Approvisionnement des Français en produits de grande consommation (Procédure accélérée)

Mme la présidente.  - L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, visant à sécuriser l'approvisionnement des Français en produits de grande consommation.

Discussion générale

M. Marc Fesneau, ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire .  - L'équilibre des relations commerciales entre fournisseurs et distributeurs, la juste rémunération des agriculteurs, tels sont les objets de notre débat. Notre défi commun est d'assurer notre souveraineté alimentaire. Il est de notre devoir collectif de trouver des solutions pour préserver notre capacité à produire et nous nourrir dans les années à venir. Tous les maillons de la chaîne de production sont imbriqués, d'où cette responsabilité collective réciproque. La capacité des agriculteurs à dégager du revenu détermine la résilience de l'ensemble de la chaîne alimentaire.

Évitons les caricatures : ce texte ne cherche pas à monter les uns contre les autres, les fournisseurs contre les distributeurs ou vice-versa. La recherche de l'équilibre doit nous inviter à la tempérance.

Lors du précédent quinquennat, Égalim 1 a renforcé le seuil de revente à perte (SRP), mettant fin à des promotions déroutantes pour les consommateurs comme pour les agriculteurs. Avec Égalim 2, les contrats ont été sécurisés juridiquement, offrant de la visibilité aux agriculteurs. La matière première agricole (MPA) a ainsi été sanctuarisée. Les effets ont été sentis très vite, avec la fin de la spirale destructrice de la guerre des prix des produits agricoles. Ces deux lois ont permis de maintenir de nombreuses exploitations sur nos territoires, même s'il reste du chemin à parcourir.

Dans le contexte particulier de la guerre en Ukraine, évitons de fragiliser cet édifice. De nombreuses PME avaient achevé leurs négociations avant l'entrée en vigueur de la loi. Elles doivent maintenant profiter des mesures votées.

Cette proposition de loi pouvait porter atteinte à leur équilibre financier. Certes, l'efficacité du système reste à prouver... (On renchérit au banc des commissions.) Mais supprimer le relèvement de 10 % du seuil de revente à perte (SRP+10) pourrait relancer la guerre des prix.

Le Gouvernement veut protéger les Français de l'inflation, mais cela ne se fait pas forcément au détriment des agriculteurs : n'opposons pas les difficultés des uns et des autres. Le juste prix pour les agriculteurs est bien celui qui permet leur rémunération.

L'évaluation économique d'une telle mesure est complexe, surtout en période de choc inflationniste, mais elle sera nécessaire. Il est préférable de l'évaluer en profondeur avec le Parlement, que de supprimer le dispositif. Mme la rapporteure, je salue donc l'évolution de votre position à travers votre amendement de séance publique qui va dans ce sens. Je reste réservé sur la déconnexion des dates du SRP+10 de celles de l'encadrement des promotions, ainsi que sur l'exclusion des fruits et légumes - mais nous en reparlerons tout à l'heure.

À l'article 2 ter B, l'élargissement de l'encadrement des promotions aux produits de droguerie, parfumerie et hygiène (DPH) interroge : les acteurs du secteur sont bien différents de l'agroalimentaire, qui n'est pas une activité comme les autres. Le champ agricole doit être traité à part. Mais l'important, c'est de nous donner trois ans supplémentaires pour poursuivre l'expérimentation et l'évaluer.

Ce texte, amélioré par le Sénat, propose de nombreuses avancées : pénalités logistiques mieux encadrées, sanctions alourdies en cas d'abus, plus juste équilibre pour éviter les ruptures de négociations au 1er mars. Je salue le travail pointu de Mme la rapporteure, son engagement et celui de la présidente Primas, engagement que nous partageons... (Sourires au banc des commissions)

Ce texte a été adopté à l'unanimité de l'Assemblée nationale. Que la sagesse proverbiale des sénateurs oeuvre également à cette cause nationale. (Applaudissements sur les travées du RDPI et au banc des commissions ; Mmes Amel Gacquerre, Marie-Pierre Richer et M. Éric Gold applaudissent également.)

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure de la commission des affaires économiques .  - (Applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains) C'est la troisième fois en cinq ans que le législateur doit intervenir pour clarifier les négociations commerciales. C'est que les tensions vont crescendo : c'est une partie de poker menteur où chaque joueur rejette la responsabilité sur l'autre. Pourtant, un coup d'oeil sur nos voisins révèle que les parties pourraient s'entendre sans recourir à l'arbitrage du législateur. J'espère que le Sénat construira dans la sérénité un cadre utile aux producteurs comme aux consommateurs.

La commission a apporté des évolutions majeures. Nous avons engagé le débat sur le SRP+10, une manne pour les distributeurs dont l'efficacité n'est pas prouvée après quatre années d'expérimentation, malgré un rapport du Gouvernement et de l'Inspection générale des finances. Nous ne pouvions concevoir une reconduction de trois ans sans un débat sur cette singularité française, qui s'est traduite par une augmentation des marges des distributeurs d'environ 2,8 milliards d'euros en quatre ans, recyclées en carte de fidélité, en cagnottage ou en valorisation des marques de distributeurs (MDD), sans ruissellement vers les agriculteurs.

Certaines filières estiment que le SRP+10 est à l'origine de la baisse de leur revenu. C'est un chèque en blanc fait à la grande distribution, sans contrepartie pour les producteurs. La commission avait donc décidé de le suspendre pendant deux ans, le temps que l'inflation s'apaise. Cette position responsable traduisait aussi notre exaspération devant l'absence totale de transparence pendant ces quatre dernières années.

Mais nous avons entendu ceux qui craignent que les distributeurs négocient ensuite plus durement pour conserver leurs marges. C'est une crainte qu'il faut tempérer : avec Égalim 2, la contractualisation écrite est obligatoire - ce qui a conduit à une augmentation de 3,5 % de la rémunération de la MPA.

La commission propose finalement une prolongation du SRP+10 jusqu'en 2025, tout en imposant aux distributeurs de communiquer l'usage qu'ils en font au ministre et aux présidents des commissions des affaires économiques des deux chambres. Nous maintenons l'exclusion de la filière fruits et légumes.

L'encadrement des promotions sur les produits alimentaires a entrainé un report sur le non-alimentaire, et notamment les produits de DPH : le taux moyen de promotion moyen est passé à 40 ou 45 %, mais atteint 90 % pour certains produits ! Ce sont les producteurs qui financent ces promotions. Pensons aux dizaines de milliers d'emplois qu'ils représentent, à l'heure où le Gouvernement parle de relocalisation.

Ce serait un cadeau aux multinationales étrangères ? D'une part, il y a beaucoup de PME françaises, comme Briochin, Maison verte ou Vigor ; d'autre part, des groupes étrangers ont des usines en France, comme Ariel à Amiens ou Signal à Compiègne. Faut-il risquer des délocalisations ?

Le risque d'impact sur l'inflation reste très minime, car les trois quarts des produits DPH sont encore sous-promus.

À l'article 3, nous voulons trouver un équilibre entre fournisseurs et distributeurs, tout en conservant le principe de liberté contractuelle : il ne nous appartient pas de dire quel est le prix juste. En cas d'échec de la négociation au 1er mars, le préavis devra tenir compte des conditions du marché, comme le coût des intrants. Nous répondons aux inquiétudes des PME - le déréférencement - des distributeurs - l'arrêt des livraisons - comme des fournisseurs - la livraison à perte.

Le recours au juge pour faire appliquer la loi inquiétait, nous proposons donc une nouvelle rédaction souple et claire.

Enfin, nous introduisons un nouveau dispositif pour mieux protéger les produits agricoles sous MDD et renforçons le cadre juridique des pénalités logistiques. Tout cela au service, in fine, de nos producteurs. (Applaudissements sur les travées des groupeUC et Les Républicains)

M. Jean-Baptiste Lemoyne .  - (Applaudissements sur les travées du RDPI) Il y a d'abord un contexte conjoncturel. L'inflation est de retour, crispant encore plus les négociations commerciales entre fournisseurs et distributeurs. Cette inflation a un double impact, sur le portefeuille des consommateurs, et sur la chaîne en amont. Avec 7 % en janvier, nous sommes cependant mieux lotis que la moyenne de la zone euro, à 8,5 %. Les industriels font face à une explosion des coûts de fabrication. Les producteurs et agriculteurs sont confrontés au renchérissement du coût des intrants et de l'énergie, et doivent s'adapter au changement climatique.

Mais il y a aussi le contexte structurel. Les relations commerciales sont dégradées depuis quinze ans. La forte interdépendance devrait conduire à la responsabilité, mais les rapports de force sont trop déséquilibrés entre plusieurs centaines de fournisseurs et une poignée de distributeurs. Une guerre des prix, destructrice de valeur, est engagée depuis que la loi de modernisation de l'économie (LME) a rétabli la liberté tarifaire et permis le contournement de la loi Galland.

Pendant le quinquennat précédent, les lois Égalim 1 et 2 ont rééquilibré ces relations au profit des agriculteurs - Bernard Buis y a été très attentif - notamment en rendant les conventions écrites obligatoires. Certains industriels leur faisaient signer des contrats dont ils n'avaient pas le droit d'obtenir de copies ! (Mme la présidente de la commission le confirme.)

Ce texte vient clarifier, retoucher Égalim 1 et 2. Plus qu'une loi Égalim 3, ce serait plutôt Égalim 2+... Nous ajustons le dispositif pour les MDD. Nous avons entendu vos réserves, monsieur le ministre, sur les DPH.

L'article 3 a considérablement évolué entre la version d'origine et la rédaction de la commission. Les conditions économiques du marché seront prises en compte, et les recours sont bornés. Les apports sont pertinents.

Ce matin encore, nous bloquions sur la suspension du SRP+10, qui a permis d'augmenter l'excédent brut d'exploitation des agriculteurs. Ce n'est plus le cas, puisque la commission a adapté sa position : la cathédrale d'Égalim conserve sa pierre angulaire.

Le RDPI votera ce texte. (Applaudissements sur les travées du RDPI et au banc des commissions)

M. Serge Mérillou .  - (Mme la présidente de la commission applaudit.) La situation de l'agriculture française se dégrade : les agriculteurs ne parviennent pas à se payer dignement. On s'éloigne de l'esprit d'Égalim, qui visait à garantir une juste rémunération aux agriculteurs. On peut même s'interroger sur les conséquences pour les agriculteurs, en amont, de cette énième tentative de pallier l'inefficience d'Égalim, en attendant une grande loi agricole qui devrait traiter les problèmes de fond.

La crise ukrainienne nous a empêchés d'atteindre les objectifs d'Égalim 1 et 2, mais la conjoncture n'est pas seule responsable : le groupe SER avait alerté sur les failles de ces textes.

Notre priorité est de consolider notre modèle agricole. Redevenir une vraie puissance agricole, assurer une alimentation de qualité, garantir notre souveraineté : ces objectifs sont partagés, mais ne pourront être atteints sans un juste partage de la valeur. Notre rôle est de veiller à la transparence des négociations. Je salue l'article 1er, qui lutte contre les contournements du droit par la grande distribution.

Comme l'affirmait le député Gérard Leseul, nous devons corriger le cadre et rééquilibrer les choses. Le groupe SER était opposé aux intentions de la rapporteure sur l'article 2 : si le SRP+10 n'a pas tenu ses promesses, sa suppression pure et simple n'aurait pas été un bon signal.

Le bon levier serait d'encourager les conventions interprofessionnelles, alternative intéressante aux contractualisations individuelles. Nous défendons à ce propos un amendement rétablissant le texte voté à l'Assemblée nationale sur une initiative socialiste.

Ce texte est l'occasion de remettre l'agriculture au coeur du débat. L'absence de clauses miroir dans les accords de libre-échange, le manque d'attractivité plombent le secteur, mais nous devons trouver des solutions rapides et efficaces. Ce texte n'est qu'une goutte d'eau : il faut une réforme globale de notre modèle agricole.

