le Gouvernement envisage-t-il d'adapter ces deux réformes pour prendre en compte les spécificités des saisonniers ? Nous craignons qu'une désertification de ces métiers ne dégrade le tourisme français. Ne faudrait-il pas créer un statut spécifique aux métiers saisonniers, inspiré de celui des intermittents du spectacle ?

Mme Sarah El Haïry, secrétaire d'État chargée de la jeunesse et du service national universel .  - La réforme de l'allocation chômage n'a commencé à s'appliquer qu'à partir du 1er octobre 2021 et n'a joué qu'à la marge sur les emplois saisonniers. Les saisonniers de carrière peuvent être touchés, mais le dispositif bonus-malus a de premiers effets positifs sur le secteur : la durée des contrats d'intérim a augmenté significativement.

Plusieurs mesures de soutien au tourisme existent, en particulier dans le plan Destination France. De nouveaux guichets d'accueil et d'orientation des saisonniers ont été installés dans les zones touristiques. Depuis octobre 2022, Pôle emploi a également mis en place des viviers de demandeurs motivés pour les métiers de l'hôtellerie, du commerce et de la restauration. Le service public de l'emploi et les opérateurs de compétences (Opco) ont également noué des partenariats.

Je ne sais pas s'il faut un régime spécifique, mais il est certain que les métiers saisonniers, agricoles ou touristiques, demandent un accompagnement particulier, notamment pour le logement. Il faut traiter cette question de manière systémique.

La séance est suspendue à 12 h 40.

Présidence de M. Pierre Laurent, vice-président

La séance reprend à 14 h 30.

Mises au point au sujet de votes

M. Damien Regnard.  - Au scrutin n°125 du 7 février 2023, je souhaitais voter contre, et non pour.

M. Olivier Henno.  - Au scrutin n°122, M. Jean Hingray souhaitait voter pour, et non contre.

M. le président.  - Acte vous est donné de ces mises au point. Elles seront publiées au Journal officiel et figureront dans l'analyse politique des scrutins.

Encadrement des centres de santé

M. le président.  - L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, visant à améliorer l'encadrement des centres de santé.

Discussion générale

Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée chargée de l'organisation territoriale et des professions de santé .  - On compte près de 1 000 centres dentaires sur le territoire français. Leur nombre a progressé de 60 % en cinq ans. La tendance est similaire pour les centres ophtalmologiques, passés de 88 en 2015 à 157 en 2020. Leur développement rapide impose une double exigence : soutenir ce modèle d'exercice collectif de la médecine, et lutter avec intransigeance contre les dérives. Nous devons créer un cadre légal pour que ces centres se développent de façon éthique.

Je salue l'auteure de la proposition de loi, la députée Fadila Khattabi, ainsi que le rapporteur Jean Sol.

Nous avons tous été marqués par les scandales Dentexia et Proxidentaire. Les manquements à la qualité des soins sont évidents. Des mutilations volontaires ont même parfois eu lieu. Fraude, surfacturations, surtraitements et multifacturations ont été aussi constatés.

Le 23 janvier, deux centres ont été déconventionnés en Seine-Saint-Denis et dans les Yvelines, pour un préjudice pour l'assurance maladie de 1,5 million d'euros.

C'est d'autant plus choquant que ces centres ont abusé de la confiance de patients précaires. Un retraité s'est vu arracher inutilement ses six dents, perdant la capacité de s'alimenter normalement. « On m'a volé une partie de moi » : ses mots nous obligent.

Le Gouvernement a rapidement réagi : l'ordonnance du 12 janvier 2018 a représenté une première avancée. Nous avons consolidé notre arsenal juridique pour déconventionner plus rapidement les centres frauduleux. Des amendes administratives ont été créées dans la loi de financement de la sécurité sociale (LFSS) pour 2022. C'est par l'union des forces de contrôle que nous serons efficaces. Ainsi, en novembre dernier, dix centres de santé ont fait l'objet d'une inspection de contrôle conjointe des agences régionales de santé (ARS), des caisses primaires d'assurance maladie (CPAM), de l'inspection du travail et du fisc. Elle a aussi été soutenue par la mission interministérielle de coordination antifraude.

Cette proposition de loi sécurisera mieux la prise en charge des patients.

Notre premier objectif est de lutter contre les inégalités d'accès à la santé. L'offre de soins connaît de grandes tensions dans tout le pays, ce qui affecte les plus fragiles. Les centres de santé sont reconnus comme des lieux d'accès rapide aux soins. Leur présence au coeur des territoires est essentielle -  on en compte 2 400, regroupant 38 000 professionnels. Ces structures collectives répondent, de plus, à l'aspiration des jeunes praticiens. Ne leur jetons pas l'opprobre, même si certaines d'entre elles connaissent des dérives.

Encadrer ces centres, c'est rendre le système fiable et garantir la qualité des soins.

Cette proposition de loi prévoit des dispositions légitimes et équilibrées. L'agrément au niveau régional inscrira les structures dans un projet territorial plus large, défini par les ARS. La qualité des soins sera garantie par la vérification des diplômes et des contrats de travail des praticiens.

Nous ne transigeons pas avec la sincérité de la gestion financière, en imposant la certification des comptes et leur transmission aux ARS.

Durant la première année, des contrôles renforcés auront lieu : l'agrément ne deviendra définitif qu'à l'issue de cette période.

Les sanctions seront renforcées : les amendes pourront aller jusqu'à 500 000 euros. Nous souscrivons au durcissement voulu par votre commission.

Le Gouvernement soutient cette proposition de loi, qui favorisera un développement éthique de ces centres, au service de nos concitoyens. (Applaudissements sur les travées du RDPI ; M. Joël Guerriau applaudit également.)

M. Jean Sol, rapporteur de la commission des affaires sociales .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; M. Joël Guerriau applaudit également.) En 2015, les centres Dentexia fermaient après avoir mutilé et escroqué de nombreux patients. En 2020, les centres Dental Access fermaient à leur tour. Ils avaient fait l'objet de nombreux signalements. En mars 2018, une patiente y était même décédée, pendant une intervention. En 2021 éclatait le scandale Proxidentaire : attirés par la promesse de soins à bas coût, des patients se voyaient facturer des soins superflus et étaient parfois édentés à vie.

À chaque fois, la même indifférence de la part de gérants qu'il faut bien qualifier d'aigrefins.

Ces dérives ont été rendues possibles par un assouplissement du cadre juridique comportant des failles. La loi portant réforme de l'hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires (HPST) de 2009 avait substitué à l'agrément une simple déclaration de conformité.

L'ordonnance de 2018 a notamment interdit la distribution des bénéfices issus de l'exploitation de ces centres ainsi que la publicité, mais cela n'a pas suffi. La Caisse nationale de l'assurance maladie (Cnam) peut déjà déconventionner des centres, mais cela ne résout pas un problème plus large.

Le nombre de centres a bondi de 50 % entre 2017 et 2021, cette proportion atteignant 124 % pour les centres ophtalmologiques. Le secteur se financiarise, à l'instar de celui des maisons de retraite.

Cette proposition de loi de la présidente de la commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale est donc bienvenue. Il ne s'agit pas de jeter l'opprobre sur tous ces centres, mais de prévenir les scandales.

L'article 1er rétablit l'agrément, mais seulement pour les activités dentaires et ophtalmologiques. Sa demande sera examinée sur le fondement d'un dossier, incluant les déclarations d'intérêts des dirigeants. Il pourra être remis en cause après une visite de conformité organisée par l'ARS.

L'agrément sera définitif sous réserve de la transmission des diplômes et des contrats de travail des professionnels aux ARS.

La commission a clarifié cet article et renforcé les moyens d'information des ARS sur les liens d'intérêts des dirigeants.

L'article 1er quater prévoit un mécanisme transitoire afin de faire entrer les centres de santé existants dans le nouveau régime. La commission a aménagé le délai prévu.

L'article 1er bis exclut le dirigeant d'un centre en cas de lien d'intérêts avec un prestataire, afin d'éviter certains montages complexes.

L'article 1er ter prévoit une obligation d'information des organismes en cas de fermeture d'un centre de santé, pour réduire la fraude. La commission a approuvé ces deux articles, sous réserve de clarifications.

La commission a en outre adopté deux articles additionnels : l'article 1er bis A vise à assurer la continuité de la prise en charge des patients après la fermeture d'un centre de santé ; l'article 1er quinquies renforce l'interdiction de publicité.

L'article 2 impose un comité dentaire ou ophtalmologique, utile contrepoids au pouvoir du gestionnaire, composé des seuls médecins. Il favorise également l'identification, par les patients, des professionnels qui les prennent en charge. La commission en a clarifié la rédaction et en a renvoyé le détail au décret.

L'article 2 bis prévoit une identification personnelle des professionnels dépendant des centres, étendue par la commission à tous les praticiens.

L'article 4 précise les conséquences d'un constat de manquement d'un centre à ses obligations. Il garantit que les décisions de suspension et de fermeture sont transmises sans délai à la Cnam et aux ordres. Une décision de suspension ou de fermeture peut justifier pendant huit ans le refus d'un nouvel agrément.

Il facilite aussi le recensement des mesures de suspension. La commission a en outre rendu obligatoire la publication de ces refus sur le site de l'ARS, à l'initiative du GEST.

L'article 5 dispose que les gestionnaires des centres de santé font certifier leurs comptes et les transmettent annuellement au directeur général de l'ARS.

L'article 7 précise que les centres de santé ne peuvent demander le paiement des soins encore non dispensés.

L'article 8 précise les sanctions financières à la main du directeur général de l'ARS. Ainsi, un barème gradué sera précisé par voie réglementaire. La commission a relevé le montant des amendes.

Même si elle ne porte pas de vision nouvelle de l'organisation de l'offre de soins de ville, ce que nous regrettons, cette proposition de loi est indispensable. La commission souhaite son adoption, sous réserve d'ajustements. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; M. Alain Duffourg applaudit également.)

M. Joël Guerriau .  - (Applaudissements sur les travées des groupes INDEP et UC) Sur internet, des photos choquantes relatives au scandale Dentexia, en 2016, témoignent du traumatisme des victimes. Ce n'était que le début d'une longue série. Problèmes d'hygiène, surfacturations, escroqueries, mutilations : les victimes de ces centres low cost sont nombreuses. Se soigner moins cher, pourquoi pas, mais avec quelles conséquences ?

La loi du 21 juillet 2009 a supprimé l'obligation d'agrément pour les centres de santé, ce qui a favorisé leur développement. Il s'agissait d'éviter que des Français se rendent à l'étranger pour leurs soins dentaires, ou simplement y renoncent.

Les dérives constatées ne concernent pas tous les centres, qui regroupent de nombreux praticiens et offrent un accès facile et abordable aux patients. Les médecins y bénéficient de conditions d'exercice intéressantes, telles que le salariat, ce qui satisfait les aspirations des nouvelles générations.

Il fallait légiférer. Cette proposition de loi renforce les conditions d'ouverture des centres dentaires ou ophtalmologiques. Elle rétablit l'obligation d'agrément et le soumet à une visite de conformité, qui reste cependant facultative, ainsi qu'à la transmission de divers documents. Elle prévient aussi les conflits d'intérêts et instaure un comité médical, entre autres.

Les mesures proposées encadrent plus strictement l'activité de ces centres et sécurisent la prise en charge des patients. Mais, afin que l'objectif soit atteint, il faudrait que les ARS disposent des moyens d'effectuer des contrôles. Sinon, cette proposition de loi restera symbolique.

En toute situation, le manque de contrôle favorise les dérives. On voit aussi que l'enfer est pavé de bonnes intentions et qu'à trop simplifier la réglementation pour faciliter l'accès aux soins, on expose les patients à d'autres risques. Nous devons mieux mesurer l'impact de nos décisions.

Le groupe INDEP votera ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP ; Mmes Brigitte Devésa et Christine Bonfanti-Dossat applaudissent également.)

Mme Raymonde Poncet Monge .  - (Applaudissements sur les travées du GEST) Pratiques commerciales trompeuses, opacité, manquements à l'hygiène... après Orpea, voici les centres dentaires.

Encore une fois, le but est de réaliser des bénéfices. C'est l'histoire de la rencontre entre le lucratif et la santé, au détriment des plus pauvres. Rappelons la persistance de fortes inégalités de santé bucco-dentaire. Le pourcentage d'adultes à qui il manque des dents varie du simple au double en fonction des catégories socioprofessionnelles : 45 % des ouvriers non qualifiés sont concernés. Cela s'explique par le coût des soins pour des personnes aux revenus modestes, qui ne possèdent pas toujours de complémentaire. Les soins dentaires sont, après les soins ophtalmologiques, les premiers auxquels on renonce.

L'offre à bas prix de certains centres de santé est attractive. Mais les centres de santé ne devraient pas être lucratifs. Ils demeurent l'un des piliers de la lutte contre les déserts médicaux. Ne faisons donc pas d'amalgames. Le rôle médico-social de la majorité d'entre eux est essentiel.

Des garde-fous sont nécessaires contre les abus.

Certaines mesures du texte créent des doublons. De plus, l'agrément avait été supprimé en raison du manque de moyens humains des ARS. L'Inspection générale des affaires sociales (Igas) défend la mobilisation des ressources humaines sur des contrôles ciblés, sinon, l'impact des contrôles restera limité.

Les moyens humains du contrôle de l'État et de l'assurance maladie se sont raréfiés au fil des ans. Nous appelons à leur renfort et promouvons les contrôles inopinés.

Nous regrettons que les maisons de santé pluridisciplinaires (MSP) soient exemptées des obligations créées par cette proposition de loi.

Malgré tout, celle-ci améliore la traçabilité des actes et prévoit de meilleures sanctions financières, ainsi qu'une identification plus facile des professionnels. Les comptes des gestionnaires seront en outre mieux suivis, et les conflits d'intérêts mieux prévenus. Nous saluons l'adoption en commission de notre amendement rendant obligatoire la publication sur le site de l'ARS des sanctions financières infligées aux centres frauduleux.

Nous soutenons la forme associative des centres de santé, parfois détournée dans un but lucratif.

Malgré ces réserves, le GEST votera cette proposition de loi. (Applaudissements sur les travées du GEST et sur quelques travées du groupe SER et du RDPI ; Mme Laurence Cohen applaudit également.)

M. Xavier Iacovelli .  - (Applaudissements sur les travées du RDPI) Cette proposition de loi est attendue et nécessaire. Attendue, car nos concitoyens veulent accéder à des soins abordables, pratiqués dans de bonnes conditions. Les acteurs de la santé la soutiennent largement.

Nécessaire, car, treize ans après la loi HPST, le cadre juridique existant n'a pas empêché les scandales. La simple déclaration s'est substituée à l'autorisation d'exercice, et certains centres de santé se sont engouffrés dans la brèche pour devenir des objets lucratifs.

Les scandales Dentexia et Proxidentaire ont révélé des pratiques gravissimes. Dentexia a fait 2 400 victimes pour 350 plaintes. Les soins étaient réalisés à la va-vite et les victimes, qui se sont parfois endettées pour des soins mal réalisés, sont nombreuses. Certes, ces dérives ne sont pas la norme - les centres mutualistes et municipaux, notamment, jouent pleinement leur rôle.

Mais ces drames nous obligent. Pallions les limites de la loi, dont certains abusent. Je me réjouis que nous débattions de ce texte et j'exprime ma pleine solidarité à son auteure, Fadila Khattabi, à la suite des attaques dont elle a été victime.

Nous devons aller plus loin dans le contrôle des centres de santé. Je salue le travail du rapporteur Sol, qui a renforcé le texte.

Il était indispensable de rétablir l'agrément préalable à l'ouverture d'un centre. Mais le renforcement des contrôles doit s'accompagner d'une amélioration des moyens des ARS. L'agrément sera conditionné à la production des diplômes des professionnels : c'est une avancée.

Cette proposition de loi répond à un problème systémique : la logique du profit aux dépens de la santé des patients doit cesser. Trop de victimes garderont des séquelles ; trop de patients ont été arnaqués.

L'accès à des soins de qualité n'est pas négociable. Il faut revenir à un encadrement plus strict, et mieux contrôler. Le groupe RDPI votera ce texte, fruit d'un travail collectif. (Applaudissements sur les travées du RDPI)

Mme Annie Le Houerou .  - (Applaudissements sur les travées du groupe SER) L'émergence des centres de santé a modifié la pratique de la médecine de ville. Ces structures, qui dispensent des soins de premier et de second recours, sont indispensables pour répondre aux besoins.

Toutefois, les scandales ont révélé les dérives de certains d'entre eux. Nous ne pouvons tolérer que des patients soient mutilés par des charlatans qui n'ont pour objectif que le profit.

Cette proposition de loi était nécessaire. Il y va de la sécurité sanitaire et de la pérennité de notre système de sécurité sociale.

Luttons plus sévèrement contre l'exercice illégal, les surfacturations et autres surtraitements.

Cette proposition de loi s'ajoute à d'autres, qui collent une rustine sur un système de santé à bout de souffle.

La santé n'est pas un produit de consommation. La qualité des soins doit être garantie.

Les centres de santé sans médecin se multiplient, comme dans les Côtes d'Armor. Sur place, des assistants réalisent les examens et l'ophtalmologue pose son diagnostic à distance. Cette pratique profite de la pénurie de professionnels de santé et déshumanise le système.

Face à ces dérives, un encadrement s'impose.

Ce texte rétablit l'agrément préalable à l'ouverture d'un centre et crée un répertoire national des gestionnaires sanctionnés, pour éviter leur nomadisme. L'article 3 impose de transmettre une copie des diplômes et des contrats de travail des praticiens. Enfin, le directeur général de l'ARS pourra refuser l'ouverture d'un nouveau centre à un gestionnaire dont l'un des centres fait déjà l'objet d'une procédure.

Le renforcement des contrôles contribuera à lutter contre les dérives. Mais il faut augmenter les moyens de contrôle des ARS.

La question du caractère lucratif de ces centres se pose. En 2018, le Gouvernement a permis aux personnes morales gestionnaires d'établissements privés de santé de créer des centres de santé ; telle n'est pas notre conception de l'organisation des soins. Cette mesure dénature l'esprit des centres de santé et contribue à la marchandisation de la santé.

Pourquoi limiter les nouvelles mesures d'encadrement aux seuls centres dentaires et ophtalmologiques ? Nous défendrons un ratio minimal d'assistants, pour garantir la qualité des soins.

Notre groupe votera malgré tout ce texte, même si nous souhaitons que les moyens des ARS soient renforcés. (Applaudissements sur les travées du groupe SER et sur quelques travées du groupe CRCE)

Mme Laurence Cohen .  - Je remercie le rapporteur Sol pour la qualité de son travail.

Mon groupe est très attaché aux centres de santé, établissements de proximité essentiels à l'accès aux soins, implantés historiquement dans des quartiers populaires. Depuis dix ans, ils se sont développés dans les zones rurales. Ce sont aussi des structures collectives, où le tiers payant est généralisé, qui sont plus attractives pour les jeunes professionnels.

Pourtant, certains centres de santé sont ébranlés par des scandales. Il existe, d'un côté, des structures à but non lucratif ; de l'autre, des structures qui n'ont de centre de santé que le nom. Ces marchands d'actes se sont implantés plus facilement grâce à la loi HPST. Ces centres low cost, dentaires et ophtalmologiques, sont détenus par des holdings qui font remonter les bénéfices dans des structures commerciales à but lucratif. Selon la Cnam, la patientèle est passée de 400 000 à 800 000 entre 2015 et 2019, le coût des remboursements a bondi de 245 %, à 69 millions d'euros. Parallèlement, les contrôles des ARS ont diminué.

Ce qui était prévisible arriva, avec les affaires Dentaxia et Proxidentaire. Comment ne pas être en colère de voir des patients mutilés ? De trop nombreuses victimes ne peuvent recevoir d'indemnisation. À quand un procès pénal pour dénoncer ces escroqueries qui ont ruiné des vies ?

Cette proposition de loi sera-t-elle suffisante ? Nous en doutons. Le rétablissement de l'agrément préalable est bienvenu, de même que la transmission des diplômes et contrats de travail à l'ARS. Toutefois, l'absence de moyens de contrôle supplémentaires pour les ARS interroge.

Les centres déviants devraient être fermés automatiquement. Nous aurions souhaité plus de fermeté face à des prédateurs capables de détourner la loi.

Nous aurions voulu que le texte interdise aux gestionnaires d'établissements à but lucratif d'ouvrir des centres de santé. Finissons-en avec les structures privées lucratives qui voient la carte Vitale comme une carte bleue !

Cela étant, nous voterons cette proposition de loi, qui est une première étape en attendant une loi plus générale sur les centres de santé. C'est aussi un des moyens de faire reculer les déserts médicaux. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE, ainsi que sur quelques travées du groupe SER et du RDPI)

M. Olivier Henno .  - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) Je salue l'excellent travail du rapporteur. La révélation de scandales a souligné l'urgence à renforcer l'encadrement des centres de santé.