En attendant une grande loi agricole, nous défendrons le principe de juste rémunération des agriculteurs. (Applaudissements sur les travées du groupe SER)

M. Fabien Gay .  - En un an, l'inflation alimentaire a atteint 12 % -  du jamais-vu depuis les années 1980. La pandémie, le réchauffement climatique, l'agression russe de l'Ukraine, autant de raisons qui expliquent la situation actuelle. Les crises s'enchaînent, affectant la chaîne de valeur ; les coûts des intrants s'envolent, ainsi que les prix.

Pour les consommateurs, c'est l'asphyxie : plus 60 % sur une bouteille d'huile, plus 22 % sur la farine, plus 16 % sur une volaille. Le caddie est de plus en plus cher, mais salaires et pensions n'augmentent pas. L'inflation est insupportable, le passage en caisse est redouté.

Cela ne peut plus durer, ni pour les consommateurs ni pour les producteurs. Des intérêts ne sont pas conciliables : on ne peut pas faire baisser les prix, assurer la juste rémunération des agriculteurs, tout en augmentant les marges des distributeurs.

Une négociation, c'est emporter l'avantage. Il n'y a pas de négociation possible avec la grande distribution, qui ne laisse aucune place à la rémunération du producteur ou au consommateur qui veut accéder à une alimentation de qualité à des prix raisonnables.

Le SRP+10 n'est pas une mauvaise idée, mais il faut le conditionner à la revalorisation de la rémunération des producteurs. Si ce n'est pas le cas, ce mécanisme doit être supprimé, comme nous le proposons dans un amendement.

Corriger légèrement un système qui ne peut pas fonctionner ne sert à rien : il faut une réforme de profondeur.

J'entends parler des exportations facilitées par les accords de libre-échange. Concrètement, sait-on mesurer leur bénéfice pour les producteurs ? Non, mais cela n'empêche pas d'en signer à tour de bras.

Égalim 2 a inscrit l'objectif de 50 % de produits durables dans la restauration collective et 20 % de produits bios ; il faut aller plus loin, et faire des marchés publics le levier d'une commande saine pour protéger les producteurs des prédations de la grande distribution. Imposons un prix plancher construit sur les coûts de production, auxquels on ajoute une marge raisonnable, pour garantir une rémunération juste.

Des solutions existent, mais elles passent par des politiques publiques encadrant fermement les négociations. Cette proposition de loi ne remplira pas ses objectifs : le groupe CRCE s'abstiendra.

Mme Amel Gacquerre .  - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) En 2018, puis en 2021, nous avons posé les bases d'une relation équilibrée entre producteurs et distributeurs. Les lois Égalim s'appuyaient sur des principes salvateurs : meilleure répartition de la valeur, juste rémunération des agriculteurs, fin des relations conflictuelles entre distributeurs et fournisseurs lors des négociations commerciales.

Le plafonnement des promotions sur les produits agricoles a fait naître un dispositif robuste. La généralisation des contrats pluriannuels écrits a favorisé une plus grande transparence. L'introduction d'une clause de renégociation activable en fonction de l'évolution des prix a démontré sa pertinence.

Malheureusement, nous n'avions pas été écoutés sur l'évasion juridique ou l'encadrement déficient des MDD. C'est bien une loi Égalim 3 que nous examinons, puisque ce texte met en lumière les failles du droit existant.

Des changements majeurs sont opérés : les pratiques juridiques d'évasion des grandes enseignes seront encadrées, de même que les promotions sur les DPH, la renégociation a été redessinée afin d'éviter toute asymétrie. L'exclusion des fruits et légumes frais dans le SRP+10 était demandée : nous l'avons fait.

Le débat a été engagé à juste titre sur les effets du SRP+10 ; il est en effet de notre devoir d'évaluer les dispositions législatives.

L'application des pénalités logistiques, armes ultimes pour que certains distributeurs réalisent des marges, est mieux encadrée.

Le Sénat s'affirme plus que jamais comme la chambre des agriculteurs, mais nous devons rester prudents face à la multiplication des normes et à l'empilement de dispositifs pas toujours lisibles.

Poursuivons nos travaux avec vigilance, ne modifions pas le droit sans recul, ne confondons pas vitesse et précipitation.

Je propose un principe clair : l'adoption de nouvelles normes doit se justifier soit par des dysfonctionnements clairs, soit par des objectifs d'intérêt général. Nous voterons ce texte équilibrant les relations entre distributeurs et producteurs, à l'heure où l'inflation galopante met à mal les petites entreprises. Il faut perfectionner Égalim, mieux rémunérer nos agriculteurs et nos petites entreprises. (Applaudissements sur les travées du groupe UC et sur le banc des commissions.)

M. Henri Cabanel .  - (Applaudissements sur les travées du RDSE et du groupe UC) Cela fait trois fois en deux mois que nous débattons de ce sujet, avec toujours les mêmes orateurs...

Impuissants face à la baisse de compétitivité de notre agriculture, nous posons un sparadrap là où ça fait mal. Notre agriculture ne vaut-elle pas mieux ? La loi est présentée dans les médias comme Égalim 3 ; mais je rappelle que l'acronyme signifie « états généraux de l'agriculture et de l'alimentation » : nous avons perdu les états généraux en cours de route... C'est dommage, car la méthode était la bonne.

Qui a payé la facture de la guerre des prix ? L'agriculteur et le consommateur. Que reste-t-il d'Égalim 1 ? Pour la troisième fois en cinq ans, le législateur doit réguler les négociations commerciales, signe de la défiance qui y règne. Je déplore le manque de vision sur des problématiques transversales, comme le bien-être des agriculteurs ou la nécessité de nourrir dix milliards d'êtres humains.

Pour revaloriser le métier, il faudrait une stratégie nationale, mais les textes qui se succèdent sont rédigés dans un certain entre soi. Le seuil SRP+10 est la star d'un imbroglio : le maintenir, l'annuler, chacun y va de son analyse. Les syndicats eux-mêmes ne sont pas en phase. Si, comme la rapporteure l'affirme, les 600 millions d'euros par an ont été un chèque en blanc pour les distributeurs, pourquoi la FNSEA, syndicat majoritaire des agriculteurs, le défend-il ?

Demain, les quelques groupes qui se partagent la distribution pourront préférer des produits étrangers, alors qu'un fournisseur déréférencé peut perdre jusqu'à 20 % de son chiffre d'affaires.

Nous devons coconstruire des modèles de contrats gagnant-gagnant. Nos voisins ont su mettre en place des organisations professionnelles communes. Nos agriculteurs perdront toujours le combat face à une poignée de distributeurs. Les objectifs de la loi Égalim ne sont pas simples à atteindre et il faut y aller pas à pas : mon groupe votera cette proposition de loi.

M. Daniel Gremillet .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; Mme la rapporteure applaudit également.) Notre pays fait face à deux sujets majeurs : alimentation et énergie. Sur les deux, la France est en difficulté.

Monsieur le ministre, nous examinons bien une loi Égalim 3. Égalim 1 et 2 ont sanctuarisé la MPA. Avec Anne-Catherine Loisier, nous assurons un suivi de ces lois. Avec un temps d'avance, nous avons perçu les modifications à apporter. (Mme la rapporteure acquiesce.) Nous avons peut-être une vision plus réaliste...

La MPA dans les MDD, c'est 50 % du marché de l'agriculture ; 50 % qui n'était pas traité.

Les travaux du groupe de suivi du Sénat montrent les matières premières industrielles (MPI) ne sont impliquées qu'à 30 % ? Il y a là une erreur terrible : nous ne mesurons pas encore les conséquences que cela aura sur la répartition des PME dans les territoires.

Jour après jour, la ferme France perd en compétitivité, et en volume de produits sur le marché.

C'est avec la MPI que les ingénieurs innovent. Si ce domaine est fragilisé, tout l'édifice agroalimentaire vacille.

Il n'y a pas eu de lois Égalim chez nos voisins ; pourtant, les mille litres de lait sont payés 120 euros de plus en Allemagne, 210 euros de plus en Irlande, 100 euros de plus en Pologne ! Malgré notre arsenal législatif, nous sommes les avant-derniers d'Europe pour la rémunération des produits laitiers. C'est dramatique !

Un système ainsi construit est toujours en retard. Les indicateurs sont toujours dépassés. On court toujours derrière un système inflationniste.

Je remercie notre rapporteure d'avoir pris en considération les MDD. Il n'y avait pas lieu de les exclure de la sanctuarisation de la MPA.

Monsieur le ministre, pour améliorer le revenu agricole, il faut peser sur les recettes comme sur les dépenses. Or concernant ces dernières, nous empilons les contraintes environnementales.

Madame la rapporteure, vous vouliez poser le débat sur le SRP+10, qui ne bénéficie ni aux producteurs, ni aux consommateurs. Merci d'avoir remis l'église au milieu du village par votre amendement. Notre groupe votera ce texte, qui apporte certaines réponses, mais nous attendons la CMP avec impatience. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

M. Franck Menonville .  - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) Le 14 octobre 2021, lors de l'examen de la proposition de loi visant à protéger la rémunération des agriculteurs, j'appelais à compléter et corriger la loi Égalim. Dès 2020, j'évoquais déjà les espoirs déçus. Notre groupe de suivi, présidé par Daniel Gremillet, invitait à la révision du texte. De fait, le Sénat a beaucoup enrichi la loi Égalim 2 : non-négociabilité des matières premières agricoles, encadrement des marques de distributeur, simplification de l'affichage.

Nous poursuivons le travail pour garantir une juste répartition de la valeur et une juste rémunération à nos agriculteurs. Le déséquilibre des négociations est exacerbé cette année, entre crise énergétique et pression inflationniste. La guerre des prix a conduit à une destruction de la valeur et à la destruction d'emplois. De plus, une pression croissante pèse sur les industries agroalimentaires -  cruciales à l'export.

Nous nous réjouissons donc de cette nouvelle proposition de loi.

L'article 2 relatif à l'expérimentation du SRP a fait débat. Nous devons nous assurer que le ruissellement profite à tous les maillons de la chaîne. C'est pourquoi nous soutenons les amendements visant à reconduire l'expérimentation tout en apportant des correctifs.

Notre groupe plaide pour le partage de la valeur et une relation commerciale équilibrée et gagnant-gagnant entre distributeurs et producteurs.

Les pénalités logistiques sont certes nécessaires, mais doivent être encadrées pour éviter les abus. Elles ne sont pas adaptées à toutes les filières, notamment les grossistes, et je me félicite que plusieurs de mes amendements en ce sens aient été adoptés en commission.

Malgré les textes successifs, les déséquilibres structurels demeurent, avec une distribution puissante et très concentrée. D'où la nécessité d'une grande loi de régulation pour corriger la loi de modernisation de l'économie. Je pense à la loi d'orientation à venir, mais aussi à la proposition de loi Duplomb-Mérillou-Louault sur la compétitivité de la ferme France.

Le groupe INDEP votera ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe UC et sur quelques travées du groupe Les Républicains)

M. Joël Labbé .  - (Applaudissements sur les travées du GEST) Ce texte, que certains appellent Égalim 3, démontre la difficulté à rééquilibrer les relations commerciales sans mesures structurantes. Dans un contexte de concurrence internationale poussant au moins-disant social, environnemental et sanitaire, et dans un marché dominé par la grande distribution, les contournements et effets de bord des lois Égalim 1 et 2 sont nombreux. Le secret des affaires rend complexe l'évaluation de leur efficacité.

Des mesures structurelles s'imposent pour rééquilibrer le rapport de force : cessons de passer des accords de libre-échange, imposons des clauses miroir pour les produits importés, adoptons des mécanismes de régulation des marchés au niveau européen.

À rebours de certaines enseignes qui ne cherchent qu'à faire pression sur les prix payés aux producteurs et fournisseurs, nous voulons redonner leur valeur aux produits alimentaires et mettre en place une sécurité sociale de l'alimentation.

Cela passe aussi par la rémunération des services écosystémiques rendus par les systèmes agricoles locaux et durables, par la relocalisation de l'alimentation et le soutien aux filières locales et à la restauration collective.

Nous défendrons un amendement interdisant que les contrats entre producteurs et distributeurs fixent un prix inférieur au coût de production - c'est le seul moyen de garantir un revenu paysan digne.

Ce texte comporte certaines avancées, notamment sur les pénalités logistiques ou sur le contournement de la loi par les centrales d'achat à l'étranger. Nous nous réjouissons qu'un compromis ait été trouvé sur le SRP. Le ruissellement doit être effectif !

Nous voterons cette proposition de loi, en attendant une grande loi pour une agriculture plus durable et plus juste. Appuyons-nous sur les États généraux de l'alimentation, sur la loi d'avenir agricole de 2014. C'est ainsi que nous avancerons. (Applaudissements sur les travées du GEST ; M. Serge Mérillou applaudit également.)

M. Sebastien Pla .  - (Applaudissements sur les travées du groupe SER) Ce texte prétend armer l'industrie agroalimentaire contre les pratiques de la grande distribution. Fournisseurs contre distributeurs : un combat de géants contre des titans de l'alimentation ! Les premiers arguent de l'explosion des coûts, les seconds veulent des prix toujours plus bas. Mais ne soyons pas dupes : d'un bout à l'autre de la chaîne alimentaire, les intermédiaires font leurs marges sur le dos des agriculteurs et des consommateurs.

La commission a reconduit le SRP+10 pour éviter une nouvelle guerre des prix : quelle sage décision de la majorité sénatoriale qui, la semaine dernière encore, le jugeait inutile et inefficace ! L'approche du Salon de l'agriculture fait des miracles...

Ce texte se voudrait une loi Égalim 3 mais fait l'impasse sur le revenu des paysans. La production agricole a augmenté de 17 % en valeur selon l'Insee, conséquence de l'envolée du coût de l'énergie et des matières premières ; en volume, l'augmentation est de 0,8 %.

Il est temps de proposer enfin une grande loi agricole.

Prenons garde à ce que ce texte ne serve pas de prétexte aux mastodontes de l'agroalimentaire pour gonfler leurs marges. Ce n'est pas ainsi que l'on défendra notre souveraineté alimentaire et la compétitivité de la ferme France !

Avec l'inflation, les consommateurs opèrent une descente en gamme dans le choix des produits. Nous espérions que le Gouvernement exigerait que les industriels et distributeurs amortissent les hausses pour protéger le pouvoir d'achat des Français.

Après Égalim 1 et 2, vous pourriez proposer cinquante nouvelles versions que les consommateurs ne trouveraient toujours pas leur compte, ni les paysans.

Ce ne sont ni l'industrie agroalimentaire ni les distributeurs qui souffrent, mais bien la ferme France, et notre capacité à rémunérer dignement ceux qui nous nourrissent. (Applaudissements sur les travées du groupe SER)

M. Laurent Duplomb .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Égalim 1, 2, puis 3... nous pourrions aller jusqu'à l'infini !

Égalim 1 devait améliorer le revenu des agriculteurs, ce fut loin d'être le cas. Rappelez-vous : le titre I visait à équilibrer les relations commerciales grâce à la création du SRP+10 et à l'encadrement des promotions, ce qui devait entraîner un ruissellement vers les revenus des agriculteurs. Mais la loi comportait aussi un titre II, objet de 2 500 amendements à l'Assemblée nationale, qui tous vilipendaient l'agriculture française : interdiction des remises, rabais et ristournes ; séparation du conseil et de la vente... La cible du revenu des agriculteurs a été ratée.

On a donc incité les agriculteurs à monter en gamme, en oubliant que beaucoup de Français souhaitent manger des produits français - mais de l'entrée de gamme, de la moyenne gamme, pas du Hermès ! Ne prôner que la montée en gamme, c'était mettre sous le tapis le problème de la compétitivité, et ouvrir grand la porte à des importations qui, elles, ne respectent pas nos normes.

Finalement, le message véhiculé par Égalim 1 était que l'agriculture française n'était ni saine ni durable. Or il y avait 25 000 morts d'intoxications alimentaires en 1950, 250 aujourd'hui. Notre agriculture est un modèle dans le monde : respectueuse des territoires, des produits, elle fait notre richesse patrimoniale.

Égalim 2, c'était un peu meilleur, sans doute parce que le ministre était un peu meilleur : contractualisation, non-négociabilité des matières premières, encadrement de pénalités logistiques parfois quasi mafieuses : 150 000 euros de pénalités pour 15 000 euros de dégâts, c'est disproportionné et inadmissible. Sur ma proposition, on a expérimenté la sortie des fruits et légumes frais du SRP+10, à la demande de la filière, qui était pénalisée.

Égalim 3 reprend les sujets sur lesquels nous vous alertions, en vain... Nous vous avions prévenu que la loi serait contournée par un recours à des plateformes européennes : chassez le naturel, il revient au galop ! Nous aurions pu régler le problème dès le premier texte...

Enfin, nous sortons les fruits et légumes du SRP+10 avec Égalim 3. Oui, nous étions favorables, en commission, à sa suppression totale. Les 600 millions d'euros donnés à la grande distribution grâce à ce dispositif ne ruissellent pas vers les agriculteurs. Nous avons finalement accepté une position de compromis.

M. Jean-Baptiste Lemoyne.  - Ah !

M. Laurent Duplomb.  - La filière fruits et légumes perd chaque année 93 millions d'euros avec le SRP+10 : sortons-la du dispositif !

Mettons un terme aux pénalités logistiques. Quand Auchan et Casino les ont baissées, Leclerc et Carrefour les ont augmentées !

Acceptons la non-négociabilité des matières premières agricoles.

Le mal endémique de notre pays, c'est la perte de notre compétitivité. Nous avons déposé une proposition de loi, riche de 26 articles qui visent à arrêter les surtanspositions, à améliorer le cadre fiscal, à encourager l'innovation, à rendre confiance aux agriculteurs, à ce que les Français soient fiers de leur agriculture. C'est ainsi que nous retrouverons notre souveraineté. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; M. Pierre Louault applaudit également.)

M. Marc Fesneau, ministre.  - Sur les DPH, 90 % des produits sont liés à des multinationales, qui savent se défendre : la marge n'est pas un sujet pour elles.

Monsieur Lemoyne, merci pour vos propos.

Monsieur Mérillou, vous dites que la loi est une goutte d'eau. Je ne le crois pas. Le sujet de la rémunération est sur la table depuis longtemps. Nous essayons de progresser au fur et à mesure.

Notre philosophie est de partir du prix de la matière première agricole pour fixer le prix : c'est tout l'inverse du ruissellement.

Monsieur Gay, vous avez dit que les intérêts sont irréconciliables : c'est l'honneur de notre fonction d'essayer de les conjuguer. Nous recherchons un point d'équilibre, même si c'est difficile, tant le rapport de force est déséquilibré. L'évaluation de la loi est une question importante.

Pour ma part, je n'ai jamais parlé de loi Égalim 3. Je considère qu'il s'agit d'adapter certaines dispositions de la loi Égalim 2.

M. Jean-Baptiste Lemoyne.  - 2+ !

M. Marc Fesneau, ministre.  - Il approfondit certains sujets, comme les pénalités logistiques ou le contournement de la loi par les centrales d'achat à l'étranger.

Les relations commerciales sont complexes : nous essayons de les améliorer, avec modestie et détermination, en ajustant les dispositifs. Si la solution était facile, elle aurait déjà été mise en oeuvre !

Monsieur Duplomb, je suis d'accord : il est sidérant de voir des promotions du type « deux paquets de pâtes pour le prix d'un ». Cela n'existe que dans l'alimentation. C'est le résultat d'une dérive collective, hélas. Les lois Égalim 1 et 2 ont tenté d'y remédier. Le prix doit offrir une juste rémunération aux agriculteurs.

À la télévision, des chefs de grandes enseignes affirment lutter contre l'inflation, dans l'intérêt des consommateurs. Mais l'intérêt des consommateurs, c'est aussi qu'on continue à produire en France ! Ce qui passe par une juste rémunération. N'opposons pas la rémunération des agriculteurs et la lutte contre l'inflation.

Les seuls à être opposés au SRP+10, depuis le début, n'étaient ni les producteurs ni les transformateurs, mais l'étage du dessus... C'est donc qu'ils estiment que la mesure ne va pas dans leur sens.

Monsieur Cabanel, ce texte n'est pas une loi Égalim 3, ce n'est pas un sparadrap : c'est une étape. Il ne résoudra pas tous les problèmes de l'agriculture française, mais la rémunération itérée est un moyen de retrouver des marges pour l'investissement.

« Un dialogue de raison et de confiance », dites-vous : une rémunération juste est dans l'intérêt des producteurs, des transformateurs et des distributeurs. Dans une négociation, le seul objectif est-il vraiment d'écraser l'autre, monsieur Gay ? Non. Tous participent à la chaîne alimentaire. Les distributeurs constatent que certains produits manquent, car les fournisseurs ne veulent pas vendre au tarif proposé.

Monsieur Gremillet, il est vrai que nos industries agroalimentaires sont fragiles, qu'elles ont besoin de se moderniser. Nous recherchons avec Bercy des solutions sur ce volet trop peu abordé.

Le sujet du lait est complexe, vous le savez. Désormais, les prix baissent en Allemagne et montent en France ; nous étions désynchronisés, car des opérateurs ont tardé à bouger... Nous faisons en sorte qu'ils soient à la hauteur de la rémunération.

Je suis frappé du nombre de mes homologues qui me demandent des éléments sur Égalim - en Europe et même au Canada. Signe que ces sujets sont d'actualité.

Monsieur Menonville, mais j'essaie d'avancer sur les sujets importants, sans avoir la prétention de résoudre tous les problèmes par une loi. Je ne pense pas que la loi Le Foll l'ait fait, monsieur Labbé. L'essentiel est de construire un pacte avec la société, en disant ce que nous attendons de notre agriculture : vous avez raison, monsieur Duplomb. La question de la souveraineté est beaucoup plus prégnante aujourd'hui qu'en 2018. Votre rapport montre bien que la dégradation de la souveraineté française est une oeuvre collective... La question est un impensé d'Égalim.

Monsieur Pla, l'article 3 est un pas sur le chemin pour retrouver notre souveraineté. Nous y allons étape par étape.

Monsieur Duplomb, ce texte s'inscrit dans la philosophie générale d'Égalim 1. Des opérateurs ont tendance à contourner la réglementation, c'est vrai. Il faut évaluer la loi, la faire évoluer, mais aussi stabiliser certains dispositifs, comme le SRP, et dépasser le pas de temps annuel. Égalim 2 a été votée en octobre 2021 et mise en application au printemps dernier ! En plein épisode inflationniste lié à la guerre en Ukraine, nous ne sommes pas en mesure de juger et de jauger : il faut prolonger encore l'expérimentation.

Discussion des articles

L'article 1er est adopté.

APRÈS L'ARTICLE 1er

Mme la présidente.  - Amendement n°28, présenté par MM. Labbé, Salmon, Benarroche, Breuiller, Dantec, Dossus, Fernique et Gontard, Mme de Marco, M. Parigi et Mmes Poncet Monge et M. Vogel.

Après l'article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le 1° du III de l'article L. 631-24 du code rural et de la pêche maritime est complété par les mots et une phrase ainsi rédigée : « , tenant compte du fait que ce prix ne peut pas être inférieur au coût de production. Celui-ci peut être déterminé à l'appui des indicateurs de référence de coûts pertinents de production en agriculture tels que mentionnés au quinzième alinéa du présent III ; »

M. Joël Labbé.  - Cet amendement, déjà présenté lors de l'examen d'Égalim 2, précise que le prix défini par contrat ne peut être inférieur aux coûts de production. Avec les difficultés du bio, les prix payés ont encore baissé cette année, concomitamment aux aléas climatiques et à la flambée des prix de l'énergie et des matières premières. C'est la preuve qu'Égalim 2 ne fonctionne pas. Une telle mesure est certes complexe à mettre en oeuvre, mais il faut assurer un revenu minimal aux agriculteurs et proscrire la vente à perte.