La suppression de l'agrément préalable, en 2009, a entraîné des dérives. Le résultat est accablant : patients mutilés, multiples fraudes... Je n'ai aucun doute sur le bien-fondé de ce texte.

Je regrette au passage la tendance à légiférer par petits bouts sur notre système de santé. Euripide disait que ce n'est pas l'abondance, mais l'excellence qui est richesse... La multiplication des initiatives législatives stresse le système de santé. À quand une grande loi Santé ?

Pour paraphraser Georges Pompidou, arrêtons, dans ce pays, « d'emmerder » les soignants et les médecins.

Beaucoup de nos problèmes résultent de la pénurie de médecins. Malgré la fin du numerus clausus, nous ne formons que 17 % de médecins en plus, faute de locaux et de professeurs de médecine. Résultat : de nombreux jeunes Français vont se former à l'étranger. C'est ubuesque !

L'ordonnance de 2018 n'était pas suffisante. Cette proposition de loi contient de nombreuses avancées telles que le rétablissement de l'agrément et l'obligation de transmettre à l'ARS les contrats de travail des praticiens du centre.

L'article 2 oblige les centres à se doter de comités dentaires ou ophtalmologiques. Ces mesures sont attendues par les assurés et par les professionnels de santé.

Rappelons que les centres de santé associatifs ou municipaux effectuent un travail de qualité. Nous légiférons pour les brebis galeuses, les centres de santé low cost, pour lesquels la qualité et la sécurité des soins ne sont clairement pas prioritaires.

La surconcentration se caractérise par l'apparition d'acteurs financiers à la recherche d'une rentabilité record. Cela vaut aussi pour les maisons de retraite ou les laboratoires.

En cas de fermeture d'un centre de santé, le directeur de l'ARS, celui de la caisse locale d'assurance maladie et le président départemental de l'ordre compétent devront être informés dans les sept jours. C'est une réponse à la circulation incontrôlée des cartes de professionnels de santé. Les professionnels des centres devront être identifiés par un numéro personnel distinct de celui du centre : la traçabilité est une exigence morale.

Le développement de centres à bas prix a participé à la multiplication des fraudes : luttons contre cet exercice illégal de la médecine.

De plus, la fermeture de laboratoires transforme les zones rurales en zones sous-dotées. Or ce sont les plus modestes qui, généralement, fréquentent ces centres.

Notre groupe votera ce texte, parce que la qualité des soins n'est pas négociable. (Applaudissements sur les travées du groupe UC et sur quelques travées du groupe Les Républicains)

Mme Véronique Guillotin .  - (Applaudissements sur les travées du RDSE et sur quelques travées du groupe UC) Ne transigeons pas avec la qualité des soins. En 2009, le législateur a assoupli les règles d'ouverture des centres de santé, avant tout pour faciliter l'accès aux soins, notamment en zone sous-dotée. C'était une alternative à l'offre libérale.

Face à des devis de libéraux dépassant leurs capacités financières, les patients se sont tournés en toute confiance vers ces nouveaux centres de santé. Mais l'ouverture de ces derniers n'était soumise qu'à une simple déclaration et les contrôles n'ont pas suivi.

Il n'en fallait pas plus pour que des gestionnaires peu scrupuleux s'engouffrent dans la brèche, faisant des milliers de victimes : infections, surfacturations, mutilations...

Pour que des scandales tels que Dentexia et Proxidentaire ne se reproduisent plus, renforçons les règles et les procédures de contrôle.

Le groupe RDSE souscrit pleinement à ce texte, notamment parce qu'il rétablit l'autorisation préalable et renforce les pouvoirs des ARS. La déclaration des liens et conflits d'intérêts empêchera également des sociétés privées de servir de tels canaux pour faire sortir l'argent engendré par l'association à but non lucratif. Mais il faudra sans doute augmenter les moyens affectés aux ARS pour le contrôle.

Nous saluons l'interdiction, pour toute personne ayant des liens avec un gestionnaire, de diriger un centre de santé. Jusqu'à présent, le président d'une association pouvait exercer cette fonction à titre bénévole tout en étant rémunéré par une société dont l'association était la seule cliente. Cinq des sept centres dentaires visés par la mission de l'Igas fonctionnaient de la sorte.

L'article 1er bis cible mieux les dérives observées, pour mieux les contrer. Je salue l'interdiction du paiement anticipé des soins - qui s'accompagnait même de crédits dans certains cas.

La proposition de loi renforce également le pouvoir de sanction des ARS, empêchant qu'un gestionnaire fautif puisse ouvrir une nouvelle structure. Le groupe RDSE la votera. (Applaudissements sur les travées du RDSE et sur quelques travées du groupe Les Républicains ; M. Franck Menonville applaudit également.)

Mme Corinne Imbert .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Cette proposition de loi résulte d'un double constat : l'augmentation exponentielle du nombre de centres de santé et, malheureusement, la hausse des dérives.

Nous n'intentons pas de procès au modèle des centres de santé, qui répondent à un besoin, même s'ils restent concentrés dans les centres urbains. En revanche, les pratiques frauduleuses, mises en lumière par le scandale Dentexia, sont intolérables.

Ce texte se focalise sur les activités dentaires et ophtalmologiques. Les dérives sont diverses : non-respect du code du travail, fraude à l'assurance maladie, mise en danger de la sécurité du patient. Elles fragilisent la confiance des patients. Ce sont des entorses au pacte républicain.

La majorité sénatoriale intervient régulièrement sur le sujet. Les professionnels de santé auditionnés sont favorables à ce texte, à cause de l'impact désastreux des scandales sur l'image de leur profession.

La suppression de l'agrément préalable à l'ouverture d'un centre de santé, en 2009, a eu des effets désastreux sur certains patients. Attention à ne pas ouvrir de nouvelles boîtes de Pandore sous couvert de simplification...

J'ai déposé un amendement introduisant une parité entre le nombre d'assistants médicaux et de médecins dans les centres de santé, initialement prévue dans la proposition de loi sur l'amélioration de l'accès aux soins.

Ce texte relativement consensuel ne devrait pas rencontrer d'opposition frontale. Veillons à sa bonne application et à son évaluation. Notre système de santé en sortira grandi. Le groupe Les Républicains le votera. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; Mme Émilienne Poumirol et M. Bernard Jomier applaudissent également.)

M. Jean-Luc Fichet .  - (Applaudissements sur les travées du groupe SER) La multiplication des scandales dans les centres de santé illustre les dérives de notre système : au lieu d'essaimer sur le territoire, les centres de santé se sont concentrés dans les zones urbaines surdotées.

Dans le Finistère, une partie de la population n'a pas accès aux soins dans des conditions satisfaisantes, et les centres de santé n'ont pas permis le rééquilibrage de l'offre de soins. Le groupe SER proposera un amendement pour interdire l'implantation de nouveaux centres dans les zones géographiques où ils sont déjà très nombreux, et où ils ne recherchent que la maximisation des profits.

Certaines dispositions de ce texte vont dans le bon sens, comme l'agrément délivré par le directeur de l'ARS, supprimé par la loi HPST de 2009 afin de faciliter les installations. Nous proposerons d'améliorer le dispositif avec une visite de conformité obligatoire préalable à l'agrément car le contrôle sur pièces est insuffisant.

Le texte n'aborde pas réellement le fléau de la financiarisation du système, qui s'accentue depuis 2017. D'où notre amendement qui soumet l'ensemble des centres de santé à agrément. Mais il faudra augmenter les moyens des ARS. Madame la ministre, il y va de la santé et de la sécurité de nos concitoyens.

Le groupe SER propose aussi de fixer un ratio d'assistants dans les centres dentaires et ophtalmologiques.

Ce texte est utile, mais parcellaire - nous attendons une nouvelle loi de santé. Nous le voterons néanmoins. (Applaudissements sur les travées du groupe SER et du GEST)

Mme Pascale Gruny .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Comme beaucoup de Français, j'ai été révoltée par les scandales récents dans des centres dentaires et ophtalmologiques, avec des dégâts irréversibles pour certains patients, souvent les plus fragiles, et un endettement lourd.

Les fraudes ont accompagné le développement des centres de santé : entorses aux règles déontologiques, surfacturation, soins non pertinents ou inachevés, etc. Certains praticiens mal intentionnés se sont installés dans les grandes villes, dévoyant la vocation des centres. Il est inacceptable de jouer ainsi avec la santé des Français.

Que de temps perdu ! Il y a trois ans et demi, le Gouvernement refusait de soutenir une proposition de loi du groupe Les Républicains restaurant l'agrément. Je me félicite néanmoins de l'arrivée de ce texte, qui prévoit enfin ce rétablissement, ainsi que la communication des contrats de travail à l'ARS et aux ordres professionnels et la mise en place d'un numéro personnel obligatoire pour chaque praticien.

Je salue le travail de la commission des affaires sociales et de son rapporteur, qui ont renforcé l'opérationnalité et la cohérence de la proposition de loi. Je songe au renforcement du contrôle des ARS sur les liens d'intérêts entre organismes gestionnaires et sociétés tierces, au retrait de l'agrément en cas de manquements, à l'alourdissement des sanctions qui deviennent réellement dissuasives et à la transmission du projet de santé aux ordres.

Je voterai donc cette proposition de loi : la régulation de l'installation des centres de santé est un combat que le groupe Les Républicains mène depuis longtemps. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

M. Édouard Courtial .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) L'accès aux soins de proximité est fondamental : la désertification médicale, qui continue à progresser, remet en cause la liberté d'habiter à la ville ou à la campagne. C'est notre identité nationale qui est fragilisée.

Ce texte adopté à l'unanimité par l'Assemblée nationale est une avancée. Les centres dentaires se sont multipliés, dans un opportunisme qui doit désormais être régulé après une série de drames et de scandales : victimes parfois édentées à vie, soins superflus, surfacturations.

L'assouplissement du cadre juridique par la loi HPST, qui substituait à l'agrément une simple déclaration de conformité, a conduit à de telles dérives. L'ordonnance de 2018 a amélioré l'encadrement, avec l'interdiction de la redistribution des bénéfices, l'ouverture à tous les patients et l'interdiction de la publicité.

Je salue le travail du rapporteur et celui de l'Assemblée nationale. Au-delà du rétablissement de l'agrément pour les centres dentaires et ophtalmologiques, il faut saluer la création d'un comité médical ou dentaire et le renforcement du pouvoir de sanction des ARS.

Il faut absolument renforcer le contrôle, dans l'intérêt de l'immense majorité des centres de santé qui font un travail sérieux et pâtissent terriblement de cette mauvaise presse. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

Discussion des articles

AVANT L'ARTICLE 1er

M. le président.  - Amendement n°12, présenté par M. Fichet et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Avant l'article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article L. 6323-1 du code de la santé publique est complété par deux alinéas ainsi rédigés :

« Les centres de santé sont soumis, pour leurs activités de soins autres que dentaires et ophtalmologiques, à une procédure d'agrément définie par décret en Conseil d'État.

« Ceux de ces centres autorisés à dispenser des soins avant l'entrée en vigueur de la présente loi doivent effectuer une demande d'agrément dans des conditions fixées par décret, dans un délai d'un an à compter de l'entrée en vigueur de la présente loi. »

M. Jean-Luc Fichet.  - Cet amendement soumet l'ensemble des centres de santé à l'agrément. En effet, les centres de santé en psychiatrie ou en gynécologie où le spécialiste n'est accessible que par téléconsultation se multiplient aussi. La logique est de faire de l'argent au détriment du juste soin. Il convient de freiner cette financiarisation.

M. Jean Sol, rapporteur.  - Avis défavorable. La loi HPST a supprimé l'agrément pour encourager le développement des centres de santé et parce que la procédure était trop lourde. Il serait irréaliste de le rétablir pour tous les centres : ce serait une tâche colossale à la fois pour les centres de santé et les ARS. Concentrons-nous sur les spécialités sujettes à dérives.

Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée.  - Avis défavorable. Les centres de santé apportent une réponse aux besoins de santé, notamment ceux des plus fragiles. Les dérives constatées concernent surtout les centres dentaires et ophtalmologiques. Pour les autres, il y a une palette de sanctions, jusqu'au déconventionnement et à la fermeture administrative. Enfin, la téléconsultation fait l'objet d'un agrément spécifique.

Mme Émilienne Poumirol.  - Le 1er février 2022, j'ai interpellé le ministre Véran sur un projet de rachat d'un centre de santé de la Croix-Rouge par le groupe Ramsay. Il m'a répondu que l'État n'avait pas à intervenir dans le cadre d'un rachat. Bref, il fallait laisser faire le marché.

La financiarisation touche désormais les soins primaires : les chaînes de cliniques commerciales créent des centres de santé de premier recours. Ramsay expérimente la tarification à la capitation, qui repose sur un forfait en fonction du nombre et de la typologie des patients. Cela incite au tri des patients en fonction de leur rentabilité ; les moins rentables sont dirigés vers l'hôpital public... La santé ne peut devenir une marchandise comme une autre. (Mme Michelle Meunier applaudit.)

L'amendement n°12 n'est pas adopté.

ARTICLE 1er

M. le président.  - Amendement n°6, présenté par Mme Cohen et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

I.  -  Alinéa 4

Après le mot :

dentaire

insérer les mots :

principale en termes de chiffre d'affaires

II.  -  Alinéa 5

Après le mot :

ophtalmologique

insérer les mots :

principale en termes de chiffre d'affaires

Mme Laurence Cohen.  - Évitons les amalgames entre centres de santé. La proposition de loi encadre des dérives, mais elle risque de pénaliser les centres vertueux. D'où notre proposition de restreindre l'agrément aux structures monoprofessionnelles où les activités dentaires et ophtalmologiques sont majoritaires.

M. Jean Sol, rapporteur.  - Avis défavorable. Certes, l'agrément peut être lourd dans le cas d'un centre pluridisciplinaire où l'activité dentaire, par exemple, est limitée à un ou deux fauteuils. Mais traiter différemment deux centres pratiquant une même activité est problématique au regard du principe d'égalité devant la loi. J'ajoute que l'agrément étant préalable, votre amendement est inopérant.

Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée.  - L'activité majoritaire d'un centre de soins ne peut se déterminer avant sa création, puisqu'elle est déterminée en fonction du chiffre d'affaires. En outre, les centres déviants pourraient licencier les praticiens non dentaires ou ophtalmologiques une fois obtenue la dispense d'agrément... Avis défavorable.

L'amendement n°6 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°13, présenté par Mme Le Houerou et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

I.  -  Après l'alinéa 4

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Ils ne peuvent fonctionner sans dentiste physiquement présent. » 

II.  -  Après l'alinéa 5

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Ils ne peuvent fonctionner sans ophtalmologue physiquement présent. »

Mme Annie Le Houerou.  - Les centres au rabais, parfois sans spécialiste physiquement présent, ont pour objectif le profit, au détriment du soin. C'est une déshumanisation de notre système de santé. Cet amendement impose la présence physique d'un dentiste ou d'un ophtalmologue.

M. Jean Sol, rapporteur.  - Avis défavorable. Je partage l'intention, mais de telles situations constituent déjà des fraudes.

Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée.  - Même avis.

L'amendement n°13 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°14, présenté par M. Fichet et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Après l'alinéa 5

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Aucun agrément pour de tels centres de santé ou leurs antennes n'est délivré dans les zones définies au 2° de l'article L. 1434-4. »

M. Jean-Luc Fichet.  - Les centres de santé visés par la proposition de loi sont principalement implantés dans les zones urbaines et surtout dans les zones les plus dotées. C'est particulièrement vrai en Île-de-France. Pour lutter contre les dérives inhérentes à la logique de pur profit, cet amendement interdit les implantations dans les zones urbaines déjà très dotées.

M. Jean Sol, rapporteur.  - Avis défavorable. Cet amendement conduirait à la fermeture de centres existants, qui ne pourraient pas obtenir l'agrément : c'est disproportionné. De plus, l'agrément peut être refusé en cas d'incompatibilité avec le projet régional de santé : c'est un garde-fou.

Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée.  - Je partage l'intention de lutter contre les centres déviants, mais cet amendement crée une rupture d'égalité avec les autres professionnels de santé. De plus, l'article 1er prévoit déjà le refus d'agrément en cas d'incompatibilité avec le projet régional de santé. Avis défavorable.

Mme Laurence Cohen.  - Il y a un problème de discrimination entre les différents exercices : on frappe les centres de santé, mais pas la pratique libérale. Cet amendement est une fausse bonne idée.

L'amendement n°14 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°20, présenté par Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco et MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé, Parigi et Salmon.

I.  -  Alinéa 8

Supprimer cet alinéa.

II.  -  Alinéa 9, première phrase

Supprimer le mot :

provisoire

III.  -  Alinéa 11, première phrase

Supprimer le mot :

définitif

Mme Raymonde Poncet Monge.  - L'agrément pour les centres de soins existants ne deviendra définitif qu'après un an. Voilà qui est trop complexe pour les ARS, qui manquent de moyens pour réaliser les visites de contrôle. Nous saluons l'intégration par la commission des affaires sociales d'une visite inopinée, mais voulons supprimer le caractère provisoire de l'agrément.

M. Jean Sol, rapporteur.  - Avis défavorable. La commission a adhéré à la première proposition de l'Assemblée nationale, celle d'un agrément en deux temps, qui propose une forme de souplesse. Le processus de retrait d'un agrément définitif est en effet très lourd.

Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée.  - Avis défavorable.

L'amendement n°20 n'est pas adopté.

L'article 1er est adopté.

L'article 1er bis A est adopté.

APRÈS L'ARTICLE 1er BIS A

M. le président.  - Amendement n°5, présenté par Mme Cohen et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Après l'article 1er bis A 

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au premier alinéa de l'article L. 6323-1-3 du code de la santé publique, les mots : « ou à but lucratif » sont supprimés.

Mme Laurence Cohen.  - Cette proposition de loi vise à lutter contre les pratiques déviantes des centres de santé obsédés par la rentabilité financière. La santé n'est pas une marchandise. Des structures lucratives se trouvent derrière ces centres : ce sont elles qui sont à l'origine des scandales. Il est temps de mettre fin à ce système. Les personnes morales gestionnaires d'établissements à but lucratif ne devraient pas gérer des centres de santé.

M. le président.  - Amendement identique n°17 rectifié, présenté par Mme Le Houerou et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Mme Annie Le Houerou.  - Cette proposition de loi ne met pas assez en cause les groupes qui exploitent les failles de la tarification et les personnes vulnérables. Nous n'acceptons pas la marchandisation de la santé.

M. le président.  - Amendement identique n°21 rectifié, présenté par Mmes Poncet Monge et M. Vogel.

Mme Raymonde Poncet Monge.  - L'Igas a montré qu'il fallait des garde-fous. La maximisation du profit ne peut guider la gestion des centres de santé : ils ne doivent pas être gérés par des groupes lucratifs, qui trouveront toujours le moyen de contourner la réglementation. Réservons l'ouverture des centres de santé aux seuls organismes publics ou de l'économie sociale et solidaire.

M. Jean Sol, rapporteur.  - Avis défavorable. L'exclusion des cliniques n'est pas pertinente à ce stade. La commission est préoccupée par la place prépondérante du secteur privé dans les centres de santé. Mais tel n'est pas l'objet du texte. Les dérives sont le fait de groupes privés dissimulés derrière des associations paravents. De plus, les groupes de santé ont un enjeu de réputation à préserver.

Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée.  - Les dérives observées concernaient des centres non lucratifs. Votre proposition n'aurait pas d'effet. Avis défavorable.

Les amendements identiques nos5, 17 rectifié et 21 rectifié ne sont pas adoptés.

ARTICLE 1er BIS

M. le président.  - Amendement n°24, présenté par M. Sol.

Après l'alinéa 2

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

...° À la seconde phrase du second alinéa, les mots : « présent article » sont remplacés par les mots : « présent I » ;

L'amendement de coordination rédactionnelle n°24,accepté par le Gouvernement, est adopté.

M. le président.  - Amendement n°22, présenté par Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco et MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé, Parigi et Salmon.

Alinéa 4

Après le mot :

privées

insérer le mot :

lucratives

Mme Raymonde Poncet Monge.  - Cet article, introduit par le groupe écologiste à l'Assemblée nationale, interdit le cumul de la direction d'un centre de santé avec une fonction dirigeante dans la structure gestionnaire. D'où la déclaration des liens et conflits d'intérêts recommandée par l'Igas. Cependant, il faut préciser la rédaction, pour ne pas pénaliser les groupes mutualistes.

M. Jean Sol, rapporteur.  - Avis défavorable. Il faudrait mieux expertiser les effets de bord.

Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée.  - Avis défavorable. Il convient de contrôler tous les liens, y compris avec les structures à but non lucratif : leur objet social est souvent détourné.

L'amendement n°22 n'est pas adopté.

L'article 1er bis, modifié, est adopté.

Les articles 1er quater et 1er quinquies sont successivement adoptés

ARTICLE 2

M. le président.  - Amendement n°1 rectifié, présenté par MM. Guerriau, Chasseing et Decool, Mme Mélot et MM. A. Marc, Lagourgue, Grand, Wattebled, Chatillon, Haye, Moga, Pellevat et Laménie.

Alinéa 4

1° Première phrase

Après le mot :

Les

insérer les mots :

organismes gestionnaires de

2° Deuxième phrase

Remplacer les mots :

, à l'exclusion du représentant légal de son organisme gestionnaire

par les mots :

et du représentant légal de l'organisme gestionnaire

M. Joël Guerriau.  - La création d'un comité médical au niveau de chaque centre pose des difficultés, pour les petits centres comme pour les centres pluridisciplinaires. Ce comité doit être créé au niveau de l'organisme gestionnaire.

M. le président.  - Amendement identique n°2 rectifié, présenté par Mme N. Delattre, MM. Corbisez, Guérini, Cabanel, Gold et Bilhac et Mme M. Carrère.

Mme Maryse Carrère.  - Défendu.

M. le président.  - Amendement identique n°7, présenté par Mme Cohen et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Mme Cathy Apourceau-Poly.  - L'article 2 présente deux difficultés : un comité ophtalmologique ou dentaire est difficile à mettre en place dans les petits centres, et ce comité ne prévoit pas la présence de l'organisme gestionnaire. Une instance de dialogue social sans représentant... Cela n'est pas possible. C'est bien l'organisme gestionnaire qui assume la responsabilité pénale en cas de manquement sanitaire vis-à-vis de l'assurance médicale.

Mme Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales.  - Vous ouvrez la brèche !

L'amendement n°10 n'est pas défendu.

M. le président.  - Amendement identique n°19 rectifié bis, présenté par Mme Estrosi Sassone, MM. D. Laurent, Savary, Calvet, Daubresse, J.B. Blanc, Burgoa et Cardoux, Mmes Chauvin, Belrhiti, Di Folco et Puissat, MM. Savin et Tabarot, Mmes L. Darcos et Micouleau, MM. Belin, Brisson, Frassa, Rapin, Panunzi et Bascher, Mme Dumont, MM. Charon, Bouchet et Meignen, Mme Joseph, M. Cuypers, Mme Richer et MM. Gremillet, B. Fournier et Klinger.

Mme Dominique Estrosi Sassone.  - Il me semble préférable de renforcer le contrôle des dispositifs de droit commun, tels que les obligations ordinales ou les outils de l'assurance maladie. Dans tous les cas, un tel comité doit être mis en place au niveau de l'organisme gestionnaire.

M. le président.  - Amendement identique n°23, présenté par Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco et MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé, Parigi et Salmon.

Mme Raymonde Poncet Monge.  - Dans de petits centres, n'exercent parfois que deux ou trois professionnels. Cet amendement nous a été suggéré par la Mutualité française.

M. Jean Sol, rapporteur.  - Avis défavorable. Ajouter le gestionnaire dans le comité serait contre-productif, car ce dernier doit servir de contrepoids face au gestionnaire. Par ailleurs, les risques de dérive remonteront plus vite si les comités sont organisés au sein même des centres.

Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée.  - Au vu des enjeux de qualité et de sécurité des soins, les comités doivent être au plus proche du terrain. Les salariés doivent aussi y participer au plus près de leur lieu de travail. En revanche, les gestionnaires ne doivent pas en faire partie, afin de conserver l'indépendance des comités.

L'amendement n°19 rectifié bis est retiré.

Mme Catherine Deroche, présidente de la commission.  - L'objectif du comité médical est bien d'éloigner l'organisme gestionnaire ! (Mme Émilienne Poumirol et M. Jean-Luc Fichet acquiescent.) Sinon, ces organismes s'engouffreront dans la brèche. Pour les petits centres, Jean Sol propose que le comité soit élargi à l'ensemble des professionnels de santé.

Les amendements identiques nos2 rectifié, 7, 23 et 1 rectifié sont retirés.

M. le président.  - Amendement n°25, présenté par M. Sol.

Alinéa 4, deuxième phrase

Remplacer le mot :

médicaux

par les mots :

de santé

M. Jean Sol, rapporteur.  - Il serait pertinent d'intégrer les professionnels paramédicaux dans les comités.

Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée.  - Ces professionnels interviennent à part entière dans l'activité des centres et sont concernés par la politique d'amélioration de la qualité, de la pertinence et de la sécurité des soins, ainsi que par la formation continue. Avis favorable.

L'amendement n°25 est adopté.

M. le président.  - Amendement n°26, présenté par M. Sol.

Alinéa 5

Compléter cet alinéa par les mots :

à compter de la prise de rendez-vous

M. Jean Sol, rapporteur.  - Nous voulons renforcer les obligations d'identification des professionnels de santé, en prévoyant une information sur les praticiens dès la prise de rendez-vous.

Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée.  - Avis favorable, car cet amendement sert la bonne information des patients.

L'amendement n°26 est adopté.

M. le président.  - Amendement n°11 rectifié, présenté par Mme Le Houerou et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Compléter cet article par un alinéa et un paragraphe ainsi rédigés :

« ... - Dans les centres de santé ou leurs antennes ayant une activité ophtalmologique, l'emploi d'assistants médicaux au sens de l'article L. 4161-1 est subordonné, pour ces activités, à l'embauche, en nombre identique, de médecins. »

... -  Le chapitre III bis du titre IX du livre III de la quatrième partie du code de la santé publique est complété par un article L. 4393-... ainsi rédigé :

« Art. L. 4393-....  -  Quelle que soit la structure d'exercice, le nombre d'assistants dentaires ne peut excéder le nombre de chirurgiens-dentistes ou de médecins qui la composent. »

Mme Annie Le Houerou.  - Nous voulons instaurer un ratio d'assistants par rapport aux professionnels de santé. Cette disposition était inscrite dans le texte portant amélioration de l'accès aux soins par la confiance aux professionnels de santé, mais a été supprimée par la rapporteure Imbert, car elle avait plus sa place dans le présent texte.

M. le président.  - Amendement n°3, présenté par Mme Imbert.

Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :

« ....  -  Dans les centres de santé et leurs antennes ayant une activité ophtalmologique, le nombre d'assistants médicaux ne peut excéder le nombre de médecins. »

Mme Corinne Imbert.  - Nous voulons un ratio de 1 pour 1 entre assistants et médecins. Ainsi nous éviterons des dérives. Cette proposition de loi est le bon véhicule.

M. Jean Sol, rapporteur.  - Par souci de clarté, retrait de l'amendement n°11 rectifié au profit de l'amendement n°3 rectifié bis de Mme Imbert.

Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée.  - Retrait de l'amendement n°11 rectifié au profit de l'amendement n°3 rectifié bis, auquel je suis favorable, car il luttera efficacement contre des dérives potentielles.

L'amendement n°11 rectifié est retiré.

L'amendement n°3 rectifié bis est adopté.

L'article 2, modifié, est adopté.

APRÈS L'ARTICLE 2

M. le président.  - Amendement n°9, présenté par Mme Cohen et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Après l'article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le i du II de l'article L. 162-31-1 du code de la sécurité sociale est abrogé.

Mme Laurence Cohen.  - Une dérogation au principe du salariat pour les professionnels des centres de santé avait été adoptée sous forme d'expérimentation dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2019. Ce statut de salarié est l'un des principes fondateurs des centres. Rien n'interdit à des professionnels libéraux d'exercer de manière mixte, ce qui satisfait toutes les parties, depuis toujours. Proposer un exercice libéral en centre de santé témoigne d'une méconnaissance du fonctionnement de ces centres, dont il faut préserver les valeurs.

M. Jean Sol, rapporteur.  - Avis défavorable. Vous abrogez une disposition introduite en 2019 à titre expérimental, pour une durée de cinq ans, dont les effets n'ont pas encore été évalués.

Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée.  - Laissons l'expérimentation arriver à son terme. Il faut l'évaluer avant toute chose. Avis défavorable.

Mme Laurence Cohen.  - Pour la loi Rist, vous n'avez pas les mêmes exigences en matière d'expérimentations... Je me méfie de ces positionnements à géométrie variable, et ne comprends pas le rejet de notre amendement : les centres de santé fonctionnent avec des professionnels qui exercent en tant que salariés à l'intérieur des centres et en libéral à l'extérieur. Vous apportez de la confusion avec une perméabilité qui n'a pas de raison d'être.

L'amendement n°9 n'est pas adopté.

L'article 2 bis est adopté.

ARTICLE 4

M. le président.  - Amendement n°16, présenté par M. Fichet et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Alinéa 5

Compléter cet alinéa par les mots :

sur tout le territoire national

M. Jean-Luc Fichet.  - Nous voulons lutter contre le nomadisme des fraudeurs et des structures commerciales déviantes. Le refus d'ouverture d'un nouveau centre doit avoir une portée nationale.

M. Jean Sol, rapporteur.  - L'amendement est satisfait par l'article, qui prévoit la création d'un répertoire national, accessible aux services intéressés. Demande de retrait.

Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée.  - Vous précisez le périmètre national de cet article, qui crée également un répertoire national recensant l'ensemble des mesures de suspension et de fermeture des centres de santé sur le territoire. Avis favorable.

L'amendement n°16 est adopté.

L'article 4, modifié, est adopté.

L'article 5 est adopté.

L'article 7 est adopté.

ARTICLE 8

M. le président.  - Amendement n°18, présenté par M. Iacovelli et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants.

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

....  -  Au dernier alinéa de l'article L. 162-32-3 du code de la sécurité sociale, le mot : « deux » est remplacé par le mot : « trois ».

M. Xavier Iacovelli.  - Pour renforcer la protection des patients et se prémunir contre les pratiques déviantes, nous rétablissons la base légale pour le déconventionnement en urgence des centres de santé en cas de dérives.

M. Jean Sol, rapporteur.  - Cet amendement corrige une malfaçon légistique qui a supprimé la base légale du déconventionnement en urgence des centres de santé. Avis favorable.

Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée.  - Cet amendement limite le préjudice subi par l'assurance maladie en cas de faute grave d'un centre de santé. Avis favorable.

L'amendement n°18 est adopté.

L'article 8, modifié, est adopté.

La proposition de loi, modifiée, est adoptée.

M. le président.  - À l'unanimité. (Applaudissements sur les travées du RDPI et sur plusieurs travées des groupes Les Républicains et SER)

Amélioration de l'accès aux soins (Procédure accélérée)

M. le président.  - L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, portant amélioration de l'accès aux soins par la confiance aux professionnels de santé.

Discussion générale

Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée chargée de l'organisation territoriale et des professions de santé .  - Le 6 janvier, le Président de la République a adressé ses voeux aux acteurs de la santé en invitant à réussir les changements qui s'imposent.

Avec François Braun, nous nous sommes adressés fin janvier aux forces vives pour détailler les jalons de cette refondation. La présente proposition de loi traduit ces paroles en actes. Elle vise à décloisonner notre système de santé et témoigne du besoin de favoriser les coopérations entre professionnels de santé, sans dégrader la qualité des soins ni créer une médecine à deux vitesses, de libérer du temps médical et de faciliter l'accès à la santé.

Alors que les médecins généralistes manifestent, il ne s'agit pas de minorer leur rôle essentiel. Par leur expertise, ils sont au centre du parcours de soins.

La pandémie de covid-19 a bouleversé notre système de santé. Nous avons inventé des solutions, bâti des solidarités nouvelles, comme l'extension des compétences vaccinales aux professionnels de proximité, clé de la réussite de la campagne de vaccination. Ce progrès a été entériné dans la loi de financement de la sécurité sociale (LFSS) pour 2023, en élargissant la prescription de vaccins.

Les crises sont des catalyseurs de changement. La LFSS pour 2023 comprend de nombreuses autres mesures pour l'accès aux soins, souvent d'origine parlementaire, comme la simplification des aides à l'installation, l'établissement de certificats de décès par les infirmiers ou les consultations avancées en zones sous-denses. Les sages-femmes pourront pratiquer des IVG instrumentales sous certaines conditions.

Faisons bouger les lignes ; favorisons la confiance et la collaboration renforcée entre tous les professionnels pour répondre aux besoins et lutter contre les inégalités d'accès aux soins.

Il faut nommer les choses : nous sommes confrontés à une crise de l'accès à la santé. Pour les médecins, nous avons supprimé le numerus clausus, mais les effets ne seront pas immédiats. Avec les régions, nous avons créé plus de 5 000 places supplémentaires dans les instituts de formation en soins infirmiers et plus de 3 000 en instituts de formation d'aides-soignants. Nous comptons déjà près de 2 000 infirmiers en pratique avancée et 4 000 assistants médicaux ; nous en visons 10 000 d'ici 2024.

Nous devons mobiliser tous les leviers pour mieux partager les tâches et gagner du temps médical. Cela passe notamment par des compétences élargies pour chaque acteur de santé, dans le rôle qui est le sien, et par la rénovation de l'organisation du parcours de soins autour du médecin traitant. Nous nous inscrivons dans une logique partenariale entre les soignants, de confiance entre les pouvoirs publics et les professionnels, et de coopération entre la ville et l'hôpital, dans un esprit de dialogue et de responsabilités partagées. C'est aussi un enjeu d'attractivité et de fidélisation.

Avec cette proposition de loi, il s'agit à la fois de renforcer l'accès aux soins et de donner de nouvelles perspectives professionnelles aux soignants.

Le débat parlementaire a beaucoup enrichi le texte. Ainsi de la possibilité pour les patients souffrant de diabète de se voir prescrire des orthèses plantaires par les pédicures podologues, de la possibilité pour les pharmaciens de renouveler les traitements chroniques lorsque le médecin prescripteur n'est pas disponible, ou encore de la reconnaissance des assistants de régulation médicale comme professionnels de santé.

Je salue ces élargissements. Je suis convaincue que le chemin que nous empruntons est le bon.

Je salue le travail effectué en commission, madame la rapporteure.

Je suis sensible à la question du statut des infirmiers anesthésistes diplômés d'État (Iade), des infirmiers de bloc opératoire (Ibode) et des infirmiers puériculteurs (Ipuer), dont les professions sont aussi spécifiques que celle d'infirmier en pratique avancée (IPA). Chacune a besoin d'un cadre stabilisé, après concertations.

Le rapport Igas-Igesr propose de maintenir la notion de spécialité infirmière, ancienne et qui reste structurante dans l'identité de ces professionnels. Votre commission a choisi de ne pas distinguer IPA praticiens et spécialisés. Le Gouvernement soutiendra ce choix. Iade, Ibode, Ipuer, tous ont une page à écrire !

Je suis aussi attentive aux craintes exprimées par les médecins généralistes, qui manifestent aujourd'hui. Il n'est pas question de mettre de côté le médecin généraliste, bien au contraire : nous lui confions un rôle pivot. Les généralistes sont le visage familier de notre système de santé, comme l'a rappelé le Président de la République. Ils voient en moyenne un million de patients par jour, mais six millions de Français n'ont pas de médecin traitant : il nous faut trouver les voies pour concilier le principe de liberté de la médecine libérale avec la nécessité d'un engagement territorial.

Cela passe sans doute par une modulation de la rémunération qui repose sur des objectifs de santé publique. Quand un médecin s'engage pour créer de la coopération à l'échelle de son territoire, il doit être valorisé.

La solution ne passe pas par la contrainte mais par la coopération et l'exercice coordonné. Certains médecins s'engagent déjà au service de leurs patients et de leur territoire - ils doivent être récompensés financièrement. Concrètement, il s'agit d'accepter des patients qui ne trouvent pas de médecin traitant, d'assurer des soins non programmés, de limiter le reste à charge, de proposer des parcours de prise en charge pluriprofessionnels. Nous souhaitons donner plus de moyens aux généralistes, mais au bon endroit !

J'entends les craintes, mais je veux aussi appeler au sang-froid et dénoncer une certaine instrumentalisation politique.

Les mesures d'accès direct ne sont en aucun cas généralisées, et les IPA ne sont pas une menace pour les médecins. IPA, assistants médicaux et bucco-dentaires, kinésithérapeutes et orthophonistes, tous ces professionnels feront gagner des heures de temps médical aux médecins.

Pour convaincre sans contraindre et transformer sans abîmer, nous devons nous projeter dans une vision systémique de la réponse aux besoins de santé, où chacun sera, à sa juste place, le plus utile. Je sais pouvoir compter sur le Sénat dans ce travail collectif, au service de tous. (Applaudissements sur les travées du RDPI)

Mme Corinne Imbert, rapporteure de la commission des affaires sociales .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Lors du dernier PLFSS, la commission des affaires sociales appelait de ses voeux une loi Santé, pour un débat serein hors du cadre contraint des textes financiers.

Madame la ministre, nous nous sommes mal compris : le Gouvernement a profité de l'examen d'un texte déjà sensible à l'Assemblée nationale pour y insérer des mesures nouvelles, sans étude d'impact ni cohérence d'ensemble, puis il a accéléré son inscription à l'ordre du jour du Sénat. La méthode employée a un effet délétère : loin de favoriser la confiance, ce texte a opposé les professions de santé entre elles. Très attendu des paramédicaux dont il valorise les compétences, il suscite au contraire l'inquiétude des médecins, qui redoutent une désorganisation du parcours de soins et une dégradation de la qualité de la prise en charge.

Or l'examen intervient concomitamment à la négociation de la prochaine convention médicale : il eût été difficile de choisir un moment moins opportun !

Sur l'amélioration de l'accès aux soins, ne nous berçons pas de chimères : ce texte apporte des réponses parcellaires à un problème structurel, et la démographie médicale ne s'améliorera pas de sitôt.

Malgré ces vents contraires, la commission a retenu une approche équilibrée, visant à fluidifier le parcours des patients, à valoriser les compétences des professionnels, à garantir la sécurité des soins et à conserver le rôle central du médecin dans la coordination et le suivi.

Le premier volet du texte, le plus conflictuel, porte sur l'accès direct aux orthophonistes, aux masseurs-kinésithérapeutes et aux IPA.

L'article 1er autorise les IPA à prescrire. Ils seront accessibles directement s'ils exercent à l'hôpital, en établissement médico-social ou au sein d'une structure d'exercice coordonné -  l'information du médecin traitant étant assurée. Les IPA bénéficient d'une formation de deux ans supplémentaires et de compétences élargies dans cinq domaines reconnus. Ils apportent un appui précieux. Pourtant, leur déploiement est limité : 1 700 IPA au total l'année dernière, 200 en libéral. En cause, le nombre insuffisant de patients confiés par les médecins.

Compte tenu de ces effectifs, les dispositions du texte ne résoudront rien à court terme, mais renforceront l'attractivité et la reconnaissance de la pratique avancée. La commission les a donc adoptées, en veillant à ce que l'accès direct s'exerce en coordination avec les autres professionnels de santé.

L'article 1er créait deux catégories d'IPA, spécialisés et praticiens : la commission les a supprimées parce qu'elles ne sont pas adaptées au modèle français, et que les professions concernées y sont opposées.

Les articles 2 et 3 prévoient un accès direct aux masseurs-kinésithérapeutes et aux orthophonistes. Là encore, la commission l'a réservé aux structures les mieux intégrées.

Un second volet vise à étendre les compétences des professionnels de santé. L'article 1er bis autorise les infirmiers à prendre en charge le traitement de plaies. L'article 2 bis autorise les masseurs-kinésithérapeutes à prescrire une activité physique adaptée -  la commission l'a accepté, en prévoyant toutefois un avis de la HAS.

L'article 4 confie de nouvelles compétences aux assistants dentaires de niveau II : la commission y a donné un avis favorable, à condition qu'ils valident une formation spécifique. À l'article 4 bis, la commission a prévu que le ratio d'un assistant pour un chirurgien-dentiste s'appliquera au regard du nombre de chirurgiens-dentistes effectivement présents.

La commission a adopté l'article 4 septies, qui élargit les compétences des pédicures podologues ; l'article 4 octies, qui autorise les opticiens à adapter la prescription de verres correcteurs ; l'article 4 nonies, qui concerne les professionnels de l'appareillage. Enfin, l'article 4 terdecies qui autorise, à titre expérimental, les pharmaciens biologistes à pratiquer des prélèvements cervico-vaginaux pour le dépistage du cancer du col de l'utérus. Je souhaite une reconnaissance législative de cette compétence.

Le troisième volet du texte concerne l'organisation du parcours de soins.

L'article 4 ter permet aux sages-femmes, aux chirurgiens-dentistes et aux infirmiers de concourir à la permanence des soins ambulatoire. La commission a toutefois supprimé la notion de responsabilité collective, imprécise, de même que l'article 4 quater relatif à l'engagement territorial des médecins, qu'elle a jugé inutile et qui interférait avec les négociations en cours.

Pour rendre du temps médical aux médecins, elle a adopté un nouvel article 3 bis visant à pénaliser les rendez-vous médicaux non honorés, en prévoyant une indemnisation à la charge du patient pour responsabiliser les assurés.

L'article 4 sexies modifie les conditions de qualification permettant l'exercice de la profession de préparateur en pharmacie. La commission l'a voté, de même que l'article 4 decies qui reconnaît les assistants de régulation médicale comme professionnels de santé.