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure.  - Cet amendement revient à fixer, dans tous les contrats, un prix plancher. C'est contraire au droit européen, car cela revient à administrer les prix. Dans son avis sur la loi Égalim 1, le Conseil d'État avait indiqué que les parties devaient être libres de déterminer les indicateurs, sans prix minimal. Avis défavorable - d'autant qu'un prix plancher deviendra vite un prix plafond.

M. Marc Fesneau, ministre.  - Je comprends l'intention, mais votre amendement créerait une usine à gaz. Comment différencier d'un territoire à un autre ? De plus, il incitera tout le monde à s'aligner sur le prix plancher. Avis défavorable.

L'amendement n°28 n'est pas adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°29, présenté par MM. Labbé, Salmon, Benarroche, Breuiller, Dantec, Dossus, Fernique et Gontard, Mme de Marco, M. Parigi et Mmes Poncet Monge et M. Vogel.

Après l'article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

À la deuxième phrase du quinzième alinéa du III de l'article L. 631-24 du code rural et de la pêche maritime, après le mot : « agriculture », sont insérés les mots : « , intégrant la rémunération de la main-d'oeuvre agricole salariée et non salariée, ».

M. Daniel Salmon.  - Cet amendement précise la définition du coût de production pris en compte dans les contrats, qui doit intégrer une rémunération équitable de la main-d'oeuvre agricole.

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure.  - Pour être conformes au droit européen, les indicateurs de coût de production doivent être librement déterminés par les parties au contrat. De plus, les situations sont très variables selon les filières, voire les exploitations. Si le coût de production est considéré comme pertinent par une filière, l'interprofessionnelle en tiendra compte. Avis défavorable.

M. Marc Fesneau, ministre.  - Même avis. Il est déjà possible d'intégrer la rémunération de la main-d'oeuvre. Laissons les parties s'accorder sur les indicateurs les plus pertinents. Avis défavorable.

M. Joël Labbé.  - C'est possible, mais pas obligatoire... Dans tous les secteurs, il faut tenir compte du coût salarial.

L'amendement n°29 n'est pas adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°26, présenté par MM. Labbé, Salmon, Benarroche, Breuiller, Dantec, Dossus, Fernique et Gontard, Mme de Marco, M. Parigi et Mmes Poncet Monge et M. Vogel.

Après l'article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le quinzième alinéa du III de l'article L. 631-24 du code rural et de la pêche maritime est complété par une phrase ainsi rédigée : « Pour déterminer les indicateurs utilisés au titre du présent III, les parties doivent également s'appuyer sur les modalités de fixation du prix des systèmes de garantie et des labels de commerce équitable définis à l'article 60 de la loi n° 2005-882 du 2 août 2005 en faveur des petites et moyennes entreprises. »

M. Joël Labbé.  - Défendu.

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure.  - Avis défavorable.

M. Marc Fesneau, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°26 n'est pas adopté.

ARTICLE 2

M. Jean-François Longeot .  - Je suis satisfait de constater que notre amendement, largement cosigné, a ouvert un débat sur la pérennité du SRP+10. Il aurait été inconcevable que la lutte contre la vie chère soit menée au détriment des rémunérations des agriculteurs. Quelle image donnerions-nous de notre assemblée !

L'inspection générale des finances (IGF) chiffre l'impact du SRP+10 à 0,17 % de l'inflation. Ce n'est pas rendre honneur au labeur des agriculteurs que de le suspendre. La valeur travail, si chère au Sénat, doit rester pour nous un totem.

Je me félicite donc que la rapporteure se soit ralliée à la position de la quasi-totalité des groupes. Le Sénat reste la chambre de l'agriculture française.

M. Laurent Duplomb .  - Ce n'est pas très fair-play pour la rapporteure, qui travaille avec Daniel Gremillet au suivi des lois Égalim 1 et 2 depuis quatre ans. Ils ont établi que le SRP+10, une manne de 600 à 800 millions d'euros, ne ruisselle pas sur le revenu des agriculteurs. Il aurait été inconcevable que Mme Loisier remette en question ce qu'elle dit depuis quatre ans. Je suis très attaché à la constance en politique. (Applaudissements sur quelques travées du groupe Les Républicains)

Mme Anne-Catherine Loisier , rapporteure.  - Le rôle du législateur est aussi de contrôler la bonne application de ce qu'il a voté. Le débat sur l'efficacité du SRP+10 n'a pas eu lieu à l'Assemblée nationale, nous tenions à ce qu'il se tienne au Sénat. Nous tenions à mettre la pression sur les distributeurs pour qu'ils le reversent aux agriculteurs plutôt que de le garder à leur profit, avec des cagnottes et des cartes de fidélité.

Le principe du SRP+10 n'est pas en cause, mais son efficacité.

Mon amendement vise à prolonger le SRP jusqu'en 2025 - après six ans d'expérimentation, nous aurons des éléments probants ; à exclure les fruits et légumes, qui sont pénalisés ; à faire la transparence sur l'utilisation du mécanisme à travers une restitution annuelle au ministre et aux présidents des commissions compétentes des deux chambres.

M. Michel Canévet .  - Mes collègues bretons et moi-même sommes très préoccupés par la situation de l'agriculture et de l'agroalimentaire dans notre région. La législation a légèrement amélioré le revenu des agriculteurs ; il faut continuer à s'assurer que la volonté du législateur est respectée. Les acteurs agricoles et industriels nous appellent à la prudence dans les évolutions que nous proposons.

M. Pierre Louault .  - J'ai beaucoup consulté, notamment les syndicats et les entreprises de l'agroalimentaire. Supprimer le SRP+10 aurait envoyé un signal catastrophique : les grandes surfaces n'attendent que cela pour mettre à bas Égalim.

M. Jean-Baptiste Lemoyne.  - Eh oui !

M. Pierre Louault.  - Ce qu'elles souhaitent, c'est que les agriculteurs bradent leurs produits !

Je remercie la rapporteure d'avoir proposé une position de consensus en excluant les fruits et légumes.

M. Daniel Gremillet .  - Le sujet est complexe et stratégique. Il fallait le mettre sur la table, comme l'a dit la rapporteure. Le SRP ne bénéficie ni au producteur ni au consommateur. Le défi, c'est d'apporter une réponse aux agriculteurs sur la non-négociabilité de la MPA - ce que le SRP+10 ne remet pas en cause.

Tous les travaux de notre groupe de suivi ont été confortés, notamment par une étude de l'UFC-Que Choisir, chiffres à l'appui.

Il fallait exclure les fruits et légumes du dispositif. Vous l'avez fait : chapeau.

M. Henri Cabanel .  - Merci à la rapporteure d'avoir ouvert ce débat, oublié à l'Assemblée nationale.

Le SRP+10, au fond, c'est le juste prix payé à l'agriculteur, et le juste prix payé par le consommateur. Le supprimer, c'est autoriser la grande distribution à ne pas vendre au juste prix, sur le dos des agriculteurs - car la marge est toujours prise sur le plus faible. On ne peut laisser penser que l'on peut vendre à prix coûtant.

La filière des fruits et légumes est certes spécifique, mais le SRP+10 donnait néanmoins un peu plus de marge aux agriculteurs. Quoi qu'il en soit, le compromis trouvé est satisfaisant.

Mme Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques .  - Je salue le travail du groupe de suivi d'Égalim ; avec Mme Loisier et M. Gremillet, nous gardons toujours un oeil sur la mise en oeuvre de ce texte.

Nous l'avons démontré, le SRP+10 ne ruisselle pas comme prévu sur le revenu agricole. Ce sont, monsieur Cabanel, la contractualisation et la non-négociabilité des prix des matières premières qui ruissellent.

On aurait pu penser que le SRP+10 donnerait de l'air dans les négociations, notamment sur la MPI.

Pourtant, avant que nous supprimions ce système en commission, je n'ai pas l'impression que les négociations se passaient dans un nid d'anges... Ce n'est pas le SRP+10 qui les rend moins dures.

Le timing de ce texte est mauvais, à treize jours de la fin des négociations. La suppression du SRP+10 a suscité un vif débat. Je m'en réjouis, car nous n'avons pas fini de découvrir les effets de bord de ce dispositif. Un exemple : en cette période de forte inflation, Carrefour déréférence massivement des marques pour donner la priorité aux premier prix, aux marques distributeur et à une marque leader dans chaque catégorie.

Ce débat n'est pas médiocre. La question des effets de bord mérite d'être posée, et je remercie Mme la rapporteure d'avoir eu le courage de le faire. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

M. Marc Fesneau, ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire .  - Je souscris à ces propos. Évaluer, débattre, c'est toujours positif. Seulement, personne à ce jour ne connaît précisément les conséquences du SRP+10.

En effet, monsieur Louault, opérateurs et distributeurs doivent savoir que nous faisons preuve de constance. Depuis le début, les distributeurs nous demandent la suppression du dispositif.

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure.  - Un seul le demande !

M. Marc Fesneau, ministre.  - Continuons à évaluer, dans la durée. Nous en tirerons les conséquences.

Mme la présidente.  - Amendement n°31, présenté par M. Gay et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Rédiger ainsi cet article :

L'article 125 de la loi n° 2020-1525 du 7 décembre 2020 d'accélération et de simplification de l'action publique est ainsi modifié :

I.  -  Le premier alinéa du IV est ainsi modifié :

1° Après le mot : « Parlement », la fin de la première phrase est ainsi rédigée : « , avant le 1er octobre de chaque année, un rapport évaluant les effets du présent article sur la construction des prix de vente des denrées alimentaires et des produits destinés à l'alimentation des animaux de compagnie. » ;

2° Après la même première phrase, est insérée une phrase ainsi rédigée : « Ce rapport présente notamment les effets relatifs au seuil de revente à perte majoré et évalue la création de valeur résultant de cette mesure ainsi que sa répartition entre les différents acteurs concernés, filière par filière. » ;

3° À la deuxième phrase, les mots : « remis avant le 1er octobre 2022 » sont supprimés ;

4° Sont ajoutés deux alinéas ainsi rédigés :

« Ce rapport est établi après consultation de l'ensemble des acteurs économiques concernés de la filière alimentaire.

« L'observatoire de la formation des prix et des marges des produits alimentaires, mentionné à l'article L. 682-1 du code rural et de la pêche maritime, est associé à l'élaboration de ce rapport annuel d'évaluation. »

II.  -  Au VIII, l'année : « 2023 » est remplacée par l'année : « 2026 ».

Mme Michelle Gréaume.  - Par cet amendement d'appel, nous relayons les craintes des syndicats agricoles quant à la suspension sans préavis du SRP+10. Les agriculteurs ne peuvent être la variable d'ajustement. Le SRP+10 est un barrage dans la guerre des prix, et fait l'objet d'un consensus des acteurs de la filière.

Mme la présidente.  - Amendement n°5 rectifié, présenté par MM. Lemoyne et Buis, Mme Schillinger, MM. Théophile, Rohfritsch, Richard et Rambaud, Mme Phinera-Horth, M. Patriat, Mme Cazebonne, MM. Bargeton, Dennemont et Dagbert, Mme Duranton, MM. Gattolin et Hassani, Mme Havet, MM. Haye, Iacovelli, Kulimoetoke, Lévrier, Marchand, Mohamed Soilihi et Patient et Mme Ract-Madoux.

Rédiger ainsi cet article :

Au VIII de l'article 125 de la loi n° 2020-1525 du 7 décembre 2020 d'accélération et de simplification de l'action publique, l'année : « 2023 » est remplacée par l'année : « 2026 ».