La commission a porté un regard pragmatique sur le texte, retenant les mesures attendues sur le terrain mais prévenant toute désorganisation du système de santé en apportant un meilleur encadrement. Elle vous invite à adopter le texte issu de ses travaux. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC)

Mme Mélanie Vogel .  - (Applaudissements sur les travées du GEST) Notre système de santé a dépassé le stade de la crise. Il s'effondre, à la suite d'une suite de décisions politiques à courte vue, inspirées par l'idéologie selon laquelle les services publics doivent coûter le moins possible et que le marché est par nature plus efficace.

Les conditions de travail se sont dégradées pour les professionnels ; tant renoncent, si peu arrivent, ceux qui restent sont épuisés, en proie à un sentiment d'impuissance face aux conséquences, pour eux et pour les patients, des politiques menées jusqu'ici...

Dans ce contexte, il est vital de revaloriser ces métiers.

Ce texte ouvre un accès direct aux masseurs-kinésithérapeutes, aux IPA et aux orthophonistes, dans le cadre de l'exercice coordonné, à l'heure où six millions de Français n'ont pas accès à un médecin traitant. Situation qui ne va pas s'améliorer, à court ou moyen terme. Le GEST salue la montée en responsabilité de ces professionnels, mais s'étonne qu'elle ne soit pas accompagnée d'une revalorisation salariale. Remplacer des infirmières sous-payées par des infirmières sous-payées avec plus de responsabilités, ce n'est pas résoudre le problème.

La clé, ce sont les effectifs. Il faut investir pour construire un système de santé basé sur les besoins de la population ; faute de quoi, des textes comme celui-ci ne seront que des rustines sur un navire qui coule...

Nous regrettons aussi le dispositif de sanction pour les rendez-vous non honorés, adopté sans encadrement légal par la commission. Oui, les rendez-vous non honorés posent un vrai problème, mais soit on crée un dispositif vraiment juste, sans sanction financière disproportionnée, soit on expose les patients les plus précaires à une double peine - car c'est parmi eux que l'on trouve le plus de rendez-vous non honorés. (Mme Catherine Deroche le conteste.) Il y avait d'autres solutions que la sanction financière.

Un mot sur l'intitulé du texte : les problèmes d'accès aux soins ont peu à voir avec la confiance dans les professionnels de santé, beaucoup avec le désinvestissement public dans notre système de santé. Cela devrait pourtant être notre cap.

Le GEST s'abstiendra sur ce texte, au vu de son équilibre général. (Applaudissements sur les travées du GEST et sur plusieurs travées du groupe SER)

M. Xavier Iacovelli .  - (Applaudissements sur les travées du RDPI) Chaque année, 1,6 million de Français renoncent à des soins ; 11 % des Français de plus de 17 ans n'ont pas de médecin traitant, dont 600 000 souffrent d'une affection de longue durée (ALD). En face, des professionnels de santé aux compétences variées, qui peuvent collaborer utilement ou, comme les IPA, accéder à des formations plus complètes.

Plusieurs mesures ont déjà été prises pour renforcer l'accès aux soins : 19 milliards d'euros ont été investis avec le Ségur, le numerus clausus a été supprimé, le nombre de places ouvertes aux infirmiers a été augmenté, le cumul emploi-retraite assoupli, le déploiement des assistants médicaux accéléré. La vaccination a été ouverte à d'autres professionnels de santé. En trois ans, le budget de la santé a augmenté de 50 milliards d'euros.

Il faut désormais aller plus loin, et les conseils nationaux de la refondation (CNR) territoriaux pourront formuler d'utiles propositions.

Ce texte est une étape supplémentaire. Le médecin traitant doit rester le maillon central, mais certains soins peuvent être délégués. Il s'agit, comme le dit le titre, de faire confiance aux compétences de nos professionnels de santé, pas de les substituer au médecin.

Résorber les déserts médicaux, améliorer la prise en charge, valoriser les compétences, voilà certains des objectifs de ce texte qui ne réglera pas tout, mais qui contribue à la démarche de refondation.

Pour simplifier le parcours de soins, il faut aménager l'accès direct, c'est-à-dire faciliter la consultation en première intention d'un professionnel de santé autre que le médecin traitant.

La commission est parvenue à un équilibre. L'article 4 ter organise la permanence des soins sur chaque territoire, grâce à la collaboration entre les professionnels de santé : il faudra y associer les communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS), ainsi que les ordres des professions concernées.

Nous proposerons de rétablir par amendement le principe de responsabilité collective pour la permanence des soins.

Il est important de laisser aux partenaires conventionnels la définition de l'engagement territorial des médecins. Il convient de valoriser les professionnels qui s'engagent dans la coopération, avec des pratiques tarifaires maîtrisées.

Enfin, on compte plus de 27 millions de rendez-vous non honorés chaque année. C'est une perte de temps médical précieux. Nous proposons une pénalité de 1 euro symbolique en cas de plusieurs rendez-vous non honorés : cela nous semble préférable à la pénalité prévue par la commission.

Notre système de santé est à bout de souffle, mais il y a aussi de belles expériences, de beaux parcours. Poursuivons la dynamique enclenchée pour réagir face à la crise de vocations et coconstruire ensemble le système de soins de demain. Dans cette perspective, le RDPI votera ce texte. (Applaudissements sur les travées du RDPI)

M. Bernard Jomier .  - (Applaudissements sur les travées du groupe SER) Ce texte-là, à ce moment-là, est une faute. Le président Larcher avait souhaité que ce texte nous soit soumis à l'issue des négociations conventionnelles en cours, mais le Gouvernement nous refuse ce report de deux mois. Votre inaptitude à respecter la démocratie sociale est devenue une habitude. Résultat, la rupture se creuse avec le monde de la santé, qui a besoin d'écoute et de compromis.

Il y a deux semaines, vous repoussiez le texte sur les soignants à l'hôpital, soutenu par ces derniers et largement voté par le Sénat. Aujourd'hui, vous cristallisez les oppositions entre professions de santé, là où il faudrait de la coopération...

Après avoir jeté tant d'huile sur le feu et si peu dans les rouages, comment espérer s'accorder sur de nouvelles répartitions entre professionnels de santé ? L'Ondam hospitalier à 4 %, avec une inflation à 6 %, était un message négatif. Pour l'Ondam de ville, c'est 2,5 %... Comment voulez-vous avoir du grain à moudre dans les discussions ?

Aux médecins, aux kinésithérapeutes, vous proposez des revalorisations en centimes. Tous les syndicats ont claqué la porte des négociations. La recherche de l'accord avec les syndicats réformistes n'est décidément pas la ligne du Gouvernement...

Le directeur de la Cnam préfère proposer aux soignants de maintenir leurs revenus en multipliant les actes ! Travailler plus pour ne pas gagner plus... Les infirmières réduiront-elles le temps des toilettes, les kinésithérapeutes devront-ils passer moins de temps avec leurs patients, les médecins écourter les consultations ? Dans ce contexte dégradé, la voie parlementaire pour imposer de nouveaux partages de tâches est vouée à l'échec - non au Parlement, mais sur le terrain.

Oui, un nouveau partage de tâches est nécessaire, car le système de santé ne reconnaît pas assez les différentes professions qui le composent. Combien d'amendements de mon groupe pour valoriser la profession infirmière, toujours écartés par le Gouvernement !

Réformer les soins de ville implique l'adhésion des professionnels concernés ; beaucoup y sont prêts, laissez-leur du temps. Je salue les améliorations apportées en commission, mais mieux légiférer, c'est aussi savoir quand on ne doit pas légiférer. Le groupe SER s'abstiendra. (Applaudissements sur les travées du groupe SER ; Mme Cathy Apourceau-Poly applaudit également.)

Mme Laurence Cohen .  - (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE) Notre rapporteur a tenté de repêcher un texte bien insatisfaisant. La deuxième saison « Rist » n'est pas plus convaincante que la première, avec un projet de loi déguisé en proposition de loi, avec plusieurs amendements du Gouvernement adoptés sur des sujets majeurs, sans étude d'impact ni concertation.

C'est un texte fourre-tout, sans vision d'ensemble, comme ceux qui se sont succédé depuis 2017. Près d'un quart des Français vivent dans un désert médical, treize départements n'ont pas de gynécologue... La réforme du numerus clausus n'aura aucun effet sur la pénurie de professionnels. Vous transformez la gestion de la pénurie en un discours sur la libération de temps médical et l'articulation des professions de santé.

Oui à la revalorisation et la reconnaissance des paramédicaux, mais pas uniquement pour pallier le manque de médecins !

Vous devriez anticiper, plutôt que réagir au coup par coup. Le PLFSS pour 2022 a prévu une expérimentation de la primoprescription par les IPA, le suivant, l'expérimentation de l'accès direct. Vous nous proposez dès aujourd'hui leur généralisation. Pourquoi une telle accélération ? Reconnaissez que les restrictions budgétaires ont amené notre système de santé au bord de la rupture. À quand une grande loi Santé, qui prenne en compte les aspirations des professionnels et des patients ?

Sans même attendre la fin de la négociation conventionnelle, vous soumettez cette proposition de loi, provoquant l'arrêt des discussions et l'opposition des différentes professions entre elles. L'accès direct que vous envisagez est restreint à l'exercice coordonné : c'est méconnaître nos territoires. De fait, quasiment aucun orthophoniste ne sera concerné !

Les Français auront toujours autant de mal à se faire soigner, et ce n'est pas l'article 4 ter sur la permanence des soins qui réglera le problème, puisque vous ne revenez pas sur l'obligation de garde.

Il faut pourtant des solutions immédiates pour les six millions de Français sans médecin généraliste. Commencez par un investissement massif pour améliorer l'attractivité des carrières et la capacité de formation des universités. Réorganisez le système de santé en partant des besoins des patients, confiez aux autres professionnels de santé l'orientation vers un médecin traitant, comme dans les centres de santé.

Le groupe CRCE s'abstiendra sur cette proposition de loi, nouvelle occasion manquée d'améliorer l'accès aux soins. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE et sur quelques travées du groupe SER)

Mme Élisabeth Doineau .  - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) La première loi Rist, hospitalo-centrée, avait déjà provoqué une avalanche de réactions ; deux ans plus tard, ce texte sur la médecine de ville ne suscite pas plus d'adhésion, et les médecins sont dans la rue.

Est-il bien judicieux de réorganiser le système d'accès aux soins en pleine négociation conventionnelle ?

M. Guillaume Chevrollier.  - Non !

Mme Élisabeth Doineau.  - De jeter de l'huile sur le feu, en pleine négociation tarifaire avec la Cnam ?

Mme Émilienne Poumirol.  - Non !

Mme Élisabeth Doineau.  - Pourquoi, également, passer par deux textes qui désolidarisent l'hôpital de la médecine de ville ? Pourquoi pas un seul texte, cohérent et enrichi d'une étude d'impact ?

La priorité, c'est un accès à des soins de qualité pour tous. Je comprends l'exaspération des uns et des autres, mais comment y répondre sans l'adhésion des professionnels ? Il faut au contraire rétablir la confiance ; or elle ne se décrète pas, elle se construit. Les médecins n'en peuvent plus : mesures de régulation, permanence de soins obligatoire, installation en zone sous-dense, dixième année de médecine générale...

Maltraiter les soignants, c'est maltraiter les patients. Les propositions de loi traversent le temps législatif comme les ballons chinois traversent le ciel américain... Combien de médecins, d'étudiants en médecine m'ont exprimé leur désarroi, leur désintérêt pour la médecine générale !

Fin 2022, le Comité de liaison des institutions ordinales (Clio) indiquait que les ordres s'étaient accordés à agir sur la pluridisciplinarité, la coordination des soins, la valorisation des compétences et la lisibilité du système. C'est aussi le sens de cette proposition de loi, qui mérite d'être votée.

Les professionnels concernés ont acquis de nouvelles compétences, qu'il s'agisse des IPA, des Ibode, des Iade, des infirmières puéricultrices - comme les paramédicaux devenus des éléments importants d'équipes pluridisciplinaires. Il faut en tenir compte.

Je fais mienne l'approche équilibrée de la rapporteure sur ce texte. Oui à l'accès direct aux IPA, masseurs-kinésithérapeutes et orthophonistes. Facilitons l'effort de la profession d'IPA, trop peu nombreuse en libéral.

L'article 2 concerne les masseurs-kinésithérapeutes. Le nombre de séances accessibles sans diagnostic médical préalable a fluctué au gré des textes ; est-ce vraiment au législateur de s'en occuper ?

Quant aux rendez-vous non honorés, il fallait agir. La convention médicale déterminera l'indemnisation du médecin à qui le patient fait faux bond. Il convient de responsabiliser les assurés. La CPAM pourra ainsi réduire à concurrence les remboursements ultérieurs versés aux patients.

Facilitons aussi l'accès à l'orthophoniste, surtout quand l'enfant a été examiné par la PMI au préalable. Sur tous ces articles, je rejoins la position de la rapporteure.

Ce texte a créé des tensions entre professions de santé. C'est regrettable, alors que nous avons besoin de tous. Jean-François Deniau disait : « Que faire dans la confusion et l'inquiétude ? C'est simple, dire ce qu'on croit ». Je crois qu'il faut attendre le CNR Santé et la conclusion des douze travaux du ministre de la santé... (Applaudissements sur les travées du groupe UC)

Mme Véronique Guillotin .  - Pendant la crise covid, les professionnels ont su travailler ensemble et relever des défis incroyables. Nous avions promis d'en tirer les leçons, en laissant le terrain s'organiser.

Mais ce texte prend une autre tournure : nous l'examinons alors que les conclusions du CNR ne sont pas encore connues. La concorde se transforme en défiance entre professionnels, les médecins sont réticents, les paramédicaux attendent les mesures. Tous s'accordent à dire que le partage des tâches est une bonne chose, mais l'accès direct inquiète. Ce serait une erreur de réduire cela à une réaction corporatiste.

L'accès direct ne peut se faire que dans le cadre d?un exercice coordonné autour du rôle pivot des médecins traitants. Pour les IPA, il aurait fallu poursuivre l'expérimentation avant de légiférer à nouveau.

La rapporteure a travaillé de manière pragmatique et équilibrée. La suppression de la distinction entre IPA praticiens et IPA spécialisés va dans le bon sens, comme la limitation de l'accès direct aux masseurs-kinésithérapeutes à cinq séances ou la création d'un assistant dentaire de niveau II. Je partage l'ambition de réduire le nombre de rendez-vous non honorés, mais je doute du caractère opérationnel de l'amendement adopté en commission.

La crise de notre système de soins nécessite une réforme profonde, mais notre groupe reste vigilant face à toute forme de désorganisation. Le médecin doit rester le pivot. Gardons-nous de l'inflation de propositions de loi sans vision globale.

L'urgence est de former des médecins, de rendre les professions de santé attractives, de donner envie aux jeunes de s'installer, de répondre à la crise identitaire de la médecine générale, et pour cela il faut restaurer la confiance. Espérons, en cette Saint-Valentin, que nous parviendrons à réunir médicaux et paramédicaux autour d'un projet commun ; nous devons le faire avec les professionnels et non contre eux. (Applaudissements sur les travées du RDSE et sur quelques travées du groupe UC ; Mmes Émilienne Poumirol et Chantal Deseyne applaudissent également.)

Mme Catherine Deroche .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) La question de la répartition des compétences entre professionnels de santé était déjà posée par le professeur Yvon Berland - c'était il y a vingt ans. Notre ancienne collègue Catherine Génisson appelait dès 2014 à un nouveau partage des tâches.

Il y a donc une voie à explorer pour notre pays, moins engagé que d'autres dans les pratiques avancées, peut-être à cause de l'expérience des officiers de santé, symbolisée par Charles Bovary opérant de son pied bot l'infortuné Hippolyte... L'évolution est nécessaire, car le temps médical est de plus en plus rare.

Cet objectif est consensuel, nous le voyons sur le terrain. Mais la mise en oeuvre l'est moins. Les IPA, statut créé en 2016, ont connu un développement limité. Les expérimentations votées n'ont pas été jugées suffisamment prioritaires pour faire l'objet d'un décret d'application.

Au sein du Clio, les propositions ont encouragé la défiance. Ce texte arrive en parallèle de négociations qu'ont quittées les syndicats de médecins le 20 janvier. Le contexte est tendu et chaque partie prête à l'autre les intentions les plus sombres.

La méthode n'est pas adaptée, notamment lorsqu'on pérennise une expérimentation à peine votée dans le PLFSS, ou qu'on procède à des ajustements pointillistes en matière réglementaire... Est-ce à la loi d'entrer dans un tel niveau de détail ? Le Parlement doit-il intervenir dans des négociations professionnelles ? Je ne le crois pas. La commission a donc supprimé un certain nombre de dispositions, pour ne pas agiter le chiffon rouge.

Nous aurions préféré le report de ce texte, mais cela n'a pas été possible. Que le Sénat garde le cap : retrouver une forme de confiance entre les professionnels, dans l'intérêt des patients. Que le Gouvernement privilégie le processus conventionnel, et qu'il propose un texte ensuite. Malgré ces réserves, nous voterons le texte qui doit beaucoup au travail de la rapporteure, laquelle a tenté un délicat exercice d'équilibriste. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

M. Daniel Chasseing .  - (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP ; Mme Patricia Schillinger applaudit également.) Le titre est ambitieux. Oui, l'accès aux soins doit être renforcé, oui, il faut du temps médical, oui il faut renforcer l'attractivité des métiers du soin ; mais les moyens pour y parvenir ne font pas l'unanimité. Cette proposition de loi a largement divisé les professionnels de santé. Je remercie Mme Imbert d'avoir tenté de l'améliorer.

Réorganisation ne doit pas rimer avec désorganisation. Les IPA peuvent être un appui précieux aux équipes de soin, pour dégager du temps médical ; leurs compétences sont une chance pour tous, ils sont formés pour la prise en charge de pathologies chroniques stabilisées, mais ne remplaceront pas le médecin qui a la compétence du diagnostic.

Les travaux sur les IPA dans d'autres pays ne montrent une efficacité que s'il y a une collaboration réelle avec le médecin traitant.

Nous pensons que les médecins doivent conserver la prescription en kinésithérapie, mais avions déposé un amendement pour autoriser les kinésithérapeutes à renouveler des séances, avec avis du médecin, lorsqu'ils exercent en Ehpad.

L'accès direct aux orthophonistes doit être soutenu, tout comme l'extension des compétences des assistants dentaires de niveau II, des orthoprothésistes et des opticiens.

Le renouvellement des ordonnances par les infirmiers diplômés d'État (IDE) pour les maladies chroniques doit être soumis à l'avis du médecin.

Les personnes diabétiques ont accès aux pédicures-podologues une fois par trimestre ; si elles ont besoin d'y aller plus souvent, cela peut révéler un risque d'artérite et justifier la consultation d'un médecin.

Je soutiens le renouvellement étendu de la prescription par les pharmaciens, de même que l'extension de la vaccination aux pharmaciens et aux infirmiers.

La place du médecin traitant doit rester centrale. C'est lui qui détient les meilleures compétences pour la coordination du parcours de soins. Mes amendements vont tous dans ce sens. Écoutons davantage les médecins et les professionnels ! (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP ; Mme Véronique Guillotin applaudit également.)

Mme Émilienne Poumirol .  - (Applaudissements sur les travées du groupe SER) Ce texte a été très largement amendé par le Gouvernement, qui lui a ajouté pas moins de neuf articles. Il serait peut-être temps de proposer un grand texte sur la santé...

La commission et sa rapporteure ont su écouter les professionnels et ont supprimé des dispositions qui mettaient en danger le parcours de soins, comme la création de l'IPA praticien.

Nous soutenons la création d'assistants dentaires de niveau II et la reconnaissance des assistants de régulation médicale.

Notre groupe est attaché à l'exercice coordonné de la médecine. Je regrette que ce ne soit pas la question centrale du texte, qui traite les professionnels en silo. Seule une organisation centrée sur un partage des tâches collaboratif entre médecin traitant et autres professionnels, dont les IPA, dégagera du temps médical. C'est le souhait de l'Ordre des médecins.

Le texte propose d'ouvrir davantage l'accès direct et la primo-prescription pour les paramédicaux. Nous saluons l'accès direct aux masseurs-kinésithérapeutes et aux orthophonistes, mais le rôle des IPA n'a de sens que dans un exercice coordonné. Il est indispensable de renforcer leur formation et d'instaurer des aides financières pour rétribuer la formation complémentaire de deux ans.

L'article 3 bis propose de sanctionner les patients qui n'honorent pas leurs rendez-vous : c'est simpliste et inefficace. Face au manque de moyens, face au non-respect des conventions médicales, et surtout à l'absence de vision d'ensemble, le groupe SER s'abstiendra. (Applaudissements sur les travées du groupe SER ; Mme Laurence Cohen applaudit également.)

Mme Florence Lassarade .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Face à la désertification médicale, cette proposition de loi poursuit des objectifs louables. Il y a urgence, quand 6 millions de Français sont sans médecin traitant, dont 600 000 souffrant d'une ALD. C'est une source de complications et d'hospitalisations.