M. Jean-Baptiste Lemoyne.  - M. Duplomb a parlé de constance. Le groupe RDPI fait preuve d'une grande constance ; faute d'avoir été entendus en commission, nous proposons à nouveau en séance la prolongation du SRP+10. Nous sommes ravis que la majorité sénatoriale s'y rallie. Nous pensons qu'il faut maintenir la cohérence d'ensemble des lois Égalim 1 et 2.

Mme la présidente.  - Amendement identique n°10 rectifié, présenté par M. Mérillou et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

M. Serge Mérillou.  - Le groupe SER aussi est constant. Nous proposons de rétablir le SRP+10. Reste que les lois Égalim 1 et 2 ne vont pas assez loin. Le SRP+10 n'a pas atteint ses objectifs, le ruissellement tant attendu n'est pas au rendez-vous et les principales victimes sont en début de chaîne. Il faudra, rapidement, remettre à plat Égalim.

Mme la présidente.  - Amendement identique n°18, présenté par le Gouvernement.

M. Marc Fesneau, ministre.  - Avec le même esprit de constance, nous rétablissons le dispositif dans sa version initiale, sans exclusion des fruits et légumes. Nous maintenons le cap de la juste rémunération, sans préjudice d'évolutions qui pourront intervenir.

Mme la présidente.  - Amendement identique n°19 rectifié bis, présenté par MM. Cabanel et Roux, Mme N. Delattre, MM. Artano et Bilhac, Mme M. Carrère, MM. Fialaire, Gold, Guiol, Requier et Corbisez, Mmes Guillotin et Pantel et M. Chasseing.

M. Henri Cabanel.  - Nous n'avons pas assez de recul sur les effets du dispositif. Toutes les organisations professionnelles agricoles doivent rester unies, ne faisons pas le jeu des distributeurs : diviser pour mieux régner.

Mme la présidente.  - Amendement n°2 rectifié octies, présenté par M. Longeot, Mmes Jacquemet et Vermeillet, M. Moga, Mmes Guidez et Ract-Madoux, MM. Menonville et Bonnecarrère, Mme N. Goulet, M. Guerriau, Mme Herzog, MM. Guérini, Delcros, Bacci et Bonnus, Mmes Doineau, Thomas et Micouleau, MM. Chatillon, Buis, Duffourg, Capo-Canellas, Decool, S. Demilly, Chauvet et Pellevat, Mme Gatel, MM. Le Nay, Louault et P. Martin, Mmes Sollogoub et de La Provôté, M. Houpert, Mme Saint-Pé, M. Henno, Mmes Muller-Bronn, Perrot et Vérien et MM. A. Marc, Haye, Corbisez et Chasseing.

Rédiger ainsi cet article :

L'article 125 de la loi n° 2020 - 1525 du 7 décembre 2020 d'accélération et de simplification de l'action publique est ainsi modifié :

1° Le I ter est ainsi rédigé :

« I ter.  -  Le I du présent article n'est pas applicable aux produits mentionnés aux parties IX et XI de l'annexe 1 au règlement (UE) n° 1308/2013 du Parlement européen et du Conseil du 17 décembre 2013 portant organisation commune des marchés des produits agricoles et abrogeant les règlements (CEE) n° 922/72, (CEE) n° 234/79, (CE) n° 1037/2001 et (CE) n° 1234/2007 du Conseil.   

« Par dérogation, un arrêté du ministre chargé de l'agriculture peut fixer la liste de certains de ces produits pour lesquels le I du présent article est applicable, sur demande motivée par l'interprofession représentative des produits concernés ou, lorsqu'il n'existe pas d'interprofession pour ce type de produits, par une organisation professionnelle représentant des producteurs. » ;

2° Le premier alinéa du IV est ainsi modifié :

a) A la première phrase, les mots : « respectivement avant le 1er octobre 2021 et avant le 1er octobre 2022 deux rapports » sont remplacés par les mots : « , avant le 1er octobre de chaque année, un rapport » ;

b) A la deuxième phrase, les mots : « remis avant le 1er octobre 2022 » sont supprimés ;

c) La dernière phrase est supprimée ;

d) Sont ajoutées deux phrases ainsi rédigées : « Ce rapport est établi après consultation de l'ensemble des acteurs économiques concernés de la filière alimentaire. L'observatoire de la formation des prix et des marges des produits alimentaires, mentionné à l'article L. 682-1 du code rural et de la pêche maritime, est associé à l'élaboration de ce rapport annuel d'évaluation ».

3° Après le même IV, il est inséré un IV bis ainsi rédigé :

« IV bis.  -  Chaque distributeur de produits de grande consommation transmet au ministre en charge de l'économie et au ministre en charge de l'agriculture, avant le 1er septembre de chaque année, un document présentant la part du surplus de chiffre d'affaires enregistré à la suite de la mise en oeuvre du I qui s'est traduite par une revalorisation des prix d'achat des produits alimentaires et agricoles auprès de leurs fournisseurs. Le Gouvernement transmet aux présidents des commissions chargées des affaires économiques de chaque assemblée ce document, qui ne peut être rendu public. » ;

4° Le VIII est ainsi rédigé :

« VIII.  -  Les dispositions du I et du premier alinéa du IV du présent article sont applicables jusqu'au 15 avril 2025.

« Les dispositions du II et du second alinéa du IV du présent article sont applicables jusqu'au 15 avril 2026. »

M. Jean-François Longeot.  - Signé par bon nombre de collègues issus de différents groupes, cet amendement a permis d'ouvrir le débat sur la pérennité du dispositif.

Mme la présidente.  - Amendement identique n°11 rectifié bis, présenté par M. Mérillou et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

M. Sebastien Pla.  - Cet amendement de repli rétablit le SRP+10 pour deux ans. Il maintient l'exclusion des fruits et légumes, en prévoyant la possibilité de réintégrer certains d'entre eux par décret. À terme, il faudra revoir le dispositif, d'où cette prolongation pour une durée limitée.

Mme la présidente.  - Amendement identique n°22 rectifié, présenté par Mme N. Delattre, MM. Cabanel, Artano et Bilhac, Mme M. Carrère, MM. Corbisez, Fialaire et Gold, Mme Guillotin, M. Guiol, Mme Pantel et MM. Requier et Roux.

M. Henri Cabanel.  - Cet amendement de Mme Delattre est un amendement de repli, dans le sens de celui de Mme la rapporteure.

Mme la présidente.  - Amendement identique n°30 rectifié, présenté par M. Gay et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Mme Michelle Gréaume.  - Le relèvement du SRP+10 a-t-il amélioré le revenu des distributeurs ? (« Non ! » sur plusieurs travées du groupe Les Républicains) A-t-il entraîné une hausse des prix au bénéfice des distributeurs et industriels les plus puissants ?

Pour certains, l'effet inflationniste est réel - les associations de défense des consommateurs l'évaluent à 1,6 milliard d'euros en deux ans. Pour d'autres, l'abandon du dispositif risque de relancer la guerre des prix. La vérité, c'est que nous n'avons pas d'évaluation fiable des effets du dispositif.

Avec cet amendement de compromis et d'équilibre, nous proposons une prolongation jusqu'en 2025, en excluant les fruits et légumes et en rendant obligatoire une évaluation fine. Mais ce dispositif reste une rustine face au déséquilibre structurel entre les acteurs, lié à la puissance des centrales d'achats. Nous devons entendre les agriculteurs, partie la plus fragile dans ces négociations libérales.

Mme la présidente.  - Amendement identique n°38, présenté par Mme Loisier, au nom de la commission.

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure.  - Nous proposons la prolongation du SRP+10 jusqu'en 2025, le renforcement de la transparence et la sortie de la filière fruits et légumes. Nous sommes constants dans notre volonté d'assurer la transparence et de mettre la pression sur les distributeurs. Le seul bon-vouloir des distributeurs ne peut suffire : s'ils ne jouent pas le jeu, le législateur interviendra.

L'amendement n°20 rectifié est retiré.

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure.  - Tous ces amendements proposent une prolongation du SRP+10, la divergence portant sur la date butoir : les amendements identiques nos2 rectifié octies, 11 rectifié bis, 22 rectifié, 30 rectifié et 38 proposent 2025 ; l'amendement n°31 et les amendements identiques nos5 rectifié, 10 rectifié, 18 et 19 rectifié visent 2026. Autre sujet de divergence : les premiers excluent les fruits et légumes, pas les seconds.

Avis favorable aux amendements identiques nos2 rectifié octies, 11 rectifié bis, 22 rectifié, 30 rectifié et 38. Avis défavorable aux autres. Je demande la priorité de vote sur l'amendement n°38.

M. Marc Fesneau, ministre.  - Le Gouvernement souhaite maintenir en l'état le dispositif de la loi Égalim 2. Le débat a été utile, car les positions ont évolué. Avec toujours le même souci de constance, le Gouvernement est favorable aux amendements nos31 et 5 rectifié, ainsi qu'aux amendements identiques. Je suis défavorable aux autres amendements, qui envoient des signaux de détricotage. Le SRP+10, c'est un bloc.

Mme la présidente.  - Le Gouvernement s'oppose-t-il à la demande de priorité sur l'amendement n°38 et les amendements identiques nos2 rectifié octies, 11 rectifié bis, 22 rectifié et 30 rectifié ? (M. le ministre manifeste qu'il n'a pas d'opposition.)

La priorité est ordonnée.

M. Laurent Duplomb.  - Ne pas vouloir supprimer le SRP+10 est une aberration. Cette mesure coûte 30 millions d'euros par an à la filière tomate, 25 millions pour les pommes et les poires, 4 millions pour les asperges, 6 millions pour les carottes, 11 millions pour les melons, 15 millions pour les fraises. En tout, 91 millions d'euros sont perdus chaque année depuis quatre ans. On ne peut pas dire que l'on ne sait pas, que les producteurs ne sont pas négativement impactés ! C'est du dogmatisme. Avec 600 millions d'euros donnés aux grandes et moyennes surfaces (GMS), vous achetez la paix. Supprimons le SRP+10 pour ceux qui perdent de l'argent.

M. Christophe-André Frassa.  - Bravo !

M. Marc Fesneau, ministre.  - Non, nous n'achetons pas la paix. Au reste, à vouloir acheter la paix, on obtient la guerre. Les syndicats agricoles ne veulent pas la suppression du SRP+10. Se pose aussi la question de la contractualisation des filières -  c'est de cette façon qu'elles retrouveront des éléments de rémunération et de souveraineté.

M. Franck Montaugé.  - Je veux être sûr de bien comprendre. La rapporteure a demandé la priorité sur son amendement, identique au nôtre, mais qui est antérieur. Ce n'est pas très fair-play. Pour notre part, nous n'avons jamais changé de position.

Mme la présidente.  - J'ai été claire : la priorité porte sur l'amendement de la rapporteure et les amendements identiques, dont le vôtre.

Mme Sophie Primas, présidente de la commission.  - Monsieur Montaugé, il est évident que la demande de priorité concerne l'ensemble des amendements identiques, issus de plusieurs groupes. Je vous en avais averti et j'y suis très attachée.

M. Henri Cabanel.  - Monsieur Duplomb, il faut aller au bout de l'analyse : la filière fruits et légumes perd de l'argent à cause du maintien des prix promotionnels par les distributeurs, sur le dos des agriculteurs !

Les amendements identiques nos2 rectifié octies, 11 rectifié bis, 22 rectifié, 30 rectifié et 38 sont adoptés et l'article 2 est ainsi rédigé.

L'amendement n°31 n'a plus d'objet, non plus que les amendements identiques nos5 rectifié, 10 rectifié, 18 et 19 rectifié bis.

APRÈS L'ARTICLE 2

Mme la présidente.  - Amendement n°21 rectifié, présenté par MM. Cabanel, Artano et Bilhac, Mmes M. Carrère et N. Delattre, MM. Fialaire, Gold, Guiol, Requier, Roux et Corbisez et Mmes Guillotin et Pantel.

Après l'article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Dans un délai d'un an à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport établissant avec précision les effets de la majoration du seuil de revente à perte, prévue par la loi n° 2018-938 du 30 octobre 2018 pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous et prorogée par la loi n° 2020-1525 du 7 décembre 2020 d'accélération et de simplification de l'action publique, sur la vente de produits de grande consommation.

M. Henri Cabanel.  - J'ai entendu que l'amendement de la rapporteure satisfait le mien.

L'amendement n°21 rectifié est retiré.

L'article 2 bis A est adopté.

APRÈS L'ARTICLE 2 BIS A

Mme la présidente.  - Amendement n°1, présenté par MM. Cadec, Reichardt, Charon et Henno, Mme Gruny, MM. Panunzi, Chasseing, Sol, Anglars, Burgoa, J.P. Vogel, Calvet, Houpert, Rapin, Cuypers, Pellevat, Chauvet, Savary, Hingray, Chatillon et Genet, Mme Lassarade, MM. Somon et Belin, Mme Lopez et MM. Laménie et Longeot.

Après l'article 2 bis A

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le 4° du I de l'article L. 442-1 du code de commerce est ainsi modifié :

1° Les mots : « S'agissant des produits alimentaires et des produits destinés à l'alimentation des animaux de compagnie soumis au I de l'article L. 441-1-1, » sont supprimés ;

2° La référence : « L. 443-8 » est remplacée par la référence : « L. 441-3 ».

M. Jean-François Longeot.  - Défendu.

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure.  - Avis favorable. Ce point a été débattu lors des débats d'Égalim 2, mais l'article 45 nous a entravés. Il est hors de question que les produits non alimentaires ne soient pas protégés : la non-discrimination tarifaire est un principe essentiel.

M. Marc Fesneau, ministre.  - Avis défavorable. Ce principe est applicable uniquement aux produits agroalimentaires : il est justifié par un contexte concurrentiel spécifique à l'agroalimentaire, et il ne semble pas pertinent de l'étendre.

L'amendement n°1 est adopté et devient un article additionnel.

ARTICLE 2 BIS (Supprimé)

L'amendement n°36 est retiré.

L'article 2 bis demeure supprimé.

L'article 2 ter A est adopté.

APRÈS L'ARTICLE 2 TER A

Mme la présidente.  - Amendement n°23, présenté par MM. Labbé, Salmon, Benarroche, Breuiller, Dantec, Dossus, Fernique et Gontard, Mme de Marco, M. Parigi et Mmes Poncet Monge et M. Vogel.

Après l'article 2 ter A 

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le Gouvernement remet au Parlement, dans un délai de trois mois à compter de la promulgation de la présente loi, un rapport étudiant la possibilité de la mise en place d'un encadrement des marges des distributeurs sur les produits sous signes d'identification de la qualité et de l'origine afin qu'elle ne puisse pas être supérieures aux marges effectuées sur les produits conventionnels. 

M. Joël Labbé.  - Les pratiques de la grande distribution en matière de marge sur les produits porteurs d'un signe officiel d'identification de la qualité et de l'origine (Siqo), notamment les produits bios, sont problématiques. Un rapport de l'UFC-Que Choisir et les travaux de la Confédération paysanne montrent que les surcoûts proviennent des marges des distributeurs. La FNSEA elle-même a dénoncé ces pratiques.

L'adoption de notre amendement en commission représente une première avancée, mais il faut étudier l'encadrement de ces surmarges pour donner un réel ordre de grandeur entre un produit conventionnel et un produit Siqo. Nous demandons un rapport sur la faisabilité de cet encadrement.

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure.  - En commission, nous avons adopté un amendement de M. Salmon prévoyant que l'Observatoire des prix et des marges se penche sur les produits bio. Vous demandez son élargissement à tous les Siqo. Sagesse.

M. Marc Fesneau, ministre.  - Le travail a en partie été fait en commission. Avis défavorable.

L'amendement n°23 est adopté et devient un article additionnel.

ARTICLE 2 TER B

Mme la présidente.  - Amendement n°17, présenté par le Gouvernement.

Supprimer cet article.

M. Marc Fesneau, ministre.  - Le Gouvernement veut supprimer l'encadrement des promotions pour les produits de grande consommation. Nous comprenons les préoccupations des filières, notamment pour la droguerie, la parfumerie et l'hygiène, mais ce dispositif expérimental devait répondre aux spécificités de la filière alimentaire, caractérisée par un amont très déconcentré et un aval très concentré. La prolongation doit être poursuivie à périmètre constant.

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure.  - Avis défavorable. Le Sénat s'intéresse depuis longtemps aux préjudices et aux effets de bords de la loi Égalim ayant impacté ces rayons. Les promotions peuvent aller aujourd'hui jusqu'à 90 %, autant dire qu'on vend à perte !

Mme Sophie Primas, présidente de la commission.  - Je m'oppose fermement à cet amendement. (M. le ministre fait mine d'en être surpris.) Vous avancez les spécificités du marché alimentaire, mais il n'y a pas beaucoup de différences entre une bouteille de Coca-Cola et une bouteille de shampoing produite par une PME française !

Ces marques souffrent actuellement de promotions disproportionnées. Derrière, il y a des entreprises françaises, des PME, des ETI. Parlez-en à Olivia Grégoire... Beaucoup d'entreprises de la cosmétique et de l'hygiène sont sur le point d'arrêter leur activité.

Les entreprises internationales ont des outils industriels ; lorsqu'elles regardent les résultats depuis Washington ou Francfort, elles s'aperçoivent qu'elles ne font plus de profits en France, et nous devenons pour elles un pays secondaire, ce qui n'est pas dans l'intérêt des consommateurs français.

L'amendement n°17 n'est pas adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°4 rectifié bis, présenté par MM. Canévet, Delcros et Delahaye, Mme N. Goulet, MM. Duffourg et Moga et Mmes Jacquemet et Billon.

Alinéa 3

Rédiger ainsi cet alinéa :

2 ° Le C du II est abrogé ;

M. Michel Canévet.  - Nous souhaitons supprimer l'encadrement à 25 % des promotions en volume sur les produits de l'alimentation et d'hygiène beauté.

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure.  - Il serait dangereux d'encadrer les promotions uniquement en valeur et non en volume. Un distributeur pourrait augmenter fortement les promotions en volume, ce qui aboutirait à l'effet inverse de celui recherché : défendre l'emploi et l'innovation dans ces PME. Si ces PME n'avaient que les promotions pour rivaliser avec les grandes marques, elles devraient en outre plutôt favoriser les promotions en volume. Avis défavorable.

M. Marc Fesneau, ministre.  - Pour les mêmes motifs de cohérence, nous demandons le maintien du périmètre actuel. Avis défavorable.

L'amendement n°4 rectifié bis est retiré.

Mme la présidente.  - Amendement n°24, présenté par MM. Labbé, Salmon, Benarroche, Breuiller, Dantec, Dossus, Fernique et Gontard, Mme de Marco, M. Parigi et Mmes Poncet Monge et M. Vogel.

Alinéa 9, après la deuxième phrase

Insérer une phrase ainsi rédigée : 

Il analyse spécifiquement les impacts sur l'évolution du revenu des agriculteurs et les effets de la mesure sur les petites et moyennes entreprises.

M. Joël Labbé.  - Le rapport proposé à l'article 2 ter B devrait analyser l'effet des promotions sur les PME et sur le revenu agricole. L'encadrement des promotions en volume peut défavoriser des petites entreprises ; il faut proposer des adaptations de ces mesures, afin de protéger le revenu des agriculteurs et de garantir une concurrence loyale entre les entreprises, quelle que soit leur taille. Une plus grande transparence doit être favorisée, afin que le ruissellement de la valeur ait lieu.

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure.  - Il ne s'agit pas d'un rapport nouveau, mais d'un complément à un rapport existant. Avis favorable.

M. Marc Fesneau, ministre.  - Avis défavorable.

L'amendement n°24 est adopté.

L'article 2 ter B, modifié, est adopté.

ARTICLE 2 TER

Mme la présidente.  - Amendement n°12 rectifié, présenté par M. Mérillou et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Rédiger ainsi cet article :

L'article 13 de la loi n° 2018-938 du 30 octobre 2018 pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous, est ainsi modifié :

1° À la seconde phrase du premier alinéa, les mots : « expérimentation de » sont supprimés ;

2° L'article est complété par une phrase ainsi rédigée : « Le Gouvernement remet au Parlement, avant le 31 décembre 2025, un rapport évaluant le développement des conventions mentionnées au premier alinéa et ses impacts sur les différents maillons de la chaîne agroalimentaire. »

M. Serge Mérillou.  - Nous voulons rétablir la pérennisation des conventions tripartites introduite par le groupe socialiste à l'Assemblée nationale, mais supprimée en commission par la rapporteure, qui lui a préféré une expérimentation jusqu'au 31 décembre 2025.

Le rapport d'information de l'Assemblée nationale sur l'évaluation de la loi Égalim préconisait cette pérennisation. Nous pourrions envoyer un signal positif pour la généralisation de ces conventions.

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure.  - Nous partageons votre point de vue sur ces conventions tripartites, mais les pérenniser serait prématuré en raison du manque d'évaluation de leurs conséquences en matière de concurrence. Vous souhaitez pérenniser le dispositif, puis l'évaluer ; nous proposons l'inverse : poursuivons l'expérimentation, évaluons, puis, éventuellement, pérennisons. Avis défavorable.

M. Marc Fesneau, ministre.  - Avis défavorable : il faut évaluer avant de pérenniser.

L'amendement n°12 rectifié n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°13 rectifié, présenté par M. Mérillou et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Alinéa 2, seconde phrase

Remplacer le mot :

décembre

par le mot :

septembre

M. Serge Mérillou.  - Cet amendement de repli vise à avancer de quatre mois la date de remise du rapport d'évaluation sur les conventions tripartites, afin que le législateur ait le temps de trouver un véhicule législatif opportun. Si ce rapport était publié le 15 décembre 2025, le dispositif ne pourrait être pérennisé avant 2026.

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure.  - Avis favorable.

M. Marc Fesneau, ministre.  - C'est du bon sens : en général, je suis plutôt favorable à celui-ci...

L'amendement n°13 rectifié est adopté.

L'article 2 ter, modifié, est adopté.

APRÈS L'ARTICLE 2 TER

M. le président.  - Amendement n°3 rectifié bis, présenté par MM. Canévet, Delcros et Delahaye, Mme N. Goulet, MM. Duffourg et Moga et Mmes Jacquemet et Billon.

Après l'article 2 ter

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article L. 442-1 du code du commerce est complété par un paragraphe ainsi rédigé :

« ....  -  À titre expérimental, pour une durée de deux ans et dès lors que le fournisseur relève de la catégorie des microentreprises, des petites et moyennes entreprises et des entreprises de taille intermédiaire, au sens de l'article 51 de la loi n° 2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l'économie, engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait, par toute personne exerçant des activités de distribution ou de services, de faire obstacle à la prise d'effets du tarif général du fournisseur à la date prévue pour son entrée en vigueur, sous réserve que ce tarif général a été communiqué trois mois avant cette date. Dans ce cadre, le V de l'article L. 441-4, le V de l'article L. 443-8, ainsi que l'obligation d'affichage du prix unitaire des obligations mentionnées au deuxième alinéa du I du même article L. 443-8 ne sont pas applicables »

M. Michel Canévet.  - Nous voulons expérimenter l'autonomie du tarif fournisseur pour une période de deux ans.

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure.  - Même sous la forme d'une expérimentation, les conséquences seraient importantes pour les négociations commerciales : il deviendrait illégal pour un distributeur de ne pas accepter le tarif d'un fournisseur. Or nous voulons équilibrer les relations. Le risque est de passer d'un extrême à l'autre, sans maîtriser les effets sur l'inflation. Par ailleurs, la date du 1er mars est approuvée par les acteurs. Retrait, sinon avis défavorable.