Ce texte vise à fluidifier les parcours de soins et libérer du temps médical, en proposant un accès direct aux IPA, masseurs-kinésithérapeutes et orthophonistes. Les IPA pourront aussi prescrire, mais n'eût-il pas fallu attendre la fin de l'expérimentation ? Le texte ne précise pas les protocoles de prise en charge... Nous avons des inquiétudes. Jusqu'où les IPA et masseurs-kinésithérapeutes pourront-ils aller sans pratiquer la médecine ? Qui endossera la responsabilité en cas de faute médicale ? Qu'est-ce que cette responsabilité collective que vous évoquez ?

Les IPA pourront intervenir sur des pathologies bénignes, mais la bénignité apparente cache parfois des pathologies graves.

Ce texte intervient en parallèle des négociations tarifaires, mais la seule revalorisation prévue, à 1,50 euro, est inacceptable, alors que les honoraires sont bloqués depuis 2016.

Le médecin doit rester au coeur du système de santé : dix à quinze années d'études sont nécessaires pour poser les diagnostics. Infirmiers et médecins sont complémentaires, mais non substituables.

Ce texte propose une médecine à deux vitesses : il y aura ceux qui auront un médecin, et ceux qui iront voir des IPA ; tel est le choix du Gouvernement et de sa majorité. Heureusement, Mme la rapporteure et la commission y ont fait barrage. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

Mme Patricia Demas .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Je souhaite que chacun ait accès aux soins, mais lorsque chaque médecin retraité laisse en moyenne 1 500 patients derrière lui, les choses ne peuvent que s'aggraver. Notre système de santé doit donc évoluer. Le Gouvernement veut développer les IPA pour lutter contre les déserts médicaux. Il attendait 5 000 IPA en 2022, ils ne sont que 1 700 en 2023 : c'est peu !

Les IPA sont une solution, mais leur statut doit être mieux encadré pour l'accès direct et la primo-prescription. Je félicite Corinne Imbert pour le rééquilibrage opéré.

Les patients trouveront-ils plus d'IPA dans les territoires ruraux ? Rien n'est moins sûr, s'il n'y a pas d'incitation à l'installation. De plus, il existe une rupture d'égalité pour les infirmiers libéraux, qui ne pourront pas se former correctement. Il faudra prévoir des passerelles.

Les assistants médicaux sont censés décharger les médecins de tâches administratives. Pourquoi sommes-nous loin du compte, monsieur le ministre ? Pourquoi le recours aux médecins étrangers n'est-il pas plus fréquent ?

Dans le PLFSS j'ai voté un stage des médecins dans les zones sous-denses. Qu'en est-il ?

Notre population vieillit ; je plaide pour un système de santé plus évolutif. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

Discussion des articles

AVANT L'ARTICLE 1er

M. le président.  - Amendement n°74 rectifié, présenté par M. Chasseing, Mme Mélot, MM. Lagourgue, Guerriau, Grand, A. Marc et Somon, Mme F. Gerbaud, M. Milon, Mme Dumont et MM. Houpert et Gremillet.

Avant l'article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le quatrième alinéa de l'article L. 4130-1 du code de la santé publique est ainsi rédigé :

« 3° Être le seul responsable du parcours de soins, de sa coordination et de l'adressage pour le second recours ; »

M. Daniel Chasseing.  - Le médecin généraliste est la clé de voûte du parcours de soins coordonnés : réaffirmons son rôle et ses missions en le désignant seul responsable de ce parcours de soins.

Mme Corinne Imbert, rapporteure.  - Cet amendement est satisfait : le code de la santé publique prévoit déjà qu'il oriente les patients et suit les maladies chroniques en coordination avec les autres professionnels de santé. Avis défavorable.

M. François Braun, ministre de la santé et de la prévention.  - Oui, le médecin généraliste est la clé de voûte du système. Le code de la santé publique le précise déjà à l'article L.4130-1.

Préservons la souplesse du système, notamment en maintenant l'accès direct à certaines spécialités comme la gynécologie ou l'ophtalmologie, qui pourraient être mis à mal par votre amendement. Retrait, sinon avis défavorable.

L'amendement n°74 est retiré.

ARTICLE 1er

Mme Anne Ventalon .  - Dans les territoires sous-dotés, la proximité est vitale. En Ardèche, il est devenu difficile de se faire soigner. Je salue le dispositif de l'article 1er qui revalorise la profession d'IPA.

Le vieillissement de la population exige davantage de soins, de même que l'explosion des maladies chroniques nécessite un suivi régulier. Recourir aux IPA pour améliorer la qualité des soins est une bonne idée. Ils répondent aux besoins de la population. Ce sont des professionnels expérimentés, titulaires d'un master 2. Ces soignants ont toute leur place dans la lutte contre les inégalités médicales.

Certes, nous devons avancer prudemment, mais le décret ne doit pas décevoir les espoirs placés dans cet article.

Mme Raymonde Poncet Monge .  - Les Iade font partie des professions concernées par la pratique avancée, dont un arrêté du ministre de la santé doit dresser la liste. Or ils attendent depuis trop longtemps une reconnaissance statutaire, inscrite dans la loi. Depuis 1973, ils ont un niveau bac plus cinq, un master 2 depuis 2014.

En août 2022, un rapport de l'Igas et de l'inspection générale de l'éducation, du sport et de la recherche (IGÉSR) appelait à reconnaître la pratique avancée des Iade. Ministre après ministre, cela leur est promis. Comment se fier à un futur arrêté ? Nous voulons que cette pratique soit inscrite dans la loi comme pour les professions visées aux articles 2 et 3 ; c'était l'objet d'un amendement, déclaré irrecevable. Il est temps d'agir.

Mme Cathy Apourceau-Poly .  - Notre amendement incluant les Iade dans la pratique avancée a été déclaré irrecevable.

En février 2021, nous en débattions favorablement, mais le Gouvernement a prétexté en octobre dernier l'absence d'un véhicule législatif pour refuser. Nous en disposons enfin, mais l'article 40 a bloqué toute initiative parlementaire. Seul le Gouvernement peut désormais agir.

Les Iade remplissent les conditions de la pratique avancée, mais en sont exclus. Il faut que ce texte les y intègre : Stéphanie Rist leur a dit que cette proposition de loi avait été rédigée pour eux. Ils attendent des réponses ! (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE et sur plusieurs travées du groupe SER)

Mmes Laurence Cohen et Michelle Meunier.  - Très bien !

M. Philippe Mouiller .  - Avec Frédérique Puissat et Jean-Jacques Panunzi, nous voulions attribuer un statut spécifique aux Iade, mais l'article 40 de la Constitution en a décidé autrement.

La profession est pionnière : elle dispose de la qualification requise, mais souffre du dissensus entre la pratique et les textes.

Nous voulons que les Iade soient reconnus comme une profession de pratique avancée, mais avec un statut différent de celui des IPA. Les médecins anesthésistes-réanimateurs soutiennent cette démarche.

Monsieur le ministre, comment surmonter ce blocage ?

Mme Émilienne Poumirol .  - En 2017, il y avait très peu de MSP ; elles représentent aujourd'hui plus de 20 % de l'exercice libéral.

L'exercice coordonné en soins primaires est une nécessité pour améliorer la qualité de prise en charge.

Les IPA spécialisés y ont toute leur place. Formons plusieurs milliers d'IPA pour suivre les pathologies chroniques, mais aussi en pédiatrie, en cancérologie, en psychiatrie, en pédopsychiatrie. Mais prévoir pour eux un exercice non coordonné est une fausse bonne idée qui fait courir le risque d'une médecine à deux vitesses.

Je souscris aux propos de mes collègues sur les Iade. Il faut aussi deux ans de formation en plus pour devenir Ibode, mais un décret prévoit désormais qu'on peut « faire fonction » après 28 jours de formation. Sera-ce le cas aussi bientôt pour les Iade ? Rassurons-les ! (Applaudissements sur les travées du groupe SER ; Mmes Cathy Apourceau-Poly et Raymonde Poncet Monge applaudissent également.)

M. François Braun, ministre de la santé et de la prévention .  - Merci d'avoir évoqué le sujet des Iade, qui doit effectivement être traité, mais pas ici. Les Iade ne peuvent être assimilés aux IPA, qui reçoivent une formation en tronc commun, puis une formation spécialisée. Ils se rapprochent plutôt des autres infirmiers spécialisés que sont les Ibode et les Ipuer. Je me suis engagé à inclure ces trois professions dans la pratique avancée sans les enfermer dans le statut d'IPA. Nous aurons des textes législatifs en fin d'année.

M. le président.  - Amendement n°1 rectifié bis, présenté par Mme Deseyne, MM. Cambon, Burgoa et Calvet, Mme Chauvin, MM. Klinger, Chasseing et Brisson, Mmes Chain-Larché et Thomas, MM. Bonne et Panunzi, Mme F. Gerbaud, M. Bouchet, Mme de Cidrac, M. Lefèvre, Mme Gruny, MM. Somon, Gremillet, Genet et Chatillon, Mmes Di Folco et M. Mercier et MM. Sido et Cuypers.

Supprimer cet article.

Mme Chantal Deseyne.  - Nous voulons supprimer cet article. Un médecin est formé en neuf ans, bientôt dix, pour établir un diagnostic. Comment un IPA, formé en cinq ans, pourrait-il avoir la même compétence ?

Le risque est grand de créer une médecine à deux vitesses. Or tous les Français doivent avoir accès à un médecin : l'enjeu, c'est de dégager du temps médical, de ne plus voir ce temps consommé par des rendez-vous non honorés. Cette proposition de loi est un leurre, un emplâtre sur une jambe de bois. (Quelques applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; M. Olivier Henno et Mme Françoise Férat applaudissent également.)

Mme Corinne Imbert, rapporteure.  - Avis défavorable, sans surprise. Cet article 1er a été revu par notre commission pour mieux encadrer l'accès direct et la primo-prescription, de manière à sécuriser les conditions de prise en charge. Bien sûr, la qualité des soins ne doit pas être mise à mal : c'est pourquoi nous avons entouré les règles d'élaboration du décret de nombreuses garanties : avis du Conseil d'État, préavis de l'Académie nationale de médecine.

M. François Braun, ministre.  - Même avis. Les IPA ont trois ans de formation, quatre ans d'exercice professionnel, puis deux ans de formation complémentaire, soit neuf ans au total. Bien sûr, ils ne remplaceront jamais un médecin. Les IPA apportent une solution complémentaire, autour de la colonne vertébrale que représente le médecin traitant.

En cas de difficulté d'accès à un médecin, je pense que les IPA peuvent être un point d'entrée vers un médecin traitant. Certes, ce n'est pas la seule solution, mais ce n'est pas non plus un emplâtre sur une jambe de bois : c'est en combinant toutes les solutions que nous pourrons avancer. J'ai justement annoncé quinze mesures contre la paperasserie, pour dégager du temps médical.

M. Bernard Jomier.  - On aurait pu largement souscrire aux propos de Chantal Deseyne... si l'article n'avait pas été modifié par la commission, qui a supprimé notamment la distinction entre IPA praticiens et IPA spécialisés.

Nous voterons contre cet amendement, mais nous en appelons aussi à la responsabilité du Gouvernement. N'aboutissons pas à la situation décrite par Mme Deseyne !

L'amendement n°1 rectifié bis n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°78 rectifié bis, présenté par M. Chasseing, Mme Mélot, MM. Lagourgue, Guerriau, Grand, A. Marc et Somon, Mme F. Gerbaud, M. Milon, Mme Dumont, M. Gremillet et Mme de La Provôté.

I.  -  Alinéas 2 à 5

Supprimer ces alinéas.

II.  -  Alinéa 7

Compléter cet alinéa par les mots :

, uniquement avec adressage préalable par un médecin

III.  -  Alinéas 8 à 10

Supprimer ces alinéas.

M. Daniel Chasseing.  - Notre système de santé est en difficulté : il faut trouver des solutions pour améliorer la situation à court terme. L'accès direct aux IPA n'en est pas une. Ces professionnels peuvent certes assurer le suivi des maladies chroniques, mais pas remplacer un médecin en première intention.

Médecins et infirmiers doivent travailler en synergie. C'est au médecin de déterminer dans quelles conditions se fera l'accès à l'IPA. Seul le médecin peut prendre les décisions importantes pour la santé d'un patient.

M. le président.  - Amendement n°42 rectifié bis, présenté par Mme Berthet, MM. Belin, Bouchet, Bonhomme et Brisson, Mmes Drexler et Dumont, MM. Genet et Gremillet, Mme Joseph et MM. Lefèvre, Pellevat, Sido et Somon.

Alinéa 3

Compléter cet alinéa par les mots :

et des ordres des professions de santé

Mme Martine Berthet.  - Les médicaments sont divisés en trois catégories en fonction des risques pour la santé qu'ils présentent - liste 1, liste 2, stupéfiants ; certains présentent des conditions précises de délivrance. Si les IPA peuvent les prescrire, il convient de consulter les ordres professionnels compétents avant d'en établir la liste.

M. le président.  - Amendement n°53, présenté par Mme Cohen et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

I.  -  Alinéa 4

Supprimer cet alinéa.

II.  -  Alinéa 10

1° Supprimer les mots :

L'article 76 de la loi n° 2021-1754 du 23 décembre 2021 de financement de la sécurité sociale pour 2022 et

2° Remplacer les mots :

sont abrogés

par les mots :

est abrogé

Mme Laurence Cohen.  - Soucieux de valoriser les professions paramédicales, nous avons soutenu l'expérimentation de la primo-prescription par les IPA. Mais pourquoi celle-ci, votée en décembre 2021, n'a-t-elle toujours pas débuté ? En l'absence d'évaluation, comment justifiez-vous une généralisation de fait ? Pourquoi le Gouvernement fait-il si peu de cas de nos votes ?

L'évolution du nombre d'IPA est trop lente. Mais vous accélérez le calendrier, sans doute conscients que les effets du numerus apertus sur l'accès aux soins seront quasi nuls...

M. le président.  - Amendement n°77 rectifié, présenté par M. Chasseing, Mme Mélot, MM. Lagourgue, Guerriau, Grand, A. Marc et Somon, Mme F. Gerbaud, M. Milon, Mme Dumont et M. Gremillet.

Alinéa 4

Supprimer cet alinéa.

M. Daniel Chasseing.  - Les IPA ne doivent pas pouvoir prescrire des produits de santé soumis à prescription obligatoire. C'est au généraliste d'établir un diagnostic et de juger du caractère bénin ou non d'un symptôme, après examen clinique.

Un IPA peut collaborer avec le médecin, par exemple pour réaliser certaines visites, mais ce dernier doit toujours être à proximité. Par exemple, en cas d'hypertension, son intervention est nécessaire si les constantes montrent des anomalies. Je suis très favorable aux IPA pour dégager du temps médical, mais le travail doit se faire en synergie.

M. le président.  - Amendement n°89, présenté par Mme Imbert, au nom de la commission.

Alinéa 5

Remplacer les mots :

Le II

par les mots :

Le premier alinéa du II

Mme Corinne Imbert, rapporteure.  - Amendement rédactionnel.

M. le président.  - Amendement n°7 rectifié, présenté par Mmes Delmont-Koropoulis, Belrhiti et Thomas, MM. Burgoa, Frassa et Bouchet, Mme Chauvin, MM. Joyandet et Somon, Mme Lassarade, MM. Charon et Cambon et Mmes F. Gerbaud et Malet.

Alinéa 8, première phrase

Remplacer les mots :

directement les patients

par les mots et une phrase ainsi rédigée :

les patients dans un exercice coordonné par le médecin et protocolisé avec ce dernier. Dans ce cas, l'infirmier en pratique avancée peut, le cas échéant, intervenir avant une consultation médicale.

M. Laurent Somon.  - Il est inconcevable que des patients n'ayant pas bénéficié d'un diagnostic médical soient pris en charge directement par un IPA. Dans toute équipe de soins, un médecin assure la coordination de la prise en charge et un protocole organisationnel. L'accès direct à un IPA ne saurait s'y substituer.

M. le président.  - Amendement identique n°36 rectifié, présenté par Mme Guillotin, MM. Bilhac, Cabanel, Corbisez, Fialaire et Guérini et Mme Pantel.

Mme Véronique Guillotin.  - Nous sommes pour la montée en compétences, mais les IPA doivent travailler dans un espace coordonné, au coeur duquel se trouve le médecin. Ne désorganisons pas la médecine.

M. le président.  - Amendement n°8 rectifié, présenté par Mmes Delmont-Koropoulis, Belrhiti et Thomas, MM. Burgoa, Frassa et Bouchet, Mme Chauvin, MM. Joyandet et Somon, Mme Lassarade, MM. Charon et Cambon et Mmes F. Gerbaud et Malet.

Alinéa 9

Remplacer les mots :

sans adressage préalable de la part d'un médecin

par les mots :

dans les conditions prévues au II de l'article L. 4301-2 du code de la santé publique

M. Laurent Somon.  - L'exercice de l'IPA est toujours coordonné par un médecin et protocolisé. L'expression « sans adressage préalable » prête à confusion.

M. le président.  - Amendement identique n°37 rectifié, présenté par Mme Guillotin, MM. Bilhac, Cabanel, Corbisez, Fialaire, Gold et Guérini et Mme Pantel.

Mme Véronique Guillotin.  - Défendu.

Mme Corinne Imbert, rapporteure.  - Ces amendements visent à revenir sur les compétences attribuées aux IPA -  accès direct et primo-prescription. Ces mesures correspondent pourtant à des attentes fortes de ces personnels et amélioreront la prise en charge des patients. Les IPA n'exerceront que dans le cadre d'un protocole d'organisation conclu avec le médecin : les garanties sont là.

Dès lors, avis défavorable aux amendements nos78 rectifié bis, 53, 77 rectifié et 89, aux amendements identiques nos7 rectifié et 36 rectifié et aux amendements identiques nos8 rectifié et 37 rectifié.

Quant à l'amendement n°42 rectifié bis, l'avis de l'Académie de médecine est déjà prévu, mais il est utile d'inclure les ordres dans la réflexion sur le partage des tâches. Avis favorable.

M. François Braun, ministre.  - Merci au sénateur Jomier de sa confiance, dont j'espère être digne... Nous voulons tous améliorer notre système de santé.

L'exercice coordonné est la notion essentielle : cette coordination repose sur le médecin généraliste, voire spécialiste pour les pathologies chroniques comme le diabète, qui sera responsable de l'établissement des protocoles.

L'accès aux IPA est précisé et sécurisé. Avis défavorable aux amendements qui remettent en cause l'accès direct. Avis favorable à l'amendement nos89 et aux amendements identiques nos8 rectifié et 37 rectifié, de nature rédactionnelle.

M. Bernard Jomier.  - Le groupe SER ne votera pas l'amendement n°78 rectifié bis, suivant l'avis de la commission.

Vos deux prédécesseurs, monsieur le ministre, ont refusé tous les amendements votés par le Sénat pour valoriser la profession d'infirmier. Et voici que, tout d'un coup, vous faites un saut majeur en la matière...

Il faut répondre à la pénurie de médecins, mais le numerus apertus est une opération de communication : seulement 15 % de médecins en plus, alors que les dispositions négatives pour la profession s'accumulent, que le taux d'abandon des études de médecine est à deux chiffres. On nous annonçait le creux pour 2026, puis 2032 ; aujourd'hui, on nous parle de 2032 à 2035... Il faut augmenter très fortement le nombre de médecins formés ! (Applaudissements sur les travées du groupe SER ; Mme Nadia Sollogoub applaudit également.)

Mme Annick Billon.  - Dans la discussion générale, la majorité des intervenants ont annoncé que leur groupe voterait le texte, sans enthousiasme mais à cause de la pénurie. Les textes votés successivement ont réduit l'attractivité de la médecine générale. Je salue le travail de notre rapporteure, mais je voterai cet amendement, pour ne pas complexifier le système davantage encore.

M. Alain Milon.  - Je voterai cet amendement dont je suis cosignataire. Monsieur le ministre, vous nous assurez que l'article modifié par la commission vous convient. Mais celui de l'Assemblée nationale vous convenait aussi... Lequel des deux aura votre préférence ?

M. Bernard Jomier.  - Très juste ! (Mme Émilienne Poumirol renchérit.)

Mme Laurence Cohen.  - Très bonne question !

Mme Nadia Sollogoub.  - Nous parlons beaucoup des IPA, mais il y en a très peu... Ce débat fait beaucoup de mal : on dresse deux professions l'une contre l'autre, en accusant les médecins de défendre leur pré carré. M. Chasseing l'a souligné : le seul moyen de sortir de cette situation, c'est de travailler ensemble. Nous devons miser sur la collaboration ! (Mme Françoise Férat acquiesce.)

M. Laurent Somon.  - Je suis d'accord avec M. Jomier. Mais pour avoir plus de médecins, il faut aussi laisser redoubler les élèves qui ratent leur première année mais sont motivés par le métier, au lieu de les considérer comme des bons à rien ! (Applaudissements sur des travées des groupes Les Républicains et UC, ainsi que sur quelques travées du groupe SER)

On comprend l'accès direct pour les maladies chroniques, mais, dans les autres cas, je ne le comprends pas. Ce n'est pas une avancée. On va créer une médecine à deux vitesses, voire trois avec les déconventionnés ! (Applaudissements sur quelques travées du groupe Les Républicains)

À la demande de la commission, l'amendement n°78 rectifié bis est mis aux voix par scrutin public.

M. le président. - Voici le résultat du scrutin n°129 :

Nombre de votants 343
Nombre de suffrages exprimés 312
Pour l'adoption   37
Contre 275

L'amendement n°78 rectifié bis n'est pas adopté.

L'amendement n°42 rectifié bis est adopté.

À la demande de la commission, l'amendement n°53 est mis aux voix par scrutin public.

M. le président. - Voici le résultat du scrutin n°130 :

Nombre de votants 343
Nombre de suffrages exprimés 312
Pour l'adoption   86
Contre 226

L'amendement n°53 n'est pas adopté.

À la demande de la commission, l'amendement n°77 rectifié est mis aux voix par scrutin public.

M. le président. - Voici le résultat du scrutin n°131 :

Nombre de votants 343
Nombre de suffrages exprimés 327
Pour l'adoption   36
Contre 291

L'amendement n°77 rectifié n'est pas adopté.

L'amendement n°89 est adopté.

Les amendements identiques nos7 rectifié et 36 rectifié ne sont pas adoptés.

Les amendements identiques nos8 rectifié et 37 rectifié ne sont pas adoptés.

M. le président.  - Amendement n°41 rectifié ter, présenté par Mme Berthet, MM. Belin, Bonhomme, Bouchet et Brisson, Mmes Drexler et Dumont, MM. Genet et Gremillet, Mme Joseph, M. Lefèvre, Mme Malet et MM. Pellevat et Sido.

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

....  -  Le code de la santé publique est ainsi modifié :

1° L'article L. 1110 12 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Dans le cadre d'un exercice en pratique avancée mentionné à l'article L. 4301-1 du présent code, le pharmacien délivrant les médicaments prescrits est réputé membre de l'équipe de soin. » ;

2° Au dernier alinéa du I de l'article L. 1521-1 et au dernier alinéa de l'article L. 1541-1, les mots : « l'ordonnance n° 2018-20 du 17 janvier 2018 » sont remplacés par les mots : « loi n°     du         portant amélioration de l'accès aux soins par la confiance aux professionnels de santé ».

Mme Martine Berthet.  - Le renouvellement et l'adaptation des prescriptions par les IPA posent déjà des difficultés d'application pour les pharmaciens. Ceux-ci doivent procéder à la dispensation de l'ordonnance dans son intégralité et en vérifier la validité, mais ils n'ont pas connaissance du protocole établi entre l'IPA et le médecin. Ils ne disposent donc pas des informations nécessaires à la dispensation sécurisée des médicaments.

Pour réaliser en toute sécurité l'acte dont il a la responsabilité, le pharmacien doit pouvoir vérifier le cadre dans lequel l'IPA prescrit un médicament. Il convient donc qu'il soit réputé membre de l'équipe de soin, afin d'avoir accès au protocole.

Mme Corinne Imbert, rapporteure.  - Les protocoles devront être déterminés par décret en Conseil d'État. Quant à l'opportunité d'inclure le pharmacien dans l'équipe de soin, quel est l'avis du Gouvernement ?

M. François Braun, ministre.  - Le patient est libre du choix de sa pharmacie. Le pharmacien peut déjà délivrer des médicaments prescrits par un IPA. Votre amendement alourdirait le parcours de soins. Avis défavorable.

Mme Martine Berthet.  - Certes, mais le pharmacien doit disposer de l'ensemble des informations pour dispenser l'ordonnance, notamment en cas d'adaptation de la posologie par IPA.

Mme Corinne Imbert, rapporteure.  - Je suis le Gouvernement : avis défavorable.

M. Bernard Jomier.  - Nous allons nous abstenir, car la réponse reçue n'est pas satisfaisante. Mme Berthet soulève la question de la responsabilité, question qui, à vrai dire, plane sur l'ensemble du texte. Un acte de soin relève d'une responsabilité individuelle, qui doit s'exercer dans de bonnes conditions. L'infirmier qui diagnostique une gastro-entérite au lieu d'une colite ischémique devra en assumer la responsabilité. C'est un point de fragilité de ce texte, dont il est trop peu question, d'autant que, s'agissant d'une proposition de loi, nous sommes privés de l'éclairage du Conseil d'État.

M. François Braun, ministre.  - L'article L. 4301-1 du code de la santé publique prévoit que l'IPA est responsable des actes qu'il réalise.

L'amendement n°41 n'est pas adopté.

M. Alain Milon.  - Monsieur le ministre, je réitère ma question : quelle version de l'article 1er aura votre faveur, celle de l'Assemblée nationale ou celle du Sénat ?

M. François Braun, ministre.  - Je m'en remets à la CMP... (Mouvements divers)

Mme Corinne Imbert, rapporteure.  - Vous êtes habile !

M. Jean-Baptiste Lemoyne.  - Je ne suis pas spécialiste des questions médicales, mais j'ai une pratique avancée de mon territoire...

Médecine à deux ou trois vitesses, disait un précédent orateur. Hélas, c'est déjà le cas ! Cet article offre un outil supplémentaire dans une palette d'instruments. Depuis quelques années, nous avons pris à bras-le-corps le chantier de la pénurie de médecins : numerus apertus, quinze mesures pour simplifier la vie du médecin... Nous avançons sur l'exercice coordonné, ce qui paraissait bien difficile il y a quinze ans, au moment de la loi HPST.

Je voterai cet article des deux mains !

M. Bernard Jomier.  - Je remercie M. le ministre de répondre à nos questions, ce qui n'a pas toujours été le cas. Reste que le texte demeure imprécis et instable. Nous critiquons fermement la méthode du Gouvernement consistant à nous faire délibérer sur ce texte alors que des négociations sont en cours. Cela dit, une CMP peut ne pas être convoquée très vite...

Il faut reconnaître à sa juste valeur la profession d'infirmier, mais aussi entendre les inquiétudes sur la place du médecin. C'est cette version de l'article, avec le cadre posé par la commission, que nous approuvons. Ce cadre devra être défendu dans la suite de la procédure parlementaire.

M. Olivier Henno.  - Pour voter cet article des deux mains, il faut prendre son élan... Notre position peut se résumer ainsi : petit oui, mais grand mais.

Certes, la rapporteure a fait du bon travail, mais les doutes restent nombreux : médecine à deux vitesses, attractivité de la médecine générale, avenir des jeunes médecins. Nous voterons l'article, mais nous ne serons en rien engagés si le cadre posé est modifié. Nos collègues qui siégeront en CMP auront une lourde responsabilité. (Applaudissements sur des travées du groupe UC)

Mme Véronique Guillotin.  - Nous nous abstiendrons sur l'article. Nous soutenons la montée en compétences, mais nous sentons le malaise, notamment sur l'accès direct, qui suscite beaucoup d'inquiétudes. Nous avons voté une dixième année d'études pour les médecins ; où est la cohérence ? Subrepticement, on laisse entendre que les IPA pourraient pallier, ici ou là, l'absence de médecins. Eh bien non : ils amélioreront la prise en charge des malades chroniques, mais ne sauraient remplacer les médecins.

Mme Laurence Cohen.  - Nous sommes pour l'accès direct aux IPA et la primo-prescription. Mais nous sommes partagés au moment de nous prononcer sur cet article, car le paysage de la santé est très inquiétant. Au lieu d'un projet de loi global et ambitieux, le Gouvernement a choisi de soutenir une proposition de loi insatisfaisante, fourre-tout, qui ne règle pas les problèmes. Vous réagissez au lieu d'anticiper. D'autre part, nous n'avons pas reçu de réponse sur l'abandon de l'expérimentation : pourquoi se précipite-t-on ? Enfin, il faut aussi un effort salarial pour la profession d'infirmier.

M. Philippe Mouiller.  - Une grande majorité d'entre nous votera l'article, mais nous dénonçons un problème de méthode : vous opposez médecins et paramédicaux, rural et urbain. Même au sein des CPTS, des tensions émergent. Certes, la commission a cherché à trouver un équilibre, mais le texte n'est pas abouti, et nous serons très vigilants lors de la CMP. Il faut une stratégie d'organisation de la santé, avec tous les acteurs. Cessons de prendre les choses morceau par morceau en opposant les uns aux autres. (Applaudissements sur de nombreuses travées du groupe Les Républicains ; M. Olivier Henno applaudit également.)

Mme Marie Mercier.  - Les infirmiers sont formés au soin, les médecins au diagnostic différentiel. Je salue le travail de la rapporteure, mais nous devons absolument rendre la médecine générale plus attractive. Un médecin sur quatre n'exercera pas la médecine. Il faut dix ans de sacrifices pour apprendre la vie et la mort ! Par ailleurs, soyons prudents sur l'exercice illégal de la médecine. Pour ma part, je m'abstiendrai.

À la demande du groupe Les Républicains, l'article 1er, modifié, est mis aux voix par scrutin public.

M. le président. - Voici le résultat du scrutin n°132 :

Nombre de votants 343
Nombre de suffrages exprimés 308
Pour l'adoption 287
Contre   21

Le Sénat a adopté.

ARTICLE 1er BIS

M. le président.  - Amendement n°75 rectifié, présenté par M. Chasseing, Mme Mélot, MM. Lagourgue, Guerriau, Grand, A. Marc et Somon, Mme F. Gerbaud, M. Milon, Mme Dumont et M. Gremillet.

Alinéa 2, deuxième phrase

Supprimer les mots :

et la liste des prescriptions et examens complémentaires et produits de santé autorisés est définie par arrêté

M. Daniel Chasseing.  - Nous souhaitons supprimer la possibilité pour les IDE de prescrire des examens et des produits de santé. Derrière une plaie, il faut être capable de diagnostiquer une artérite. C'est au médecin généraliste d'établir un diagnostic.

M. le président.  - Amendement n°69 rectifié bis, présenté par M. Chasseing, Mme Mélot, MM. Lagourgue, Guerriau, Grand, A. Marc et Somon, Mme F. Gerbaud, M. Milon, Mme Dumont, MM. Houpert, Gremillet et Nougein et Mme de La Provôté.

Alinéa 2, deuxième phrase

Après le mot :

complémentaires

insérer les mots :

, avec l'avis du médecin traitant,

M. Daniel Chasseing.  - Défendu.

Mme Corinne Imbert, rapporteure.  - Les infirmiers concernés auront suivi une formation complémentaire. Ces amendements videraient l'article de sa substance. Avis défavorable.

M. François Braun, ministre.  - Avis défavorable.

L'amendement n°75 rectifié n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°69 rectifié bis.

L'article 1er bis est adopté.

ARTICLE 2

M. le président.  - Amendement n°2 rectifié bis, présenté par Mme Deseyne, MM. Cambon, Burgoa et Calvet, Mme Chauvin, MM. Klinger, Chasseing et Brisson, Mmes Chain-Larché et Thomas, MM. Bonne et Panunzi, Mme F. Gerbaud, M. Bouchet, Mme de Cidrac, M. Lefèvre, Mme Gruny, MM. Somon, Gremillet, Genet et Chatillon, Mmes Di Folco et M. Mercier et M. Sido.

Supprimer cet article.

Mme Chantal Deseyne.  - Je propose la suppression de cet article 2, pour les mêmes raisons que celles exposées à l'article 1er. Ne bradons pas la médecine !

Mme Corinne Imbert, rapporteure.  - La commission a réservé l'accès direct aux structures les plus intégrées et réduit de dix à cinq le nombre de séances de kinésithérapie qui pourront être suivies sans intervention d'un médecin. Dans ces conditions, l'accès direct est souhaitable.

M. François Braun, ministre.  - Même avis. Je remercie la commission d'avoir ramené le nombre de séances de dix à cinq.

L'amendement n°2 rectifié bis n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°9 rectifié, présenté par Mmes Delmont-Koropoulis, Belrhiti et Thomas, MM. Burgoa, Frassa et Bouchet, Mme Chauvin, MM. Joyandet et Somon, Mme Lassarade, MM. Charon et Cambon et Mmes F. Gerbaud et Malet.

Alinéa 2, première phrase

Remplacer les mots :

pratique son art sans prescription médicale

par les mots :

peut prendre en charge les patients dans un exercice coordonné par le médecin et protocolisé avec ce dernier

M. Laurent Somon.  - C'est au médecin d'assurer la prise en charge du patient et le protocole organisationnel.

Mme Corinne Imbert, rapporteure.  - Je répète que l'accès direct est très encadré, et le nombre de séances limité. Dans ces conditions, l'accès direct est souhaitable et fluidifiera le parcours de soins. Avis défavorable.

M. François Braun, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°9 rectifié n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°21, présenté par M. Jomier et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Alinéa 2, dernière phrase

Supprimer cette phrase.

M. Bernard Jomier.  - La dernière phrase de l'article est très floue. Par ailleurs, assortir l'obligation de coordination d'une sanction financière n'est pas opportun.

Mme Corinne Imbert, rapporteure.  - En effet, la sanction serait un mauvais signal. Nous l'avons déjà supprimée en commission pour les orthophonistes. Avis favorable.

M. François Braun, ministre.  - Il est important de s'assurer d'un exercice coordonné. Alors que 98 % de nos concitoyens ont donné leur accord pour l'ajout de leurs informations médicales au sein de Mon Espace santé, le Gouvernement pense que l'information doit circuler le plus vite possible. Avis défavorable.

L'amendement n°21 est adopté.

M. Jean-Baptiste Lemoyne.  - Comme M. Henno précédemment, je dis « oui, mais » à cet article. Il va dans le bon sens en libérant du temps médical, mais la commission en a restreint le champ d'application. En milieu rural, nombre de professionnels se déplacent chez les patients, sans être partie prenante d'un centre de soins. Ils ne seront pas bénéficiaires de la mesure, ce qui est dommage.

Mme Corinne Imbert, rapporteure.  - Je vous rassure : nous avons supprimé les CPTS, mais il y a aussi les équipes de soins primaires.

M. Jean-Baptiste Lemoyne.  - Pas partout !

Mme Corinne Imbert, rapporteure.  - Faciles à mettre en place, elles permettent le partage de patientèles.

Mme Catherine Deroche, présidente de la commission.  - Très bien !

L'article 2, modifié, est adopté.

ARTICLE 2 BIS

M. le président.  - Amendement n°10 rectifié, présenté par Mmes Delmont-Koropoulis et Belrhiti, MM. Burgoa, Frassa et Bouchet, Mme Chauvin, MM. Joyandet, Somon, Charon et Cambon et Mmes F. Gerbaud et Malet.

Supprimer cet article.

M. Laurent Somon.  - Confier aux masseurs-kinésithérapeutes la primo-prescription d'une activité physique adaptée (APA) est un contresens : seul le médecin peut en décider, car cela suppose une vision globale de l'état de santé du patient. Il n'en va pas de même pour une prolongation de prescription, déjà prévue par les textes.

M. le président.  - Amendement identique n°26, présenté par Mme Poumirol et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Mme Émilienne Poumirol.  - Les bienfaits de l'APA sont prouvés. En cancérologie, elle permet d'éviter certaines récidives - jusqu'à 24 % pour le cancer du sein. Or elle reste pour le moment confidentielle. L'absence de prise en charge si elle est prescrite par le kinésithérapeute est un frein supplémentaire. En outre, on ne peut être à la fois prescripteur et réaliser les soins prescrits : c'est pourquoi il convient de supprimer cet article.

M. le président.  - Amendement identique n°38 rectifié, présenté par Mme Guillotin, MM. Bilhac, Cabanel, Corbisez, Fialaire, Gold et Guérini et Mme Pantel.

Mme Véronique Guillotin.  - La primo-prescription de l'APA nécessite une évaluation globale de l'état de santé, qui revient aux médecins.

Mme Corinne Imbert, rapporteure.  - La loi sur le sport de 2022 a déjà adapté les prescriptions d'APA. La commission a cherché à mieux encadrer les dispositions relatives à l'APA, par le biais d'un décret soumis à l'avis de la Haute Autorité de santé (HAS) et de l'Académie de médecine.

La commission a demandé le retrait de ces amendements. À titre personnel, sagesse.

M. François Braun, ministre.  - Vous connaissez mon engagement en matière de prévention. Les masseurs-kinésithérapeutes peuvent adapter la prescription d'APA depuis la loi sur le sport de 2022.

Conformément au guide validé par la HAS, la prescription d'APA doit être précédée d'un examen médical.

Fin 2022, j'ai créé une mission sport-santé, présidée par le Dr Dominique Delandre, qui me rendra ses premières conclusions au mois de mars, puis son rapport au mois de juin : n'anticipons pas. Avis favorable à ces amendements de suppression.

M. Bernard Jomier.  - L'avis de sagesse de la rapporteure nous invite à temporiser...

Si ces actes sont prescrits par un masseur-kinésithérapeute, ils ne seront pas pris en charge par l'assurance maladie, contrairement à une prescription par un médecin. Les Français n'y comprendront plus rien.

Prescrire est une chose, réaliser les actes prescrits en est une autre. Les étudiants de la filière Staps peuvent se spécialiser en APA : les masseurs-kinésithérapeutes dirigeront-ils les patients vers ces jeunes professionnels ou souhaiteront-ils les conserver ? Il faudra préciser les choses : en attendant, supprimons l'article.

Les amendements identiques nos10 rectifié, 26 et 38 rectifié sont adoptés et l'article 2 bis est supprimé.

APRÈS L'ARTICLE 2 BIS

M. le président.  - Amendement n°27, présenté par Mme Poumirol et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Après l'article 2 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport portant sur l'application de l'article 59 de la loi n° 2019-1446 du 24 décembre 2019 de financement de la sécurité sociale pour 2020. Ce rapport analyse plus largement l'opportunité et la faisabilité d'élargir la prescription de l'activité physique adaptée, de remplacer certains soins de suite et de réadaptation par un programme d'activité physique adaptée en ambulatoire, et d'introduire une fiscalité incitative au sport-santé pour les complémentaires.

Mme Émilienne Poumirol.  - Amendement de repli. Au sein de l'oncopôle de Toulouse, les patients se voient proposer une APA. Après six mois d'accompagnement, les résultats sont probants.

Nous demandons donc qu'un rapport soit remis au Parlement en vue d'élargir le périmètre de l'APA. Nous souhaitons également que le remboursement de cette pratique soit généralisé.

Mme Corinne Imbert, rapporteure.  - Je souscris à votre analyse : l'APA comporte de nombreux bienfaits. Toutefois, avis défavorable à cette demande de rapport. Le sujet pourrait toutefois être étudié par le groupe cancer du Sénat.

M. François Braun, ministre.  - L'article 3 de la loi du 2 mars 2022 prévoit déjà la remise par l'assurance maladie d'un rapport relatif à l'APA. La mission Delandre rendra elle aussi deux rapports : votre amendement est donc satisfait. Retrait ?

Mme Émilienne Poumirol.  - Je le retire. Toutefois, j'avais cru comprendre que la perspective des jeux Olympiques permettrait d'accélérer la production des rapports.

L'amendement n°27 est retiré.

ARTICLE 3

Mme Laurence Cohen .  - Depuis 2013, les orthophonistes suivent une formation en cinq ans débouchant sur un master. Il est difficile de trouver un rendez-vous auprès de ces professionnels : quand allez-vous enfin augmenter les quotas, monsieur le ministre ? Sur 25 000 orthophonistes en France, 21 000 exercent en libéral. À Paris, sur 750 orthophonistes, six exercent en MSP. Ne conditionnons pas l'accès direct à une pratique coordonnée, car cela bénéficiera à peu de professionnels.

M. le président.  - Amendement n°22, présenté par M. Jomier et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

I.  -  Alinéa 2

1° Après la référence :

L. 1411-11-1,

insérer la référence :

L. 1434-12,

2° Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

À défaut, les actes réalisés par l'orthophoniste sont mis à sa charge.

II.  -  Après l'alinéa 2

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Dans le cadre des structures prévues à l'article L. 1434-12, le sixième alinéa du présent article s'applique à la condition que les modalités de prise en charge et de coordination sans prescription médicale soient inscrites dans le projet de santé de la structure. »

M. Bernard Jomier.  - Paris compte en effet peu d'orthophonistes exerçant en MSP... Le cadre est donc trop restrictif, d'autant que cette profession est formée au diagnostic et à la prise en charge, ce qui n'est pas le cas des infirmiers. Les orthophonistes travaillent en bonne collaboration avec les médecins.

Nous voulons donc rétablir la mention de la CPTS, comme voté par l'Assemblée nationale.

Mme Corinne Imbert, rapporteure.  - La commission a préféré supprimer l'appartenance à une CPTS comme condition à l'accès direct pour les orthophonistes. Toutefois, j'ai hésité : les enjeux de l'accès direct ne sont pas les mêmes pour les IPA, les masseurs-kinésithérapeutes et les orthophonistes. Mais par souci d'équité j'ai supprimé la mention des CTPS pour les orthophonistes, sinon j'aurais été rattrapée par l'article 40. Avis défavorable.