M. Marc Fesneau, ministre.  - Vous voulez sanctuariser le tarif fournisseur en le soustrayant à la négociation commerciale. Cela remettrait en cause l'équilibre que nous recherchons. Avis défavorable.

L'amendement n°3 rectifié bis est retiré.

ARTICLE 3

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure de la commission des affaires économiques .  - Cet article a suscité de nombreux débats à l'Assemblée nationale.

Les négociations commerciales en France se terminent au 1er mars, après quoi le préavis de rupture prend le relais, les fournisseurs devant livrer à l'ancien tarif. La version initiale de la proposition de loi prévoyait que le tarif du fournisseur s'appliquerait. Les députés sont revenus sur ce point en séance, en vue de prévenir un arrêt brutal des livraisons. Or les PME craignent le risque de déréférencement, et les distributeurs celui de difficultés d'approvisionnements.

Nous avons tenté de trouver un équilibre. Au cours d'un préavis de rupture, le prix doit tenir compte des conditions du marché, comme l'inflation ou les hausses de tarifs acceptées par d'autres fournisseurs. Certains regrettent de devoir saisir le juge pour faire appliquer la loi. Le temps de la justice n'étant pas celui des affaires, j'ai déposé un nouvel amendement pour accélérer la résolution des litiges.

Cet article concerne en réalité très peu d'acteurs : les rares entreprises n'ayant pas d'accord au 1er mars et n'ayant pas de distributeur respectant la loi.

M. Jean-Baptiste Lemoyne.  - Très bien !

M. le président.  - Amendement n°39, présenté par Mme Loisier, au nom de la commission.

Rédiger ainsi cet article :

Le code de commerce est ainsi modifié :

1° Après l'article L. 441-4 du code de commerce, il est inséré un article L. 441-4-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 441-4-1.  -  En l'absence d'accord au 1er mars entre le fournisseur et le distributeur ou le prestataire de services conformément au IV de l'article L. 441-3, le préavis de rupture mentionné au II de l'article L. 442-1 tient compte des conditions économiques du marché sur lequel opèrent les parties, notamment pour la détermination du prix applicable durant ledit préavis.

« Tout litige entre un fournisseur et un distributeur ou un prestataire de services relatif à la fixation des conditions du préavis doit, préalablement à toute saisine du juge, faire l'objet d'une procédure de médiation par le médiateur des relations commerciales agricoles ou par le médiateur des entreprises. Le médiateur des relations commerciales agricoles ou le médiateur des entreprises fixe la durée de la médiation, qui ne peut excéder un mois à compter du 1er mars.

« En cas d'accord des parties sur les conditions du préavis, le prix convenu s'applique rétroactivement aux commandes passées durant la durée de la médiation, par dérogation au a de l'article L. 442-3.

« En cas d'échec de la médiation, le médiateur des relations commerciales agricoles ou le médiateur des entreprises formule des recommandations qui comportent, le cas échéant, une proposition de règlement de tout ou partie du litige. Cette proposition tient notamment compte :

« 1° Des conditions économiques du marché sur lequel opèrent les parties, comme par exemple l'évolution du prix des différentes matières premières qui entrent dans la composition des produits du fournisseur ;

« 2° Du prix convenu, le cas échéant, entre le fournisseur et le ou les distributeurs avec lesquels une convention écrite a été conclue en application de l'article L. 441-4.

« Toute partie au litige, en cas d'échec de la médiation, peut saisir le président du tribunal compétent, qui statue selon la procédure accélérée au fond en tenant compte de la proposition de règlement du litige formulée par le médiateur des relations commerciales et agricoles ou le médiateur des entreprises.

« L'appel du jugement n'est pas suspensif de l'exécution de la décision contestée. » ;

2° L'article L. 443-8 est ainsi modifié : 

a) Au VII, les mots : « au présent article » sont remplacés par les mots : « aux dispositions des I à VI du présent article » ;

b) Il est ajouté un VIII ainsi rédigé :

« VIII.  -  Pour les produits mentionnés au I du présent article, les dispositions de l'article L. 441-4-1 sont applicables ainsi que, pour la détermination du prix applicable durant la durée du préavis, le II du présent article. »

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure.  - J'insiste : ce dispositif prévoit que le préavis tient compte des conditions du marché, prévoit une médiation en cas de litige et dispose que, si le désaccord persiste, le juge devra prendre une décision rapide. Un éventuel appel ne sera pas suspensif. Encore une fois, cela ne concerne qu'une infime partie des négociations.

M. Marc Fesneau, ministre.  - Nous partageons le même souci d'équilibre : il faut sortir de l'impasse de négociations non conclusives. Je pense en particulier aux ETI et aux PME, qui risquent le déréférencement.

L'Assemblée nationale a cherché cet équilibre ; vous aussi, et le point d'équilibre trouvé en commission nous semblait le bon.

Les modifications que vous proposez s'en éloignent : vous supprimez le caractère expérimental du dispositif, rendez obligatoire le recours au médiateur et contraignez ainsi les choix des parties. Par ailleurs, il faut tenir compte des litiges entre seuls deux opérateurs. L'office du médiateur pourrait courir le risque d'un alignement des prix ne respectant pas le droit à la concurrence. Avis défavorable.

Mme Sophie Primas, présidente de la commission.  - Nous entendons vos remarques, monsieur le ministre. La réflexion peut se poursuivre jusqu'à la CMP. Lorsqu'on fait appel au médiateur, l'objectif est d'avoir accès à des informations non publiques sur les négociations entre industriels et distributeurs. Je remercie le médiateur des relations commerciales et agricoles, avec qui nous avons travaillé. Continuons la réflexion pour trouver un accord !

M. Daniel Gremillet.  - Je soutiens l'amendement de notre rapporteure : il est essentiel de le voter, car certains considèrent que les négociations ne se terminent pas réellement le 1er mars, mais qu'il y a un mois de plus. (M. le ministre marque son approbation.) Nous pourrons améliorer le dispositif par la suite.

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure.  - Nous tenons à la médiation préalable obligatoire, qui sécurise la relation et permet d'éviter des pressions. Le médiateur remettra la balle au centre.

M. Marc Fesneau, ministre.  - Ce sujet a fait l'objet de nombreux débats. Nous avons un désaccord sur l'obligation : l'idée même de médiation suppose que les deux parties aient envie de dialoguer.

Mme Sophie Primas, présidente de la commission.  - Monsieur le ministre, nous ne rendons la médiation obligatoire que si un litige persiste et qu'une des parties porte l'affaire devant le juge. Nous espérons un accord dans un délai d'un mois. L'appel au médiateur est obligatoire avant que l'une des deux parties ne se tourne vers le juge.

L'amendement n°39 est adopté et l'article 3 est ainsi rédigé.

L'amendement n°25 n'a plus d'objet.

Les articles 3 bis A et 3 bis B sont successivement adoptés.

ARTICLE 3 BIS

Mme la présidente.  - Amendement n°14 rectifié, présenté par M. Tissot et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Après l'alinéa 2

Insérer deux alinéas ainsi rédigés :

...) Après le premier alinéa du I, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« À titre expérimental, pour une période de deux ans à compter de la promulgation de la loi n° du  visant à sécuriser l'approvisionnement des Français en produits de grande consommation, les taux de service mensuels sont fixés à 97 % pour les promotions et les produits hors promotions. À l'issue de cette période, le Gouvernement présente au Parlement un rapport dressant un bilan de cette expérimentation afin d'évaluer l'opportunité de sa généralisation. »

M. Serge Mérillou.  - Nous souhaitons diminuer les taux de service mensuel pouvant donner lieu à l'application d'amendes par les distributeurs aux fournisseurs. Au vu de la situation depuis 2020 et des dysfonctionnements dans la chaîne d'approvisionnement, les taux retenus par l'Assemblée nationale nous semblent trop élevés.

La rapporteure estime que les taux doivent relever de la liberté contractuelle des parties. Sur ce sujet, faisons preuve de précaution : nous proposons une expérimentation de deux ans, qui serait suivie d'un bilan. Nous gagnerions ainsi en objectivité.

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure.  - Nous avons considéré qu'il n'était pas utile de fixer un taux de service maximal. Trouver un taux juste s'appliquant à la dizaine de milliers de références de produits est impossible. De plus, ce taux pourrait rapidement être dépassé, ce qui serait contreproductif.

Le Gouvernement peut suspendre l'application des pénalités logistiques en cas de crise. Retrait ou avis défavorable.

M. Marc Fesneau, ministre.  - Même avis, pour les mêmes raisons. Votre amendement aurait un effet contreproductif : cela légaliserait et, de ce fait, automatiserait les taux de service à 97 %.

L'amendement n°14 rectifié n'est pas adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°40, présenté par Mme Loisier, au nom de la commission.

Alinéa 7

Remplacer les mots :

informe le fournisseur de l'application d'une

par les mots :

transmet au fournisseur une facture de

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure.  - Amendement rédactionnel.

M. Marc Fesneau, ministre.  - Nous considérons qu'il ne s'agit pas d'un amendement rédactionnel.

M. Jean-Baptiste Lemoyne.  - Bien essayé !

M. Marc Fesneau, ministre.  - Avis défavorable.

M. Laurent Duplomb.  - Nous voterons quand même !

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure.  - Nous voulons rendre concomitantes la transmission de la facture et la justification de la pénalité. Peut-être faut-il réécrire l'amendement ?

M. Marc Fesneau, ministre.  - Je maintiens l'avis défavorable.

L'amendement n°40 est adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°34, présenté par le Gouvernement.

Alinéa 9

Rédiger ainsi cet alinéa :

« III.  -  Le Gouvernement peut, en cas de crise d'une ampleur exceptionnelle affectant gravement la chaîne d'approvisionnement, suspendre l'application des pénalités logistiques prévues par les contrats conclus en application du présent titre, par décret en Conseil d'État, pour une durée qui ne peut excéder six mois. » ;

M. Marc Fesneau, ministre.  - Nous voulons réintroduire le mécanisme voté par l'Assemblée nationale, qui permet au Gouvernement, en cas de crise exceptionnelle, de suspendre l'application des pénalités logistiques par décret en Conseil d'État, et non par simple arrêté du ministre. Cela se justifie par la portée d'un tel dispositif.

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure.  - Depuis Égalim 2, le montant des pénalités logistiques tend à diminuer. Il nous semble qu'un arrêté suffit, pour une telle suspension en cas de crise exceptionnelle. De plus, vous supprimez la possibilité d'une suspension limitée à certains secteurs, ainsi que la possibilité de la renouveler. Avis défavorable.

M. Laurent Duplomb.  - Monsieur le ministre, je voterai votre amendement. Il est le reflet de la réalité que nous avons vécue lors de la crise sanitaire. Il est inadmissible d'appliquer des pénalités lorsque la logistique fait défaut en cas de crise grave.

Mme Sophie Primas, présidente de la commission.  - L'amendement de la rapporteure répond à vos souhaits, monsieur Duplomb. Il donne plus de pouvoir au Gouvernement pour agir plus vite : il pourra renouveler la suspension et sélectionner les secteurs où elle s'applique. La souplesse est plus grande qu'avec un décret en Conseil d'État.

M. Marc Fesneau, ministre.  - Nous avons besoin de sécurité juridique. Il est à peu près sûr qu'un arrêté serait contesté par les distributeurs devant le Conseil d'État. En adoptant cet amendement, nous rendons la mesure plus opérationnelle immédiatement, en évitant ce type de procédure.

À la suite d'une épreuve à main levée déclarée douteuse, l'amendement n°34, mis aux voix par assis et debout, n'est pas adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°35, présenté par le Gouvernement.

Alinéas 11 à 16

Supprimer ces alinéas.