M. François Braun, ministre.  - Au 31 décembre 2021, on comptait 24 208 orthophonistes, dont 20 657 exerçaient en libéral, seulement 71 en centre de santé et un peu plus de 1 000 en maison de santé : c'est un exercice principalement isolé. Notons que les effectifs ont augmenté de 25 % entre 2012 et 2022, et que les effectifs en formation sont passés de 800 à 1 000 sur la même période.

Nous voulons adapter les effectifs aux besoins, qui sont importants.

Je me suis engagé à ce que les CPTS soient déployées sur l'ensemble du territoire national avant la fin de l'année. J'ai les mêmes hésitations que la rapporteure et m'en remets à la sagesse du Sénat.

Mme Corinne Imbert, rapporteure.  - En ce qui me concerne, je ne pouvais pas lever le gage.

Mme Laurence Cohen.  - Les orthophonistes ne sont pas suffisamment reconnus et manquent cruellement dans les hôpitaux et les centres médico-pédagogiques (CMP). Monsieur le ministre, reconnaissez les compétences des orthophonistes et augmentez leurs salaires ! Certes, ils travaillent de manière isolée, mais toujours en étroite collaboration avec les médecins.

M. Bernard Jomier.  - J'ai eu la même réflexion que la rapporteure, mais l'article 40 est toujours là... La rapporteure déclare vouloir se montrer équitable ; mais être équitable, c'est être juste. En l'espèce, c'est reconnaître que des professions différentes ont des niveaux d'intervention différents. Chacun reconnaît que les orthophonistes sont une profession qualifiée, à l'instar des sages-femmes. C'est pourquoi il faut différencier les conditions d'accès. Cet amendement est certes une cote mal taillée, mais il respecte mieux la réalité que la rédaction actuelle du texte.

M. Jean-Michel Arnaud.  - Je souscris à l'argumentaire de Bernard Jomier. Le métier d'orthophoniste est singulier. Ces professionnels sont présents au coeur de nos territoires, notamment pour nos jeunes : il est important de favoriser un accès direct.

L'amendement n°22 est adopté.

M. le président.  - Amendement n°55, présenté par Mme Cohen et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Alinéa 2, deuxième phrase

Compléter cette phrase par les mots :

, lorsqu'il est ouvert

Mme Laurence Cohen.  - Défendu.

M. le président.  - Amendement identique n°67 rectifié, présenté par MM. Gremillet, Pellevat, Bacci et Belin, Mme Férat, MM. Bouchet, de Nicolaÿ, Klinger, Charon, Somon, Bonhomme et Darnaud, Mme Perrot et MM. Hingray et Pointereau.

M. Daniel Gremillet.  - Il s'agit de garantir le dépôt du compte rendu de bilan orthophonique sur le dossier médical partagé, à condition toutefois que ce dernier soit ouvert.

Mme Corinne Imbert, rapporteure.  - La loi de 2019 offre la possibilité aux patients de refuser l'ouverture de leur dossier médical partagé (DMP). On ne pourrait reprocher aux orthophonistes de ne pas alimenter un dossier qui n'existe pas. Votre amendement est donc satisfait : retrait ou avis défavorable.

M. François Braun, ministre.  - Avis défavorable.

Les amendements identiques nos55 et 67 rectifiés sont retirés.

L'article 3, modifié, est adopté.

La séance est suspendue à 20 heures.

Présidence de M. Alain Richard, vice-président

La séance reprend à 21 h 30.

ARTICLE 3 BIS

M. le président.  - Amendement n°28, présenté par Mme Poumirol et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Supprimer cet article.

Mme Émilienne Poumirol.  - Plutôt que de sanctionner les patients au titre des rendez-vous non honorés, interrogeons-nous sur la raison de ces rendez-vous manqués. Les études montrent que la majorité des absentéistes sont en situation de précarité ou atteints d'ALD, notamment de troubles psychiatriques.

Cet article obéit à une logique libérale qui appréhende la santé comme un marché où se rencontrent une offre et une demande de soins.

La gestion déshumanisée des rendez-vous par les plateformes favorise ce consumérisme en rendant possible la prise de rendez-vous en un clic... Passer par une secrétaire médicale est bien plus pertinent.

La santé est un bien commun qui doit se soustraire aux lois du marché. Nous nous opposons à la stigmatisation de patients victimes de l'ubérisation du système de santé.

M. le président.  - Amendement identique n°50, présenté par Mme Cohen et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Mme Laurence Cohen.  - Certes, le phénomène des rendez-vous non honorés est réel, mais la réponse envisagée n'est pas la bonne. Nous refusons le principe d'une taxation des malades. Il s'agit souvent de personnes vulnérables, en situation de précarité.

Quels seraient les critères retenus pour évaluer si l'absence est justifiée ou non ? Les raisons d'une absence sont parfois non intentionnelles. Avec le remplacement des secrétaires médicales par des plateformes comme Doctolib, les relations entre les patients et les médecins se sont dématérialisées. (M. Bernard Jomier le confirme.) Ne pénalisons pas les patients.

M. le président.  - Amendement identique n°73 rectifié, présenté par M. Chasseing, Mme Mélot, MM. Lagourgue, Guerriau, Grand, A. Marc, Pellevat, Somon et Milon et Mmes Dumont et Perrot.

M. Daniel Chasseing.  - Je souscris aux propos de mes collègues. Précarité, troubles psychiatriques, problèmes personnels subis... Les raisons de ces absences - qui ont toujours existé, bien avant Doctolib - sont parfois légitimes. Il me paraît difficile de demander une justification.

M. le président.  - Amendement identique n°86, présenté par Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco et MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé, Parigi et Salmon.

Mme Raymonde Poncet Monge.  - Il faut envisager le phénomène de manière globale. La prise de rendez-vous numérique, sans contact humain, joue beaucoup. La numérisation déresponsabilise ; elle constitue en outre une difficulté pour ceux qui sont moins à l'aise avec le numérique. Ces sanctions seront peu efficaces, et pénaliseront les plus vulnérables. Les raisons de ces absences sont souvent liées à la précarité sociale ; considérons-les plutôt comme des signaux d'alerte.

Mme Corinne Imbert, rapporteure.  - Nous ne voulons pas stigmatiser mais mettre sur la table un sujet qui a été évoqué lors de nos auditions. Le nombre de rendez-vous non honorés augmente, pour tous les professionnels de santé. Je regrette moi aussi la déshumanisation lors de la prise de rendez-vous numérique, presque trop facile. Mais ces rendez-vous non honorés réduisent le temps médical disponible : il faut responsabiliser les patients.

L'article 3 bis ne fait que permettre la discussion entre l'assurance maladie et les syndicats de médecins. (M. Bernard Jomier en doute.) Les conventions pourront établir les modalités et les montants. Il s'agit seulement d'aborder le sujet. Avis défavorable.

M. François Braun, ministre.  - Lors de ses voeux aux soignants, le Président de la République a dit que l'assurance maladie analyserait précisément le problème, qui est complexe. Paradoxalement, les médecins équipés de plateforme ont moins rendez-vous non honorés : 3,5%, contre 7 % pour les autres.

J'ai entamé la discussion avec les plateformes, qui ont des solutions. Nous recherchons un équilibre entre le risque de renoncement aux soins et le blocage de plages de rendez-vous. Cependant, faute de diagnostic précis, il me semble prématuré de décider de telles sanctions. Avis favorable aux amendements de suppression.

M. Bernard Jomier.  - Les conséquences de ces rendez-vous non honorés varient selon des modes de gestion des rendez-vous. La commission propose de confier aux négociations conventionnelles le soin de déterminer les sommes demandées aux assurés sociaux. Or ce n'est pas leur objet ! Le problème est réel, mais mieux vaut le renvoyer au PLFSS, quand nous aurons des données plus précises.

M. Olivier Henno.  - Rien ne sert d'être nostalgiques : adaptons-nous à la réalité numérique, qui doit rester humaine. Il y a toujours de bonnes raisons de repousser la responsabilisation et la régulation, or le rendez-vous médical n'est pas un simple produit de consommation. Je voterai contre ces amendements.

M. Daniel Chasseing.  - Les rendez-vous manqués ont toujours existé. Il y a des gens insouciants, mais c'est rare. Et comment démontrer la faute ? Ce sera une usine à gaz. (Mme Émilienne Poumirol acquiesce.)

Mme Élisabeth Doineau.  - La commission a entendu l'exaspération des médecins. Les rendez-vous non honorés représenteraient 4 000 ETP ! Autant de consultations perdues pour des patients qui ont besoin de voir un médecin. Cet amendement autorise simplement l'assurance maladie à réfléchir à des solutions.

Le phénomène est grandissant. Pourquoi serait-il possible de prendre un rendez-vous, mais pas de l'annuler à temps en cas d'empêchement ? Cela suffit. Que ces assurés soient un peu plus élégants, et pensent un peu plus aux autres !

M. François Bonhomme.  - Bravo !

Mme Véronique Guillotin.  - Je voterai les amendements de suppression, même si le phénomène des rendez-vous non honorés est effectivement insupportable. La commission tente de régler un problème réel, mais il sera très difficile de trouver les critères pour déterminer si telle annulation est justifiée ou non. Nous allons générer des contentieux. La solution n'est pas mûre.

À la demande du groupe CRCE, les amendements identiques nos28, 50, 73 rectifié et 86 sont mis aux voix par scrutin public.

M. le président. - Voici le résultat du scrutin n°133 :

Nombre de votants 343
Nombre de suffrages exprimés 320
Pour l'adoption 120
Contre 200

Les amendements identiques nos28, 50, 73 rectifié et 86 ne sont pas adoptés.

M. le président.  - Amendement n°48 rectifié, présenté par M. Iacovelli et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants.

Rédiger ainsi cet article :

I.  -  Le premier alinéa de l'article L. 160-12 du code de la sécurité sociale est complété par une phrase ainsi rédigée : « Elles peuvent également faire l'objet d'un recouvrement d'une pénalité en cas de rendez-vous non honorés dont le montant et les modalités d'application sont définis par décret. »

II.  -  Le premier alinéa de l'article L. 1111-3 du code de la santé publique est complété par une phrase ainsi rédigée : « Elle est également informée des frais de pénalité auxquels elle pourrait être exposée en cas de récidive de rendez-vous non-honorés. »

M. Xavier Iacovelli.  - Nous comptons 27 millions de rendez-vous non honorés, alors que 6 millions de Français n'ont pas de médecin traitant. Faisons de la pédagogie pour responsabiliser les patients. Nous avons cherché un équilibre et proposons une rédaction de compromis, plus juste : un euro symbolique, en cas de récidive.

Mme Corinne Imbert, rapporteure.  - Nous poursuivons le même objectif, mais la rédaction proposée par la commission a le mérite d'étendre le dispositif à tous les professionnels de santé, et de laisser aux partenaires conventionnels le soin d'en définir les modalités : ils pourront en limiter l'application aux cas de récidive.

Retrait au profit de l'amendement n°90, sinon avis défavorable.

M. François Braun, ministre.  - Le diagnostic est encore incertain, je ne prescrirai pas un traitement dont je ne connais pas l'efficacité. Retrait ou avis défavorable.

M. Xavier Iacovelli.  - Les médecins ne demandent pas une compensation financière, mais simplement qu'il y ait moins de rendez-vous non honorés. D'où l'idée d'une retenue de 1 euro, qui ne pénalise pas mais responsabilise.

L'amendement n°48 rectifié est retiré.

M. le président.  - Amendement n°90, présenté par Mme Imbert, au nom de la commission.

I. - Alinéa 1

Rédiger ainsi cet alinéa :

Après le 1° de l'article L. 162-14-1 du code de la sécurité sociale, il est inséré un 1° ... ainsi rédigé :

II. - Alinéa 2

1° Remplacer la référence :

2° ter

par la référence :

1° ...

2° Remplacer le mot :

médecin

par les mots :

professionnel de santé

Mme Corinne Imbert, rapporteure.  - Le phénomène des rendez-vous non honorés ne concerne pas les seuls médecins ; cet amendement étend donc l'indemnisation à tous les professionnels de santé. Ce sont aussi les patients les plus précaires qui sont les victimes collatérales de ces comportements, chers collègues !

Les médias se sont fait l'écho de cette mesure, peut-être aura-t-elle un effet pédagogique et entraînera-t-elle une prise de conscience ?

M. Bernard Jomier.  - Bref, c'est un amendement d'appel ! (Sourires)

M. François Braun, ministre.  - N'ayant aucune idée de la situation que connaissent les autres professionnels de santé, avis défavorable.

L'amendement n°90 est adopté.

L'article 3 bis, modifié, est adopté.

ARTICLE 4

M. le président.  - Amendement n°57, présenté par Mme Cohen et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Après le mot :

formation

insérer le mot :

universitaire

Mme Laurence Cohen.  - Depuis la loi de 2016 de modernisation de notre système de santé, les assistants dentaires peuvent contribuer à des activités de prévention et d'éducation à la santé bucco-dentaire. L'article 4 crée des assistants de niveau II, ouvrant de nouvelles compétences, comme l'imagerie. L'Ordre des chirurgiens-dentistes préconise une formation continue sur deux ans, dont la maquette est en cours d'élaboration.

L'amendement précise que cette formation sera délivrée par les universités, pour assurer un égal accès de tous à une formation de qualité. L'attractivité des métiers du soin passe par une revalorisation du rôle des facultés.

Mme Corinne Imbert, rapporteure.  - La formation permettant d'accéder à ce niveau II est actuellement élaborée par la branche professionnelle et le ministère. Elle pourrait se faire en alternance et pas nécessairement à l'université. Ne rigidifions pas la loi : avis défavorable.

M. François Braun, ministre.  - Je souscris aux remarques de la rapporteure. Nous travaillons avec la branche professionnelle pour consolider cette formation, actuellement dispensée par des centres agréés. Si cet amendement était adopté, il faudrait reprendre le travail à zéro ; nous retarderions la mise en oeuvre. Avis défavorable.

L'amendement n°57 n'est pas adopté.

L'article 4 est adopté, ainsi que l'article 4 bis.

ARTICLE 4 TER

M. le président.  - Amendement n°33, présenté par M. Iacovelli et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants.

Alinéa 2

Rétablir le 1° dans la rédaction suivante :

1° L'article L. 1110-4-1 est ainsi rétabli :

« Art. L. 1110-4-1.  -  Les usagers du système de santé bénéficient de la permanence des soins dans les conditions prévues au présent code.

« Les établissements de santé et les autres titulaires de l'autorisation mentionnée à l'article L. 6122-1 ainsi que les médecins, les chirurgiens-dentistes, les sages-femmes et les infirmiers diplômés d'État sont responsables collectivement de la permanence des soins mentionnée aux articles L. 6111-1-3 et L. 6314-1. » ;

M. Xavier Iacovelli.  - Nous réintroduisons l'idée d'une responsabilité collective dans la permanence des soins. C'est un point essentiel : seule la collaboration aboutira à une situation satisfaisante pour nos concitoyens.

M. le président.  - Amendement n°32 rectifié, présenté par M. Patriat et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants.

Alinéa 3

Compléter cet alinéa par les mots :

, des communaute?s professionnelles territoriales de sante? telles que de?finies a? l'article L. 1434-12 du pre?sent code

M. Xavier Iacovelli.  - Les CPTS doivent être associées à la permanence des soins par les ARS. Il faut prendre l'avis de ceux qui connaissent le mieux le terrain.

Mme Corinne Imbert, rapporteure.  - Les dispositions supprimées par la commission que rétablit l'amendement n°33 inquiètent inutilement les professionnels. Avis défavorable.

Quant à l'amendement n°32 rectifié, les CPTS participent déjà à la permanence des soins, qui est assurée le week-end pour 87 % des territoires et en soirée pour 95 % d'entre eux. Avis défavorable.

M. François Braun, ministre.  - La permanence des soins est effectivement assurée sur 84 % du territoire le week-end, mais sous des formes bien différentes, parfois plutôt insatisfaisantes.

Je suis très attaché au principe de responsabilité collective, plus efficace que la coercition individuelle : les professionnels savent s'organiser pour assurer la permanence des soins, on l'a vu pendant la crise des urgences cet été. Intégrer les infirmiers de garde au dispositif va également dans le bon sens. Avis très favorable à l'amendement n°33.

Il est de la responsabilité du conseil départemental de l'Ordre des médecins d'assurer la permanence des soins. Une mission d'évaluation sur les CTPS sera lancée. Demande de retrait de l'amendement n°32 rectifié, le temps que la mission se prononce.

L'amendement n°33 n'est pas adopté.

L'amendement n°32 rectifié est retiré.

M. le président.  - Amendement n°23, présenté par M. Jomier et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Après l'alinéa 4

Insérer deux alinéas ainsi rédigés :

...° Après le deuxième alinéa de l'article L. 6314-1, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« La permanence des soins ambulatoires n'a pas vocation à être assurée au-delà de 23 heures. » ;

M. Bernard Jomier.  - Cet article dispose que les professionnels « ont vocation à » participer à la permanence des soins ambulatoires (PDSA). Soit cette expression signifie « remplissent les conditions pour » et l'article est inutile et bavard, soit elle implique que les ARS pourront édicter une obligation envers les personnels concernés.

Cet amendement précise que les professionnels de santé de ville n'auront pas à participer à la PDSA en nuit profonde, après 23 heures.

Mme Corinne Imbert, rapporteure.  - Les modalités d'organisation de la PDSA sont définies localement par les ARS. Le niveau de couverture est beaucoup plus faible en nuit profonde qu'en soirée ou week-end. Laissons aux ARS le soin de définir les organisations les mieux adaptées. L'expression « a vocation à », déjà utilisée dans le code, ne change rien : avis défavorable.

M. François Braun, ministre.  - Même avis. Si la permanence de soins en nuit profonde existe dans certains points du territoire, il y a le plus souvent un report vers les urgences de cas qui auraient pu être traités par de simples visites. Laissons la main aux territoires, dans une logique de responsabilité collective, pour apporter à nos concitoyens une réponse médicale en nuit profonde.

M. Bernard Jomier.  - Je n'ai pas eu de réponse claire sur l'expression « vocation à », ambiguë.

La PDSA en nuit profonde représente un faible intérêt. Les urgences ne sont pas saturées par les arrivées après 23 heures, mais bien par les personnes arrivées en journée qui n'ont pas été soignées.

M. le président. - Monsieur le ministre, souhaitez-vous préciser une expression effectivement très moyenne sur le plan juridique ?

M. François Braun, ministre.  - Pour moi, c'est clair : elle n'implique aucune obligation.

L'amendement n°23 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°30, présenté par M. Jomier et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Après l'alinéa 5

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Les professionnels dont l'âge excède 55 ans n'ont pas vocation à participer à la permanence des soins. Ils y concourent s'ils le souhaitent. 

M. Bernard Jomier.  - Mon amendement n'exclut aucun professionnel de santé de la PDSA en fonction de son âge, mais exempte ceux de plus de 55 ans s'il venait à y avoir une obligation. Cela rejoint nos débats sur la pénibilité : les professionnels, déjà surchargés le jour, n'ont pas à être contraints le soir au-delà d'un certain âge.

Monsieur le ministre, merci pour votre réponse personnelle, mais je ne suis pas sûr qu'elle s'impose en droit.

M le président. - « Ne sont pas tenus » aurait été préférable à « n'ont pas vocation » dans votre amendement...

Mme Corinne Imbert, rapporteure.  - Le principe du volontariat pour la permanence des soins n'est remis en cause ni par la proposition de loi ni par les propos du ministre. Retrait, sinon avis défavorable.

M. François Braun, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°30 n'est pas adopté.

L'article 4 ter est adopté.

APRÈS L'ARTICLE 4 TER

M. le président.  - Amendement n°5 rectifié bis, présenté par MM. Sautarel, Cadec, Panunzi, Perrin, Rietmann et Klinger, Mmes Estrosi Sassone, Dumont et Belrhiti, MM. Frassa, Bonhomme, Chatillon, Somon, Pointereau, Genet, Belin, Laménie, Charon et Tabarot, Mme Noël, M. Gremillet et Mme Bellurot.

Après l'article 4 ter

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.  -  Après l'article L. 4131-6 du code de la santé publique, il est inséré un article L. 4131-6-... ainsi rédigé :

« Art. L. 4131-6-....  -  À titre expérimental et pour une durée de trois ans, le directeur général de l'agence régionale de santé détermine par arrêté, après concertation avec les organisations syndicales représentatives des médecins, les zones dans lesquelles est constaté un fort excédent en matière d'offre de soins. Dans ces zones, le conventionnement à l'assurance maladie d'un médecin libéral ne peut intervenir qu'en concomitance avec la cessation d'activité libérale d'un médecin exerçant dans la même zone. 

« Un décret, pris après avis du Conseil national de l'ordre des médecins, fixe les conditions d'application du présent article. »

II.  -  En l'absence de convention conclue dans les conditions prévues au 21° de l'article L. 162-5 du code de la sécurité sociale, le I du présent article entre en vigueur le 1er juillet 2023. 

Six mois avant la fin de l'expérimentation prévue au même I, un comité composé de députés, de sénateurs, de représentants de collectivités territoriales, des administrations compétentes de l'État et des ordres de professions de santé concernées procède à l'évaluation de la mise en oeuvre du présent article et propose les mesures d'adaptation qu'il juge nécessaires. Le rapport établi par ce comité est transmis au Gouvernement ainsi qu'au Parlement.

M. Stéphane Sautarel.  - Nous voulons expérimenter le conventionnement sélectif des médecins pendant trois ans dans les zones surdotées. Des précédents existent pour d'autres professions et ont montré leur efficacité. La régulation heurte moins frontalement la liberté d'installation des médecins que l'interdiction : c'est une troisième voie entre incitation et coercition. Le conventionnement ne serait autorisé qu'à l'occasion d'un départ.

Mme Corinne Imbert, rapporteur.  - Cela me rappelle le dernier PLFSS...

Le conventionnement sélectif conduirait uniquement à répartir la pénurie, vu que 90 % du territoire est en zone sous-dotée, et découragerait l'installation des jeunes médecins. Attendons les résultats des négociations collectives. Avis défavorable.

M. François Braun, ministre.  - Je suis opposé à la coercition, non par dogme, mais parce qu'elle ne fonctionne pas en situation de pénurie - ce n'était pas le cas pour les précédents que vous évoquez.

Les conséquences d'un conventionnement sélectif seraient néfastes : les jeunes médecins se détourneraient encore plus de la médecine générale, ou s'orienteraient en fin de cursus vers les formations spécialisées transversales (FST) pour ne pas être contraints de s'installer. Ils choisiraient le salariat dans des maisons de santé - lesquelles se trouvent le plus souvent en zones bien dotées. Enfin, dans le mercato médical actuel, ils suivraient les ponts d'or offerts par l'étranger - Canada, Luxembourg, Suisse, Allemagne, voire Émirats arabes unis...

Des outils efficaces immédiatement existent cependant : guichet unique favorisant les installations, stages des internes ou encore parcours réussite - car sept jeunes médecins issus de zones sous-dotées sur dix retournent s'y installer.

Enfin, l'effet sur l'égalité entre médecins serait catastrophique : ceux des zones bien dotées pourraient vendre leur clientèle, tandis que ceux des zones sous-dotées ne le pourraient pas. Retrait ou avis défavorable.

Mme Véronique Guillotin.  - Je souscris aux propos du ministre : cet amendement est une fausse bonne idée. Les médecins qui manifestent ne mènent pas une bataille corporatiste.

Ces dispositifs ne fonctionnent pas ! (On le conteste à droite) La comparaison avec l'Allemagne ne tient pas : la régulation avait pour but de lutter contre un excédent et non une pénurie, et c'est un pays dense où toute zone désertifiée est proche d'une ville.

M. Stéphane Sautarel.  - Madame la rapporteure, depuis le PLFSS, le Gouvernement a vidé de son intérêt la quatrième année de médecine générale que nous avions introduite. Vous dites que cela ne fonctionne pas ? On ne peut pas le savoir tant qu'on n'a pas essayé. M. le ministre préconisait pourtant une telle solution lorsqu'il était conseiller d'Emmanuel Macron, alors candidat à la présidence de la République. (M. le ministre semble perplexe.)

Vous parlez de l'égalité entre les médecins, mais ce sont les patients qui subissent d'abord les inégalités : six millions de Français n'ont plus de médecin traitant. Vos propos sur le mercato médical sont un terrible aveu d'impuissance.

À la demande de la commission, l'amendement n°5 rectifié bis est mis aux voix par scrutin public.

M. le président.  - Voici le résultat du scrutin n°134 :

Nombre de votants 343
Nombre de suffrages exprimés 320
Pour l'adoption    41
Contre 279

L'amendement n°5 rectifié bis n'est pas adopté.

ARTICLE 4 QUATER (Supprimé)

M. le président.  - Amendement n°34, présenté par M. Iacovelli et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants.

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

I.  -  La section 1 du chapitre unique du titre Ier du livre préliminaire de la quatrième partie du code de la santé publique est complétée par un article L. 4011-2-1 ainsi rétabli :

« Art. L. 4011-2-1.  -  L'engagement territorial des médecins vise à assurer l'accès aux soins de proximité, l'accès aux soins non programmés, l'accès financier aux soins et les actions de santé en faveur de la population du territoire. »

II.  -  Le 3° de l'article L. 162-5 du code de la sécurité sociale est ainsi rétabli :

« 3° En application de l'article L. 4011-2-1 du code de la santé publique, les modalités, le cas échéant, de valorisation de l'engagement territorial des médecins en faveur de l'accès aux soins de proximité, de l'accès aux soins non programmés, de l'accès financier aux soins et des actions de santé en faveur de la population du territoire. Ces modalités peuvent reposer notamment sur des rémunérations forfaitaires et des tarifs spécifiques de consultation ; ».

M. Xavier Iacovelli.  - Le texte initial prévoyait que l'engagement territorial des médecins soit défini par les partenaires conventionnels. Pratiquer des tarifs maîtrisés, s'engager pour des soins non programmés, autant d'actions menées chaque jour par des médecins. Nous rétablissons l'article, qui autorisera la définition de justes rétributions.

M. le président.  - Amendement identique n°81, présenté par le Gouvernement.

M. François Braun, ministre.  - Avec cet amendement sur l'engagement territorial, nous sommes à la croisée des chemins. Le statu quo n'est pas une option, alors que le nombre de patients augmente et que le nombre de médecins continuera de diminuer, malgré nos efforts.

Pour former plus de médecins, il faut d'abord plus d'enseignants : nous y travaillons avec Sylvie Retailleau.

Soit nous optons pour la coercition, qui ne fonctionnera pas, soit nous jouons le jeu de la confiance, en misant sur l'engagement individuel au nom de la responsabilité territoriale. C'est ainsi que nous sortirons de la crise sans fin de la médecine, en changeant de paradigme : laissons les professionnels définir eux-mêmes les critères de valorisation de cet engagement territorial, pratiqué déjà par un tiers des médecins.

Les médecins ne sont pas responsables de la situation actuelle, qui résulte d'une erreur magistrale sur le numerus clausus. Changeons notre vision des choses et redonnons envie de pratiquer la médecine générale dans un cadre coordonné.

Mme Corinne Imbert, rapporteure.  - La commission est favorable à la valorisation de l'engagement des médecins. Toutefois, ces dispositions sont inutiles, car l'assurance maladie peut déjà rétribuer les médecins qui s'engagent, et malvenues, car elles interfèrent avec les négociations en cours. Jouer le jeu de la confiance, monsieur le ministre, suppose des négociations apaisées. C'est bien pourquoi le président Larcher avait demandé d'attendre la fin des négociations conventionnelles.

M. René-Paul Savary.  - J'appuie l'avis de la rapporteure. Des négociations sont en cours : pourquoi en rajouter ? Les médecins sont prêts à s'organiser dans les territoires, dans le cadre d'un contrat de confiance. Encore faut-il leur en laisser le temps. Cette proposition de loi est malvenue. Si vous voulez un climat de confiance, faites confiance !

Les amendements identiques nos34 et 81 ne sont pas adoptés et l'article 4 quater demeure supprimé.

L'article 4 quinquies est adopté.

ARTICLE 4 SEXIES

M. le président.  - Amendement n°66 rectifié, présenté par Mme Berthet, MM. Anglars, Belin, Bouchet, Bonhomme et Brisson, Mme Dumont, M. Gremillet, Mme Lassarade et MM. Pellevat et Sido.

Après l'alinéa 1

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

...° Le premier alinéa de l'article L. 4241-1 est complété par une phrase ainsi rédigée : « Ils peuvent administrer les vaccins mentionnés dans l'arrêté pris en application du 9° bis de l'article L. 5125-1-1-A. »

Mme Martine Berthet.  - Nous pérennisons la possibilité offerte aux préparateurs en pharmacie d'administrer les vaccins contre la grippe saisonnière, le covid-19 et la variole du singe. Ces professionnels ont fait leurs preuves lors de la crise sanitaire, sous l'autorité du pharmacien. Passons à la vitesse supérieure, en pérennisant ce régime dérogatoire.

Mme Corinne Imbert, rapporteure.  - Ces professionnels ont joué un rôle très utile. Il est souhaitable que cette compétence leur soit reconnue par la loi. Avis favorable.

M. François Braun, ministre.  - Il s'agit de situations particulières, liées à des épidémies massives. Les vaccinations ont déjà été étendues aux infirmiers ou sages-femmes. En l'état des choses, et hors période de crise, avis défavorable à une nouvelle extension.

Mme Florence Lassarade.  - Je ne souhaite pas que des préparateurs en pharmacie puissent vacciner des enfants. Je ne voterai pas cet amendement.

L'amendement n°66 rectifié est adopté.

L'article 4 sexies, modifié, est adopté.

APRÈS L'ARTICLE 4 SEXIES

M. le président.  - Amendement n°87, présenté par le Gouvernement.

Après l'article 4 sexies

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le code de la santé publique est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa de l'article L. 4371-2, les mots : « du diplôme d'État mentionné » sont remplacés par les mots : « des diplômes, certificats ou titres mentionnés » ;

2° L'article L. 4371-3 est ainsi rédigé :

« Art. L. 4371-3. -  Les diplômes, certificats ou titres mentionnés à l'article L. 4371-2 sont ceux qui figurent sur une liste arrêtée par les ministres chargés de la santé et de l'enseignement supérieur.

« Les modalités de la formation, les conditions d'accès, les modalités d'évaluation ainsi que les conditions de délivrance de ces diplômes, certificats ou titres sont fixées par voie réglementaire. »

M. François Braun, ministre.  - Il s'agit d'anticiper les évolutions de la formation de diététicien, à la suite des décisions du Ségur de la santé. La diététique est de plus en plus importante en matière de prévention. Le socle initial de formation doit être renforcé au niveau de la licence : c'est le sens de la création récente d'un bachelor universitaire de technologie (BUT). L'amendement retient une formulation générique pour le diplôme, afin de tenir compte des évolutions en cours.

Mme Corinne Imbert, rapporteure.  - En effet, la création récente du BUT dans une logique de montée en compétences nécessite de modifier les conditions légales. Avis favorable.

L'amendement n°87 est adopté et devient un article additionnel.

Les articles 4 septies, 4 octies et 4 nonies sont successivement adoptés.

ARTICLE 4 DECIES

M. le président.  - Amendement n°88, présenté par Mme Imbert, au nom de la commission.

Alinéa 39

Rédiger ainsi cet alinéa :

II. - Les dispositions de l'article L. 4393-19 du code de la santé publique ne font pas obstacle, jusqu'au 1er janvier 2026, à l'exercice de la profession d'assistant de régulation médicale par des personnes qui ne sont pas titulaires du diplôme mentionné au même article, dans des conditions fixées par décret.

L'amendement de coordination n°88, accepté par le Gouvernement, est adopté.

L'article 4 decies, modifié, est adopté.

ARTICLE 4 UNDECIES

M. le président.  - Amendement n°11 rectifié, présenté par Mmes Delmont-Koropoulis et Belrhiti, MM. Burgoa, Frassa et Bouchet, Mme Chauvin, MM. Joyandet et Somon, Mme Lassarade, MM. Charon et Cambon et Mmes F. Gerbaud et Malet.

Alinéa 2

Remplacer le mot :

trois

par le mot :

deux

Mme Florence Lassarade.  - Renouveler un traitement n'a rien d'anodin. L'allongement d'un à deux mois, qui doit rester exceptionnel, est un compromis entre perte de chance et réponse à un besoin.

Mme Corinne Imbert, rapporteure.  - L'article porte ce délai à trois mois, à certaines conditions. Seuls les cas de force majeure sont concernés. Retrait ou avis défavorable.

M. François Braun, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°11 rectifié est retiré.

L'article 4 undecies est adopté.

ARTICLE 4 DUODECIES (Supprimé)

M. le président.  - Amendement n°84, présenté par Mmes M. Vogel et Poncet Monge, MM. Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco et MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé, Parigi et Salmon.

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

Dans un délai de six mois a? compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur l'opportunité et la faisabilité de maintenir les dispositions de la loi n° 2004-810 du 13 août 2004 relative a? l'assurance maladie qui conditionnent la prise en charge par l'assurance maladie d'une consultation d'un médecin spécialiste par un adressage préalable d'un médecin généraliste.

Ce rapport porte a minima sur les dimensions médicale, sanitaire, sociale, financière et humaine de ces dispositions.

Ce rapport porte une réflexion globale sur l'accès direct aux professionnels de santé?.

Ce rapport fait des propositions qui améliorent l'accès de tous les assurés sociaux a? tous les professionnels de santé?.

Mme Mélanie Vogel.  - Nous rétablissons cet article qui prévoyait un rapport sur l'opportunité et la faisabilité de maintenir les dispositions de 2004 sur l'adressage préalable par un médecin généraliste. Un tel rapport nous paraît utile.

Mme Corinne Imbert, rapporteure.  - Par médecin généraliste, il faut sans doute entendre médecin traitant. Au-delà de la doctrine de notre commission en matière de rapports, l'amendement remet en cause le parcours de soins bâti depuis 2004. Cela témoignerait d'un manque de confiance envers les médecins traitants. Avis défavorable.

M. François Braun, ministre.  - Le médecin traitant est la colonne vertébrale de notre système de santé. En outre, l'accès direct est possible pour certaines spécialités bien définies : gynécologie, psychiatrie, stomatologie, ophtalmologie. Avis défavorable.

Mme Émilienne Poumirol.  - Depuis 2004, nous avons bâti un parcours de soins où le médecin généraliste occupe la place centrale. Les jeunes internes que nous avons auditionnés considéraient cet article comme une provocation. Si l'on veut sauver la médecine générale, il est urgent de ne pas le rétablir.

L'amendement n°84 n'est pas adopté.

L'article 4 duodecies demeure supprimé.

L'article 4 terdecies est adopté.

APRÈS L'ARTICLE 4 TERDECIES

M. le président.  - Amendement n°58 rectifié ter, présenté par Mme Berthet, MM. Belin, Bouchet, Bonhomme et Brisson, Mmes Drexler et Dumont et MM. Genet, Gremillet, Lefèvre, Pellevat et Sido.

Après l'article 4 terdecies

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le code de la santé publique est ainsi modifié :

1° Le deuxième alinéa de l'article L. 6211-3 est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :

« Les professionnels de santé, ou certaines catégories de personnes, listés par un arrêté du ministre chargé de la santé, peuvent réaliser l'ensemble de ces tests, recueils et traitements de signaux biologiques. L'arrêté prévoit, le cas échéant, les conditions de réalisation de ces tests, recueils et traitements de signaux biologiques, ainsi que les conditions de formation des professionnels et catégories de personnes autorisés à les réaliser.

« Cet arrêté, après avis de la commission mentionnée à l'article L. 6213-12 et du directeur général de l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé, exclut, le cas échéant, les tests, recueils et traitements de signaux biologiques ne pouvant pas être réalisés. » ;

2° À la fin de l'article L. 6433-1, les mots : « n° 2016-41 du 26 janvier 2016 » sont remplacés par les mots : « n° du portant amélioration de l'accès aux soins par la confiance aux professionnels de santé ».

Mme Martine Berthet.  - Les tests et recueils de traitement de signaux biologiques devraient pouvoir être réalisés par des professionnels de santé, pour simplifier l'accès à ces tests et renforcer la prévention.

Mme Corinne Imbert, rapporteure.  - Cet amendement modifie le régime d'autorisation pour la réalisation des tests. La liste des professionnels serait définie par décret. L'amendement assouplit les contraintes du régime actuel. Avis favorable.

M. François Braun, ministre.  - Les tests rapides d'orientation diagnostique (Trod) peuvent déjà être réalisés par des professionnels, dont la liste est définie par le code de la santé publique. L'amendement est satisfait. Retrait, sinon avis défavorable.

L'amendement n°58 rectifié ter est adopté et devient un article additionnel.

Interventions sur l'ensemble

M. Philippe Mouiller .  - Cette proposition de loi oppose les médecins aux autres professionnels de santé et suscite des interrogations dans les territoires. La démographie médicale ne s'améliorera pas à court terme, tandis que les IPA ne sont que 1 700, la plupart à l'hôpital. Pour devenir IPA, il faut consacrer deux ans à se former : qui peut se le permettre ?

Cette proposition de loi est dépourvue d'étude d'impact comme de cohérence d'ensemble. Je salue toutefois le travail de Corinne Imbert, qui s'est efforcée de l'améliorer en respectant tous les professionnels.

La grande majorité du groupe Les Républicains votera, non sans difficulté, le texte modifié par la commission. Nous serons extrêmement vigilants sur la CMP.

M. Alain Milon .  - À l'inverse de la majorité du groupe Les Républicains, je ne voterai pas ce texte. Pourquoi ne pas avoir suivi la demande du président Larcher, qui demandait un report du texte après les négociations collectives ?

Ce texte est un saupoudrage, sans colonne vertébrale. Nous aurions eu besoin d'un projet de loi sur l'organisation territoriale de la santé, faisant participer tous les professionnels de santé à la permanence des soins dans tous les territoires.

Monsieur le ministre, j'ai été déçu par votre réponse lorsque je vous ai interrogé sur la position qui serait la vôtre lors de la CMP.

Pour ces raisons, je ne puis voter ce texte, même nettement amélioré par la rapporteure. (M. Jérôme Bascher applaudit.)

M. Daniel Chasseing .  - L'important, c'est l'article 1er, auquel je ne suis pas favorable. L'accès direct aux IPA sera source de confusion. Je suis favorable aux IPA quand ils travaillent en symbiose avec les médecins. Espérons qu'en dépit de la loi, le couple médecin-IPA fonctionnera mieux. Mon groupe s'abstiendra sur ce texte.

M. Olivier Henno .  - De nombreux doutes demeurent : sur la temporalité du texte, sur sa forme -  c'est une proposition de loi Canada Dry, qui a le goût et l'odeur d'un projet de loi - et sur le fond.

Certes, le statu quo n'est pas possible, mais devons-nous jouer aux apprentis sorciers ? Quid de l'attractivité de la médecine générale, de notre capacité à former des médecins, de la notion de responsabilité ?

Nous voterons ce texte, mais nous pensons que nous arrivons au bout de la logique de multiplication des propositions de loi : nous avons besoin d'une grande loi de santé.

M. Jérôme Bascher.  - Ils n'ont pas de vision !

Mme Annick Billon .  - Je salue le travail de la rapporteure pour améliorer ce texte, même s'il n'était pas le bon véhicule pour améliorer l'accès aux soins et l'attractivité de la médecine générale.

Si l'amendement de M. Chasseing à l'article 1er avait été adopté, mon vote aurait été différent. En l'état, je ne voterai pas ce texte.

Quels que soient nos votes respectifs, nous partageons tous le même objectif : améliorer notre système de santé.

Mme Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales .  - Ce texte tombe à un très mauvais moment.

Dès lors que notre demande de report avait été refusée, nous avions deux solutions. Nous aurions pu rejeter le texte, notamment son article 1er, et en rester au texte de l'Assemblée nationale, qui est inacceptable. Ou nous pouvions border le texte et rechercher un équilibre, même fragile, entre reconnaissance des compétences des différents professionnels et place centrale du médecin traitant.

On ne peut satisfaire tout le monde, mais il fallait apaiser les tensions et les soupçons qu'avaient fait naître le texte initial. Nous tiendrons nos positions en CMP. Ce texte n'est pas celui qui nous est arrivé de l'Assemblée : je vous invite à le voter.

À la demande du groupe Les Républicains, la proposition de loi, modifiée, est mise aux voix par scrutin public.

M. le président.  - Voici le résultat du scrutin n°135 :

Nombre de votants 343
Nombre de suffrages exprimés 213
Pour l'adoption 199
Contre   14

La proposition de loi, modifiée, est adoptée.

Prochaine séance demain, mercredi 15 février 2023, à 15 heures.

La séance est levée à 23 h 10.

Pour le Directeur des Comptes rendus du Sénat,

Rosalie Delpech

Chef de publication

Ordre du jour du mercredi 15 février 2023

Séance publique

À 15 heures, 16 h 30 et le soir

Présidence : M. Gérard Larcher, président, Mme Nathalie Delattre, vice-présidente, M. Vincent Delahaye, vice-président

Secrétaires : Mme Martine Filleul - M. Jacques Grosperrin

1. Questions d'actualité au Gouvernement

2. Désignation des vingt-trois membres de la mission d'information sur le thème : « L'impact des décisions réglementaires et budgétaires de l'État sur l'équilibre financier des collectivités locales » (droit de tirage du RDSE)

3. Proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, visant à sécuriser l'approvisionnement des Français en produits de grande consommation (texte de la commission, n°327, 2022-2023)