M. Marc Fesneau, ministre.  - Supprimons les pénalités dans les contrats de vente de produits agricoles entre un agriculteur et le premier acheteur de ses produits. Elles seraient inadaptées à ce cas précis, qui ne soulève pas les mêmes problèmes que les relations générales entre fournisseurs et distributeurs.

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure.  - Sagesse. Toutefois, monsieur le ministre, si un abus est commis à l'encontre d'un producteur, n'y aurait-il pas de vide juridique ?

M. Marc Fesneau, ministre.  - Les pénalités contractuelles s'appliqueraient alors.

L'amendement n°35 est adopté.

L'article 3 bis, modifié, est adopté.

L'article 3 ter A est adopté.

ARTICLE 3 TER

Mme la présidente.  - Amendement n°27, présenté par MM. Labbé, Salmon, Benarroche, Breuiller, Dantec, Dossus, Fernique et Gontard, Mme de Marco, M. Parigi et Mmes Poncet Monge et M. Vogel.

Alinéa 5

Rédiger ainsi cet alinéa : 

« Le Gouvernement transmet chaque année à la commission chargée des affaires économiques de chaque assemblée parlementaire une synthèse des communications prévues aux deuxième et quatrième alinéas du présent article. Il précise l'impact des mesures proposées, secteur par secteur, en considérant en particulier les problématiques des petites et moyennes entreprises et des filières de l'agriculture biologique. Il détaille, le cas échéant, les manquements aux dispositions de l'article L. 441-17 constatés par le ministre chargé de l'économie ainsi que les actions mises en oeuvre pour les faire cesser. Il effectue, le cas échéant, des propositions réglementaires permettant de renforcer l'encadrement des pénalités logistiques, et évalue une potentielle suppression de celles-ci. 

M. Joël Labbé.  - Nous voulons réintroduire l'évaluation d'une interdiction des pénalités logistiques si les abus ne peuvent être empêchés. Nous voulons aussi que le rapport analyse les pénalités en fonction de la taille de l'entreprise. Les PME sont plus touchées par ces pratiques, de même que les entreprises de la filière bio dont les spécificités les exposent aux ruptures d'approvisionnement.

Favorisons aussi la transparence sur les pratiques illégales des distributeurs, en publiant la synthèse du rapport. Selon la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF), quatre grands distributeurs ont des pratiques abusives. Mais leur identité n'a pas été dévoilée au public.

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure.  - Votre amendement pose problème. Les données que vous évoquez relèvent du secret des affaires.

Nous ne sommes pas favorables à la suppression totale des pénalités logistiques.

Enfin, réaliser cet exercice chaque année nous semble excessif. Retrait ou avis défavorable.

M. Marc Fesneau, ministre.  - Monsieur Labbé, vous voulez encadrer les pénalités. Mais vos propositions nous semblent excessives : mettons un terme aux abus, mais maintenons les pénalités, utiles dans les relations contractuelles. Avis défavorable.

L'amendement n°27 n'est pas adopté.

L'article 3 ter est adopté.

ARTICLE 4

Mme la présidente.  - Amendement n°33, présenté par le Gouvernement.

Alinéa 2, deuxième phrase

Après le mot :

attestation

rédiger ainsi la fin de cet alinéa :

. Celle-ci est fournie dans le mois qui suit l'envoi des conditions générales de vente. Dans le cadre de cette option, une seconde attestation est fournie par le tiers indépendant portant sur le respect du II de l'article L. 443-8, qui impose que la négociation ne porte pas sur la part de cette évolution. À défaut d'attestation, les parties qui souhaitent poursuivre leur relation contractuelle modifient leur contrat dans un délai de deux mois à compter de la signature du contrat initial.

M. Marc Fesneau, ministre.  - Le Gouvernement souhaite réintroduire l'intervention d'un tiers indépendant à la fin des négociations commerciales. Celui-ci pourra attester que la loi a bien été respectée. L'intervention ex ante ne suffit pas.

Mme la présidente.  - Sous-amendement n°37 à l'amendement n 33 du Gouvernement, présenté par M. Lemoyne.

Amendement n° 33, alinéa 5

I. - Deuxième phrase

Après le mot :

option,

rédiger ainsi la fin de la deuxième phrase :

le tiers indépendant est aussi chargé d'attester au terme de la négociation que, conformément au II de l'article L. 443-8, celle-ci n'a pas porté sur la part de cette évolution.

II. - Dernière phrase

Après le mot :

attestation

insérer les mots :

dans le mois qui suit la conclusion du contrat

M. Jean-Baptiste Lemoyne.  - Ce sous-amendement précise le rôle de chaque attestation du tiers indépendant, la première sur les conditions générales de vente du fournisseur et la part de MPA, la seconde sur le respect de la non-négociabilité de la MPA.

Mme la présidente.  - Amendement n°41, présenté par Mme Loisier, au nom de la commission.

Alinéa 2

Compléter cet alinéa par deux phrases ainsi rédigées :

Dans le cadre de cette option, une seconde attestation est fournie par le tiers indépendant portant sur le respect du II de l'article L. 443-8, qui impose que la négociation ne porte pas sur la part de cette évolution. À défaut d'attestation, les parties qui souhaitent poursuivre leur relation contractuelle modifient leur contrat dans un délai de deux mois à compter de la signature du contrat initial.

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure.  - Je propose de corriger une erreur matérielle. Monsieur le ministre, votre amendement, même sous-amendé, ne retient pas tous les apports de la commission. Nous demandions que la méthodologie de la certification soit explicitée, même si nous sommes d'accord sur le principe de la seconde attestation. Avis défavorable à l'amendement n°33 et au sous-amendement.

M. Marc Fesneau, ministre.  - Comment calculer et produire l'attestation ? Vous introduisez un doute sur le tiers indépendant... Les parties pourront être tentées d'aller au contentieux en mettant en cause la méthodologie. Le plus simple est d'insister sur la nécessité de l'attestation. L'amendement du Gouvernement, sous-amendé par Jean-Baptiste Lemoyne, me semble être le meilleur dispositif. Je demande le retrait de l'amendement n° 41.

M. Daniel Gremillet.  - Ce sujet n'est pas si simple. Les membres du groupe de suivi Égalim ont constaté que l'attestation n'arrivait pas, ou alors bien tardivement. Introduisons de la clarté dès le début des négociations. En tant que législateurs, nous voulons que les choses fonctionnent. La première attestation est le fondement de la philosophie de la loi Égalim.

M. Marc Fesneau, ministre.  - On ne demande pas aux commissaires aux comptes, qui sont assermentés, de préciser leur méthodologie.

C'est bien le fournisseur qui est chargé de fournir les détails. Ne compliquons pas les choses inutilement.

Le sous-amendement n°37 n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°33.

L'amendement n°41 est adopté.

L'article 4, modifié, est adopté.

APRÈS L'ARTICLE 4

Mme la présidente.  - Amendement n°6 rectifié bis, présenté par M. Gremillet, Mme Belrhiti, MM. Favreau et Sol, Mme Joseph, MM. Brisson, Somon et Cambon, Mme Di Folco, MM. Piednoir et Bascher, Mmes Puissat et Billon, M. Burgoa, Mme M. Mercier, M. Husson, Mme Gruny, MM. Kern et Canévet, Mme Noël, MM. Mouiller, Belin, Bacci, Bonnus, Klinger et Charon, Mme Imbert, MM. Chauvet et Laménie, Mmes Perrot et Deseyne, M. Pointereau, Mmes Richer, Thomas, Lassarade, Berthet et Dumont, MM. Perrin et Rietmann, Mme Bellurot, M. Joyandet, Mme Canayer et M. Longuet.

Après l'article 4

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article L. 441-7 du code de commerce est ainsi modifié :

1° Le deuxième alinéa du I est complété par une phrase ainsi rédigée :

« La négociation du prix ne porte pas sur la part, dans le prix proposé par le fabricant, du prix des matières premières agricoles et des produits transformés mentionnés au I de l'article L. 441-1-1. »  ;

2° Après le I, il est inséré un paragraphe ainsi rédigé :

« ...  - Lorsque le contrat porte sur une période supérieure à douze mois, il fixe une date annuelle à laquelle le prix est renégocié pour tenir compte des fluctuations des prix des matières premières entrant dans la composition du produit.

« La négociation ne porte pas sur la part, dans le prix proposé par le fabricant à l'occasion de cette renégociation, que représente le prix des matières premières agricoles et des produits transformés composés de plus de 50 % de matières premières agricoles qui entrent dans la composition du produit. Les dispositions du quatrième alinéa du I du présent article s'appliquent lors de cette renégociation. »

M. Daniel Gremillet.  - Nous voulons que les produits vendus sous MDD soient également soumis au principe de non-négociabilité de la matière première agricole. L'ensemble de la production agricole doit être sanctuarisé.

Trouvons un équilibre. N'oublions pas que les marques sont les seules, bien souvent, à soutenir l'innovation et la recherche.

Mme la présidente.  - Amendement identique n°15, présenté par M. Duplomb.

M. Laurent Duplomb.  - Défendu.

Mme la présidente.  - Amendement identique n°42, présenté par Mme Loisier, au nom de la commission.

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure.  - C'est un point très important : nous voulons étendre la sanctuarisation des matières premières agricoles, qui a permis l'évolution de 3,5 % de la rémunération des agriculteurs, aux marques des distributeurs. Celles-ci prennent une place croissante dans les rayons, or Égalim ne concerne que les marques nationales. Poursuivons notre travail de préservation de la rémunération des agriculteurs.

M. Jean-Baptiste Lemoyne .  - Les lois sont contournées ; mais si les acteurs sont créatifs, le législateur le sera aussi. Nous ne lâcherons rien, pour protéger la rémunération de tous les maillons de la chaîne.

Je salue l'écoute du Gouvernement, qui s'est montré ouvert sur certaines de nos propositions. Gageons que la suite du travail parlementaire sera l'occasion d'accomplir un grand pas dans la défense de nos producteurs, mais aussi de nos industriels et de nos commerçants, qui sont parfois entre le marteau et l'enclume - je rappelle les moins 16 % d'excédent brut d'exploitation (EBE) ! Ce soir, nous avons trouvé un équilibre.

M. Franck Montaugé .  - Je salue le travail de la rapporteure et la qualité des débats. Ce texte est un pas, fût-il modeste, dans le bon sens et le groupe SER le votera.

La valeur qui revient au producteur n'était pas au centre du texte ; pourtant, cette question, avec celle de la diversité des modèles agricoles et des territoires, devra être au coeur de la future loi d'orientation agricole. Après la loi Le Foll qui avait orienté notre agriculture vers l'agroécologie, il faut répondre aux enjeux de compétitivité et de souveraineté alimentaire. J'espère que nous pousserons tous dans le même sens à cette occasion.

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure de la commission des affaires économiques .  - Je vous remercie pour ce travail de fond, qui n'a pas occulté le débat sur les défauts du SRP+10 et a abouti à un meilleur encadrement des MDD.

Merci également au ministre, qui se montre disposé à améliorer les dispositifs votés.

La proposition de loi est adoptée.

M. Marc Fesneau, ministre.  - Je vous remercie pour la qualité des débats. On voudrait que toutes les assemblées soient comme la vôtre... (Sourires) Je salue également le travail de la commission.

Plusieurs d'entre vous ont parlé d'un petit pas. Certes, mais le rôle du législateur est de s'adapter en permanence aux circonstances, et notamment aux adaptations ingénieuses des acteurs... Faisons donc preuve d'ingéniosité, et de constance : la juste rémunération, voilà le sujet. Ce n'est pas qu'une affaire de symbole. C'est un enjeu et un débat publics, après 40 ans de dévalorisation de la valeur symbolique de l'alimentation.

La question centrale du projet de loi d'orientation agricole sera la souveraineté. Ce n'est pas seulement une question de modèle ou de pratiques agricoles, mais de compétitivité. (M. Franck Montaugé le confirme ; applaudissements sur les travées du RDPI et du groupe UC ; M. Franck Menonville applaudit également.)